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PRÉSENTATION À LA PRESSE DU RAPPORT PUBLIC THÉMATIQUE SUR
L’ORGANISATION DES SOINS DE PREMIER RECOURS
Lundi 13 mai 2024 – 9h30
Salle André Chandernagor
Allocution de Pierre Moscovici,
Premier président de la Cour des comptes
Mesdames et messieurs,
Bonjour et merci de votre présence.
J’ai grand plaisir à vous accueillir aujourd’hui pour vous présenter le rapport public thématique sur
l’organisation des soins de premier recours.
Je souhaite avant tout saluer le travail remarquable et très approfondi de l’ensemble des artisans
de ce rapport, qui sont nombreux
. Ce travail est en effet issu d’une formation dite « inter-
juridictions », pour lequel les équipes de la sixième chambre de la Cour des comptes et celles de
chambres régionales et territoriales des comptes ont associé leurs efforts. Je remercie
chaleureusement
Véronique Hamayon
, la présidente de la 6
ème
chambre et de la formation inter-
chambres qui a piloté les travaux préparatoires,
Laurent Rabaté
, conseiller maître, rapporteur général
de l’enquête
, Line Mazuir
, première conseillère au sein de la chambre régionale d’Occitanie,
rapporteur générale adjointe, ainsi que
Roland Cash,
expert, qui tous trois ont formé l’équipe de
rapporteurs et ont coordonné et synthétisé des travaux menés sur le terrain.
*
Avant de vous présenter les constats et recommandations de notre rapport, permettez-moi dans un
premier temps d’en rappeler le périmètre et la méthode.
Le thème de l’organisation des soins de premier recours est un sujet au cœur des préoccupations
des citoyens.
Il englobe l’enjeu de ce que l’on désigne parfois de « déserts médicaux », et il revêt, vous
le savez tout aussi bien que moi, une dimension absolument majeure pour notre démocratie et
l’organisation de notre Etat social.
Il n’y a pas de consensus sur le périmètre exact des soins de « premier recours » ; d’ailleurs, la
difficulté est la même si on préfère choisir une autre expression, comme « soins primaires », soins
de « première ligne » ou « soins de proximité ».
On comprend intuitivement la notion : les soins de
premier recours sont ceux qui constituent l’entrée dans un parcours de soins, ainsi que ceux apportés
ensuite par les professionnels de proximité pour le suivi des pathologies et la prévention.
Dans le code de la santé publique (CSP), les soins de premier recours sont définis de manière large.
Ils recouvrent les soins des médecins généralistes et de quelques spécialistes accessibles en accès
direct comme les gynécologues ou les ophtalmologues, les pharmaciens, les soins infirmiers et de
kinésithérapie, les soins dentaires ou ceux assurés par les orthophonistes ou les psychologues. Comme
la plupart des études internationales ou nationales, nous avons exclu de notre périmètre les services
d’urgence hospitaliers, et ce même s’ils constituent eux aussi souvent un premier point d’accès aux
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soins. Ils font d’ailleurs actuellement l’objet d’une enquête distincte.
D’autres nombreuses questions de périmètre se posent, les spécialistes de ces questions le savent
.
Par exemple, faut-il inclure parmi les professionnels de premier recours des non-soignants, au sens du
code de la santé, comme les diététiciens ou les psychologues ? Notre réponse, pragmatique, est qu’il
faut adopter une définition
fonctionnelle
des soins de premier recours, centrée sur les questions que
les décideurs publics et les acteurs professionnels veulent résoudre – quitte à ce que le périmètre soit
parfois à géométrie variable.
En retenant la définition des soins primaires préconisée par l’OCDE, centrée sur les soins courants
dispensés par les professionnels libéraux, donc hors structures hospitalières, on aboutit à des
dépenses qui représentent environ 13 % de la dépense de santé remboursée
. En outre, le soutien
public à cette partie de l’offre mobilise en France des aides pour un montant d’environ 1 Md € par an.
Les enjeux financiers sont donc significatifs.
Pourquoi avons-nous réalisé un important travail sur une notion si complexe ? Parce qu’elle est
incontournable
. Tous les organismes de référence, comme l’Organisation mondiale de la santé ou
l’OCDE, ont fait valoir dès la fin des années 1970 que l’organisation des soins primaire ou de premier
recours était déterminante pour l’efficacité et l’efficience d’un système de santé. La France s’est ralliée
à cette conception en 2009, avec la loi dite « Hôpital, Patients, santé, territoires ». Elle a confié aux
agences régionales de santé la mission « d’organiser les soins de premier recours ».
