Les enseignements
des inondations de
2010 sur le littoral
atlantique (Xynthia)
et dans le Var
Rapport public thématique
SOMMAIRE
DELIBERE
.......................................................................
9
INTRODUCTION
............................................................
11
CHAPITRE I DEUX CATASTROPHES MAJEURES
METTANT EN CAUSE L’ACTION PUBLIQUE
..............
13
A - Un bilan humain dramatique
..............................................................
13
B - Des coûts très élevés
..........................................................................
17
C - Des risques accrus et pourtant oubliés
................................................
19
D - Les mesures prises depuis ces événements
........................................
23
CHAPITRE II LES SYSTEMES D'ALERTE ET DE
SECOURS : DES PROGRES A POURSUIVRE
............
27
I
- Les systèmes d’alerte
.............................................................................
27
A - Des améliorations notables des prévisions météorologiques et sur les
crues
.........................................................................................................
27
B - Des dispositifs d’alerte encore à améliorer
........................................
32
II
- L’organisation des secours
..................................................................
38
A - Une planification à compléter et à actualiser
.....................................
38
B - Les secours : une utilisation et une coordination à améliorer
.............
43
C - L’inadaptation de certains équipements
.............................................
45
CHAPITRE III LA PREVENTION : DES INSUFFISANCES
PERSISTANTES EN MATIERE D’URBANISME
...........
51
I
- De fâcheuses pratiques pour les décisions de construire
....................
51
II
- L’information défaillante sur les risques
...........................................
62
A - Les documents d’information sur les risques
.....................................
62
B - L’information des acquéreurs et locataires (IAL)
..............................
68
III
- Les plans de prévention des risques inondation
..............................
70
A - Les aléas de l’élaboration des plans de prévention des risques
inondation
.................................................................................................
71
B - Les constats et les évolutions intervenues
..........................................
85
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4
COUR DES COMPTES
IV
- Les documents d’urbanisme
..............................................................
90
A - Des documents souvent obsolètes
......................................................
90
B - Un défaut d’initiative pour établir de nouveaux documents
...............
91
V
- Le contrôle de légalité
..........................................................................
92
A - Les directives nationales
....................................................................
92
B - La pratique : un contrôle insuffisant
...................................................
93
C - L’influence de la jurisprudence administrative sur le contrôle
..........
96
CHAPITRE IV LA PROTECTION DES ZONES BATIES :
UNE COHERENCE DEFAILLANTE
..............................
99
I
- L’inadaptation de certains équipements publics de bord de mer et de
rivière
.........................................................................................................
100
A - Les biens immobiliers publics
..........................................................
100
B - Les terrains de camping
....................................................................
101
II
- Les zones à risque élevé : le rachat du bâti
......................................
103
A - Les zones de solidarité après Xynthia
..............................................
104
B - La méthode différente suivie après les inondations du Var
..............
114
C - Le financement des rachats de biens immobiliers
............................
115
D - La nécessaire définition d’une politique pour les biens immobiliers
exposés à de graves dangers
...................................................................
117
III
- Les ouvrages et les travaux de protection
......................................
121
A - La difficile identification des responsables
......................................
121
B - Le mauvais entretien des digues et des rivières
................................
127
C - L’action conduite depuis les catastrophes
........................................
136
D - La question non réglée de la gouvernance des digues
......................
140
IV
- Le rôle incitatif du régime d’assurance des catastrophes naturelles
....................................................................................................................
143
CHAPITRE V LES INDEMNISATIONS : TRES
COMPLETES MAIS AVEC DES INCOHERENCES
....
145
I
- Les indemnités des assurances
...........................................................
145
II
- Les dons, l’aide et l’indemnisation des particuliers
........................
147
A - Les dons reçus
..................................................................................
147
B - L’aide directe aux victimes
..............................................................
148
C - Les remises et les exonérations fiscales
...........................................
151
D - Les dépenses pour le rachat des biens immobiliers
..........................
152
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SOMMAIRE
5
III
- L’indemnisation des agriculteurs
...................................................
160
A - Le dispositif d’aide
..........................................................................
160
B - Les problèmes d’application de certains dispositifs
.........................
162
IV
- L’aide aux autres acteurs économiques
..........................................
163
A - L’indemnisation des activités économiques
.....................................
163
B - Le rachat par l’Etat des biens à usage professionnel en zone de
solidarité
.................................................................................................
164
V
- Le bilan financier pour les collectivités locales
................................
169
A - Les conséquences financières pour les communes et les départements
................................................................................................................
169
B - L’indemnisation des collectivités locales par l’Etat
.........................
170
CONCLUSION
.............................................................
175
RECAPITULATION DES RECOMMANDATIONS
.......
177
LISTE DES SIGLES
.....................................................
181
RÉPONSES DES ADMINISTRATIONS, DES
ORGANISMES ET DES COLLECTIVITES CONCERNES
.....................................................................................
187
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Les rapports publics de la Cour des comptes
- élaboration et publication -
La Cour publie, chaque année, un rapport public annuel et des
rapports publics thématiques.
Le présent rapport est un rapport public thématique.
Les rapports publics de la Cour s’appuient sur les contrôles et les
enquêtes conduits par la Cour des comptes ou les chambres régionales des
comptes et, pour certains, conjointement entre la Cour et les chambres
régionales ou entre les chambres. En tant que de besoin, il est fait appel au
concours d’experts extérieurs, et des consultations et des auditions sont
organisées pour bénéficier d’éclairages larges et variés.
Au sein de la Cour, ces travaux et leurs suites, notamment la
préparation des projets de texte destinés à un rapport public, sont réalisés par
l’une des sept chambres que comprend la Cour ou par une formation
associant plusieurs chambres.
Trois principes fondamentaux gouvernent l’organisation et l’activité
de la Cour des comptes, ainsi que des chambres régionales des comptes, et
donc aussi bien l’exécution de leurs contrôles et enquêtes que l’élaboration
des rapports publics : l’indépendance, la contradiction et la collégialité.
L
’
indépendance
institutionnelle
des
juridictions
financières
et
statutaire de leurs membres garantit que les contrôles effectués et les
conclusions tirées le sont en toute liberté d’appréciation.
La
contradiction
implique que toutes les constatations et appréciations
ressortant d’un contrôle ou d’une enquête, de même que toutes les
observations et recommandations formulées ensuite, sont systématiquement
soumises aux responsables des administrations ou organismes concernés ;
elles ne peuvent être rendues définitives qu’après prise en compte des
réponses reçues et, s’il y a lieu, après audition des responsables concernés.
La publication dans un rapport public est nécessairement précédée par
la communication du projet de texte que la Cour se propose de publier aux
ministres et aux responsables des organismes concernés, ainsi qu’aux autres
personnes morales ou physiques directement intéressées. Dans le rapport
publié, leurs réponses accompagnent toujours le texte de la Cour.
La
collégialité
intervient pour conclure les principales étapes des
procédures de contrôle et de publication.
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COUR DES COMPTES
Tout contrôle ou enquête est confié à un ou plusieurs rapporteurs.
Leur rapport d’instruction, comme leurs projets ultérieurs d’observations et
de recommandations, provisoires et définitives, sont examinés et délibérés de
façon collégiale, par une chambre ou une autre formation comprenant au
moins trois magistrats, dont l’un assure le rôle de contre-rapporteur, chargé
notamment de veiller à la qualité des contrôles. Il en va de même pour les
projets de rapport public.
Le contenu des projets de rapport public est défini, et leur élaboration
est suivie, par le comité du rapport public et des programmes, constitué du
premier président, du procureur général et des présidents de chambre de la
Cour, dont l’un exerce la fonction de rapporteur général.
Enfin, les projets de rapport public sont soumis, pour adoption, à la
chambre du conseil où siègent en formation plénière ou ordinaire, sous la
présidence du premier président et en présence du procureur général, les
présidents de chambre de la Cour, les conseillers maîtres et les conseillers
maîtres en service extraordinaire.
Ne prennent pas part aux délibérations des formations collégiales,
quelles qu’elles soient, les magistrats tenus de s’abstenir en raison des
fonctions qu’ils exercent ou ont exercées, ou pour tout autre motif
déontologique.
*
Les rapports publics de la Cour des comptes sont accessibles en ligne
sur le site Internet de la Cour des comptes et des chambres régionales et
territoriales des comptes :
www.ccomptes.fr
. Ils sont diffusés par
La
documentation Française
.
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Délibéré
La Cour des comptes, délibérant en chambre du conseil réunie en
formation ordinaire, a adopté le présent rapport sur « Les enseignements
des inondations de 2010 sur le littoral atlantique (Xynthia)
et dans le
Var ».
Le rapport a été arrêté au vu du projet communiqué au préalable
aux administrations, collectivités et organismes concernés et des réponses
adressées en retour à la Cour.
Les réponses sont publiées à la suite du rapport. Elles engagent la
seule responsabilité de leurs auteurs.
Ont
participé
au
délibéré :
M. Migaud,
Premier
président,
MM. Descheemaeker,
Bayle,
Bertrand,
Mme
Froment-Meurice,
MM. Durrleman,
Lévy,
Lefas,
Briet,
présidents
de
chambre,
MM. Pichon, Babusiaux, Hespel, présidents de chambre maintenus en
activité, MM. Richard, Cardon, Thérond, Mme Lévy-Rosenwald,
MM. Duchadeuil, Paul, Lebuy, Brun-Buisson, Lafaure, Frangialli,
Mmes Dayries, Lamarque, M. Phéline, Mme Ratte, MM.
Gautier (Jean),
Vermeulen, Mme Malégat-Mély, MM. Guédon, Bourlanges, Baccou,
Chouvet, Mme Démier, MM. Le Mer, de la Guéronnière, Vallernaud,
Jamet, Ecalle, Ortiz, Cotis, conseillers maîtres.
A assisté et participé aux débats, sans prendre part au délibéré,
M. Bénard, Procureur général. Il était accompagné de M. Miller, avocat
général.
A été entendu en son rapport, M. Bertrand, rapporteur général,
assisté de M. Guibert, conseiller maître, et de M. Schott, conseiller maître
en service extraordinaire.
***
M. Terrien, secrétaire général, assurait le secrétariat de la chambre
du conseil.
Fait à la Cour, le 3 juillet 2012
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10
COUR DES COMPTES
Le projet de rapport soumis à la chambre du conseil a été préparé,
puis délibéré le 16 avril 2012, par une formation interjuridictions présidée
par M. Bayle, président de la quatrième chambre, et composée de
M. Ganser, Mme Malgorn, conseillers maîtres, Mmes Lamarque, de
Kersauson (jusqu’au 12 février 2012), M. Vallernaud (à compter du 13
février 2012), conseillers maîtres, présidents de chambre régionale des
comptes, M. Meunier, vice-président de chambre régionale des comptes,
ainsi que, en tant que rapporteurs, MM. Guibert, conseiller maître, Schott,
conseiller maître en service extraordinaire, Sansoucy, Tisserand, La
Marle, premiers conseillers de chambre régionale des comptes, et en tant
que contre-rapporteur, M. Lebuy, conseiller maître.
Le projet de rapport a été examiné et approuvé, le 25 avril 2012,
par le comité du rapport public et des programmes de la Cour des
comptes, composé de MM. Migaud, Premier président, Bénard, Procureur
général,
Descheemaeker, Bayle, Bertrand, rapporteur général du comité,
Mme Froment-Meurice, MM. Durrleman, Levy, Lefas et Briet, présidents
de chambre.
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Introduction
Le dramatique bilan des inondations provoquées, successivement,
en février 2010 sur la côte atlantique par la tempête Xynthia, puis en juin
2010 dans le Var par des précipitations exceptionnelles, a durablement
marqué les esprits. Il a suscité des mises en cause de l’action publique,
notamment quant à sa capacité à prévenir et à gérer ce type de
catastrophe.
C’est pourquoi la Cour des comptes et les trois chambres
régionales des comptes des Pays de la Loire, de Poitou-Charentes
1
et de
Provence-Alpes-Côte d’Azur ont conduit en 2011, dans le cadre d’une
formation interjuridictions,
un ensemble de contrôles destinés à en tirer
les enseignements.
Outre les administrations centrales et les préfectures impliquées
(de Vendée, de Charente-Maritime et du Var), l’enquête a concerné des
organismes nationaux (Météo-France, la Caisse centrale de réassurance),
les régions, les départements, les services départementaux d’incendie et
de secours et plusieurs communes et organismes intercommunaux
2
.
Au regard des divers retours d’expérience effectués après ces
crises, l’enquête de la Cour et des chambres régionales des comptes
présente une triple originalité :
-
elle fait un point précis sur l’historique et la situation de
plusieurs dossiers qui ont fait l’objet de polémiques après les
inondations ou ont joué un rôle décisif
dans l’ampleur des
dégâts ;
-
elle recense le plus complètement possible le coût de ces crises,
travail complexe compte tenu de la multiplicité des intervenants
et des procédures ;
1
Depuis avril 2010, chambre régionale des comptes Aquitaine, Poitou-Charentes.
2
Pour la Vendée, les communes de L’Aiguillon-sur-Mer, La Faute-sur-Mer et
La Tranche-sur-Mer, le syndicat mixte du marais poitevin, bassins de la Vendée et de
la Sèvre et des Autizes, et les associations syndicales de la vallée du Lay (ASVL) et
des Marais de La Faute
(ASMF) ; pour la Charente-Maritime, les communes de
Charron, Fouras et Port des Barques, et le syndicat mixte pour la mise en valeur des
marais de Charente-Maritime (UNIMA) ; pour le Var, la commune de Draguignan, la
communauté d’agglomération dracénoise (CAD), la commune de Fréjus et le syndicat
intercommunal d’aménagement de la Nartuby (SIAN).
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12
COUR DES COMPTES
-
elle examine, outre la gestion de ces catastrophes, la réalité des
leçons qui en ont été tirées.
Un tel bilan après deux ans n’avait pas été effectué jusqu’à
présent, et il l’est trop rarement dans ce genre de crises, en dépit des
riches enseignements qu’il permet le plus souvent.
Il ne s’est évidemment pas agi, pour cette enquête, de refaire tout
le travail important de retour d’expérience déjà réalisé par de nombreux
organismes, mais de dresser un tableau d’ensemble des enseignements à
tirer de ces crises, à partir notamment d’un examen détaillé des coûts
qu’elles ont occasionnés et des mesures prises depuis.
Le rapport examine successivement :
-
la place de la gestion publique des risques dans les deux
évènements (chapitre I) ;
-
les systèmes d'alerte et de secours (chapitre II) ;
-
la prévention en matière d’urbanisme (chapitre III) ;
-
la gestion du bâti dans les zones à risque (chapitre IV) ;
-
le système d’indemnisation (chapitre V).
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Chapitre I
Deux catastrophes majeures mettant en
cause l’action publique
Ces deux catastrophes ont abouti à un bilan humain dramatique et
à un coût financier lourd.
L’action publique a appelé de sérieuses critiques. La mémoire des
catastrophes anciennes a été perdue, face à des risques pourtant aggravés.
Pour éviter le renouvellement de ces défaillances, il est essentiel
que les diverses mesures prises depuis soient fortes, cohérentes et,
surtout, pérennes.
A - Un bilan humain dramatique
La tempête Xynthia, qui a atteint les côtes françaises dans la nuit
du 27 au 28 février 2010, a eu un impact dévastateur car elle a entraîné
une submersion marine brutale et étendue. Le caractère singulier de cet
évènement est dû à la concomitance d’une forte dépression, avec des
rafales de vent très violentes mais inférieures à celles enregistrées lors de
la tempête de 1999, et d’un fort coefficient de marée (102)
3
. Cette
conjugaison a provoqué une surcote (hausse du niveau des eaux)
3
Coefficient de marées : mesure de l’ampleur de la marée par rapport à sa valeur
moyenne.
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14
COUR DES COMPTES
importante et des phénomènes de submersion rares
4
, notamment sur les
côtes de la Vendée et de la Charente-Maritime, où la quasi-totalité du
littoral a été touchée.
Le bilan humain a été lourd. La Vendée a connu 29 morts
(concentrés sur La Faute-sur-Mer), 47 blessés légers, 767 personnes
évacuées, 33 hospitalisées. La Charente-Maritime a enregistré 12 décès
(trois à Charron, un à Esnandes, deux à La Flotte-en-Ré, trois à Aytré,
deux à Châtelaillon et un à Saint-Georges d’Oléron). La localisation des
communes concernées et des décès figure dans la première carte ci-après.
Les inondations qui ont frappé le Var le 15 juin 2010 à partir de
16 heures ont eu pour origine des précipitations exceptionnelles (397 mm
de cumul de précipitations en cinq heures sur le pluviographe des Arcs).
Elles sont intervenues, soit par ruissellement, soit par débordement des
cours d’eau et ont essentiellement affecté la région de Draguignan et les
vallées de la Nartuby et de l’Argens. Leur ampleur a été accentuée par
des phénomènes karstiques
5
en amont de Draguignan. Cette crue,
résultant d’averses très fortes et localisées dont les caractéristiques sont
bien connues sur l’espace méditerranéen, constitue un évènement rare par
son intensité et pourrait être qualifiée de centennale
6
, ce qui n’exclut pas
qu’elle se répète à brève échéance.
23 personnes ont perdu la vie, dont neuf à Draguignan, et deux ont
été portées disparues. La localisation des communes concernées et des
décès figure dans la deuxième carte ci-après.
4
Les submersions marines sont des inondations temporaires de la zone côtière par des
eaux d’origine marine lors d’évènements météorologiques (forte dépression et vent de
mer) et océanographiques (houles, marée) d’ampleur très inhabituelle.
5
Dissolution de calcaires aboutissant à la création de cavernes, de grottes et de
syphons et pouvant entraîner des résurgences d’eau souterraine.
6
Crue dont la probabilité de survenance sur une année est de 1 sur 100 en termes de
débit. Elle ne se produit donc pas nécessairement tous les cent ans.
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DEUX CATASTROPHES MAJEURES METTANT EN CAUSE L’ACTION
PUBLIQUE
15
Source : SDIS de Charente-Maritime, août 2010 (carte retravaillée pour la Cour par Hélène
Lecoq)
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16
COUR DES COMPTES
23 décès et 2 disparitions totalisés sur une carte communiquée à la Cour par la gendarmerie nationale après accord
du procureur
de la République de Draguignan
Source : carte fournie par la direction départementale des territoires et de la mer
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DES CATASTROPHES MAJEURES METTANT EN CAUSE L’ACTION
PUBLIQUE
17
B - Des coûts très élevés
Outre les conséquences humaines dramatiques, les inondations
dues à la tempête Xynthia et celles du Var ont entraîné des coûts élevés,
que la Cour et les chambres régionales ont recensés de la manière la plus
complète possible
7
.
Les dégâts matériels ont été très importants : 75 km de digues
endommagées,
160
exploitations
agricoles
inondées
en
Vendée,
4 800 habitations inondées, 120 km de côtes endommagées, 40 km de
voies départementales inondées et des dégâts importants sur la voie ferrée
La Rochelle - Rochefort en Charente-Maritime, un millier d’habitations
ou d’immeubles provisoirement ou définitivement déclaré inhabitable
dans le Var.
En matière économique, l’impact, réel mais relativement ponctuel,
de Xynthia porte essentiellement sur le tourisme (recul d’un peu plus de
10 % en 2010 dans les deux communes les plus inondées du Sud
Vendée), l’agriculture (pertes évaluées pour 2010 à 35 M€ dans le marais
poitevin), et, dans une moindre mesure, le commerce. Dans le Var, les
conséquences
économiques
ont
été
initialement
plus
fortes,
1 125 entreprises ou commerces de la communauté d’agglomération de
Draguignan ayant été sinistrés. Presque tous (98 %) avaient cependant
repris une activité économique moins de 7 mois après les inondations.
Les coûts financiers directs sont de deux catégories : d’une part, les
crédits publics, d’autre part les indemnités d’assurance. L’ensemble des
contribuables français finance les crédits publics engagés par l’Etat et la
quasi-totalité
de
nos
concitoyens
contribue
au
financement
des
indemnités d’assurance à travers
la prime « catastrophe-naturelle »
(régime dit des catastrophes naturelles
8
) et les tarifs d’assurance. Les
assurances ont ainsi procédé en 2011 à une hausse de leurs tarifs, de
2,5 % à 4,5 % pour la garantie automobile et de 4,4 % à 9
% pour celle
des habitations, dont l’origine est en partie due à la part résiduelle à leur
7
Tous les coûts se rapportent pour la tempête Xynthia aux communes victimes des
inondations sur le littoral, mais excluent les dégâts dus au vent à l’intérieur des terres.
8
Le régime d’assurance pour les catastrophes naturelles (dit « Cat-Nat ») est fondé
sur un système de réassurance géré par la Caisse centrale de réassurance (CCR) avec
la garantie de l’Etat. Les surprimes sont à un taux unique fixé par arrêté, valable pour
tous les assurés et appliqué au montant de la prime d’assurance dommages aux biens
(12 % des primes afférentes aux contrats de base pour les habitations et 6 % des
primes
vol et incendie
pour les véhicules terrestres à moteur).
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18
COUR DES COMPTES
charge dans le cadre du régime dit catastrophes naturelles pour les
inondations.
S’agissant des crédits publics, le total des dépenses publiques
nettes payées en 2010 et 2011 ou devant l’être en 2012
9
, s’élève pour les
inondations Xynthia à 141,3 M€ (82,9 M€ pour le budget de l’Etat,
3,7 M€ de dépenses fiscales sur les dons reçus
10
et 54,7 M€ pour les
collectivités locales
11
). Pour les inondations du Var, elles se montent à
58,7 M€ (34,1 M€ pour le budget de l’Etat et de la sécurité sociale,
0,7 M€ de dépenses fiscales sur les dons reçus et 23,9 M€ pour les
collectivités locales).
Si on ajoute les dépenses liées au rachat de maisons par le fonds
de prévention des risques naturels majeurs
12
(FPRNM), à hauteur de
315,7 M€ de crédits délégués fin juin 2012 pour les inondations Xynthia
13
et de 12,3 M€ pour les inondations du Var
14
, et celles à venir pour les
équipements obligatoirement à reconstruire dans le Var (particulièrement
la maison d’arrêt de Draguignan pour 93 M€ et la route de Chateaudouble
pour 37 M€), les dépenses publiques totales nettes s’élèvent à 457 M€
pour Xynthia et 201 M€ pour les inondations du Var.
Les crédits européens
15
se sont montés pour Xynthia à 40,6 M€
(dont 38,6 M€ dépensés à la fin de 2011). Dans le Var, l’ampleur et
l’étendue géographique de la crise ne se sont pas révélées suffisantes pour
bénéficier d’une aide d’urgence spécifique dans le cadre des procédures
européennes
16
.
S’agissant des indemnités d’assurance, dont une partie est adossée
à une garantie publique dans le cadre du régime des catastrophes
naturelles, elles s’élèvent à 690 M€ pour les inondations Xynthia et à
9
Subventions de l’Union européenne non déduites, dépenses dans le cadre du fonds
Barnier liées aux rachats de maison non incluses.
10
Dépense liée à la déduction fiscale de 66 % prévue aux articles 200 et 238bis du
code général des impôts.
11
Régions, départements, et communes du Sud-Vendée et du littoral charentais. Il
s’agit des dépenses nettes (dépenses moins dons perçus, indemnités d’assurance,
subventions hors celles provenant de l’Union européenne).
12
Ce fonds, appelé couramment
Fonds Barnier,
est alimenté par un prélèvement
de 12 % sur le montant des primes du régime catastrophes naturelles, et est
destiné à financer des actions de prévention.
13
298,3 M€ de dépenses fin juin 2012.
14
5 M€ de dépenses fin juin 2012.
15
Versés au titre du fonds de solidarité de l’union européenne (FSUE) et du fonds
européen de développement régional (FEDER).
16
La seule subvention, d’importance marginale, provient du fonds européen agricole
pour le développement rural (FEADER, 0,19 M€).
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19
615 M€
17
pour celles du Var. Sur ces sommes, la Caisse centrale de
réassurance a payé respectivement 360 M€ pour les inondations Xynthia
et 280 M€ pour le Var, soit au total 640 M€, le reste étant pris en charge
par les entreprises d’assurance et leurs éventuels autres réassureurs.
Les provisions du régime catastrophes naturelles ont certes permis
au budget de l’Etat de ne pas être mis directement à contribution.
Toutefois, pour la première fois depuis plusieurs années, le seuil
d’intervention de l’Etat
18
a baissé au début de 2011 par rapport au début
de 2010. Les provisions restent substantielles (3,1 Md€ au début de
2012), mais, à elles seules, elles permettraient difficilement de faire face à
un événement très exceptionnel
19
sans une contribution du budget de
l’Etat.
Les coûts de ce type de catastrophe sont importants et répercutés
très largement sur l’ensemble de nos concitoyens. Dans un contexte
d’accroissement probable, dans les prochaines années, du nombre et de la
gravité des phénomènes naturels exceptionnels, leur maîtrise constitue
donc un vrai enjeu.
C - Des risques accrus et pourtant oubliés
1 -
Le changement de la nature du risque dans ces régions
Que ce soit dans le Var ou sur la façade atlantique, la démographie
et l’urbanisation de ces dernières décennies ont profondément modifié le
contexte et l’impact de tels événements météorologiques exceptionnels.
La pression démographique s’exerce fortement sur les zones littorales et
dans la partie la plus méridionale du pays. La saison touristique entraîne
un afflux considérable de population sur des territoires aux capacités
limitées. Il existe dans ces régions une véritable « soif » de construire,
entretenue par les propriétaires et les promoteurs et relayée par les élus
locaux.
Ces territoires sont pourtant particulièrement vulnérables.
17
Estimations de la Caisse centrale de réassurance. Pour un chiffre global pour les
inondations Xynthia, il faut ajouter les indemnités liées au vent (652,5 M€)
correspondant au risque tempête à la charge exclusive des assureurs.
18
Montant au-delà duquel le budget de l’Etat devrait être mis à contribution.
19
Le coût potentiel d’une inondation centennale en région parisienne est évalué entre
4 et 6 Md€, dont une charge pour la Caisse centrale de réassurance comprise entre 2,5
et 3,1 Md€. Une inondation deux-centennale (inondation dont la probabilité
d’apparition sur une année est de 1/200 en termes de débit) conduirait à des
dommages assurés de plus de 11 Md€.
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20
COUR DES COMPTES
Les côtes du littoral atlantique, longues de 276 km en Vendée et de
463 km en Charente-Maritime avec les îles (Ré, Oléron, Aix et Madame),
sont constituées d’un vaste cordon dunaire naturel, dont l’Etat est le
principal propriétaire, de côtes endiguées et de plusieurs estuaires. De
façon générale, le relief très plat favorise la présence de nombreux
marais.
Sur
ce
littoral,
particulièrement
en
Vendée,
la
poussée
multiséculaire de la terre au détriment de l’océan a accru cette
vulnérabilité. Il est significatif à ce sujet que la carte des zones
submergées par la tempête Xynthia recouvre quasiment à l’identique celle
des espaces soumis aux flots marins à l’embouchure de la Sèvre Niortaise
au 2
ème
siècle avant Jésus-Christ.
Dans le Var, le fleuve côtier Argens (114 km de longueur,
2 700 km
2
de bassin versant) traverse 21 communes pour se jeter dans la
Méditerranée à Fréjus. Il a toujours été sujet à de grandes crues formant
des marécages, qui ont constitué au fil du temps la plaine alluviale de la
basse vallée, autour de Fréjus. La Nartuby prend sa source à 800 mètres
d’altitude sur le plateau de Canjuers. Longue de 35 km, elle se jette dans
l’Argens à hauteur du Muy. Son bassin versant est d’environ 200 km
2
.
Elle traverse Draguignan où elle a provoqué d’importants dégâts, son
débit élevé se conjuguant aux eaux de ruissellement provenant du
Malmont, qui culmine à 550 mètres au nord-ouest de la ville.
La basse vallée de l’Argens, qui s’étend de Roquebrune-sur-
Argens à Fréjus sur le littoral méditerranéen, forme une plaine fertile,
siège de nombreuses exploitations spécialisées dans le maraîchage. Elle a
été dévastée par les inondations du 16 juin 2010.
2 -
Un urbanisme soumis à la pression démographique
Dans la conception originelle des polders sud-vendéens, les
villages étaient en retrait du littoral atlantique, parfois sur de légères
éminences, de même que les habitations dispersées, assez rares. Ce n’est
plus le cas aujourd’hui, avec une modification de l’affectation des terres
toujours dans le même sens d’une urbanisation au plus près des côtes et la
construction d’habitations dans des zones basses, autrefois laissées à
l’état naturel ou réservées à l’agriculture.
L’exemple de La Faute-sur-Mer est significatif. Sur cet étroit
territoire
20
de 7 km
2
, serré entre le littoral et la rive droite du Lay, existait
20
Cette presqu’île, apparue au 18
ème
siècle, constitue une bande de terre entre l’océan
à l’ouest et l’estuaire du Lay à l’est d’une longueur de 10 km et dont la largeur ne
varie qu’entre 0,5 km et 2 km.
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PUBLIQUE
21
un hameau, peuplé de 151 habitants en 1929. Ayant obtenu le statut de
commune
en
décembre
1953,
notamment
pour
accélérer
le
développement de la station littorale, La Faute-sur-Mer comptait 693
habitants permanents en 1982 et 1 035 en 2008 (+ 49 %), mais atteint
20 000 résidents en été (pour une fréquentation estivale totale de
40 000 personnes). L’urbanisation a fortement progressé à partir des
années 1970 et surtout du milieu des années 1980, sous la forme de
lotissements composés de maisons individuelles de plain-pied. Le parc
immobilier comptait 1 342 résidences en 1975 et 2 822 en 2009, soit plus
qu’un doublement en trente-quatre ans. Les résidences secondaires
constituent les quatre cinquièmes de ce parc.
En ajoutant les deux autres communes de L’Aiguillon-sur-Mer
(2 152 habitants en 1982, 2 303 en 2008, soit + 7 %) et de La Tranche-
sur-Mer (2 071 habitants en 1982, 2 702 en 2008 soit + 30 %), le secteur
a vu sa population totale croître de 22 % en un peu plus d’un quart de
siècle et connait une fréquentation estivale de 150 000 personnes.
Parallèlement, la population résidente comporte davantage de personnes
âgées (par exemple
58 % de retraités à L’Aiguillon-sur-Mer en 2007
contre 45 % en 1999), plus vulnérables en cas de catastrophe naturelle.
En Charente-Maritime, la population, de 513 220 habitants en
1982, s’élève à 623 201 habitants aujourd’hui, soit une croissance de plus
de 21 %. En été, cette population double quasiment, pour avoisiner le
million de personnes.
Le Var a connu une évolution démographique plus marquée
encore : 708 331 habitants en 1982, 1 013 458 désormais (+ 43 %). Là
aussi, la population double en été, pour dépasser 2 millions de personnes.
A Draguignan, le nombre d’habitants croît d’environ 1 000 par an. Depuis
plusieurs années, une majorité des nouveaux arrivants a souhaité
s’installer au pied du Malmont dans un quartier résidentiel orienté au sud.
C’est de là qu’est partie la majorité des eaux de ruissellement qui ont
inondé plusieurs quartiers de la ville.
Le risque de submersion marine, essentiellement agricole jusqu’au
milieu du XX
e
siècle, est ainsi progressivement devenu urbain depuis les
années 1980. Il en va de même pour le risque d’inondations dans les
zones méditerranéennes.
3 -
Une mémoire défaillante et une culture du risque très
insuffisante
Loin d’être des phénomènes exceptionnels et non prévisibles, la
submersion marine liée à la tempête Xynthia et les inondations du Var
traduisent plutôt un oubli de catastrophes anciennes.
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22
COUR DES COMPTES
Sur le littoral Sud de la Vendée, cinq tempêtes survenues au cours
du XX
ème
siècle ont occasionné des submersions marines dans le secteur
de La- Faute-sur-Mer et de L’Aiguillon-sur-Mer. Les principales
catastrophes (1906, 1928, 1940, 1979, 1999) ont été suivies de mesures
pour améliorer la protection. Quoique rarement pérennisées, celles-ci, en
revanche, ont pu contribuer à un sentiment erroné de sécurité derrière les
digues. Pour les huit communes les plus touchées de la moitié sud du
département
21
, le nombre d’arrêtés de catastrophes naturelles par
commune s’est élevé en moyenne, de 1982 à 2005, à 6,2 (contre 4,1 sur
les 8 communes littorales les plus touchées de la moitié nord).
Des alertes ont pourtant été données. Un rapport de 2008 d’un chef
de service à la direction départementale de l’équipement de la Vendée
22
indique que, dans les communes de La Faute et de L’Aiguillon, « la
conjonction de deux phénomènes, de crue dans l’estuaire du Lay et de
submersion marine, pourrait avoir un impact très important sur les zones
densifiées à l’arrière d’un réseau de digues vieillissant » et que «
sur le
secteur littoral, la zone de l’estuaire du Lay est la zone la plus dangereuse
du département… ». Ce rapport n’a sans doute pas eu à l’époque un
retentissement suffisant, mais la plaquette d’information préventive
relative au « plan de prévention des risques inondation de l’estuaire du
Lay », diffusée beaucoup plus largement en juillet 2007, comporte les
mêmes indications.
En Charente-Maritime, le littoral a toujours été soumis à des
attaques venant de l’océan. De nombreuses submersions ont été
enregistrées sur le littoral au cours des siècles, et en particulier sur l’île de
Ré. Au XXème siècle, neuf tempêtes avec submersion marine ont frappé
les secteurs de Ré et de La Rochelle.
Dans le Var, un orage « épouvantable » s’était produit en juillet
1827, engendrant des ruissellements déferlants de la vallée de la Nartuby,
arrachant tout sur leur passage et causant le décès de six personnes. Ce
dramatique évènement de la première moitié du XIXème siècle a
apparemment été oublié. Pourtant, à Trans, un maire, voulant perpétuer le
souvenir de l’évènement, avait fait graver sur une plaque de marbre le
texte suivant : « le 6 juillet 1827, les eaux de la rivière se sont élevées
jusqu’à cette hauteur, ont inondé une partie du village et englouti une
maison avec ses habitants ».
Ce texte est toujours visible sur la façade de
21
Olonne-sur-Mer, Les Sables d’Olonne, Château d’Olonne, Talmont-S
t
-Hilaire,
Longeville-sur-Mer, La Tranche-sur-Mer, La Faute-sur-Mer, L’Aiguillon-sur-Mer.
22
« Le classement des digues littorales au titre de la sécurité civile : un exemple de
mise en oeuvre en Vendée » - Intervention de Stéphane Raison aux dixièmes journées
nationales génie côtier-génie civil, 14-16 octobre 2008, Sophia Antipolis.
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23
la pharmacie qui fait face à l’hôtel de ville, après que la plaque,
endommagée par les inondations de juin 2010, a été rénovée.
En 2005, un ingénieur du conseil général du Var a adressé à un
collègue de l’unité de l’eau au sein de la direction départementale de
l’agriculture et de la forêt (DDAF) un récit de la catastrophe de 1827.
L’ingénieur de la DDAF a répondu dansune lettre du 13 juin 2005 en
indiquant que « ce qui s’est produit le 6 juillet 1827 peut arriver de
nouveau, mais les conséquences en seraient bien pires ». Il adresse copie
du document au préfet, au sous-préfet de Draguignan, à la direction
départementale
de
l’équipement
et
au
syndicat
intercommunal
d’aménagement de la Nartuby.
Depuis 1827, d’autres inondations aux conséquences moins
dramatiques sont survenues, notamment en 1974, 1994, février 1996 et
janvier 2000.
La gravité du risque susceptible de menacer certains secteurs de la
Charente-Maritime, de la Vendée et du Var était exposée dans plus d’un
document, mais elle n’a été ni appréhendée ni prise en compte autant que
cela eût été nécessaire.
D - Les mesures prises depuis ces événements
Les deux catastrophes ont fait l’objet de plusieurs rapports
parlementaires
23
et d’inspections
24
. De nombreux rapports de retour
d’expérience ont en outre été réalisés par les préfectures,
par les services
concernés, notamment les services départementaux d’incendie et de
secours, par la gendarmerie ou Météo-France. Leur contenu est
généralement de bonne qualité, mais leur suivi n’a pas été effectué
systématiquement.
23
Rapport de la mission d’information de l’Assemblée Nationale présidée par
Maxime Bono (député-maire de La Rochelle) et rapporté par Jean-Louis Léonard
(député-maire de Châtelaillon), juillet 2010 ; rapport de la mission commune
d’information du Sénat présidée par Bruno Retailleau (sénateur, président du conseil
général de Vendée) et rapporté par Alain Anziani (sénateur de Gironde), juillet 2010.
24
Pour la tempête Xynthia, rapport de retour d’expérience du conseil général de
l’environnement et du développement durable (CGEDD), de l’inspection de la
défense et de la sécurité civile (IDSC) et des inspections générales des finances (IGF)
et de l’administration (IGA), mai 2010 ; rapport sur l’évaluation des dommages
causés par la tempête aux biens non assurés des collectivités locales, CGEDD-IDSC-
IGF-IGA, juillet 2010
.
Pour les inondations du Var, rapport de retour d’expérience du
CGEDD et de l’IGA, octobre 2010, et rapport CGEDD-IGA-IGF-conseil général de
l’alimentation, l’agriculture et des espaces ruraux de juillet 2010.
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24
COUR DES COMPTES
A la suite de ces crises, des initiatives de réformes ont été prises.
Celles-ci sont synthétisées dans le « plan submersions rapides » (PSR),
décidé par le Gouvernement pour mieux faire face aux submersions
marines, aux crues soudaines et aux ruptures de digues. Appelé parfois
« plan digues », il a été rendu public le 17 février 2011 et comprend
quatre axes : maîtrise de l’urbanisation et adaptation du bâti ;
amélioration des systèmes de surveillance, de prévision, de vigilance et
d’alerte ; fiabilité des ouvrages et des systèmes de protection ;
amélioration de la résilience des populations (culture du risque, mesures
de sauvegarde).
Ce plan anticipe la future stratégie nationale de gestion des risques
d’inondation, dont le cadre a été fixé par l’article 221 de la loi du
12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement, dite
LENE ou « Grenelle 2 », qui transpose la directive européenne du
23 octobre 2007, dite « inondation». L’objectif est de parvenir à une
vision stratégique du risque d’inondation.
Trois étapes successives sont prévues, renouvelées tous les six
ans : une évaluation préliminaire permettant de définir les territoires à
risque important d’inondation (TRI), sur lesquels se concentrera l’action
publique ; d’ici à la fin de 2013, une cartographie des surfaces inondables
et des risques d’inondation pour ces territoires, intégrant la prise en
compte des évènements extrêmes ; d’ici à la fin de 2015, la mise en place
pour ces territoires et à l’échelle des grands bassins hydrographiques de
plans de gestion des risques inondation (PGRI), sur la base d’une analyse
coût-efficacité mettant en balance les conséquences dommageables des
inondations et les mesures nécessaires pour les atteindre.
Entre temps, un nouvel épisode pluvieux exceptionnel est
intervenu dans le Var, en novembre 2011.
Var : le nouvel épisode pluvieux exceptionnel de novembre 2011
Le vendredi 4 novembre 2011 à 10 heures, le département du Var a
été placé en alerte orange pour un épisode pluvio-orageux d’une
exceptionnelle intensité et durée (7 jours). L’Argens et la Nartuby passent en
vigilance crue de niveau orange le samedi 5 novembre à 10 h. Pendant la
durée de cet épisode, ce sont entre 300 et 500 mm de pluie (jusqu’à 200 mm
en 24 heures), soit 300 à 500 litres/m
2
carré, qui se sont abattus, accompagnés
parfois de vents violents (pointe à 140 km/h sur les îles d’Hyères) et
d’épisodes de surcote maritime de 70 cm freinant l’écoulement des eaux. Les
crues ont été généralisées à tous les cours d’eau du département, mais ont été
d’une ampleur moindre et moins destructrices qu’en juin 2010.
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25
Durant ces sept jours de crise, les secours sont intervenus près de
3 300 fois. Plus de 2 550 personnes ont été évacuées et 123 hélitreuillées.
1 250 personnes ont été provisoirement hébergées. Contrairement à 2010, des
évacuations préventives ont été effectuées sur décision du préfet, en
particulier celles des campings de la vallée de l’Argens, de la maison de
retraite de Barjols, d’un quartier de Fréjus situé derrière des digues et d’un
quartier de l’estuaire du Gapeau à Hyères. Le décès d’un couple de personnes
âgées à la suite d’une intoxication au monoxyde de carbone a été constaté. 89
familles sont à reloger, dont 37 qui étaient logées en camping.
600 habitations et bâtiments publics, 673 entreprises, commerces et
exploitations agricoles ont subi des dommages pour un montant de dégâts
estimés entre 28,8 M€ et 33,8 M€. Un premier arrêté de reconnaissance de
catastrophe
naturelle,
publié
le
18
novembre
2011
et
concernant
92 communes, est complété par deux autres, les 3 janvier et 1
er
mars 2012,
qui portent à 105 le nombre total des communes reconnues en état de
catastrophe naturelle.
Durant cette crise d’importants moyens de secours ont été engagés,
dont 900 pompiers du Var, renforcés par 20 marins pompiers de Marseille et
des personnels venus d’autres services départementaux d’incendie et de
secours (SDIS) de la zone sud,
150 membres des unités de sécurité civile,
près de 900 policiers et gendarmes, y compris ceux issus des forces mobiles,
8 hélicoptères de la sécurité civile et de la gendarmerie nationale. L’armée
avait également pré-positionné des renforts en moyens aériens. Au titre de la
sauvegarde, les associations départementales de sécurité civile
ont été
fortement mobilisées en appui des communes.
Par rapport à la crise de juin 2010, il est vrai plus dévastatrice mais sur
un territoire plus réduit, le bilan humain est tout différent. La qualité des
prévisions de Météo France a permis une meilleure alerte. La conduite des
opérations a pu être davantage fondée sur l’anticipation, avec un pré-
positionnement des moyens et des évacuations préventives. La mobilisation
des élus des communes, dont certaines disposaient d’un plan communal de
sauvegarde opérationnel, a été plus efficace et le fonctionnement des réseaux
de transmission, meilleur.
