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ENTITÉS ET POLITIQUES PUBLIQUES
L’ORGANISATION
TERRITORIALE
DES SOINS
DE PREMIER
RECOURS
Cahier territorial du Castelbriantais
Rapport public thématique
Mai 2024
L’organisation territoriale des soins de premiers recours - mai 2024
Cour des comptes - www.ccomptes.fr - @Courdescomptes
Sommaire
Procédures et méthodes
................................................................................
5
Synthèse
.........................................................................................................
9
Introduction
..................................................................................................
13
Chapitre I Un besoin de soins important mais une offre de soins
insuffisante
....................................................................................................
15
I - Une situation sanitaire dégradée dans le contexte de la région Pays-
de-la-Loire
.....................................................................................................
15
II -
L’offre de soins médicaux s’est dégradée jusqu’en 2021
........................
16
Chapitre II
Un levier d’actions prioritaires
: le développement de
l’exercice coordonné
......................................................................................
19
I - La stratégie régionale de santé a identifié les problèmes et les
leviers d’action
...............................................................................................
19
II -
Des modalités d’aides aux structures très hétérogènes de la part
des communes
................................................................................................
20
A - Une diversité de sites
......................................................................................
20
B - Une grande diversité dans les modes
d’intervention
.......................................
21
C -
Un manque de rigueur dans la mise en œuvre des
aides
.................................
22
D - Une réflexion globale en matière de santé est amorcée au niveau
communautaire
.....................................................................................................
24
III -
Les interventions de la région, de l’ARS et de la
Cpam
.........................
24
A - Les aides de la région
.....................................................................................
24
B -
Les aides de l’ARS
.........................................................................................
25
C - Les aides de la Cpam
......................................................................................
26
IV - Une coordination entre acteurs renforcée depuis la création
d’une
CPTS
..............................................................................................................
27
A - La communauté professionnelle territoriale de santé
......................................
27
B - La coopération entre la médecine de ville et la médecine hospitalière
s’est renforcée
.......................................................................................................
28
C -
Une logique partenariale prônée par l’ARS et la Cpam
.........................................
29
Chapitre III Des progrès récents, à confirmer
.........................................
31
I - Divers facteurs font obstacle à une appréciation synthétique des
résultats
..........................................................................................................
31
II - Un bilan qualitatif positif, au travers des entretiens avec les
professionnels de santé
..................................................................................
33
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4
III -
Des inflexions positives dans l’offre de soins non programmés et
dans l’accès au médecin traitant
.....................................................................
35
A - Les urgences hospitalières sur le territoire sont saturées mais la part de
passages en CCMU1 diminue
...............................................................................
35
B -
Une amélioration de l’accès à un médecin traitant en 2022
............................
36
IV - Des initiatives récentes exemplaires
.......................................................
37
A - La CPTS a mis en place un relais du SAS
......................................................
37
B - Deux dispositifs mis en place par le Centre hospitalier Châteaubriant
Nozay Pouancé
.....................................................................................................
38
Conclusion générale
.....................................................................................
41
Liste des abréviations
..................................................................................
43
Annexes
.........................................................................................................
45
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Procédures et méthodes
En application de l’article L. 143
-6 du code des juridictions
financières, la Cour des comptes publie chaque année un rapport public
annuel et des rapports publics thématiques.
C
es travaux et leurs suites sont réalisés par l’une des six chambres
que comprend la Cour ou par une formation associant plusieurs chambres
et/ou plusieurs chambres régionales ou territoriales des comptes.
Trois principes fondamentaux gouvernent l’organisation et l’activité
de la Cour ainsi que des chambres régionales et territoriales des comptes,
donc aussi bien l’exécution de leurs contrôles et enquêtes que l’élaboration
des rapports publics : l’indépendance, la contradiction et la collégialité.
L’
indépendance
institutionnelle des juridictions financières et
l’indépendance statutair
e de leurs membres garantissent que les contrôles
effectués et les conclusions tirées le sont en toute liberté d’appréciation.
La
contradiction
implique que toutes les constatations et
appréciations faites lors d’un contrôle ou d’une enquête, de même que t
outes
les
observations
et
recommandations
formulées
ensuite,
sont
systématiquement soumises aux responsables des administrations ou
organismes concernés ; elles ne peuvent être rendues définitives qu’après
prise en compte des réponses reçues et, s’il y a l
ieu, après audition des
responsables concernés.
Sauf pour les rapports réalisés à la demande du Parlement ou du
Gouvernement, l
a publication d’un rapport est nécessairement précédée par
la communication du projet de texte, que la Cour se propose de publier, aux
ministres et aux responsables des organismes concernés, ainsi qu’aux autres
personnes morales ou physiques directement intéressées. Dans le rapport
publié, leurs réponses sont présentées en annexe du texte de la Cour.
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6
La
collégialité
intervient pour conclure les principales étapes des
procédures de contrôle et de publication. Tout contrôle ou enquête est confié
à un ou plusieurs rapporteurs. Le rapport d’instruction, comme les projets
ultérieurs d’observations et de recommandations, provisoires et d
éfinitives,
sont examinés et délibérés de façon collégiale, par une formation
comprenant au moins trois magistrats. L’un des magistrats assure le rôle de
contre-rapporteur et veille à la qualité des contrôles.
L’enquête a été pilotée par la formation inte
rjuridictions (FIJ)
relative à « l’organisation territoriale des soins de premier recours
». Elle a
associé la sixième chambre de la Cour des comptes et onze chambres
régionales et territoriales des comptes : Bourgogne-Franche-Comté,
Bretagne, Corse, Centre-Val de Loire, Grand Est, Île-de-France, Nouvelle-
Aquitaine, Nouvelle-Calédonie, Occitanie, Pays de la Loire et Provence-
Alpes-
Côte d’Azur. Des monographies territoriales, complémentaires des
analyses nationales, ont été établies sur le périmètre de la Communauté
professionnelle territoriale de santé (CPTS) de Châteaubriant, en Loire-
Atlantique, sur le département de l’Aveyron et sur le territoire de Nouvelle
-
Calédonie. Dans chacun de ces cas, les observations provisoires ont été
soumises à la contradiction des responsables des politiques analysées.
Le présent cahier territorial a été délibéré en même temps que le cahier
national, le 19 janvier 2024, par la formation interjuridictions présidée par Mme
Hamayon, présidente de la sixième chambre, et composée de M. Colcombet,
conseiller maître, Mme Daussin-Charpantier, Mme Bonnafoux, présidentes de
chambre régionale des comptes, MM. La Marle, Pagès et Landais, présidents
de section de chambre régionale des comptes, Mme Jagot, première conseillère
de chambre régionale des comptes, ainsi que de M. Rabaté, conseiller maître,
rapporteur général, Mme Mazuir, première conseillère de chambre régionale
des comptes, rapporteure générale adjointe, et en tant que contre-rapporteur,
M. Colcombet, conseiller maître.
Il a été examiné le 27 février 2024 par le comité du rapport public et
des programmes de la Cour des comptes, composé de M. Moscovici,
Premier président, M. Rolland, rapporteur général du comité du rapport
public et des programmes, Mme Démier, M. Bertucci, M. Meddah et Mme
Mercereau, présidentes et présidents de chambre, M. Soubeyran, M. Glimet
et M. Machard, présidents de section représentant les présidentes et
président des première, quatrième et sixième chambres, conseillers maîtres,
M. Lejeune, M. Serre, Mme Daussin-Charpantier, Mme Renet et Mme
Bonnafoux, présidentes et présidents de chambre régionale des comptes et
M. Gautier, Procureur général, entendu en ses avis.
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PROCÉDURES ET MÉTHODES
7
Les rapports publics de la Cour des comptes sont accessibles en ligne
sur le site internet de la Cour et des chambres régionales et territoriales des
comptes : www.ccomptes.fr.
Ils sont diffusés par La Documentation Française.
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Synthèse
La chambre régionale des comptes Pays-de-la-Loire a participé à
une enquête pilotée par une formation commune à la Cour des comptes et
aux chambres régionales des comptes, relative à l’organisation territoriale
des soins de premier recours. Les territoires des communautés de
communes de Châteaubriant-Derval et de la Région de Nozay, au nord du
département de Loire-
Atlantique, qui constituent l’essentiel du territoire de
la communauté professionnelle territoriale de santé Atlantique-Nord Loire,
la première créée dans le département, ont été retenus pour illustrer
l’approche globale de l’enquête qui vise
:
-
à mettre en rapport les évolutions respectives sur ce territoire de la
demande et de l’offre de soins de premier recours, pour expliquer les
tensions ressenties par les patients dans l’accè
s à ces soins ;
-
à identifier les principales interventions publiques réalisées ou
engagées, dans ces territoires, en faveur de l’accès aux soins de
premier recours, en l’occurrence celles qui visent à soutenir le
développement de l’exercice coordonné ;
-
à
apprécier l’effet des aides publiques accordées et à repérer les pistes
d’évolution les plus prometteuses, pour une action publique mieux
ciblée et plus efficace.
L’écart entre les besoins de soins de la population
et l’offre de soins de premier recours
Ce territoire présente des caractéristiques médico-sociales très
dégradées : avec une population en croissance et qui cumule de
nombreuses difficultés sociales et sanitaires, le besoin de soins de premier
recours est important. Or, si l’effectif de certain
es professions de santé
(infirmiers, masseurs-
kinésithérapeutes) augmente, ce n’est pas le cas des
professions médicales, surtout des médecins généralistes : leur nombre
diminue. En conséquence, l’accessibilité à un médecin généraliste, en
particulier à un médecin traitant, se dégrade.
La situation est hétérogène et changeante au sein du territoire
retenu. E
n 2017, la partie la plus au nord a été classée par l’agence
régionale de santé dans les zones sous-
dotées devant bénéficier d’une
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10
intervention prioritaire, tandis que la partie sud est considérée comme
proposant une offre de soins satisfaisante. La situation était exactement
inverse en 2012.
