ENTITÉS ET POLITIQUES PUBLIQUES
L’ORGANISATION
TERRITORIALE
DES SOINS
DE PREMIER
RECOURS
Cahier territorial
de la Nouvelle-Calédonie
Rapport public thématique
Mai 2024
•
L’organisation territoriale des soins de premiers recours - mai 2024
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Sommaire
Procédures et méthodes
................................................................................
5
Synthèse
.........................................................................................................
9
Introduction
..................................................................................................
13
Chapitre I
Des tensions dans l’accès aux soins de premier
recours, amplifiées par la répartition
de l’offre
........................................
15
I - Le poids élevé des soins chroniques
..........................................................
15
A - Une prévalence élevée des maladies chroniques
............................................
15
B - Un phénomène appelé à croître avec le vieillissement de la population
.........
17
II - Une répartition territori
ale de l’offre de soins qui accentue les
déséquilibres entre les provinces
.....................................................................
18
A - La concentration de la population et de
l’activité de soins sur la
province Sud et le grand Nouméa
.........................................................................
19
B - Une répartition très polarisée des médecins généralistes selon leur
statut, aggravée par les difficultés de recrutement
................................................
20
III -
Des difficultés multiformes dans l’accès aux soins de premier
recours
...........................................................................................................
21
A - Des données déclaratives confirment la persistance de difficultés
d’accès aux soins
..................................................................................................
22
B -
Des soins peu efficaces, selon les médecins, pour l’éducation
thérapeutique
........................................................................................................
23
C - Une réponse insuffisante aux soins non programmés
.....................................
24
D - Un « aller vers » insuffisant vers les populations les plus fragiles
..................
25
Chapitre II Des interventions insuffisamment orientées sur
l’accès aux soins et l’éducation thérapeutique
...........................................
27
I - Au niveau des provinces, un réseau maillé de centres médico-
sociaux
...........................................................................................................
27
A - Un réseau maillé de centres médico-sociaux
..................................................
27
B - Un réseau fragile
.............................................................................................
29
II - Au niveau du territoire
.............................................................................
30
A -
Les outils de planification de l’offre
...............................................................
31
B -
Un plan qui vise à intégrer l’ensemble des interventions publiques
...............
32
C - Un levier plus opérationnel, le recours à des outils de télésanté
.....................
33
Chapitre III
La nécessité d’une démarche ciblée sur les soins de
premier recours et d’une mise sous tension des résultats
.........................
35
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4
I - Un pilotage
ad hoc
à mettre en place, pour une meilleure
organisation des soins de premier recours
.....................................................
35
II - Des leviers opérationnels à déployer
........................................................
37
III - Un partenariat à construire dans le financement et la gouvernance
........
37
Annexes
.........................................................................................................
39
•
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Procédures et méthodes
En application de l’article L. 143
-6 du code des juridictions
financières, la Cour des comptes publie chaque année un rapport public
annuel et des rapports publics thématiques.
C
es travaux et leurs suites sont réalisés par l’une des six chambres
que comprend la Cour ou par une formation associant plusieurs chambres
et/ou plusieurs chambres régionales ou territoriales des comptes.
Trois principes fondamentaux g
ouvernent l’organisation et l’activité
de la Cour ainsi que des chambres régionales et territoriales des comptes,
donc aussi bien l’exécution de leurs contrôles et enquêtes que l’élaboration
des rapports publics : l’indépendance, la contradiction et la col
légialité.
L’
indépendance
institutionnelle des juridictions financières et
l’indépendance statutaire de leurs membres garantissent que les contrôles
effectués et les conclusions tirées le sont en toute liberté d’appréciation.
La
contradiction
implique que toutes les constatations et
appréciations faites lors d’un contrôle ou d’une enquête, de même que toutes
les
observations
et
recommandations
formulées
ensuite,
sont
systématiquement soumises aux responsables des administrations ou
organismes
concernés ; elles ne peuvent être rendues définitives qu’après
prise en compte des réponses reçues et, s’il y a lieu, après audition des
responsables concernés.
Sauf pour les rapports réalisés à la demande du Parlement ou du
Gouvernement, l
a publication d’
un rapport est nécessairement précédée par
la communication du projet de texte, que la Cour se propose de publier, aux
ministres et aux responsables des organismes concernés, ainsi qu’aux autres
personnes morales ou physiques directement intéressées. Dans le rapport
publié, leurs réponses sont présentées en annexe du texte de la Cour.
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6
La
collégialité
intervient pour conclure les principales étapes des
procédures de contrôle et de publication. Tout contrôle ou enquête est confié
à un ou plusieurs rapporteurs. Le rapport d’instruction, comme les projets
ultérieurs d’observations et de recommandations, p
rovisoires et définitives,
sont examinés et délibérés de façon collégiale, par une formation
comprenant au moins trois magistrats. L’un des magistrats assure le rôle de
contre-rapporteur et veille à la qualité des contrôles.
L’enquête a été pilotée par la
formation interjuridictions (FIJ)
relative à « l’organisation territoriale des soins de premier recours ». Elle a
associé la sixième chambre de la Cour des comptes et onze chambres
régionales et territoriales des comptes : Bourgogne-Franche-Comté,
Bretagne, Corse, Centre-Val de Loire, Grand Est, Île-de-France, Nouvelle-
Aquitaine, Nouvelle-Calédonie, Occitanie, Pays de la Loire et Provence-
Alpes-
Côte d’Azur. Des monographies territoriales, complémentaires des
analyses nationales, ont été établies sur le périmètre de la Communauté
professionnelle territoriale de santé (CPTS) de Châteaubriant, en Loire
Atlantique, sur le département de l’Aveyron et sur le territoire de Nouvelle
-
Calédonie. Dans chacun de ces cas, les observations provisoires ont été
soumises à la contradiction des responsables des politiques analysées.
Le présent cahier territorial a été délibéré en même temps que le
cahier national, le 19 janvier 2024, par la formation interjuridictions présidée
par Mme Hamayon, présidente de la sixième chambre, et composée de
M. Colcombet, conseiller maître, Mme Daussin-Charpantier, Mme Bonnafoux,
présidentes de chambre régionale des comptes, MM. La Marle, Pagès et
Landais, présidents de section de chambre régionale des comptes, Mme Jagot,
première conseillère de chambre régionale des comptes, ainsi que de M. Rabaté,
conseiller maître, rapporteur général, Mme Mazuir, première conseillère de
chambre régionale des comptes, rapporteure générale adjointe, et en tant que
contre-rapporteur, M. Colcombet, conseiller maître.
Il a été examiné le 27 février 2024 par le comité du rapport public et
des programmes de la Cour des comptes, composé de M. Moscovici,
Premier président, M. Rolland, rapporteur général du comité du rapport
public et des programmes, Mme Démier, M. Bertucci, M. Meddah et Mme
Mercereau, présidentes et présidents de chambre, M. Soubeyran, M. Glimet
et M. Machard, présidents de section représentant les présidentes et
président des première, quatrième et sixième chambres, conseillers maîtres,
M. Lejeune, M. Serre, Mme Daussin-Charpantier, Mme Renet et Mme
Bonnafoux, présidentes et présidents de chambre régionale des comptes et
M. Gautier, Procureur général, entendu en ses avis.
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PROCÉDURES ET MÉTHODES
7
Les rapports publics de la Cour des comptes sont accessibles en ligne
sur le site internet de la Cour et des chambres régionales et territoriales des
comptes : www.ccomptes.fr.
Ils sont diffusés par La Documentation Française.
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Synthèse
La chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie a
participé à une enquête pilotée par une formation commune à la Cour des
comptes et aux chambres régionales et territoriales des comptes relative à
l’organisation territoriale des soins de premier recours. Le territoire de la
Nouvelle-
Calédonie a ainsi fait l’objet d’une analyse s’inscrivant dans le
cadre général de l’enquête. Malgré les
évidentes spécificités de la demande
et de l’offre de soins de premier recours sur le territoire, on retrouve en
effet des problématiques en partie communes :
-
les évolutions respectives sur ce territoire de la demande et de l’offre
de soins de premier recours se conjuguent pour expliquer les tensions
déjà ressenties par les patients dans l’accès à ces soins et le risque de
tension encore accrues à l’avenir ;
-
en faveur de l’accès aux soins de premier recours, différentes
interventions publiques sont réalisées ou engagées dans le territoire,
mais elles demeurent cloisonnées et limitées ;
-
pour une action publique mieux ciblée et plus efficace, il convient
donc de prolonger les évolutions engagées en diffusant les pistes les
plus prometteuses.
L’écart entre
les besoins de soins de la population
et l’offre de soins de premier recours
L’espérance de vie, inférieure à celle de la métropole, a augmenté
de près de neuf années en trente ans et atteint 77,8 ans en 2019. Selon les
projections de l
’
institut de la statistique et des études économiques (ISEE),
les plus de soixante ans devraient constituer en 2030 plus d’un cinquième
de la population. La prévalence de maladies chroniques est élevée, alors
même que l’effet du vieillissement sur la structure par â
ges de la population
calédonienne devrait encore l’aggraver. En effet, le taux de personnes
déclarant des maladies chroniques est de 22 % en Nouvelle-Calédonie,
alors qu’il n’était en 2021 que de 17,
7 % pour la métropole. Près des deux
tiers des adultes de 18 à 64 ans sont considérés comme étant en surpoids.