Quelques mots à présent sur la méthode qui a été adoptée pour l’instruction de ce rapport
. Face à
une notion stratégique mais difficile à saisir, nous avons retenu une approche fondée sur une analyse
par territoires. L’enquête est documentée par pas moins d’une cinquantaine de contrôles de terrain.
Ils ont été réalisés par la 6ème chambre de la Cour, mais aussi par neuf chambres régionales des
comptes et par la chambre territoriale de Nouvelle-Calédonie, réunies dans le cadre d’une formation
inter-juridictions
ad hoc
.
Une première étape de ce travail colossal avait conduit à la publication d’un chapitre, en mars 2023,
dans le rapport public annuel de la Cour, sur les interventions des collectivités territoriales en faveur
de l’accès aux soins de premier recours.
Depuis lors, nous avons poursuivi l’enquête, en lien avec
plusieurs chambres régionales et territoriales et en élargissant notre examen aux interventions des
ARS et de l’assurance maladie.
Les équipes de contrôle ont également interrogé les professionnels de santé, qui ont été réunis en
une dizaine « d’ateliers d’acteurs »
. Tant dans les départements ruraux comme la Dordogne ou
l’Aveyron, que dans des départements urbains comme la Loire atlantique ou Paris, nous avons été
frappés de constater l’acuité des problèmes, mais aussi l’engagement et l’inventivité des
professionnels pour y remédier, à la mesure de leurs moyens d’actions. A cet égard, je vous invite à
prendre connaissance des trois cahiers territoriaux qui sont publiés en même temps que le rapport
général.
*
J’en viens à présent aux trois principaux messages de notre rapport :
-
D’abord, l’accès aux soins de premier recours est de plus en plus contraint ;
-
Ensuite, les mesures successives qui ont été prises sont peu coordonnées et de moins en moins
orientées vers les territoires qui en ont le plus besoin ;
-
Enfin, la politique publique des soins de premiers recours doit être structurée, et orientée vers les
résultats attendus.
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Premier message : l’évolution de l’accès aux soins de premier recours est décevante, avec un
accès aux soins de plus en plus contraint.
En France comme dans l’ensemble des pays développés, les écarts se creusent entre la demande et
l’offre pour les soins de premier recours.
Du côté de l’offre de soins, la Cour relève la stagnation, voire la baisse récente du potentiel de temps
médical, en médecine générale
. Cela est dû à une modification des comportements des
professionnels, comme la diminution des créneaux de soins ouverts en soirée ou les week-ends. Cette
réduction de l’offre n’est pas véritablement compensée par la forte hausse de la démographie de
professionnels libéraux comme les infirmiers, les sages-femmes ou les kinésithérapeutes, en raison
d’un recours encore assez limité aux nouvelles formes de coopérations entre professionnels de santé.
La demande de soins, quant à elle, augmente – notamment en raison du poids croissant des
pathologies chroniques.
Ces dernières, comme le diabète
,
pèsent pour certaines fortement sur les
professionnels de premier recours. Elles conduisent en effet à augmenter le volume de soins dits «
programmés », qui correspondent à un suivi récurrent, préventif et curatif : ils représentent
aujourd’hui 70 % environ de la charge de travail des médecins généralistes. Du fait de la saturation
des agendas mais aussi de l’évolution des demandes, les patients rencontrent donc de plus en plus de
difficultés à trouver une réponse à leurs demandes de soins dits « non programmés ». Il reste
a fortiori
encore moins de temps pour les soins délivrés aux usagers qui n’expriment pas ou seulement
tardivement leur demandes de soins, et qui supposent donc un mouvement « d’aller-vers » les
patients les plus vulnérables ou précaires.
Plusieurs indicateurs quantitatifs traduisent ces tensions, et témoignent d’une dégradation
progressive de l’accès aux soins sur les vingt dernières années
. Les délais moyens pour obtenir des
rendez-vous avec les médecins s’allongent ; selon les données disponibles, même lacunaires, il est
passé de six à huit jours de 2018 à 2023. La part de médecins ne prenant plus de nouveaux patients
augmente, de même que la part de patients sans médecin traitant : elle est passée de 9,3 % en 2015
à 12,2 % en 2022.