Des interventions visant essentiellement l’installation
de médecins généralistes
Les collectivités publiques du territoire sont intervenues au cours
des années récentes en faveur de la création de structures de soins de
premier recours, surtout pour l’accueil de médecins généralistes. Sept
structures d’exercice libéral de soins de premier recours ont bénéficié d’un
soutien public, toutes proposant le regroupement de professionnels de
santé, mais deux seulement selon des modalités qui impliquent à la fois la
définition d’un projet de santé et une aide récurrente au fonctionnement de
l’assurance maladie (pour les
maisons de santé pluridisciplinaires - MSP -
et les centres de santé qui adhérent à un accord national).
À l’exception de la maison de santé pluridisciplinaire de Nozay,
ouverte en 2015 et portée par la communauté de communes de la Région
de Nozay elle-même, toutes les autres structures ont été ouvertes très
récemment, en 2021 ou 2022, et ont fait l’objet d’un portage communal.
La quasi-
totalité vise à favoriser en priorité l’installation de médecins
généralistes mais d’autres professions de santé peu
vent être considérées
localement comme prioritaires.
L’intervention publique a pris essentiellement la forme d’une aide à
l’investissement initial. Le montant des loyers consentis par les
propriétaires aux occupants des locaux fait apparaitre des stratégies
différentes quant au retour sur investissement du projet : sa durée peut être
courte, se traduisant par un loyer élevé lorsqu’une logique économique
domine, mais elle peut être aussi très longue lorsqu’un loyer faible est fixé,
dans une logique de politi
que d’aménagement du territoire et d’attractivité.
On relève dans ces interventions un certain manque de rigueur :
ainsi, les conditions légales encadrant l’attribution, par une communauté
de communes ou une commune, d’aides à l’installation ou au maintien
de
professionnels de santé, ne sont pas respectées. En outre, les charges
d’amortissement sont rarement comptabilisées (contrairement à la
règlementation
1
, dans le cas de communes de plus de 3 500 habitants) et
les charges de fonctionnement induites sont peu suivies.
Dans ce territoire, ni les EPCI ni le département de la Loire-Atlantique
n’ont subventionné les porteurs de projet. Pour autant, les aides financières
1
C
onformément à l’article R.
2321-1 du code général des collectivités territoriales.
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SYNTHÈSE
11
dont les acteurs à l’initiative des structures peuvent bénéficier, sont
nombreuses, puisque
la région, l’
agence régionale de santé (ARS) et la caisse
primaire d’assurance maladie
(Cpam)
subventionnent l’installation des
professionnels de santé dans les territoires les plus en difficultés.
Des interventions dont l’effet positif est à confirmer
Le rôle de chacune des parties prenantes de la politique des soins de
premier recours manifeste une différence d’approche assez marquée
: tandis
que les élus, relais sur ce point des attentes des patients-citoyens, se
préoccupent en premier lieu de la présence même de professionnels de santé,
surtout de médecins généralistes, sur leur territoire, les services de l’État
insistent sur les conditions de réussite des projets. Parmi ces conditions,
l’acquisition d’une culture de l’exercice pluriprofessionnel app
araît comme
la plus déterminante. Les communautés de communes ont commencé à fixer,
dans des documents stratégiques, des objectifs d’une politique plus globale.
L’organisation des soins non programmés sur le territoire,
notamment par le centre hospitalier de Châteaubriant-Nozay-Pouancé,
d’une part, par la communauté professionnelle territoriale de santé
Atlantique-
Nord Loire, d’autre part, a permis d’instaurer une gradation de
la prise en charge qui, si elle ne parvient pas à réduire la pression sur le
service des urgences du centre hospitalier, a contribué à faire diminuer le
nombre des passages aux urgences les moins pertinents.
En outre, l’effet de ces mesures de soutien à l’implantation de
structures de soins sur le territoire a été d’am
éliorer, à compter du premier
semestre 2022, l’accès à un médecin traitant. Même si elle doit être
confirmée, l’efficacité des différentes interventions réalisées sur le
territoire est donc avérée.
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Introduction
Dans le cadre de l’enquête des juridictions financières relative à
l’organisation des soins de premier recours, la chambre régionale des
comptes Pays-de-la-
Loire a cherché à mesurer l’effet de ces interventions
au
niveau local, sur un territoire déterminé : celui de la communauté
professionnelle territoriale de santé (CPTS) Atlantique-Nord Loire (ANL),
constitué par le territoire des communautés de communes de Châteaubriant-
Derval
2
et de Nozay
3
, qui regroupe plus de 60 000 habitants
4
.
Le territoire ainsi délimité est caractérisé par une situation sanitaire
très préoccupante au regard des indicateurs régionaux, notamment parce
qu’il souffre d’un déficit de médecins généralistes (
Chapitre I). Sur ce
territoire, la chambre a examiné tous les lieux et structures qui répondaient
aux trois conditions cumulatives suivantes : offrir des soins de premier
recours ; ne pas se limiter à un seul professionnel de santé (donc hors
cabinets médicaux mono-professionnels
5
) ; avoir f
ait l’objet d’une aide
financière publique, sous quelque forme que ce soit (Chapitre II).
Sur le fondement de nombreux entretiens avec les acteurs locaux qui
sont intervenus au bénéfice de l’ouverture de ces structures, ou qui
interviennent régulièrement en matière de santé sur le territoire, a été
conduite une analyse de l’effet de ces interventions (
Chapitre III).
2
44 500 habitants, la plus vaste du département de Loire-Atlantique et celle avec le plus
grand nombre de communes-membres. La ville de Châteaubriant, qui en est le siège, est
le pôle urbain le plus peuplé (12 000 habitants) du territoire retenu (chiffres Insee 2020).
3
16
000 habitants, l’une des plus petites du département
. Son siège, Nozay, compte
4 216 habitants (chiffres Insee 2020).
4
Ce territoire se trouve à équidistance des grandes villes de la région : Nantes au sud,
Angers au sud-est, Laval au nord-est, Rennes au nord et
Redon à l’ouest
, chacune à
environ 60 km. Le nord du territoire (Rougé, Sion-les-Mines) se trouve donc plus près
de Rennes tandis que le sud (Nozay, Abbaretz) subit plutôt
l’attraction de Nantes
. Il est
traversé sur sa limite ouest par la voie rapide Rennes-Nantes et, au centre, depuis 2014,
par la ligne de Tram-Train Nantes-Châteaubriant.
5
Ce qui a conduit à écarter le cabinet médical de Puceul dont les locaux sont loués à la
commune par un médecin généraliste.
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Chapitre I
Un besoin de soins important
mais une offre de soins insuffisante
Le territoire constitué par les deux communautés de communes de
Châteaubriant-Derval et de la région de Nozay forme un ensemble, marqué
par des indicateurs défavorables de point de vue de la santé publique (I).
Alors même que les besoins en soins sont avérés,
l’offre de de premier
recours a connu une évolution défavorable, de 2017 à 2021 (II).
I -
Une situation sanitaire dégradée
dans le contexte de la région Pays-de-la-Loire
L’état de santé de la population des deux communautés de communes
Châteaubriant-Derval (CCCD) et Région de Nozay (CCN), qui constituent
ensemble l’un des 28 territoires d’animation de l’ARS Pays
-de-la-Loire,
présente de nombreux paramètres défavorables : certains indices comme les
taux de personnes de tous âges, admises en affection de longue durée (ALD),
prises en charge pour maladie cardio-neuro-vasculaire ou hospitalisées en
court séjour pour lésion traumatique, sont les plus forts de la région Pays-de-
la-Loire. La mortalité prématurée évitable, la mortalité par suicide, les
pathologies liées à la consommation d'alcool et les prises en charge pour
troubles mentaux et du comportement sont également élevées par rapport à
la moyenne régionale.
Les
principaux
problèmes
de
santé
sont
les
maladies
cardiovasculaires et les troubles mentaux et du comportement, les
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COUR DES COMPTES
16
problèmes directement liés à la consommation d’alcool (plus fort indice
régional des personnes hospitalisées en court séjour pour pathologie liée à
l'alcool) ayant comme conséquence des accidents (plus fort indice régional
des personnes hospitalisées en court séjour pour lésion traumatique et
indice de mortalité par accident de la circulation parmi les plus forts). Les
problèmes de cancer (hormis le cancer de la prostate), de diabète et de
maladies de l’appareil respiratoire sont en revanche à un niveau inférieur à
la moyenne nationale et parfois à la moyenne régionale (cancer du poumon,
diabète), ce qui pourrait toutefois traduire un sous-diagnostic.
II -
L’offre de soins médicaux s’est dégradée
jusqu’en 2021
L’évolution du nombre de professionnels de santé sur le territoire
entre 2017 et 2021 est contrastée selon les professions de santé : le nombre
diminue pour les médecins généralistes (- 9 %), est relativement stable
pour les dentistes et augmente pour les professions non médicales. Les
infirmiers et kinésithérapeutes augmentent de quatre professionnels, soit
+ 13 % pour les kinésithérapeutes et + 9 % pour les infirmiers, légèrement
moins vite toutefois que la dynamique départementale (respectivement,
+ 17 % et + 14 %).
Au 31 décembre 2019, on comptait dans la CPTS ANL 42 médecins
généralistes, d’une moyenne d’âge de 53
ans et ayant en moyenne une
patientèle en tant que médecin traitant (MT) de 1 217 personnes, pour une
"file active" moyenne de 1 795 personnes
6
.
En ce qui concerne l’âge des médecins généralistes, le territoire de
vie-santé (TVS)
7
de Châteaubriant est comparable aux territoires
mayennais ou sarthois, alors que la situation moyenne de la Loire-
6
Pour le nombre de patients, on distingue la « patientèle médecin traitant » (PMT), qui
est l’ensemble des patients ayant désigné un médecin généraliste comme leur médecin
traitant, et la « patientèle file active » (PFA), qui désigne tous les patients ayant consulté
le MG au moins une fois dans l’année, qu’ils l’aient ou non désigné comme leur
médecin traitant.