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COUR DES COMPTES
10
Or l’offre de soins de premier recours est inégalement répartie, ce
qui accentue les difficultés à répondre aux demandes. Cette offre de soins
est en effet concentrée sur le sud de la Nouvelle-Calédonie, en particulier
autour de Nouméa, et ce encore plus fortement que la population. La
province Sud, qui accueille 75 % de la population, regroupe ainsi 86 % des
professionnels de santé, 86 % des infirmiers, 81 % des médecins
généralistes, 96 % des médecins spécialistes. Le secteur libéral est
développé surtout en province Sud, les soins étant principalement assurés,
en province Nord et province des Îles par des centres médico-sociaux qui
peinent à recruter les professionnels salariés nécessaires à leur gestion.
Peu nombreuses, les données disponibles confirment la persistance de
difficultés d’accès aux soins. Les délais de rendez
-vous sont jugés élevés par
les usagers-
patients, la possibilité même d’obtenir un accès aux soins est
assez souvent réduite : 20 % des adultes limitaient en 2021 leurs visites
auprès de professionnels de santé en raison des difficultés d’accès aux soins.
Les différentes fonctions des soins de premier recours connaissent
de fait des tensions repérées, notamment des reports de soins non
programmés sur les urgences, en raison des horaires d’ouverture trop
limités des centres médico-
sociaux. Les soins programmés, c’est
-à-dire le
suivi dans le temps des patients chroniques, sont eux aussi impactés. Selon
l’appréciation qu’en faisaient
en 2016 les médecins généralistes, leurs
actions d’éducation thérapeutique se révéleraient très inégalement
efficaces : 82 % des médecins généralistes déclaraient qu’ils sont peu
(75%) ou pas du tout (7%) efficaces dans leur pratique de l’éducation
thérapeutique des patients obèses. Pourtant, les équipes pluridisciplinaires,
intégrant des infirmières de santé publique ou des diététiciens, sont rares.
Enfin, la fonction « d’aller
-
vers », c’est
-à-dire la capacité des
professionnels de santé à proposer un suivi aux populations les plus
éloignées du soin, paraît très variable selon les territoires. Plus d’un tiers
des habitants n’avait pas consulté un médecin en 2021, dans les deux
provinces Nord et des Iles, contre moins de 20 % dans la province Sud. Cet
éc
art constitue un indicateur significatif de l’insuffisance des démarches
proactives en direction des patients éloignés du soin, pour des d’examens
périodiques des patients et des actions de prévention.
L’offre de soins de premier recours est ainsi insuffis
ante par rapport
aux demandes, alors même que l’évolution prévisible de la démographie
va, à relativement brève échéance, aggraver cet écart, dans le contexte de
pathologies chroniques qui caractérise la Nouvelle Calédonie.
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SYNTHÈSE
11
Des interventions diversifiées quant à leurs objectifs
mais encore peu abouties
Face à ce risque, le territoire dispose de deux atouts : il bénéficie
d’un réseau dense de centres médico
-sociaux, reconnu des professionnels,
en premier lieu. Cette offre permet en partie de compenser les inégalités de
répartition territoriale des médecins généralistes. En outre, une stratégie
globale d’évolution de l’offre sanitaire a été adoptée, avec le plan
« Do
Kamo » pour la décennie 2018-2028, plan qui intègre les soins de premier
recours et implique les différents financeurs et décideurs publics. Se
dessine ainsi une forme de mobilisation des leviers publics, afin de
transformer l’offre de soins.
Mais cette démarche est encore insuffisamment affirmée et pilotée.
La gradation des centres médico-socia
ux, selon leur rôle dans l’offre de
soins, n’est pas encore clarifiée et certains éléments clés doivent
faire
l’objet d’un examen tels que le rôle des centres médico
-sociaux en matière
d’urgence, leurs horaires d’ouverture afin de garantir une amplitu
de accrue
d’accueil, et enfin le fonctionnement de leurs antennes supervisées par des
médecins sans leur présence permanente.
Les 86 actions du plan stratégique de 2018 sont ambitieuses, mais
peu hiérarchisées. En outre, elles ne sont pas inscrites dans un calendrier
réaliste de mise en œuvre. Le déploiement des actions portées par le
territoire, par l’intermédiaire de la direction de l’action sanitaire souffrait
en 2023, au moment de l’enquête de la chambre territoriale, de retards
importants dans la mise
en œuvre. Le socle que devrait constituer la «
première ligne », ou l’offre de soins de premier recours, n’a pas fait l’objet
d’une identification suffisante et d’une priorisation particulière.
Des interventions coordonnées à mettre sous tension de résultat
Une politique ciblée sur l’organisation des soins de premier recours
est donc nécessaire. Elle devrait reposer, au niveau du territoire, sur la
détermination d’objectifs opérationnels et de cibles précises, fondés sur des
indicateurs robustes et disponibles, quant aux soins non programmés, (par
exemple la réduction des passages aux urgences peu justifiés), aux soins
programmés, (par exemple la part des pathologies chroniques prises en
charge par des équipes référentes)
, ou à « l’aller
-vers », (par exemple, la
réduction de la part des personnes sans soins dans l’année
).
Pour chaque segment des soins de premier recours, des actions
spécifiques, parfois déjà envisagées ou programmées dans le plan
stratégique « Do Kamo », doivent être prévues et leurs responsables
clairement désignés. S’agissant des soins programmés, en complément de
l’orientation inscrite en f
aveur du médecin traitant, et dans la continuité de
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COUR DES COMPTES
12
ce qui était déjà prévu pour les patients souffrant de pathologies chronique,
des équipes référentes doivent être déployées, en lien avec les centres
médico-sociaux. Dans ces équipes doivent figurer des diététiciens et des
infirmières de santé publique, formés pour traiter dans la durée et dans leur
complexité les habitudes alimentaires et la surcharge pondérale. Afin de
mieux prendre en compte les besoins de santé des populations les plus
éloignées des soins, ces équipes doivent, dans les territoires les plus
carencés, être élargies à des médiateurs en santé ou à des assistantes
sociales, capables de soulager les médecins généralistes et les autres
professionnels de santé pour les questions de littéracie et ou de prise en
charge administrative des patients. Une gestion mutualisée de ces
professionnels, incluant le cas échéant des psychologues, peut être
organisée au niveau des provinces.
S’agissant des soins non programmés, une réflexion devrait être
engagée afin de structurer au niveau du territoire un «
service d’accès aux
soins », adossé aux principaux sites des urgences, le centre hospitalier
territorial et le centre hospitalier Nord, et outillé pour gérer une régulation
téléphonique médicalisée vers les urgences hospitalières mais aussi vers
des consultations libérales ou les centres médico-sociaux
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Introduction
La chambre territoriale de la Nouvelle-Calédonie a conduit en 2023
un contrôle de la direction des affaires sanitaires du territoire
1
.
Précédemment avait été mené en 2022 un contrôle sur la gestion par la
province Nord des centres médico-sociaux
2
suivi lui aussi de plusieurs
recommandations. Dans le prolongement de ces enquêtes, la chambre
territoriale de la Nouvelle-Calédonie a participé aux travaux conjoints des
juridictions financières sur «
l’organisation des soins de premier
recours
»
3
. Ont notamment été organisés trois «
ateliers d’acteurs
», pour
interroger les professionnels de santé sur leurs constats sur les perspectives
d’évolution
de l
’
organisation des soins de premier recours.
Malgré les évidentes spécificités calédoniennes, par rapport à la
métropole, tenant aux données démographiques et socio-économiques du
territoire ou encore au contexte juridique et institutionnel qui régit les
interventions publiques dans le domaine sanitaire, des enseignements en
large partie communs peuvent être mis en évidence. Un premier trait
commun tient à l’écart croissant
entre les demandes de soins de premier
recours et l’offre disponible, ce qui se traduit par des difficultés d’accès
accrues à ces soins (I). Un deuxième trait, là encore analogue, tient au
caractère trop peu ciblé et trop limité des interventions, par rapport aux
enjeux, et donc à la nécessité d’une réorientation partielle des aides, vers le
déploiement d’équipes pluriprofessionnelles intégrant une offre adaptée
d’éducation thérapeutique (II).
1
Rapport d’observations définitives sur la Nouvelle
-Calédonie
–
gestion sanitaire et
2
Rapport d’ob
servations définitives relatif à la province Nord- soins de premiers
nord-soins-premiers-recours
3
Ces travaux ont conduit dans un premier temps à une intervention sur les interventions
des collectivités territoriales en faveur de l’accès aux soins 2023 intitulé «
Mieux
coordonner et hiérarchiser les interven
tions des collectivités territoriales dans l’accès
aux soins » (voir le chapitre 7 du rapport public annuel de la Cour des comptes de mars
2023). Dans un deuxième temps, une enquête a porté en 2023 sur les politiques
nationales et sur leur mise en œuvre pa
r les agences régionales de santé et les caisses
primaires d’assurance maladie.