Parmi les patients sans médecin traitant, la part des plus précaires bénéficiant de l’assurance
complémentaire santé solidaire, s’accroît aussi proportionnellement plus vite. Ces résultats décevants
rejaillissent sur les passages aux urgences, en forte augmentation, qui ont atteint 21 millions en 2019.
Au-delà de ces tensions, les inégalités dans la répartition géographique des professionnels sont
importantes et s’aggravent globalement
. Les analyses particulières relatives au département de
l’Aveyron ou de Nouvelle- Calédonie montrent l’ampleur des carences constatées dans certains
territoires, dans lesquels l’offre de soins de premier recours est parfois très faible, avec un
enclavement qui ne facilite pas les déplacements.
Par exemple, dans certains territoires, le taux de patients sans médecin traitant peut représenter
jusqu’à 25 %, soit deux fois plus que la moyenne nationale, et le taux de passages aux urgences sans
gravité particulière peut atteindre 40 %, comme dans les Ardennes en 2022
. Derrière ces données,
se profile le risque de relations parfois dégradées entre les professionnels de santé et les patients,
avec des abus, comme par exemple la multiplication de consultations limitées à un seul « motif ».
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(2)
J’en viens au deuxième message de ce rapport : les mesures mises en œuvre par les pouvoirs
publics pour améliorer l’accès aux soins de premier recours sont trop dispersées, et trop peu
ciblées.
Depuis une vingtaine d’années, divers plans, « pactes » ou mesures ambitieuses ont été déployées
pour mieux organiser les soins de premier recours, et notamment pour lutter contre les déserts
médicaux.
Les résultats décevants que j’évoquais il y a quelques instants apparaissent donc quelque
peu paradoxaux ; ils peuvent être expliqués par la trop grande dispersion des politiques
successivement engagées, qui ne sont ni intégrées ni pilotées.
Depuis les années 1990, l’accent a d’abord été mis sur le rôle de « pivot » donné aux médecins
généralistes « référents », puis « traitants ».
Des « réseaux de soins » ont été organisés pour faciliter
cette orientation et partager la charge du suivi des patients. Divers « pactes » ou « plans » ont ensuite
cherché à renforcer et à mieux orienter les aides versées aux professionnels de santé, pour favoriser
leur installation ou leur maintien dans des zones peu dotées en médecins.
À partir des années 2010, l’objectif a plutôt été de développer des structures de soins dites
« coordonnées » : maisons de santé pluriprofessionnelles ou centres de santé médicaux et
polyvalents
. Plus récemment ont été soutenues diverses formes nouvelles de coopérations entre
professions de santé. Des aides à l’optimisation, ou à « l’économie » du temps médical ont aussi été
déployées, avec par exemple les aides au recrutement d’assistants médicaux. En parallèle, des
missions d’appui aux professionnels libéraux de premier recours ont été confiées à des établissements
sanitaires.
Mais ces mesures sont restées dispersées.
La loi de juillet 2009 dite « hôpital, patients, santé,
territoires - HPST » avait posé le principe d’une responsabilité publique « d’organiser les soins de
premier recours », et elle avait confié aux agences régionales de santé la mission de sa mise en œuvre.
Mais les ARS n’ont pas disposé d’outils juridiques ou financiers suffisants pour bâtir une stratégie
d’ensemble.
La stratégie esquissée au niveau national repose sur les lois de janvier 2016 puis de juillet 2019, et
sur la stratégie nationale de santé pour les années 2017-2022
. Elle réaffirme le caractère
indispensable de la modernisation et de l’adaptation des soins de premier recours.
Cependant, cette stratégie a été peu traduite en objectifs opérationnels évaluables
. Les bilans
effectués décomptent le nombre de dispositifs déployés et s’intéressent parfois aux montants
mobilisés ; mais ils détaillent peu les difficultés rencontrées et ne rapprochent pas les résultats
obtenus des ambitions affichées. Le contraste est donc important entre l’ambition des mesures
annoncées et le « sentiment d’abandon » que peuvent connaître les habitants des territoires les plus
fragilisés.
Le faible ciblage, la multiplication de ces dispositifs et leur instabilité dans le temps rendent une
consolidation globale des résultats très difficile.