7
Le « territoire de vie-
santé » est un agrégat de communes autour d’un pôle
d’équipements et de services,
constitué selon une logique proche du découpage en «
bassins de vie » de l’Insee. Ce découpage vise à délimiter le territoire le plus resserré
possible au sein duquel les habitants ont accès aux équipements et services considérés
comme les plus courants (v
oir notamment la méthodologie dans le n°1144 d’Études et
résultats, de février 2020 « En 2018, les territoires sous-dotés en médecins généralistes
concernent près de 6 % de la population ».
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UN BESOIN DE SOINS IMPORTANT
MAIS UNE OFFRE DE SOINS INSUFFISANTE
17
Atlantique est relativement bonne comparée à celle des autres
départements de la région Pays-de-la-Loire. Selon une prospective réalisée
en novembre 2020 par la Cpam
, le nombre de départs à l’horizon de cinq
ans, estimé à cette date, était de 18 médecins généralistes totalisant 24 340
patients qui, donc, ont dû ou devront trouver un autre médecin traitant.
L’accessibilité potentielle localisée
ou « APL moyen pondéré »,
exprimé en nombre de consultations accessibles par an et par habitant
« standardisé », diminue entre 2017 et 2021 dans ces trois territoires, que
ce soit pour l’accès à tous les médecins généralistes ou à ceux âgés de
moins de 65 ans. Le phénomène de la désertification médicale est donc
marqué sur le territoire : ses habitants
ont vu leur possibilité d’accéder à un
médecin généraliste se dégrader.
La traduction de cette évolution est moins lisible : avant 2018, le
territoire de Nozay était qualifié de zone fragile (ancienne terminologie).
Depuis 2018, les territoires de Derval et Châteaubriant sont classés en
zones d’intervention prioritaires (ZIP)
; le territoire de Nozay ne figure plus
dans le zonage.
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Chapitre II
Un levier d’actions prioritaires
:
le développement de l’exercice coordonné
Des actions correctives ont été engagées
, dans le cadre d’une
stratégie régionale fondée sur le partenariat avec les collectivités
territoriales (I), qui a été déclinée de manière diversifiée par celles-ci,
parfois de manière insuffisamment cadrée (II). Mais les actions conjointes
de la région, de l’agence régionale de santé (ARS)
et de la Cpam ont fait
apparaître des axes plus structurants (III), désormais relayés et concrétises
sur le territoire par les interventions de la Communauté professionnelle
territoriale de santé (CPTS), crée en 2019 (IV).
I -
La stratégie régionale de santé a identifié
les
problèmes et les leviers d’action
Le projet régional de santé (PRS) des Pays-de-la-Loire pour les
années 2018 à 2022 a relevé l’inégalité de l’accès aux soins sur le territoire
ligérien et les difficultés à accéder, notamment, à un médecin généraliste,
à un kinésithérapeute, ou à un chirurgien-dentiste. À cet égard, il constate
«
l’évolution des aspirations des jeunes professionnels
»
:
«
s’installer
dans un territoire qui offre un cadre de vie attractif »
et avoir
« un exercice
collectif, si possible pluriprofessionnel, qui leur garantisse un équilibre
entre leur vie familiale et leur vie professionnelle et qui offre des parcours
professionnels diversifiés »
.
Il insiste donc sur
«
l’organisation des soins de santé primaires
»
à
améliorer et souligne ce qui a déjà été réalisé, notamment le fort
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COUR DES COMPTES
20
développement des structures d’exercice coordonné. Un objectif de
réduction «
du nombre de territoires identifiés comme fragiles
» est
affirmé
8
, même si sa concrétisation (qui suppose l’identification préalable
de ces
territoires prioritaires et l’affectation ciblée des aides mobilisables)
est renvoyée vers les comités
d’
accompagnement territorial des soins de
premier recours (CATS), créés dans chaque département. Parmi les
«
leviers d’action
» identifiés pour atteindre ce résultat, le « partenariat
avec les collectivités locales » est explicitement mentionné.
II -
Des modalités d’aides aux structures très
hétérogènes de la part des communes
A -
Une diversité de sites
Plusieurs sites ont fait l’objet d’un aménagement
afin de permettre
un exercice pluriprofessionnel. Sept lieux, dont le plus ancien a été créé en
2015 mais qui l’ont surtout été depuis 2021, relèvent de deux catégories
différentes
: l’exercice simplement regroupé, lorsque les professionnels de
santé exerc
ent leur art dans les mêmes locaux, sans mise en place d’une
coordination formelle de l’offre de soins au sens du code de la santé
publique
; l’exercice coordonné proprement dit, au sens de ce code.
L’annexe n°
2 détaille les conditions de fonctionnement et le coût pour les
collectivités de l’aménagement, dans l’ordre chronologique de leur
ouverture à la patientèle.
8
Voir le livret « accès aux soins de proximité » (p. 4 à 9) du projet régional de santé.
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UN LEVIER D’ACTIONS
PRIORITAIRES :
LE DÉVELOPPEMENT DE
L’EXERCICE COORDONNÉ
21
Carte n° 1 :
l
ocalisation des structures d’exercice des soins
de premier recours sur le territoire
Source : Géoportail / carte IGN échelle 1 : 400 000
e
(en bleu
: les structures d’exercice regroupé
; en vert : les
structures d’exercice coordonné)
Des projets de construction de maison médicale, plus ou moins
avancés, étaient également en cours d’expertise, notamment dans les
communes de Saffré et d’Is
sé.
B -
Une grande diversité dans les modes
d’intervention
Comme le montre l’analyse des coûts par mètre carré supportés par
les collectivités territoriales (ou de la durée théorique de remboursement
des avances accordées), présentée aussi en annexe n°2, les logiques sont
très diverses. Au regard de la rentabilité du projet, le montant des loyers
consentis aux professionnels de santé permet de révéler quatre stratégies :
-
la stratégie d’équilibre financier des professionnels immobiliers (le
constructeur spécialisé ou la ville de Châteaubriant), lorsque ce sont
eux les bailleurs, qui vise à rembourser l’investissement en 10 à 20
L’organisation territoriale des soins de premiers recours - mai 2024
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COUR DES COMPTES
22
ans ; cela contraint ainsi la commune de Châteaubriant à fixer un
montant de sous-loyer assez élevé ;
-
la stratégie de Derval, à mi-
chemin entre l’équilibre financier et
l’attractivité
;
-
la stratégie d’Abbaretz et de Nozay qui privilégient l’attractivité, ce
qui conduit à une durée de rentabilité plus longue mais sans perdre de
vue le besoin d’équilibre financier
;
-
la stratégie de Sion-les-Mines et de Rougé, lesquelles ont adopté une
politique de bailleur sanitaire social privilégiant l’attractivité.
Cette diversité serait encore accrue si l’on intégrait les aides au
fonctionnement des structures. Les charges de fonctionnement des locaux
loués aux professionnels de santé sont régulièrement un « angle mort » des
aides publiques à leur installation. Par ailleurs, les charges de gestion
administrative, qui constituent pourtant une prestation de service qui
pourrait être, sinon facturée du moins identifiée en comptabilité analytique,
ne sont jamais prises en compte dans les structures examinées.
C -
Un manque de rigueur dans la mise en œuvre
des aides
1 -
L’absence de suivi des
amortissements
Autre point relevé, les charges d’amortissement ne sont pas
identifiées, même lorsque la réglementation en fait obligation aux
collectivités (au-delà de 3 500 habitants). Les juridictions financières
recommandent donc à la communauté de communes de la région de Nozay
et à la commune de Derval d’enregistrer les dotations aux amortissements
des surfaces de maison de santé mises en location, conformément à l’article
R. 2321-1 du code général des collectivités territoriales (CGCT).
2 -
Les conditions de légalité des aides publiques
aux professionnels de santé ne sont pas respectées
L’article L.
1511-8 du CGCT dispose, notamment, que
« les
collectivités territoriales et leurs groupements peuvent attribuer des aides
destinées à favoriser l'installation ou le maintien de professionnels de santé
dans les zones définies en application du 1° de l'article L. 1434-4 du code
de la santé publique. À cette fin, des conventions sont passées entre les
collectivités et groupements qui attribuent l'aide et les professionnels de
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PRIORITAIRES :
LE DÉVELOPPEMENT DE
L’EXERCICE COORDONNÉ
23
santé intéressés. Les conventions signées sont transmises par les
collectivités et groupements concernés aux agences régionales de santé ».
Les articles R. 1511-44 à R. 1511-
46 du CGCT précisent les types d’aides
possibles, le contenu de la convention de subventionnement obligatoire et
la procédure de sa conclusion.
Ces dispositions ne sont pas respectées en pratique : des aides, sous
la forme d’avantages économiques non facturés (prix de location inférieurs
au marché ou coûts de fonctionnement non pris en compte), sont attribuées
hors zonage autorisé, ou dans le zonage mais sans convention.
3 -
La compétence juridique en matière de santé
ne fait pas l’objet d’une analyse
On trouve peu de traces d’une analyse préalable portant sur
l’existence d’une compétence
en matière de santé et sur son étendue. Les
délibérations des communes, quel que soit leur objet, ne comportent aucune
mention permettant d’identifier un fondement ou un cadre juridique
spécifique au thème de la santé, pour les opérations objets de ces
délibérations. Les communautés de communes, en revanche, ont modifié
leurs statuts pour y intégrer la compétence « santé ».
La clause de compétence générale est parfois invoquée. Le plus
souvent, l’intervention publique est justifiée d’une manière beaucoup pl
us
prosaïque :
le besoin pressant d’accès de la population communale à un
professionnel de santé, surtout à un médecin généraliste, et la pression ou
l’inquiétude forte des habitants sur ce sujet lors d’échanges avec les élus,
justifient à leurs
yeux la nécessité d’investir ce champ de l’action publique.
Enfin, la question du respect des libertés économiques est
postérieure à celle de l’existence d’une compétence pour intervenir mais
conditionne en principe tout autant la légalité de l’interventio
n publique.