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Chapitre I
Des tensions
dans l’accès aux
soins
de premier recours, amplifiées
par la répartition de l’offre
Le
rappel
des
principales
données
épidémiologiques
et
démographiques (I) met en évidence le risque de tensions croissantes dans
l’accès aux soins (
II), risque démultiplié par les fortes inégalités dans la
répartition territoriale de l’offre de soins (
III).
I -
Le poids élevé des soins chroniques
La prévalence de maladies chroniques est élevée, et l’effet du
vieillissement sur la structure par âge de la population calédonienne devrait
encore
l’aggraver.
A -
Une prévalence élevée des maladies chroniques
Selon le dernier « baromètre de la santé », le taux de personnes avec
des maladies chroniques déclarées est élevé en Nouvelle-Calédonie,
puisqu’il dépasse 22 %, contre environ 18
% dans l’hexagone.
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16
Tableau n° 1 :
prévalence déclarée des maladies chroniques
selon le sexe, la province et l’âge
Effectif total
Pourcentage pondéré
Hommes
1 578
21 %
Femmes
2 127
23,2 %
Sud
1 244
22,5 %
Nord
1 372
20,4 %
Îles Loyauté
1 089
22,5 %
18-24 ans
370
13,9 %
25-44 ans
1 668
13,1 %
45-64 ans
1 667
36,5 %
Source : baromètre de santé annuel 2021, agence sanitaire et sociale
Ces taux étaient en 2021 élevés pour les différentes pathologies
chroniques identifiées. Un diabète a été retrouvé chez 10,8 % des personnes
ayant bénéficié d’un prélèvement sanguin et un prédiabète chez 5,
7 % des
personnes. En ce qui concerne le cholestérol, 20,5 % des personnes avaient
un cholestérol total supérieur ou égal à 2,2 g/l, sans différence selon le genre.
La prévalence to
tale de l’hypertension s’élevait à
29 % de la population
adulte de 18‑64 ans. Plus précisément,
14 % avait une tension élevée, 7 %
une tension très élevée et 8 % était sous traitement
4
.
4
Ces prévalences sont du même ordre de grandeur que celles obtenues en 2015 sur les
données mesurées.
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DES TENSIONS DANS L’
ACCÈS AUX SOINS DE PREMIER RECOURS,
AMPLIFIÉES PAR LA RÉ
PARTITION DE L’OFFRE
17
Graphique n° 1 :
répartition des adultes de 18 à 64 ans
selon leur indice de masse corporelle en 2021
Source : baromètre de santé annuel 2021, agence sanitaire et sociale
Une des causes repérées de ces pathologies tient aux problèmes de
poids, en particulier en raison des comportements alimentaires. Selon les
données consolidées à partir des indices de masse corporelle (IMC), «
un
peu plus de deux tiers des adultes, de 18 à 64 ans, étaient en excès de
poids : 28 % sont en surpoids et 38 % sont obèses
». 47 % des personnes
de 45 à 64 ans sont obèses. C’est presque la moitié de cette tranche d’âge
5
.
B -
Un phénomène appelé à croître avec le vieillissement
de la population
La prévalence de l’obésité
et des diverses pathologies chroniques,
souvent associées, augmente avec l’âge : 36,
5 % des personnes de 45 à
64 ans déclarent des maladies chroniques. Or les données issues du
recensement de 2019 font apparaître un processus de vieillissement
caractérisé, plus récent et moins prononcé que dans l’hexagone, mais aux
effets inéluctables à terme. La population calédonienne est en effet au début
d’un processus
de vieillissement démographique
6
avec un taux de
personnes de plus de 60 ans encore peu élevé (15 % en 2019 contre 12 %
en 2014 et 2009) en comparaison avec la part que représentent les
personnes de plus de 60 ans dans l’hexagone (
26 % en 2019).
5
Le taux d’obésité est plus élevé chez les femmes (
42 %) que chez les hommes (34 %).
6
La fécondité baisse et l’espérance de vie augmente, symptomatique de la transition
démographique que traverse le territoire depuis le milieu des années 1990.
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18
Graphique n° 2 :
répartition de la population calédonienne
par grandes tranches d’âges entre 2009 et 2019
Source
: données de l’ISEE issues des recensements 2009, 2014 et 2019
L’espérance de vie a gagné près de neuf années en trente ans pour
atteindre 77,8 ans en 2019 : 75,3 ans pour les hommes et 80,4 ans pour les
femmes. Nettement supérieure à celles des pays voisins insulaires, elle
demeure moins élevée que la moyenne française (82,8 ans). Pour autant,
selon les projections de l’ISEE, les plus de 60 ans constitueront en 2030
plus d’un cinquième de la population totale et on notera un triplement des
plus de 80 ans en province Sud.
II -
Une répartition territoriale de l’offre
de soins
qui accentue les déséquilibres entre les provinces
Dans le contexte de déséquilibres démographiques marqués entre la
province sud et les deux autres provinces, Nord et Iles (A), la répartition
de l’offre de soins accentue les inégalités
: les professionnels libéraux sont
concentrés dans la province Sud sans que la répartition des professionnels
salariés ne corrige véritablement les déséquilibres (B).
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DES TENSIONS DANS L’
ACCÈS AUX SOINS DE PREMIER RECOURS,
AMPLIFIÉES PAR LA RÉ
PARTITION DE L’OFFRE
19
A -
La concentration de la population
et de l’activité
de soins sur la province Sud et le grand Nouméa
La concentration de la population sur la province Sud et tout
particulièrement sur le grand Nouméa est un autre trait caractéristique qui
induit une contrainte forte pour le système de soins et en particulier pour
sa capacité à garantir un accès suffisant aux soins.
La majorité de la population est concentrée en province Sud (75 % de
la population), contre 18 % en province Nord et 7 % en province des Îles.
Plus spécifiquement, Nouméa et le grand Nouméa (Dumbéa, Païta et Mont-
Dore) réunissent 67 % de la population totale : plus de deux calédoniens sur
trois habitent dans l’une des quatre communes de l’agglomération du grand
Nouméa, contre un sur deux cinquante ans auparavant.
Graphique n° 3 :
évolution de la population de la Nouvelle-Calédonie
entre 2009 et 2019 par province
Source : chambre territoriale des comptes, à partir des données ISEE issues des recensements
de la population de 2014 et 2019
Cette
concentration
de
la
population
s’accompagne
d’une
concentration encore plus marquée de l’offre de soins, y
compris de soins
de premier recours.
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20
Tableau n° 2 :
nombre de professionnels de santé par province
en 2018 (population 2019)
Province
des Iles
Province
Nord
Province
Sud
Nouvelle
Calédonie
Population 2019 (en
milliers
d’habitants)
18,4
49,9
203,1
271,4
Répartition
6,7 %
18,4 %
74,8 %
100 %
Infirmiers
69
172
1 522
1 763
Répartition
4 %
10 %
86 %
100 %
Médecins généralistes
15
49
281
345
Répartition
4 %
14 %
81 %
100 %
Médecins spécialistes
0
14
309
323
Répartition
0 %
4 %
96 %
100 %
Chirurgiens-dentistes
5
18
103
126
Répartition
4%
14 %
82 %
100 %
Masseurs-kinésithérapeutes
7
25
168
200
Répartition
4 %
13 %
84 %
100 %
Sages-femmes
5
24
111
138
Répartition
4 %
17 %
80 %
100 %
Source : ISEE
B -
Une répartition très polarisée des médecins
généralistes selon leur statut, aggravée
par les difficultés de recrutement
Le secteur libéral est développé en province Sud. En province Nord
et Îles, les soins de premier recours sont essentiellement assurés par les
centres médico-sociaux, qui restent marqués par une tradition centrée sur
les médecins généralistes, ce qui contribue à y expliquer le déficit marqué
en personnel de santé spécialistes, ou en chirurgiens-dentistes, sages-
femmes, masseurs-kinésithérapeutes, infirmiers.
L’organisation territoriale des soins de premiers recours - mai 2024
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DES TENSIONS DANS L’
ACCÈS AUX SOINS DE PREMIER RECOURS,
AMPLIFIÉES PAR LA RÉ
PARTITION DE L’OFFRE
21
Graphique n° 4 :
densité des médecins généralistes
pour 100 000 habitants au 30 juin 2019
Source
: chambre territoriale des comptes d’après les informations fournies par la direction des
affaires sanitaires et sociales
S’agissant des médecins généralistes, l’importance relative des
médecins salariés, notamment par les provinces dans les centres médico-
sociaux, limite un peu les inégalités de répartition territoriale, qui
demeurent notables. Cependant, du fait de difficultés de recrutement, dans
les centres médico-sociaux de la province Nord, au 1
er
janvier 2022, sur les
30 postes prévus de médecins, seulement 11 sont pourvus (et neuf au
30
mai 2022). Concernant les postes d’infirmiers, seulement
neuf postes
sont pourvus sur les 24 prévus.
III -
Des difficultés multiformes dans l’accès
aux soins de premier recours
Des difficultés multiformes sont constatées dans l’accès des patients
aux soins : pour les soins programmés (A), notamment face aux
pathologies liées à l’obésité, faute
de moyens adaptés (B) ; pour les soins
non programmés (C) ; et pour les actions «
d’aller vers
» les populations
les plus vulnérables (D).