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26
COUR DES COMPTES
Il reste que le coût financier de ce nouvel épisode est une nouvelle fois
non négligeable. Au titre de l’assurance des catastrophes naturelles, pour des
dégâts estimés initialement à 325 M€, 144 M€ étaient payés en mars 2012
pour 23 512 sinistres. Au titre du programme 128 du budget de l’Etat
« crédits d’extrême urgence », 1,7 M€ ont été sollicités. Le programme 122
« concours spécifiques aux collectivités » devra être mis à contribution pour
des dégâts évalués à plus de 30 M€ pour 115 dossiers. L’indemnisation
économique concerne 182 dossiers éligibles, celle du chômage partiel 433
salariés dans 116 établissements. Les dommages agricoles ont été évalués à
4,75 M€
25
.
25
Une mission d’information a été décidée par le Sénat pour faire le bilan de ces
nouvelles inondations.
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Chapitre II
Les systèmes d'alerte et de secours : des
progrès à poursuivre
L’amélioration des systèmes d’alerte et de secours est une priorité
car ils permettent de sauver des vies humaines. Les mesures prises sont en
outre souvent d’un coût limité par rapport à leur impact en cas de crise.
Encore faut-il que les dispositifs soient complets, cohérents et rationnels,
ce qui n’est pas toujours le cas.
I
-
Les systèmes d’alerte
A - Des améliorations notables des prévisions
météorologiques et sur les
crues
1 -
Les
enseignements
de Xynthia
Du point de vue météorologique, la tempête Xynthia ne présente
pas un caractère exceptionnel avec des vitesses maximales de vent
enregistrées sur le littoral à la pointe de l’île de Ré de 160 km/h.
Toutefois, la concomitance de ce phénomène avec une marée haute de
vives-eaux (coefficient de 102) s’est traduite
par une surcote de 1,5 mètre
sur le littoral, expliquant une montée des eaux assez exceptionnelle.
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28
COUR DES COMPTES
Météo-France a correctement prévu le phénomène de surcote, mais
son ampleur a été sous-estimée dans le secteur de La Rochelle. La surcote
y a atteint environ 1,50 mètre
26
alors que les prévisions indiquaient de
0,80 m à 1 m (selon l’avis de très fortes vagues du samedi à 9h).
Certaines carences du dispositif de prévision étaient connues. Une
étude cofinancée par le département de la Vendée et l’Etat, dont les
conclusions avaient été présentées aux acteurs du littoral, souligne, dès
2002, l’absence d’observatoires de type
marégraphe dans la zone
concernée, sur le pourtour de la baie de Bourgneuf et de l’anse de
l’Aiguillon
27
, ce qui ne permet pas de comparer la simulation et les
constatations sur la marée. Un mémoire
28
de 2007 fait état de la difficulté
d’évaluer l’aléa de submersion marine dans cette région.
Le service hydrographique et océanographique de la marine
(SHOM), initialement chargé de l’observation des hauteurs d’eau
uniquement pour la sécurité maritime, est sollicité depuis 2007 pour la
prévention des risques. Mais son réseau de 23 observatoires le long des
côtes françaises, dénommé RONIM, dépourvu (sauf pour 7 d’entre eux)
de moyens de transmission en temps réel, ne comprend pas d’installations
dans ce secteur. Son amélioration et sa densification avaient été décidées
en 2009, mais avec un intérêt prioritaire pour la prévention des risques de
tsunami en Méditerranée.
Il est vrai que la correction de ces carences n’aurait eu un effet que
si elle avait été accompagnée de progrès substantiels des modèles
océanographiques côtiers. Ces carences restent néanmoins regrettables,
d’autant plus qu’elles existent de la même façon
dans la quasi-totalité des
zones du littoral à très fort risque de submersion importante, au nombre
d’une dizaine.
Plusieurs initiatives ont été prises ou poursuivies depuis Xynthia,
dans le cadre du volet du plan submersions rapides (PSR) « Améliorer
l’anticipation
des
submersions
marines ».
L’institut
géographique
national (IGN) est chargé de constituer et de mettre à jour un référentiel à
26
Météo-France : «
La tempête Xynthia des 27 et 28 février 2010
». Selon «Voiles et
Voiliers » du 5 mars 2010, la surcote, à ajouter à une pleine mer d’au moins 6 m à la
côte, a vraisemblablement dépassé 1,50 m.
27
Le marégraphe de La Rochelle, positionné dans un port face à l’ouest, a une
géographie qui diffère complètement de sites d’estuaire et de baie profonde comme
La Faute et L’Aiguillon-sur-Mer. Paradoxalement, les instruments de mesure de la
rade de Brest, bien que plus éloignés, donneraient des informations techniquement
plus comparables, quoique à retraiter.
28
«
Contribution à l’analyse des phénomènes de surcotes et de submersions marines :
secteur du Pertuis Breton (Vendée)
», Ecole nationale des travaux publics de l’Etat
(ENTPE), mémoire de Céline Perherin.
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grande échelle sur l’ensemble du territoire national, en particulier les
zones inondables et littorales. La zone de la tempête, considérée comme
prioritaire, est couverte depuis fin 2011. Le programme national sur la
période 2011 - 2013 permettra, pour un montant de 9 M€, de couvrir la
totalité du littoral métropolitain et la quasi-totalité des cours d’eau
principaux.
Par instruction du secrétaire général de la mer du 20 avril 2010, le
service hydrographique et océanographique de la marine a été désigné
comme coordonnateur national pour l’observation du niveau de la mer.
Un programme d'action a été élaboré pour développer la connaissance,
notamment des aléas extrêmes, et les modèles en matière de prévision
côtière, avec une première phase en 2011. Une convention-cadre a été
signée sur ce sujet en 2011 entre le service hydrographique et
océanographique de la marine, et le ministère chargé de l’écologie. Une
autre sera signée entre ce dernier et Météo-France, qui a déjà entamé le
travail.
En revanche, il n’est pas prévu que le modèle de prévision
opérationnel de surcote en Gironde, qui a donné de bons résultats, soit
étendu à d’autres estuaires (Loire, Adour, Charente). Il existe un modèle
moins sophistiqué utilisé pour cinq estuaires ou fleuves côtiers, qu’il
serait
plus
adapté
d’améliorer.
La
création
d’un
observatoire
marégraphique dans le Pertuis Breton n’est en outre toujours pas décidée.
Il n’existe pas enfin de structure formalisée de coordination pour la
submersion marine, contrairement à ce qui existe pour les rivières
(Service de prévision des crues et service central d’hydrométéorologie et
d’appui à la prévision des inondations (SCHAPI)).
L’amélioration des outils pour intégrer dans la prévision les
caractéristiques des aménagements côtiers est ainsi engagée, mais elle
prendra du temps et comporte, deux ans après, quelques insuffisances. Le
nombre des intervenants justifierait en outre que soit formalisée la
coordination pour la prévision des submersions marines.
2 -
Les enseignements des inondations du Var
Les pluies ont dévasté une zone peu étendue (40 à 50 km
2
autour
de Draguignan), ce que les outils opérationnels de prévision actuels ne
permettent pas de prévoir avec une localisation suffisamment précise. Les
outils existants ont permis de passer au niveau orange suffisamment tôt et
de cibler plus spécifiquement le Var. Cependant, même si les prévisions
et leur interprétation en termes de vigilance ont été conformes à l’état de
l’art,
le passage en niveau rouge était a posteriori justifié. Il n’a pas été
retenu, même s’il a été discuté au sein de Météo-France.
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COUR DES COMPTES
Les insuffisances en matière de prévision des précipitations sont
avant tout liées aux limites techniques des modèles. Il s’agit d’une zone
non maîtrisée d’un point de vue scientifique, qui fait partie des recherches
menées par Météo-France.
Le dispositif d’observation pour anticiper la crue était en outre très
insuffisant. Au-delà des images radar, les observations pluviométriques
en
temps
réel
sont
restées
très
imparfaites
en
raison
des
dysfonctionnements des réseaux de télécommunication. Le projet
d’extension des tronçons surveillés, notamment à la Nartuby et à
l’Argens, était en consultation dans les mairies, mais n’était pas
opérationnel.
Le retard pris avant la crise pour la surveillance de cours d’eau
connus comme étant à risque est regrettable.
Les inondations de novembre 2011 ont bénéficié des retours
d’expérience de celles survenues en juin 2010. Une meilleure
surveillance des cours d’eau conjuguée à des prévisions météorologiques
d’une grande fiabilité, a favorisé la réactivité des différents acteurs du
secours.
Le service de prévision des crues (SPC), assuré par la direction
interrégionale sud-est de Météo-France, est intégré dans le réseau du
ministère chargé de l’environnement. Ses dépenses d’investissement ont
été en baisse sur la période. Certains équipements ont certes été financés
par d’autres crédits, mais sans qu’en soit facilitée la création d’une
surveillance pour les rivières à risques que constituent l’Argens et la
Nartuby.
Sur le plan juridique, les compétences pour la prévision des crues
sont enchevêtrées. La loi n° 2003-699 du 30 juillet 2003 prévoit que
« l’organisation de la surveillance, de la prévision et de la transmission de
l’information sur les crues est assurée par l’Etat » (article L. 564-1 du
code de l’environnement). Néanmoins, les collectivités locales peuvent
mettre en place des dispositifs de surveillance des cours d’eau (article
L. 564-2 I).
L’insuffisance des moyens en particulier d’investissement du
service de prévision des crues, a contribué au retard pris en matière de
surveillance des rivières. Il serait en tout état de cause utile que soit
clarifiée plus nettement dans ce domaine la répartition des compétences et
des sources de financement entre l’Etat et les collectivités locales.
Depuis 2010, plusieurs initiatives ont été prises pour améliorer des
équipements et des méthodes.
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Depuis septembre 2010, la vigilance crue est étendue à l’Argens, la
Nartuby et le Gapeau. Pour l’ensemble du pays, le réseau surveillé par
l’Etat, pour les crues, a été déployé sur un linéaire d’environ 600 km entre
la mi-2010 et la fin de 2011. Plusieurs lacunes subsistent cependant dans
le dispositif. Une prévision fiable des crues de la Nartuby suppose
notamment
une
connaissance,
même
partielle,
des
écoulements
souterrains du plateau de Canjuers, mais ceux-ci font l’objet d’un
programme de recherche avant d’être équipés d’un appareillage sur
mesure. Des améliorations peuvent être apportées pour le suivi de la
Nartuby en amont de Draguignan (notamment par la remise en place d’un
capteur sur le site de Chateaudouble). Il en va de même pour celui du
Haut-Argens et de certains cours d’eau côtiers.
La confirmation des limites de la prévision des précipitations à
l’échelle infra-départementale a conduit à s’appuyer sur l’estimation des
cumuls de précipitation par les radars hydrométéorologiques. Un service
particulier d’avertissement ne peut être rendu qu’aux communes situées
dans la couverture radar, et seulement si la qualité des observations est
suffisante et fiable.
Météo-France a lancé des études pour améliorer ses méthodes
(ajustement plus rapide de la lame d’eau radar
29
, en 30 minutes, plutôt
qu’en 1 heure actuellement) et est en train de renforcer le réseau des
radars pour améliorer la couverture de la zone (en particulier achat de
quatre radars supplémentaires). Une nouvelle convention dénommée
« observation » fixe le nouveau programme 2011-2016 de renouvellement
et d’extension des réseaux de radars et de pluviomètres pour un montant
total de 26,3 M€.
Un effort substantiel d’amélioration des équipements a été
accompli. Les inondations de novembre 2011 ont bénéficié des retours
d’expérience de celles survenues en juin 2010. Une meilleure
surveillance des cours d’eau conjuguée à des prévisions météorologiques
fiables
30
a favorisé la réactivité des différents acteurs du secours. Cet
effort doit être complété et poursuivi dans la durée.
29
Lame d’eau radar : une lame d’eau est un cumul de précipitations sur une certaine
durée. Dans le cas du radar, la lame d’eau est estimée en étalonnant les échos de
retour avec les stations de surface.
30
Il est vrai que contrairement à l’événement pluvieux de juin 2010, de petite échelle,
violent et très bref, celui de novembre 2011 a été de plus grande échelle, long bien
qu’intense. Alors que la prévision pour un événement du premier type, objet des
recherches en cours, reste encore aujourd’hui largement hors de portée, comme le
souligne Météo-France, en raison des connaissances scientifiques, celle pour un
événement du second type est beaucoup mieux maîtrisée.
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B - Des dispositifs d’alerte encore à améliorer
Il est manifeste que, pour Xynthia, le danger lié au vent est resté
prédominant dans la compréhension des messages d’alerte par rapport à
celui de la submersion, la principale référence de la mémoire collective
étant la tempête de 1999.
1 -
Les dispositifs de vigilance et d’alerte météorologique
Depuis 2007, la vigilance pluies-inondation fait partie de la
procédure de vigilance météorologique. La procédure de vigilance et
d’alerte météorologique a fait l’objet d’une nouvelle circulaire du
28 septembre 2011.
L’insuffisance du dispositif d’avis de très fortes vagues (ATFV)
existant au moment de Xynthia est reconnue par Météo-France. Le fait
que ces avis ne soient pas insérés dans le dispositif de vigilance et qu’ils
soient donc moins visibles a eu un rôle non négligeable dans la sous-
estimation du phénomène.
Cette information est désormais intégrée dans la procédure de
vigilance dite « vague/submersion », en état opérationnel depuis
octobre 2011. Celle-ci comporte un avertissement explicite du niveau de
risque à l’échelle du littoral d’un département, signalé par une bande de
couleur supplémentaire, en mer, et un pictogramme spécifique. Elle a
joué pour la première fois le 5 novembre 2011 pour le littoral de Haute-
Corse.
En matière de fortes pluies débouchant sur des inondations, le
dispositif de vigilance a par ailleurs été adapté, afin de distinguer le risque
des seules inondations (lié à la crue d’un ou de plusieurs cours d’eau à la
suite, par exemple, de pluies tombées en amont du bassin ou encore de la
fonte des neiges) de celui associant de fortes pluies et des inondations.
S’agissant de la vigilance rouge, Météo-France a, depuis les
évènements de 2010 dans le Var, amendé sa doctrine pour les systèmes
orageux dont l’évolution est rapide et difficile à prévoir. Lorsque des
cumuls de précipitations exceptionnels se sont produits sur une partie
d’un département, que ce dernier comprend des zones avec des
populations exposées au risque d’inondation et qu’une évolution
défavorable n’est pas improbable, les prévisionnistes ont dorénavant pour
instruction d’accepter le risque d’un passage en vigilance rouge non
pertinent et/ou de préavis faible, plutôt que d’y renoncer faute de
certitude. Dans ces cas, le passage en rouge est possible si la durée prévue
du phénomène est d’encore au moins 30 minutes au moment où cette
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nécessité est constatée. Un nouvel équilibre a donc été cherché entre la
fiabilité de l’avertissement (message d’avertissement adressé à bon
escient) et les fausses alertes, susceptibles de décrédibiliser celui-ci.
Des progrès importants ont ainsi été accomplis en matière de
dispositif de vigilance, avec des modifications substantielles et utiles.
2 -
L’alerte des maires
En cas de crise, les maires sont, du fait de leur rôle de police, en
première ligne pour alerter la population. Ils sont chargés de « prévenir,
par des précautions convenables, et de faire cesser, par la distribution des
secours nécessaires, les accidents et les fléaux calamiteux ainsi que les
pollutions de toute nature […], de pourvoir d’urgence à toutes les
mesures d’assistance et de secours et, s’il y a lieu, de provoquer
l’intervention de l’administration supérieure » (article L. 2212-2 5° du
code général des collectivités territoriales (CGCT). L’article L. 2212-4
précise qu’
« en cas de danger grave ou imminent […], le maire informe
d’urgence le représentant de l’Etat dans le département et lui fait
connaître les mesures qu’il a prescrites ».
Pour Xynthia, les messages automatiques d’appel et fax ont été
adressés par les préfectures aux maires des communes du littoral,
prévoyant un fort coup de vent, une surcote possible et une prévision de
forte houle. L’ensemble des communes concernées a été destinataire de
l’alerte rouge le samedi 27 février, avec une prévision de surcote d’un
mètre. Plusieurs communiqués ont été diffusés en Charente-Maritime
invitant la population à rester chez elle à partir de 22 heures et à ne plus
sortir à compter de minuit. Si les maires des communes du littoral ont été
joints personnellement pour les sensibiliser à cette alerte, l’un deux
toutefois ne l’aurait pas été.
En Vendée, dans la plage horaire correspondant au début de
l’inondation où les télécommunications fonctionnaient encore au moins
partiellement, avant 4 heures du matin le 28 février, les maires,
notamment de l’Aiguillon-sur-Mer et La Faute-sur-Mer, dont les
communes étaient en cours de submersion rapide, n’ont pas en revanche
prévenu ou fait prévenir d’urgence le préfet (article L. 2212-4 du code
général des collectivités territoriales). Ils auraient pu aussi contacter le
service départemental d’incendie et de secours (SDIS).
Dans le Var, le passage à l’orange est intervenu le 14 juin à
23 heures et plusieurs alertes ont été diffusées notamment aux maires du
Var au cours de la journée du 15 juin. A 17 h 35, le préfet a demandé aux
autorités municipales de privilégier une mise à l’abri des élèves selon la
gravité météo et l’état des routes. A 23 h 07, une alerte par SMS et par
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télécopie a été adressée à tous les maires de l’arrondissement de
Draguignan leur demandant de fermer les établissements scolaires le
16 juin et de suspendre les transports scolaires. Toutes ces alertes ont été
relayées par des communiqués de presse.
Les messages automatiques d’avertissement aux maires ont bien
fonctionné, mais leur portée a été atténuée par le non passage en alerte
rouge et des problèmes de transmission intervenus pendant la crise.
Les
leçons
méritent
d’être
tirées
des
défaillances
de
communication entre les maires et l’autorité préfectorale. Il serait
notamment souhaitable de rappeler aux maires qu’ils doivent eux-mêmes
prévenir le préfet en cas d’évènement grave affectant leurs communes.
3 -
L’alerte de la population
L’alerte de la population est évidemment essentielle pour éviter les
drames et les décès. Celle-ci a été très insuffisante, tant pour les
inondations Xynthia que dans le Var. Des efforts ont été accomplis
depuis, mais ils restent ponctuels et dispersés.
a)
L’alerte insuffisante de la population
Les médias, en particulier la radio, peuvent jouer un rôle majeur.
La
communication
à
leur
égard
a
cependant
souffert
parfois
d’imperfections de certains bulletins d’information.
Lors de Xynthia, l’alerte directe de la population a été
principalement effectuée par des visites auprès de certains de leurs
administrés du maire et d’autres élus, de nombre variable selon leur degré
d’implication personnelle. L’objectif était de s’assurer qu’à partir de
22 heures les habitants étaient rentrés chez eux.
Une fois informé de l’alerte rouge, le maire de La Faute-sur-Mer
n’a pas alerté ses services, avant la submersion, des mesures à prendre. Le
maire de L’Aiguillon-sur-Mer a précisé s’être rendu à la mairie à 3 heures
du matin le 28 février 2010, avec l’une de ses adjointes, les sapeurs-
pompiers volontaires du centre de secours local entrant alors en action sur
les instructions reçues du commandement du service départemental
d’incendie et de secours. A Fouras, la maire et des adjoints sont allés
prévenir maison par maison les habitants les plus exposés. De nouvelles
rondes seront faites durant la tempête. A Port des Barques, le maire et des
adjoints ont été présents durant la tempête pour identifier les habitations
les plus menacées et participer dans certains cas à l’évacuation de leurs
occupants.
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Les autres moyens possibles d’alerte n’existaient pas ou n’ont pas
été activés. A Charron, ils se limitaient à l’affichage en mairie des
bulletins météo, dans un contexte où la submersion par deux côtés a rendu
quasi immédiatement impossible tout déplacement dans la commune.
A
Port des Barques, aucun moyen n’était dédié à l’alerte de la population. A
Fouras, la commune ne disposait que d’une sirène sur le toit de la mairie.
En Vendée, il n’existait, avant la submersion, qu’une sirène par
commune, aux mairies de La Faute et de L’Aiguillon-sur-Mer et au centre
de secours de La Tranche-sur-Mer. La sirène existante à La Faute-sur-
Mer n’a pas été activée.
Dans le Var, l’alerte à la population avant la crise a été
pratiquement inexistante compte tenu de l’absence de passage en
vigilance rouge. Pendant la crise, les informations ont été diffusées dans
certaines communes, autant que possible, par des agents municipaux
munis de véhicules et de mégaphones. Quand les différentes autorités ont
pris conscience de la gravité de la situation, il était trop tard pour réagir,
tous les moyens de communications étaient hors service et le réseau
électrique coupé.
L’absence de dispositif cohérent et prévu à l’avance, que n’a pu
pallier en totalité l’intervention des responsables locaux, a aussi contribué
à l’effet de surprise de la population. Une sensible amélioration a été
constatée dans le Var en novembre 2011 : l’envoi de messages aux élus
concernés a permis d’activer les plans de sauvegarde en temps opportun.
b)
L’amélioration des dispositifs communaux d’alerte depuis la crise
En Vendée, les trois communes contrôlées sont en train
d’améliorer leur système d’alerte, selon des modalités variables.
Systèmes d’alerte des communes du Sud Vendée après Xynthia
L’Aiguillon
-sur-Mer
La Faute-
sur-Mer
La Tranche-
sur-Mer
Sirène
oui (mairie)
oui
(2
sirènes)
oui (centre de
secours)
Sirène avec messages vocaux
non
non
non
Service d’alerte tél.
oui
oui
oui
Hauts parleurs sur véhicules
oui
oui (deux)
oui (en cours)
Diffusion sur véhicule
municipal
oui
oui (deux)
non
Rampe lumineuse avec sirène
sur véhicule
oui
non
oui
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COUR DES COMPTES
Ces outils devront s’accompagner, pour être efficaces, d’une bonne
information de la population sur la signification des sirènes et des
messages téléphoniques d’alerte.
Les communes ont pris des mesures pour améliorer les systèmes
d’alerte, mais de manière dispersée.
c)
Les nouveaux systèmes d’information pour les pluies et les crues
fluviales
Dans le cadre du plan submersions rapides, Météo-France a mis en
place depuis fin 2011 un système d’avertissement sur les observations de
pluies intenses au niveau communal (APIC) destiné à informer les
communes volontaires (et couvertes par des observations radars de qualité
suffisante) du caractère exceptionnel des précipitations sur leurs
territoires. Il s’agit d’informer sur les pluies, et non de prévoir les crues.
Ce système est proposé à l’ensemble des communes métropolitaines.
Le service central d’hydrométéorologie et d’appui à la prévision
des
inondations
(SCHAPI)
a
décidé de
procéder
à
des
expérimentations afin de produire des avertissements notamment pour les
rivières à lit variable et sur les petits bassins versants rapides non
surveillés et dépourvus d’instruments de mesure. Il s’agit en particulier de
déployer des mesures optiques (caméras) de niveau d'eau. Depuis juillet
2011, le service de prévision des crues dispose d’images de la Nartuby
issues d’une webcam installée au centre de Trans-en-Provence.
Plus généralement, il a engagé au plan national un recensement des
dispositifs d’avertissement en cas de crues à cinétique rapide dont les
collectivités locales sont dotées, ou souhaitent se doter.
L’amélioration de ces dispositifs très utiles mérite d’être
poursuivie.
d)
Le système d’alerte et d’information des populations (SAIP) et
l’articulation avec les dispositifs communaux
Le livre blanc sur la défense et la sécurité nationale, adopté en juin
2008, retient la modernisation de l’alerte des populations comme un
objectif prioritaire. Il s'agit de se doter d’un « réseau d'alerte performant
et résistant » en remplacement du réseau national d’alerte existant (RNA),
dont la vétusté ne lui permet pas de jouer un rôle efficace. Xynthia et les
inondations du Var en ont été l’illustration.
Le nouveau système d'alerte et d'information des populations
(SAIP) prévoit, dans sa version actuelle, la mise en réseau des vecteurs
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d'alerte
existants,
notamment
des
sirènes,
leur
densification
et
l’élargissement de l'éventail des moyens (panneaux d'information,
messages radio, SMS sur les téléphones mobiles). Un recensement des
moyens existants a été organisé nationalement au premier semestre 2010.
Sur le plan national, des appels d'offres ont été lancés au premier
semestre 2011 et les premières expérimentations interviendraient en 2013.
Il reste qu’aucun matériel n’a encore été installé plus de trois ans après le
livre blanc. En dehors du recensement des sirènes et des autres moyens
d’alerte et d’information d’initiative locale, aucun projet concret n’a pour
le moment été porté à la connaissance des préfectures. Le budget alloué
au nouveau système, initialement de 78 M€ a d’ailleurs été réduit à
24 M€ pour la période 2011-2013. La mise en place d’un nouveau
système complet sera donc étalée dans le temps, au-delà de 2013.
Un tel projet, de portée nationale et destiné notamment aux crises
majeures, ne peut certes s’adapter à chaque solution technique locale. Il
existe en outre un comité d’experts associant des acteurs locaux et les
normes prévues du nouveau système permettent l’intégration des données
des systèmes locaux les plus performants. Il reste regrettable que les
initiatives prises par les collectivités locales n’aient pas fait l’objet d’un
partenariat avec l’Etat, ce qui aurait permis à ce dernier de garantir le
moment venu la compatibilité des nouveaux systèmes locaux avec le
nouveau système.
Ces difficultés sont notamment le fruit du partage ambigu de la
responsabilité du système d’alerte, qui relève de la commune pour un
évènement communal, mais de l’Etat lorsque plusieurs communes sont
concernées (article 17 de la loi du 13 août 2004 de modernisation de la
sécurité civile).
La lenteur de mise en oeuvre du nouveau système et l’absence de
véritable partenariat sur ce sujet avec les collectivités locales sont
critiquables. S’agissant de l’alerte, le partage des compétences entre le
maire et le préfet a l’inconvénient de ne pas faciliter l’organisation, la
définition et la mise en place d’un système cohérent avec des moyens
adaptés. Il convient donc de clarifier la question de la responsabilité du
système d’alerte et d’établir un cahier des charges national, auquel
pourront se référer les communes.
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COUR DES COMPTES
II
-
L’organisation des secours
A - Une planification à compléter et à actualiser
1 -
L’actualisation des plans ORSEC et les exercices
L’état des plans de secours montre d’importantes carences des
services de l’Etat et des collectivités locales avant la crise. Celles-ci ont
été partiellement corrigées depuis.
En Vendée, le plan ORSEC
31
départemental avait été mis à jour en
juin 2008. Ses dispositions ont depuis été actualisées le 26 avril 2011
pour tenir compte, notamment, des restructurations des services de l'Etat.
Un plan de surveillance du littoral pour une vigilance coordonnée entre
les acteurs concernés a été mis au point afin d’assurer la surveillance des
lieux sensibles de la côte lors des périodes à risques, conjuguant
notamment de forts coefficients de marée avec des vents violents.
Contrairement aux années précédentes, en 2010 et 2011, deux exercices
portant sur les inondations et la submersion marine ont été organisés.
En Charente-Maritime, il existait, avant Xynthia, trente plans de
secours et de défense civile, mis à jour pour le plus ancien en 2001. Pour
le risque inondation, le principal document existant était le règlement de
surveillance, de prévision et de transmission de l’information sur les crues
(RIC Littoral Atlantique datant de septembre 2006). Il existait également
un plan intempéries Sud-Ouest. Ces plans sont progressivement
remplacés dans le cadre de la refonte du dispositif ORSEC. Cette réforme
est en voie d’aboutir à la signature par le préfet d’une partie des
dispositions générales (acteurs, chaîne de commandement) et du mode
d’action (secours à nombreuses victimes). De 2007 à 2010, plusieurs
exercices de sécurité civile ont été menés, sans qu’aucun concerne la
thématique inondation. Le constat est le même en 2011, après la crise.
Dans le Var, les dispositions générales ORSEC étaient en cours de
refonte à la suite de la réglementation de 2004 et 2005 et de la nouvelle
organisation de la préfecture. Le nouveau plan a été signé récemment par
le préfet du Var. Un plan ORSEC « dispositions spécifiques inondations »
sera arrêté en 2012, prévoyant notamment la priorité absolue à
l’anticipation et la mise en place d’une cellule de réponse aux maires. Les
exercices de sécurité civile sur la thématique inondation sont peu
fréquents voire inexistants, la priorité étant donnée aux feux de forêt.
31
ORSEC : organisation de la réponse de sécurité civile ; c’est une organisation de
gestion de crise.
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Ainsi, à Draguignan, aucun exercice de ce type n’a été organisé, ni entre
2007 et 2010, ni depuis cette date.
L’État devrait accélérer la mise à jour des plans ORSEC dans les
départements les plus à risque, avec éventuellement un appui des
préfectures de zone
32
, et organiser davantage d’exercices. Quant aux
collectivités, elles pourraient programmer des exercices réguliers pour
sensibiliser la population et tester les plans communaux de sauvegarde.
2 -
L’adaptation du schéma départemental d’analyse et de
couverture des risques (SDACR)
Le schéma départemental d'analyse et de couverture des risques),
dont l’élaboration est rendue obligatoire par l’article L. 1424-7 du code
général des collectivités territoriales, dresse l'inventaire des risques et
détermine les objectifs de leur couverture. L’adaptation de ce document
est donc essentielle pour faire face dans de bonnes conditions à des
risques exceptionnels.
En Vendée, le préfet a approuvé le schéma départemental par
arrêté du 14 février 2011. Le texte préparé avant la tempête n’a pas été
modifié pour tenir compte des enseignements de la crise. Cette signature
du préfet s’explique compte tenu de la longueur de la procédure et de
l’ancienneté du précédent document (qui datait de 2000), mais il convient
d’actualiser le plus vite possible ce schéma. A titre d’exemple, dans le
document actuel, la couverture en bateaux légers de sauvetage est
globalement la moins bonne dans le sud du département, avec un temps
d’arrivée sur les lieux estimé à 30 minutes, alors qu’il s’agit de la plus
vaste zone submersible de Vendée.
En Charente-Maritime, le schéma départemental date d’octobre
2007 (le précédent remontait à 1999). Seules les crues fluviales font
l’objet de référence. Le sauvetage aérien n’est pas envisagé. Le risque de
submersion, s’il est mentionné, ne fait l’objet de préconisations pour les
matériels et les procédures qu’au titre des inondations et des tempêtes.
Par courrier du 22 septembre 2011 au directeur départemental du service
départemental d’incendie et de secours (SDIS) de Charente-Maritime, la
préfète l’a informé de son souhait de voir la révision du schéma achevée
avant l’automne 2012, et lui a demandé de lui rendre compte
régulièrement de l’état d’avancement de ce dossier.
32
Préfecture où le préfet de département et de région est en même temps préfet de la
zone de défense et de sécurité. Il y a sept zones de défense en métropole et cinq outre-
mer.
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40
COUR DES COMPTES
Dans le Var, le schéma date de novembre 2007. Il liste l’ensemble
des cours d’eau, dont la Nartuby et l’Argens, susceptibles d’être affectés
par des crues torrentielles, brutales et rapides, propres au climat
méditerranéen. Les inondations y sont fréquemment citées en tant que
risque particulier. Le service départemental d’incendie et de secours du
Var s’est adapté à ce risque : il a, par exemple, créé une unité spécialisée
systématiquement engagée lors des inondations pour mettre en sécurité
les populations menacées et pour la reconnaissance des habitations
submergées. En revanche, la localisation de certains centres a
manifestement été mal évaluée. L’actualisation du schéma devrait être
engagée en 2012.
Les schémas départementaux d’analyse et de couvertures des
risques doivent être révisés sans délai afin de prendre en compte le risque
existant en matière de submersion marine, en intégrant les conséquences
prévisibles du changement climatique, notamment l’élévation du niveau
de la mer.
3 -
Les plans communaux de sauvegarde (PCS)
Le plan communal de sauvegarde, défini dans l’article 13 de la loi
du 13 août 2004 de modernisation de la sécurité civile et dans le décret
d’application du 15 septembre 2005, traite de la réponse opérationnelle de
la commune en cas de sinistre ou de catastrophe (hébergement, soutien et
réconfort des populations, action sociale).
Il doit être compatible avec les
plans d'organisation des secours (plan ORSEC). Un plan intercommunal
de sauvegarde peut être établi dans les établissements publics de
coopération intercommunale à fiscalité propre.
a)
Une situation initiale non satisfaisante
Aux termes de la loi de 2004, les communes ont obligation de
réaliser un plan communal dans les deux ans après signature de l'arrêté
d'approbation d’un plan particulier d’intervention (PPI) ou d’un plan de
protection des risques naturels (PPRN). Une réflexion est en cours pour le
rendre obligatoire dès la prescription d’un plan de protection sans
attendre son approbation. Cette disposition a été reprise dans la
proposition de loi adoptée en première lecture par le Sénat en mai 2011,
mais n’est toujours pas votée.
Sur les 36 711 communes de métropole et des départements
d'outre-mer, 10 546 sont soumises à l'obligation de réaliser un plan
communal. Au début de 2010, seules 2 000 communes, soit environ
20 %, en disposaient et 2 349 plans communaux de sauvegarde étaient en
cours d’élaboration.
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41
En Charente-Maritime, sur 57 communes sur le territoire
desquelles un plan communal de sauvegarde était obligatoire, seules
quatre en étaient dotées ; deux l’avaient fait approuver alors qu’il n’était
pas obligatoire.
En Vendée, le nombre de plans communaux approuvés avant la
submersion était très faible (15), et il n’y en avait pas dans les trois
communes du Sud-Vendée. Ils n’étaient certes pas formellement
obligatoires dans ces communes mais, s’agissant de La Faute-sur-Mer, le
préfet avait, à quatre reprises (en 2004, 2007 et deux fois en 2008), appelé
en vain l’attention du maire sur leur utilité. La commune avait adressé
une lettre datée du 26 juillet 2007 à la direction départementale de
l’équipement de Vendée, en demandant si les mesures d’information déjà
prises étaient suffisantes ou s’il était « nécessaire d’en prévoir d’autres
(signal d’alerte sonore avec la sirène de la mairie, point de rassemblement
élevé de la commune) ». La commune de L’Aiguillon-sur-Mer a, quatre
jours avant la tempête, transmis un projet de plan communal au préfet. En
tout état de cause, l’absence de plan communal n’a pas facilité le
regroupement de la population dans des lieux sécurisés, en particulier à
La Faute-sur-Mer.
Au moment des inondations du Var, sur les 58 communes de
l’arrondissement de Draguignan, seules neuf disposaient d’un plan
communal, alors que 29 d’entre elles sont soumises à un risque majeur
(hors feu de forêt et risque sismique). Le contenu des plans communaux
existant dans les communes concernées du Var s’attache plutôt au risque
de feux de forêt, le risque inondation étant généralement absent. A
Draguignan comme à Fréjus, le plan ne détaille pas d’actions particulières
dans ce domaine. A Draguignan, le document communiqué, daté de 2008,
n’était manifestement plus tenu à jour s’agissant notamment de certaines
listes nominatives.
b)
Une amélioration à poursuivre
A la suite de Xynthia et des inondations du Var, un effort non
négligeable a été accompli. La proportion des communes ayant réalisé un
plan communal par rapport à celles soumises à cette obligation est
devenue un nouvel indicateur du programme budgétaire «
Administration
territoriale » (programme 307). Plusieurs documents, dont un guide
pratique d'élaboration, ont été diffusés par la direction de la sécurité civile
du ministère de l’intérieur. Un fascicule de janvier 2011 fait le bilan de la
réalisation des plans et recense les bonnes pratiques.
Les préfets des trois départements concernés ont rappelé à chaque
maire par plusieurs courriers l’intérêt majeur présenté par la réalisation du
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42
COUR DES COMPTES
plan communal. Des dispositifs d’appui, des modèles types et des
documents pédagogiques ont été mis à la disposition des maires, et des
réunions d’information organisées. Cette action a cependant été parfois
freinée par la faiblesse des moyens humains des services concernés de la
préfecture et la difficulté de les accroître.
En avril 2011, le nombre de communes soumises à cette obligation
et disposant d’un plan communal s’élevait au plan national à 3 953 : il a
donc pratiquement doublé par rapport au début de 2010. Mais il ne
représente que 37 % des communes concernées
33
. A la fin de 2011, parmi
les
communes soumises à un plan communal obligatoire, - 55 en
Charente-Maritime, 69 en Vendée et 47 dans le Var -, respectivement 25,
33 et 27 en disposaient. Les autres ne l’ont pas encore confectionné,
même si certaines sont en train de l’élaborer.
Au total, dans les trois départements, une quarantaine de
communes, pour lesquelles un plan communal est obligatoire, n’ont
toujours pas entrepris d’en élaborer un.
c)
Le format et le contenu des plans communaux de sauvegarde
La mise au point des plans communaux de sauvegarde n’a fait
l’objet d’aucune coordination locale entre les deux communes de La
Faute-sur-Mer (PCS adopté en février 2011)
et de L’Aiguillon-sur-Mer
(mars 2011), alors qu’elles sont soumises à un risque commun compte
tenu de la configuration des lieux. Cette situation est d’autant plus
paradoxale que nombre d’habitants de La Faute-sur-Mer ont été obligés,
lors de la crise, de se réfugier dans la commune de L’Aiguillon-sur-Mer.
Celle-ci a cependant pris des contacts avec deux autres communes
voisines pour assurer un accueil en cas d’évacuation.
Dans le Var, la communauté d’agglomération dracénoise a, en
revanche, décidé en 2011 d’élaborer un plan intercommunal de
sauvegarde (PICS) embrassant tous les risques majeurs auxquels est
exposé son territoire.
Le contenu des plans communaux se rapproche généralement du
document type. A titre d’exemple, les plans communaux examinés en
Charente-Maritime, notamment à Fouras et à Port des Barques sont
semblables et de contenu inégal. Les différents niveaux et les moyens de
l’alerte ne sont pas toujours mis en évidence, ni les consignes susceptibles
d’être données à la population. Dans le Var, les plans communaux
33
Selon les indications apportées fin juin 2012 par le ministère de l’intérieur, ce taux
s’élève en avril 2012 à 46 % des communes concernées.
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principalement consacrés au risque de feux de forêt n’ont pas été pour le
moment modifiés.
Les plans communaux de sauvegarde gagneraient à être moins
littéraires ou descriptifs. Une présentation sous forme de fiches actions
dans lesquelles chaque intervenant saurait parfaitement le rôle qu’il doit
jouer en cas de crise paraît préférable. Il est en outre souhaitable que les
plans communaux de sauvegarde de communes d’une même aire
géographique et soumises aux mêmes aléas soient cohérents les uns avec
les autres, et que se développent dans ces situations des plans
intercommunaux.
B - Les secours : une utilisation et une coordination à
améliorer
Les crises ont donné lieu à des retours d’expérience multiples, qui
soulignent tous l’efficacité et le dévouement des secours. De nombreuses
mesures ponctuelles ont été déjà prises par les préfectures et les SDIS
pour améliorer le dispositif. Quelques questions subsistent néanmoins.
1 -
Le pré-positionnement des moyens
Dans le cas de Xynthia, une anticipation des secours est
intervenue, mais fondée principalement sur le risque lié au vent.
En Vendée, bien que le maillage territorial dense du territoire par
les centres de secours ait permis l’engagement rapide de deux autres
centres autour de la zone inondée, la submersion a mis en évidence des
problèmes d’organisation des moyens humains du service départemental
d’incendie et de secours, et en particulier la dispersion de l’encadrement.
Celle-ci a affecté la réactivité du centre de secours de L’Aiguillon-sur-
Mer après le passage en alerte rouge.
Le manque de
moyens humains du service départemental
d’incendie et de secours dans le sud du département est noté dans le
schéma départemental d’analyse et de couverture des risques de 2011. Il
est dû, notamment, aux difficultés à recruter des sapeurs-pompiers
volontaires en zone littorale comme en zone rurale
.
De surcroît, les
centres de secours de La Tranche-sur-Mer et de L’Aiguillon-sur-Mer sont
quelque peu excentrés dans leur secteur, étant situés chacun à plus de 35
minutes des Sables d’Olonne, lieu de stationnement du véhicule léger de
commandement de référence.
S’agissant des moyens nationaux, des colonnes de renfort des
unités militaires de la sécurité civile ont été acheminées. Quatre sections
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d’unités d'instruction et d'intervention de la sécurité civile (UIISC),
complétées par deux sections supplémentaires (au total 156 hommes), ont
été pré-positionnées vers Poitiers et Angoulême, mais aucune en région
des Pays de la Loire, pourtant en alerte rouge. Huit hélicoptères de la
sécurité civile ont été mis en alerte, dont aucun en Vendée.
Dans le Var, les imprécisions des prévisions ont rendu impossible
un pré-positionnement dans la région de Draguignan.
Lorsqu’un pré-positionnement est décidé, il devrait être appliqué
de manière systématique par tous les organismes.
2 -
Les moyens aériens et leur coordination
En Vendée, comme l’ont souligné les rapports parlementaires, le
délai d’arrivée des hélicoptères sur la zone sinistrée a handicapé le
guidage et la projection des moyens du service départemental d’incendie
et de secours.
La densité de l’habitat en zone littorale conduit à s’interroger sur
l’absence totale d’hélicoptères publics appropriés dans ce département, le
seul de l’ouest de la France dans cette situation. Lors des exercices
effectués
au
moment
des
grandes
marées
de
septembre
2010,
l’hélicoptère public civil affecté au département de Charente-Maritime
n’a pas pu non plus exercer sa mission de surveillance de la côte
vendéenne.
Le caractère tardif de l’intervention des hélicoptères en Vendée est
aussi dû à un manque de coordination, tous les hélicoptères ayant
commencé
à
travailler
en
Charente-Maritime
avec
l’aide
d’un
coordinateur basé à la tour de contrôle de l’aéroport de La Rochelle
34
. Le
travail de sauvetage a enfin été gêné par les difficultés de transmission
entre les hélicoptères et les sauveteurs au sol. En Charente-Maritime, par
exemple, les communications air/sol avec le service départemental
d’incendie et de secours n’ont été possibles qu’avec les hélicoptères de
sécurité civile, soit avec la moitié seulement des moyens engagés.
Tirant la leçon de Xynthia, la coordination des moyens aériens
dans le Var a été facilitée par la présence de moyens militaires, en
particulier de l’école d’application de l’artillerie (EAA) de Draguignan et
de l’école d’application de l’aviation légère de l’armée de terre (EALAT)
34
Un officier sapeur-pompier titulaire du brevet de pilote privé et connaissant bien les
infrastructures de l’aéroport de La Rochelle-Ré a été détaché à la base hélicoptère de
la Sécurité civile puis à la tour de contrôle, aucun contrôleur aérien n’y étant présent
faute d’avoir été sollicité. Opérationnel vers 8h30, il a été chargé de réguler
l’engagement des moyens aériens.