(CE Ass., 31 mai 2006,
Ordre des avocats au barreau de Paris
). Or, que
ce soit au niveau intercommunal ou au niveau communal, cette question
n’est jamais posée avant les décisions. La carence de l’initiative privée
pourrait certes paraître évidente, au regard des difficultés à attirer des
médecins. Toutefois, le sujet mériterait d’être évoqué dans l’exposé des
motifs des délibérations, notamment dans les communes-centres où il
existe des cabinets libéraux n’ayant pas bénéficié d’aides publiques,
lesquelles ne sont pas octroyées seulement en investissement mais parfois
aussi en fonctionnement.
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COUR DES COMPTES
24
D -
Une réflexion globale en matière de santé est
amorcée au niveau communautaire
À la communauté de communes Région de Nozay (CCN), le projet
de territoire 2017-2030 mentionne que
« les élus seront attentifs au respect
du maillage de l’offre médicale du territoire qui sera abordé dans le projet
de santé qui doit être élaboré par les professionnels sous l’égide de
l’ARS
»
. La communau
té de communes a conscience du besoin d’inscrire
son intervention dans un cadre plus approfondi, réfléchi prioritairement par
les professionnels de santé eux-mêmes. Intégrée dans une partie relative à
l’offre de service public, l’offre médicale tend presqu
e à revêtir cette
qualification. Toutefois, les voies et moyens de la coopération ne sont que
peu analysés.
La communautés de communes Châteaubriant-Derval (CCCD) a
décidé en 2021 d’élaborer un contrat local de santé (CLS) conclu avec
l’ARS. Après
l’accord de principe de l’ARS, la CCCD a modifié ses statuts
puis a recruté
un coordinateur, cofinancé par l’ARS. Cependant,
initialement prévue mi-
2022, puis fin 2022, la signature du CLS n’a
pas eu
lieu avant la fin de 2023. L’établissement
public intercommunal dispose en
outre d’un conseil de développement qui avait déjà engagé depuis 2012 des
réflexions et des actions sur la démographie médicale puis sur la politique
de santé, et qui a élaboré en janvier 2019 un rapport sur la santé, faisant
une large place aux besoins de prévention, de coordination et de
participation de tous.
III -
Les interventions de la région, de l’ARS
et de la Cpam
Face au risque de dispersion des efforts, les interventions cumulées
de la région (A)
, de l’ARS
(B) et de la Cpam (C) ont permis de dégager des
axes plus structurants.
A -
Les aides de la région
La région Pays-de-la-Loire a progressivement investi le domaine de
la santé à partir de 2007. Elle a construit un régime d’aides aux collectivités
en matière de santé,
en partenariat avec l’
agence régionale de santé (ARS),
qui est intégré à son dispositif général d’aide aux communes et
intercommunalités. À l’origine exclusivement ciblées sur les
maisons santé
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LE DÉVELOPPEMENT DE
L’EXERCICE COORDONNÉ
25
pluridisciplinaires (MSP), les aides régionales se sont diversifiées entre
2016 et 2021, au regard des modèles alternatifs qui se sont développés :
centres de santé, équipes de soins primaires, téléconsultation, délégation de
tâches. Elles peuvent aussi être octroyées exceptionnellement pour
l’ouverture d’un cabinet médical, sous certaines conditions, notamment
d’urgence. Un fonds régional d’urgence a en effet été doté pour octroyer
des aides de 50 000
€ aux petites communes qui s’engagent dans le
lancement d’un projet territorial de santé (contrat local
de santé ou, au
moins, un plan) ou quand un projet déjà avancé a pour objet le maintien
d’un médecin et qu’une équipe de soins primaires peut être constituée. Un
outil de suivi et de contrôle des aides a été mis en place en janvier 2023.
La région Pays-de-la-
Loire a inscrit ces dispositifs d’aide dans une
réflexion plus globale sur la stratégie en matière de santé, en élaborant un
Projet régional d’accès à la santé 2017
-2020 (PRAS), auquel a succédé un
Plan Région Santé 2022-
2028. Elle est consciente de l’importance d’agir
sur les déterminants de santé (environnement, mobilités, etc.), dans un
objectif de prévention.
En revanche, ni les EPCI (hors création d’une structure d’exercice
de soins directement portée par l’EPCI, ce qui est la situation de la
communauté de communes Région de Nozay
CCN - pour la MSP de
Nozay) ni le département de Loire-
Atlantique n’accorde d’aide, à la seule
exception d’une subvention de 2011 du département à la construction de la
MSP de Nozay dans le cadre du contrat de territoire départemental.
B -
Les aides de l’ARS
L’ARS
Pays-de-la-
Loire a créé un portail d’information et
d’assistance en ligne aux professionnels de santé (PAPS), recensant tous
les dispositifs d’aide et les procédures administratives les concernant.
Sur le territoire, le premier type d’aide est le fonds d’i
ntervention
régional (FIR). L’élaboration du projet de santé de la MSP de Moisdon
-la-
Rivière a, par exemple, donné lieu à l’attribution, dans le cadre du FIR,
d’un montant forfaitaire initial de 16
000
€ puis d’un montant de
1 500
€/mois sur 10
mois, et d’
une aide forfaitaire de 4 000
€ lors de la
création de la société interprofessionnelle de soins ambulatoires (SISA).
Cette aide permet de financer les réunions de concertation des
professionnels de santé ou le travail du coordinateur de la structure.
L’acq
uisition, par le centre de santé (CdS) de Sion-les-
Mines, d’un logiciel
interprofessionnel a de son côté donné lieu à une aide du FIR de 18 000
€.
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26
Le CdS de Sion-les-
Mines a fait l’objet d’un deuxième type d’aide
:
une participation du dispositif « 400 MG », pour « 400 postes de médecins
généralistes dans les territoires prioritaires
», créé par l’instruction de la
direction générale de l’offre de soins (DGOS) du 6 février 2019. Ce
dispositif se divise en deux volets : un premier pour le recrutement de
jeunes médecins généralistes exerçant de façon mixte, à mi-temps à
l’hôpital et à mi
-temps en ambulatoire en médecine de ville, et un second
pour des postes de médecins généralistes salariés en ZIP ou en ZAC. Le
CdS répond à ces deux critères. L’aide 400 MG a
ainsi permis de combler
l’écart entre les charges et les produits, à hauteur de presque 36
000
€, entre
septembre 2021 et septembre 2022.
Un troisième type d’aide est le financement des postes de
coordinateur. L’embauche de la coordinatrice de la CPTS
Atlantique Nord
Loire (ANL)
a ainsi fait l’objet d’une aide de l’ARS sous la forme de
dotations aux frais de fonctionnement.
C -
Les aides de la Cpam
La Cpam
gère également différents types d’aide, souvent
conjointement avec l’ARS, comme le contrat d’aide à l’installation de
médecin (CAIM). Sur le territoire, on peut signaler en outre les aides
apportées au CdS de Sion-les-
Mines, par le contrat d’aide à l’installation
d’un centre de santé en zone sous
-
dotée (CAI) puis par le contrat d’a
ide à
l’embauche d’un assistant médical. Le CAI impose deux obligations au
centre de santé
: que les médecins exercent pendant cinq ans et qu’ils
participent à la permanence des soins ambulatoires. En contrepartie, la
Cpam verse une aide forfaitaire uni
que à l’installation, de 30
000
€ pour le
premier médecin généraliste salarié, puis de 25 000
€ pour le deuxième et
le troisième.
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NS PRIORITAIRES :
LE DÉVELOPPEMENT DE
L’EXERCICE COORDONNÉ
27
Les aides de la Cpam
prennent surtout la forme d’un financement
annuel à une structure, en contrepartie d’objectifs. En 2022, l’exercice
coordonné pluriprofessionnel des soins, qui n’était auparavant qu’une
condition optionnelle de ces aides, est devenu obligatoire. La structure
n’est comprise que d’un point de vue fonctionnel
: il s’agit d’un
regroupement coordonné de professionnels de santé et non de locaux. Les
collectivités qui se bornent à investir dans la construction d’un pôle santé
ou d’une maison médicale ne bénéficient d’aucune aide, y compris de la
région qui a repris ce critère d’exercice coordonné.
IV -
Une coordination entre acteurs renforcée
depuis la création
d’une CPTS
On note plusieurs évolutions récentes (parallèlement à la
multiplication
des
projets
de
création
des
structures
d’exercice
coordonné)
: la mise en place d’une communauté professionnelle
territoriale de santé (CPTS) (A)
et le développement d’actions de sout
ien
de la part du centre hospitalier (B), destinées à mieux prendre en compte
les attentes des territoires (mission nouvelle reconnue depuis 2019 aux
hôpitaux de proximité). On note aussi en ce sens une réorganisation de
l’action des services des délégations départementales des ARS, ainsi que
des Cpam (C).
A -
La communauté professionnelle territoriale de santé
La CPTS Atlantique-Nord Loire (ANL) a été créée par 35
professionnels de santé en 2019, après approbation de son projet de santé
articulé selon quatre axes stratégiques : renforcer la coordination et
l'organisation entre la ville et les établissements de santé pour améliorer la
continuité des parcours de soins de la population ; organiser la réponse à la
demande de soins non programmés
; favoriser l’accès à un médecin traitant
pour la population du territoire de la CPTS ; améliorer la coordination et la
communication pluriprofessionnelle intra et extra-CPTS entre les acteurs
de santé ; mettre en place des actions locales de prévention en relation avec
les programmes et les plans nationaux, régionaux et départementaux. Ces
axes font l’objet d’une fiche qui les traduit en actions concrè
tes avec des
objectifs, des exemples, des coordinateurs désignés, un calendrier
prévisionnel et des critères d’évaluation.
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28
La crise sanitaire de 2020 a été un accélérateur de développement
pour la CPTS : elle a été un vecteur de communication, a passé commande
de matériel de protection et créé des consultations pour la covid.
La CPTS a adhéré en novembre 2020 à l’accord conventionnel
interprofessionnel de 2019 relatif au déploiement des CPTS et a signé une
convention tripartite avec l’ARS et la C
pam qui prévoit les moyens de
financement de la CPTS et ses objectifs, avec des indicateurs quantifiés.