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COUR DES COMPTES
22
A -
Des données déclaratives confirment la persistance
de difficultés d’accès aux soins
Les données relatives aux difficultés d’accès aux soins sont
lacunaires, mais celles disponibles font apparaître des difficultés notables,
dans les délais de rendez-
vous mais aussi dans la possibilité même d’accéder
aux soins. Selon les résultats de la dernière enquête dite « Baromètre Santé
Adulte », réalisée en 2021-
2022 par l’agence sanitaire et sociale
25 % des
adultes avaient déclaré limiter leurs visites auprès de professionnels de santé,
faute d’accès aux soins. Ils sont un peu moins nombreux en 2
021
7
.
Graphique n° 5 :
raisons invoquées parmi ceux qui disent
rencontrer des difficultés d’accès aux soins (
en %)
Source : agence sanitaire et sociale, bilan social 2021 et 2015
7
Les adultes de 18‑64 ans sont
20 % à déclarer rencontrer des difficultés pour consulter
des professionnels de santé autant qu’ils le voudraient. Il n’y a pas de différence entre
provinces ou tranches d’âge. Les femmes sont quant à elles un peu plus nombreuses à
avoir ce type de difficultés : 23 % contre 18 % des hommes.
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DES TENSIONS DANS L’
ACCÈS AUX SOINS DE PREMIER RECOURS,
AMPLIFIÉES PAR LA RÉ
PARTITION DE L’OFFRE
23
Les motifs, quant à eux, ont évolué entre 2015 et 2021 et diffèrent
selon les provinces. Le délai d’attente pour obtenir des rendez‑vous est plus
souvent cité en 2021 en province Sud (15 %) qu’en province Nord (7 %) ou
îles Loyautés (5 %). Le coût des consultations, peu cité, concerne surtout les
plus jeunes (7 % des 18‑24
ans, 6 % des 25‑44 ans et 2 % des 45‑64 ans),
tout comme les problèmes de couverture sociale (2 % des 18‑
24 ans, 0,5 %
des 25‑44 ans et 0,4 % des 45‑64
ans). Les difficultés d’accès sont à l’inverse
plus souvent citées par les habitants des province Nord (9 %) et îles Loyauté
(7 %) par rapport au Sud (2 %). Il en est de même pour le manque de
médecins et de spécialistes, qui concerne plus particulièrement les provinces
îles Loyauté (6 %) et Nord (5 %) que le Sud (2 %) ainsi que le coût du
transport (4 % dans le Nord, 2,5 % dans les Îles et 1 % dans le Sud).
B -
Des soins peu efficaces, selon les médecins,
pour
l’éducation
thérapeutique
L’analyse de l’offre de soins de premier recours par type de
fonctions, permet d’identifier des insuffisances significatives pour les
diverses fonctions, en premier lieu pour les soins programmés, c’est
-à-dire
le suivi dans le temps des patients chroniques.
Le dispositif de « médecin traitant
» n’existe pas en Nouvelle
-
Calédonie, ce qui rend moins facile le suivi spécifique de l’efficacité de
l’offre de soins programmés.
Cependant, le baromètre des médecins
généralistes peut constituer un indicateur partiel, un peu ancien mais adapté
au contexte calédonien, sur l’efficacité des soins médicaux du point de vue
des médecins généralistes quant à l’éducation thérapeutique des patients.
Le baromètre des médecins généralistes (de 2016
8
) met en évidence que
le su
ivi des patients n’aurait qu’une efficacité très variable et limitée en ce qui
concerne les conduites alimentaires, pourtant repérées comme une cause
dominante de morbidité. Les médecins généralistes concernés pensent que
leurs activités d’éducation thérapeutique sont d’une certaine efficacité auprès
des patients hypertendus, asthmatiques et diabétiques. À
l’opposé,
82 % des
médecins généralistes déclarent qu’ils sont peu (
75 %) ou pas du tout (7 %)
efficaces dans leur pratique de l’éducation
thérapeutique des patients obèses.
8
Réalisé au sein d’une population de 220 médecins généralistes éligibles, l’enquête a
bénéficié de la participation de 54 % des professionnels sollicités : les réponses
émanaient de médecins généralistes : aux deux t
iers d’hommes pour un tiers de femmes,
d’un âge médian de 53 ans, professionnellement installés, pour moitié, depuis plus de
10 ans en Nouvelle-Calédonie. Pour deux tiers ils exerçaient dans le périmètre urbain
du grand Nouméa et en brousse pour le tiers restant, dans le secteur libéral pour deux
tiers encore, et en tant que salarié pour le dernier tiers.
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COUR DES COMPTES
24
Graphique n° 6 :
e
fficacité jugée de l’éducation thérapeutique
par les médecins généralistes
Source : baromètre des médecins généralistes de 2016 établi pa
r l’a
gence sanitaire et sociale
de Nouvelle-Calédonie
Lorsque les médecins peuvent à eux-seuls en assurer la
transmission, les messages d’éducation thérapeutiques sont jugés efficaces.
A l’inverse, lorsque pour être entendus et surtout mis en œuvre par les
patients, leurs messages doivent être relayés par d’autres profes
sionnels,
qui souvent font défaut dans leur environnement, leur action est jugée
moins efficace (conduites alimentaires et arrêt du tabac, cause principale
des bronchopneumopathies chroniques obstructives).
C -
Une réponse insuffisante aux soins non programmés
Il n’existe pas d’étude sur les délais d’obtention des rendez
-vous
médicaux,
a fortiori
distinguant selon les motifs, entre les soins ressentis
comme urgents et ceux qui relèvent d’un suivi au long cours. Mais certains
signaux sont connus. Comme l
’indique le plan de santé «
Do Kamo », de
2018, ainsi, «
en Nouvelle-Calédonie, à partir de 16h30, de nombreux
cabinets médicaux privés, les dispensaires, les centres de santé (de la
CAFAT par exemple), sont fermés au public. Les citoyens-
usagers n’ont
don
c d’autres alternatives que de faire appel à
« SOS médecin »
ou de se
rendre aux urgences hospitalières publiques. Cela se traduit par une
embolisation des services concernés et des délais de prise en charge
souvent longs pour les patients. En matière de service public, cela
représente autant une perte de la qualité dans la prise en charge qu’un
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DES TENSIONS DANS L’
ACCÈS AUX SOINS DE PREMIER RECOURS,
AMPLIFIÉES PAR LA RÉ
PARTITION DE L’OFFRE
25
surcoût financier important
». La chambre territoriale des comptes l’a aussi
mis en évidence dans son rapport d’observations définitives concernant la
province Nord et la prise en charge des soins de premiers recours
9
.
Le nombre de passages aux urgences au centre hospitalier territorial,
après avoir baissé du fait de la crise sanitaire, a augmenté rapidement
ensuite (l’augmentation est
de 8,7 % entre 2018 et 2022, passant de 49 398
en 2018 à 53 694 en 2022).
Graphique n° 7 :
évolution du nombre de passages* aux urgences
au centre hospitalier territorial
Source : chambre territoriale des comptes à partir des données du centre hospitalier territorial
* Le nombre de passages agrège les urgences adultes et pédiatriques.
Plusieurs facteurs peuvent expliquer cette hausse qui traduit
notamment un moindre recours aux centres médico-sociaux et aux
professionnels libéraux.
D -
Un « aller vers » insuffisant vers les populations
les plus fragiles
Pour ce qui concerne la fonction «
d’aller
vers
», c’est
-à-dire la
capacité des professionnels de santé à proposer un suivi aux populations les
9
Rapport d’observations définitives relatif à la province Nord
- soins de premiers recours, délibéré
soins-premiers-recours page 35.
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26
plus éloignées du soin, un éclairage au moins partiel existe au travers de
l’indicateur concernant la part de la population qui déclare consulter dans
l’année, faisant apparaître en creux la part de ceux qui n’ont pas consulté.
En
moyenne, plus de trois calédoniens sur quatre (77 %
10
) ont déclaré avoir
consulté un médecin ou un professionnel de santé au cours de l’année
écoulée. Ces proportions varient de manière forte selon les provinces : 82 %
dans le Sud contre 64 % dans le Nord et 62 % dans les Îles Loyauté.
Plus d’un tiers des habitants n’a pas consulté un médecin en 2021,
dans les deux provinces Nord et des Îles, contre moins de 20 % dans la
province Sud. Cet écart constitue un indicateur significatif, sur l’insuffisance
des démarches de prévention et d’examens périodiques des patients.
Au total, les indicateurs disponibles, même limités, traduisent une
offre de soins de premier recours insuffisante par rapport aux demandes,
pour les soins programmés, non programmés et l’effort d’«
aller vers », et
ce alors même que l’évolution prévisible de la démographie devrait à
relativement brève échéance aggraver cet écart, dans le contexte de
pathologies chroniques qui caractérise la Nouvelle Calédonie.
10
Cette proportion augmente avec l’âge :
72
% chez les 18‑24 ans,
75 % chez les
25‑
44 ans et 82
% chez les 45‑64 ans
.