La pertinence de ces divers outils n’est pas garantie,
qu’il s’agisse des aides directes aux professionnels de santé, destinées à favoriser leur installation ou
leur maintien en zones fragiles, ou de celles visant à développer l’exercice coordonné entre
professionnels ou à économiser le temps médical. Les moyens financiers affectés à ces plans ne font
pas non plus l’objet de consolidation. On a toujours raisonné sur la base du nombre de
dispositifs déployés : nombre de réseaux de soins, nombre de communautés professionnelles
territoriales de santé ou d’assistants médicaux, etc. Mais l’apport réel de ces outils n’a que très peu
été mesuré. Dans l’ensemble, les aides apportées, même en hausse, se révèlent insuffisantes si l’on
en juge par leur faible impact.
Les mesures disponibles sont dans l’ensemble très décevantes, sauf
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pour ce qui concerne l’économie de temps médical permise par l’aide à l’emploi d’assistants
médicaux.
De surcroit, les nouvelles possibilités de coordination sont insuffisamment mises en pratique.
Nombre d’études comparatives montrent que les délégations de tâches du médecin vers d’autres
professionnels de santé sont moindres en France que dans les autres pays développés.
La conclusion de la Cour est simple : la méthode retenue depuis 2004, avec cette succession de plans
et de mesures, s’est révélée insuffisante.
Les difficultés ont augmenté partout, les inégalités
territoriales n’ont pas été réduites et ont même eu tendance à s’accentuer. En conséquence, la
situation de l’accès aux soins est devenue inacceptable dans de nombreux territoires.
*
J’en viens au troisième et dernier message de notre rapport : comment faire mieux ?
Les juridictions
financières proposent de mieux structurer la politique publique d’accès aux soins de premier recours,
selon les résultats attendus.
Nous proposons pour ce faire trois orientations : construire une politique publique intelligible, avec
une ligne directrice et une gouvernance claire ; mieux cibler les aides ; et réguler la demande en
élargissant le recours aux outils comme la télémédecine.
Pour formuler ses recommandations, la Cour s’est notamment appuyée sur les nombreuses
réussites locales identifiées au cours des enquêtes de terrain
. Dans le cahier territorial relatif à la
Communauté professionnelle territoriale de Châteaubriand, en Loire Atlantique, sont décrites des
initiatives de différentes communautés de communes, relayées par la Cpam et l’ARS, qui se révèlent
progressivement efficaces.
Le cahier territorial relatif à l’Aveyron présente un bilan plus contrasté : on note des modèles
d’organisation probants, par exemple sur le périmètre du plateau de l’Aubrac ; mais on note à l’inverse
des territoires où l’offre s’est réduite de manière alarmante. De même, le cahier relatif à la Nouvelle
Calédonie montre les risques engendrés par une reconnaissance insuffisante des enjeux particuliers
liés aux soins de premier recours, et par la difficulté des partenariats entre les différents niveaux de
collectivités.
La première orientation de la Cour est de construire une stratégie globale, intégrée, à la
gouvernance clarifiée au niveau local.
Il faut donner un cadre pour que les meilleures pratiques se
diffusent au niveau territorial, entre acteurs publics, ARS, Cpam, et collectivités territoriales. Pour que
l’ensemble de ces acteurs travaillent aux mêmes objectifs, nous préconisons d’inscrire dans les
schémas territoriaux de santé un objectif explicite de réduction des inégalités sociales et territoriales
de santé.
Pour les soins de premier recours, le bon échelon de mesure et de programmation des actions nous
paraît être le département, tandis que le bon échelon de réalisation est celui des communautés
professionnelles de santé (les CPTS).
Les acteurs privés que sont les CPTS, les maisons de santé
pluriprofessionnelles, éventuellement les équipes de soins primaires (ESP), qui sont appelées à se
développer, sont les opérateurs naturels de ces actions, proposées soit à leur initiative, soit en réponse
à des appels à manifestation d’intérêt.
Dans certains territoires, très carencés du point de vue de l’offre en soins de premier recours, il n’y
a pas ou plus d’opérateur privé capable de porter un projet médical de territoire
. Pour ces cas-là,
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nous proposons que soit amplifié le mouvement de création de centres de santé, portés par des
collectivités territoriales ou par des hôpitaux – des hôpitaux de proximité, bien entendu, mais relayés
et soutenus par leur Groupement hospitalier de territoire.