Elle a bénéficié d’une aide de 60
000
€ au démarrage, aide renouvelée
chaque année pour son fonctionnement. Trois dialogues de gestion sont
prévus annuellement. Les indicateurs de financement variables sont ceux
liés à l’accès aux soins
: progression de la patientèle avec médecin traitant,
taux décroissant de passage aux urgences, taux croissant d’admission
directe en hospitalisation par un médecin traitant.
Tous les acteurs du territoire ont eu contact, à un moment ou à un
autre, avec la CPTS Atlantique Nord Loire (ANL). Elle est devenue un
acteur incontournable de la coordination des projets et intervenants sur le
territoire et certaines de ses ac
tions (mise à disposition d’une messagerie
instantanée protégée, création d’un service d’accès aux soins, relations
entre la médecine de ville à Châteaubriant et le centre hospitalier) ont
amélioré très concrètement l’activité des professionnels de santé.
B -
La coopération entre la médecine de ville
et la médecine hospitalière s’est renforcée
Le CH Châteaubriant Nozay Pouancé (CNP) a développé des
relations avec la médecine de ville par divers moyens. Il a développé, à
partir de 2015, un partenariat avec un groupe appelé « Acteurs santé » issu
de la conférence régionale de la santé et de l’autonomie (CRSA) des Pays
-
de-la-Loire et réunissant, sur le territoire, divers acteurs locaux, de toutes
professions, concernés par la santé, aussi bien dans les domaines médicaux
que médico-sociaux. Des réunions et colloques en commun ont été
organisés, notamment dans le but de préparer un contrat local de santé.
Le centre hospitalier a ensuite intégré cette problématique
d’accès
aux soins dans son projet d’établissement 2018
-2022, au sein de ses axes
stratégiques n° 1
«
Réduire sur notre territoire les inégalités d’accès aux
soins et de prise en charge »
et n° 3
« Mettre en avant le rôle des équipes
du CH-CNP dans la coordination sur le territoire »
.
Puis, dès la création de la Communauté professionnelle territoriale
de santé (CPTS)
à l’été 2019, des réunions entre ses membres et le
centre
hospitalier ont été tenues. La CPTS a permis de structurer les relations entre
l’hôpital
et les professionnels libéraux, selon son directeur. La présidente
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PRIORITAIRES :
LE DÉVELOP
PEMENT DE L’EXERCICE
COORDONNÉ
29
de la commission médicale d'établissement du centre hospitalier en fait
partie et un rythme d’une réunion mensuelle avec le président et la
coordinatrice de la CPTS s’est installé, en plus des réunions thématiques
entre praticiens du centre hospitalier et professionnels de santé du territoire.
Fin 2019, ces réunions ont permis de faire connaître la difficulté pour les
patients des médecins généralistes de Châteaubriant d’accéder à une
consultation en cardiologie, puis de mettre en place un contact direct des
médecins avec le centre hospitalier pour les semi-urgences grâce à des
créneaux réservés. Une réflexion similaire est en cours pour la gériatrie.
Ces relations permettent donc de transformer des soins non programmés en
soins programmés, à l’entrée du parcours de soins.
Les relations mensuelles avec la CPTS se sont maintenues pendant
la crise de la covid 19 et ont permis une bonne communication entre le
centre hospitalier et les libéraux, notamment quant aux mesures de
prévention à prendre.
C -
Une logique
partenariale prônée par l’ARS
et la Cpam
Les élus interrogés ont exprimé des sentiments contrastés sur les
échanges noués avec l’ARS et la C
pam et sur leur efficacité. Certains
expriment des critiques,
quand d’autres soulignent la qualité de l’écoute et
de l’accompagnement qui leur a été prodigué. La grande majorité observe
très favorablement la mise en place de relais chargés spécifiquement
d’assurer l’articulation entre les collectivités locales et les
services de
l’État
: une animatrice territoriale de santé, à l’ARS, et, plus récemment,
un animateur territorial, à la Cpam.
Les professionnels de santé ont également été interrogés : ceux qui
ont bénéficié d’un soutien en vue de créer une structure d
e soins de premier
recours expriment une grande satisfaction à propos de cette assistance et
de la proximité à leur égard de ces interlocuteurs de terrain.
Ces « ressentis » confirment, du côté des destinataires et
interlocuteurs des services de l’État, la
transformation en cours d’une
logique prescriptive à une logique partenariale. Cette logique prend donc
la forme d’une démarche incitative, utilisant largement l’instrument
conventionnel, où le financement est conditionné par l’atteinte de résultats.
Le d
éploiement d’agents sur le terrain pour faciliter les interactions est
l’autre instrument privilégié. La C
pam a ainsi déployé en Loire-Atlantique
cinq équipes territoriales sur cinq territoires, placées sous la responsabilité
d’un animateur territorial
et comprenant, chacune, un chargé de prévention,
un délégué de l’assurance
-maladie, un conseiller de
l’assurance
-maladie et
un délégué numérique de la santé.
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Chapitre III
Des progrès récents à confirmer
Il est difficile
d’objectiver l’impact des actions menées, po
ur mieux
organiser les soins de premier recours dans le territoire de la CTPS (I).
Mais les « retours » des professionnels de santé sont positifs (II). On note
une inflexion dans les indicateurs synthétiques disponibles (III) et plusieurs
initiatives structurantes, pour le développement ultérieur des coopérations
entre professionnels de santé ont été engagées (IV).
I -
Divers facteurs font obstacle à une
appréciation synthétique des résultats
Lorsqu’on tente d’apprécier de manière synthétique les diverses
interventions en matière de soins de premier recours, un premier facteur de
difficulté réside dans la diversité des périmètres géographiques. Aux
périmètres administratifs classiques, correspondant aux territoires des
collectivités publiques, s’ajoutent plusieurs types de zones géographiques
propres au champ de la santé
: le territoire d’animation de l’
agence
régionale de santé (ARS) qui sert pour le zonage des indicateurs de
l’observatoire régional de la santé, ne correspond pas au territoire de vie
-
santé, défini quant à lui par la Drees (ministère chargé de la santé), les deux
étant différents du territoire couvert par une communauté professionnelle
territoriale de santé (CPTS). La simple comparaison des indicateurs
existants est rendue moins fiable en raison de ces divergences.
Deuxième élément de confusion, la terminologie des lieux
d’exercice médical est parfois trompeuse. Même si le code de la santé
publique donne une définition des « maisons de santé » (à son article
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COUR DES COMPTES
32
L6323-3), précisant en particulier (au 2
ème
alinéa de l’article) qu’un «
projet
médical » doit être établi, les appellations utilisées en pratique sont moins
rigoureuses.
L
es dénominations peuvent varier, y compris pour la même
structure : « maison médicale », « maison de santé », « pôle santé »,
« centre de santé », « maison pluriprofessionnelle ou pluridisciplinaire »,
etc. Certaines structures dénommées « maisons de santé » peuvent ne pas
avoir établi de projet médical. E
lles ne sont pas dès lors éligibles à l’accord
conventionnel
interprofessionnel
relatif
aux
maisons
de
santé
pluridisciplinaires (MSP) et aux aides prévues dans ce cadre.
Les élus
témoignent du fait que seuls
ceux s’étant investis sur le sujet ont acquis la
connaissance de la différence entre la maison de santé agréée par l’ARS et
celle ne constituant qu’un exercice regroupé. En outre, le fait que la maison
de santé pluriprofessionnelle prévue par le code de la santé publique (CSP)
ne soit pas un bâtiment, un local, mais d’abord une «
construction »
professionnelle, fonctionnelle, qui peut ne pas être localisée dans un
bâtiment (maison de santé « hors les murs
», telle qu’elle existe pour le
moment à Moisdon-la-
Rivière), n’est pas toujours perçu, alors que les
professionnels de santé insistent pour rappeler que l’identité d’une
structure comme une MSP réside, non dans un bâtiment, mais dans la
qualité de leurs relations pluriprofessionnelles.
Une appréci
ation de l’effet précis du développement de l’exercice
coordonné est rendue difficile enfin par l’absence d’indicateurs sur le sujet,
corrélés à l’activité des structures. Le temps passé dans les réunions
d’exercice coordonné n’est pas pertinent.
Or, les
structures aidées sont très diverses et d’un niveau
d’intégration hétérogène
. Il est difficile dès lors de distinguer
l’effet
spécifique ou différentiel de chacune de ces formules ou de ces réalisations.
Sur le
territoire retenu, il n’existe aucune équipe de soins primaires
:
l’exercice coordonné tel que prévu par le CSP, c’est
-à-dire sur le
fondement d’un projet de santé approuvé par l’ARS, n’existe que dans une
maison de santé pluriprofessionnelle et un centre de santé. Un projet
important de création de MSP a échoué en raison des divergences
d’appréciation de la part des médecins généralistes sur la répartition de la
charge financière entre eux-mêmes, les autres professionnels de santé et la
personne publique. Cette difficulté a été repérée par tous les acteurs
(associations, constructeurs) travaillant auprès des professionnels de santé.
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DES PROGRÈS RÉCENTS, À CONFIRMER
33
II -
Un bilan qualitatif positif au travers
des entretiens avec les professionnels de santé
Les entretiens directs réalisés avec les professionnels de santé
permettent d’apprécier plus concrètement les améliorations intervenues. Le
partage d’une messagerie professionnelle instantanée y compris entre
professions médicales et non-médicales, sont systématiquement soulignés
comme permettant une circulation très fluide des informations et un
ajustement au mieux à la situation médicale et sociale des patients. La
recherche d’indicateurs de qualité, par les autorités attribuant des aides,
apparaît ainsi comme une priorité.
Méthodologie retenue dans le cadre de l’enquête
L’analyse des conséquences de l’exercice coordonné des soins et de
sa prise en compte, ou non, par les acteurs du soin a été effectuée au moyen
de plusieurs entretiens, collectifs ou individuels, avec ces acteurs. Ont été
interrogés non seulement les professionnels de santé, de différentes
professions, mais encore le personnel administratif qui les aide, les membres
d’une association spécialisée dans l’aide à la création de projets de santé et
de structures de soins et les dirigeants de deux entreprises spécialisées dans
la construction de maisons de santé. De multiples exemples concrets ont été
recueillis pour contextualiser ces entretiens.