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Chapitre II
Des interventions insuffisamment
orientées sur l’accès aux soins
et l’éducation thérapeutique
Diverses mesures ont été engagées,
pour consolider ou renforcer l’offre
de soins de premier recours et, en amont, mieux structurer les interventions
publiques. Au niveau des provinces (I), ces mesures visent à renforcer un réseau
maillé de centres médico-sociaux, mais se heurtent à la difficulté de recruter ou
de fixer les professionnels de santé et de consolider leur fonctionnement. Au
niveau du territoire (II), de nombreux outils sont disponibles, cartes, schémas,
plans stratégiques, actions des agences ou administrations territoriales, mais ils
n’ont que peu de portée sur les soins de premier recours.
I -
Au niveau des provinces, un réseau maillé
de centres médico-sociaux
Le territoire dispose d’un outil, avec le réseau des centres médico
-
sociaux (A), même si ce réseau connaît des difficultés récurrentes pour
faire face à l’étendue de ses missions (
B).
A -
Des implantations multiples sur le territoire
Les soins de santé de premier recours et les programmes en matière
de protection maternelle et infantile, de surveillance des grossesses, de
suivi et vaccination des enfants, sont assurés par les centres médico-
sociaux, en lien avec le secteur libéral quand il est présent, très développé
en province Sud, mais limité en province Nord et dans les Îles.
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COUR DES COMPTES
28
Carte n° 1 :
implantation des centres médico-sociaux
en Nouvelle-Calédonie
Source : direction des affaires sanitaires et sociales de la Nouvelle-Calédonie, situation sanitaire en Nouvelle-
Calédonie, 2017
Le territoire compte 27 centres médico-sociaux, mais aussi
23 antennes ou « infirmeries ». Certains centres médico-sociaux, plus
importants, disposent de lits
d’observation, étiquetés «
lits de médecine et
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DES INTERVENTIONS INSUFFISAMMENT ORIENTÉES
SUR
L’ACCÈS AUX SOINS ET
L’ÉDUCATION THÉRAPE
UTIQUE
29
d’obstétrique
»
11
. Les particularités géographiques de la Nouvelle-Calédonie
ont en effet contraint les provinces à équiper leurs structures de soins de lits
physiques à vocation multiple, pour éviter des transports longs lorsqu’ils ne
sont pas indispensables.
Tableau 1 : structures de santé de compétence provinciale
(hors centres spécialisés)
Circonscriptions
médicales et centres
médico-sociaux
Centres médicaux
secondaires ou
infirmeries
Total
Province Sud
7
6
13
Province Nord
15
2
17
Province des Iles
5
15
20
Total
27
23
50
Source : direction des affaires sanitaires et sociales de la Nouvelle-Calédonie, situation sanitaire
en Nouvelle-Calédonie, 2017
Les moyens de ces centres sont inévitablement comptés et diverses
observations critiques sont faites sur leur capacité à répondre aux demandes
de soins, en particulier du fait de leurs horaires de fonctionnement. Le coût
de la permanence de soins dans les dispensaires est également relevé
comme un point d’attention, signalé dans le plan
« Do Kamo » qui a pour
objectif d’étendre les
plages horaires d’ouverture des centres en journée et
reporter l’accueil d’urgence vers des centres plus importants après
18 heures.
Quelles que soient les évolutions éventuellement nécessaires, ce
réseau constitue un atout, reconnu des professionnels interrogés pour
l’enquête lors des ateliers d’acteurs (voir
annexe n° 1). Ils soulignent la
pertinence de l’organisation des coopérations pluriprofessionnelles,
notamment des « équipes soignantes » au sein des centres.
B -
Un réseau fragile
Pour autant, le contrôle mené par la chambre sur les actions de la
province Nord en matière d’accès aux soins de premier recours a montré
les limites des interventions menées. Sur les 30 postes de médecins prévus,
11
En 2018, il y avait 72 lits dans les centres médicosociaux, 57 de médecine et 15
d’obstétrique.
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COUR DES COMPTES
30
seuls neuf étaient pourvus au 30 mai 2022 et sept centres médico-sociaux
12
n’avaient pas de médecins. Les centres médico
-sociaux qui disposent de
médecins n’en avaient souvent qu’un seul, qui pouvait légitimement être
absent durant ses congés ou pour raison de santé.
Ces observations confirmaient un constat plus systématique et plus
ancien. La province Nord avait en effet mené une enquête en 2014 auprès
des professionnels de santé, qui avait mis en avant une surcharge de travail,
du fait d’astreintes et de gardes importantes, un taux de rotation du
personnel conséq
uent, un risque élevé d’isolement professionnel, du fait du
manque de communication entre professionnels de santé et avec la
direction, de l’absence de réunions de service, d’un accueil jugé
globalement insatisfaisant par les médecins. Le cadre de travail était jugé
imprécis, du fait de l’absence de description précise du poste, des missions
et des responsabilités du personnel médical. L’audit relevait en outre le
manque de formation continue portant notamment sur les aspects culturels
de la maladie, sur le
s urgences, l’obésité, le diabète et les divers aspects de
santé publique.
À la suite de cette enquête, un plan d’action a été élaboré, reposant
sur plusieurs axes de travail
: amélioration du recrutement, de l’accueil et
de l’accompagnement professionnel
du personnel, amélioration des
conditions de vie et sécurisation des centres médico-sociaux et des
logements des personnels, amélioration des cadres locaux dans le domaine
médical, renforcement du partenariat avec le gouvernement de la Nouvelle-
Calédonie.
Si certaines actions ont été engagées (recrutement d’une
personne chargée du recrutement des soignants et de leur intégration par
exemple), le suivi de sa mise en œuvre reste rudimentaire.
L’atout potentiel que constituent les centres médico
-sociaux est
donc réduit, du fait des insuffisances de leur fonctionnement qui n’ont plus
été documentées de manière précise depuis près de dix ans, mais qui
apparaissaient encore marquées en 2022, selon les observations de la
chambre territoriale des comptes.
II -
Au niveau du territoire
Sous réserve des compétences exercées par les provinces sur les
centres médico-
sociaux, l’organisation et le financement des soins relèvent
de la Nouvelle-Calédonie, qui a successivement déployé dans le domaine
12
Voh, Kaala-Gomen, Belep, Ouégoa, Pouébo, Ponérihouen et Kouaoua.
L’organisation territoriale des soins de premiers recours - mai 2024
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DES INTERVENTIONS INSUFFISAMMENT ORIENTÉES
SUR
L’ACCÈS AUX SOINS ET
L’ÉDUCATION THÉRAPE
UTIQUE
31
des soins primaires, trois
formes d’actions
: des outils de planification
sanitaire (A), une stratégie globale (B), et un appui à la télésanté et à la
télémédecine (C).
A -
Les outils de planification de l’offre
La Nouvelle-
Calédonie dispose d’une carte sanitaire
et d’un schéma
d’orga
nisation sanitaire
13
. La carte sanitaire détermine les indices
permettant de répondre à l’évolution des besoins médicaux de la population
calédonienne notamment dans les domaines de la périnatalité, des
urgences, de l’insuffisance rénale chronique et de la
santé mentale. Elle
détermine par exemple le nombre de lits ou de places autorisables et le
nombre global d’appareils pour les équipements matériels lourds. La carte
sanitaire est pertinente pour la structuration des centres hospitaliers et des
équipements lourds.
L
’outil de programmation qu’est le schéma d’organisation sanitaire
peut jouer un rôle de structuration et de gradation de l’offre, puisqu’il a
pour objectif d’assurer aux usagers l’accessibilité et la continuité des soins,
la proximité et la gradation des soins, la qualité et la sécurité des soins,
ainsi que d’encadrer l’offre de soins en veillant à promouvoir la flexibilité
et la mise en réseau de l'offre de soins, la maîtrise des dépenses de soins,
l’aménagement du territoire. Cet outil n’a pas é
té utilisé pour structurer
l’offre de soins de premier recours malgré sa pertinence.
Ni
la carte sanitaire, ni le schéma d’organisation sanitaire n’ont fait
l’objet d’une mise à jour
14
depuis 2016. Dans son rapport d’observations
définitives relatif à la Nouvelle-Calédonie et à la gestion sanitaire et
sociale, la chambre territoriale des comptes a préconisé de rendre ces outils
réellement opérationnels. Pour les soins de premiers recours, cela permettra
de mieux garantir la correspondance entre l’organisation de l’offre et les
niveaux de services attendus par la population.
13
Délibération modifiée n° 171 du 25 janvier 2001 modifiée relative à la carte sanitaire
et aux schémas d’organisation sanitaire de la Nouvelle
-Calédonie.
14
Cependant, le gouvernement de Nouvelle-Calédonie annonce lancer en 2024, avec
l’AFD, un projet de refonte de la carte sanitaire
.
L’organisation territoriale des soins de premiers recours - mai 2024
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COUR DES COMPTES
32
B -
Un plan qui vise à intégrer l
’ensemble
des interventions publiques
Un deuxième levier a consisté dans l’engagement d’une démarche
stratégique, valant référence partagée pour l’ensemble d
es acteurs publics,
à la suite des « assises de la santé », organisées en 2015, se traduisant par
un plan stratégique intitulé « Do Kamo, être épanoui ». Adopté par le
congrès en mars 2016 pour la période 2018-2028, ce plan se décline en
trois axes et 86 actions. Les deux premiers axes
15
visent des objectifs de
rééquilibrage financier et de meilleure coordination entre les différents
opérateurs chargé à un titre ou un autre, de la définition ou de la mise en
œuvre des politiques publiques de santé
. L
’
axe 3 «
assurer une offre de
santé efficiente, grâce à une offre de prévention renforcée et coordonnée
avec l’offre de soin
» entre plus précisément dans le détail des mesures,
dont plusieurs concernent les soins de premier recours.