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du Cannet-des-Maures. Ceux-ci ont été directement sollicités par le
préfet. Au plus fort de la crise 19 appareils étaient en vol simultanément.
1 350 personnes ont été évacuées par les airs auxquelles s’ajoutent
1 100 sauvetages par voie terrestre. Sur ce total de 2 450 personnes, on
estime que 300 étaient vouées à une mort certaine faute d’évacuation.
Un coordonnateur des hélicoptères a été désigné, le chef de la base
sécurité civile à Cannes, basé à la tour de contrôle de l’EALAT. La
coordination des moyens terrestres était réalisée par un officier du service
départemental d’incendie et de secours. Si la communication VHF
35
entre
les fréquences civiles et militaires air-air n’a pas posé de difficultés, la
communication air-sol n’a pas fonctionné. Seuls les appareils de la
sécurité civile possédaient les fréquences radios des sapeurs-pompiers et
pouvaient donc dialoguer avec la salle du centre opérationnel
départemental d’incendie et de secours (CODIS). La diversité des engins
engagés et la non-compatibilité des fréquences air-sol des différents
services ou administrations en action sont des obstacles à une bonne
communication entre acteurs au sol (les pompiers et secouristes) et les
pilotes d’aéronefs. Les repères terrestres étaient en outre inutilisables et
tous les appareils ne possédaient pas une qualification au vol de nuit.
C’est en réalité l’expérience et le savoir-faire des pilotes qui ont permis le
bon déroulement de l’opération.
A la suite de ces crises, le ministère de l’intérieur
indique s’être
engagé dans un travail de clarification doctrinale pour la coordination des
moyens aériens. Il reste également à envisager la question de la
compatibilité des différentes fréquences et des moyens de transmission
entre les éléments aériens (hélicoptères des différents services) et
terrestres (sapeurs-pompiers, unités de la sécurité civile, gendarmes,
armée).
Une véritable planification nationale, relayée à l’échelon des zones
de défense et de sécurité,
reste à mettre en place pour l’intervention des
moyens aériens utilisables en cas de crise.
C - L’inadaptation de certains équipements
Certains équipements ont été localisés ou construits sans prendre
en compte le risque de submersion marine ou d’inondation. Ces situations
handicapent
l’arrivée
des
secours.
Elles
représentent
des
coûts
supplémentaires quand il faut les relocaliser ailleurs, ou des gaspillages
quand il faut les abandonner.
35
VHF : very high frequency, très haute fréquence.
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COUR DES COMPTES
1 -
La localisation en zone inondable des centres de secours des
services départementaux d’incendie et de secours
Plusieurs centres des services départementaux d’incendie et de
secours ont été inondés, ce qui a gêné l’efficacité des secours et entraîné
des coûts supplémentaires.
En Vendée, le schéma départemental d’analyse et de couverture
des risques indique explicitement que le centre de secours de l’Aiguillon-
sur-Mer est situé en aléa moyen d’inondation maritime et qu’il « pourrait
se retrouver isolé » et susceptible d’être le « plus impacté par le risque de
submersion », à l’instar de celui de Noirmoutier. De fait, la submersion a
mis hors service ce centre, qui est aussi compétent pour La Faute-sur-
Mer, ce qui a rendu inutilisable les installations, les véhicules, les bateaux
légers, et les autres moyens matériels. La paralysie de ce centre de
secours a retardé la projection des moyens du service départemental
d’incendie et de secours puisque quatre véhicules sur six y ont été mis
hors d’usage au début du sinistre.
En Charente-Maritime, trois centres de secours ont été inondés, à
Rochefort,
Ars-en-Ré
et
Saint-Trojan-les-Bains.
Le
projet
de
reconstruction du centre de secours de Rochefort, déjà inondé en 1999,
est toujours à l’étude. Le conseil général a procédé à l’acquisition d’un
terrain pour sa reconstruction, celle-ci étant estimé à 4 M€. Le coût de la
reconstruction du centre de secours de Saint-Trojan-les-Bains, en zone de
solidarité, serait d’environ 1,5 M€ à 2,1 M€. Il est envisagé de le
reconvertir en un centre pour plongeurs nautiques, et en un poste avancé
de sauvetage l’été, les moyens étant concentrés sur celui du Château
d’Oléron. Les services de secours du Var ont été eux-mêmes très affectés
par les inondations. Des organes opérationnels majeurs se sont trouvés
inondés et ont été rendus indisponibles : à Draguignan, le siège de la
direction départementale, le centre de secours principal, ainsi que le site
logistique des Incapis (magasin départemental) ; aux Arcs, le centre de
secours. Le service départemental d’incendie et de secours a de ce fait
définitivement perdu 87 véhicules, sur 160 véhicules sinistrés, et 155
postes de communication numérique Antarès. La réparation des dégâts a
coûté 1,66 M€ au service départemental d’incendie et de secours et s’y est
ajoutée la mise en sécurité des personnels et des installations (0,2 M€).
Le centre de secours principal de Draguignan et les bâtiments du
SDIS se trouvent dans une zone d’aléa, même si selon le plan de
prévention des risques inondations de Draguignan, ils ne se situent
curieusement pas en zone inondable (cf. infra). Seul le magasin, aussi
appelé local technique-logistique, était situé en zone rouge.
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Depuis les inondations, les études menées en vue de déplacer des
centres et installations n’ont pas abouti. Pour le centre de secours
principal de Draguignan, la ville a proposé un terrain. Pour les locaux du
service départemental d’incendie et de secours, construits en 1969 et
1971, l’ampleur des surfaces nécessaires à une relocalisation posent
problème. Ces investissements seront lourds, évalués à 40 M€ par le
service, y compris le déplacement du centre de secours des Arcs qui avait
également été inondé. Ils sont cependant urgents et indispensables.
Il est impératif
de supprimer ou de relocaliser les centres situés en
zone inondable, ce qui n’est pas encore fait pour le moment. Les préfets,
qui
sont
directement
concernés
au
titre
de
leur
responsabilité
opérationnelle à l’égard des sapeurs-pompiers, et les conseils généraux
doivent être fortement mobilisés pour y parvenir dans les meilleurs délais.
2 -
Les transmissions
En Vendée, le réseau propre au service départemental d’incendie et
de secours, bien que distinct d’Antarès
36
, a fonctionné correctement. Mais
la coupure rapide des appels aux secours extérieurs par voie téléphonique
a retardé la mesure de l’ampleur de la submersion et la concentration des
moyens départementaux sur la zone du sinistre : cette dernière n’a été
décidée que vers 5 h du matin, le 28 février 2010, soit près de deux heures
après le début de la submersion.
En
Charente-Maritime,
la
nécessité
éventuelle
d’une
réalimentation électrique par les moyens du service départemental
d’incendie et de secours avait été anticipée et le réseau Antarès, sur lequel
le service départemental d’incendie et de secours
avait terminé la
migration intégrale de son système de transmissions, a montré sa
robustesse. Il n’y a pas eu de coupure de réseau, cinq relais privés
d’électricité ont continué à fonctionner sur batterie. En revanche, il aurait
été souhaitable, pour les liaisons entre équipes, qu’existe un stock
d’émetteurs-récepteurs portatifs Antarès au niveau de la zone de défense,
afin d’équiper les renforts extra-départementaux non équipés d’Antarès.
Dans le Var, les installations téléphoniques et informatiques du
service départemental d’incendie et de secours et du centre de secours
principal de Draguignan ont été inondées. Les liaisons de téléphonie fixe
ont
été
affectées
par
de
nombreuses
coupures
perturbant
le
fonctionnement des services de secours. Les liaisons Acropol
37
et Antarès
36
Antarès : adaptation nationale des transmissions aux risques et aux secours,
dénomination du réseau de télécommunication de la sécurité civile française.
37
Acropol : automatisation des communications radiotéléphoniques opérationnelles de
police, dénomination du système de communication radio de la police nationale.
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sont demeurées opérationnelles. Des dispositifs de communication
satellitaire ont pu être acheminés sur les lieux, mais la dotation de cet
équipement était insuffisante.
Depuis les crises, plusieurs améliorations ont été apportées. Dans
le Var, par exemple, les deux sous-préfectures (Draguignan et Brignoles)
sont dorénavant dotées de moyens de communication par satellite ainsi
que le standard de la préfecture. De tels outils ont également été
implantés dans le camion-poste de commandement mobile de la
préfecture. Une étude est en cours pour doter les maires d’un téléphone
portable satellitaire, ce qui est souhaitable
Cet effort de mise à niveau doit être poursuivi.
__________
CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
________
Les insuffisances des systèmes de prévision météorologique ont
contribué à la gravité de la crise. Ces systèmes ont été substantiellement
améliorés depuis. De même, les dispositifs d’alerte ont commencé à être
perfectionnés, mais sans cohérence suffisante. Quant à l’organisation des
secours, elle a fait l’objet d’un effort, mais les outils de planification
restent à parfaire, et certains équipements demeurent inadaptés.
La Cour et les chambres régionales des comptes formulent les
recommandations suivantes :
Pour L’Etat :
1.1 donner une cohérence d’ensemble aux mesures prises par les
communes en matière d’alerte, en articulation avec le futur système
d’information et alerte des populations (SAIP) ;
1.2
formaliser la coordination pour la prévision des submersions
marines ;
1.3 mettre à jour sans délai les schémas départementaux d’analyse
et de couverture des risques (SDACR) et les plans de secours (ORSEC)
dans les départements les plus à risque ;
1.4 mettre en place une planification de l’intervention des moyens
aériens nationaux.
Pour les conseils généraux et les services départementaux
d’incendie et de secours (SDIS) dans les zones concernées :
1.5 supprimer ou relocaliser dans les meilleurs délais les centres
de secours situés en zone inondable ;
Pour les communes des zones concernées :
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49
1.6 mettre au point et actualiser régulièrement leur plan
communal de sauvegarde ;
1.7 compléter leur système d’alerte, y compris sur une base
intercommunale lorsque cela est nécessaire.
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Chapitre III
La prévention : des insuffisances
persistantes en matière d’urbanisme
La submersion marine provoquée par la tempête Xynthia et les
inondations
du Var illustrent les effets dramatiques de certaines pratiques
constatées en matière d’urbanisme dans les départements concernés.
La prévention y apparaît très insuffisante, qu’il s’agisse de
l’information sur les risques ou des plans de prévention. En ces domaines,
des évolutions positives sont intervenues depuis les catastrophes de 2010,
mais restent largement à concrétiser. En revanche, pour les documents
d’urbanisme, souvent obsolètes, leur actualisation n’est guère engagée.
De façon générale, le contrôle de légalité sur les décisions d’urbanisme
des communes s’est révélé trop faible, et, à ce jour, a fait surtout l’objet
de mesures d’urgence.
I
-
De fâcheuses pratiques pour les décisions de
construire
Certaines constructions dans les zones à risques peuvent être
lourdes de conséquences. Les modalités des décisions publiques les
concernant méritent d’être illustrées par quelques exemples révélateurs.
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COUR DES COMPTES
1 -
Les constructions dans une zone de grand danger : le cas du
lotissement « les Voiliers » à La Faute-sur-Mer
A La Faute-sur-Mer, au lieu dit « l’anse de Virly », où le plus
grand nombre de décès a été constaté lors de la catastrophe, trois
autorisations de lotir avaient été accordées par le maire, avec l’avis
favorable du préfet et des services de l’Etat : le lotissement « l’Ostréa »
autorisé en mars 1997, avec un achèvement de tous les travaux en
novembre 2006 ; le lotissement « les Doris », autorisé
en octobre 1999 et
comprenant 84 terrains à bâtir, où des constructions sont réalisées
jusqu’en
2009 ; le
lotissement
« les
Voiliers »,
qui
mérite
un
développement spécifique, objet de l’encadré ci-dessous.
Le lotissement « les Voiliers » à La Faute-sur-Mer
Ce lotissement, comprenant 35 lots, est autorisé par le maire en
décembre 2002, avec l’accord du préfet au titre de l’article L. 146-4-II du
code
de
l’urbanisme
et
après
l’avis
favorable
de
la
commission
départementale des sites
38
. Celle-ci s’est réunie le 19 septembre 2002 et s’est
prononcée par dix votes favorables, deux votes contre et deux abstentions ; la
direction départementale de l’équipement et la direction départementale de
l’agriculture et de la forêt, alors chargée de la police de l’eau, se sont
exprimées en faveur du lotissement ; l’une des deux voix discordantes a été
celle du conservateur d’une réserve naturelle, dont la position est ainsi
résumée dans le compte-rendu de la réunion :
«M…fait observer que ce
projet se situe à une altitude de 2 ou 3 mètres. De son point de vue,
l’argument de la « dent creuse » à combler qui revient régulièrement en
commission des sites n’est pas recevable… Il ajoute que l’ensemble des
aménagements montre une incohérence territoriale majeure et il s’interroge
sur les problèmes de sécurité qui peuvent en découler ».
Le secteur à lotir a
été, en effet, présenté par le pétitionnaire et la commune, comme étant en
continuité avec d’autres secteurs bâtis et constituant donc une « dent creuse »
au milieu de zones urbanisées ; la direction départementale de l’équipement a
considéré, en commission des sites, que le projet
était «
une extension limitée
de l’urbanisation »
; quant à la direction départementale de l’agriculture et de
la forêt, elle
« n’a pas émis de réserves au titre de la police et de la gestion
de l’eau sur ce projet d’aménagement ».
38
Selon l’article L. 146-4-II du code de l’urbanisme, l’extension limitée de
l’urbanisation des espaces proches du rivage peut-être réalisée avec l’accord du
représentant de l’Etat dans le département, après avis de la commission
départementale des sites.
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D’URBANISME
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L’autorisation de lotir, avec l’accord du préfet, n’est toutefois pas
suffisante. Il faut également une autorisation au titre de la loi sur l’eau pour
un remblaiement en « zone humide », nécessaire pour mettre à niveau le
terrain par rapport aux lotissements mitoyens et à la rue des Voiliers.
Le lotisseur tente, dans un premier temps, de contester le besoin d’une
telle
autorisation :
par
plusieurs
courriers
adressés
à
la
direction
départementale de l’équipement et au préfet, de décembre 2003 et janvier
2004, il soutient que la zone, objet de l’autorisation de lotir, n’est pas classée
en « zone humide ». Le 19 janvier 2004, la direction départementale de
l’équipement répond clairement :
« …la zone d’aménagement est bien une
zone humide : " il s’agit d’une zone de marais constituée essentiellement
d’argile, le mouvement de l’eau dans le sol est très lent "… »
;
une lettre
mise à la signature du préfet est plus précise encore :
«…c’est une zone basse
située juste derrière la digue du Lay et entre plusieurs lotissements
antérieurs : la sécurité des évacuations hydrauliques (clapets) mérite d’être
étudiée, améliorée et surveillée, d’autant plus que les enjeux de l’habitat sont
plus conséquents que ceux de l’agriculture pour laquelle ces ouvrages
avaient été conçus, et que l’utilisation de cette zone basse en supprimera
l’intérêt
comme
volume
hydraulique
tampon
pour
les
lotissements
existants ».
Finalement, le lotisseur se résout à déposer sa demande
d’autorisation et, le 26 septembre 2005, le préfet signe l’arrêté
« autorisant
partiellement le remblai d’un marais pour la création du lotissement les
Voiliers à La Faute sur Mer ».
L’arrêté impose notamment qu’il ne puisse
pas y avoir de construction dans les 50 mètres jouxtant la digue, ce qui remet
en cause les lots n° 14 à 20 de la seconde tranche du lotissement. Lorsque le
lotisseur sollicite le certificat de viabilité de la première tranche du
lotissement, la direction départementale de l’équipement lui répond le
3 janvier 2006 qu’elle s’oppose à la délivrance de celui-ci, car la mise en
place du clapet anti-retour, le décanteur-déshuileur ainsi que la station de
relevage, ne sont pas réalisés et que dans ces conditions
« aucune garantie ne
peut être donnée aux futurs acquéreurs de lots quant au bon fonctionnement
de ce réseau d’eaux pluviales en cas de crue, de gros orage ou de
submersion marine ».
En définitive, le maire ne délivre pas de certificat de
conformité
globale,
mais
seulement
une
attestation
partielle,
le
18 janvier 2010.
Le déroulé des faits montre une interrogation croissante des services
de l’Etat par rapport à la dernière autorisation de lotir accordée dans le
secteur. L’autorisation de remblai au titre de la loi sur l’eau a été accordée,
alors que le plan de prévention du risque inondation était prescrit et que
l’étude d’aléa avait été produite par la société Grenobloise d’étude et
d’application hydrauliques (SOGREAH), celle-ci montrant la dangerosité de
la zone.
En définitive, il est permis de se demander si, dans le cadre de la
loi sur l’eau, un refus ne devait pas être opposé à ce projet de
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remblaiement en zone humide, alors même que l’autorisation de lotir
avait été accordée. En l’occurrence, cette loi a été interprétée d’une façon
très compréhensive pour le lotisseur et la commune, avec une prise en
compte insuffisante des exigences liées à la police de l’eau.
Il convient aussi de relever que la demande d’autorisation de lotir a
été déposée, au nom d’une société à responsabilité limitée, par un
particulier, copropriétaire d’une partie des terrains concernés, qui était
alors président de l’association syndicale
propriétaire de la digue derrière
laquelle était prévu le projet de lotissement. C’est la mère de ce
particulier, adjointe déléguée à l’urbanisme de La Faute-sur-Mer, qui a
signé à ce titre au moins un permis de construire récent dans le
lotissement.
2 -
Le respect aléatoire des règles : l’exemple d’un dossier
d’urbanisme dans le Var
Le projet immobilier dans le quartier de Valescure à Fréjus
constitue un exemple des aléas de l’application de la réglementation
applicable. Les faits sont présentés dans l’encadré ci-après.
Le projet immobilier dans le quartier de Valescure à Fréjus
Ce projet, présenté en janvier 2005, concerne la construction d’un
ensemble de 5 bâtiments comportant 157 logements, avec voirie, parkings,
espaces verts et piscine. Il est situé dans le lit majeur du Valescure, dans une
cuvette fermée à l’aval par un remblai.
Dans le plan de prévention des risques inondation (PPRI) du
Valescure approuvé par arrêté préfectoral en 2002, la zone est classée en zone
inondable bleue, c’est-à-dire autorisant la construction sous réserve de
travaux prescrits par un arrêté préfectoral de 1999, notamment la réalisation
d’un bassin écrêteur, le recalibrage de digues, le renforcement de la station de
pompage. Avant même leur accomplissement, le maire de Fréjus
accorde le
permis de construire par un arrêté du 23 février 2005. La société a
entièrement commercialisé le premier immeuble dès septembre 2006.
Le projet est, par ailleurs, soumis à autorisation préfectorale au titre de
la loi sur l’eau. La direction départementale de l’agriculture et de la forêt
(DDAF), chargée de la police de l’eau, déclare le dossier recevable le
26 novembre 2006, après la production des pièces
attestant de la réalisation
des travaux.
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D’URBANISME
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Les 2 et 3 décembre 2006, de violentes précipitations provoquent une
forte crue du Valescure. La hauteur d’eau constatée sur le terrain d’assise du
projet dépasse de beaucoup le mètre permettant un classement en zone bleue.
Les services de l’Etat établissent que cette hauteur a atteint 1,83 mètre. La
station de pompage et l’écrêteur de crues n’ont pu jouer le rôle attendu ; un
remblai imprévu a bloqué une évacuation partielle des eaux.
Le 11 décembre 2006, un arrêté préfectoral ouvre l’enquête publique.
Le 26 février 2007, le commissaire enquêteur émet un avis favorable, de
même que les mairies de Fréjus et Saint Raphaël.
Le maire accorde, par arrêté du 4 janvier 2007, une prorogation du
permis de construire. Le 22 février 2007, il délivre un permis modificatif,
augmentant le nombre de logements, porté à 176.
A la suite des inondations, la communauté d’agglomération confie une
étude au cabinet BCEOM
39
, qui se conclut en juin 2007 par un
schéma
directeur de lutte contre les inondations de la Garonne, du Pédégal et du
Valescure
.
Des travaux y sont prévus pour mettre notamment hors d’eau la
zone du projet.
Le 22 mai, les services de l’Etat se réunissent et conviennent
d’émettre un avis défavorable au projet au titre de la police de l’eau, en
constatant que le classement du terrain en zone bleue est à revoir : la hauteur
atteinte par l’eau le classe en zone d’aléa fort, où l’urbanisation est à
proscrire (elle l’est d’ailleurs, de façon générale, dans le lit majeur). Ils
décident aussi de proposer au préfet une lettre au maire pour l’informer que
les inondations de décembre 2006 sont susceptibles d’entrainer une
modification du plan de prévention du risque inondation.
Un arrêté préfectoral du 23 mai 2007 proroge le délai d’instruction de
deux mois. Le 13 juin, le conseil départemental de l’environnement et des
risques sanitaires et technologiques (CODERST) émet un avis défavorable au
projet.
39
Le cabinet
BCEOM appartient depuis 1996 au groupe EGIS. En 2007, son activité
eau a été apportée à la société « EGIS Eau », nouvellement créée. Depuis 2011, la
société s’appelle « EGIS international ».
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Le 17 juillet se tient une réunion associant le secrétaire général de la
préfecture, la sous-préfète, le maire de Fréjus, la direction départementale de
l’équipement et la direction départementale de l’agriculture et de la forêt. Il
est convenu de demander au pétitionnaire de proposer un nouvel
aménagement prenant en compte la crue et de faire expertiser par le centre
national du machinisme agricole, du génie rural, des eaux et des forêts
(CEMAGREF)
40
l’étude réalisée par BCEOM pour la communauté
d’agglomération. Le préfet en confirme les conclusions au maire par un
courrier du 3 août et précise qu’il a décidé de subordonner sa décision
définitive aux résultats de cette expertise.
En octobre 2007 est déposé à la direction départementale de
l’agriculture et de la forêt un projet modifié, qui prévoit notamment la
construction des parkings, bâtiments et voiries sur pilotis.
Dans une note au préfet du 26 octobre 2007, la direction
départementale de l’agriculture et de la forêt, souligne que
«le projet …
même modifié n’est pas conforme à la politique de l’Etat en matière de
gestion des risques naturels»
et maintient son avis défavorable. Le service
déconcentré ajoute que «
plusieurs projets d’urbanisation en zone inondable
sont en cours d’étude sur Fréjus, accompagnés de travaux importants visant
à mettre hors d’eau les zones concernées, quel que soit le niveau de l’aléa
naturel
» et qu’une «
autorisation … constituerait un précédent pouvant
rendre difficiles des refus ultérieurs.
»
Le 14 novembre 2007, le conseil départemental de l’environnement et
des risques sanitaires et technologiques (CODERST), saisi du projet modifié,
décide, sur la proposition du président de séance, de surseoir à son avis
jusqu’à l’adoption du plan prévention du risque d’inondation révisé. En
décembre,
l’avis
est
notifié
par
le
préfet
au
pétitionnaire.
40
Le CEMAGREF est devenu en 2011 l’institut national de recherche en sciences et
technologies pour l’environnement et l’agriculture (IRSTEA)
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Les études d’aléas sont lancées en 2009, préalablement à la révision
du plan. L’étude, confiée à EGIS Eau
42
, montre que le
« terrain est fortement
inondable avec des hauteurs d’eau pouvant atteindre 2 mètres. »
Concernant
la pluviométrie, il est décidé de faire expertiser les études par le centre
d’études techniques de l’équipement (CETE), qui les confirme. A plusieurs
reprises en 2009, le sénateur-maire de Fréjus intervient auprès du préfet en
faveur du projet.
Le 25 octobre 2010, le promoteur transmet au préfet une nouvelle
étude, intitulée
schéma d’aménagement hydraulique
, et sollicite une nouvelle
présentation du dossier au CODERST. Le 10 novembre 2010, le sénateur-
maire réécrit au préfet et signale le
«réel intérêt»
de l’opération, qui
comporte 50 logements sociaux.
Le 7 février 2011, plus de quatre ans après les inondations de fin
2006, un arrêté préfectoral prescrit la révision du plan de prévention du
risque inondation.
Dans une lettre de février 2011, un cabinet d’avocats, conseil du
promoteur, demande au préfet qu’une décision définitive soit prise sans
tarder. Il souligne que le préfet devait statuer dans un
« délai raisonnable
», à
peine d’engager la responsabilité de l’Etat, et rappelle les délais fixés par la
loi sur l’eau
43
. Les avocats précisent que, si l’intention du préfet était de
refuser l’autorisation, la société envisagerait alors la possibilité de faire valoir
ses droits devant la juridiction administrative, ne serait-ce qu’en vue
d’obtenir réparation du préjudice subi du fait des retards dans l’instruction du
dossier.
Le CODERST réexamine le projet le 16 mars 2011. Dans son rapport,
le directeur départemental des territoires et de la mer souligne
« que le projet
est en contradiction avec la politique de gestion des zones inondables et les
orientations du schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux
(SDAGE) … que les travaux de protection réalisés…ne suffisent pas à
supprimer les risques d’inondations, compte tenu du caractère torrentiel du
Valescure et du fait que l’ensemble immobilier se situe dans l’axe du cours
d’eau…enfin [que] les inondations survenues en juin 2010 dans la Dracénie
et la basse vallée de l’Argens ont démontré qu’une urbanisation non
maîtrisée dans les zones à risques pouvait conduire à des situations
dramatiques. »
Le
CODERST
renouvelle
son
avis
défavorable.
42
Voir note n° 39.
43
Art. R. 214-12 du code de l’environnement : « …Le préfet statue dans les trois mois
du jour de réception par la préfecture du dossier de l'enquête transmis par le
commissaire enquêteur ou par le président de la commission d'enquête. En cas
d'impossibilité de statuer dans ce délai, le préfet, par arrêté motivé, fixe un délai
complémentaire, qui ne peut être supérieur à deux mois… ».
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Le 14 avril 2011, conformément à la règlementation, le préfet
communique au pétitionnaire le projet d’arrêté portant rejet de la demande
d’autorisation. Le 2 mai 2011, le cabinet d’avocats
répond en contestant la
position
prise
et
en
insistant,
s’agissant
du
projet,
sur
son
côté
« particulièrement novateur et unique en ce qu’il prévoit des constructions
sur pilotis comportant même un dispositif de gestion du risque assurant la
sécurité des populations »
et sur le fait qu’il pourrait faire face à un
évènement pluvieux similaire à la crue de 2006,
« sans atteinte à la sécurité
des biens et personnes ».
Il précise que
« c’est sur l’invitation explicite de
M. le préfet et de ses services … que la société … a accepté de revoir son
projet ».
Il annonce sa volonté de saisir la justice administrative, en cas de
décision négative du préfet.
Le 17 mai 2011, le préfet signe l’arrêté portant rejet de la demande
d’autorisation de la réalisation de l’ensemble immobilier.
Ce dossier soulève plusieurs questions.
S’agissant du plan de prévention du risque inondation, il est
surprenant que celui de 2002 ait envisagé l’urbanisation de cette zone
compte tenu de sa situation dans l’axe du cours d’eau, dans le lit majeur,
dans une cuvette délimitée par un remblai. Il a fallu en outre quatre ans
après les inondations de décembre 2006 pour qu’intervienne l’arrêté
préfectoral de mise en révision du plan de prévention du risque
inondation, alors que les services de l’Etat avaient envisagé celle-ci
aussitôt.
Au titre de la loi sur l’eau, le CODERST a adopté un avis
défavorable le 17 juin 2007. Le préfet était dès lors en mesure de refuser
le projet, en veillant au délai fixé par les textes. Or la décision n’a cessé
d’être retardée. Il est permis de s’interroger sur la façon dont la loi sur
l’eau a été appliquée tant dans la lettre que dans l’esprit.
Le maire a accordé le permis de construire avant l’achèvement
des travaux permettant, selon le plan de prévention du risque inondation
de 2002, un aménagement de la zone. Il a prorogé ce permis, aussitôt
après les crues de décembre 2006, puis, par un permis modificatif, a
autorisé un accroissement du nombre de logements. Il a accordé ces deux
derniers permis nonobstant les risques démontrés par les inondations de
décembre 2006, cela en contradiction avec la législation et la
réglementation, notamment l’article R. 111-2 du code de l’urbanisme
44
.
44
Cet article permet de prendre en compte la connaissance d’un risque, même en
l’absence d’un plan de prévention des risques naturels, pour refuser une autorisation
d’occupation des sols.
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Lors de la délivrance du permis de construire, le contrôle de
légalité aurait pu être mis en oeuvre. Il aurait, en tous cas, dû l’être pour
les permis de prorogation et modificatif ; l’article R. 111-2 aurait, en
effet, dû être invoqué, à la suite des crues.
L’atlas des zones inondables couvrant la zone du Valescure a été
actualisé en 2008 par les services de la direction régionale de
l’environnement et devait être notifié alors par le préfet à la commune,
mais il ne l’a été qu’en juin 2011.
S’agissant de l’information des acquéreurs et locataires (IAL),
selon la réglementation, les constatations des services de l’Etat à la suite
des crues de fin 2006 devaient, avant même la révision du plan de
prévention du risque inondation, entraîner l’actualisation des données
relatives à la zone, pour être mises à la disposition des acquéreurs
potentiels. Or, les consultations effectuées en 2011 du site Internet de la
préfecture
ont montré que, dans la rubrique information des acquéreurs et
locataires, le dossier de Fréjus était resté inchangé pour le risque
inondations depuis février 2006. L’actualisation n’a été réalisée qu’à la
fin de 2011.
Enfin, est soulevée la question de la responsabilité pécuniaire de
l’Etat : le promoteur, qui a déjà commercialisé une partie de la résidence
projetée et dont la multiplication des interventions a contribué à la
longueur de la procédure
prévue par la loi sur l’eau semble désormais
envisager de se prévaloir de cette longueur afin d’invoquer cette
responsabilité.
3 -
Le coût de certaines constructions en zone inondable
Les inondations provoquées par Xynthia et celles du Var ont fait
apparaître des situations d’extrême danger sans possibilité de réduire la
vulnérabilité des bâtiments, ce qui a obligé l’Etat à racheter ces biens.
Il s’agit, par exemple, dans le Var d’une maison sans étage ni
refuge dans une zone d’expansion des crues (avenue de la Cerisaie, à
Draguignan, permis de construire délivré en 2004), d’une autre maison
avec une configuration dangereuse des lieux (boulevard du Bachaga
Boualem au Muy, permis de construire de 1979), d’une habitation isolée
sur une berge inondable face à une autre berge urbanisée (quartier les
Founses, les Arcs, permis de construire de 1970), ou d’une construction
récente (boulevard André Bouis à La Motte, permis de construire de
2007) où la submersion a été de l’ordre de deux mètres. Le rachat de ces
quatre maisons a coûté 870 000 €.
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Sur la côte atlantique, certaines
zones ont montré leur dangerosité
au moment de la catastrophe, en raison de l’ampleur du phénomène de
submersion. Pour d’autres, comme certains lotissements de la Faute-sur-
mer ou la zone d’Aytré, le phénomène de cuvette était cependant
parfaitement identifié auparavant. Le coût pour les finances publiques du
rachat des maisons du sud-Vendée situées en zone d’expropriation (dans
les zones les plus dangereuses) se monte à plus de 100 M€. Pour Aytré
seule, la facture s’élève à 6,2 M€.
La zone de solidarité d’Aytré
Cette zone, comme le montre la carte ci-après, comprend notamment
un espace situé au fond d’une baie dénommée Anse de Godechaud, en
cuvette, bordé à l’arrière par le remblai de la voie de chemin de fer et avec un
cordon dunaire réduit en bord de plage. L’atlas des risques littoraux de 1999
a catalogué l’endroit en zone submersible. Celui-ci a bien entendu été
submergé lors de la tempête Xynthia.
Dans cette zone dont les dangers sont visibles à l’oeil nu, plusieurs
biens immobiliers ont été construits : un hôtel avec un permis de construire
récent (délivré en juillet 2006), la seule précaution prise étant une
construction sur pilotis ; un immeuble avec sept appartements, le permis de
construire ayant été délivré en février 1996 ; un établissement ostréicole très
ancien reconverti en maison d’habitation avec trois chambres d’hôtes.
Après la tempête Xynthia, cet endroit a été inclus dans la zone de
solidarité. Dans un premier temps, l’hôtel a été classé en zone orange, avec
prescriptions de travaux obligatoires, mais le préfet a décidé le 2 mai 2010 de
le réintégrer en zone de solidarité, du fait de l'incapacité du propriétaire
d’assurer les prescriptions de sécurité requises (une évacuation par le premier
étage). En conséquence, le rachat du restaurant par l’Etat a été lui aussi
décidé.
Au total, le coût pour l’Etat des décisions d’urbanisme dans ce secteur
s’élève à 6,2 M€ (acquisition de l’hôtel-restaurant et de deux maisons), sans
compter les campings, où la procédure est en cours.
Les autorisations d’urbanisme accordées dans ces zones, outre
leurs conséquences tragiques sur les vies humaines, ont, au bout du
compte, coûté très cher à l’Etat et donc aux contribuables.
***
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D’URBANISME
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L’examen précis de quelques dossiers d’urbanisme montre la
volonté de plusieurs communes, avant la catastrophe, d’appuyer les
promoteurs et d’autoriser les constructions, en minorant, voire en ignorant
les risques naturels. Il témoigne aussi de la faiblesse de l’Etat, notamment
de certains de ses représentants, qui ont pris des libertés avec les lois
qu’ils
sont
chargés
d’appliquer,
notamment
la
loi
sur
l’eau.
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Après les catastrophes, des mesures d’urgence sont prises par les préfets.
En Vendée, le préfet écrit en mars 2010 aux maires de La Faute-sur-Mer
et de L’Aiguillon-sur-Mer pour leur demander d’interdire provisoirement
toute construction nouvelle et de retirer des permis de construire
récemment délivrés. En Charente-Maritime, aussitôt après la tempête, une
suspension provisoire de tous les permis dans les zones sinistrées est
décidée. Un « porter à connaissance » donnant une nouvelle appréciation
du risque est envoyé aux communes du nord du département en juillet
2010.
Dans le Var, dès juin 2010, le préfet écrit aux maires pour leur
demander d’appliquer les dispositions de l’article R.111-2 et de refuser
tout permis de construire dans les zones ayant été inondées, y compris
celles considérées comme non inondables dans les plans de prévention du
risque inondation approuvés, prescrits ou en cours d’étude. Au plan
national, des circulaires demandent aux préfets de s’opposer aux projets
de construction dans les zones à risque et de s’appuyer, si besoin, sur
l’article R. 111-2.
Ces mesures d’urgence ont certes été utiles, mais leur impact
s’étiolera progressivement si le relais n’est pas pris par des textes et des
dispositions à portée pérenne. Seuls des documents adaptés d’urbanisme
et de prévention des risques, ainsi qu’une détermination suffisante de
l’Etat pour les faire appliquer, pourront vraiment changer
la situation.
II
-
L’information défaillante sur les risques
Le code de l’environnement établit le droit à l’information des
citoyens sur les risques majeurs. Son application a souffert de nombreuses
imperfections avant la crise, qui ne sont pas toutes corrigées.
A - Les documents d’information sur les risques
1 -
Le dossier départemental sur les risques majeurs (DDRM)
Établi par le préfet, le dossier départemental sur les risques
majeurs énumère les risques majeurs dans le département et leurs
conséquences prévisibles. Il précise les mesures générales de prévention,
de protection et de sauvegarde. Il est tenu à la disposition du public. Il
doit être mis à jour dans un délai qui ne peut excéder cinq ans.
Avant les catastrophes de 2010, le contenu des dossiers
départementaux sur les risques majeurs apparait trop général, ne facilitant
pas une déclinaison précise des risques dans chaque commune. Dans le
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D’URBANISME
63
Var, la présentation du risque inondation, qui concerne l’essentiel des
communes, est très synthétique, avec cinq pages de texte qui lui sont
consacrées, plus quelques cartes fort générales. En Charente-Maritime,
seules quatre pages sur 77 traitent du risque de submersion marine
Dans aucun des trois départements, le dossier départemental n’a
été actualisé dans les délais règlementaires
: dans le Var, arrêté en 1995, il
n’a été actualisé que treize ans plus tard, en 2008 ; en Vendée, réalisé en
1995, puis réécrit en 2003, il n’a été approuvé dans sa dernière version
qu’en août 2005, soit plus de dix ans après ; en Charente-Maritime, sa
version 2002 a été remplacée en janvier 2008.
Des initiatives sont intervenues après les évènements de 2010,
mais n’ont pas encore abouti. Le préfet du Var a demandé en août 2011
une mise à jour du dossier départemental, au plus tard en 2013. Le travail
est en cours, avec la volonté d’élaborer le «
document le plus exhaustif
possible »,
qui soit d’une meilleure précision pour les inondations, et avec
l’ambition de disposer d’un document numérique actualisable en continu
et accessible depuis un site Internet. En Vendée
,
l’actualisation du
dossier
départemental est bien engagée, avec l’objectif d’aboutir en 2012.
2 -
Le document d’information communal sur les risques majeurs
(DICRIM)
Elaboré par le maire, le document d’information communal sur
les risques majeurs doit permettre de relayer l’information de prévention
au niveau local. Il indique les mesures de prévention, de protection et de
sauvegarde répondant aux risques majeurs susceptibles d’affecter la
commune.
Une minorité de communes était dotée d’un tel document avant
les catastrophes. Aucune des trois du Sud Vendée n’en disposait. En
Charente-Maritime (472 communes), la préfecture n’avait connaissance
que de huit documents d’information communaux ; ni Charron ni Fouras,
localités très touchées par la tempête, n'en étaient dotés. Sur les 153
municipalités
du
Var,
seules
douze
possédaient
un
document
d’information communal ou un plan communal de sauvegarde en tenant
lieu ; neuf des treize communes les plus sinistrées en étaient toutefois
dotées.
De manière générale, les dossiers étaient peu détaillés,
notamment pour la cartographie du risque
ou les règles d’urbanisme ; ils
n’étaient guère opérationnels. Quant aux services de l’État dans le Var, ils
n’étaient pas informés de leur actualisation.
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COUR DES COMPTES
Après les inondations, les trois préfectures ont mis en place des
structures d’aide aux communes pour leur réalisation. Pourtant, à la mi-
mars 2012, soit près de deux ans après la catastrophe dans le Var, seules
sept communes de ce département ont pu faire l'objet d'une visite d’appui
et seuls 32 document d’information communal sur les risques majeurs ont
été transmis à la préfecture, alors que la quasi-totalité des collectivités est
concernée.
La mise en place des documents d’information communaux et
l’amélioration de leur contenu doivent être généralisées. L’appui des
services déconcentrés de l’Etat, même s’il n’a pas à être exclusif, est
souhaitable et devrait être envisagé dans les directives nationales et les
moyens alloués à ces services.
3 -
Les atlas des zones inondables (AZI)
L’établissement d’une cartographie des zones inondables a été,
depuis le milieu des années quatre-vingt-dix, une action prioritaire des
services déconcentrés de l’Etat. L’administration centrale du ministère
chargé de l’environnement a mis en place sur le réseau Internet un
serveur national « Cartorisque », afin de publier l’ensemble des cartes des
risques naturels et technologiques.
Si l’atlas des zones inondables vise d’abord l’information sur les
risques et n’a pas de valeur contraignante en soi, il peut toutefois servir à
l’action, pourvu qu’il soit bien connu et que son contenu soit pertinent.
Il peut être exploité dans la révision des documents d’urbanisme,
selon les dispositions de l’article L. 121-1 du code de l’urbanisme.
45
Il
peut même être utilisé par le préfet pour contraindre une commune à
modifier son plan local d’urbanisme, afin qu’un risque d’inondation
y
soit pris en compte : il peut être érigé à cette fin en projet d’intérêt
général
46
. Il peut être invoqué, en l’absence d’autre document plus précis,
dans le cadre du contrôle de légalité sur les actes d’urbanisme des
45
Cet article précise que
« les schémas de cohérence territoriale, les plans locaux
d'urbanisme et les cartes communales déterminent les conditions permettant
d'assurer, dans le respect des objectifs du développement durable…la prévention des
risques naturels prévisibles, ... »
46
La circulaire conjointe du 7 avril 2010 des ministres chargés de l’écologie et de
l’intérieur, relative aux mesures à prendre suite à la tempête Xynthia, adressée aux
préfets du littoral métropolitain, puis la circulaire aux préfets du 25 juin 2010, signée
du directeur de cabinet du ministre de l’intérieur et relative aux mesures à prendre en
matière de risques d’inondation suite aux intempéries dans le Var, soulignent cette
possibilité.
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D’URBANISME
65
collectivités territoriales, à travers l’article R. 111-2 du code de
l’urbanisme.
La diffusion des informations disponibles par les services de
l’Etat au moyen du « porter à connaissance » auprès des collectivités, est
donc essentielle. Cela n’a pas toujours été le cas. Si la diffusion des atlas
ou d’autres cartographies a été convenable dans les deux départements
atlantiques, il n’en a pas été de même dans le Var : les atlas de nouvelle
génération n’y ont, en effet, pas été transmis par le préfet aux maires
avant la catastrophe de juin 2010. Leur contenu s’est pourtant révélé
proche des phénomènes constatés lors de ces inondations.
La non-transmission des atlas des zones inondables dans le Var
A la suite des instructions nationales, un premier atlas des zones
inondables, élaboré en 1994, est adressé par le préfet aux maires en juin
1995. Une nouvelle génération d’atlas, établie selon une approche
géomorphologique, est mise à l’étude en 2004. En mars 2006, le préfet valide
la première phase d’étude, qui concerne notamment la Nartuby et l’Argens,
mais ne porte pas l’atlas à la connaissance des maires.
Le 22 avril 2008, le directeur régional de l’environnement saisit le
préfet de la deuxième phase d’étude, relative notamment au haut bassin
versant de l’Argens, pour lui en proposer la validation ; le courrier ne reçoit
pas de réponse. Le 2 juin 2008, la directrice départementale de l’équipement
adresse au préfet une lettre de rappel, avec un projet qui serait à diffuser aux
maires. D’autres relances sont faites le 22 janvier 2009 par le directeur
régional
de
l’environnement et
le
10
mars
2009
par
la
direction
départementale de l’équipement et de l’agriculture. Tous ces courriers restent
sans suite.
A la suite de la tempête Xynthia, dans la circulaire du 7 avril 2010,
le ministre chargé de l’écologie et celui de l’intérieur demandent aux préfets
du littoral métropolitain que
« l’ensemble des études techniques dont dispose
l’Etat en matière de prévention des risques naturels soit porté à la
connaissance des communes ou de leurs groupements compétents… »
, en
précisant que
« toute omission sera rectifiée sans délai ».