Il en ressort que l’exercice coordonné est un levier u
tile pour la
qualité des soins mais exige l’acquisition d’une culture de l’exercice
pluriprofessionnel.
Les entreprises spécialisées de même que les associations ont insisté
sur l’importance d’une assistance, différente selon les intérêts de chacun
mais dont les logiques générales se rejoignent. Elles ont souligné que la
plupart des échecs de projets provenaient de deux problèmes majeurs : du
côté des élus, la croyance que la construction de locaux suffisait par elle-
même pour attirer des professionnels de santé, surtout des médecins
généralistes, ou pour regrouper les professionnels résidant déjà sur le
territoire et éviter leur départ ; du côté des professionnels de santé, la
difficulté à concilier leurs intérêts et à s’engager dans un projet technico
-
administratif complexe. Cela concerne particulièrement la catégorie des
médecins généralistes.
La méthode mise en place a pour but de créer une culture commune
entre les professionnels de santé membres de la future structure et de les
aider à formaliser leur projet, fondé sur un diagnostic partagé. Si cette
méthode est suivie, on constate que l’exercice coordonné des soins de
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COUR DES COMPTES
34
premier recours devient, pour tous les professionnels de santé qui y
participent, une source de gratification personnelle, en raison de
l
’amélioration notable de l’efficacité et de la qualité des soins apportés aux
patients, qu’ils constatent tous.
La différence générationnelle souvent observée chez les médecins
généralistes
en matière de charge de travail n’est pas observée en ce qui
con
cerne l’appréciation de l’exercice coordonné. L’acquisition d’une culture
de la coordination, qui va au-
delà du regroupement, c’est
-à-dire de la
coopération ponctuelle entre médecins exerçant sur le même lieu, divise les
médecins généralistes, mais ce, quel que soit leur âge. La coordination fait
l’objet de certains présupposés critiques, alors que ceux qui s’y investissent
soulignent son intérêt pour l’exercice de leur propre profession.
Le temps de coordination, généralement limité, n’est jamais perçu
comme une perte de temps médical mais, au contraire, comme un gain très
net de qualité des soins rendus. Le retour des autres professionnels de santé
sur les prescriptions réalisées le confirme : les professionnels de santé
constatent un grand respect des compétences de chacun, au profit de la
qualité des soins de la patientèle commune. L’exercice coordonné, en
revanche, n’est jamais une cause de gain de temps médical en lui
-même :
les objectifs de lutte contre la désertification médicale et celui
d’améliorati
on de la qualité des soins ne sont pas sur le même plan.
Ces objectifs, quantitatifs et qualitatifs, sont liés mais de manière
indirecte. La création de lieux d’exercice coordonné est attractive en vue
de nouvelles installations et le financement public des ARS, conditionné
par cette création, la rend attractive pour les collectivités du bloc
communal. La plus grande facilité de la mise en place de délégations de
tâches au sein de structures d’exercice coordonné peut avoir un effet sur le
temps médical. L’
exercice coordonné apparaît en effet comme un facteur
facilitateur de la délégation de tâches, qu’il s’agisse d’infirmière en
pratique avancée (par exemple à la MSP de Moisdon-la-Rivière) ou
d’infirmière «
Asalée » (par exemple au centre de santé de Sion-les-
Mines). Pour les professionnels de santé, l’enjeu est d’abord d’apporter les
soins de premier recours au bon niveau avec le bon professionnel.
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DES PROGRÈS RÉCENTS, À CONFIRMER
35
III -
Des inflexions positives dans l’offre de soins
non programmés et dans l’accès
au médecin traitant
La réponse à la demande de soins non programmés est un enjeu
majeur des soins de premier recours, dans son organisation propre et dans
sa coordination avec les services spécialisés. Les soins non programmés
sont les demandes de soins ressenties par les patients comme urgents et
nécessitant la consultation d’un médecin, mais qui ne sont pas vitales et ne
relèvent pas médicalement de l’urgence.
A -
Les urgences hospitalières sur le territoire sont
saturées mais la part de passages en CCMU1 diminue
Sur le territoire, le CH Châteaubriant Nozay Pouancé (CNP) est le
seul titulaire d’une autorisation pour l’activité d’accueil et de traitement
des urgences. Les urgences du CH CNP sont fréquemment en grande
tension, notamment en raison du manque de personnel, de la fermeture de
services d’urgence à proximité pour des durées plus ou moins longues, ou
pour la nuit (Ancenis, Redon, Vitré), et de l’incidence de la perte
d’autonomie des personnes âgées.
Les passages aux urgences font l’objet d’une catégorisation
, la
classification clinique des malades des urgences (CCMU), comprenant cinq
niveaux de gravité. En l’absence d’autre indicateur pertinent, la CCMU1 qui
s’apparente par certains aspects à une simple consultation médicale, peut être
considérée comme relevant de la permanence de soins ambulatoires (PDSA),
c’est
-à-
dire que le patient n’aurait pas dû être pris en charge aux urgences,
comme l’a confirmé le chef du service des urgences.
Le nombre de passages aux urgences du CH CNP s’est accru
fortement en 2021-2022 par rapport en 2019 (+ 10,2
%), si l’on écarte
l’année 2020 marquée par les confinements dus à la crise de la
covid 19 .
En revanche, alors que le nombre de passages en CCMU1 s’est aussi accru
fortement de 2019 à 2021 (+ 27,8 %), il a diminué de 2021 à 2022 (- 7 %),
d’où une proportion dans le nombre total de passages aux urgences qui
diminue aussi puisque ces passages ont continué, quant à eux, à augmenter.
Une telle évolution, sur un an, doit être nuancée : il faut attendre une
vérifi
cation sur une période un peu plus longue pour qu’elle soit significative,
d’autant plus qu’en valeur absolue, le nombre des passages aux urgences en
CCMU1 en 2022 est encore significativement supérieur à celui de 2019 (+ 549).
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COUR DES COMPTES
36
Graphique n° 1 :
passages aux urgences du CH CNP
Nombre total et en CCMU1
Source : Système (national)
de recueil d’informations des urgences
(Syrius) - note de
lecture : les valeurs exprimées en pourcentage sont égales au rapport entre le nombre de
passages en CCMU1 et le nombre total de passages aux urgences,
dans l’année
.
B -
Une amélioration de l’accès à un médecin traitant
en 2022
Les données récentes des indicateurs de suivi de la démographie
médicale sont encourageantes
: elles montrent un progrès dans l’accès à un
médecin traitant sur le territoire. Ces données, qui portent uniquement sur le
premier semestre 2022 et sur le taux de non-accès à un médecin traitant dans
la population considérée, montrent dans chaque catégorie une amélioration
des indicateurs (qui se confirmerait en 2023 grâce aux installations de
médecins généralistes intervenues à la fin de l’année 2022 et courant 2023).
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DES PROGRÈS RÉCENTS, À CONFIRMER
37
Graphique n° 2 :
évolution, de 2021 (année) à 2022 (1
er
semestre),
du taux de patients sans médecin traitant
(en part de la population totale considérée)
Source :
caisse primaire d’assurance maladie
IV -
Des initiatives récentes exemplaires
Aussi bien la Communauté professionnelle territoriale de santé
(CPTS) que le centre hospitalier de Châteaubriant ont déployé au cours des
mois récents des initiatives aux effets positifs.
A -
La CPTS a mis en place un relais du SAS
Le service d’accès aux soins (SAS) est fondé, au niveau
départemental, sur un partenariat étroit entre la médecine de ville et le Samu :
l’accès est obligatoirement régulé et a pour but d’orienter le patient vers le
type de recours adapté à sa situation, relevant en principe de consultation de
médecine générale à ce stade. La CPTS Atlantique-Nord Loire a mis en place
un relais du SAS en décembre 2022. Elle a joué le rôle de coordinateur,
notamment avec la régulation téléphonique (création d’un numéro local)
, et
fournit un système de messagerie instantanée. Elle a financé un équivalent
temps-plein de régulateur affecté aux soins non programmés.
Les deux structures d’exercice coordonné du territoire ont elles
-
mêmes mis en place un double système de réponse aux soins non
programmés. D’une part, comme y incite l’
accord conventionnel
interprofessionnel (ACI), des créneaux sont réservés chaque jour dans leur
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38
organisation pour répondre aux urgences de leur propre patientèle. Ainsi,
la MSP de Moisdon-la-Rivière organise trois consultations par heure pour
les soins programmés et une par heure pour les soins non programmés de
sa patientèle. La maison regroupe en outre deux cabinets médicaux,
disposant chacun d’une secrétaire médicale qui travaillent ensemble pour
se répartir les urgences entre les cabinets, si nécessaire.
D’autre part, dans le cadre du SAS local mis
en place par la CPTS,
les deux structures prévoient des créneaux de consultation pour les soins
non programmés des patients du territoire, et non plus de leur patientèle.
Le centre de santé de Sion-les-Mines réserve sept ou huit consultations par
semaine, avec un volume qui augmente en période épidémique prononcée.
La MSP de Moisdon-la-Rivière ouvre quant à elle une à deux consultations
par semaine.
B -
Deux dispositifs mis en place par le centre
hospitalier Châteaubriant Nozay Pouancé
Dans le cadre de la permanence de soins ambulatoires (PDSA), en
premier lieu, les infirmiers des urgences peuvent réorienter les patients lors
de la prise en charge initiale, vers le centre d'accueil et de permanence des
soins (CAPS) situé juste à côté, si le médecin de garde et le patient sont
tous deux d’accord. En pratique, le chef du service des urgences a indiqué
que les patients ne refusaient jamais cette orientation, au regard du délai
d’attente aux urgences.