Les actions n° 71 à 75, notamment, prévoient la montée en charge
progressive d’une démarche d’identification des risques et d’adaptation du
fonctionnement des équipes, en fonction des ressources existantes dans les
différents bassins de vie. Plusieurs actions (voir une présentation résumée
de chacune de ces actions en annexe n° 2) sont notamment ciblées sur la
détection et le suivi des personnes en surcharge pondérale, avec l’objectif
d’intégrer
des
interventions
pluridisciplinaires
d’accompagnement
(éducation thérapeutique) et de prévention. Les actions n° 77 à 82 sont
encore plus directement destinées à répondre aux insuffisances constatées
dans l’offre de soins de premier recours
: l’action n°
77 retient l’objectif de
généraliser le système du « médecin traitant
», à la place d’un dispositif de
« médecin référent
», jusqu’ici déployé pour les seuls patients chroniques.
Toutes ces actions paraissent pertinentes et utiles. La crise sanitaire,
notamment, en a retardé certains volets, comme la chambre territoriale des
comptes l’a constaté en 2022 (voir le rapport d’observations définitives
précité). Les outils permettant en outre de faire le point sur l’avancement des
actions ne semblent pas encore opérationnels, même s’il est prévu dans le
plan de «
créer un
dispositif d’observation de l’état de santé des calédoniens
et les outils indispensables à son fonctionnement
». Il est donc en l’état
difficile de savoir dans quelle mesure les orientations prévues, notamment
par les actions 71 à 75, sont mises en œuvre.
Il en va de même,
a fortiori
,
pour les actions plus structurelles relatives à l’organisation de l’offre de soins
de premier recours (actions n° 77 à 82), notamment pour ce qui concerne le
développement des coopérations entre professionnels de santé.
15
Soit l’axe 1,
« construire le nouveau modèle économique du système de santé
calédonien
» et l’axe 2
« construire une nouvelle gouvernance du système de santé
calédonien ».
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DES INTERVENTIONS INSUFFISAMMENT ORIENTÉES
SUR
L’ACCÈS AUX SOINS ET
L’ÉDUCATION THÉRAPE
UTIQUE
33
C -
Un levier plus opérationnel, le recours
à des outils de télésanté
D’autres action sont plus avancées, parce qu’elles reposent sur une
collaboration entre le niveau territorial et les provinces. C’est le cas
notamment du télé conseil et de la télémédecine, prév
ues dans l’action 82
du
plan
« Do
Kamo »
.
Ces
deux
formes
d’intervention
sont
complémentaires. Leur développement permet en effet aux professionnels
de santé d’avoir accès à l’avis médical de leurs confrères ou de réaliser un
diagnostic précoce susceptible
d’éviter d’éventuelles complications, tout
en réduisant les déplacements pour les patients, qui peuvent bénéficier par
ailleurs d’une meilleure prise en charge. C’est un levier d’action utilisé par
la province Nord ou la province des Îles.
La médecine itinérante
permet également d’améliorer l’offre de
soin, en assurant une présence médicale physique dans les zones
confrontées à une pénurie de médecins. Les provinces peuvent, par
exemple, mettre à disposition des locaux permettant le passage d’un
médecin, une ou plusieurs demi-journées par semaine. Ces locaux doivent
garantir le respect du secret professionnel et être équipés du matériel
médical et informatique nécessaire pour assurer des consultations.
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Chapitre III
La nécessité d’une démarche
ciblée
sur les soins de premier recours
et d’une mise sous tension des résultats
La « première ligne
» de prise en charge que constitue l’offre de
soins de premier recours doit permettre de générer des économies, par un
moindre report sur les soins de niveau plus importants, sollicités en cas de
réponse insuffisamment rapide aux demandes relevant du premier niveau
ou par une prise en charge plus précoce, limitant les complications. C’est
pourquoi il est nécessaire d’organiser un pilotage et un suivi dis
tinct des
objectifs relevant de cette partie de l’offre de soins (
I). En complément aux
actions déjà engagées, certaines mesures peuvent utilement compléter
celles déjà envisagées ou engagées (II). Leur pleine efficacité suppose que
des concertations et des partenariats soient engagés entre les différents
acteurs publics, pour mieux organiser les soins de premier recours (III).
I -
Un pilotage
ad hoc
à mettre en place,
pour une meilleure organisation des soins
de premier recours
L’organisation des so
ins de premier recours implique des mesures
diversifiées et souvent complexes, qui dépendent de niveaux d’expertise et
de décision variés. Ainsi, pour le développement des interventions de
professionnels de santé comme les infirmiers de pratique avancée, le congrès
a adopté en 2020 un avant-
projet de loi du pays. D’autres leviers d’action
peuvent dépendre de décisions du gouvernement, notamment pour élargir la
possibilité de coopérations entre les professionnels, sans créer de nouvelle
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COUR DES COMPTES
36
catégorie
. D’autres actions peuvent relever de la sphère d’action de la caisse
de compensation des prestations familiales, des accidents du travail et de la
prévoyance des travailleurs de Nouvelle-Calédonie (CAFAT), par exemple
le niveau de rémunération des
consultations complexes en vue d’une prise
en charge des patients polypathologiques ou en affection de longue durée
16
.
Enfin, de nombreux leviers dépendent des provinces, notamment
l’organisation et le financement des centres médico
-sociaux.
Les leviers de coordination existants paraissent trop limités, pour
permettre la mise en cohérence attendue des soins de premier recours. Une
pol
itique ciblée sur l’organisation de ces soins est donc nécessaire. Elle doit
reposer, au niveau du territoire, sur la détermin
ation d’objectifs
opérationnels fondés sur des indicateurs robustes et disponibles relatifs aux
soins non programmés, par exemple la réduction des passages aux urgences
peu justifiés, aux soins programmés, par exemple la part des pathologies
chroniques prises en charge par des équipes référentes, ou à «
l’aller
-vers »,
par exemple, la réduction de la part des personnes sans soins dans l’année.
Les orientations complémentaires à étudier, suggérées lors des
ateliers d’acteurs, devraient concerner plusieurs volets. Premièrement, face
à la saturation de l’offre médicale, un allègement des tâches administratives
incombant aux médecins doit être recherché, notamment s’agissant des
certificats de scolarité ou des arrêts de travail. Deuxièmement, une
politique plus volontariste doit être rapidement engagée en matière de
coopération entre professionnels de santé. Les participants aux ateliers
avaient notamment signalé la possibilité de faire valider par des infirmiers
ou des pharmaciens l’utilisation de certains produits (Ventoline, vitamine
D, etc.), ou le renouvellement des ordonnances pour les patients chroniques
qu’ils suivent déjà. L’orientation consistant à développer les coopératio
ns
entre professionnels de santé suppose une dotation plus importante,
notamment en infirmiers de pratiques avancées, en assistants médicaux, ou
en infirmières de santé publique.
Les responsables du contrôle médical unifié, au sein de la Cafat, ont
confir
mé dans la réponse adressée par cet organisme l’acuité des difficultés
mais, aussi, la diversité des pistes de d’évolution susceptibles d’apporter
un progrès. Ils suggèrent notamment de mieux profiter «
du maillage
officinal efficient
» existant. Il serait
possible ainsi, selon eux, de s’appuyer
davantage sur ces professionnels de santé dans la prise en charge des
patients, notamment dans le cas des traitements chroniques (équipe
pluridisciplinaire de proximité par zone géographique). Des protocoles
pourraient être mis en place avec les médecins définissant les contrôles que
pourraient réaliser les pharmaciens (comme la prise de tension par
16
Ce
point a été signalé comme sensible par certains participants lors des ateliers d’acteurs.
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LA NÉCESSITÉ D’UNE D
ÉMARCHE CIBLÉE SUR LES SOINS
DE PREMIER RECOURS E
T D’UNE MISE SOUS TE
NSION DES RÉSULTATS
37
exemple...) permettant la poursuite de traitements lorsque le patient est bien
équilibré ou, dans le cas contraire, l’o
rienter vers un médecin.
II -
Des leviers opérationnels à déployer
Pour chaque segment des soins de premier recours, des actions
spécifiques, parfois déjà envisagées ou programmées dans le plan
stratégique, doivent être prévues et leurs responsables clairement désignés.
S’agissant des soins programmés, en complément de l’orientation
en faveur du médecin traitant, et dans la continuité de ce qui était déjà prévu
pour les patients souffrant de pathologies chroniques, des équipes
référentes peuvent être déployées, en lien avec les centres médico-sociaux.
Dans ces équipes doivent figurer des diététiciens et des infirmières de santé
publique, formés pour traiter dans la durée et dans leur complexité les
habitudes alimentaires et la surcharge pondérale.