Les ministres
ajoutent
: « A ce titre, il convient de s’assurer de la diffusion des atlas de
zones inondables (AZI) et de zones submersibles, éventuellement après leur
mise à jour. Ces documents seront parallèlement transmis par le biais du
porter à connaissance. »
Ces directives ministérielles ne reçoivent pas plus
de suite dans le Var, s’agissant de la diffusion des atlas, que les notes
adressées par les chefs de services déconcentrés au préfet.
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COUR DES COMPTES
Au lendemain des inondations dans le Var, le 17 juin 2010, le
directeur départemental des territoires et de la mer adresse une note au préfet
réitérant sa proposition de validation officielle des atlas. Il est à nouveau
sursis à leur envoi : en effet, un relevé exhaustif des laisses de crue
47
ayant
été engagé, le souci est de ne pas adresser des renseignements différents aux
maires, à quelques mois d’écart. Ces relevés de laisse de crues sont envoyés
fin 2010 aux maires ; dès l’arrêté de prescription du plan de prévention du
risque inondation en septembre 2010, une carte d’application des dispositions
de l’article R. 111-2 du code de l’urbanisme a été jointe à cet arrêté
,
étant
précisé que
« cette carte a été élaborée à partir de l’atlas des zones
inondables réalisé par la direction régionale de l’environnement, de
l’aménagement et du logement en 2007
»
48
. Le 27 juin 2011, les atlas sont
enfin diffusés par le préfet aux treize maires concernés, accompagnés d’une
lettre précisant tout leur intérêt.
Ces atlas avaient certes avant 2010 été mis en ligne sur les sites
Internet de la direction départementale des territoires et de la mer et de la
direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logment.
Leur non-transmission officielle aux maires a toutefois permis à ceux-ci
d’expliquer qu’ils n’en ont pas eu connaissance, de sorte qu’ils n’ont pu que
difficilement se voir reprocher de ne pas les avoir pris en compte dans leurs
décisions d’urbanisme.
Lorsqu’ils ont été diffusés, ces atlas sont restés peu utilisés.
Selon le témoignage de l’ancien maire
49
de l’une des communes du sud
de la Vendée
,
«
l’atlas des zones inondables,…en 2002, a été considéré à
l’époque par la population comme un document fantaisiste pour les uns et
insupportable pour les autres ».
En Charente-Maritime, l’atlas de
Charron, explicite sur la nature et l’étendue des risques d’inondation, ne
conduit pas la municipalité à modifier ses documents d’urbanisme et n’est
guère utilisé par celle-ci dans l’examen des autorisations de construire,
instruites il est vrai jusqu’en 2009 par les services de l’Etat. Quant à ce
dernier, il ne se sert guère de l’atlas.
Les atlas des zones inondables ne doivent pas seulement être
connus des élus, mais pouvoir être consultés par les citoyens, dont le droit
à l’information sur les risques est consacré par la loi. Des consultations
effectuées en 2011 sur les sites Internet ont cependant montré la difficulté
de l’exercice et les insuffisances de l’information disponible et accessible.
47
Laisse de crue : trace d’écoulement ou de débordement qui indique que la crue a
atteint le secteur.
48
Lettre du 30 décembre 2010 du préfet du Var (direction départementale des
territoires et de la mer) au maire de Draguignan
49
Lettre du 18 janvier 2012 de M. Michel Fardin, ancien maire de la Tranche-sur-
Mer, à la présidente de la chambre régionale des comptes des Pays de la Loire.
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D’URBANISME
67
Le contenu des atlas est enfin de qualité variable. En Vendée, la
cote de 4 mètres NGF
50
retenue par l’atlas de 2002 a été largement
dépassée, notamment dans l’estuaire du Lay. En Charente-Maritime, les
différences ont été significatives entre les données des atlas et celles
relevées sur le terrain.
Plusieurs initiatives ont été prises depuis 2010 pour améliorer la
situation. La circulaire interministérielle du 7 avril 2010 demande aux
préfets qu’un porter à connaissance soit adressé aux communes. Des
réunions sont, par ailleurs, organisées avec les services déconcentrés de
l’Etat, en particulier pour chacune des façades littorales, au cours
desquelles est soulignée l’importance de la qualité de l’information sur
les risques de submersion marine.
Les évaluations préliminaires des risques (EPRI) prévues par la
directive européenne de 2007 doivent être réalisées par grands bassins
hydrographiques pour la fin de 2011. Cette directive conduira aussi à
élaborer ou réactualiser une cartographie des surfaces inondables et des
risques d’inondation pour les territoires à risques importants (TRI) à
l’horizon 2013.
Les directives nationales données après les catastrophes de 2010
doivent partout être mises en oeuvre dans les départements, et les atlas des
zones inondables ou autres cartographies existantes doivent être diffusés
et mis à la disposition du public.
L’Etat doit accroître son effort d’élaboration de la cartographie
des zones inondables, notamment pour se conformer à la directive
européenne. Il convient que les moyens nécessaires soient mis en oeuvre
afin de respecter les délais de réalisation, qu’une attention particulière soit
accordée à la qualité du contenu de la cartographie, enfin que celle-ci soit
portée à la connaissance des décideurs, ainsi que du public.
Un pilotage national, avec une remontée régulière d’informations
de la part des autorités préfectorales et la tenue de tableaux de bord, est
souhaitable, tant pour les mesures d’urgence que pour l’application de la
directive européenne.
50
NGF : nivellement général de la France. Le zéro du système altimétrique du
nivellement général de la France est basé sur un niveau de la mer mesuré aux
marégraphes de Marseille et d’Ajaccio.
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COUR DES COMPTES
B -
L’information des acquéreurs et locataires (IAL)
Pour que l’information sur les risques joue pleinement son rôle en
matière de prévention, il importe qu’elle soit portée de façon efficace à la
connaissance des acquéreurs ou des locataires de biens immobiliers.
La loi du 30 juillet 2003 instaure l’obligation d’information des
acquéreurs et des locataires (IAL) de biens immobiliers, d’une part, sur
les risques affectant le bien, d’autre part, sur les sinistres résultant de
catastrophes ayant affecté l’immeuble concerné. Cette obligation
concerne les zones couvertes par un plan de prévention des risques,
prescrit ou approuvé. Elle est applicable depuis le 1
er
juin 2006.
Le préfet doit prendre un arrêté pour établir la liste des
communes concernées par l’information des acquéreurs et locataires, puis
pour chacune d’entre elles, un arrêté fixant notamment la liste des risques
auxquels celle-ci est exposée. Ces arrêtés doivent être régulièrement mis à
jour, selon les évolutions règlementaires des plans de prévention des
risques ou lorsque des informations nouvelles sur les risques sont connues
des services de l’Etat. A partir des informations mises à disposition par le
préfet, un « état des risques naturels et technologiques » est établi par
chaque vendeur ou bailleur, selon un modèle défini par arrêté du ministre
chargé de la prévention des risques.
1 -
Les insuffisances du dispositif existant
Dans le Var, les arrêtés préfectoraux de mise en oeuvre, qui
concernaient 110 communes, sont intervenus en février 2006. Aucune
actualisation relative aux inondations n’a ensuite été faite avant 2011,
après que
la Cour ait appelé l’attention des autorités sur les faiblesses du
dispositif. Les arrêtés ont alors été repris et concernent désormais
153 communes ; en toute fin d’année 2011, la rubrique « information des
acquéreurs et locataires » a été mise à jour sur le site d’information
géographique (SIG) des services de l’Etat. Avant cette actualisation, la
commune
de
Chateaudouble,
par
exemple,
où
les
inondations
provoquèrent des décès, et celle des Arcs ne figuraient toujours pas sur le
site au titre des « inondations », quoique depuis la catastrophe, un plan de
prévention du risque inondation y eût été prescrit. Pour Draguignan, le
tronçon du Salamandrier était considéré comme non inondable, alors qu’il
avait été fortement envahi par les eaux ; le nouveau plan de prévention du
risque inondation prescrit et les relevés de laisses de crue des inondations
de juin 2010 n’étaient pas pris en compte.
Les lacunes du dispositif d’information des acquéreurs et
locataires ont également été significatives sur la côte atlantique. Outre
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D’URBANISME
69
l’absence des communes non couvertes par un plan de prévention du
risque inondation, comme Charron, où la tempête Xynthia a provoqué
trois décès, le risque littoral, à quelques exceptions près, n’était pas pris
en compte et n’apparaissait donc pas dans l’information des acquéreurs et
locataires. En Vendée, pour les communes de La Faute-sur-Mer et de
L’Aiguillon-sur-Mer, l’arrêté préfectoral au sujet des risques, qui aurait
dû intervenir dès février 2006, au moment de la mise en oeuvre de
l’information des acquéreurs et locataires, n’est pris qu’à la fin d’octobre
2007, après la mise en application anticipée de certaines dispositions du
plan de prévention du risque inondation.
La mise à jour effectuée dans le Var, qui a représenté un effort
significatif des services de l’Etat, n’est pas généralisée sur le territoire
national. Les faiblesses de l’information des acquéreurs et locataires
relevées lors du contrôle gardent leur actualité et concernent : la
composition même du site de l’information des acquéreurs et locataires,
qui ne comporte pas toutes les informations dont l’Etat dispose
; le
contenu des plan de prévention du risque inondation, qui minore voire ne
prend pas en compte certains risques connus ; le défaut d’actualisation,
qui empêche l’information sur des risques avérés.
D’autres faiblesses sont soulignées par les services de l’Etat.
L’information n’est obligatoire que dans les communes où un plan de
prévention du risque inondation a été prescrit ou approuvé. Les
informations dont dispose l’administration ne sont pas homogènes : tantôt
l’atlas seul, tantôt un plan de prévention du risque inondation, tantôt une
étude. La conciliation de la complexité des connaissances, ou de leur
absence, avec la simplicité de l’information constitue un exercice délicat
et il n’est pas toujours aisé, au vu du dossier communal d’informations,
de déterminer si un bien est exposé à un risque et quel est le degré
d’exposition à ce risque.
2 -
L’expérience des notaires
« L’état des risques naturels et technologiques
»
est joint aux
promesses et actes de vente. Il est établi dans la plupart des cas par un
expert, appelé diagnostiqueur, et fait partie d’un ensemble, qui comprend
également les diagnostics relatifs à l’amiante, au plomb, aux termites, à
l’installation de gaz, aux installations électriques, à la performance
énergétique. Il comporte généralement des cartes.
L’examen de quelques « états », chez deux notaires à Draguignan
et La-Tranche-sur-Mer, conduit à plusieurs observations. Dans le modèle
établi par le ministère, le risque « submersion marine » ne figure pas ; il
n’est pas prévu que soit précisée la nature de la zone du plan de
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COUR DES COMPTES
prévention du risque inondation, par exemple bleue ou rouge, où le bien
immobilier est implanté ; les plans fournis ne contiennent souvent pas les
éléments - comme l’orientation, l’échelle et la référence cadastrale -
nécessaires à leur lecture ; « l’état » est rempli différemment selon les
diagnostiqueurs, des rubriques n’étant fréquemment pas complétées ;
pour celle consacrée à la localisation, il n’est pas toujours précisé si
l’immeuble se trouve à l’intérieur ou à l’extérieur d’un périmètre à
risques.
Dans le dispositif d’information des acquéreurs et locataires, tous
les secteurs à risques ne sont pas couverts. Seuls ceux disposant d’un plan
de prévention du risque inondation, prescrit ou approuvé, le sont. Par
ailleurs, l’information à laquelle le dispositif donne accès est souvent
parcellaire, ne prenant pas en compte l’ampleur des risques, et elle n’est
pas actualisée. Quant à l’information diffusée aux particuliers chez les
notaires, à travers
l’état des risques naturels et technologiques, elle n’est
pas assez précise.
Il convient d’actualiser les sites « information des acquéreurs et
locataires » avec les données issues des plus récentes concrétisations des
risques, et de revoir « l’état des risques naturels et technologiques », de
sorte qu’il indique clairement ceux pesant sur l’immeuble et que
l’acquéreur ou le locataire soit incité à consulter le site des services de
l’Etat.
De façon générale, le dispositif doit être relancé à partir d’un bilan
de l’existant, notamment par une actualisation des textes, pour que soient
couverts tous les secteurs à risques et que ceux-ci soient pris en compte
de façon exhaustive. Une réflexion doit enfin être engagée pour rendre les
sites d’information des acquéreurs et locataires mieux connus du public et
faciliter leur accès.
Il serait enfin opportun de mettre en place un véritable pilotage par
le ministère de tutelle de la mise en oeuvre locale de cette relance du
dispositif.
III
-
Les plans de prévention des risques
inondation
La prescription d’un plan de prévention des risques inondation
(PPRI), qui fait partie des plans de prévention des risques naturels
(PPRN), a lieu par arrêté préfectoral, ainsi que son adoption, après
enquête publique et, notamment, avis des conseils municipaux concernés.
En cas d’urgence, le préfet peut, après consultation des maires concernés,
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D’URBANISME
71
rendre immédiatement opposables certaines des dispositions d’un plan de
prévention des risques naturels.
Le plan peut imposer des mesures pour réduire la vulnérabilité de
l’habitat existant, comme les niveaux refuges, et prévoir les aides
correspondantes aux particuliers.
Surtout, il délimite les zones à risque et vaut servitude d’utilité
publique. Il doit être annexé au plan d’occupation des sols (POS) ou au
plan local d’urbanisme (PLU). Contrairement à l’atlas des zones
inondables, le plan de prévention du risque inondation a donc une valeur
contraignante permettant de maîtriser l’urbanisation dans les zones à
risque. Encore faut-il qu’il soit prescrit, puis approuvé, et que son contenu
corresponde aux risques existants.
A -
Les aléas de l’élaboration des plans de prévention
des risques inondation
1 -
Dans le Var
Avant la crise, parmi les treize communes les plus concernées par
les inondations, trois seulement, dont Draguignan, étaient couvertes par
un plan de prévention du risque inondation. Près de huit années et demie
s’étaient écoulées entre la prescription (7 juillet 1997) et l'approbation des
plans (30 décembre 2005). Ceux-ci devant être annexés au plan
d’occupation des sols des communes, les arrêtés des trois maires
concernés ont bien actualisé le plan d’occupation des sols en visant le
plan de prévention du risque inondation, mais sans conduire à son terme
la procédure destinée à rendre cohérents les zonages des deux documents.
Dans quatre communes, les plans de prévention du risque
inondation avaient été prescrits, mais n’avaient pas dépassé le stade de
l’enquête publique : quatre ans après leur prescription en avril 2000,
l’enquête publique s’était déroulée en avril 2004, puis, devant
l’opposition des communes (à l'exception de l’une d’entre elles) et de la
chambre d’agriculture, le préfet n'avait pas approuvé les plans. Parmi ces
localités figurait Fréjus, qui possédait un plan de prévention du risque
inondation, mais pour un seul cours d’eau, le Valescure, alors que c’est
l’Argens qui a été l’une des causes de la catastrophe de 2010.
Dans deux autres communes, la prescription du plan en janvier
1997 et en avril 2000 n’a même pas débouché sur une enquête publique.
Dans l’une de ces communes, la réunion destinée à engager l’étude s’est
tenue en août 2008 plus de huit ans après la prescription ; le projet de plan
a été présenté à la commune en 2009 et une réunion publique a enfin eu
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72
COUR DES COMPTES
lieu en avril 2010, avec l’ouverture d’un registre d’observations en
mairie.
Aucun plan n’avait enfin été prescrit dans quatre communes, dont
l’une a enregistré trois décès.
S’agissant du contenu des plans, le rapport des inspections relève,
dans ceux qu’elles ont examinés, un texte relatif à l’aléa de référence
« ambigu et peu clair »
et qui
« n’est pas conforme aux instructions
nationales ».
Elles constatent que la crue de 1827 de la Nartuby,
« la crue
historique la plus haute reconnue »
, est quelquefois citée, mais que
« les
services n’en ont tiré aucun parti… sauf pour en acter le caractère
formidable sans le quantifier ».
Elles s’interrogent aussi sur la façon dont
les bureaux d’études ont calculé les caractéristiques de l’écoulement.
Enfin, elles observent que
« les règlements sont rédigés a minima »
51
.
L’exemple du secteur du Salamandrier dans la zone Saint-Hermentaire à
Draguignan est de ce point de vue significatif.
Le plan de prévention du risque inondation de Draguignan
Ce plan, approuvé par le préfet en décembre 2005, avait fait l’objet
d’un avis défavorable du conseil municipal, compte tenu notamment des
contraintes qu’il ferait peser sur les secteurs à vocation économique, sur la
perte de la valeur patrimoniale des terrains, sur la réduction de la capacité des
hébergements touristiques et enfin sur le frein au développement des
exploitations agricoles.
Son contenu n’est pas exempt de critiques. Sa note de présentation fait
référence à la catastrophe de 1827, en reproduisant en annexe un texte intitulé
« Débordement de la rivière Nartuby en 1827 »,
mais sans aller plus loin
dans l’exploitation des leçons de cette
« formidable crue ».
Il est vrai qu’il
paraît difficile de quantifier cet événement sur la seule base d’une chronique
de l’époque. Le plan de prévention du risque inondation ne couvre en outre
que les inondations liées à la Nartuby, celles pouvant résulter de
ruissellements naturels ou urbains n’étant pas prises en compte
.
Les services
de l’Etat, conscients de ce manque, le signalent par un avertissement au
lecteur sur le site Internet consacré à l’information des acquéreurs et des
locataires (IAL).
La carte du plan de prévention du risque inondation comporte enfin
des dispositions qui suscitent une interrogation, en particulier pour le secteur
du Salamandrier dans la zone de Saint-Hermentaire.
51
Ces citations sont extraites des pp. 37 et 38 du rapport intitulé « Retour
d’expérience des inondations survenues dans le département du Var les 15 et 16 juin
2010 ».
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D’URBANISME
73
Sur ce secteur, situé entre la rivière Nartuby et une butte sur laquelle a
été bâti un centre commercial, ont été construits notamment les services
techniques de la ville et le centre de secours principal (CSP).
La sous-préfète, un colonel des sapeurs-pompiers et le maire, réunis
dans l’après-midi du mardi 15 juin dans cette caserne pour faire un point de
la situation, furent surpris par la montée extrêmement rapide des eaux et
durent quitter précipitamment les lieux, pour improviser un premier poste de
commandement opérationnel dans le centre commercial voisin. La direction
départementale des services d’incendie et de secours était de son côté
submergée par 1,6 mètre d’eau et le centre opérationnel départemental
(CODIS), ainsi que celui pour la réception des appels d’urgence, abrités dans
le bâtiment de la direction, étaient de fait mis hors service.
Une visite sur les lieux montre que le centre de secours principal a été
construit à proximité immédiate de la rivière Nartuby, dans ce qu’il convient
de considérer sans doute comme le lit majeur de celle-ci. Le permis de
construire a été accordé par le maire de Draguignan le 12 novembre 1990, le
dossier ayant été instruit par la direction départementale de l’équipement
(DDE). Celle-ci l’avait présenté comme un
« projet conforme aux
dispositions
règlementaires
applicables »
,
sans
évoquer
de
risque
d’inondation. L’extension de cette caserne, dans les années 2004-2005, n’a
pas appelé plus d’observations.
Comme le soulignent les responsables du service départemental
d’incendie et de secours, le projet est effectivement localisé en zone non
inondable dans
le plan de prévention du risque inondation de 2005. C’est ce
que montre le document cartographique ci-après : des zones inondables,
rouges et bleues, existent en amont du secteur du Salamandrier puis en aval
de celui-ci, comme si, en cas de fortes inondations, la rivière quittait son lit
en amont du secteur, puis le regagnait le temps de dépasser et d’épargner
celui-ci, enfin en sortait à nouveau une fois ce franchissement accompli.
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D’URBANISME
75
La question posée est donc de savoir comment l’aléa et la cartographie
ont été établis. La direction départementale des territoires et de la mer,
interrogée à ce sujet s’est renseignée auprès du bureau d’études qui avait
réalisé la modélisation du plan de prévention du risque inondation. Ce bureau
précise que
« les cotes de référence sont issues d’une étude CETE
52
faite pour
la DDE en 1996 »
,
que
« le tronçon du Salamandrier a été … recalibré au
moment de la mise en place de la ZI
53
antérieurement à cette étude »
, qu’aux
endroits concernés
, « les cotes calculées par le CETE …en lit mineur sont en
dessous des cotes des terrains en lit majeur »
, enfin qu’il
« était légitime de
ne pas considérer cette zone comme inondable au vu des cotes CETE »
.
D’autres précisions recueillies, il ressort que le recalibrage au moment de la
création de la zone avait été fait pour un débit de 350 m
3
/s et que, dans l’une
des études préalables au contrat de rivière en 2000, la capacité du lit dans la
zone était estimée entre 240 et 280 m3/s. Le débit centennal retenu pour le
PPRI avait été fixé à 245 m3/s. Le 15 juin 2010, le débit maximum instantané
dans la zone s’est établi, selon une expertise, à 443 m
3
/s.
Lors de l’élaboration du plan de prévention du risque inondation,
l’hypothèse était celle d’un débordement de la Nartuby, sans considération
des ruissellements pouvant survenir, et qui se sont effectivement produits lors
de la catastrophe. De même, le phénomène des embâcles n’avait pas été pris
en compte, la survenance totalement aléatoire de ceux-ci ne pouvant certes,
selon les informations recueillies, être intégrée dans l’établissement de cartes
à partir d’une modélisation des écoulements.
Ces points précisés, les discussions à l’époque de l’élaboration des
cartes d’aléas auraient été vives, deux communes, dont celle de Draguignan,
ayant notamment fait réaliser des « études complémentaires » visant en
réalité à diminuer les zones inondables ou à en réduire l’aléa. On est en
définitive conduit à se demander si, malgré le principe selon lequel « l’aléa
ne se discute pas », celui-ci n’a, en réalité, pas été soumis à débat et si
l’hypothèse la plus « pessimiste » n’a pas été écartée permettant ainsi de
justifier les constructions qui avaient été faites dans ce secteur, notamment de
la caserne des pompiers chargés d’intervenir, en cas d’inondations.
Après la catastrophe, en septembre 2010, des plans de prévention
du risque inondation ont été prescrits ou mis en révision dans les treize
communes. Leur élaboration a été lancée sans tarder. Après leur avoir été
présentés en septembre-octobre 2011, avec un aléa arrêté à partir des
relevés de laisses de crue réalisés à l’initiative de la direction
départementale des territoires et de la mer, douze projets de plans de
prévention du
risque inondation
54
ont été transmis aux collectivités à la
52
CETE : centre d’études techniques de l’équipement.
53
ZI : zone industrielle
54
Le treizième plan de prévention du risque inondation exige quelques études
techniques complémentaires.
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COUR DES COMPTES
fin de 2011 et au début de 2012. A l’issue du délai d’un mois accordé aux
maires pour émettre leurs observations, les projets ont été approuvés par
anticipation par le préfet. La phase de concertation avec les acteurs
locaux et la population, en vue de l’aboutissement des plans définitifs, est
prévue à partir du second semestre 2012. L’ambition du préfet est
d’adopter l’ensemble des plans de prévention du risque inondation
définitifs d’ici à la
fin de l’année.
Par ailleurs, les inondations de novembre 2011 devraient
conduire à en prescrire d’autres.
2 -
En Vendée
Le plan de prévention du risque inondation de l’estuaire du Lay,
qui concerne les communes de L’Aiguillon-sur-Mer et de La Faute-sur-
Mer, est prescrit par un arrêté préfectoral du 29 novembre 2001 pour les
risques inondation et submersion marine. Sa mise en application anticipée
n’est décidée par le préfet que près de six ans plus tard en juin 2007 et, au
moment de la catastrophe en février 2010, plus de huit ans après, le plan
définitif n’est toujours pas approuvé.
La gravité du risque est pourtant connue et soulignée dans
plusieurs documents, par exemple dans la plaquette d’information relative
au plan de prévention du risque inondation et diffusée en juillet 2007 aux
habitants, ou encore dans une note de la direction départementale de
l’équipement et de l’agriculture du 21 août 2009, qui présentait ces
communes
«
comme des secteurs particulièrement sensibles, de par leur
altitude moyenne relativement faible et leur situation en zone
estuarienne »,
avec une accentuation du risque en raison de leur
« situation d’interface entre les eaux marines et fluviales ».
Le récit ci-après illustre les difficultés relatives à l’adoption du
plan de prévention du risque inondation et la détermination insuffisante
des autorités de l’Etat pour les surmonter.
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D’URBANISME
77
Le difficile et trop long cheminement du plan de prévention du risque
inondation de l’estuaire du Lay
Après la prescription du plan de prévention du risque inondation en
novembre 2001, L’Aiguillon et La Faute font partie des 28 communes
auxquelles le préfet adresse en septembre 2002 « l’atlas de l’aléa submersion
marine ».
Dans une note à l’attention du préfet, rédigée immédiatement après
la catastrophe, le 1
er
mars 2010 à 1h30, le directeur départemental des
territoires et de la mer présente ainsi la période de cinq ans allant de fin 2001
à fin 2006 :
« [Elle] semble avoir été essentiellement occupée à des échanges
prévus par la règlementation… les conflits d’intérêt qui ont été soulevés
notamment par les deux maires …ont conduit à une absence de décision.
Mesurant l’ampleur des risques, l’Etat a affirmé sa détermination… ».
Dans ce contexte, le préfet décide, en effet, plus de cinq ans après la
prescription, l’application anticipée de certaines dispositions du plan de
prévention. Il écrit aux maires, afin de leur communiquer le dossier et
recueillir leurs éventuelles observations. Le 7 mars 2007, celui de La Faute
répond en faisant part de sa
« profonde déception à la lecture du règlement et
du plan de zonage qui y est associé ».
Il s’étonne notamment du classement
du camping municipal en zone rouge, en renvoyant à un propos qu’il attribue
au préfet lors d’une visite à La Faute et selon lequel la digue de protection
« ne présentait aucun risque ».
Il conteste le fait que certains terrains soient
devenus inconstructibles dans le lotissement « Les Doris » et se demande s’il
« n’y a… pas là purement et simplement spoliation du bien en question »
. Il
ne comprend pas que la zone du Hâvre soit classée en totalité en zone rouge,
considérant qu’
« il demeure possible d’[en] aménager la partie centrale… ».
Dans une lettre, marquée du cachet de la préfecture en date du
4 avril 2007, le président de l’association des propriétaires du Hâvre proteste
auprès du préfet, au nom de ses 150 adhérents, soulignant qu’ils étaient
« tous désireux de valoriser leurs parcelles (actuellement boisées ou terrain
vague) ».
Il écrit notamment :
« …La classification en aléa fort (rouge) sur
toute la pointe d’Arçay nous surprend …, sachant bien…qu’elle ne
correspond pas à la réalité,…. De mémoire de Fautais, ce territoire n’a pas
subi d’inondation marine depuis plus d’un siècle ».
Dans une note au préfet
d’avril 2007, le directeur départemental de l’équipement rappelle que
« la
protection par des digues peut conduire à étendre les règles de
constructibilité des zones protégées déjà partiellement urbanisées, mais ne
doit en aucun cas conduire à ouvrir à l’urbanisation des zones qui ne le
seraient pas, ni à construire de nouveaux systèmes de protection destinés à
permettre une urbanisation nouvelle. Le règlement du PPRI de l’estuaire du
Lay est conforme à ces conclusions. »
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COUR DES COMPTES
Le préfet écrit au maire le 8 juin 2007, en se référant à l’entrevue du
23 avril, lors de laquelle l’élu avait exprimé
« ses craintes face à la perte de
valeur des parcelles non bâties devenues inconstructibles ».
Il lui confirme,
après une étude complémentaire de ses services, que, des 21 parcelles
concernées, douze
« pourraient accueillir une construction sur la partie
située en zone bleue »,
que
deux appartenant à la commune et à l’association
syndicale ne font pas l’objet d’un projet
et que sur les sept autres, situées
intégralement en zone rouge, il est impossible d’autoriser une construction.
Par cette lettre, le préfet notifie également l’arrêté de mise en
application anticipée du plan de prévention du risque inondation, qu’il vient
de signer près de six ans après la prescription. Ses dispositions cesseront
d’être opposables si elles ne sont pas reprises dans le plan définitif ou si
celui-ci n’est pas approuvé dans un délai de trois ans, c’est à dire au plus tard
le 8 juin 2010. La lettre de notification au maire de L’Aiguillon se limite à
une notification formelle, la contestation ne s’étant pas exprimée comme à La
Faute.
Le défaut d’approbation du plan de prévention du risque inondation
avant la catastrophe
Dans un courrier du 19 juillet 2007, le préfet annonce au maire de
La Faute qu’il mettra à sa disposition un lot de plaquettes d’information
destinées au grand public. Il évoque aussi les travaux à entreprendre sur la
digue Est et la nécessité de ramener en un premier temps le nombre
d’emplacements du camping à 274, tout en relevant qu’il s’agit de mesures
d’urgence ne traitant pas la situation irrégulière du camping. Le 27 décembre,
par une autre lettre, le préfet invite le maire à soumettre au conseil municipal
le projet d’étude de la réduction de la vulnérabilité des habitations soumises à
un aléa fort de submersion. Le conseil municipal va délibérer, mais l’étude ne
sera pas réalisée.
Des réunions sont tenues sous la présidence de la sous-préfète des
Sables d’Olonne en novembre 2007 et janvier 2008. Il y est question des
difficultés de mise en oeuvre de l’application anticipée du plan de prévention
du risque inondation.
Dans une lettre du 7 janvier au préfet, le maire précise
qu’elles tiennent principalement au zonage retenu, dans le secteur de la route
de la Tranche, le lotissement « les Doris » et la zone du Hâvre ; le maire
résume ainsi le sentiment de ses concitoyens :
«… l’ensemble de la
population fautaise perçoit ces interdictions liées au PPRI comme une
profonde injustice… ».
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D’URBANISME
79
Le 12 décembre 2008, le maire écrit au préfet notamment au sujet du
niveau bas des constructions (que les services de l’Etat veulent voir implanter
à 0,20 m du niveau de référence). Le 2 mars 2009, le préfet répond que
« pour répondre [à ces difficultés], le service Eau… de la direction
départementale de l’équipement et de l’agriculture a repris le projet de
[PPRI], que je soumettrai prochainement à votre approbation… ».
Dans une
note de la direction départementale de l’équipement et de l’agriculture
55
du
21 août 2009, transmise aux sous-préfets des Sables d’Olonne et de Fontenay
le Comte, ainsi qu’au préfet, il est expliqué au sujet de la règle des 0,20 m :
« Cette disposition constructive a été adoptée dans le projet de règlement
pour tenir compte de la topographie de cette zone. En effet, la plupart des
terrains est susceptible d’être concernée par des hauteurs de submersion de
2 m, ce qui imposerait dans la zone bleue d’édifier des constructions sur
remblai ou vide-sanitaire de 2 m de hauteur ».
Un compromis est retenu et le
règlement adapté prévoit finalement qu’
« en cas d’impossibilité technique,
la cote plancher devra être établie à 0,70 m au-dessus du terrain naturel sur
un remblai ou un vide sanitaire et un dispositif permettant l’accès à un
niveau refuge devra être mis en oeuvre… » .
Cependant, le travail en vue de l’approbation définitive du plan de
prévention du risque inondation progresse et le 24 août 2009, le préfet
consulte les deux communes sur le projet de plan. Dans la note du
21 août 2009, le directeur départemental de l’équipement et de l’agriculture,
qui envisage alors une approbation à la fin du premier semestre 2010
56
,
rappelle les positions retenues : conserver une bande de 50 m inconstructible
en arrière des digues ; bloquer l’urbanisation aux deux extrémités de La
Faute ; permettre la densification normale du village déjà urbanisé
moyennant un renforcement et une surveillance des digues. Il précise que les
zones modifiées par rapport au plan de prévention initial sont : le centre
bourg de la Faute, considéré comme zone urbaine et en quasi-totalité classé
en zone bleue ; la zone naturelle des marais et de la pointe de l’Aiguillon,
classée en zone rouge.
55
Note intitulée : « Stratégie d’élaboration du plan de prévention des risques naturels
de l’estuaire du Lay ».
56
Précédemment, cette approbation avait été prévue au troisième trimestre 2008 (Note
interne à la direction départementale de l’équipement et de l’agriculture du 26 mai
2009).
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80
COUR DES COMPTES
Les sous-préfets organisent en septembre et octobre des réunions
pour présenter aux maires le projet. Celui de La Faute expose dans une lettre
du 12 octobre à la sous-préfète ses divergences avec les services de l’Etat,
entre autres : diminution des zones blanches au Nord ; inconstructibilité
d’une dizaine de terrains en zone rouge le long de la rivière, notamment de
quatre terrains dans le lotissement « Les Doris » ; non prise en compte des
travaux prévus sur la digue. Il demande qu’il soit sursis au déroulement de
l’enquête publique prévue au début de l’année 2010.
Une nouvelle réunion est organisée fin novembre entre la direction
départementale de l’équipement et de l’agriculture et la municipalité et
s’achève par l’évocation des points à soumettre à l’arbitrage du préfet.
Le conseil municipal de L’Aiguillon, le 27 octobre 2009, et celui de
La Faute-sur-Mer, le 19 novembre, sollicitent finalement un report de trois
mois de l’enquête, considérant que le délai est trop court entre la présentation
du projet de PPRI et la date prévue pour l’ouverture de l’enquête. Le
président de la chambre d’agriculture, qui a été consulté, demande que
certaines terres agricoles restent en zone bleue, ajoutant qu’avec des
digues
« entretenues, rehaussées, voire réempierrées »,
le risque d’inondation
tendait
« vers le zéro »
.
Par-delà les interrogations que suscite l’inaboutissement du plan
de prévention du risque inondation, son contenu ne manque pas
d’interpeller. Le zonage du plan prévoit, parmi les zones inondables, des
zones rouges, qui sont inconstructibles, et des zones bleues, qui
demeurent constructibles sous certaines conditions.
La limitation de la bande inconstructible à une zone de 50 m
derrière la digue est discutable. Les services de l’Etat s’appuient sur la
circulaire du 30 avril 2002
57
, qui permet, dans les termes suivants,
certaines exceptions à l’inconstructibilité derrière les digues
:
«
…
dans
les secteurs déjà urbanisés et dans le respect du principe de limitation de
l’urbanisation en zone inondable ou submersible, des constructions
peuvent être autorisées dans les conditions suivantes : -qu’elles ne soient
pas situées dans des zones où l’aléa représente une menace pour les vies
humaines, tout particulièrement dans les zones à proximité immédiate des
digues pouvant subir l’impact d’une rupture ou d’une submersion …A
titre indicatif, par exemple, pourraient être considérées comme telles, les
zones où les hauteurs d’eau peuvent atteindre plus de 1 mètre en cas de
rupture ou submersion ou encore les zones situées à une distance
57
Circulaire du ministère de l’aménagement, du territoire et de l’environnement et du
ministère de l’équipement, des transports et du logement, relative à la politique de
l’Etat en matière de risques naturels prévisibles et de gestion des espaces situés
derrière les digues de protection contre les inondations et submersions marines.
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D’URBANISME
81
inférieure à 50 mètres du pied de digue. L’évaluation précise de ces zones
reste cependant liée à chaque situation particulière ;… ».
Dans les espaces inconstructibles envisagés par ce texte, figurent
certes la bande des 50 mètres, mais aussi
« les zones où les hauteurs
d’eau peuvent atteindre plus de 1 mètre en cas de rupture ou
submersion ».
Or, l’examen de la carte d’aléa réalisée par la SOGREAH
pour l’élaboration du plan de prévention du risque inondation (voir ci-
après, juxtaposées, la carte SOGREAH et celle du plan) montre qu’à La
Faute, de telles zones vont bien au-delà de la bande des 50 mètres et
englobent notamment la cuvette dite de l’anse de Virly, où le phénomène
de submersion s’est produit et où la très grande majorité des décès a dû
être constatée.
Interrogée sur la limitation de la zone rouge à un espace de
50 mètres derrière la digue, la direction départementale des territoires et
de la mer répond que le zonage
« résulte du croisement entre des aléas
(en l’occurrence les risques d’inondation et de submersion marine) et des
enjeux (zone urbanisée soumise à l’aléa) »
, ainsi que cela est, par
exemple, précisé dans le compte rendu de l’audience du 23 avril 2007
accordée au maire. Cependant l’étude de la SOGREAH semble déjà avoir
pris en compte la définition des enjeux.
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D’URBANISME
83
On doit donc se demander si la carte, sur laquelle est basé le plan
de prévention du risque inondation anticipé, n’aurait pas dû être la carte
produite par la SOGREAH, avec une zone rouge allant bien au-delà des
50 mètres.
On peut ajouter que, par circulaire du 20 juillet 2006, le ministre
des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer et celui de
l’écologie et du développement durable invitent les préfets à
« une
approche renforcée des risques sur le littoral »
et évoquent
« le principe
d’inconstructibilité dans la bande de 100 mètres ».
Après la catastrophe, le préfet prescrit en août 2010 deux
nouveaux plans de prévention du risque inondation distincts, l’un pour La
Faute-sur-Mer, l’autre pour L’Aiguillon-sur-Mer. La consultation du
public est ouverte de septembre 2010 à janvier 2011. Les réunions
publiques qui sont organisées montrent que les oppositions aux projets de
plan restent vives.
Le conseil municipal de L’Aiguillon-sur-Mer développe ses
revendications dans une délibération du 11 janvier 2011. Il y demande
notamment que toutes les propriétés bâties situées à une cote plancher
supérieure à 3,70 mètres, ainsi que celles situées à une altitude inférieure
à 3,70 m mais non inondées, soient reclassées en zone bleue et que les
terrains nus situés en zone rouge soient constructibles moyennant des
adaptations aux règlements d’urbanisme. Le même jour, le conseil
municipal de La Faute-sur-Mer décide de transmettre un mémoire aux
services de l’Etat et aux différents partenaires. Il y préconise, notamment,
d’autoriser des constructions nouvelles dans les zones rouges urbanisées,
sous condition de hauteur du niveau habitable ; il demande la suppression
de la bande des 100 mètres inconstructibles derrière les digues et
l’autorisation de la reconstruction après sinistre et des extensions, sous
condition de hauteur de niveau du plancher habitable. Enfin, il considère
que seules devraient être déclarées inconstructibles les deux zones les
plus gravement inondées. La commune continue d’affirmer une politique
d’urbanisation et de densification de son territoire.
La procédure relative aux plans de prévention du risque
inondation est suspendue en avril 2011 dans l’attente de la décision
gouvernementale définitive concernant la surcote prévue en raison du
réchauffement climatique et qui est critiquée par les élus et la population.
Le préfet s’est fait l’écho de ces réactions, notamment dans deux lettres,
de septembre et décembre 2010. Il y aborde une autre question
controversée : celle de la « transparence » des digues, que contestent ceux
qui opposent à ce principe le « plan digues » destiné à consolider les
ouvrages.
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84
COUR DES COMPTES
La circulaire ministérielle attendue tardant à être publiée, la
préfecture reprend la procédure en juin 2011. Des oppositions persistantes
aux projets de plan de prévention du risque inondation, dont la presse
58
se
fait l’écho, s’expriment. A La Faute-sur-Mer, le rejet est global de la part
des habitants et des élus, qui contestent la cote de référence,
souhaiteraient la « sortie » de maisons des zones rouges, la prise en
compte des travaux à venir sur les digues pour alléger les contraintes, la
possibilité de construire à certaines conditions en zone rouge, par
exemple
sur
pilotis.
A
L’Aiguillon-sur-Mer,
plusieurs
points
apparaissent dans le débat public : demande de transformer la zone rouge
« rayée », qui a été créée avec moins de contraintes, en zone bleue, avec
encore moins d’obligations ; souhait de la poursuite de l’agrandissement
de la zone bleue, qui a déjà été élargie, 500 maisons y ayant été
réintégrées selon la municipalité ; demande d’une prise en compte de la
protection que représenteraient les digues ; contestation de la surcote liée
au réchauffement climatique.
L’enquête publique a lieu en octobre et novembre 2011. Près de
1 100 observations sont formulées, avec plus de «
colère
» à La Faute-
sur-Mer, plus
« d’interrogations et de désappointement »
à L’Aiguillon-
sur-Mer, selon le constat de la commission d’enquête
59
. Celle-ci émet un
avis favorable sur chacun des projets de plan de prévention du risque
inondation, avec des réserves et des recommandations. Le préfet estime
que l’approbation des plans devrait pouvoir intervenir en juin 2012, après
intégration des adaptations techniques demandées par la commission
d'enquête, notamment l'analyse des relevés topographiques fournis par les
propriétaires.
3 -
En Charente-Maritime
Avant la catastrophe de 2010, des priorités sont fixées pour
l’élaboration des plans de prévention du risque inondation, l’accent étant
mis sur la moitié Sud du département, où la tempête de 1999 a fait le plus
de ravages. Ainsi, dans la partie Nord, à laquelle appartient la commune
de Charron où la tempête Xynthia va provoquer 3 décès, le plan n’est pas
prescrit.
58
Par exemple, le numéro
d’ « Ouest France » du 21 octobre 2011 rend compte de
ces oppositions, à travers trois articles, titrés :
« Après Xynthia, le flou dans les zones
à risque », « Un mois d’enquête publique, plus d’un an de préparation », « Littoral :
la culture du risque fait débat ».
59
Conclusions-avis de la commission d’enquête sur le plan de prévention du risque
inondation de l’Aiguillon – p. 3.
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D’URBANISME
85
La préfecture souligne que
« les procédures PPR sont des
démarches très longues, difficiles à conduire et nécessitant beaucoup de
pédagogie vis-à-vis des collectivités et de la population ».
Par exemple,
pour le plan de prévention du risque inondation « Estuaire Charente,
marais d’Yves et île d’Aix » (14 communes), il est nécessaire d’organiser
80 réunions de diverses natures, non compris celles internes aux services
de l’Etat ou entre ceux-ci et les bureaux d’études. L’élaboration du plan
commence en 2002, mais il n’est prescrit officiellement qu’en 2008, six
ans plus tard. Au moment de la catastrophe, le plan de prévention du
risque inondation n’est ni approuvé ni mis en application anticipée.
La procédure concernant les plans de prévention du risque
inondation est relancée aussitôt après la tempête, en distinguant ceux
classés en priorité 1, devant aboutir en 2014 au plus tard, de ceux pour
lesquels l’urgence est moindre, classés en priorité 2.