Un groupe de travail « paramédical » entre le centre hospitalier et la
CPTS a été récemment mis en place pour mieux gérer le parcours de soins
en sortie d’hospitalisation. Il s’agit de permettre, d’une part, une meilleure
coordination entre les sorties du centre hospitalier et les disponibilités des
infirmières pour les soins de suite à domicile, en anticipant les sorties,
d’autre part, un retour d’expérience des infirmières et des pharmaciens sur
les prescriptions, visant à améliorer celles-
ci. Des axes d’amélioration ont
été présentés en commis
sion médicale d’établissement
(CME) le
17
novembre 2022 et de nouveaux modèles d’ordonnance ont été
formalisés au centre hospitalier
. Ces réunions font l’objet de comptes
-
rendus formalisés.
Au titre de la continuité des soins, en second lieu, c’est
-à-dire en
journée, le centre hospitalier a mis en place un service «
d’urgences
debout »
: il s’agit d’une filière propre aux urgences reprenant une pratique
venue de Vendée, selon le chef du service des urgences. Ces consultations
non programmées, qui ne relèvent pas des urgences, sont assurées par trois
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DES PROGRÈS RÉCENTS, À CONFIRMER
39
jeunes médecins généralistes, anciens internes du CH Châteaubriant Nozay
Pouancé (CNP) et faisant des remplacements dans le secteur, attirés par la
proximité du plateau technique. Ils ont été recrutés à mi-temps, directement
par le centre hospitalier, comme praticiens hospitaliers contractuels. Ce
service, accueilli dans les locaux du CAPS et qui ne fonctionne, depuis
décembre 2020, que les lundi, mardi et vendredi, satisfait tous les acteurs
(patients, urgences, médecins de garde).
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Conclusion générale
Le territoire des communautés de communes de Châteaubriant-
Derval et de la Région de Nozay, au nord de la Loire-Atlantique, illustre
l’engagement
croissant
des
pouvoirs
publics,
tant
décentralisés
(communes, EPCI, région) que déconcentrés (ARS, Cpam), en matière
d’offre de soins de premier recours.
L’activité
particulièrement
significative
de
la
communauté
professionnelle territoriale de santé Atlantique-
Nord Loire, l’intégration du
centre hospitalier de Châteaubriant dans son territoire, la mobilisation des
professionnels de santé et des élus, le soutien ponctuel apporté par des
entreprises spécialisées, ou pérenne par des associations d’aide à la création
de structures d’exercice coordonné des soins, forment un
environnement
local des soins de premier recours qui s’est développé très récemment mais
semble déjà montrer des effets bénéfiques.
Les résultats obtenus sont cependant encore fragiles, ce qui incite à
rechercher une coordination plus institutionnalisée, facteur de pérennité et
de poursuite des progrès attendus par les patients dans l’accès aux soins.
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Liste des abréviations
ACI
...............
Accord conventionnel interprofessionnel
ADOPS
........
A
ssociation départementale pour l’organisation de la permanence
des soins
ALD
.............
Affection de longue durée
APL
..............
Accessibilité potentielle localisée
ARS
..............
Agence régionale de santé
CC
................
Communauté de communes
CCD
............
Communauté de communes de Châteaubriant-Derval
CCN
.............
Communauté de communes de la région de Nozay
CLS
..............
Contrat local de santé
CPAM
..........
C
aisse primaire d’assurance maladie
CPTS
............
Communauté professionnelle territoriale de santé
CPTS ANL
…CPTS
Atlantique-Nord Loire
EPCI
.............
Établissement public de coopération intercommunale
FIR
...............
Fonds d'intervention régional
GPSRN
........
Groupement des professionnels de santé de la région de Nozay
LAD-SELA .. Loire-Atlantique Développement
Société d’équipement
de Loire-Atlantique
MMP
............
Maison médicale pluriprofessionnelle ou pluridisciplinaire
MSP
..............
Maison de santé pluriprofessionnelle
MT
................
Médecin traitant
ORS
..............
Observatoire régionale de la santé
PDSA
...........
Permanence des soins ambulatoires
PFA
..............
Patientèle file active
PMT
.............
Patientèle médecin traitant
PRS
..............
Projet régional de santé
ROSP
............
Rémunération sur objectifs de santé publique
SISA
.............
Société interprofessionnelle de soins ambulatoires
SNP
..............
Soins non programmés
SRS
..............
Schéma régional de santé
ZIP
................
Z
ones d’intervention prioritaires
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Annexes
Annexe n° 1 :
description des structures d’exercice regroupé aidées
..........
46
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46
Annexe n° 1 :
description des structures
d’exercice regroupé aidées
Cinq structures pluriprofessionnelles de statuts divers ont été
successivement créées, avec l’aide des collectivités territoriales (A), et
deux
structures
d’exercice
coordonné
conformes
aux
règles
de
fonctionnement prévues dans les accords nationaux interprofessionnels,
sur les MSP et les centres de santé (B).
A. Les diverses structures de regroupement pluriprofessionnel
La maison de santé pluridisciplinaire de Nozay
La communauté de communes de la région de Nozay a fait
construire une maison de santé pluridisciplinaire, ouverte en avril 2015. Le
bâtiment abrite, d’un côté, un pôle médico
-social, géré par le département
de Loire Atlantique et toujours propriété du constructeur LAD-SELA et,
de l’autre
, une maison médicale, appartenant à et gérée par la CCN,
accueillant notamment quatre médecins généralistes, trois dentistes, des
infirmières et des kinésithérapeutes. Les études préparatoires, qui ont
commencé au début des années 2000, illustrent le temps nécessaire avant
d’ouvrir une telle structure
.
Ces études ont été conduites en coopération étroite avec les
professionnels de santé implantés sur le territoire, qui ont constitué en 2010
une association, le groupement des professionnels de santé de la région de
Nozay (GPSRN). Son objet social était à l’orig
ine de
« créer une maison
de santé pluridisciplinaire, telle que définie par la loi dite « HPST » de
juillet 2009 »
mais les montants des loyers et la répartition des charges ont
créé des difficultés, qui ont conduit à l’abandon du projet d’exercice
coordo
nné selon les modalités prévues dans ce cadre (création d’une Sisa,
notamment).
Le coût total de la maison s’est élevé à 7
119 491,99
€ pour une
surface de plancher totale de 2 566 m², soit un prix de 2 774,55
€/m². La
CCRN a obtenu cinq subventions (du dé
partement, de la région, de l’
État),
pour un montant total de 1 140 810,07
€. L’investissement net de la CCRN
a donc été de 2 784 645
€. La CCRN perçoit les loyers qui s’élevaient à
84 447
€ en 2019. Les charges liées aux parties communes sont assumées
en partie par la CCRN, pour environ 58
€ en moyenne par professionnel,
soit un total de 14 784
€ en 2019.
Aucun amortissement ne figure à l’état de l’actif. Or, en vertu des
articles L. 2321-2, 27°, L. 2321-3 et R. 2321-1, 2°, du code général des
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ANNEXE
47
collectivités territoriales (CGCT), les dotations aux amortissements des
immobilisations relevant des
«
biens immeubles productifs de revenus […]
non affectés directement ou indirectement à l'usage du public ou à un
service public administratif »
constituent une dépense obligatoire pour les
groupements de communes de plus de 3 500 habitants, la CCRN en ayant
plus de 16 000.
Le produit total permet de compenser, en 46 ans et demi, le coût de
l’investissement initial brut et, en 33 ans, l’investissement net des aides
octroyées, soit une durée relativement longue.
La maison de santé de Derval
La maison de santé de Derval, d’une superficie de 394
m², a été
construite par un promoteur immobilier en 2020-2021. La commune avait
cédé l’assiette foncière au promoteur qui a v
endu ensuite à la commune
deux cellules comprenant trois cabinets, laquelle les loue à deux dentistes
et à un podologue. Les autres cellules ont été vendues ou louées
directement par le promoteur à un laboratoire de biologie médicale et à
deux ostéopathes.
D’autres cellules sont destinées à être occupées par des
spécialistes mis à disposition par un groupe privé de santé.
Le partage entre la vente à la commune ou la location directe est lié
au risque de ne pas trouver preneur. Si ce risque est trop élevé, les
entreprises spécialisées dans la construction de maison de santé estiment
qu’il relève d’une politique publique d’aménagement du territoire devant
être assumé par la collectivité à l’initiative du projet. La maison médicale
a été achetée en novembre 202
0 au moyen d’un contrat de vente en l’état
futur d’achèvement (VEFA). Les conditions de légalité d’une VEFA
conduisent, en l’espèce, à un risque de requalification en marché public de
travaux.
Les dépenses d’investissement consenties par la commune s’élève
nt
à 418 804
€ TTC, financées sans subvention. Les baux professionnels sont
conclus pour six ans et pour un montant annuel de 17 427,96
€. Le coût net
d’investissement pour la commune exige ainsi, pour être compensé
intégralement et en l’absence de vacance
des locaux, la perception des
loyers (hors charges et indexation) durant 24 ans.
Les comptes de la commune n’enregistrent aucune dotation aux
amortissements, ce qui constitue une irrégularité. En effet, en vertu des
articles L. 2321-2, 27°, L. 2321-3 et R. 2321-1, 2°, du code général des
collectivités territoriales (CGCT), les dotations aux amortissements des
immobilisations relevant des
«
biens immeubles productifs de revenus […]
non affectés directement ou indirectement à l'usage du public ou à un
service public administratif »
constituent une dépense obligatoire, pour les
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COUR DES COMPTES
48
seules communes dont la population est égale ou supérieure à 3 500
habitants. Or, d’une part, selon l’INSEE, Derval a dépassé ce seuil en 2019
et, d’autre part, les cellules de la maiso
n médicale dont la commune est
devenue propriétaire sont productives de revenus puisqu’elles sont louées
pour un usage privatif.
Le pôle santé de Rougé
La commune de Rougé a acheté puis viabilisé un terrain de 4 800 m²
afin d’y installer deux structures modulaires, en vue d’y établir une maison
de santé pluriprofessionnelle. Toutefois, si elles sont occupées en partie,
depuis septembre 2022, par des infirmières, aucun médecin n’y est pour le
moment installé.