Afin de mieux prendre en compte les besoins de santé des
populations les plus éloignées des soins, ces équipes doivent dans les
territoires les plus carencés être élargies à des médiateurs en santé ou à des
assistantes sociales, capables de soulager les médecins généralistes et les
autres professionnels de santé pour faciliter la compréhension des
traitements ou la prise en charge administrative des patients. Une gestion
mutualisée de ces professionnels, incluant le cas échéant des psychologues,
peut être organisée au niveau des provinces.
III -
Un partenariat à construire
dans le financement et la gouvernance
En réponse aux observations provisoires des juridictions, la
présidente de la province sud a souligné que
l’offre de soins de premier
niveau repose largement sur les provinces à travers leurs centres médico-
sociaux lorsque l’offre libérale est faible ou inexistante, alors qu’elles ne
sont en rien compétentes en matière de santé. Aussi, un rôle éventuel des
provinces «
en matière de coordination des soins ou d’équipes
pluridisciplinaires
» [impliquerait que]
ces tâches supplémentaires soient
correctement compensées financièrement
».
Un
décalage s’est instauré entre les compétences des acteurs au sens
institutionnel et leur exercice sur le terrain comme le relève dans sa réponse
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la présidente de la province Sud. Les provinces et le territoire doivent donc
échanger pour définir les voies et moyens de développer le rôle des centres
médico-
sociaux en tant que support adéquat du déploiement d’une offre
coordonnée pluriprofessionnelle en Nouvelle-Calédonie.
S’agissant des soins non programmés, une réflexion doit être
engagée, pour structurer au niveau du territoire un «
service d’accès aux
soins », adossé aux sites principaux des urgences, le centre hospitalier
territorial et le centre hospitalier Nord, et outillé pour gérer une régulation
téléphonique médicalisée vers les urgences hospitalières mais aussi vers
des consultations libérales ou les centres médico-sociaux.
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Annexes
Annexe n° 1 :
principaux enseignements des ateliers d’acteurs
organisés en Nouvelle-Calédonie
.........................................
40
Annexe n° 2 :
extraits des actions du plan de santé « Do Kamo »
de septembre 2018, relatives aux soins
de premier recours
................................................................
44
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40
Annexe n° 1 :
principaux enseignements des
ateliers d’acteurs organisés en Nouvelle
-Calédonie
Trois ateliers d’acteurs ont été organisés, dans chacune des
provinces, regroupant à chaque fois une dizaine de professionnels de santé.
Durant ces ateliers, trois thèmes ont été abordés :
les soins programmés,
les soins non-programmés et «
l’aller
-vers ». Un questionnaire préalable a
permis d’introduire les débats et de recu
eillir des premiers constats, ensuite
enrichis par les échanges et complétés par les suggestions d’évolutions.
Soins programmés :
L
a moitié des répondants ont confirmé les difficultés qu’ils
rencontraient, compte tenu de leur charge de travail, pour respecter les
règles de bonnes pratiques visant une bonne prise en charge des patients
chroniques dans leur quotidien. Le recours à des assistants médicaux pour
améliorer la récupération des documents nécessaires à la facturation et leur
déléguer des tâches protocolisées, le regroupement des cabinets infirmiers,
des locaux et du matériel de qualité ainsi que le développement de la
médecine libérale semblent aux professionnels interrogés de nature à
améliorer à la fois la qualité de la prise en charge et le nombre de patients
suivis.
70
% des répondants ont considéré qu’ils avaient pour mission de
répondre aux demandes provenant de nouveaux patients complexes. Pour
certains professionnels, le flux de nouveaux patients s’équilibre avec les
anciens patients. Les 30
% restant considèrent qu’il est nécessaire de
bénéficier d’une équipe soignante accessible et indiquent qu’ils
n’acceptent pas d’autres patients par manque de temps. Selon eux, cela
pourrait compromettre la qualité de leur prise en charge.
Plusieurs actions sont considérées comme étant de nature à
améliorer le temps médical utile. La proposition la plus plébiscitée est le
développement du recours aux psychologues de ville, dont la consultation
serait prise en charge par la CAFAT. Le renforcement de la place des
travailleurs sociaux au plus près des équipes soignantes (médiateurs en
santé, assistants sociaux), l’augmentation du nombre d’assistants médicaux
sont considérés comme les propositions les plus utiles pour permettre un
gain de temps médical. Autre recommandation retenue : le transfert de
certaines tâches administratives au patient lui-même (notamment
s’agissant des certificats de scolarité ou des arrêts de travail) et la validation
par des infirmier diplômés d’
État
ou des pharmaciens de l’uti
lisation de
certains produits (Ventoline, vitamine D, etc.), ou pour le renouvellement
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ANNEXES
41
des ordonnances des patients chroniques car ils les connaissent très bien.
Cela allègerait le rôle de prescription des ordonnances habituelles ou de
renouvellement.
Pour
mieux garantir l’égalité territoriale d’accès aux soins, est
préconisée une dotation plus importante en infirmiers de pratiques
avancées et en assistants médicaux, qui pourrait être accompagnée d’un
audit pour adapter et uniformiser les pratiques selon les besoins et les
provinces. Le développement de la téléconsultation associée à la médecine
itinérante est une deuxième orientation proposée. Sous-utilisée en
Nouvelle-Calédonie, cette technologie pourrait pallier momentanément la
pénurie de soignants et compléter la médecine itinérante impossible à
assurer sur tout le territoire.
S’agissant du rôle des pharmaciens dans la prise en charge des soins,
40 % des répondants ont affirmé que ces derniers pourraient prendre en
charge ponctuellement les patients les plus fragiles dans le traitement des
maladies
chroniques
grâce
à
leurs
bonnes
connaissances
physiopathologiques et médicamenteuses et pour faciliter la continuité des
soins. Le maillage obligatoire des pharmacies permet d’avoir un
professionnel de sant
é sur toute l’île et la polyvalence de ses compétences en
font un professionnel de santé de premier recours particulièrement sollicité.
Soins non programmés :
Les avis des professionnels interrogés sont partagés sur la capacité
de l’organisation actuelle à
répondre aux demandes des soins non
programmés. Pour certains, cette mission, jugée essentielle, serait
correctement assurée. Pour d’autres la réalité du terrain serait aléatoire, du
fait de la fermeture des cabinets le week-
end et d’effectifs insuffisant
s. Les
sollicitations
seraient
surtout
prises
en
compte
par
les
centres
médicosociaux, qui ont une place importante dans la prise en charge des
soins non programmés et seraient les seuls lieux de recours de soins sur les
îles et en brousse. Pour plus de la moitié des professionnels qui se sont
exprimés sur ce point, en tout cas, le modèle actuel de visites à domicile
(SOS médecin, etc.) et dans les centres médico-sociaux ne fonctionne pas.
En
Nouvelle-
Calédonie,
SOS
médecins
n’intervient
que
dans
l’agglomér
ation du grand Nouméa (avec des quartiers non couverts) et les
centres médicosociaux font des visites à domiciles à condition d’avoir
suffisamment de personnels soignants.
Selon la majorité des participants, la permanence des soins
ambulatoires et la régul
ation (Service d’accès aux soins) seraient
organisées de manière insatisfaisante : disparate selon les provinces, il
manquerait au dispositif plusieurs éléments : un schéma des urgences
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(process commun), la participation de la médecine libérale et des
pharmacies à cette permanence, une
coordination et une communication
renforcées et des moyens de transport améliorés (un seul hélicoptère est
disponible, qui ne peut voler la nuit et les transports sanitaires terrestres
sont à améliorer). Le financement de ces soins (actes et organisation) et du
service d’accès aux soins paraît peu pertinent à plus des deux tiers des
professionnels interrogés
:
la tarification à l’acte entraînerait des écarts de
tarifications, des inégalités et des incohérences dans la prise en charge.
Certains participants ont souligné que les évolutions concrètes leur
paraissaient limitées, depuis l’adoption du plan Do Kamo. S’agissant de la
permanence des soins ambulatoires, en plus de créer le réseau précédemment
évoqué, une proposition de copier le modèle de Lifou est proposée : créer un
mixte dispensaire/libéral (ce qui suppose de rémunérer correctement les
professionnels libéraux disposés à participer à cette mission).
« Aller-vers » :
Selon les professionnels interrogés, les personnes les plus éloignées
du soin, pour lesquelles un accompagnement spécifique serait nécessaire,
sont les personnes ayant des difficultés à se déplacer pour des raisons
psychologiques ou physiques et les personnes âgées, isolées à leur
domicile. Les raisons évoquées sont multiples : difficultés de mobilité et/ou
de compréhension (ou méconnaissance) du réseau de soins, pénuries de
professionnels de santé, particulièrement dans les centres médicosociaux,
absence de soutien familial et isolement avec un problème de transport
récurrent et un entourage familial insuffisant.
C
haque professionnel de santé a son importance dans l’organisation
de la prise en charge du patient et la polyvalence est une nécessité, selon
les participants. Mais tous affirment que les infirmi
ères diplômées d’Etat
sont les professionnels les plus pertinents pour « aller vers » ces personnes
et les prendre en charge, car elles sont les plus à même de prendre en
compte tous les besoins de santé de la personne. Elles font d’ailleurs partie
déjà des équipes traitantes dans les centres médicosociaux, avec les
médecins, formule bien adaptée en brousse.