En priorité 1, dans les six communes de « l’embouchure Gironde et
Nord Gironde » et dans les quatorze de « l’estuaire Charente, marais
d’Yves et île d’Aix », la procédure a été engagée. Pour dix de ces
dernières communes, un arrêté d’application anticipée a été pris en
octobre 2010, pour Fouras et Yves en juillet 2011, pour Port des Barques
en octobre 2011 ; pour l’île d’Aix, la procédure est en cours de
finalisation.
Toujours en priorité 1, dans les 16 communes du nord du
département, le plan de prévention des risques est prescrit depuis juillet
2010 et les études d’aléa sont lancées; pour Charron, le projet de plan de
prévention du risque inondation est intégré à celui de l’agglomération de
La Rochelle, qui en est au stade des études. Dans les îles de Ré et
d’Oléron (18 communes), dotées d’un plan de prévention du risque
inondation en février 2010, la procédure de révision devrait être lancée au
premier semestre 2012, et dans les bassins « Brouage et Seudre »,
l’élaboration du plan devrait l’être courant 2012. Douze communes du
Sud Gironde et quatre de la presqu’île d’Arvert figurent en priorité 2.
B -
Les constats et les évolutions intervenues
1 -
Avant les inondations de 2010
Les exemples développés plus haut font apparaître plusieurs
constats dans la pratique des plans de prévention du risque inondation
avant les catastrophes :
-
des plans de prévention du risque inondation n’ont pas été
prescrits dans toutes les zones à risque ;
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COUR DES COMPTES
-
là où ils l’ont été, la procédure a parfois été interrompue en
cours de route ou s’est enlisée dans des discussions sans fin. La
trop longue durée entre la prescription et l’approbation d’un
plan fragilise les actions de l’Etat visant à s’opposer à des
constructions en zone à risque
60
;
-
les maires se sont, de façon assez générale, opposés à
l’adoption des plans ou ont retardé celle-ci autant que possible,
voyant dans ces plans des obstacles à la volonté d’urbaniser
leur commune ;
-
l’Etat, à travers ses représentants, les préfets, n’a pas toujours
su résister aux pressions des élus et a généralement accepté un
allongement excessif des procédures
;
S’agissant du contenu des plans, les aléas ont fait l’objet de
concertation, voire de négociations, pour ne pas trop contraindre les
potentialités d’urbanisation du territoire communal, ceci au détriment de
la sécurité des biens et des personnes. Les élus locaux ont entrepris de
minorer autant que possible les contraintes et l’Etat a bien souvent été
conduit à transiger.
2 -
Les évolutions intervenues depuis 2010
Depuis les catastrophes, une volonté nouvelle s’exprime de la part
de l’Etat, mais les oppositions locales, tant des habitants que des élus,
n’ont pas disparu. Pour conduire à bien l’élaboration des plans de
prévention des risques inondation, devenus sur le littoral « plans de
prévention des risques littoraux » (PPRL), une forte détermination devra
être mise en oeuvre dans la durée.
a)
La couverture des communes à risque par des plans de prévention
des risques littoraux
La circulaire du 7 avril 2010 fixe l’objectif de couvrir, dans un
délai de trois ans, l’ensemble des zones exposées à un risque fort de
submersion marine par un plan de prévention des risques naturels
approuvé et demande aux préfets du littoral métropolitain d’engager, à cet
60
Ainsi, dans son arrêt du 27 janvier 2011 confirmant l’arrêt Messous du 22 janvier
2009 du tribunal administratif de Nice qui avait rejeté le déféré du préfet contre une
construction dans une zone soumise au risque feu de forêt, la Cour administrative
d’appel relève, dans l’un des considérants, que le plan de prévention des risques
n’avait toujours pas été soumis à enquête publique près de quatre ans après sa
prescription, que la carte d’aléa n’avait pu être discutée et n’était donc pas opposable
en tant que telle à la commune.
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D’URBANISME
87
effet, une identification des zones prioritaires. Dans la circulaire du
28 juin 2010, relative aux thèmes prioritaires d’actions nationales en
matière de risques naturels et hydrauliques pour 2010-2011, le ministre
chargé de l’écologie demande aux préfets coordonnateurs de bassin et aux
préfets de région de poursuivre l’élaboration des plans de prévention des
risques naturels en priorité sur les zones à forts enjeux, en veillant
notamment «
à une approbation dans un délai de trois ans maximum,
quatre ans par exception ».
Dans cette circulaire, est reconnue
«
l’hétérogénéité
» des plans de prévention des risques naturels, qui
« nuit
à leur lisibilité et interpelle fréquemment sur leur équité »
, et évoquée la
perspective d’une fixation au niveau règlementaire des principales lignes
de doctrine.
Le 1
er
décembre 2010, la ministre chargée de l’écologie (direction
générale de la prévention des risques) demande aux préfets littoraux de
lui communiquer la liste des bassins de risque pour lesquels ils comptent
prescrire ou réviser un plan de prévention des risques et d’identifier parmi
ceux-ci les plan de prévention des risques prioritaires. En annexe du
communiqué du 17 février 2011, intitulé
« Tempête Xynthia, un an
après… »
et rendant public le plan submersions rapides, la ministre fait
paraître les cartes des plans de prévention des risques littoraux prioritaires
dans les deux départements atlantiques, dont ceux à approuver d’ici 2014.
Une circulaire du 2 août 2011 de la ministre fixe la liste des 303
communes à couvrir en France par un plan de prévention des risques
littoraux d’ici 2014.
Une étape nouvelle est franchie avec le décret du 28 juin 2011, qui
donne force règlementaire au délai de trois ans pour l’adoption des plans
de prévention des risques naturels. Ce délai est prorogeable une fois, dans
la limite de dix-huit mois, par arrêté motivé du préfet. Quatre ans et demi
doivent donc désormais constituer la durée maximale pour l’adoption
d’un plan de prévention des risques naturels prescrit. Ces dispositions
constituent un progrès, même si elles ne contiennent pas d’indication sur
les conséquences d’un non-respect du délai.
La loi « Grenelle II » du 12 juillet 2010 avait déjà modifié
certaines mesures relatives aux plans de prévention des risques naturels
dans le code de l’environnement. Elle avait ainsi supprimé celle rendant
les dispositions appliquées par anticipation automatiquement non
opposables si le plan de prévention des risques naturels n’était pas
approuvé dans un délai de trois ans. Elle avait également introduit une
procédure de modification, à côté de celle de révision. Elle avait, par
ailleurs, prévu des décrets pour encadrer plus formellement l’élaboration
des plans de prévention des risques naturels afin d’éviter notamment les
disparités de traitement pour des situations comparables, et ainsi de
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COUR DES COMPTES
donner plus de force au corpus de doctrine des plans. Enfin, la loi avait
relevé les taux maximaux d’intervention du fonds de prévention des
risques naturels majeurs.
Les dispositions prises depuis les catastrophes de 2010 témoignent
de la volonté d’améliorer la couverture des zones à risques par des plans
de prévention des risques naturels et d’accélérer l’adoption de ceux-ci. Il
n’en reste pas moins qu’il ne sera pas possible, en raison même de la
fixation de priorités différenciées, d’atteindre l’objectif extrêmement
ambitieux fixé par le Président de la République lors de son discours de
mars 2010 à La-Roche-sur-Yon devant les acteurs de la chaîne de secours
et solidarité:
« dans trois ans, toutes les communes situées dans des zones
à risques seront couvertes par un plan de prévention ».
Pour que la couverture des zones à risque par des plans de
prévention des risques naturels progresse dans un délai raisonnable, le
ministère en charge du dossier, avec l’appui de celui de l’intérieur, doit
poursuivre son action à l’égard des préfets et des services déconcentrés,
avec
un
pilotage
national
supposant
des
remontées
régulières
d’informations et la tenue de tableaux de bord. Les effectifs et les crédits
suffisants doivent également être affectés aux services, l’élaboration d’un
plan de prévention des risques naturels nécessitant une forte capacité
d’expertise et de travail.
Il faut, enfin et surtout, que, par-delà les oppositions inévitables et
en veillant à la concertation indispensable, la volonté préfectorale
s’exprime dans les départements et les régions, en relais de la volonté
gouvernementale, avec une clarté et une force suffisantes.
b)
Le contenu des plans de prévention des risques littoraux
La circulaire relative à la prise en compte du risque de submersion
marine dans les plans de prévention des risques littoraux paraît le
27
juillet 2011. Elle doit être complétée par un nouveau guide
d’élaboration méthodologique des plans de prévention des risques
littoraux, qui remplacera celui de 1997.
Le périmètre du plan de prévention des risques littoraux doit être
réalisé
à
une
échelle
géographique
présentant
une
cohérence
hydrosédimentaire
et
doit,
dans
la
mesure
du
possible,
traiter
simultanément tous les aléas.
Plus de la moitié de la circulaire est consacrée aux ouvrages de
protection dans les plans de prévention des risques naturels. Ceux-ci
doivent être à la fois considérés comme des objets de danger potentiel (en
cas de rupture) et comme des objets de protection, en fonction du
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D’URBANISME
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dimensionnement et de la qualité de l’ouvrage. Une zone protégée par
une digue reste une zone inondable. Le principe d’inconstructibilité
derrière les digues est réaffirmé.
Toutefois, il connaît des exceptions, que la circulaire encadre.
L’exception doit faire l’objet d’une demande expresse de la commune et
d’un processus de concertation. Elle ne peut être prise en compte que
dans le respect de plusieurs conditions relatives, d’une part, à l’ouvrage
de protection (notamment, un système de protection en conformité avec la
règlementation et un responsable d’ouvrage clairement identifié, pérenne
et qui apporte sa garantie) et, d’autre part, au territoire et au projet associé
(seules les zones physiquement urbanisées ou d’intérêt stratégique sont
éligibles, exception faite de « cuvettes » en aléa fort et soumises à des
risques
de
montée
rapide
d’eau,
d’une
bande
de
précaution
immédiatement derrière l’ouvrage, de zones d’écoulement préférentiel
correspondant à un aléa fort dû à la présence même de l’ouvrage).
Le plan de prévention des risques littoraux devra délimiter une
bande de précaution inconstructible immédiatement derrière l’ouvrage ;
par défaut, est recommandée une largeur forfaitaire égale à 100 fois la
distance entre la hauteur d’eau maximale atteinte à l’amont de l’ouvrage
et le terrain naturel derrière, cette largeur ne pouvant être inférieure à
50 mètres.
La circulaire prend également en compte le changement
climatique. Le plan de prévention des risques littoraux doit comporter
deux aléas distincts : l’aléa de référence (20 cm en plus) et un aléa à
l’horizon 2100 (60 cm). En zone non urbanisée, c’est
« l’aléa 2100 »,
du
moins quand il est fort, qui s’impose. En zone déjà urbanisée, c’est l’aléa
de référence qui fait loi.
Cette nouvelle doctrine s’applique aux
plans prescrits après la date
de parution de la circulaire ou à ceux prescrits avant le 15 septembre 2011
pour lesquels des études d’aléa préalables à la prescription auraient déjà
fait l’objet de concertation avec les collectivités.
Cette circulaire a été arrêtée après un important processus de
concertation avec les préfets, les élus et entre ministères. Plusieurs des
points traités ont fait l’objet de longues discussions, particulièrement le
changement climatique et la constructibilité derrière les digues. Il reste
des interrogations pour savoir si la circulaire était le bon outil et si son
contenu marque un véritable progrès pour la protection des populations.
Quoi qu’il en soit, l’application de cette circulaire devra faire l’objet
d’évaluations régulières.
La directive européenne « inondation » de 2007 fera évoluer le
dispositif des plans de prévention du risque inondation. A l’échelle des
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grands bassins hydrographiques, pour les territoires à risque important
(TRI), seront à établir une cartographie des surfaces inondables et des
risques d’inondation (intégrant les enjeux) d’ici à la fin de 2013, puis un
plan de gestion des risques inondation (PGRI) d’ici à la fin de 2015. La
cartographie ira au-delà de ce qui est réalisé dans le cadre des plans de
prévention du risque inondation. Quant au plan de gestion, qui concernera
les trois volets de la prévention, de la protection et de la préparation aux
situations d’inondation, il aura un contenu plus exhaustif que les plans de
prévention du risque inondation, voire les programmes d’actions de
prévention des inondations (PAPI) ou schémas d’aménagement et de
gestion des eaux (SAGE)
61
. Il arrêtera une véritable stratégie : il devra
définir les risques, fixer des objectifs évaluables et arrêter des actions
pour les atteindre, dans le cadre d’une procédure impliquant étroitement à
chacune des étapes les différents acteurs, particulièrement les collectivités
locales, ainsi que le public.
La doctrine concernant le contenu des plans de prévention du
risque inondation évolue, à travers notamment la circulaire de juillet
2011, dont la mise en application
devra être évaluée. La directive
européenne de 2007 va entraîner l’élaboration de nouveaux documents de
prévention. Cette phase transitoire ne doit pas conduire à un
ralentissement de l’effort engagé pour la cartographie et les plans de
prévention des risques.
IV
-
Les documents d’urbanisme
A - Des documents souvent obsolètes
Le rapport des inspections relatif au Var souligne
« la couverture
du territoire par des documents obsolètes »
, en relevant «
la volonté
affichée de préserver le possibilité de laisser se développer une
urbanisation diffuse ».
Avant les inondations de 2010,
douze
62
des treize communes
sinistrées dans le Var disposaient d’un plan d’occupation des sols (POS)
antérieur à 1995 et, pour sept d’entre elles, à 1990. Ainsi, le POS de
Trans-en-Provence était daté de 1980, ceux des Arcs et de Draguignan de
1989. Certes, dans neuf de ces localités, un plan local d’urbanisme avait
61
Le schéma d’aménagement et de gestion des eaux (SAGE) est un document de
gestion de l’eau à l’échelle d’une unité hydrographique cohérente (bassin versant,
aquifère, etc.).
62
Seule la commune de Fréjus disposait d’un PLU approuvé en 2005 et dont la
révision avait été prescrite en 2007.
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D’URBANISME
91
été prescrit entre 2001 et 2009, mais sans que la procédure n’eût abouti
dans huit d’entre elles, tandis que, dans la neuvième, le plan local
d’urbanisme avait été annulé en 2009 par le tribunal administratif. Si des
modifications ou des révisions simplifiées étaient intervenues, la réflexion
globale en vue de l’élaboration d’un plan local d’urbanisme ou manquait,
ou n’avait pas abouti.
Ainsi que le souligne le préfet du Var,
« ce n’est pas tant la
volonté de révision des documents d’urbanisme qui pose question que
celle de réviser les modes d’occupation du sol et d’urbanisation. Au plan
local, pour de nombreux élus, le document d’urbanisme est encore vécu
comme le moyen de répartir les droits à bâtir. »
La catastrophe de 2010 n’a pas influencé la prescription de
révisions des documents d’urbanisme par les élus des communes
concernées, quand bien même celles-ci étaient dotées de plans
d’occupation des sols anciens. S’agissant des schémas de cohérence
territoriale (SCOT), celui de la Dracénie a été prescrit en 2004 et n’est
toujours pas approuvé, celui du Var Est en est à son troisième projet,
toujours « en attente ».
En
Vendée,
dans
la
commune
de
La
Faute-sur-Mer,
particulièrement éprouvée par les décès, le plan d’occupation des sols
était daté de juillet 1984. Un plan local d’urbanisme avait été prescrit en
2008, mais les études n’en étaient qu’à leur début en 2010.
B - Un défaut d’initiative pour établir de nouveaux
documents
Aucune disposition d’ensemble n’a été prise pour que les
communes remplacent les plans d’occupation des sols obsolètes. De
même,
l’élaboration
des
SCOT,
qui
concerne
la
dimension
intercommunale, tarde à se concrétiser.
Certes des mesures incitatives ont été prises par l’Etat. Ainsi, à la
suite de la tempête Xynthia, la direction de l’habitat, de l’urbanisme et
des paysages du ministre chargé de l’urbanisme a lancé un « atelier
national », en vue «
d’initier un projet global pour la partie la plus
frappée du littoral charentais »
, couvrant le territoire de 26 communes,
sur une longueur de côte de 80 km. Le travail, restitué aux élus en février
2011,
a été mis à leur disposition, afin notamment de leur servir de
«
guide
» pour leurs
« projets futurs ».
De façon plus globale, des incitations ont vu le jour à la suite du
Grenelle de l’environnement en faveur de plans locaux d’urbanisme
intercommunaux ou de SCOT ruraux. Par ailleurs, à l’échelon
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COUR DES COMPTES
départemental, souligne le préfet du Var
, « l’ensemble des services de
l’Etat, sous-préfets et direction départementale des territoires et de la
mer, s’efforce de conseiller aux élus d’adopter des plans locaux
d’urbanisme »
, mais ajoute-t-il,
« en la matière, ils sont in fine les seuls
décideurs et l’Etat en est réduit à des incitations »
. En effet, les outils
législatifs et réglementaires existants ne permettent pas de contraindre
une collectivité territoriale à transformer un plan d’occupation des sols
ancien en plan local d’urbanisme.
Si, pour l’essentiel, l’urbanisme relève de la responsabilité des
collectivités territoriales, c’est l’Etat qui en fixe les grandes règles, dans
le cadre desquelles se déploie l’action de ces collectivités. Or, autant les
ministères concernés ont agi au plan national pour accélérer l’adoption de
plans de prévention du risque inondation, autant ceux-ci n’ont pas engagé
de réelle action, en vue d’obliger les collectivités territoriales à activer
l’élaboration des schémas de cohérence territoriale et à réaliser des plans
locaux d’urbanisme à la place des plans d’occupation des sols obsolètes.
Les territoires touchés par les inondations de 2010 étaient souvent
couverts par des documents d’urbanisme obsolètes, peu contraignants
quant à l’extension de l’urbanisation. Depuis les catastrophes, les
collectivités locales n’ont pas pris de réelle initiative pour les remplacer
par des documents de nouvelle génération, visant un développement
équilibré et durable des territoires. Face à cette situation, il paraîtrait
opportun que l’Etat prescrive, par voie législative ou règlementaire, les
dispositions contraignant les communes à remplacer leurs documents
d’urbanisme obsolètes par des documents de nouvelle génération.
V
-
Le contrôle de légalité
A - Les directives nationales
Si dans la période récente, plusieurs textes ont contribué à
restreindre le périmètre du contrôle de légalité et si le nombre d’actes des
collectivités locales transmis en préfecture a diminué d’un tiers entre
2004 et 2009, cette baisse ne concerne pas les actes relatifs à l’urbanisme,
dont, au contraire, la transmission s’est accrue, à la suite en particulier de
la réforme du code de l’urbanisme.
Dans les années précédant les inondations, les circulaires adressées
aux préfets, notamment en 2006 et 2009, ont classé parmi les priorités du
contrôle les aménagements et travaux situés dans des zones de risque,
ainsi que les autorisations individuelles de construire dans ces zones.
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D’URBANISME
93
Avant l’engagement de la phase contentieuse auprès de la
juridiction administrative, il a été recommandé aux préfets d’envoyer à la
collectivité une lettre d’observations valant recours gracieux.
A l’issue des catastrophes de 2010, deux circulaires renforcent et
surtout précisent les directives données auparavant.
Après la tempête Xynthia, la circulaire conjointe du ministre en
charge de l’écologie et de celui en charge de l’intérieur, datée du
7 avril 2010, demande en particulier aux préfets
« de s’opposer à la
délivrance d’autorisations d’urbanisme dans les zones à risque fort…et
notamment dans les bandes de sécurité situées derrière les ouvrages de
protection, sur la base des dispositions de l’article R. 111-2 du code de
l’urbanisme ».
Elle invite instamment les préfets à faire usage de cet
article, même en l’absence de plan de prévention.
Après les inondations du Var, la circulaire du 25 juin 2010 est un
texte
« d’impulsion politique »
et de rappel pratique des outils disponibles
pour contrôler efficacement les actes des collectivités locales dans les
zones à risques. Son ton est ferme et les indications données sont claires.
Le texte s’achève, toutefois, par une phrase laissant au préfet une large
marge d’appréciation
: « J’en appelle à votre vigilance et votre
connaissance du terrain pour appliquer avec le bon sens requis les
présentes instructions ».
B - La pratique : un contrôle insuffisant
Dans la période 2004 à 2009, moins d’un acte d’urbanisme sur 150
en Charente-Maritime, un peu plus d’un pour 1000 en Vendée, moins
d’un sur 200 dans le Var (selon les données de la préfecture) fait l’objet
d’une lettre d’observation du contrôle de légalité. Le nombre de recours
est d’une extrême faiblesse : 20 recours pour plus de 150 000 actes reçus
en Charente-Maritime, 16 pour probablement plus de 100 000 actes en
Vendée (une année manque dans le recensement fait sur la période) ; dans
le Var, selon les données fournies par la préfecture, 123 pour plus de
136 000 actes transmis.
63
Une lettre sur 50 en Charente-Maritime et une
63
Les chiffres sont issus des éléments statistiques fournis par le ministère de
l’intérieur (éléments extraits sans retraitements du système d’information Indigo des
préfectures) et des chiffres, différents, produits par la préfecture du Var. Ces chiffres
sont, de 2004 à 2009 :
- pour les lettres d’observations : en Charente-Maritime, 988 lettres sur 153 032 actes
d’urbanisme des communes reçus en préfecture, soit 0,65 % ; en Vendée, 121 sur
91 144, une année n’étant pas renseignée pour les actes reçus et deux pour les lettres,
soit 0,13 % ; dans le Var,
647 sur 88 819 selon le système Indigo, soit 0,73 %, et 502
sur 136 333 selon les chiffres de la préfecture, soit 0,37 % ;
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COUR DES COMPTES
sur un peu moins de 8 en Vendée a été suivie d’un recours. Dans le Var,
le taux est supérieur et s’élève à un recours pour quatre lettres.
Dans deux des trois départements, le contrôle sur les actes
d’urbanisme apparait plus faible que dans l’ensemble du pays. Le taux
des observations sur les actes reçus de 2007 à 2009 s’établit à 1,20 %
pour la France, alors qu’il se situe à 0,39 % en Charente-Maritime,
0,15 % en Vendée, 0,21 % dans le Var. Le taux de déférés par rapport aux
actes transmis s’établit à 0,034 % pour la France entière, il est de 0,014 %
en Charente-Maritime, de 0,010 % en Vendée ; seul dans le Var, ce taux
(0,073 % selon les données préfectorales) serait supérieur au
taux
national
64
.
Le recensement des personnels affectés au contrôle de légalité de
l’urbanisme montre la faiblesse de leur effectif. De surcroît, en Provence-
Alpes-Côte d’Azur, celui-ci diminue sensiblement entre 2009 et 2011. De
façon générale, les préfectures du Var et de Vendée sont, selon le rapport
« administration générale et territoriale de l’Etat » de l’Assemblée
nationale
65
parmi les moins bien dotées en effectifs de France, se classant
respectivement aux 90
ème
et 88
ème
rangs des préfectures.
Les réorganisations du contrôle de légalité dans la période récente
ont été marquées d’abord par un transfert de tâches des sous-préfectures à
la préfecture, généralement sans augmentation des effectifs de celle-ci,
ainsi que cela a été le cas en Vendée. Ensuite, dans le cadre de la
réorganisation de l’administration territoriale de l’Etat, les fonctionnaires
chargés au sein de l’ancienne direction départementale de l’équipement
de la première étape du contrôle des actes d’urbanisme ont parfois été
transférés à la préfecture. Il en a été ainsi en Charente-Maritime et en
- pour les recours : 20 en Charente-Maritime, soit 0,013 % des actes reçus ; 16 en
Vendée, soit 0,018 % ; 123 dans le Var, selon les chiffres de la préfecture, soit
0,09 %.
64
Les chiffres sont établis :
- pour l’ensemble de la France,
à partir des données du 21
ème
« rapport du
gouvernement au Parlement sur le contrôle a posteriori des actes des collectivités
locales et des établissements publics locaux » (années 2007, 2008, 2009), p. 20, 21,
23, 25. Ils sont les suivants : 3 337 344 actes d’urbanisme reçus par les préfets ;
40 124 observations, soit 1,20 %
des actes reçus ; 1127 déférés, soit 0,034 %.
- pour la Charente-Maritime et la Vendée, à partir des éléments statistiques du
système d’information Indigo des préfectures, fournis par le ministère de l’intérieur, et
pour le Var, à partir des chiffres, différents, produits par la préfecture : en Charente-
Maritime,
83 110 actes reçus des communes, 321 observations (0,39 %), 12 recours
(0,014 %); en Vendée , 73 020 actes, 107 observations (0,15 %), 7 recours (0,010 %) ;
dans le Var, 88 483 actes, 189 observations (0 ,21 %), 65 recours (0,073 %).
65
Rapport
annexé au
rapport de la commission des finances, de l’économie générale
et du contrôle budgétaire de l’Assemblée nationale sur le projet de loi de finances
pour 2011.
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LA PREVENTION : DES INSUFFISANCES PERSISTANTES EN MATIERE
D’URBANISME
95
Vendée, où les agents concernés ont
été transférés le 1
er
janvier 2010 ; en
Vendée, chacun de ces agents contrôle, en 2008 et 2009, en moyenne,
7 000 actes dans l’année. Toutes ces réorganisations ont conduit à un
amoindrissement des effectifs consacrés au contrôle de légalité.
Un autre élément touchant à l’organisation administrative est à
évoquer. Le sénateur, président de la mission d’information sur les
conséquences de la tempête Xynthia, en soulignant, lors de l’audition du
préfet de la Vendée, la très faible proportion des actes d’urbanisme
finalement déférés au juge, a demandé
« si ce constat n’était pas lié au
fait que les préfectures étaient " juge et partie", dans la mesure où elles
étaient chargées à la fois de l’instruction des demande des permis de
construire pour les petites communes et de l’exercice du contrôle de
légalité ».
Le préfet a répondu
« que la dualité de fonctions des services
de l’Etat, souvent chargés de contrôler des autorisations d’urbanisme
dont ils avaient eux-mêmes réalisé l’instruction, posait un réel problème
dont le législateur devait se saisir en interdisant aux services de l’Etat
d’intervenir dans l’instruction des demandes de permis ».
Par-delà les questions de l’organisation et des moyens, celle de la
volonté de l’Etat est centrale. Dans sa déposition évoquée ci-dessus, selon
le compte rendu fait,
le préfet de la Vendée
«
a regretté
que les
instruments dévolus au contrôle de légalité soient utilisés de manière très
inégale, et que la fréquence du recours à ces outils dépende largement de
la personnalité et du style des préfets en place… ».
Plus loin
, « il a
souligné que des directives orales incitant les préfets à exercer leur
mission de contrôle de légalité avec moins de rigueur avaient été données
par les membres de tous les gouvernements depuis plusieurs années, et
que l’exercice du contrôle était complexifié par la révision générale des
politiques publiques (RGPP), qui avait provoqué une diminution
drastique et brutale des effectifs consacrés à cette tâche sans pour autant
atténuer la responsabilité de la puissance publique… »
66
.
Face à des pressions locales fortes, relayées souvent par des élus
nationaux
non
dépourvus
de
relations
avec
des
autorités
gouvernementales, le préfet peut se trouver en position de faiblesse.
Les cas concrets, en Vendée et dans le Var, d’une urbanisation
insuffisamment contrôlée, ont illustré cette faiblesse relative du
représentant de l’Etat dans sa mission de contrôle. Pour que celle-ci soit
exercée convenablement, il faut des directives claires et des moyens
66
Audition de M. Jean-Jacques Brot, préfet de la Vendée, in Rapport d’information
n° 647 de la mission commune d’information sur les conséquences de la tempête
Xynthia du Sénat : « Xynthia : une culture du risque pour éviter de nouveaux
drames », T. II, Auditions, p. 60 à 65.
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COUR DES COMPTES
suffisants, mais surtout la volonté, à l’échelon gouvernemental, de faire
respecter la loi, y compris lorsque cela peut déplaire à tel ou tel élu local,
de façon que le préfet sache qu’il sera soutenu dans ses décisions, parfois
difficiles, en matière d’urbanisme.
C - L’influence de la jurisprudence administrative sur
le contrôle
Les préfectures, spécialement celles de la Vendée et du Var,
évoquent l’impact sur la pratique du contrôle de légalité de décisions de
la jurisprudence administrative désavouant l’Etat dans ses efforts pour
faire
respecter
l’inconstructibilité
en
zone
inondable
à
risques.
L’observation peut surprendre, lorsque l’on considère que le taux de
déférés gagnés par le préfet en 2010 dans le contrôle de légalité est plus
élevé dans les trois départements que dans l’ensemble de la France : plus
de 83 % en Charente-Maritime, plus de 94 % dans le Var, 100 % en
Vendée.
Un examen plus précis de la situation passée en explique toutefois
les raisons. Ainsi, par un arrêt du 26 décembre 2003, la Cour
administrative d’appel de Nantes a rejeté une requête du préfet tendant à
annuler un arrêté du maire de La Faute-sur-Mer de janvier 2001
autorisant une société civile immobilière à aménager un parc résidentiel
de loisirs au lieu-dit « La Vieille Prise ». Le juge a considéré que le
terrain d’assiette, bien que situé en bordure du Lay, en est séparé par une
digue en terre, ainsi que de l’océan Atlantique par une distance de 700 m ;
que la partie du terrain destinée à abriter les habitations légères de loisir
se situe, d’après l’atlas de submersion marine, en zone d’aléa « faible à
moyen » ; que la conjonction d’une rupture du cordon dunaire vers
l’ouest et d’une rupture de digue vers l’estuaire
« ne s’est jamais
réalisée »
; que des travaux de surélévation de la digue amont sur le Lay
et de consolidation de celle-ci par enrochements sur 130 m ont été
réalisés. Le maire n’était donc pas réputé avoir
« commis, au regard des
dispositions (…)
du code de l’urbanisme, une erreur manifeste dans
l’appréciation du risque effectif de submersion marine ».
A compter d’avril 2006, le tribunal administratif de Nantes, puis la
cour administrative d’appel, ont fait droit aux déférés préfectoraux fondés
sur l’article R. 111-2, puis sur le plan de prévention du risque inondation,
applicable par anticipation dès 2007. Toutefois, certaines
décisions ont
continué à aller dans le sens inverse.
***
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LA PREVENTION : DES INSUFFISANCES PERSISTANTES EN MATIERE
D’URBANISME
97
Avant la tempête Xynthia, les directives nationales aux préfets ne
manquent pas de souligner la nécessité de faire figurer dans les priorités
du contrôle de légalité celui des documents et décisions d’urbanisme dans
les zones à risque. Leur traduction opérationnelle
montre cependant une
grande faiblesse dans le contrôle des actes d’urbanisme.
Celle-ci est parfois expliquée en préfecture par la jurisprudence
administrative ou par l’insuffisance des effectifs dédiés au contrôle. Si ces
arguments reflètent une part de la réalité, l’examen de quelques dossiers
sensibles montre que cette faiblesse tient surtout à une insuffisance de
volonté préfectorale.
Après la catastrophe, les préfets des départements concernés ont
fait preuve d’initiative pour une plus grande rigueur dans le contrôle et
des directives à visée plus opérationnelle leur ont été adressées.
Toutefois, pour que l’efficacité du contrôle de légalité soit améliorée dans
la durée, il faut
les moyens nécessaires en personnel qualifié et surtout
une claire volonté de l’autorité préfectorale. Celle-ci sera d’autant plus
forte qu’elle se saura soutenue par l’autorité gouvernementale.
__________
CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
________
L’examen des mesures de prévention prises avant les inondations
montre leurs défaillances, qu’il s’agisse de l’établissement des documents
d’information sur les risques, de la diffusion des atlas des zones
inondables, de l’élaboration des plans de prévention, de l’obsolescence
des documents d’urbanisme ou encore de la faiblesse du contrôle de
légalité. Face à une véritable soif de construire, généralement relayée
par les élus locaux, l’Etat n’a souvent pas su faire preuve, au plan
départemental, d’une détermination suffisante pour empêcher des
constructions dans des zones à risque.
Après les catastrophes de 2010, une volonté nouvelle s’est
exprimée au sein de l’Etat en vue d’une politique de prévention plus
efficace. Il reste à la consolider, d’autant plus qu’une politique de
prévention bien conduite est peu coûteuse par rapport aux coûts
considérables, humains et matériels, liés à des crises comme celles
analysées dans l’enquête.
C’est pourquoi la Cour et les chambres régionales des comptes
formulent les recommandations suivantes :
Pour l’Etat :
2.1 arrêter la stratégie nationale des risques d’inondation imposée
par la loi « Grenelle 2 » et appliquer la directive européenne relative aux
inondations, en respectant les délais fixés ;
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COUR DES COMPTES
2.2 veiller, dans l’application de la directive européenne, à ce que
l’évolution des instruments existants ne retarde pas la mise en place
urgente des dispositifs décidés après les catastrophes de 2010 ;
2.3 faire assurer la diffusion complète des cartes relatives aux
risques et relancer le dispositif « information des acquéreurs et
locataires » ;
2.4 faire aboutir dans le délai prévu les plans prioritaires de
prévention des risques ;
2.5 conduire les communes à disposer de documents d’urbanisme
actualisés, au besoin en fixant par la voie législative une obligation en la
matière ;
2.6 soutenir l’administration préfectorale
pour un contrôle de
légalité efficace sur les décisions d’urbanisme des collectivités locales ;
2.7 instaurer un pilotage national, avec des objectifs et des
remontées régulières d’informations de l’autorité préfectorale, sur les
dispositifs les plus sensibles, comme l’établissement et la diffusion de la
cartographie des risques, l’aboutissement des plans de prévention,
l’actualisation du dispositif « information des acquéreurs et locataires ».
Pour les communes et intercommunalités :
2.8 arrêter les documents d’information communaux sur les
risques majeurs (DICRIM) et bien informer les habitants sur les risques,
selon les dispositions légales ;
2.9 apporter à l’autorité préfectorale une contribution positive
pour l’adoption rapide des plans de prévention ;
2.10 remplacer les plans d’occupation des sols (POS) obsolètes,
particulièrement là où existent des risques, par des documents
d’urbanisme de nouvelle génération ; faire aboutir les schémas de
cohérence territoriale (SCOT).
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Chapitre IV
La protection des zones bâties : une
cohérence défaillante
Alors que la prévention suppose notamment que l’on évite
d’urbaniser les zones à risque, pour, selon l’expression consacrée,
« ne
pas ajouter du risque au risque »,
la protection vise les zones déjà
urbanisées et leurs populations. L’enjeu est particulièrement important
pour le bâti dans les zones à risque très élevé, dont on mesure les dangers
à la lumière des inondations provoquées par la tempête Xynthia et celles
du Var.
La solution traditionnelle, souvent attendue et souhaitée, est une
protection par des digues solides, bien conçues et suffisamment hautes,
même si celle-ci ne peut jamais garantir totalement l’absence de risques.
Pour les rivières, une solution peut consister en l’entretien voire
l’aménagement des cours d’eau. Dans certains cas, le danger et les
difficultés de protection sont tels que seul le rachat et la destruction du
bâti peuvent s’envisager. Il s’agit alors de mettre en oeuvre une logique de
« repli stratégique ». Dans d’autres cas, la protection peut être obtenue
par des aménagements du bâti, en particulier pour de nouveaux refuges.
Les inondations Xynthia et du Var ont montré l’importance et la
difficulté de ce débat, et la nécessité qu’il soit posé de manière cohérente.
Ceci suppose d’en examiner les principaux aspects, en matière
d’équipements de service public, d’acquisitions et de destruction de
maisons, de construction et d’entretien de digues. Les décisions prises
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doivent enfin s’appuyer sur un dispositif d’assurance applicable aux
catastrophes naturelles qui joue un rôle incitatif beaucoup plus important.
I
-
L’inadaptation de certains équipements publics
de bord de mer et de rivière
A - Les biens immobiliers publics
Certains dossiers d’aménagement montrent que le risque de
submersion marine était connu avant la réalisation de l’équipement, mais
n’a pas été pris en compte. Il s’agit, par exemple, de l’installation d’une
estacade à Port des Barques, première tranche d’un programme plus vaste
d’aménagement du front de mer (2,2 M€). L’ouvrage sera emporté lors de
Xynthia, alors que le risque avait été souligné dans la notice d’impact et
que les services de l’Etat, lors de l’instruction, avaient émis des réserves.
D’autres équipements étaient manifestement inadaptés. A Port des
Barques, une digue de protection d’un peu plus d’un kilomètre sur les
bords de la Charente réalisée en 2007, ainsi qu’une écluse électrique
(travaux
de 2 M€, avec une participation de la commune de 0,3 M€) ont
été inefficaces, malgré la hauteur calée sur les plus hautes eaux connues
(1999) et supérieure au phénomène d’occurrence centennale. La surcote a
atteint un niveau jusque-là inégalé, et la longueur de la digue s’est révélée
insuffisante pour éviter que l’eau ne la contourne. L’absence de clapets
sur l’écluse, la protection insuffisante du système électrique et le non
fonctionnement du système manuel de secours a maintenu l’eau dans les
terres inondées pendant plus de 48 heures. La collectivité va continuer à
payer jusqu’en 2013 pour des ouvrages dont l’inutilité et l’inadaptation
ont été démontrées.
Ailleurs, l’implantation de certains bâtiments en bord de mer, sans
adaptation de la configuration des locaux au risque de submersion marine,
a entraîné des charges inutiles.
Tel a été le cas du siège du conseil général à La Rochelle et de la
maison de la Charente-Maritime dans le port de commerce de Rochefort,
ce qui, dans le premier bâtiment, a notamment entrainé la destruction des
véhicules qui y étaient stationnés.
Les permis de construire de ces deux
immeubles ont été délivrés respectivement en février 1998 et août 1997,
avant la réalisation de l’atlas des zones inondables, entreprise après la
tempête de 1999. Ce dernier document, qui mentionnait le risque pour ces
deux constructions, n’a cependant pas conduit à la mise en place de
mesures de protection, telles des portes étanches.
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LA
PROTECTION DES
ZONES
BATIES :
UNE
COHERENCE
DEFAILLANTE
101
Depuis, un dispositif de barrières étanches et amovibles a été prévu
à La Rochelle et est à l’étude à Rochefort.
Le coût de remise en état et de rachat de matériel pour ces deux
bâtiments peut être estimé à 4,5 M€, les remplacements ayant en partie
fait l’objet d’indemnités versées par les assurances
A Draguignan, une clinique a subi des dommages estimés à 1,4 M€
en exploitation (remboursement aux familles du surcoût tarifaire supporté
pour l’hébergement des résidents dans d’autres structures, non réalisation
de journées de séjour) et de 3,9 M€ en investissement. La maison d’arrêt
a été totalement inondée et est aujourd’hui fermée, les détenus ayant été
transférés vers d’autres centres pénitentiaires. La construction d’une
nouvelle prison est évaluée à 93 M€ hors coûts de démolition de
l’ancienne structure. Dans la zone de Saint-Hermentaire, au-delà du
centre de secours, plusieurs équipements publics ont été affectés, dont les
ateliers municipaux de la ville.
Ces différents exemples illustrent les coûts pour les budgets
publics d’une implantation dans une zone soumise au risque d’inondation
ou de submersion marine. Il convient notamment, pour les équipements et
bâtiments qui y sont implantés, de veiller à prendre des mesures avant une
crise pour en limiter les conséquences.
B - Les terrains de camping
Selon l’article L. 443-2 du code de l’urbanisme, pour les terrains
de camping, le maire est l’autorité compétente pour délivrer les
autorisations d’aménagement, établir les prescriptions d’information,
d’alerte et d’évacuation, et autoriser l’ouverture. Le préfet ne l’est qu’en
cas d’absence de plan d’occupation des sols et de plan local d’urbanisme.
Il a en outre le pouvoir, selon l’article R. 125-22 du code de
l’environnement, de se substituer à l'autorité compétente en cas de
carence de cette dernière et après mise en demeure non suivie d'effet dans
un délai d'un mois.
Dans les trois départements, certains terrains étaient en situation de
grave danger. Les préfets ont pris des mesures après la crise, mais de
nombreuses situations restent à régler.
En Sud Vendée, le camping municipal de « la Baie » à
L’Aiguillon-sur-Mer a été atteint par la submersion due à la tempête
Xynthia. Ensuite, sa partie basse a dû être fermée pour travaux en 2010.
Quant à celui de La Faute-sur-Mer, « Côte de Lumière », il était dans
l’illégalité.
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COUR DES COMPTES
Le camping municipal « Côte de Lumière » à La Faute-sur-Mer
Ce camping, installé depuis 1972 dans l’estuaire du Lay lui-même, ne
disposait que d’une autorisation temporaire d’occupation, parvenue à son
terme en 1991. En 2004, la commune a pourtant renforcé la digue de ceinture
de ce camping pour un coût de 0,42 M€, malgré l’article L. 321-6 du code de
l’environnement, issu de la loi littoral, qui interdit clairement de porter
atteinte à l’état naturel du rivage dans le domaine public maritime,
notamment par endiguement, enrochement ou remblaiement.
Ce camping municipal, géré sous forme de régie et doté d’un budget
annexe globalement équilibré, constituait le plus important satellite
budgétaire de la commune avec 0,78 M€ de dépenses d’exploitation en 2009.
La commune a réclamé 0,63 M€ à sa compagnie d’assurance pour indemniser
les dégâts, mais, vétusté déduite, les dommages n’ont été garantis que jusqu’à
0,11 M€.
L’autorité préfectorale, soucieuse de rétablir le libre usage du domaine
public maritime dans l’estuaire du Lay, a été confrontée depuis 2001 à de
nombreuses oppositions, et n’a obtenu, partiellement, gain de cause que le
4 mars 2010 en imposant le démantèlement des installations fixes de ce
camping.
Au total, la gestion du camping municipal de La Faute-sur-Mer a
engendré d’importantes dépenses pour la commune aussi bien avant qu’après
la tempête Xynthia, alors même que l’occupation de ce terrain ne respecte
pas les dispositions réglementaires en vigueur.
En Charente-Maritime, trente-deux terrains ont été affectés par la
tempête, dont dix ont été recouverts par au moins un mètre d’eau. Sept
d’entre eux représentant 463 emplacements n’ont pas été autorisés à
rouvrir. Si les maires de Fouras et de La Rochelle ont pris les arrêtés de
fermeture définitive, le préfet a dû se substituer à celui d’Aytré pour cette
décision.
Les trois campings d’Aytré, situés en zone de solidarité, ont fait
l’objet de propositions de rachat amiable par l’Etat pour un montant total
de 4,9 M€. Le refus de l’Etat d’une proposition d’un montant supérieur,
incluant le fonds de commerce, a amené les propriétaires de deux des
campings à saisir la juridiction administrative.