Cette gouvernance territoriale doit s’appuyer sur un suivi consolidé, au bon niveau, qui ne peut plus
être retardé
. La Cour recommande donc d’établir un suivi annuel de la politique d’amélioration de
l’accès aux soins de premier recours, placé sous le pilotage du secrétariat général des ministères
chargés des affaires sociales.
La deuxième orientation des préconisations de la Cour, consiste à mieux cibler les aides allouées par
les ARS et les Cpam
. Les aides doivent être réparties de manière plus sélective sur les territoires les
plus en difficulté, notamment pour ce qui concerne les aides à l’emploi d’assistants médicaux ou
l’implantation d’infirmiers de santé publique. Les aides aux Communautés professionnelles
territoriales de santé ou aux équipes de soins primaires devraient par exemple être conditionnées par
des protocoles engageant au déploiement de coopérations entre professionnels de santé. Pour parler
plus simplement,
il s’agit de partager plus efficacement et de manière plus efficiente la charge des
soins entre médecins généralistes et infirmiers ou autres professionnels médicaux et paramédicaux
(comme les sages-femmes ou les kinésithérapeutes). L’objectif recherché est la constitution d’un
esprit d’équipe, autour du médecin généraliste, sans exclure toutefois la reconnaissance d’actes
autonomes des autres professionnels.
Les efforts doivent aussi être recentrés sur les dispositifs qui permettent les gains de temps médical.
Il faut poursuivre et amplifier les mesures destinées à économiser le temps médical, en réduisant les
tâches administratives des médecins. Nous nous posons à cet égard la question de l’utilité d’un
certificat médical, pour des arrêts maladie de très courte durée.
Pour améliorer l’offre de soins, notre rapport revient également sur une orientation déjà exprimée
par la Cour pour ce qui concerne le « conventionnement sélectif ».
Nous connaissons la sensibilité
du sujet et sa difficulté politique et pratique. Dans le cadre de ce rapport, et avec l’objectif de réduire
les écarts de potentiel médical entre les territoires, nous préconisons une forme particulière de
conventionnement, fondée sur le déploiement de cabinets secondaires, soutenus par les collectivités
territoriales. L’installation en zones sur-denses, pour les professionnels libéraux généralistes et des
autres spécialités, serait conditionnée, pour les nouveaux entrants en troisième cycle, par un
engagement d’exercice partiel en zone sous-dense. La proximité géographique très générale entre
zones sur-denses et zones sous-denses, que nous illustrons en annexe au rapport, rend cette voie
praticable, même si ses modalités devraient encore être détaillées de manière plus fine.
La Cour préconise également d’étendre aux médecins hospitaliers, exerçant dans des centres de
santé hospitaliers, la possibilité de percevoir une rémunération partiellement indexée sur leur
activité.
Il faudrait bien sûr qu’un tel dispositif soit déployé dans des conditions juridiques sécurisées.
Enfin, s’agissant de la télémédecine, la Cour relève qu’elle devrait être mieux liée à un objectif de
meilleur accès aux soins
. Si cet outil a pu apparaître comme une « solution magique », en réalité la
télémédecine a plutôt conduit à creuser les inégalités. Faire de la télémédecine un outil de réduction
des inégalités territoriales et sociales de santé suppose donc un effort pour en soutenir plus fortement
l’usage, dans les territoires sous-dotés.
Comme vous le voyez, les recommandations qui accompagnent notre rapport, et que vous trouverez
étayées en annexes, sont diverses.
Seraient-elles suffisantes pour introduire l’indispensable rupture
dans les tendances actuelles, vers toujours plus d’inégalités entre les territoires et toujours plus de
difficultés dans l’accès aux soins de premier recours ?
Ce n’est pas certain, et d’ailleurs, je reconnais
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que d’autres aspects ici non traités ont toute leur importance. Je pense par exemple aux les enjeux de
formation des diverses catégories de professionnels.
Mais le point décisif, que toutes ces recommandations visent à illustrer, est qu’il convient d’ériger
l’organisation des soins de premier recours en véritable politique publique, placée « sous tension
de résultats ».
Dit autrement, on ne doit plus se soucier du nombre de dispositifs déployés ou
financés, mais de leur effet sur la résolution des difficultés concrètes rencontrées par les patients et
usagers.
Mesdames, messieurs, je vous remercie pour votre attention
. Je me tiens à votre disposition, ainsi
que l’équipe qui a instruit ce rapport et que je remercie à nouveau pour cet immense travail, pour
répondre à vos questions.