Trois dispositifs existants dédiés aux politiques visant à aller vers
ces personnes éloignées du soin paraissent aux participants efficaces :
l’équipe
mobile de gériatrie/de psychiatrie, les équipes médicales dans les
centres médicosociaux
–
assistantes sociales, enfin l’équipe de soins
primaire (équipe soignante ne partageant pas les mêmes locaux mais réunie
autour d’un projet de santé commun). Pour au
tant, afin de mieux prendre
en compte les besoins spécifiques des personnes éloignées du soin, une
meilleure prise en charge financière des consultations complexes serait
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ANNEXES
43
nécessaire, de même qu’une organisation différente, privilégiant la stabilité
des professionnels (on note un turn-over important et des pénuries) et la
connaissance des besoins de la population, dans la durée. Est suggérée la
création d’équipes traitantes structurées autour des patients complexes,
composées d’une infirmière diplômée d’État, d’un médecin et d’un
pharmacien, utilisant un logiciel commun et capable de protocoliser des
délégations d’actes (comme c’est déjà le cas dans les dispensaires).
Est également avancée l’idée d’une dotation spécifique aux
territoires carencés, gérée au
niveau provincial, dans un objectif d’égalité
d’accès territorial, qui pourrait permettre une dotation supplémentaire
d’assistants médicaux, d’infirmières en pratique avancée, ou d’infirmières
de santé publique et qui pourrait financer des projets innovants
d’organisation de soins (cabinets de consultation mobiles par exemple). La
géographie de la Nouvelle-Calédonie nécessite une plus grande mobilité
des soignants auprès des patients les plus éloignés
; ou à l’inverse, de
meilleures conditions de transport sanitaire, pour un transport à la demande
gratuit vers les lieux de soins (les transports vers les centres médicosociaux
sont trop chers pour certains patients ou parfois inexistants. Le manque de
transport serait un frein aux soins). Un recours accru à la téléconsultation
ou aux cabines de téléconsultation dans ces territoires carencés permettrait
de pallier la carence dans l’offre médicale et apporterait un soutien aux
infirmiers de pratiques avancées, ces dernières constituant déjà un levier
pour une délégation accrue des pratiques.
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Annexe n° 2 :
extraits des actions du plan de santé
« Do Kamo » de septembre 2018, relatives aux
soins de premier recours
Deux volets sont particulièrement pertinents, du point de vue du
déploiement d’une stratégie de soins de premier reco
urs plus adaptée aux
demandes : les actions n° 71 à 75 qui entendent développer les actions de
prévention de proximité, assurées par les équipes soignantes ; et les actions
n°
77 à 82 qui entendent mieux structurer l’organisation des soins et le suivi
gradué des patients.
Exemples d’actions du plan ciblées sur une prise en charge
d’équipe préventive
Action n° 71 : La surcharge pondérale est une problématique de
santé publique en Nouvelle-Calédonie. Elle ne fait actuellement pas partie
des priorités de santé publique définies par la Délibération n°490 du 11 août
1994. Pourtant, la morbidité et la qualité de vie des citoyens-usagers sont
largement impactées, tandis que les impacts sociaux et de santé s’avèrent
importants. Les facteurs déterminant la surcharge pondérale sont nombreux
(sédentarité, stress, alimentation, réseau social, sommeil, etc.) rendant sa
prise en charge complexe et donc nécessairement pluridisciplinaire.
L’évaluation réalisée à l’initiative de l’ASS
-NC en décembre 2017 a
permis de mettre en
évidence l’existence de fortes disparités (qualitatives et
quantitatives) en termes de prise en charge du surpoids et de l’obésité de
l’enfant au sein de l’offre de santé* de niveaux 2 et 3, à l’échelle du Pays.
Il s’avère aussi que la répartition géograp
hique des moyens humains est très
hétérogène et que les compétences en termes d’Éducation Thérapeutique du
Patient des professionnels de santé et du sport, sont inégales.
Action n° 72
: L’élaboration de la prise en charge pluridisciplinaire
du parcours de santé du Calédonien devra tenir compte de la pénurie de
moyens humains sur certains bassins de vie et de la rareté des ressources
financières. À cette fin, une mutualisation des moyens des différents
partenaires des trois bassins de vie de l’expérimentati
on, doit être organisée.
Action n° 73 : Identifier les référents par bassin de vie, les équipes
pluridisciplinaires de prise en charge et les dispositifs existants dans le cadre
de l’expérimentation. Le nombre et la diversité des professionnels de santé
et des éducateurs sportifs dans chaque bassin de vie sont très hétérogènes.
Certains territoires bénéficient de l’ensemble des professionnels de santé
nécessaires tandis que d’autres d’une partie seulement.
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Afin de pallier le manque de moyens humains dans certains bassins
de vie, les référents du territoire (qu’ils soient IDE, diététiciens,
psychologues, éducateurs sportifs ou médecins) seront identifiés dans
chaque bassin de vie. Ils assureront l’accompagnement du patient dans
l’élaboration de son projet de
vie, projet de santé, en suivront les évolutions
et coordonneront les prises en charge de l’expérimentation. (…). En cas de
défaut d’une ou de plusieurs compétences, il sera proposé des stratégies de
prises en charge innovantes : délégations de compétences (après formation
et dans le cadre de protocoles) et/ou télé conseil, télémédecine et
professionnels mobiles.
Action n° 74
: Le repérage et le dépistage de l’excès de poids sont la
première étape de la prise en charge des patients en situation de surpoids ou
d’obésité. Plusieurs stratégies sont possibles pour le recrutement et
l’orientation des sujets à risque : repérage par les acteurs sensibilisés à la
promotion de la santé et susceptibles d’orienter (CCAS, maisons de quartier,
éducateurs sportifs, etc.) ; dépistage opportuniste lors de consultations pour
d’autres affections ; dépistage de santé publique incorporé dans des
programmes de prévention existants (visite de santé scolaire, visite de santé
au travail, visite médicale pour le certificat de non contre-indication à la
pratique de l’activité physique et sportive, etc.).
Action n° 75 : Construire des réseaux de « patients experts et
solidaires » en mesure de se soutenir dans le cadre de l’expérimentation. La
communauté scientifique s’accorde pour souligner l’impact positif des
démarches communautaires en santé. À
titre d’exemple, une expérience en
Nouvelle-Zélande a démontré la plus-
value de la création d’un réseau de
soutien associé à la prescription de l’activité physique.
Actions destinées à mieux structurer des prises en charge graduées
par les professionnels de premier recours.
Action n° 77 : Institutionnaliser le « médecin traitant » tout au long
de sa vie permettra une meilleure coordination des soins et un suivi du
patient bien plus qualitatif. Le nomadisme médical, les consultations et les
examens inutiles s’en trouveront également considérablement réduits.
Chaque patient choisira son « médecin traitant » parmi les professionnels en
médecine générale ou par dérogation un autre spécialiste (oncologue par
exemple). Chaque « médecin traitant » suivra ses patients sur la durée,
assurera un suivi de prévention personnalisé et coordonnera leurs soins.
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Action n° 78 : rendre la continuité et la permanence des soins
obligatoires, grâce au dispositif conventionnel médical et les contrats de
travail, et mettre en place une coordination médicale autogérée, permettront
d’améliorer l’offre de proximité en l’articulant mieux aux réalités des
besoins des patients ; de désengorger les services d’urgence ; de
diminuer
le coût des soins hospitaliers.
Action n° 80 : Les contraintes financières auxquelles la Nouvelle-
Calédonie doit faire face, l’accroissement de la demande de soin, l’évolution
des besoins et des attentes des populations en termes de soin ainsi que les
pénuries médicales de certains bassins de vie, conduisent à repenser
l’organisation de l’offre de soin, à l’échelle du Pays.
De nouvelles coopérations interprofessionnelles et de nouveaux
partages de compétence doivent être développés, posant le défi sans
précédent du redéploiement des compétences des infirmiers. Dans un
contexte international de redécoupage des responsabilités entre les
professionnels de santé, la Nouvelle-
Calédonie s’interroge sur l’opportunité
de créer de nouveaux métiers d’infirmie
r en endocrinologie-diabétologie,
soins palliatifs et milieux isolés.
Dans un premier temps, il s’agira de s’adjoindre une expertise
externe qui aura pour missions d’objectiver et argumenter les besoins ;
d’identifier les implications réglementaires ; de d
éfinir les référentiels
d’activité, de compétences et de formation ; de déterminer les évolutions de
statut nécessaires. Le développement des pratiques médicales avancées en
Nouvelle-
Calédonie permettra d’améliorer l’offre de soin et le parcours de
santé des patients en prenant en compte les représentations et les pratiques
culturelles
kanak
et
océaniennes
(représentations
de
la
maladie,
pharmacopée, etc.) de diminuer le coût des soins prodigués ; de valoriser les
compétences des infirmiers(ères).
Action n° 79 sur les pratiques avancées) et n° 82 : Environ 70 000
Calédoniens vivent en province Nord et province des Iles loyautés. L’accès
aux structures de santé et de soin pour les habitants de ces deux provinces
s’avère difficile en raison de l’éloignement gé
ographique. De plus, la
majorité des spécialistes exerce dans le grand Nouméa. Le document
indique que des modalités d’organisation adaptées (pratiques avancées et
télé-conseil) seront définies et soutenues.
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