Les autres campings ont pu continuer leur activité, certains après
des travaux. Il reste que sur les 25 maintenus, neuf seulement ont un
cahier de prescriptions actualisé, tandis que pour quatre l’actualisation est
en cours. 12 ont donc toujours un cahier de prescription très ancien, alors
qu’ils ont été touchés par la tempête Xynthia. Sur les 282 campings de
Charente-Maritime situés dans des communes à risque naturel ou
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PROTECTION DES
ZONES
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UNE
COHERENCE
DEFAILLANTE
103
technologique, 157 disposent de cahiers de prescriptions approuvés
depuis plus de cinq ans et 57 n’en ont pas.
Dans le Var, neuf campings ont été fermés et non exploités durant
l’été 2010, et trois ont fait l’objet d’une fermeture partielle. Seuls certains
d’entre eux détenaient un cahier de prescriptions, ceux-ci ne mentionnant
pas, ou de manière insuffisante, le risque inondation ainsi que les mesures
d’alerte et d’évacuation des occupants. Enfin, les liens avec les plans
communaux de sauvegarde n’étaient pas clairement précisés.
Le préfet a écrit le 31 janvier 2011 aux maires des communes
concernées, notamment de Fréjus, Roquebrune-sur-Argens et Les Arcs-
sur-Argens, pour leur signifier les conditions d’une éventuelle réouverture
en 2011 (notamment la mise à jour du plan communal de sauvegarde, la
mention dans le cahier des prescriptions des mesures de prévention prises
par l’exploitant, l’implantation des repères de crues).
Avant toute réouverture, chaque camping a été visité par la sous-
commission départementale de sécurité pour vérifier que les dispositifs
prévus étaient opérationnels. De nouveaux cahiers de prescription ont été
proposés et approuvés. La préfecture a précisé aux maires, qu’à partir du
moment où le dispositif de veille de Météo-France placerait les cours
d’eau
au
niveau
« orange »
(crue
génératrice
de
débordements
importants), la règle, à inclure dans les plans communaux de sauvegarde,
devait être l’évacuation préventive. Celle-ci a été appliquée lors des
inondations de 2011.
Au total, la prise de conscience de la nécessité de faire strictement
appliquer la règlementation en matière de camping est réelle, mais les
résultats ne sont encore que partiels. L’exemple du camping de La Faute-
sur-Mer montre pourtant, sans même évoquer des risques pour les vies
humaines, le coût pour une collectivité locale des dégâts sur un terrain
implanté de manière irrégulière.
II
-
Les zones à risque élevé : le rachat du bâti
Dans les zones où le risque est particulièrement élevé, une solution
possible consiste à renoncer à une protection jugée peu réaliste, ce qui
s’apparente à un « repli stratégique ». La pratique des zones de solidarité,
avec le rachat amiable des maisons par l’Etat, pourrait se rapprocher
d’une telle politique. Toutefois, le manque de cohérence de la démarche
observée après la tempête Xynthia en relativise la portée.
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104
COUR DES COMPTES
A - Les zones de solidarité après Xynthia
1 -
La procédure suivie
La méthode pour délimiter les « zones sinistrées qui ne pourront
plus être réoccupées à cause de leur trop forte exposition aux risques » est
fixée dans une circulaire signée par le directeur de cabinet du ministre
chargé de l’écologie du 18 mars 2010. Après avoir rappelé que l'État doit
prendre rapidement des positions, fondées au plan technico-économique,
juridique et opérationnel et pouvant être expliquées et partagées par les
collectivités locales et les habitants concernés, ce texte indique qu'in fine,
une décision de sécurité publique « pourra devoir être imposée ». Il
demande aux deux préfets de Vendée et de Charente-Maritime que soit
adressé « d’ici le 21 mars au soir » au cabinet et aux administrations
centrales concernées un projet de cartographie, afin de faire l'objet d’une
concertation le 22 mars pour valider ces zones.
La première annexe de ce document fixe la méthode pour
déterminer les zones de risques majeurs dans lesquels les bâtiments ne
devront plus être réoccupés : l'aléa de référence
67
est constitué des
niveaux d'eau atteint par la tempête Xynthia, sans surélévation pour cause
de changement climatique ; la zone d'aléa fort
68
est délimitée à partir
d'une hauteur d'eau de 1 m qui crée un danger très important pour la vie
humaine ; une bande de précaution en pied de digues de 90 à 110 m est
incluse dans le périmètre à cause de l'effet de vagues en cas de rupture.
Cette disposition est présentée comme conforme à un « avis de la
direction régionale de l’environnement de 2004 », alors que certains plans
de prévention des risques prescrits ou approuvés (par exemple, les
dispositions anticipées du plan de prévention du risque inondation de La
Faute-sur-Mer) ne prévoient une zone rouge derrière les digues que sur
une bande de 50 m.
À partir de ces règles, la circulaire précise qu'il faut établir au
niveau local la cartographie des zones et des habitations touchées, en
prenant en compte les possibilités de protection, l’existence éventuelle de
refuges, mais aussi l'état des habitations. Elle indique cependant que
doivent être considérés « la forme et l'impact de ces zones en termes
d'urbanisme », afin de ne pas créer un mitage ingérable.
67
Maximum des plus hautes eaux connues et de la submersion de fréquence
centennale.
68
Zone où la hauteur d’eau et la vitesse en l'absence de protection mettent la vie en
danger.
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LA
PROTECTION DES
ZONES
BATIES :
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COHERENCE
DEFAILLANTE
105
L’ambiguïté de ce texte tient au choix entre une analyse du risque
maison par maison ou une logique d'urbanisme sur des zones entières.
Officiellement, la possibilité de protection des habitations est prise en
compte, à la fois par une analyse globale de la zone et un examen des
caractéristiques de chaque maison. Cette dernière démarche est toutefois
subordonnée à une cohérence d’urbanisme.
Les délimitations des zones de solidarité ont finalement été
annoncées les 7 et 8 avril 2010. Même s’il est vrai que le travail avait été
engagé avant, le délai pour élaborer la cartographie des « zones de danger
mortel » a été, à partir de la parution de la circulaire, étonnamment court
(trois jours). Le premier zonage a été achevé le 21 mars et les expertises
complémentaires des deux semaines suivantes n’ont porté que sur des
ajustements limités. Ce délai n’a naturellement permis aucune véritable
concertation avec les élus et la population.
La cartographie retenue fait apparaître des zones dites de solidarité
de grande surface et d’un seul tenant, notamment en Vendée, privilégiant
une analyse fondée sur une base collective (possibilité de protection
d’une zone entière) plutôt qu’individuelle (niveau réel de construction de
la maison, ou existence de niveaux refuges, par exemple).
En Vendée, 840 biens sont inclus en zone de solidarité, à La Faute-
sur-Mer et L’Aiguillon-sur-Mer. En Charente-Maritime, 785 biens sont
initialement concernés dans treize communes : Ile d’Aix, Aytré, Charron,
Châtelaillon,
La Flotte-en-Ré,
Fouras,
Loix,
Nieul,
Saint-Georges
d’Oléron, Saint-Pierre d’Oléron, Yves, Port des Barques, Saint-Trojan-
les-Bains.
S’il est légitime que l’Etat ait voulu aller vite pour éviter de laisser
des familles dans l’incertitude, une précipitation qu’on peut estimer
excessive a conduit à une concertation insuffisante avec les collectivités
locales et les habitants. Il est regrettable que la situation individuelle des
maisons par rapport au risque n’ait pas été suffisamment prise en compte.
De ce point de vue, la circulaire du 18 mars s’est révélée trop ambigüe, et
n’a pas permis, contrairement à ses préconisations, de faire accepter par
les élus et la population,
les décisions prises.
2 -
L’incertitude sur le statut de ces zones de solidarité
Face à la multiplication des protestations, l’Etat a eu du mal à fixer
sa doctrine sur le statut des zones de solidarité. Des expertises
complémentaires sont engagées très rapidement, avec des diagnostics de
terrain et une meilleure prise en compte des remarques des élus locaux.
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106
COUR DES COMPTES
Le 15 avril 2010, le ministre chargé de l'écologie écrit aux maires
concernés. Il leur indique qu’il « ne saurait être question de la démolition
systématique des immeubles et des habitations dans les zones décidées
par l'État et très improprement appelées zones noires. » La procédure
d'acquisition amiable est justifiée par le souhait d'éviter que les sinistrés
se retrouvent dans une impasse, avec l'impossibilité de se réinstaller dans
leur maison et de la revendre. Il annonce que l’expropriation ne portera
que sur une partie de ces zones.
Par lettre du 26 avril 2010 à tous les sinistrés, le préfet de
Charente-Maritime leur indique pourtant qu’ils peuvent ne pas souhaiter
souscrire à l’offre d’acquisition à l’amiable de l’Etat, et qu’« une
déclaration d’utilité publique pour raisons de sécurité sera alors mise en
oeuvre, dans le cadre de laquelle sera effectuée une expertise
contradictoire au cas par cas, de chaque parcelle, donc de chaque
habitation, pour en évaluer les risques. Au terme de cette procédure, les
juridictions compétentes se prononceront sur une éventuelle expropriation
et, le cas échéant, sur une valeur d’indemnisation pour votre propriété. »
Il n’est précisé nulle part dans ce document que certains biens figurant en
zone de solidarité pourraient ne pas être soumis à cette procédure.
Le ministre écrit le 7 juin 2010 au préfet de Vendée en précisant
que les périmètres de zone de solidarité n’ont plus vocation à évoluer
« sauf exception dûment justifiée et d’ampleur limitée ». Les zones
soumises à expropriation ont vocation à être incluses dans le périmètre
des zones de solidarité, tout en évitant, là aussi, de créer des îlots « qui ne
pourraient être mis en sécurité de manière satisfaisante ou n'auraient pas
de sens en matière urbanistique ».
Il adresse une lettre similaire le 11 juin 2010 au préfet de Charente-
Maritime. Il lui annonce qu'à partir de fin octobre 2010, un terme sera mis
aux zones de solidarité et que les procédures d'expropriation seront
engagées. Ces dates seront repoussées.
La délimitation des zones d’expropriation intervient à la suite
d’études
complémentaires
effectuées
par
le
conseil
général
de
l’environnement et du développement durable (CGEDD). Le rapport pour
la Vendée (MM. Pitié et Puech) date de septembre 2010, à un moment où
l’essentiel des dispositions et des décisions individuelles est déjà prise en
matière d’acquisition amiable. C’est encore plus net pour la Charente-
Maritime, où le rapport du conseil général de l’environnement et du
développement durable (MM. Pitié, Bellec, Maillot, Nadeau, Puech) n’est
publié qu’en février 2011, soit presqu’un an après l’événement. Ce
dernier rapport n’est en outre pas conclusif pour un certain nombre de
communes.
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LA
PROTECTION DES
ZONES
BATIES :
UNE
COHERENCE
DEFAILLANTE
107
Les zones de solidarité ont été initialement créées à partir de la
demande pressante d’habitants traumatisés par la submersion. La décision
de tels rachats amiables s’est fondée sur un double objectif de protection
et de solidarité nationale, ce qui a été une source majeure d’ambiguïté, en
particulier vis-à-vis de ceux qui ne voulaient pas vendre leur maison.
Celle-ci a été aggravée par les hésitations qui apparaissent dans les prises
de position des représentants de l’Etat et le délai pris, en tout cas en
Charente-Maritime, pour fixer les zones d’expropriation.
Même si plusieurs propriétaires ont finalement refusé l’acquisition,
d’autres se sont très probablement sentis obligés d’accepter rapidement la
proposition de l’Etat, alors que les études ultérieures ont montré que
l’acquisition n’était pas toujours inévitable.
3 -
Les conséquences d’un tracé différent des zones de solidarité
et d’expropriation
A la différence de ceux ayant délimité les zones de solidarité, les
travaux complémentaires des experts coordonnés par M. Pitié se sont
appuyés sur des visites de terrain et une concertation avec les élus et les
personnes concernées. Leurs rapports sont fondés sur une analyse des
risques et des moyens de protection, en principe sans prendre en compte
la position du propriétaire pour accepter ou non un rachat par l’Etat.
Un des changements importants de méthode est en outre la prise en
compte de la présence d’un étage dans les maisons concernées, qui est
dans certain cas la seule justification de la non inclusion dans la zone
d’expropriation
(exemples :
Saint-Trojan-les-Bains
en
Charente-
Maritime, sud du port des Yachts à La Faute-sur-Mer, secteur des
Glaireaux et des Caves à L’Aiguillon-sur-Mer).
a)
Pour la Vendée
Le rapport dit « Pitié » valide intégralement la délimitation d’une
zone d’expropriation identique à la zone de solidarité dans certains
endroits (secteur de La Pointe à L’Aiguillon-sur-Mer). Il définit ailleurs
des zones d’expropriation plus réduites (quartiers sud de L’Aiguillon-sur-
Mer, La Faute-sur-Mer). Pour La Faute-sur-Mer, le rapport propose en
outre, d’inclure dans la zone d’expropriation 11 biens ne figurant pas en
zone de solidarité. Cette dernière mesure n’est pas retenue dans le
dispositif final annoncé par un communiqué du ministre chargé de
l’écologie du 18 octobre 2010, compte tenu des protestations qu’elle
suscite.
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COUR DES COMPTES
Alors que dans sa lettre du 7 juin 2010, le ministre indiquait qu’à
partir de septembre, seuls les biens situés dans les zones soumises à
expropriation, resteraient éligibles à la procédure d'acquisition amiable, le
communiqué du 18 octobre 2010 annonçant le tracé de la zone
d’expropriation précise que « la zone de solidarité (…) est maintenue » et
que tous les habitants de la zone, qu’ils soient ou non en zone
d’expropriation,
disposent
d’un
délai
d’un
mois,
soit
jusqu’au
18 novembre, pour confirmer ou non leur intention de procéder à la vente
amiable. Cette disposition est peu cohérente : soit les biens concernés
sont dangereux, et ils auraient dû figurer en zone d’expropriation ; soit ils
ne le sont pas, et il n’y a aucune raison de proposer une acquisition
amiable.
Au total, 246 biens (sur 840) situés en zone de solidarité se
retrouvent hors zone d’expropriation. Parmi eux, 167 ont été rachetés par
l’Etat (121 à La Faute-sur-Mer, 46 à l’Aiguillon-sur-Mer), pour un
montant de 49 M€ (coût net pour l’Etat, à partir de l’évaluation des
domaines, majorée des indemnités de remploi et de déménagement et
minorée des indemnités des assurances). Onze maisons dont la valeur
dépasse 500 000 € sont dans cette situation, rachetées pour un montant
total de 6,6 M€.
Trois exemples à La Faute-sur-Mer illustrent, parmi d’autres, le
fait qu’une analyse précise de chaque bâti aurait dû être conduite avant de
délimiter les zones. Une résidence située chemin des Pensées, rachetée
805 602 €, est, certes, implantée à quelques mètres de la digue, et donc en
zone rouge de l’ancien plan de prévention du risque inondation, mais
bénéficie d’un étage de grande surface (165 m
2
) et d’un grenier
aménageable au-dessus (150 m
2
). Une autre située impasse des
Chalutiers, rachetée 611 000 €, est constituée d’une maison avec un
étage ; elle n’a subi aucune inondation et les indemnités d’assurance sont
nulles. Une troisième située dans la même impasse, rachetée 556 000 €,
n’a été inondée qu’à hauteur de 75 cm et surtout dispose de trois
chambres à l’étage. Dans chacun de ces cas, les étages permettent aux
habitants de se protéger.
b)
Pour la Charente-Maritime
Dans une lettre du 11 juin 2010, le ministre indique au préfet qu'à
partir de fin octobre 2010, un terme sera mis aux zones de solidarité et
que seront engagées les procédures d'expropriation. Les premières
décisions datent en fait du 9 février 2011, où un communiqué de la
préfecture entérine les propositions du rapport « Pitié », tout juste rendues
publiques.
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LA
PROTECTION DES
ZONES
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COHERENCE
DEFAILLANTE
109
A Charron, la zone d’expropriation inclut trois maisons non
intégrées dans la zone de solidarité, mais exclut de la zone
d’expropriation huit biens situés en zone de solidarité. Dans les autres
communes concernées et pour lesquelles une décision est prise, les zones
d’expropriation recouvrent les zones de solidarité soit totalement (à
Nieul, Ile d’Aix, Port des Barques), soit partiellement (à La Flotte-en-Ré
et Saint-Trojan-les-Bains, avec chaque fois quatre maisons en moins). Là
où la zone d’expropriation est tracée, la préfecture précise que les
propriétaires disposent jusqu’au 15 mars pour bénéficier de l’offre faite
pour l’acquisition de leur maison à l’amiable.
Pour d’autres communes, la décision interviendra encore plus tard,
après plusieurs études complémentaires, en particulier pour examiner les
possibilités et le coût d’éventuelles nouvelles protections, et une autre
expertise du conseil général de l’environnement et du développement
durable, avec cette-fois-ci un raisonnement prenant explicitement en
compte les caractéristiques de chaque maison, en particulier l’existence
ou non d’un niveau refuge.
S’agissant du quartier des Boucholeurs (Châtelaillon, Yves), la
décision de renoncer à toute expropriation est prise en septembre 2011.
L’exemple de cette zone est significatif d’un processus chaotique et de
décisions contradictoires, inutilement coûteuses pour les finances
publiques.
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COUR DES COMPTES
Le rachat de biens immobiliers dans la zone des Boucholeurs
Le quartier des Boucholeurs, à l’origine un ancien hameau de
pêcheurs de Châtelaillon, est devenu au cours de la deuxième moitié du
vingtième siècle une station touristique. Plusieurs centaines de maisons ont
ainsi été construites, dont le plus grand nombre sur la commune d'Yves.
Ainsi, ce qui est désormais communément appelé "Les Boucholeurs" est un
quartier réparti entre les communes de Châtelaillon et d’Yves.
Il se caractérise par une zone en front de mer, très exposée et protégée
par une digue de pierres, et une zone plus basse à l’intérieur des terres,
inondable par contournement à l’Est, à proximité d’une réserve naturelle.
Celle-ci, créée en 1981 sur des territoires appartenant au conservatoire du
littoral et au conseil général et gérée par la ligue pour la protection des
oiseaux (LPO), ne dispose face à la mer que d’un mince cordon sableux et
soumis à l’érosion marine.
La tempête de décembre 1999 avait submergé le site jusqu’à la voie
ferrée le longeant et avait inondé les quartiers bas du village. A la suite de cet
évènement, une procédure de plan de prévention du risque inondation avait
été lancée par l’Etat et une étude réalisée par le conseil général. Celle-ci
prévoyait de construire une digue de protection en renforçant un ancien
chemin sableux au coeur de la réserve. Ces initiatives n’ont pas eu de suite.
Lors de la tempête Xynthia, deux décès par noyade sont intervenus
dans ce quartier, dans des maisons sans étage. Le village a été inondé de
façon plus marquée qu’en 1999 : les digues en pierre et en maçonnerie ont été
submergées et des maisons de bord de mer détruites par l’attaque frontale de
la masse d’eau.
441 maisons ont été inondées, dont 91 à Châtelaillon et 350
à Yves. Parmi elles, 270 ont été submergées par plus de 1 mètre d’eau, dont
200 ne disposaient pas d'un niveau refuge. La réserve naturelle a elle-aussi
été submergée, ainsi que la voie ferrée, qui avait fait barrage en 1999.
Après la tempête, une bande de 50 m de large a été classée en zone de
solidarité le long du front de mer, 49 « biens » (dont 4 commerces) à
Châtelaillon et 40 habitations à Yves étant compris dans cette zone. Ce
zonage a été contesté par les élus et une partie des habitants.
Pour ce quartier, le rapport Pitié procède dès février 2011 à une
analyse plus nuancée que celle ayant conduit à la décision initiale. Il
considère qu’il est difficile de mettre ce quartier à l'abri des inondations, mais
qu’il est possible de ramener le risque à un niveau compatible avec la sécurité
des occupants à trois conditions : un endiguement du site, un dispositif de
drainage et une organisation de la prévention. Ce rapport propose de retirer
de la zone de solidarité les constructions qui ne sont pas en première ligne par
rapport au rivage, mais de maintenir celles qui y sont. Aucune décision n’est
cependant prise à ce stade.
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LA
PROTECTION DES
ZONES
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COHERENCE
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111
Plusieurs solutions de protection sont possibles. S’agissant des flux de
mer susceptibles de passer à travers la réserve naturelle, une digue est
envisageable, soit en front de mer en s’appuyant sur le cordon dunaire, soit
au milieu de la réserve conformément à l’étude du conseil général, soit le
long des infrastructures routière et ferroviaire existantes, en utilisant la
réserve comme lieu d’amortissement de l’onde de marée. Le conservatoire du
littoral ne s’oppose pas à l’édification d’une digue sur sa propriété.
A l’initiative du département de Charente-Maritime, un scénario de
protection du site accompagné d’un aménagement hydraulique des zones de
marais est finalement proposé et accepté au printemps 2011 par les
communes concernées. Il comporte une protection en mer, avec mise en
place de quatre brise-lames de 150 mètres espacés de 50 mètres entre eux, et
complétée, à terre,
par un talus en enrochements et un mur chasse mer. Le
coût des travaux envisagés est de 11,5 M€.
Lors d’une réunion au cabinet de la ministre chargée de l’écologie le
27 septembre 2011, les services techniques du ministère valident sa
faisabilité et ses capacités de protection des zones habitées. Il reste à préciser
les financements requis. Le ministre chargé de l’écologie avait, dans une
lettre au préfet de Charente-Maritime du 11 juin 2010, demandé que le choix
du maître d’ouvrage soit fait avant la fin de 2010, mais celui-ci vient
seulement d’être constitué au dernier trimestre 2011 (syndicat intercommunal
du littoral Yves et Châtelaillon).
Sur ces bases, le préfet décide fin septembre 2011 de ne pas définir de
zone d’expropriation sur ce quartier pourtant classé initialement en zone de
solidarité, même si l’incertitude subsiste sur la date et la bonne réalisation des
travaux.
Le coût actuel de ces décisions contradictoires, à 18 mois d’intervalle,
est au minimum de 11 198 289 €, correspondant aux 35 maisons rachetées
inutilement si on considère la décision prise depuis d’exécuter des travaux
pour, en principe, protéger correctement la zone.
Ce coût sera majoré des dépenses nécessaires pour régler le devenir de
ces biens, qui pose problème dans le nouveau contexte. Leur destruction
pourrait fragiliser les maisons mitoyennes et entraîner l’apparition de « dents
creuses » peu satisfaisantes sur le plan de l’urbanisme. Toutefois la procédure
de rachat de maisons interdit à juste titre une autre hypothèse que leur
démolition. L'exposé préalable figurant dans tous les actes de vente indique
qu’ «
afin d'assurer la protection et la réinstallation du vendeur, ainsi que la
sécurité de la zone, l'Etat garant des intérêts du peuple français et de la
solidarité nationale acquiert à l'amiable et en l'état ledit bien et s'engage à
procéder à l'entière démolition desdites constructions. »
Pour la zone de solidarité de Boyardville à Saint-Georges
d’Oléron, la décision définitive sur l’expropriation est prise par la préfète
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COUR DES COMPTES
en janvier 2012. Le critère retenu est l’altitude du seuil des biens
concernés et l’absence de niveau refuge. Sur cette base, par rapport aux
119 biens existant en zone de solidarité et aux 37 biens ayant donné lieu à
une acquisition amiable, 25 biens seulement restent à acquérir. Sur les
37 biens déjà acquis par l’Etat, 22 figurent en zone d’expropriation, mais
ce n’est pas le cas pour 15 d’entre eux (valeur : 6,09 M€).
Pour la zone de solidarité de la pointe de la Fumée à Fouras, une
première décision prise en décembre 2010 exclut 15 biens de la zone
d’expropriation. La décision finale est prise en février 2012, après une
analyse au cas par cas de chaque maison. Par rapport aux 116 biens
existant en zone de solidarité et aux 44 biens ayant donné lieu à une
acquisition amiable, 4 biens seulement restent à acquérir et 5 sont dans
une situation incertaine. Sur les 44 biens déjà acquis par l’Etat,
13 figurent en zone d’expropriation, mais ce n’est pas le cas pour 31
d’entre eux (valeur : 12,31 M€).
Un des exemples les plus significatifs de dépenses pouvant être a
posteriori considérées comme inutiles est celui du quartier de l’école de
voile à La Flotte-en-Ré (quatre maisons). Le niveau de l’océan étant
monté lors de la tempête à 4,5 mètres nivellement général de la France
(NGF), cette zone a été incluse en zone de solidarité du fait d’un sol à un
niveau inférieur en moyenne à 3,5 m (seuil applicable compte tenu de la
hauteur d’eau de danger retenue de un mètre). En réalité, les experts
concluent dans leur rapport de janvier 2011 qu’il n’est pas nécessaire que
cette zone soit incluse en zone d’expropriation si le site est sécurisé par
un muret de 150 mètres environ pour un coût estimé à 70 000 €. Les deux
maisons qui subsistent dans la zone sont par ailleurs pourvues d’un étage.
Il reste qu’au moment de cette décision sur la délimitation de la zone
d’expropriation, deux maisons situées dans cette zone avaient déjà été
rachetées pour une valeur totale de 2,4
M€, dont une résidence principale
avec étage (achetée 1,5
M€, les indemnités d’assurances de
moins de
27 000 € permettant de penser que les dégâts étaient relativement peu
importants) et une résidence secondaire (achetée 0,9 M€). S’agissant au
minimum de la maison avec étage, l’acquisition par l’Etat ne s’imposait
manifestement pas.
A l’inverse, certaines maisons ne sont incluses ni en zone de
solidarité ni en zone d’expropriation, alors qu’elles sont considérés par les
experts coordonnés par M. Pitié comme plus dangereuses que d’autres qui
se situent en zone de solidarité. C’est le cas par exemple à Loix, où trois
maisons proches du bourg (quartier du Port) figurent en zone de solidarité
(et où d’ailleurs les propriétaires refusent le rachat amiable). Le rapport
Pitié indique que «
certaines maisons du quartier Lavaud (situé hors zone
de solidarité), exposées à une submersion supérieure à 1,50 mètres, sont
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PROTECTION DES
ZONES
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objectivement dangereuses alors que, en zone de solidarité, (…) l'une des
maisons du quartier du Port l’est nettement moins ». Aucune décision n’a
pourtant été prise pour le moment pour corriger cette situation.
Au total, 88 maisons en Charente-Maritime ont été acquises par
l’Etat tout en n’étant pas incluses dans une zone d’expropriation, pour un
coût total de 34 M€ : 35 aux Boucholeurs (pour un total de 11,2 M€), 15 à
Saint-Georges d’Oléron (6,1 M€), 31 à Fouras (12,3 M€), et 7 dans
d’autres communes (4,4 M€).
Le coût élevé des rachats des maisons situées hors zone
d’expropriation (près de 50 M€ en Vendée, 34 M€ en Charente-Maritime)
illustre le caractère précipité des décisions prises par l’Etat et ce qu’il faut
appeler une utilisation inefficace
des fonds publics.
S’il ne s’agissait que de protéger la population dans des zones à
risque très élevé, les zones de rachat amiable auraient dû avoir pour
délimitation
celle,
restreinte,
des
zones
d’expropriation
et
la
détermination des zones d’expropriation aurait dû interrompre la
procédure amiable pour les biens situés à l’extérieur de ce zonage. La
seule présence dans une zone inconstructible, déclarée rouge au plan de
prévention des risques, ne suffit pas en effet à justifier un rachat de
maison, qui doit, selon la loi et le bon usage des fonds publics, être limité
aux cas où aucune mesure de protection moins coûteuse n’est possible.
Si les rachats amiables par l’Etat étaient motivés par un principe
de solidarité nationale pour des personnes traumatisées, y compris lorsque
l’expropriation n’était pas considérée comme justifiée en l’absence d’un
risque très élevé ou en présence de solutions de protection à un coût
moindre, d’autres méthodes auraient été nettement moins coûteuses et
plus efficaces pour les biens hors zone d’expropriation, comme, par
exemple, la prise en charge sur longue durée du coût du relogement en
attendant la vente de la maison. Il est en outre regrettable dans ce cas
qu’une distinction n’ait pas été clairement faite entre résidences
principales et secondaires.
Il aurait été au total de bien meilleure gestion et de même effet au
plan de la solidarité de limiter strictement les rachats amiables aux zones
incontestables d’extrême danger où toute protection apparaît soit illusoire,
soit très coûteuse, et de prévoir, par exemple, pour les victimes situées en
zone intermédiaire et voulant vendre leur résidence principale une prise
en charge du relogement sur une certaine durée, le temps que le bien
puisse être normalement vendu.
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COUR DES COMPTES
B - La méthode différente suivie après les inondations
du Var
La méthode suivie dans le Var est radicalement différente. Elle
consiste à ne pas définir immédiatement après la crise des zones de rachat
amiable, et à traiter le problème en deux phases en fonction de l’urgence.
La première phase concerne 20 biens immobiliers correspondant à
des maisons ayant fait l’objet d’arrêtés de péril.
Quelques demandes de
rachat enregistrées sont alors refusées, en particulier au Muy dans des
secteurs où les inondations sont récurrentes.
Dans la deuxième phase, une étude est prévue dans les périmètres
les plus exposés des cours d'eau ayant connu des crues torrentielles ou à
montée rapide : la Nartuby, la Florièye et le Réal. Ces périmètres seront
définis en concertation avec les élus. L’objectif est de mesurer le danger
sur la base d’une analyse exhaustive des constructions. Les principaux
critères utilisés sont le niveau de l’eau atteint lors de la récente crue, la
vitesse d’écoulement, qui peut être rapide et donc dangereuse, et les
possibilités de protection et de refuges. Un marché a été passé pour
réaliser cette étude.
L'inventaire des constructions à acquérir dépendra en outre des
décisions d'aménagement des lits mineur et moyen de la rivière, qui ne
sont pas encore prises. Ces informations devraient être disponibles au
cours du premier semestre 2012.
La méthode s’inspire de celle utilisée en 2005 dans le Gard. Il est
en principe prévu de limiter l'acquisition des constructions aux seuls
périmètres les plus exposés, identifiés et validés avec les élus, et, sauf
exception particulière, de ne pas acquérir de bâtiments dans les centres-
villes. L’examen de la situation de la basse vallée de l'Argens, qui
représente un travail important, aura lieu dans une étape ultérieure,
simultanément au réaménagement agricole de ce secteur.
Au total, ces différentes contraintes expliquent qu’aucune
estimation fiable du nombre de constructions concernées n’existe, plus
d’un an après les faits. Un premier diagnostic identifie 18 nouveaux cas.
L’examen de certains d’entre eux montre l’existence de réels dangers,
qu’il est peut-être regrettable de ne pas traiter plus rapidement.
Il s’agit, par exemple, de deux maisons à Chateaudouble. Les
habitants de l’une sont décédés sur le terrain de leur propriété lors de
l’inondation. Ces habitations sont situées au milieu du plan de
Rebouillon, très proches de la rivière, alors que les autres constructions
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LA
PROTECTION DES
ZONES
BATIES :
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COHERENCE
DEFAILLANTE
115
anciennes du hameau ont été édifiées à sa périphérie, en pied du relief, et
sont donc de ce fait moins exposées.
Les caractéristiques de la procédure suivie dans le Var garantissent
en principe la prise en compte de l’ensemble des paramètres avant la
décision de rachat et permettent d’éviter ainsi les acquisitions inutiles.
Pour les biens non rachetés en urgence, la méthode a cependant
l’inconvénient de ne pas traiter le problème « à chaud », de laisser un
long délai pour statuer sur le cas de maisons, qui, pour certaines, restent
dangereuses, et de rendre, le moment venu, plus difficile l’acceptation de
la vente par le propriétaire.
***
Dans ce genre de crise, il n’est pas illégitime de vouloir réagir
rapidement face aux traumatismes ressentis par les personnes sinistrées.
Agir trop lentement a l’inconvénient, comme dans le Var, de ne pas
répondre à la situation de détresse de certaines victimes et de rendre plus
difficile le règlement final des problèmes. La rapidité ne justifie toutefois
pas la précipitation dont l’Etat a fait preuve dans un premier temps dans
le cas des inondations provoquées par Xynthia, ce qui a généré de
multiples effets pervers et contribué à faire prendre en charge des rachats
injustifiés de biens immobiliers et à alourdir le coût global de ces
opérations.
C - Le financement des rachats de biens immobiliers
1 -
La synthèse des dépenses
Les crédits ouverts et les dépenses en 2011 dans le cadre du fonds
Barnier pour les rachats de maison dans le Var sont de 5 M€. 7,3 M€ de
crédits supplémentaires ont été délégués le 25 mai 2012.
Les crédits ouverts pour les inondations provoquées par Xynthia
sont beaucoup plus importants. Ils s’élèvent au total à 315,7 M€ de
crédits délégués fin juin 2012, et 298,7 M€ de dépenses à la même date.
Leur montant total payé par le Fonds Barnier est proche de celui de
la totalité des dépenses de ce fonds au cours de
la période de quatre
années 2006-2009 (331 M€). Elles en représentent 80 % en 2010, seuls
48 M€ subsistant pour les autres actions.
Outre
l’utilisation
du
solde
des
opérations
achevées,
le
financement
en
2010
de
ces
acquisitions
s’est
effectué
grâce
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COUR DES COMPTES
à l’accroissement des recettes de la prime
69
(163 M€ y compris les
produits financiers), à l’utilisation des réserves du fonds (75 M€ de
reliquat évalué au premier trimestre 2010), à un abondement versé début
décembre
en
provenance
du
programme
181
du
ministère
de
l’environnement (25 M€, financé par un redéploiement interne au
programme 181 à hauteur de 8 M€, et par un abondement de 17 M€ dans
le cadre du décret d’avance du 30 novembre 2010), à la restitution de
crédits à hauteur de 10,2 M€ et à une diminution des autres lignes de
dépenses du fonds de prévention des risques naturels majeurs.
Pour 2011, outre le produit du prélèvement (175 M€) et les
reversements (5 M€), l’article 38 de la loi de finances a prévu que « le
dividende versé en 2011 par la Caisse centrale de réassurance à l'État est
affecté, dans la limite de 100 M€, au fonds de prévention des risques
naturels
majeurs
mentionné
à
l'article
L.
561-3
du
code
de
l'environnement, pour le financement des acquisitions immobilières, par
voie d’acquisition amiable ou d’expropriation, rendues nécessaires à la
suite de la tempête Xynthia ».
La Caisse centrale de réassurance a certes l’Etat pour actionnaire
unique. Le texte de loi de finances décidant de cette opération se garde
bien de fixer le dividende, ce qui serait irrégulier et indique que le
dividende sera reversé au fonds de prévention « dans la limite de
100 M€ ».
Il reste qu’un tel dispositif doit rester exceptionnel, le dividende de
la caisse centrale de réassurance n’ayant aucune raison d’être affecté a
priori avant même de connaître son montant exact, qui est fixé par le
conseil d’administration au moment de l’arrêté des comptes en avril.
2 -
Le programme d’avances décidé en loi de finances pour 2011
Étant donné le quasi-assèchement de sa trésorerie fin 2010, le
fonds n’est pas en mesure de disposer d’une trésorerie suffisante au
premier semestre 2011 pour faire face aux besoins générés par les
acquisitions amiables. 40 % des recettes du fonds Barnier sont perçues au
premier trimestre, mais, en 2011, 80 % des dépenses ont eu lieu dans la
même période. C’est pourquoi une avance de l’Etat d’un maximum de
100 M€ est décidée, celle-ci devant être remboursée par le fonds grâce au
versement prévu du dividende exceptionnel de la caisse centrale de
réassurance.
69
L’augmentation du montant de la prime perçue en 2010 par rapport à 2009
s’explique par le fait que l’accroissement du taux en 2009 ne s’est appliqué qu’à partir
du mois de mars.
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LA
PROTECTION DES
ZONES
BATIES :
UNE
COHERENCE
DEFAILLANTE
117
La possibilité pour l’Etat d’accorder une avance au fonds Barnier
est prévue par l’article L 561-3 du code de l’environnement.
Pour sa mise en oeuvre, un nouveau programme 865 du compte de
concours financier « prêts et avances à des particuliers ou à des
organismes privés » est créé par la loi de finances pour 2011. Il s’intitule
« Prêts et avances au Fonds de prévention des risques naturels majeurs »
et son responsable est le directeur général du Trésor. Il permet à l’État
d’accorder des facilités de financement au Fonds Barnier en cas de
besoins ponctuels de trésorerie. Ces facilités de financement donneront
lieu à liquidation d’intérêts. Il est doté en 2011 de 100 M€, dont 65 M€
ont été utilisés.
L’imputation budgétaire de ce dispositif est contestable, puisqu’il
s’agit d’un compte de concours financier réservé à des particuliers ou à
des firmes privées, alors que le fonds de prévention des risques naturels
majeurs est un fonds d'État sans personnalité morale.
D - La nécessaire définition d’une politique pour les
biens immobiliers exposés à de graves dangers
Une politique globale et cohérente pour l’ensemble des situations à
risque mérite d’être définie, ce qui n’est pas suffisamment le cas
aujourd’hui.
1 -
La protection définitive des zones où les maisons ont été rachetées
Il convient de gérer les zones où les maisons ont été rachetées, le
danger
qui
les
menace
imposant
qu’aucune
reconstruction
n’y
intervienne. Compte tenu de la soif de construire, la pression risque
cependant d’être forte dans l’avenir pour certaines de ces zones, une fois
les évènements de 2010 en partie effacés des mémoires. Dans le Var, la
direction départementale des territoires et de la mer envisage de transférer
les terrains dans le patrimoine communal, avec un usage très restrictif,
mais, dans cette hypothèse, nul ne peut être sûr de l’absence de
reconstruction à l’horizon de quelques décennies, ce que la seule
propriété de l’Etat et le classement en zone rouge du plan de prévention
du risque inondation ne garantissent pas.
Une méthode offrant de solides garanties serait le rachat par le
conservatoire du littoral. Cet établissement public possède déjà des
terrains littoraux au fond de la baie de L’Aiguillon-sur-Mer (la ferme de
la Prée Mizottière) et gère un ancien site ostréicole à La Faute-sur-Mer, à
la suite d’une convention signée avec le préfet le 5 septembre 2008.
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COUR DES COMPTES
Le statut final des biens immobiliers acquis par l’Etat peut faire
craindre un oubli progressif de l’impératif de non-construction sur tout ou
partie de ces terrains. Au-delà du classement en zone inconstructible dans
les plans de prévention des risques, la dévolution au Conservatoire du
littoral constituerait une solution sur le long terme. C’est pourquoi celle-
ci, actuellement envisagée pour certains terrains, est à recommander, à
condition bien sûr qu’il s’agisse de sites cohérents sur les plans naturel et
paysager et en prévoyant des projets de gestion conformes aux missions
de l’établissement.
2 -
L’identification et le traitement des zones concernées ailleurs
Les exemples des inondations Xynthia et du Var montrent que des
zones d’habitation peuvent être très menacées. Il convient donc de les
identifier de manière systématique et de rechercher des solutions adaptées
aux menaces.
S’agissant des rivières à crues rapides et dangereuses, aucune
identification précise n’a été menée depuis les inondations du Var.
Pour le littoral, une étude a été menée par l’observatoire de la
mission « risque naturel » des entreprises d’assurance, pour déterminer le
nombre de maisons et d’entreprises construites sur le littoral à une faible
altitude. Alors que l’essentiel des habitations inondées de La Faute-sur-
Mer et de L’Aiguillon-sur-Mer est construit à une altitude comprise entre
2 et 5 mètres, cette étude chiffre le nombre d’immeubles construits à
moins de deux mètres d’altitude à 230 000 pour ceux à usage d’habitation
et à 20 000 pour ceux à usage professionnel. Il s’agit naturellement d’un
ordre de grandeur, toutes ces maisons n’étant pas menacées de la même
façon. Mais l’ordre de grandeur a le mérite de montrer l’ampleur du
problème potentiel.
Pour l’appréhender plus précisément, le ministère chargé de
l’écologie
a
engagé,
après
la
tempête
Xynthia,
un
exercice
d’identification des zones d’extrême danger. Par circulaire du 7 avril
2010, les deux ministres chargés de l’intérieur et de l’écologie ont
demandé aux préfets littoraux d’identifier « les zones d’extrêmes dangers
pour la vie humaine sans possibilité de réduire la vulnérabilité des
bâtiments ». Trois critères ont été retenus : un mètre de submersion lors
des inondations Xynthia ; une habitation à moins de 100 mètres derrière
une digue ; une cinétique de submersion lors des inondations Xynthia
représentant un risque pour les personnes. Leur portée est incertaine, en
particulier pour savoir s’il s’agit de tirer les conséquences de la tempête
Xynthia elle-même ou de mesurer les effets d’un phénomène de
caractéristiques équivalentes ailleurs sur les côtes françaises.
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LA
PROTECTION DES
ZONES
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UNE
COHERENCE
DEFAILLANTE
119
Le recensement fait apparaître un engagement modéré des préfets
pour délimiter ces zones et y mener des opérations. Plusieurs d’entre eux
n’ont pas répondu. D’autres donnent des indications très générales. Par
exemple,
dans le Nord-Pas-de-Calais, 400 000 habitations jusqu’à 40 km
dans les terres seraient concernées ; en Languedoc-Roussillon, 10 à
11 000 habitations le seraient, mais avec des incertitudes importantes ; en
Bretagne, 74 sites seraient identifiés, leur caractéristique de zone
d’extrême danger restant cependant à confirmer.
Certains préfets sont précis, pour indiquer parfois qu’aucune zone
ne serait concernée, ainsi en Corse-du-Sud. Sinon les précisions apportées
sont les suivantes :
-
dans les Bouches-du-Rhône, entre 331 et 3 018 constructions
seraient identifiées, en particulier à Port-Saint-Louis du Rhône,
les Saintes-Maries de la Mer, Arles et plus ponctuellement Fos-
sur-Mer ;
-
en Pays de la Loire, plusieurs sites seraient particulièrement
exposés hors le Sud-Vendée, tous en Loire-Atlantique dont La
Baule-Le Pouliguen-Guérande, Batz-sur-Mer et Pornic, avec
409 biens concernés ;
-
en Aquitaine, deux secteurs exposés ont été identifiés en
Gironde (bassin d’Arcachon, estuaire de la Gironde), ainsi
qu’un site répondant aux trois critères (Saint-Louis-de-
Montferrand, 30 à 40 maisons).