Le projet a coûté 1 196 596,17
€ TTC. Il a bénéfi
cié de 70 000
d’aides de l’État et de 115
000
€ d’aides de la région. L’occupation des
locaux donne lieu au versement d’un loyer de 5
€/m² par les professionnels
de santé. À raison de 150 m² chacun, les deux modulaires peuvent donc
engendrer
potentiellem
ent
un
revenu
annuel
d’environ
18
000
€,
permettant de compenser le coût de l’investissement initial net, 594
656
TTC, en 33 ans et 10 mois, compte non tenu des charges de ménage, soit
une durée de rentabilité très longue.
La maison de santé pluridisciplinaire de Châteaubriant
La maison de santé de Châteaubriant, ouverte en septembre 2022 à
l’entrée du Pôle de santé Choisel qui regroupe un centre hospitalier (CH
CNP) avec ses urgences, une clinique chirurgicale et un laboratoire de
biologie médicale, accueille quatre médecins généralistes libéraux, un
ophtalmologue, deux podologues, une consultation de sages-femmes du
CH et un centre de dialyse. L’installation d’autres professionnels
(infirmières, dentiste) et d’une pharmacie est envisagée à moyen terme. U
n
bureau est enfin réservé aux internes en médecine qui seront accueillis en
stage par les médecins libéraux.
L’association ECHO avait, pour ses besoins propres, envisagé
l’implantation d’un centre de dialyse. Le maire de la commune avait alors
proposé à l
’association d’inclure ce projet dans un ensemble plus vaste.
L’objectif était que la Ville et le CH se partagent à égalité les locaux de
l’étage, le centre de dialyse étant situé au rez
-de-chaussée.
Le coût total s’élève à 7
241 902,82
€ TTC pour une surf
ace des
locaux loués de 2 202,96
m². Le financement, à la charge d’une société
filiale d’ECHO, propriétaire, repose essentiellement sur un prêt bancaire
d’une durée de 20
ans. Cette société a ensuite loué les différentes parties
du bâtiment à quatre preneurs :
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ANNEXE
49
-
l’association ECHO elle
-même : 1 165,43 m² destinés à un centre de
dialyse géré par l’association, pour un loyer de 189,23
HT/m²/an
(15,77
HT/m²/mois) soit 220 534,32
HT/an ;
-
le CH CNP : neuf bureaux constituant 500,99 m², pour un loyer de
174,79
HT/m²/an (14,57
HT/m²/mois) soit 87 568,04
HT/an ;
-
la Ville de Châteaubriant : sept bureaux constituant 297,74 m², pour
un
loyer
de
173,28
HT/m²/an
(14,44
HT/m²/mois)
soit
51 592,39
HT/an ;
-
un pharmacien : 238,80 m² de locaux affectés à cette activité pour un
loyer
de
164,92
HT/m²/an
(13,74
HT/m²/mois)
soit
46 804,29
HT/an.
Le coût de la maintenance est pour partie à la charge de la ville. Elle
sous-loue les locaux dont elle dispose dans le cadre de baux à usage
professionnel d’une durée de 11 années et pour un loyer de
696,50
€/mois
TTC, à des professionnels de santé, dont cinq médecins
généralistes à ce jour. Au regard de ce qu’elle a engagé (61
910,87
TTC/an, en fonctionnement), la ville de Châteaubriant supporte en réalité
une partie des charges communes.
La récupération intégrale de la charge du loyer est aussi un sujet
pour le CH CNP. Seule la perception de sous-loyers auprès de
professionnels libéraux permet cette récupération. En outre, le montant du
loyer se traduit par des sous-
loyers élevés. L’utilisation des locaux loués
par le CH CNP pour ses propres services (consultations de sages-femmes)
n’assure pas cet objectif mais est rendue nécessaire par les problème
s de
disponibilités de locaux au CH.
Les médecins libéraux de la ville ont, par ailleurs, demandé la
possibilité d’utiliser un bureau pour un stagiaire interne, qui pourrait être
mis à disposition gratuitement, ce qui est encore susceptible d’augmenter
les dépenses de fonctionnement restant à la charge de la ville et du CH.
La maison médicale d’Abbaretz
La commune d’Abbaretz a ouvert en novembre 2022 une maison
médicale d’une surface utile d’environ 200
m² au cœur du bourg et à
proximité de la gare, accueillant un dentiste
et une assistante dentaire
ainsi qu’un masseur
-kinésithérapeute. Depuis septembre 2023, un second
dentiste est installé avec une assistante dentaire. Une extension permettant
d’accueillir deux médecins généralistes,
un infirmier et un second
kinésithérapeute a déjà été décidée par le conseil municipal en février 2023
en raison de demandes d’installation.
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COUR DES COMPTES
50
Le coût comprend l’achat des locaux (120
000
€ TTC) et leur
rénovation (349 616,30
€ TTC). La commune a bénéficié de subventions
de l’Etat
(129 000
HT) et de la région (50 000
HT), soit un
investissement net de 290 616
€ TTC, qui serait compensé en fonction des
loyers perçus pendant 19 ans. Productive de revenus, la maison médicale
est en principe amortissable mais la commune a une population (2 056
habitants)
inférieure
au
seuil
d’amortissement
obligatoire
de
3 500 habitants.
B. Les structures d’exercice coordonné
conformes aux accords nationaux
Le centre de santé de Sion-les-Mines est situé sur le TVS de Derval
et la maison de santé de Moisdon-la-Rivière est située dans le TVS de
Châteaubriant, tous deux classés en zone d’intervention prioritaire.
Le centre de santé de Sion-les-Mines
Le centre de soins infirmiers de Sion-les-Mines, créé en 1973, a
ouvert en septembre 2021 un centre de santé dans ses locaux (de 222 m²),
réaménagés par la commune à la demande de celle-ci. Le centre de santé,
géré par les infirmières du CSI, salarie trois médecins généralistes (une à
temps plein, une à 90 % et une à mi-temps). Le salariat répond à une
demande de la part des médecins généralistes elles-mêmes. Le projet de
santé du centre a aussi été un élément d’attractivité
: il fait largement place
à l’éducation thérapeutique et aux actions de prévention.
Le CSI ne bénéficie d’aucune subvention des collectiv
ités mais
perçoit des aides de la CPAM et de l’ARS, notamment les aides dites
« démographiques » versées pendant deux ans pour la prise en charge
d’une partie des salaires des médecins salariés. Elle a par ailleurs bénéficié
d’une aide du fonds européen LE
ADER de 44 000
€ pour l’acquisition de
mobiliers et de matériel médical, de matériel téléphonique et informatique
et d’une voiture de service.
Le modèle économique du centre de santé reste fragile. Le nombre
de patients n’est pas en cause mais le salariat
des MG est une charge
importante. L’exercice 2021 s’est terminé sur un déficit de 21
000
€, alors
même que le centre bénéficiait des aides de l’ARS (qui ne durent que deux
ans) et d’une aide exceptionnelle de la commune (qui a consenti à la
progressivité du loyer au regard des résultats financiers).
Les travaux ont coûté 218 350,08
€ TTC à la commune, qui a
bénéficié d’une aide de la région de 40
646
€ TTC, soit un investissement
net de 177 704
€ TTC. La commune comptant moins de 3
500 habitants,
l’amortissement n’est pas obligatoire. Sur la base du loyer du CSI de
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ANNEXE
51
950
€/mois, il faudrait 15 ans et 7 mois pour couvrir le coût net des travaux.
Le maire avait indiqué au conseil municipal que
« le calcul [du loyer] repose
sur un coût au mètre carré et que la re
ntabilité n’a pas été étudiée car il
s’agit avant tout de mettre des services à la disposition de la population
»
.
La maison de santé pluriprofessionnelle de Moisdon-la-Rivière
Pour l’instant située « hors les murs
», une maison de santé, au sens
du CSP, regroupe à Moisdon-la-Rivière 13 professionnels de santé dont
quatre médecins généralistes, deux pharmaciens, une infirmière en pratique
avancée (IPA) et trois infirmières libérales, dont une « Asalée »
9
. La
commune s’est engagée à construire des locaux,
qui devraient ouvrir en
septembre 2025 et comprendront des cabines de télémédecine pour des
téléconsultations avec des spécialistes du CH CNP. En attendant, elle met
gratuitement à disposition des salles et du matériel.
L’initiative est venue, en novembre
2019, des MG eux-mêmes. Ils
ont tenu une réunion en mairie avec tous les professionnels de santé du
territoire puis ont constitué ensemble en 2021 une association. Les
professionnels ont élaboré un projet de santé, en relation avec l’ARS (qui
l’a approuvé en 2022) et la CPTS, et avec l’aide de l’association pour le
développement de l’exercice coordonné en MSP dans les Pays
-de-la-Loire
(APMSL). La maison bénéficie d’un assistant médical qui réalise des
préconsultations.
La MSP est toutefois déjà saturée. Le nombre de consultations
programmées par jour est compris entre 25 pour un MG et jusqu’à 40 pour
un autre mais les quatre MG ont ensemble environ 6 400 patients en file
active. Il faut 48 heures pour obtenir un créneau de consultation d’urgence.
Il n’y a pa
s de remplacement durant les vacances mais une coordination est
réalisée entre les MG pour assurer le maximum de permanences : pendant
l’été 2022, il n’y a eu que deux jours sans consultation. Les professionnels
disposent d’une application sécurisée de mes
sagerie instantanée (Globule)
pour fluidifier leur exercice coordonné.
La construction de la MSP devrait coûter 2,9 M € TTC en
investissement, avec une partie d’aides publiques et le reste financé par la
commune.
9
Action de Santé Libérale en Équipe
: Asalée est le nom d’une association comprenant
des médecins généralistes et des infirmières, travaillant ensemble en équipe de soins, dans
le cadre de la coopération entre professionnels de santé prévue par les articles L. 4011-1
et suivants CSP. L’infirmière Asalée bénéficie d’une «
délégation de tâches » de la part
d’un médecin généraliste référent, dans le cadre d’un protocole de coopération type.
L’organisation territoriale des soins de premiers recours - mai 2024
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