Au total, en retenant les fourchettes les plus basses et en ne prenant
en compte que les réponses précises, plusieurs centaines de maisons au
minimum seraient d’ores et déjà concernées, mais celles-ci sont
probablement beaucoup plus nombreuses si on prend en compte
l’ensemble du littoral.
A partir de ce diagnostic, le ministère a établi un tableau de suivi et
organisé en septembre 2010 des réunions par façade littorale, qui ont
confirmé l’existence, dans chaque région, de zones d’extrême danger,
mais aussi « le manque de données topographiques et la connaissance
encore très partielle des ouvrages de protection ». C’est pourquoi, des
études complémentaires ont été décidées, mais sans qu’un programme
d’action ne soit mis au point, et sans qu’aucun budget ne soit prévu dans
le fonds de prévention des risques naturels majeurs.
Il est essentiel que les zones dangereuses situées sur le littoral
soient identifiées et traitées, soit par un rachat, soit par une réduction de la
vulnérabilité. S’agissant d’un danger pour la vie humaine, cette politique
devrait être prioritaire.
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COUR DES COMPTES
3 -
Les choix à opérer
Dans le cas des inondations provoquées par Xynthia, le coût
budgétaire des rachats de maison a été considérable. Il n’est ni possible,
ni souhaitable de généraliser ce type de dépenses pour les habitations
situées
dans
les
zones
de
danger.
Trois
orientations
semblent
envisageables :
-
l’adaptation des procédures. Des méthodes très différentes ont
été utilisées pour les inondations Xynthia et celles du Var. En
tout état de cause, le cadre législatif actuel permettant ces
acquisitions, qui n’a pas été créé pour faire face à ce type de
situation, souffre de nombreuses imperfections. S’il est logique
que les procédures soient adaptées à des situations qui ne sont
pas identiques, il est souhaitable que les règles d’action soient
plus précisément fixées pour l’avenir ;
-
la recherche effective et systématique de moyens de protection
alternatifs au rachat et de moindre coût. Dans de nombreuses
situations, la vulnérabilité des bâtiments peut être réduite par
des travaux à l’intérieur ou à l’extérieur des bâtiments. Ceci
exige cependant de procéder à des analyses au cas pas cas, avec
des moyens humains suffisants, et appuyée sur une volonté
forte des acteurs publics ;
-
la prise en charge des coûts de la réduction de la vulnérabilité
ou du rachat. Il n’est ni sain ni possible que ces financements
reposent exclusivement à l’avenir sur le budget de l’Etat. Il
serait souhaitable qu’ils soient pris en charge pour partie par
d’autres intervenants, en particulier les collectivités territoriales
avec un montant à la charge des propriétaires eux-mêmes. Ceci
suppose là aussi une adaptation de la législation en la matière.
Si l’Etat décide des plans de prévention du risque inondation,
dispose du contrôle de légalité et parfois instruit les permis de construire,
c’est le maire qui,
in fine
, les délivre, avec une obligation de respecter
l’article R. 111-2 du code de l’urbanisme. Il serait souhaitable que les
collectivités territoriales contribuent au rachat de biens immobiliers dans
des situations d’extrême danger, afin de les inciter à prendre davantage de
précaution dans les autorisations de construire.
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ZONES
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UNE
COHERENCE
DEFAILLANTE
121
III
-
Les ouvrages et les travaux de protection
Les populations comptent sur l’efficacité des ouvrages de
protection, digues fluviales ou ouvrages de protection contre la mer. Elles
comptent également sur une gestion efficace par leurs élus des risques liés
aux rivières. Or, les catastrophes de l’année 2010 ont montré
l’insuffisance des dispositifs de protection existants.
A - La difficile identification des responsables
Durant la dernière décennie, l’Etat s’est efforcé de recenser les
digues et les classer comme ouvrages intéressant la sécurité publique.
Cette démarche s’est heurtée à de sérieuses limites, principalement liées à
un système anarchique et déresponsabilisant de gouvernance. Celle-ci
concerne à la fois la propriété de la digue, qui porte souvent sur un simple
tronçon de digue
70
, et la responsabilité de la gestion de la digue, qui
devrait s’attacher à une digue complète ou un ensemble d’ouvrages
hydrauliquement cohérent.
La circulaire du 28 mai 1999 de la ministre chargée de
l’environnement demande aux services de l’Etat de recenser les digues
d’ici à la fin de l’année 1999. Le décret du 11 décembre 2007, précise les
catégories de digues à classer (4 classes : A, B, C, D, selon notamment le
nombre de personnes protégées et la hauteur des ouvrages
71
) et impose au
gestionnaire d’établir un bon état général des ouvrages.
1 -
En Vendée
La direction départementale de l’équipement commence le
recensement des digues de premier rang en 1999. Elle entreprend
également une démarche de classement au titre de la sécurité civile avant
même l’intervention du décret de 2007. La digue Est de la Faute-sur-Mer
70
Selon le centre européen de prévention des risques (CEPRI), les 8 600 km de digues
en France, dont au moins 510 km contre les submersions marines, sont morcelés en
7 500 tronçons, c’est-à-dire en unités de 1,1 km en moyenne.
71
Digue de classe A
= ouvrage d’une hauteur de 1 mètre ou plus et protégeant
50 000 habitants ou plus ; de classe B
= hauteur de 1 m ou plus et protégeant entre
1 000 et 50 000 habitants ; de classe C
= hauteur de 1 m ou plus et protégeant entre
10 et 1 000 habitants ; de classe D
= soit hauteur de moins de 1 m, soit moins de 10
habitants protégés. Le préfet peut par décision motivée modifier le classement d’un
ouvrage, s’il estime que celui-ci n’est pas de nature à assurer une protection adéquate
des risques ; il peut ainsi surclasser un ouvrage.
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COUR DES COMPTES
est ainsi le premier ouvrage classé par un arrêté préfectoral de
juillet 2005, avec des prescriptions de diagnostic et de surveillance.
Toutes les digues exposées à la mer vont être classées.
De sérieuses limites marquent cependant cette démarche.
Elle ne concerne que certains types d’ouvrages et non les dunes.
Elle n’englobe pas les remblais supportant
des routes (et, en dehors de la
Vendée où la question ne se pose pas, ceux supportant des voies ferrées).
Surtout, les obligations fixées par l’arrêté de classement ne sont
pas forcément suivies d’effet : réalisation d’un diagnostic approfondi de
l’ouvrage, création d’un dispositif d’entretien et de surveillance,
établissement d’un rapport annuel de gestion. La question est de savoir si
le propriétaire ou le gestionnaire de la digue, lorsqu’il est connu (ce qui
est loin d’être toujours le cas
72
), est capable de concrétiser les
prescriptions fixées. Ce point n’a pas été prévu.
Si pour certaines digues jugées prioritaires un effort est fait, celui-
ci n’est pas généralisé. Sur la digue Est de La Faute-sur-Mer, le
diagnostic initial est réalisé par un bureau d’études à la demande de la
commune, puis les travaux sont confiés par celle-ci à l’association
syndicale de la vallée du Lay (ASVL), tandis que l’association syndicale
propriétaire de la digue n’intervient pas. L’ASVL n’opère pas de
diagnostic sur les autres digues dont elle a la charge et ne produit pas de
rapport annuel de gestion. Le sous-préfet de Fontenay est obligé
d’organiser des réunions pour mettre les propriétaires et les gestionnaires
face à leurs obligations.
Par ailleurs, aucun dispositif n’est mis en place avant la
catastrophe pour contrôler la mise en oeuvre des obligations issues de
l’arrêté de classement.
Enfin, point essentiel, cette démarche ne règle pas la question de la
gestion des digues, sans laquelle les prescriptions fixées risquent de rester
lettre morte, en tout cas de ne pas être durablement suivies. La situation
d’avant la catastrophe est marquée par un enchevêtrement des
responsabilités.
A titre d’exemple, la carte des digues du Sud Vendée fait
apparaître que sur un linéaire de l’ordre de 20 km, on recense 11 digues,
7 propriétaires et 5 gestionnaires. Parmi les propriétaires, figurent des
associations syndicales, des syndicats, un particulier, une digue se
trouvant sur le domaine public maritime ; parmi les gestionnaires, se
72
Selon le centre européen de prévention des risques d’inondation, cité plus haut, sur
les 8 600 km de digues en France, plus de 3 000 km sont sans propriétaire identifié.
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ZONES
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COHERENCE
DEFAILLANTE
123
trouvent des associations syndicales, un syndicat de
marais, un syndicat
mixte, un particulier, une commune, une digue étant identifiée comme
n’étant de
« plus entretenue ».
Pour une digue, n’est indiqué ni le
propriétaire ni le gestionnaire.
Par ailleurs, quand il est connu, le
propriétaire est souvent incapable d’entretenir la digue, et, parfois, s’en
suivent des montages complexes, en vue d’un partage des compétences
avec une autre structure et/ou la commune. L’exemple de l’association
des marais de la Faute-sur-Mer, développé plus loin, est significatif.
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PROTECTION DES
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125
2 -
En Charente-Maritime
La direction départementale de l’équipement initie en 2000
l’inventaire et tente d’identifier la domanialité des ouvrages. Elle lance un
projet
de
système
d’information
géographique
(SIG).
Au
total,
224 kilomètres de digues sont recensées, dont 135 km se trouvent sur le
domaine public maritime. S’agissant de la domanialité des ouvrages, le
service précise que
« cette indication, qui s’est appuyée plus sur la
connaissance de terrain que sur une analyse juridique souvent complexe,
doit être considérée comme définissant une présomption ».
Le classement suppose toutefois d’identifier un responsable
d’ouvrage,
qui
reste
très
généralement
inconnu.
En
2009,
un
questionnaire est envoyé à toutes les communes du département, en vue
d’un recensement des digues dans le cadre du décret de décembre 2007.
Aucun arrêté de classement n’est cependant pris avant la catastrophe et
aucune opération de contrôle n’est organisée.
Le conseil général accepte en revanche depuis 1988 de prendre la
maîtrise d’ouvrage de travaux, mais sans prendre la responsabilité
pérenne de digues. Dès 1950, il avait créé l’Union des Marais de
Charente Maritime (UNIMA), afin de mettre à disposition des moyens
techniques et administratifs pour la gestion des marais. Cette initiative,
utile pour les études et la prise de maîtrise d’oeuvre, n’a pas cependant
réglé le problème de la gouvernance. D’autres collectivités sont
intervenues plus ponctuellement sur leur territoire, ou de façon
systématique comme la ville de La Rochelle.
Pour désigner un gestionnaire
73
, la direction départementale de
l’équipement a mis en oeuvre pour les digues du domaine public maritime
une procédure de « titre domanial », avec la conclusion d’une
«convention de gestion conjointe »
. Une telle convention a été signée en
janvier 2008 par l’Etat et la communauté de communes de l’île de Ré. Sur
l’île d’Oléron, une procédure similaire a été appliquée.
Au terme de ces efforts largement dus à l’initiative locale des
services déconcentrés faute de textes clairs relatifs à la détermination de
la responsabilité des ouvrages, une partie des digues est susceptible de
faire
l’objet
d’un
classement :
en
février
2011
74
,
la
direction
départementale des territoires et de la mer, qui a succédé à la direction
départementale de l’équipement, précise que
« le pourcentage de digues
73
Ce qui est indispensable pour entreprendre des travaux dans le cadre de la
déclaration d’intérêt général prévue par l’article L. 211-7 du code de l’environnement.
74
Note du 9 février 2011 intitulée
« Inventaire, classement et contrôle des ouvrages
de protection ».
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126
COUR DES COMPTES
littorales que nous sommes en mesure de classer à brève échéance est de
l’ordre de 5 % de l’ensemble du linéaire que nous devrions classer »
.
En d’autres termes, pour 95 % du linéaire, il n’est pas possible
d’identifier le responsable de l’ouvrage, en particulier pour les digues
situées sur le domaine public maritime, propriété de l’Etat, sur lequel sont
construits les quatre cinquièmes d’entre elles. L’une des possibilités
serait, selon l’interprétation de la jurisprudence par les services de l’Etat,
d’attribuer la responsabilité de la gestion au département, qui intervient
depuis un certain temps pour assurer l’entretien des ouvrages. Le conseil
général n’apparait cependant pas prêt à accepter une telle charge.
***
Dans les deux départements atlantiques, l’Etat entreprend avant la
catastrophe une action de recensement et de classement des ouvrages, qui
se heurte à de très sérieuses limites.
Une grande confusion règne en effet dans l’identification de leurs
responsables. Dans de nombreux cas, le propriétaire de la digue n’est pas
connu et, quand il l’est, se montre souvent incapable d’entretenir
l’ouvrage, faute de moyens et de volonté. Par-delà les propriétaires, les
gestionnaires des digues sont également difficiles à identifier. Enfin, sur
un même linéaire de digues, la multiplicité des intervenants potentiels
crée une confusion rendant difficile, sinon impossible, le bon entretien
des ouvrages.
3 -
Dans le Var
L’article L. 215 du code de l’environnement s’applique aux quatre
cours d’eau concernés (l’Argens, la Nartuby, la Florièye, le Réal), tous
non domaniaux : leur lit appartient aux propriétaires des deux rives, qui
sont tenus à un entretien régulier du cours d’eau. Les collectivités
territoriales et leurs groupements ont la possibilité, mais non l’obligation,
d’intervenir en substitution aux propriétaires riverains, dans le cadre,
après enquête publique, d’une déclaration d’intérêt général (DIG).
Avant la catastrophe, les rivières ne sont pas entretenues par les
riverains. L’intervention des collectivités est prévue sur la Nartuby à
travers le syndicat intercommunal d’aménagement de la Nartuby (SIAN),
qui bénéficie d’une déclaration d’intérêt général par un arrêté préfectoral
de février 2004, prorogé par un autre de novembre 2008. Le conseil
général prend en charge l’Argens jusqu’à la commune des Arcs-sur-
Argens ; puis, le syndicat intercommunal pour l’aménagement du cours
inférieur de l’Argens (SIACIA) a compétence de Puget-sur-Argens
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jusqu’au débouché en mer. Cependant, au moment de la catastrophe,
aucune de ces deux structures ne bénéficie d’autorisations valides pour
intervenir sur les cours d’eau, les précédentes étant devenues caduques.
Pour la Florièye et le Réal, aucune structure n’existe.
B - Le mauvais entretien des digues et des rivières
1 -
Les digues du littoral
a)
En Sud-Vendée
Avant la catastrophe, le financement de l’entretien des ouvrages de
protection en Vendée a été très insuffisant, malgré un effort limité après
la tempête de 1999
.
La « commission de gestion du trait de côte », composée de
représentants des cofinanceurs, a affecté annuellement en Loire-
Atlantique et en Vendée les subventions de l’Etat, de la région et des
conseils généraux de ces deux départements. Le financement a d’abord
été prévu dans le cadre du contrat de plan Etat-région 2000-2006, qui
comportait une contractualisation de la « défense contre la mer ». Ce
dispositif n’a cependant pas été maintenu dans le contrat de projets Etat-
région (CPER) 2007-2013. C’est une convention triennale « relative à la
gestion durable du trait de côte », signée en dehors du contrat de projets
en avril 2008, qui a lié l’Etat, la région et les deux départements pour la
période 2007-2009.
Dans la première période, 2000-2006, le taux de subvention de
l’Etat a été de 50 %, et dans la seconde, 2007-2009, il n’a plus été que de
25 %. Cette évolution reflète la diminution de l’effort de l’Etat, marquée
à partir de 2003 et soulignée par l’évaluation en 2005 de la mise en oeuvre
du volet « défense contre la mer » du contrat Etat-région. Par ailleurs, ce
rapport d’évaluation a relevé l’insuffisante coordination du suivi financier
des opérations entre les financeurs, défaut auquel il ne semble pas qu’il
ait véritablement été remédié depuis.
La commission de gestion du trait de côte a vu régulièrement
s’exprimer deux positions. Les élus demandaient majoritairement des
travaux pour la réalisation de défenses « dures » contre la mer, tandis que
la direction régionale de l’environnement, désormais direction régionale
de l’environnement, de l’aménagement et du logement, plaidait plutôt
pour une « gestion douce du trait de côte ». Toutefois, la commission a
financé des travaux réellement utiles : par exemple, la rénovation de la
digue Jacobsen, à Noirmoutier, qui a résisté à la tempête Xynthia. Il est
vrai aussi que son action a été dépendante de la mobilisation des
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propriétaires et gestionnaires à agir pour entretenir leurs ouvrages, le
dépôt d’une demande constituant un préalable. L’engagement en vue de
la prévention pouvait aussi influencer le taux des subventions de l’Etat :
celui-ci aurait pu être majoré si le plan de prévention du risque inondation
de La Faute-sur-Mer et L’Aiguillon-sur-Mer avait été approuvé.
En définitive, le Sud-Vendée est resté le parent pauvre des
interventions publiques en comparaison avec le marais breton et plus
encore la presqu’île de Noirmoutier. Dans les trois communes du sud-
Vendée, la subvention de l’Etat entre 2001 et 2009 s’est élevée à 1,7 M€
pour un montant d’études et de travaux de 5 M€. La dépense annuelle
moyenne pour ces ouvrages n’a donc été que de 0,54 M€, et même moins,
les crédits n’ayant pas été consommés en totalité. Sur la base d’un besoin
annuel pour l’entretien des digues de 53 000 € à 70 000 € au km
75
et
compte tenu de la longueur des ouvrages dans les trois communes, c’est
un montant moyen annuel de 1,6 M€ à 2,1 M€ qu’il aurait fallu mobiliser,
soit trois à quatre fois plus. En 2010, après la tempête Xynthia, 3,2 M€ de
subventions sont dégagés par l’Etat en moins d’un an pour un montant de
travaux de 4,8 M€.
75
Dans une intervention du directeur du centre européen de prévention des risques
d’inondation (CEPRI), citée dans le rapport sur « la gestion des digues de protection
contre les inondations », dit rapport Doligé, de février 2011, l’entretien courant des
digues est estimé à un coût de 2 500 à 3 500 € par km. Il faut y ajouter les gros
travaux à réaliser sur 3 000 à 4 000 km de digues à conforter en 15 à 20 ans, soit 1 M€
par km sur cette période ; rapporté à l’année, le montant de ces gros travaux
s’établirait donc entre 67 000€ et 50 000 € par km. Sur les digues les plus fragiles,
comme celles du Sud-Vendée, on parviendrait donc à un coût total se situant
approximativement entre 53 000 € et 70 000 € par an. Le directeur du syndicat mixte
du Marais Poitevin, bassins de la Vendée, de la Sèvre et des Autizes (SMMP) estime
de son côté que les travaux sur les digues coûtent actuellement en moyenne, avec
rehausse et compactage, de 50 000€ à 80 000€/an/km. Le coût du confortement de
digues spécifiquement urbaines peut être bien plus élevé encore.
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La digue Est à La Faute-sur-Mer : un exemple de travaux non réalisés
avant la tempête
La protection de La Faute-sur-Mer contre les hautes mers est assurée
par un cordon dunaire face à l’ouest, une courte digue au nord-ouest et
surtout par une longue digue face à l’estuaire du Lay, la digue Est. Or, seul
un tronçon de celle-ci a été rehaussé en 2001 à une hauteur de 5m – 5,50 m,
le reste demeurant à une hauteur variable, allant de 4 à 5 mètres.
Selon le dossier de programmation établi en 2007 par la direction
départementale de l’équipement, la plupart des secteurs de la digue
protégeant des zones d’habitations n’a fait l’objet d’aucune opération de gros
entretien depuis 2003. Lorsque la tempête survient, des travaux, estimés à
1 M€ HT en 2007, viennent de commencer sur deux secteurs. Le
terrassement, notamment, a été fait dans l’un d’entre eux, mais dans l’autre,
l’installation du chantier et le débroussaillage
76
sont seuls réalisés.
Contrairement aux assurances réitérées des acteurs concernés, ces travaux
sont loin d’avoir été terminés avant la tempête Xynthia. Or, la zone habitée
enregistrant la plus grande hauteur d’eau et déplorant le plus de décès
correspond à l’un de ces secteurs (l’Anse de Virly) et son voisinage.
Un
« imbroglio juridique »
Les travaux sont commencés avant la tempête sous maîtrise d’ouvrage
de la commune. Or, à ce moment, la digue appartient toujours à l’association
syndicale des Marais de La Faute-sur-Mer (ASMF), dite des Chauveau,
créée au XIXème siècle pour la protection de terrains agricoles. Celle-ci n’a
pas les moyens de sa mission. En 2006, la cotisation annuelle de chacun des
2 600 propriétaires s’élève à 12 €, soit un produit annuel estimé à 31 200 €
pour des dépenses de 32 000 €. En 2009, les recettes et les dépenses de
fonctionnement sont respectivement de 36 000 € et de 29 000 €.
Selon les indications verbales de son président, un partage tacite de
responsabilités existerait avec l’Association syndicale de la Vallée du Lay
(ASVL), celle-ci se chargeant des gros travaux d’entretien et l’ASMF gardant
seul l’entretien courant de la digue, à savoir le fauchage et la vérification des
clapets. L’ASVL est une association syndicale autorisée, formée des
propriétaires de terrains bâtis et non bâtis de 23 communes, dont L’Aiguillon-
sur-Mer, La Faute-sur-Mer et La Tranche-sur-Mer. Elle « gère », selon des
modalités variées, plus de 22 kilomètres de digues maritimes et 40 kilomètres
de digues fluviales.
76
Le maître d’oeuvre Arcadis établit un certificat de début de travaux le 4 février 2010
pour les deux secteurs. La dernière facture de travaux avant la tempête, datée du
11 février, montre que le terrassement, notamment, a été fait pour un secteur, mais
que, pour l’autre, ne sont réalisés que l’installation du chantier et le débroussaillage.
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L’accord évoqué par le président de l’ASMF ne repose sur aucune
convention, décision ou délibération conjointe. Selon les statuts de l’ASMF
et ceux de l’ASVL, chacune des deux associations syndicales est responsable
de l’entretien de la même digue. De plus, la commune, également sans base
juridique, reverserait à l’ASVL des crédits pour le gros entretien et intervient
comme maître d’ouvrage sur certaines portions de digue. La situation se
caractérise donc par une imprécision juridique et financière, qui n’est
conforme ni aux règles de droit ni à une bonne gestion et qui nuit à l’exercice
d’une véritable responsabilité pour l’entretien dans la durée de l’ouvrage.
L’association syndicale des Marais de La Faute-sur-Mer a certes
élaboré en 2007 une convention tripartite, acceptée par la commune et
l’ASVL, mais ratifiée par aucun des trois partenaires. Les digues devaient
être transférées à l’ASVL et la commune, l’association ayant effectué
auparavant les travaux d’entretien. Par la suite, l’assemblée générale a décidé
en octobre 2009 de dissoudre l’ASMF. L’arrêté préfectoral de dissolution
intervient en avril 2012, deux ans et demi plus tard.
L’engagement de la commune comme maître d’ouvrage avant la
catastrophe tient certes compte de l’impuissance de l’ASMF à faire face à ses
missions et fait suite à des travaux lancés en 2006 par l’ASVL. Toutefois,
cette démarche, qui préjuge du transfert de biens, fait courir un risque
juridique à la commune.
C’est donc la confusion qui prévaut sur la digue, situation que le
commissaire enquêteur, désigné pour l’enquête publique de décembre 2008 et
janvier 2009, relève et
qualifie d’« imbroglio juridique ».
b)
En Charente-Maritime
La situation à la veille de la catastrophe est celle d’un état dégradé
des ouvrages, faute d’entretien et de maîtrise d’ouvrage pour en assumer
la charge. Après un léger effort accompli après la tempête de 1999, dans
le cadre de l’avenant « tempête » au contrat de plan Etat-région, les
financements consacrés aux digues se révèlent très insuffisants par
rapport aux besoins.
De 2000 à 2009, la défense des côtes en Charente-Maritime
bénéficie de 24 M€, avec une part de 40 % de l’Etat et d’un peu plus de
44 % du conseil général. Après Xynthia, en un peu plus d’une année,
29,5 M€ sont engagés pour la phase 1 des travaux d’urgence et la phase 2
des travaux de consolidation, avec une participation de l’Etat et de
l’Europe de plus de 81 %.
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Entre 2000 et 2009, l’Etat consacre au total 8,7 M€ aux travaux de
défense contre la mer. Après Xynthia, l’Etat met en place une dotation de
22,5 M€ et engage 19,5 M€ (avec l’apport de fonds européens), soit
2,2 fois plus en un an qu’au cours des dix années précédentes.
Avant et après 2010 : le cas de la digue de Charron
A Charron, commune de 2259 habitants du Nord du département, les
digues Ouest assurant une protection face à la mer sont des digues rurales,
initialement à vocation agricole. Elles se trouvent en limite de la réserve
naturelle de la baie de l’Aiguillon-sur-Mer. La tempête de 1999 ayant mis en
évidence le caractère défaillant et fragile de cet endiguement en terre, long de
13 km, une réparation d’urgence, d’un coût d’environ 240 000 francs, est
faite
.
En février 2002, le directeur de l’union des marais de la Charente-
Maritime écrit au maire pour l’inviter à déposer un dossier auprès de l’Etat
afin de bénéficier de l’aide prévue dans l’avenant « tempête » pour des
travaux plus substantiels de restauration et de renforcement des digues :
« Or,
écrit le directeur,
malgré le dossier technique …, il est impossible de déposer
une intention de travaux faute de maître d’ouvrage déclaré…Si les solutions
font aujourd’hui défaut, je vous suggère que la commune se
positionne - au
moins provisoirement- en porteur du projet, et tout aussi provisoirement en
confie la maîtrise d’ouvrage déléguée à l’UNIMA…Le temps de l’instruction
du dossier nous laissera le loisir « d’ajuster le tir »….Ainsi, le Syndicat
intercommunal d’aménagement hydraulique du bassin versant du Curé
(SIAH du Curé) pourra, dans l’intervalle, réviser ses statuts».
Le conseil
municipal délibère pour se porter maître d’ouvrage, le temps que soient
réglés les problèmes de statut.
La délibération est complétée en octobre
2002,
l’opération étant alors estimée à un peu moins de 720 000 € (en août
2004, l’UNIMA l’estime à 1 M€ HT).
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Le 29 janvier 2004, le maire écrit au préfet : « Je constate, à ce jour,
que le dossier est toujours dans une impasse, les questions des « qui fait
quoi ? »
et « qui paie quoi ? » étant sans réponse » ; il fait appel au préfet
« pour une intervention en urgence, sous maîtrise d’ouvrage de l’Etat ». La
préfecture organise en septembre une réunion, lors de laquelle sont précisées
les nouvelles compétences dont le syndicat (le SIAH du Curé) doit se doter
pour réaliser les travaux, les procédures administratives à suivre, le montage
financier à définir. En novembre, le dossier est exposé devant le comité de
suivi de la réserve naturelle, qui lui réserve un accueil favorable.
Par ailleurs, se pose la question de la propriété des digues. Trois
associations syndicales autorisées de propriétaires sont « compétentes », dans
l’ambigüité : l’une d’elles a, par exemple, modifié ses statuts en 2009 pour
exclure l’entretien des digues. Un recensement des propriétaires est fait par
un cabinet mandaté à cet effet, puis le maire saisit informellement chacun des
propriétaires d’une demande d’accord de principe pour la cession des
emprises nécessaires au renforcement des ouvrages. Selon son témoignage,
sur environ 200 propriétaires, seuls 5 à 6 auraient répondu.
En octobre 2007, le président du conseil général, saisi par des
habitants, s’inquiète auprès du préfet de l’avancement du dossier. Celui-ci lui
répond qu’aucun dossier permettant la mise en oeuvre des procédures
nécessaires n’a été déposé :
« Il semble, en effet,
indique-t-il,
que le maître
d’ouvrage travaille à préciser certains aspects de ce dossier complexe,
notamment pour … les acquisitions foncières ou la nature et emprises des
travaux prévus sur le DPM
77
dans le périmètre de la réserve naturelle… ».
Le contexte environnemental est en effet sensible et la question des
matériaux nécessaires aux travaux s’avère compliquée : une opposition
s’exprime à leur prélèvement sur le domaine public de la réserve, les
propriétaires, de leur côté, étant hostiles à un prélèvement sur leurs terrains
adjacents aux digues.
Concernant la maîtrise d’ouvrage, le Syndicat du Curé intègre dans
ses statuts la compétence « études » par une délibération de septembre 2005,
mais ne délibère qu’en décembre 2009 pour intégrer la compétence
« travaux ». La majorité des communes adhérentes, qui doivent délibérer
pour donner force juridique à cette délibération syndicale, n’est atteinte que
le 26 février 2010, l’avant-veille de la catastrophe. Contrairement à la
tempête de 1999, celle-ci touche plusieurs parties basses du village.
77
DPM : domaine public maritime.
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Cet exemple montre, par-delà la question du financement, la difficulté
de conduire à bien un tel investissement, sans véritable
responsable de la
digue, qui soit capable de prendre en main la gestion du dossier, de veiller à
l’accomplissement des procédures, de constituer le plan de financement, puis
de réaliser l’opération. Il illustre ce que l’un des interlocuteurs des
rapporteurs a qualifié de « nébuleuse de l’irresponsabilité collective », à
laquelle l’Etat n’a pas su mettre bon ordre.
Aussitôt après la catastrophe, le dossier connait une
« remise à niveau
administrative ».
Le conseil général prend, fin 2010, la maîtrise d’ouvrage
des travaux. A la mi-2011, ceux-ci ont démarré, le syndicat du Curé ayant fait
l’acquisition du foncier et ayant accepté d’en être le gestionnaire. La
première tranche (1,1 M€) est achevée à la fin de l’année 2011 et la seconde
(estimée à 1,8 M€) devrait être réalisée à compter de l’été 2012. L’Etat
intervient à 40 % et le conseil général à 20 % dans le financement des
7 kilomètres de digues concernés. Il s’agit des premiers travaux réalisés dans
le département dans le cadre du « plan submersions rapides ». La commission
mixte inondation, instituée au plan national, a examiné en juillet 2011 le
dossier présenté par le conseil général et émis un avis favorable à une aide,
avec quelques réserves et deux recommandations, visant le budget annuel
réservé à la surveillance et l’entretien des ouvrages, qui parait sous-évalué,
ainsi que l’émergence dans les deux ans d’un projet de programme d'actions
de prévention des inondations dans le secteur de la baie de l’Aiguillon-sur-
Mer.
Sur la digue de retrait, dite digue du Bas Bizet, située au nord de la
commune et qui ne fait pas face à la mer, le département a également accepté
la maîtrise d’ouvrage de travaux, la commune acquérant les terrains
d’emprise (avec une aide du département à hauteur de 80 % du coût) et
l’UNIMA assurant la maîtrise d’oeuvre. Cette opération, évaluée à 0,4 M€,
devrait commencer en juillet 2012.
c)
Le bilan des financements de l’Etat jusqu’en 2010
Si, en
droit, l’entretien des digues relève des gestionnaires et
propriétaires, dont l’Etat fait partie, celui-ci est également intervenu pour
appuyer le financement des opérations par les collectivités locales,
notamment à travers les contrats de plan Etat-région. Cependant, il
n’existe pas avant la catastrophe de synthèse nationale de l’ensemble des
financements consacrés aux ouvrages de protection contre la mer
28 M€ ont été inscrits dans les contrats de plan 2000-2006 au titre
de la prévention des inondations. Dans cette somme, qui concerne à la
fois la prévention face à la mer et aux débordements des cours d’eau, il
est impossible de distinguer les crédits consacrés aux ouvrages.
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Jusqu’en 2010, le financement des opérations de défense contre la
mer est réparti dans le budget de l’Etat sur deux programmes, 113
(urbanisme, paysages, eau et biodiversité) et 181 (prévention des risques)
de la mission « écologie, développement et aménagement durables ». Le
premier, d’un montant de 4 M€ par an en moyenne, est alimenté à travers
le Fonds de concours de l'Agence de financement des infrastructures de
transport de France et concerne principalement entre 2000 et 2009 des
travaux dans le cadre d’une
stratégie de gestion durable du trait de côte.
Le programme 181 comprend une ligne « entretien des digues
domaniales de protection », dont une partie tout à fait minoritaire des
crédits va aux digues littorales, l’essentiel étant consacré aux digues
fluviales. Les financements intervenus de 2007 à 2009 pour l’ensemble
des digues (domaniales et fluviales) montrent des variations sensibles
d’une année sur l’autre : pour les autorisations d’engagement, 19 M€ en
2007, 3 M€ en 2008, 11 M€ en 2009 ; pour les crédits de paiement,
11 M€, 18,5 M€, 14 M€.
Le suivi des crédits consacrés aux ouvrages de protection a été très
insuffisant au plan national avant la tempête Xynthia, avec l’absence de
toute vision globale. Les données disponibles illustrent par ailleurs la
faiblesse et la discontinuité de l’intervention de l’Etat.
2 -
Dans le Var
a)
L’insuffisance des travaux
Le contrat de rivière de la Nartuby, signé en octobre 2007 pour la
période 2006-2010, est approuvé à l’unanimité par le comité syndical du
syndicat intercommunal d’aménagement de la Nartuby (SIAN). Dans son
sous-volet « protection des crues », l’importance du risque est soulignée,
avec la précision que celui-ci est difficile à gérer, des zones urbanisées ou
urbanisables étant situées en zone inondable en raison de l’accélération de
l’urbanisation. Par ailleurs, dans sa partie titrée,
« une rivière souffrant
d’un manque d’entretien
78
»
,
le constat suivant est fait : «
les berges sont
peu, pas ou mal entretenues par les propriétaires riverains. Les accès à
la rivière sont rendus difficiles et … des bois morts perturbent les
écoulements en période de crues ….
»
Créé en mars 2002, le syndicat associe sept communes et prend le
relais du syndicat intercommunal à vocation unique de la Nartuby, avec
pour objet l’aménagement, la restauration, la mise en valeur de la rivière
et de ses affluents, la mise en oeuvre et le suivi du contrat.
78
Contrat de rivière, chapitre III.4, p. 50.
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Le contrat prévoit pour la protection contre les crues des dépenses
à hauteur de 4,4 M€ entre 2006 et 2010, dont 2,1 M€ issus du budget du
syndicat, 2,3 M€ venant de subventions de la région et du département.
Nulle aide de l’Etat n’est inscrite. Par ailleurs, s’il fait effectuer une étude
sur la participation financière des riverains, le syndicat ne parvient pas à
la mettre en oeuvre.
Très peu des actions envisagées sont concrétisées. Avant la
catastrophe, le syndicat effectue des travaux de restauration et d’entretien
du lit et des berges, mais aucun des travaux de reprofilage des cours d’eau
prévus. Les investissements de grande ampleur ne sont pas entrepris.
En 2009, selon son compte administratif, le syndicat a dépensé un
peu plus de 165 000 € en fonctionnement et moins de 60 000 € en
investissement. En 2010, les dépenses d’investissement se sont élevées à
environ
361 700 €.
Un
rapport d’expertise, postérieur aux inondations, relève en outre
plusieurs anomalies de conception ou de réalisation des aménagements et
des ouvrages dans le lit de la Nartuby et considère que certaines seraient à
l’origine des dégâts constatés ou les auraient fortement aggravés. Quant à
la préfecture, elle souligne que le manque de gestion au quotidien des
rivières s’est traduit par une production d’embâcles importante et des
débordements aux conséquences catastrophiques.
Les dépenses d’investissement inscrites au budget du syndicat pour
2011, année suivant la catastrophe, s’élèvent à moins de 243 500 €, soit
un montant très éloigné des enjeux
.
En effet, le chiffrage des travaux de
remise en état, selon l’estimation même du syndicat, se monterait à
8,2 M€ HT pour le bassin versant de la Nartuby.
Des désaccords,
nuisibles à son action, sont de surcroît apparus avec certaines des
communes
membres.
Ainsi,
la
ville
de
Draguignan,
principale
contributrice à ses dépenses, a considéré que les actions engagées
jusqu’alors lui ont bénéficié insuffisamment et s’est interrogée sur sa
participation.
L’action publique jusqu’à aujourd’hui a été incapable de répondre
aux exigences de la prévention des inondations de la rivière Nartuby.
b)
Les remblais
De nombreux remblais existent en zone inondable, notamment
dans la basse vallée de l’Argens, secteur soumis à un risque fort
d’inondation. Leur réalisation résulte de la volonté de certains
propriétaires
riverains
de
se
protéger
d’une
inondation
par
l’exhaussement de leurs parcelles ou de se débarrasser de matériaux de
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chantier. Or, les remblais réduisent le volume des champs d’expansion
des crues, modifient les conditions d’écoulement des eaux lors de celles-
ci et déplacent les zones submersibles.
Leur réalisation s’effectue généralement en dehors des règles
fixées par la loi sur l’eau, qui supposent une autorisation ou du moins une
déclaration. Des procès-verbaux sont dressés par les services de l’Etat
dans le cadre de la « coordination des polices de l’environnement », sous
l’autorité du procureur de la République. Entre 2007 et juin 2010, selon
les précisions fournies par la direction départementales des territoires et
de la mer, 33 procès-verbaux ont été dressés, à l'encontre des actes
répréhensibles au titre de la législation sur l'eau, près des deux tiers
concernant la basse vallée de l’Argens. Après juin 2010, l’établissement
de 15 procès-verbaux en moins d’une année a témoigné d’une vigilance
plus grande des services.
Toutefois, la suite judiciaire donnée à ces procès-verbaux
n’apparait pas à la hauteur des enjeux et ne permet pas de faire régresser
significativement le phénomène.
C - L’action conduite depuis les catastrophes
S’agissant des ouvrages et des travaux de protection, l’action
s’inscrit notamment dans le cadre plus global du plan de submersion
rapide (PSR).
1 -
Les travaux sur les digues
Depuis la tempête Xynthia, les travaux entrepris sous l’impulsion
de l’Etat pour les ouvrages de protection contre la mer sont sans
commune mesure sur le plan financier avec ce qui s’est fait
précédemment. Ils ont sollicité, outre les programmes 113 et 181, le
programme 122 relevant du ministère de l’intérieur. Pour les trois
départements concernés (Charente-Maritime, Vendée, Gironde), ils sont
composés des travaux d’urgence, de phase 1 (10,2 M€), entièrement
payés par l’Etat, afin de faire face aux grandes marées de fin mars 2010,
et des travaux de remise à niveau et de confortement, de phase 2, réalisés
en vue des marées d’équinoxe d’automne et cofinancés (12,9 M€ de
crédits ouverts en 2010-2011, 7,2 M€ de dépenses effectivement payées).
Au total, les autorisations d’engagements et les crédits de paiement mis
en place en 2010-2011 par l’Etat pour les ouvrages de protection contre la
mer s’élèvent respectivement à 27,9 M€ et 27,7 M€.
Ces chiffres comprennent, outre les phases 1 et 2, des travaux de
pérennisation des ouvrages, prévus dans le cadre du plan submersions
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ZONES
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UNE
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DEFAILLANTE
137
rapides, parfois appelé «
plan digues » et rendu public en février 2011.
En 2010 et 2011, deux projets ont été labellisés à ce dernier titre pour une
subvention de l’Etat de 4,2 M€ (total de travaux 21,6 M€).
Dans les années à venir, le plan submersions rapides prévoit un
effort financier substantiellement augmenté, d’un total de 500 M€ de
2011 à 2016. Cette montée en puissance n’est toutefois qu’une prévision
et devra être confirmée dans les faits. Il n’est pas acquis qu’elle soit
compatible avec l’équilibre financier du fonds de prévention des risques
naturels majeurs, sauf à y consacrer l’essentiel de ses ressources au
détriment des autres actions.
2 -
Le projet de décret « digues »
La loi portant engagement national pour l’environnement du
12 juillet 2010 introduit dans le code de l’environnement un nouvel
article L. 562-8-1
79
relatif aux ouvrages de protection. Le projet de décret,
dit décret « digues », prévu par ce texte est en cours de préparation et vise
principalement à définir la notion même d’ouvrage de protection -en
l’inscrivant dans une notion globale de système de protection associé à
une zone clairement définie par le gestionnaire-, à préciser les conditions
dans lesquelles ce gestionnaire fixe l’objectif de protection du système
avec le niveau de sûreté requis
et à expliciter le processus destiné à
accompagner et faciliter la constitution de tels gestionnaires lorsqu’il n’en
existe pas ou lorsqu’il y a une multiplicité d’intervenants.
Plusieurs textes accompagneront le décret, dont un arrêté technique
« digues », basé sur un référentiel élaboré par un groupe de travail et
représentant l’état de l’art au plan international de la conception et de la
construction des systèmes de protection. Cet arrêté définira les principes
techniques essentiels de la conception, la construction, l’entretien et la
surveillance des digues.
La réflexion engagée sur ces normes techniques apparait tardive et
mérite d’aboutir sans tarder, en particulier pour garantir la prise en
compte du reflux de l’eau en cas de submersion d’une digue et améliorer
l’efficacité et la sûreté des ouvrages.
79
Art. L. 562-8-1 du code de l’environnement : « Les ouvrages construits en vue de
prévenir les inondations et les submersions doivent satisfaire à des règles aptes à en
assurer l'efficacité et la sûreté…
Un décret en Conseil d'Etat fixe les obligations de conception, d'entretien et
d'exploitation auxquelles doivent répondre les ouvrages en fonction des enjeux
concernés et des objectifs de protection visés. Il précise également le délai maximal
au-delà duquel les ouvrages existants doivent être rendus conformes à ces obligations
ou, à défaut, doivent être neutralisés. »
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COUR DES COMPTES
3 -
Les programmes d’actions de prévention des inondations
(PAPI) pour le littoral
Dans le « plan submersions rapides » (PSR), il a été demandé aux
préfets d’identifier une liste de zones endiguées à risque important
prioritaires et de rechercher des maîtres d’ouvrage. Ce plan a encouragé
la mise en place de programmes d’actions de prévention des inondations
(PAPI) portés par « un maître d’ouvrage public ensemblier » et pour
lesquels un appel à projet a été lancé.
Dans la circulaire du 17 février 2011 du ministre chargé de
l’urbanisme, qui a accompagné la transmission aux préfets du plan, le
directeur général de la prévention des risques a précisé, s’agissant du
financement des ouvrages de protection :
«…vous noterez d’une part, les
distinctions entre renforcement à niveau de protection constant et
augmentation du niveau de protection (qui sera financée dans le cadre de
PAPI), d’autre part le souhait de les intégrer le plus possible dans des
projets globaux de prévention des risques, bâtis sur un bassin de risque
cohérent ».
Les services de l’Etat dans les deux départements atlantiques ont
entrepris, sous l’autorité des préfets, de décliner ces directives nationales.
La DDTM de la Charente-Maritime a poursuivi l’inventaire des
ouvrages, tout en continuant à se heurter à la question de leur
responsabilité. Elle a proposé au préfet dès mars 2011 une stratégie
conforme aux directives, avec la définition de neuf
« bassins de risques
cohérents ».
Dans sa note, elle a souligné que
« le point majeur pour
satisfaire à l’objectif de mise en sécurité des systèmes d’endiguements…
reste l’identification de gestionnaires assumant les responsabilités du
maître de l’ouvrage : entretien & surveillance ».
Elle a analysé la
situation en matière de gouvernance bassin par bassin : en dehors des îles
de Ré et d’Oléron, ainsi que, dans une moindre mesure, du secteur de La
Rochelle, pratiquement tout restait à organiser.
Plusieurs réunions du préfet avec les élus des communes les plus
sensibles ont été programmées, afin de définir des principes de protection,
puis de les conduire à identifier une structure gestionnaire pérenne pour
assurer la surveillance et l’entretien du système d’endiguement, à clarifier
le montage financier, enfin à préciser un calendrier opérationnel. En mars
2012, sur les neuf bassins à risques, des lettres d’intention pour
l’établissement d’un programme d’actions de prévention des inondations
(PAPI) ont été signées par les partenaires dans six d’entre eux et des
programmes d’intention ont été déposés dans deux des bassins. Un
syndicat intercommunal vient notamment d’être créé pour la mise en
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139
oeuvre du programme des communes de Chatelaillon, Yves, île d’Aix et
Fouras.
En Vendée, deux programmes d’intention ont été labellisés (pour
l’île de Noirmoutier et le bassin du Lay), et un troisième devrait l’être au
printemps 2012. Par ailleurs, la nouvelle convention de partenariat pour la
période 2012-2016, entre l’Etat, le conseil régional des Pays de la Loire et
les départements de Loire-Atlantique et de Vendée, ne porte pas
seulement sur la gestion du trait de côte, mais aussi sur les risques de
submersion marine, et précise les clés de financement pour l’aide aux
projets.
Dans une circulaire du 5 juillet 2011 aux préfets, le
ministère
(direction générale de la prévention des risques) précise, pour la politique
de gestion des risques inondations, la gouvernance nationale, qui
est confiée à une commission mixte inondation, issue du conseil
d’orientation pour la prévention des risques naturels majeurs et du comité
national de l’eau. En 2011
,
cette commission a labellisé 14 projets de
programme d’actions de prévention des inondations et 2 projets au titre
du plan submersions rapides (PSR), ce qui témoigne d'une certaine
dynamique.
Dans les deux départements de la côte atlantique, les préfets se
sont engagés activement, avec les
collectivités locales, dans l’élaboration
de programme d’actions de prévention des inondations. Toutefois, si elle
se veut rigoureuse dans l’élaboration de la réponse au risque, pour éviter
les solutions inadaptées, et si elle vise à identifier les gestionnaires des
digues, cette démarche prend du temps, alors que les attentes de mesures
de protection efficaces sont fortes dans les localités exposées. Il s’agit
d’une difficulté que les autorités de l’Etat doivent considérer et gérer avec
leurs partenaires, en évitant de se laisser aller à des actions de protection
qui ne seraient qu’un encouragement à poursuivre une urbanisation
dangereuse.
4 -
Dans le Var, des intentions de coordination à concrétiser
Au lendemain de la catastrophe, le préfet souhaite l’élaboration
d’une stratégie globale. Le président du conseil général accepte en juillet
2011 de piloter un programme d'actions de prévention des inondations
(PAPI) sur le bassin versant de l’Argens et s’engage, dans le cadre de
l'appel à projet national, à déposer un programme d’intention,
ce qui
pourrait se faire avant l'été 2012. C’est ensuite un syndicat mixte, à créer,
qui devrait arrêter le programme d’actions.
Enfin, les travaux prévus par
le programme d’actions de prévention des inondations seraient portés par
chaque maître d’ouvrage selon ses compétences.
Le préfet et le président
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140
COUR DES COMPTES
du conseil général ont saisi par un courrier cosigné les 72 collectivités
territoriales et six intercommunalités concernées en leur demandant de
délibérer pour adhérer au PAPI ; 25 délibérations d’adhésion ont été
reçues par la préfecture à la mi-mars 2012.
La procédure du programme d’actions de prévention des
inondations est cohérente, mais lourde et complexe et exige donc des
délais de plusieurs années avant son aboutissement, alors que d’autres
crues sont susceptibles de se produire d’ici là, comme en novembre 2011.
Des travaux urgents restent nécessaires. Un plan d’urgence a ainsi
été décidé pour la Nartuby, d’un montant prévisionnel total de 15,5 M€,
dans l’exécution duquel le SIAN interviendra. Des solutions devront être
trouvées pour que les opérations d’urgence à réaliser ne soient pas en
discordance avec la perspective globale du futur programme d’actions de
prévention des inondations. Par ailleurs, une procédure d’aménagement
foncier a été lancée dans la basse vallée de l’Argens avec pour objectif
d’en maintenir durablement la vocation agricole.
***
Dans le Var, depuis les inondations de 2010, une volonté nouvelle
s’exprime pour la gestion des rivières autour de la réalisation d’un
programme d’actions de prévention des inondations. Cette démarche,
positive, exigera cependant du temps et des solutions transitoires devront
être trouvées d’ici son aboutissement. Il conviendra également que cette
démarche inclue la lutte contre les remblais sauvages, pour laquelle des
mesures plus fermes doivent être prises sans délai.
Une réflexion
mérite, par ailleurs, d’être initiée par le
gouvernement au sujet des textes régissant les rivières non domaniales,
afin d’identifier l’autorité capable d’assurer la responsabilité de
l’entretien.
D - La question non réglée de la gouvernance des digues
1 -
Les difficultés financières
de certains maîtres d’ouvrage
Certains organismes en charge de la maîtrise d’ouvrage de travaux
sur les digues et les rivières se sont heurtés à des difficultés, qui ont mis
en relief leur fragilité financière.
En Vendée, la deuxième phase des travaux d’urgence après
Xynthia (2,3 M€ hors maîtrise d’oeuvre) a pesé sur la trésorerie de
l’association syndicale de la Vallée du Lay (ASVL), en raison du
décalage entre le paiement des travaux (en 2010) et le versement des
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UNE
COHERENCE
DEFAILLANTE
141
subventions de l’Etat. La réfection de la digue Est sur le Lay (0,4 M€),
confiée à l’association, a par ailleurs été payée par la commune de La
Faute-sur-Mer sans qu’une convention ne formalise ce dispositif.
Pour le syndicat mixte du Marais Poitevin, bassins de la Vendée,
de la Sèvre et des Autizes, les travaux de remise en état (3,6 M€ fin 2011)
représentent deux à trois fois son budget annuel (de 1,2 à 1,7 M€). Malgré
des subventions qui couvrent en principe la totalité des financements,
quelques dépenses restent à la charge du syndicat (les charges salariales,
l’écart entre la charge de TVA et le remboursement du fonds de
compensation pour la TVA (FCTVA), les coûts de trésorerie). Le
syndicat a dû ouvrir deux lignes de trésorerie en octobre et décembre
2010, utilisées à hauteur de 1,5 M€.
Dans le Var, le syndicat intercommunal d’aménagement de la
Nartuby (SIAN) dispose d’un budget très limité, consacré pour l’essentiel
à son fonctionnement, comme cela a été vu précédemment. Pour qu’il
puisse entreprendre les importants travaux à réaliser prochainement, un
nouveau schéma de financement stable et cohérent sera à définir,
l’intervention de l’Etat à hauteur de près d’un quart du coût et l’emprunt
qui a été contracté pour 3 M€ ne suffisant pas à régler le problème de sa
capacité financière, dans l’attente de la décision d’autres partenaires
(région, département, agence de l’eau).
2 -
La responsabilité de la gestion des digues
Dans leur retour d’expérience
80
, les inspections générales ont
examiné
la question de la gouvernance
et envisagé
« trois scénarios pour
répondre au défi de la gestion des ouvrages de protection »
: le statu quo
« aménagé » ; le transfert de compétences aux collectivités territoriales,
intercommunalités ou départements ; la création d’un établissement
national gestionnaire. La « synthèse de la concertation »
faite autour du
projet de plan submersions rapides, souligne bien, au sujet de
l’organisation de la maîtrise d’ouvrage des digues, que
« l’ensemble des
parties prenantes… s’accordent à dire que c’est le point le plus essentiel
pour l’application de ce plan » (p. 10).
Sur le territoire, des initiatives sont apparues : ainsi, en Vendée, le
« Syndicat mixte du marais poitevin, bassins de la Vendée, de la Sèvre et
des Autizes - Vendée Sèvres Autizes » (SMMP-VSA), regroupant, depuis
2004, 35 communes et le conseil général, a pris la propriété des digues,
80
« Tempête Xynthia : retour d’expérience, évaluation et propositions d’action »,
conseil général de l’environnement et du développement durable, inspection générale
des finances, inspection générale de l’administration –
mai 2010 – p. 57 et suivantes.
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142
COUR DES COMPTES
ainsi que d’une bande de terrain de 100 mètres cédée par les associations
syndicales. L’objectif du syndicat est d’identifier un seul propriétaire afin
de s’assurer de l’entretien à venir, seul gage de la pérennité des
investissements. Cette initiative reste cependant isolée.
Le plan submersions rapides repose sur l’action des préfets pour
identifier une autorité responsable, en
incitant les acteurs locaux à devenir
gestionnaire de digues dont ils ne seraient pas propriétaires. Ce système,
ainsi que le souligne le ministère de l’intérieur,
«offre une souplesse
d’action pour répondre de façon pragmatique aux situations locales très
disparates ».
Il n’est pas certain toutefois que les financements envisagés
dans le cadre du plan suffisent à convaincre les collectivités concernées
d’assumer une responsabilité, qui se révélera lourde dans le futur. A
défaut, il est à craindre que l’Etat, face à certains travaux d’une urgence
évidente, ne doive faire preuve de souplesse pour ne pas retarder leur
engagement, même si un gestionnaire pérenne ne se dégage pas à leur
issue.
Un bilan devra être dressé dans un délai raisonnable de l’action des
préfets, pour qu’il en soit tenu compte dans les décisions, sans doute de
nature législative, qui seront nécessaires pour régler la question de la
gouvernance. Nombre d’acteurs de terrain ne manquent pas de rappeler la
vétusté du dispositif légal actuel, qui est toujours régi par les dispositions
de la loi du 16 septembre 1807 relative
« au dessèchement des marais »
.
Il est peu probable, en effet, que la loi de 1807, en demandant à
chaque riverain de se protéger contre les inondations, corresponde au
contexte d’aujourd’hui. La préoccupation principale tenait alors à la mise
en valeur de terrains agricoles, dans une approche d’initiative
individuelle, la protection des agglomérations contre les inondations
n’étant pas exclue, mais ne constituant qu’une préoccupation de second
rang. Avec le développement de l’urbanisation, le besoin de cette
protection s’est affirmé, rendant nécessaire une approche globale
intégrant des systèmes complexes de gestion des eaux (ruissellement,
évacuation des venues d’eau parasites, voire de surverse, stockages
temporaires). La logique n’est plus celle d’une protection individuelle de
biens matériels, mais devient celle d’un véritable service public à
l’échelle locale ou intercommunale. La proposition de loi
Doligé,
déposée
au Sénat en août 2011, a ainsi envisagé la création d’un « service public
de gestion des eaux pluviales et de prévention des inondations ».
***
La question fondamentale de la gouvernance des ouvrages reste à
régler. L’Etat, à ce stade, s’en remet aux préfets, pour faire émerger une
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143
gestion responsable et durable des digues. Un bilan de leur action devra
être dressé dans un délai raisonnable pour vérifier les résultats de cette
démarche et en tenir compte dans les décisions, probablement de nature
législative, qui devront intervenir à l’échelon national.
IV
-
Le rôle incitatif du régime d’assurance des
catastrophes naturelles
Il est nécessaire que le régime des catastrophes naturelles contribue
autant que possible à encourager les dispositifs et les comportements
responsables.
La Cour des comptes, notamment dans une insertion au rapport
public de 2009
81
, a déjà fait des observations en ce sens. Après Xynthia,
le Président de la République, dans son discours de mars 2010 à la
Roche-sur-Yon, a demandé une réforme du régime.
Les inconvénients du système actuel sont connus : l’imprécision du
cadre juridique (par exemple, la notion d’intensité anormale), l’uniformité
de primes additionnelles, qui ne jouent aucun rôle incitateur, la mise en
jeu de la garantie pour des biens construits en violation des règles
administratives de prévention ou de construction, et enfin la solidité
financière du régime à terme, face à l’augmentation de la fréquence et du
coût des catastrophes naturelles.
S’agissant de l’incitation à la prévention et à la protection, le seul
mécanisme existant est l’application d'une franchise majorée dans les
communes non dotées d’un plan de prévention du risque inondation, ou
avec un plan de prévention du risque inondation prescrit depuis plus de
quatre ans mais toujours pas approuvé, et déjà déclarées plus de deux fois
en état de catastrophe naturelle en moins de 5 ans. Il pénalise des
sinistrés, mais a un effet préventif discutable, puisqu’il fait peser sur des
particuliers une responsabilité qui n’est pas la leur.
Un projet de loi a été adopté par le conseil des ministres le
3 avril 2012, prévoyant notamment la modulation de la prime catastrophe
naturelle pour les entreprises et les collectivités locales en fonction du
risque encouru, ce qui va dans le sens des recommandations de la Cour.
Deux autres points mériteraient d’être traités dans un texte législatif :
-
la portée de la garantie, pour qu’elle ne puisse plus jouer pour
les biens construits sans base règlementaire ;
81
Rapport public annuel 2009, tome I, pages 645 et suivantes, « l’Etat face à la
gestion des risques naturels : feux de forêt et inondations ».
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144
COUR DES COMPTES
-
l’externalisation du prélèvement sur les primes du régime des
catastrophes naturelles au profit du fonds de prévention des
risques naturels majeurs (prélèvement direct sur les primes
d’assurance), ce qui permettrait de rendre plus transparent pour
les assurés et plus incitatif le financement de la politique de
prévention.
__________
CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
________
La présence de bâti en zone de grave danger pose un problème
spécifique qui mérite une approche globale. L’adaptation ou le
déménagement de certains équipements de service public s’impose. Les
incohérences dans la démarche d’acquisition amiable de biens
immobiliers ont été grandes et ont empêché une gestion efficace de
l’argent public. De très graves défaillances subsistent dans la
gouvernance et l’entretien des ouvrages de protection et des cours d’eau
non domaniaux.
C’est pourquoi la Cour et les chambres régionales des comptes
formulent les recommandations suivantes :
Pour les collectivités territoriales et l’Etat :
3.1 déplacer, ou, si c’est possible, adapter à la situation les
caractéristiques des bâtiments de service public en zone inondable ;
3.2 veiller à la stricte application de la règlementation des
campings ;
Pour l’Etat :
3.3 identifier précisément les zones dangereuses sur l’ensemble du
littoral et les traiter dans des délais rapides ;
3.4 faire contribuer les collectivités locales au rachat de biens
immobiliers dans des situations d’extrême danger ;
3.5 engager, après établissement du bilan de l’action des préfets
en matière de gouvernance des digues et des rivières, les modifications
législatives nécessaires. Veiller à la mise en place des financements et à
la continuité de l’effort ;
3.6 faire déboucher la réforme du régime des catastrophes
naturelles dans les meilleurs délais, en particulier pour la modulation des
primes pour les entreprises et l’exclusion des biens construits sans base
règlementaire.
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Chapitre V
Les indemnisations : très complètes
mais avec des incohérences
Le système d’indemnisation, très complet et d’un coût élevé, pose
de nombreux problèmes de gestion et souffre d’incohérences.
I
-
Les indemnités des assurances
Les arrêtés de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle
sont intervenus très rapidement. Pour les inondations Xynthia, le premier
a été pris le 1
er
mars 2010, dans les deux jours suivant la tempête, puis a
été complété par des arrêtés des 11 mars, 30 mars et 10 mai. Toutes les
communes de quatre départements (Vendée, Charente-Maritime, les
Deux-Sèvres et la Vienne) ont été reconnues en état de catastrophe
naturelle et, au total, 1 555 dans 12 départements l’ont été. Xynthia se
place au troisième rang au cours de la dernière décennie pour le nombre
de reconnaissances au titre des inondations et chocs mécaniques dus à
l’action des vagues (submersion marine). Pour les inondations du Var, 44
communes ont été reconnues en état de catastrophe naturelle par arrêté du
21 juin 2010.
Pour les deux catastrophes, l’Etat a mis en place un
médiateur pour les indemnisations des compagnies d’assurance.
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146
COUR DES COMPTES
1 -
Les délais d’indemnisation
Dans
le
régime
des
catastrophes
naturelles,
l’assureur
a
l’obligation de verser l’indemnité dans un délai de trois mois à compter
de la date de remise par l’assuré de l’état estimatif des biens endommagés
ou de la date de publication de l’arrêté si elle est postérieure à la
précédente.
L’article 125-2 du code des assurances (loi du 30 juillet 2003)
prévoit en outre qu’une provision sur les indemnités doit être versée dans
les deux mois qui suivent la date de remise de l'état estimatif des biens
endommagés ou des pertes subies, ou la date de publication, lorsque
celle-ci est postérieure, de la décision administrative constatant l'état de
catastrophe naturelle.
Les assureurs ont utilisé les moyens classiques pour accélérer les
procédures grâce notamment à la mobilisation d’experts venus de toute la
France et à des évaluations à dire d'expert et non sur devis.
S’agissant du règlement, selon les statistiques au 31 décembre
2010, soit dix mois après la tempête, sur un échantillon représentant
environ 85 % des sinistrés, 75 % des dossiers Xynthia étaient totalement
ou partiellement réglés. Ceci ne représente cependant que 49 % des
montants. 86 % des dossiers pour les automobiles étaient réglés (87 % des
montants), 74 % pour les habitations
(39 % des montants) et 73 % pour
les entreprises (61 % des montants).
Pour les dossiers d’entreprises, le pourcentage de montant soldé
dix mois après est équivalent dans l’ensemble des départements touchés
par la tempête (61 %) et les deux où prédominent des indemnisations
catastrophes narurelles liées aux inondations (Vendée 63 %, Charente-
Maritime 57 %). Pour les particuliers, le taux de 39 % masque en
revanche une très importante disparité entre les montants indemnisés dans
les deux départements de Charente-Maritime (70 %) et de Vendée (69 %)
et ceux dans l’ensemble des départements touchés par la tempête.
Ces constats montrent que les assureurs se sont fortement
mobilisés pour indemniser les particuliers, mais n’ont fait que peu
d’efforts spécifiques pour les entreprises en matière de délais. Cette
situation est paradoxale, alors que l’Etat a mis par ailleurs en place des
aides pour permettre aux entreprises de surmonter cette phase difficile.
2 -
La répartition des indemnisations
La tempête Xynthia a représenté pour l’ensemble des assureurs
(FFSA et GEMA) environ 425 000 sinistres, pour l’essentiel des
dommages
aux
particuliers
(76,8 %
aux
habitations,
7,1 %
aux
automobiles), les entreprises et les collectivités en représentant 16,1 %.
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LES
INDEMNISATIONS :
TRES
COMPLETES
MAIS
AVEC
DES
INCOHERENCES
147
L’essentiel des déclarations (391 770) correspond à des dommages dus au
vent, pris en charge directement par les assureurs. Le nombre de
déclarations relatives aux inondations, qui relèvent du régime des
catastrophes
naturelles,
n’est
que
de
32 243.
Chaque
dossier
d’inondations a en revanche un impact financier beaucoup plus important
qu’un dossier tempête (coût moyen du sinistre 20 909 € contre 1 665 €).
Les indemnisations pour le risque inondation se répartissent entre
les particuliers (habitations 408,8 M€ soit 60,6 %, automobiles 56,5 M€,
soit 8,4 %) et les entreprises et les collectivités (208,9 M€, soit 31 %).
Pour l’activité agricole, les indemnités des assurances, qui viennent
s’ajouter aux aides répertoriées infra, se sont élevées à 11,2 M€ dans le
cadre du régime des catastrophes naturelles (véhicules, bâtiments et leur
contenu), pour un total de 74,1 M€ en ajoutant l’indemnisation des
dommages dus au vent).
Pour les inondations du Var, les indemnisations se répartissent
entre les particuliers (habitations 37,9 %, automobiles 13,9 %) et les
entreprises et les collectivités (48,2 %). Le coût total des indemnisations
du Var est ainsi légèrement inférieur à celui des inondations de Xynthia,
de même que le coût moyen du sinistre (16 788 € contre 20 909 €). Mais
le coût des indemnisations pour les entreprises et les collectivités est en
revanche supérieur (266,3 M€ contre
208,9 M€).
II
-
Les dons, l’aide et l’indemnisation des
particuliers
A - Les dons reçus
Le total des dons reçus s’élève pour Xynthia à 5,65 M€ (3,7 M€
par les associations caritatives
82
, 1,95 M€ par les collectivités publiques)
et pour le Var à 1,14 M€ (pour l’essentiel par les collectivités publiques).
Compte tenu de la déduction fiscale de 66 %
83
, ces dons représentent un
coût pour l’Etat de 4,4 M€.
S’agissant de l’Etat, les dons ont été enregistrés par les directions
départementales des finances publiques et imputés sur le fonds de
82
Selon les comptes-rendus publiés par les organismes principalement concernés,
notamment la Croix-Rouge, le Secours Catholique, la Fondation de France, et le
Secours populaire français.
83
Prévue aux articles 200 et 238 bis du code général des impôts.
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concours « contributions diverses à l'aide d'urgence aux victimes de
calamités publiques » géré par le ministère de l’intérieur.
Pour les collectivités locales, les modalités d’imputation et
d’utilisation des dons sont moins précises. Une partie n’a pas été reversée
directement aux sinistrés, mais a financé les dépenses de secours ou des
travaux de remise en état. A Fouras, sur les 30 430 € de dons, 10 000 €
ont été réaffectés au budget 2011 de la commune pour la réalisation
d’infrastructures concourant à une meilleure protection de la population,
et une autre partie a été consacrée à l’acquisition de matériels de sécurité
et de secours, tels des défibrillateurs et un panneau d’alerte pour la
population . Dans la communauté d’agglomération de Draguignan, les
dons ont été imputés au compte 7 713 « libéralités reçues » sans
affectation spéciale et il a été ensuite considéré qu’ils avaient participé au
financement
des
travaux
de
déblaiement
et
d’enlèvement
des
encombrants sur la voie publique pour l’ensemble du territoire
communautaire.
B - L’aide directe aux victimes
1 -
Les montants concernés
En Vendée, l’Etat a versé 0,48 M€ aux victimes en secours
d’urgence. La région et le département ont aidé les familles et les
communes sinistrées à hauteur respectivement de 0,24 M€ et 0,41 M€. En
Charente-Maritime, l’Etat, la région et le département ont respectivement
versé 0,45 M€, 1,29 M€ et 0,38 M€. Dans le Var, l’Etat a dépensé
0,81 M€ pour l’aide d’urgence aux particuliers, la région 0,56 M€ et le
département 0,23 M€. A ces montants s’ajoutent les aides fournies par les
communes. Dans plusieurs d’entre elles, les budgets du centre communal
d’action sociale (CCAS) ont été fortement majorés.
2 -
Les aides versées par l’Etat
En Vendée, une commission a examiné chaque demande et fait une
proposition d’attribution au préfet, avec certains critères en particulier de
ressources. En Charente-Maritime, les aides ont été attribuées aux
ménages sur proposition des centres communaux d’action sociale et après
vérification de leur présence sur la liste des sinistrés validée par la mairie,
mais sans condition de ressources. Les différences constatées dans les
modalités des aides versées aux victimes par l’Etat sont surprenantes et a
priori non justifiées.
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3 -
Les aides des collectivités locales
a)
Les différences de méthode
Les modalités des aides directes aux victimes et la rapidité de leur
versement ont été très différentes, par exemple entre les deux communes
de La Faute-sur-Mer et de L’Aiguillon-sur-Mer, pourtant toutes proches
et touchées de façon similaire par la tempête.
A La Faute-sur-Mer, les trois catégories de sinistrés, servant à fixer
les points de base, ont été définies par référence au niveau d’eau dans les
pièces de vie : catégorie 1 (pas d’eau),
catégorie 2 (moins d’un mètre),
catégorie 3 (plus d’un mètre). A L’Aiguillon-sur-Mer, les dons ont été
versés par foyer selon le quotient familial et le nombre de personnes le
composant. Dans les deux communes, un forfait a été ajouté suivant le
nombre d’enfants à charge et la présence de personnes handicapées.
A La Faute-sur-Mer, la faible mobilisation du centre communal
d’action sociale et le grand nombre de critères retenus ont occasionné une
attente de l’ordre de trois mois avant des versements communaux de
625 € par bénéficiaire en moyenne (hors aide au relogement et hors centre
communal d’action sociale). Les versements individuels varient de 300 €
à 4 000 €. A L’Aiguillon-sur-Mer, la procédure a été plus pragmatique et
plus rapide, mais pour des secours locaux de 240 € par personne en
moyenne en 2010. Les versements individuels varient de 150 € à 650 €
pour 417 dossiers. En 2011, le centre communal d’action sociale a
apporté quelques aides nouvelles aux victimes pour lesquelles l’aide du
fonds d’aide au relogement d’urgence (FARU) avait expiré et pour les
foyers disposant d’un quotient familial faible, soit au total 55 000 €
Certaines personnes n’ont apparemment pas sollicité ces aides,
notamment des propriétaires de résidences secondaires. D’autres, habitant
La Faute-sur-Mer, ont, dès le sinistre, afflué dans la commune voisine de
L’Aiguillon-sur-Mer, où un centre de secours d’urgence avait ouvert en
mairie.
Si les différences de méthode pour redistribuer les dons ne sont pas
anormales, elles ont l’inconvénient de susciter des incompréhensions
voire des sentiments d’injustice. Il serait utile que l’Etat élabore un guide
qui serait porté à la connaissance des collectivités et recommanderait des
règles à suivre pour les aides directes aux sinistrés de telles catastrophes.
b)
Les problèmes de gestion
La gestion des dons n’a pas été homogène, et a parfois soulevé des
difficultés d’inégale importance. Dans aucun des départements, une règle
de non cumul n’a été mise en place.
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En Charente-Maritime, les aides régionales ont transité par les
centres communaux d’action sociale, alors que le département a appliqué
ses propres critères Dans quelques cas, comme à Fouras pour
13 personnes sinistrées, les victimes ont reçu une aide de l’Etat (7 600 €)
sans passer par la commune ou le centre communal d’action sociale.
Il en est allé de même dans le Var, où l’aide d’urgence de la région
a été attribuée sur la base de conventions conclues avec les centres
communaux d’action sociale, alors que l’aide du département a été
attribuée par ses propres services.
Les modalités de gestion de l’aide régionale en Charente-Maritime
n’ont pas été pleinement satisfaisantes. Le
total des virements pour les
chèques d’urgence solidaire s’est élevé à 1,78 M€ pour un montant de
chèques distribués de 1,29 M€. D’autres dépenses ont donc été prises en
charge
sur
l’enveloppe
attribuée
à
chaque
commune,
dans
le
prolongement de l’action engagée mais d’une nature différente de celle
qui avait été initialement retenue par l’assemblée délibérante.
Les modalités d’attribution des aides dans certaines communes
montrent enfin une dispersion à l’évidence excessive par rapport à
l’objectif consistant à secourir les personnes qui en avaient le plus besoin.
A Fréjus, par exemple, les dons reçus (0,08 M€) ont été redistribués par
une commission spécifique créée au sein du centre communal d’action
sociale, avec plusieurs distributions successives d’un montant très peu
significatif
84
.
Ces différents problèmes (possibilité de cumul, insuffisance de
coordination, non affectation des sommes à leur destination prévue,
dispersion des aides) méritent d’être à l’avenir corrigés.
4 -
L’aide au relogement
Pour faciliter le relogement, les trois départements ont mis en
oeuvre des missions dites de maîtrise d’oeuvre urbaine et sociale (MOUS),
financées par le programme 135. Les crédits effectivement engagés par
l’Etat se sont montés à 0,36 M€ dans le Var, 0,16 M€ en Vendée et
0,25 M€ en Charente-Maritime.
84
Immédiatement, 250 € pour un sinistré au titre de l’habitation principale, en
fonction de la composition familiale et de l’urgence, 100 € par foyer pour les autres
sinistrés ; en octobre 2010, 100 € de bons d’achat pour l’acquisition d’un appareil
ménager pour certaines familles ; en avril 2011, 100 € pour ceux n’ayant pas bénéficié
d’aide, les familles relogées qui n’ont reçu que des meubles usagés mais pas de bon
d’achat, les familles dont les enfants sont scolarisés au collège de Villeneuve, enfin
les retraités.
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Dans le Var comme en Vendée, la prise en charge financière s’est
effectuée à parité avec le conseil général. En Charente-Maritime où le
conseil général a finalement engagé 0,69 M€, la mise en oeuvre s’est
toutefois effectuée avec retard et a comporté des difficultés. En février
2011, neuf sinistrés sur dix avaient trouvé une solution, mais 111 restaient
à accompagner.
C - Les remises et les exonérations fiscales
Les dispositifs de remise gracieuse bénéficiant aux victimes ont été
similaires pour Xynthia et le Var. Elles sont récapitulées dans des notes
adressées par la direction générale des finances publiques à ses services
datées respectivement du 2 mars 2010 (Xynthia) et du 25 juin 2010 (Var).
Au-delà de l’examen bienveillant des difficultés de recouvrement,
il est prévu une exonération de la taxe foncière et de la taxe d’habitation
en cas d’immeubles détruits ou voués à la démolition et, pour les autres
logements, une révision de la valeur locative foncière pour les immeubles
« ayant subi une dépréciation durable et significative ».
S’agissant des documents administratifs détruits ou perdus et des
certificats d’immatriculation des véhicules acquis en remplacement de
ceux détruits, ils sont remplacés ou établis sans perception d’aucun droit
ni taxe (bulletin officiel des impôts du 21 avril 2005 confirmé dans une
circulaire du 20 mai 2010 du ministre de l’Intérieur).
Le coût net de l’exonération des droits et des taxes sur les
documents administratifs s’est élevé à 0,11 M€ en Vendée (553 dossiers),
0,17 M€ en Charente-Maritime (801 dossiers), soit au total 0,28 M€ pour
Xynthia, et de 0,46 M€ pour le Var (1 631 dossiers).
Les autres mesures fiscales ont été évaluées sur la base des remises
gracieuses et dégrèvements définitifs, hors effet du décalage de
recouvrement de certains impôts. Leur coût s’est élevé à 1,14 M€ en
Vendée, 0,31 M€ en Charente-Maritime et 3,63 M€ dans le Var.
Le coût des mesures fiscales de remises gracieuses aux particuliers
dans le Var est quatre fois et demi plus élevé qu’en Vendée, alors que le
coût des indemnisations au titre du régime des catastrophes naturelles
pour les habitations n’est que légèrement supérieur. Il est en outre
surprenant que le nombre de demandes ait été aussi élevé et que toutes
aient été satisfaites. Au total, le coût direct des mesures fiscales est de
1,73 M€ pour Xynthia et de 4,09 M€ pour le Var.
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Le parti apparemment retenu de donner satisfaction à toutes les
demandes dans le Var a pu
provoquer des situations inéquitables par
rapport aux autres contribuables, dès lors qu’il n’est pas garanti que la
remise gracieuse corresponde aux dommages réellement subis.
D - Les dépenses pour le rachat des biens immobiliers
Les procédures d’acquisition amiable de biens situés dans des
zones de risques importants résultent de la loi du 30 juillet 2003 (article
L. 561-3 du code de l’environnement). Le fonds de prévention des risques
naturels majeurs peut, sur décision préalable de l'Etat, « contribuer au
financement des mesures de prévention intéressant des biens couverts par
un contrat d'assurance mentionné au premier alinéa de l'article L. 125-1
du code des assurances ». Le cas de la submersion marine a été ajouté par
la loi du 12 juillet 2010, dite « Grenelle 2 », dont l’adoption est cependant
intervenue plusieurs semaines après la finalisation des premiers achats.
1 -
Les biens concernés
En Vendée, les 840 biens concernés par les zones de solidarité se
décomposent en 595 maisons à La Faute-sur-Mer (142 résidences
principales, 433 résidences secondaires, 234 à L’Aiguillon-sur-Mer
(38 résidences principales, 196 résidences secondaires) et 11 commerces,
dont 2 ont été finalement rachetés.
Pour les maisons d’habitation, 701 ont fait l’objet d’un accord de
vente
(524
à
La
Faute-sur-Mer,
177
à
L’Aiguillon-sur-Mer ;
146 résidences principales, 555 résidences secondaires). Fin 2011,
699 dossiers avaient été effectivement payés pour une valeur de 151,5 M€
(incluant les frais de notaires).
Les 33 dossiers de rachats de biens d’habitation avec une valeur
vénale évaluée à plus de 500 000 € sont tous situés à La Faute-sur-Mer et
représentent un coût total pour l’Etat de 19,3 M€. 17 sont des résidences
secondaires d’un coût total de rachat de 10,2 M€, le plus élevé atteignant
831 000 €.
En Charente-Maritime, les 788 biens concernés
85
par les zones de
solidarité sont situés sur treize communes : Ile d’Aix (20), Aytré (93),
Charron (212, dont 169 résidences principales, 19 résidences secondaires
et 24 commerces), Châtelaillon (49), La Flotte-en-Ré (12), Fouras (124),
Loix (8), Nieul (13), Saint-Georges d’Oléron (133), Saint-Pierre d’Oléron
(34), Yves (39), Port des Barques (41), Saint-Trojan-les-Bains (15).
85
785 initialement et 3 rajoutés ultérieurement.
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718 sont des habitations, principales ou secondaires, et 70 des
commerces.
Fin 2011, 458 biens ont fait l’objet d’un accord de vente
(292 résidences principales, 163 résidences secondaires, 3 commerces)
pour un coût total de 141,8 M€. A la même date, 443 dossiers sont
effectivement payés, pour une valeur de 137,7 M€. Dans certains
endroits, la proportion de ventes et donc d’acceptation est supérieure à
50 %, souvent là où les résidences principales prédominent A l’inverse
les communes dont les zones ont une plus grande proportion de
résidences secondaires connaissent des taux d’acceptation inférieurs à
50 %, parfois nettement.
Les onze dossiers de rachats de biens d’habitation avec une valeur
vénale évaluée à plus de 1 M€ sont situés sur l’Ile de Ré (4), l’Ile d’Aix
(2), à Aytré (3) et à Fouras (2). Huit de ces habitations sont des résidences
principales. Le coût total de leur rachat par l’Etat est de 16,65 M€.
Dans le Var, les 20 biens concernés se répartissent entre six
communes, La Motte (8, dont 7 rachetés fin 2011), Taradeau (5 dont 2),
Le Muy (un dont un), Draguignan (2 dont un), Les Arcs-sur-Argens (3
dont 3) et Chateaudouble (un dont zéro).
2 -
L’existence de deux procédures
Deux procédures sont possibles pour appliquer ces dispositions,
qui ne diffèrent que par l’ampleur du sinistre. Si les indemnités sont
supérieures à la moitié de la valeur initiale du bien et inférieures à un
plafond (article L. 561-3-I/2° du code de l’environnement), aucune
évaluation des coûts comparés de mesures alternatives n’est nécessaire,
alors qu’un tel examen est indispensable sinon (L. 561-3-I/1°).
Les maisons rachetées avec une indemnité d’assurances de plus de
50 % de la valeur estimée du bien, donc selon l’article L. 561-3-I/2°, sont
au nombre de quinze en Vendée, huit en Charente-Maritime et sept dans
le Var. Les autres maisons l’ont été sur la base de l’article L. 561-3-I/1°.
Les deux procédures pour le rachat amiable ont des finalités
similaires et des modalités proches mais pas identiques. Ceci complique
la tâche des gestionnaires sans justification véritablement convaincante.
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3 -
Les problèmes fiscaux liés au rachat de biens immobiliers
Alors que les acquisitions réalisées dans le Var n’ont pas nécessité
de dispositions fiscales particulières, celles consécutives à Xynthia ont été
réglées par une note de la direction générale des finances publiques du
14 juin 2010, et précisées par une note aux directions générales des
finances publiques des deux départements en date du 20 août 2010.
Pour les résidences secondaires acquises depuis moins de 15 ans,
la plus-value était en principe imposable, sauf application de l’article
150 U-II 4° du code général des impôts (CGI). Cet article prévoit une
exonération qui s’applique en cas d’expropriation et sous condition de
remploi. Les deux notes du 14 juin et 20 août 2010 valident ce dispositif,
mais en étendant le délai maximal pour le remploi à deux ans (au lieu
d’un an seulement) et en indiquant que dans le cas où ce délai dépasserait
12 mois, la commune de remploi devait se situer en Charente-Maritime
ou en Vendée. Au cas où cette condition ne serait pas finalement remplie,
un rôle supplémentaire serait émis.
Le coût de l’exonération sur la plus-value n’a pas pu être évalué,
mais le temps écoulé depuis la date de construction des résidences
secondaires rachetées est dans d’assez nombreux cas inférieur à 15 ans.
Dans quelques cas, l’application de cet article du CGI pour une
acquisition amiable a eu des effets suscitant l’interrogation. Le dossier
concernant un bien immobilier situé route de la pointe d’Arçay à La
Faute-sur-Mer, en constitue un exemple parmi d’autres. Le coût total de
rachat pour l’Etat est de 602 776 € après déduction des indemnités
d’assurances s’élevant à 173 224 €, alors que le bien immobilier avait été
acheté le 26 décembre 2007 au prix déclaré de 300 000 €. Des gros
travaux ont certes été effectués depuis 2007, à hauteur d’environ
90 000 €. Le rachat par l’Etat permet en l’espèce au propriétaire de
bénéficier d’une plus-value importante (plus de 300 000 €) totalement
exonérée, contrairement à ce qui se serait passé dans le cas d’une
transaction classique.
Dans un dispositif d’une telle ampleur et dans le cadre d’un rachat
à l’amiable, ce qui n’a pas grand-chose à voir avec les cas ponctuels
intervenus jusqu’à présent, l’exonération de toute imposition sur les plus-
values pour les résidences secondaires n’allait pas de soi.
4 -
La comparaison avec le coût d’autres moyens de sauvegarde
L’essentiel des biens immobiliers rachetés à l’amiable par l’Etat
l’ont été sur la base de l’article L. 561-3-I/1° du code de l’environnement,
qui autorise de telles opérations sous réserve que le prix « s'avère moins
coûteux que les moyens de sauvegarde et de protection des populations ».
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Alors que, dans le Var, l’examen des dossiers s’est opéré au cas
par cas de manière satisfaisante, il n’en pas été de même pour Xynthia.
L’examen ne s’est attaché en aucune façon à analyser la situation de
chaque habitation, ni, a fortiori, de vérifier au cas par cas si d’autres
moyens de protection n’auraient pas été moins coûteux. Cette carence est
regrettable. Le droit à l’acquisition amiable aurait pu s’exercer sur la base
de zones délimitées, mais en précisant qu’il était conditionné par une
analyse complémentaire du coût comparé d’autres moyens possibles de
protection.
La procédure suivie dans le cas de Xynthia et validée par
l’administration centrale ne respecte pas les dispositions du code de
l’environnement en matière de comparaison de solutions alternatives.
5 -
Le contrôle des permis de construire
L’absence d’autorisation de construire constitue un délit dont le
délai de prescription est fixé à trois ans par le code de procédure pénale
(article 8). Il est interrompu lorsque l'autorité administrative compétente
dresse un procès-verbal, ce à quoi elle est en principe tenue lorsqu’elle a
connaissance d'une infraction (article L. 480-1 du code de l’urbanisme).
La prescription n’entraîne pas la légalisation d’une construction, celle-ci
nécessitant une autorisation de régularisation pour mise en conformité,
mais l’irrégularité initiale ne peut plus être opposée à l’occasion d’une
demande d’autorisation d’urbanisme ultérieure (arrêt de la Cour de
cassation du 28 mars 2000). Le juge de l’expropriation ne tient en outre
compte de l’absence de permis de construire qu’à condition que l’autorité
compétente ait engagé une procédure contre la construction illégale, ce
qui n’est possible que dans le délai de prescription (arrêt de la Cour de
cassation du 6 octobre 2009).
Compte tenu de ces dispositions, les services de l’Etat n’ont pas,
dans le cas de Xynthia, procédé à un contrôle systématique de la situation
en matière de permis de construire (ou le cas échéant de régularisation)
des biens rachetés. S’agissant non d’une autorisation d’urbanisme mais
d’un rachat amiable, il aurait pourtant sans doute été possible et
souhaitable qu’ils le fassent, afin de contribuer à la dissuasion de
constructions irrégulières dans les zones de grave danger.
En Vendée, à l’Aiguillon-sur-Mer, la liste des propriétés rachetées
par l’Etat dans le secteur de la Pointe et pour lesquelles aucun permis de
construire n’aurait été délivré comporte 62 biens immobiliers. En
Charente-Maritime, certains travaux effectués pour des biens immobiliers
rachetés par l’Etat pourraient ne pas avoir fait l’objet d’extension de
permis de construire, comme la création de piscines.
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Un seul dossier d’absence de permis de construire a été signalé, à
l’initiative de la mairie de Nieul-sur-Mer. Le recueil de cette information
a conduit à interrompre la procédure en cours et annuler la proposition
d’acquisition.
L’absence de contrôle systématique de la situation des biens au
regard des règles d’urbanisme (permis de construire ou décision de
régularisation) est regrettable, car elle prive l’Etat d’un instrument de
dissuasion des constructions illégales notamment en zone de grave
danger.
6 -
Les interrogations soulevées par certaines évaluations
Les modalités de valorisation retenues dans certains cas, sans
constituer une infraction à la règlementation, posent question.
Il en est ainsi dans certains dossiers de la valorisation du terrain
attenant à certaines propriétés, alors que le prix du bien immobilier est
déjà élevé.
Dans d’autres, le bien a été valorisé comme du terrain à bâtir, alors
que la tempête Xynthia interdira à l’avenir d’y construire. La loi prévoit
certes de ne pas tenir compte du risque pour l’évaluation des biens, mais,
s’agissant de biens assurés, il ne peut s’agir en toute rigueur que du bâti et
non de terrains nus. Ceux-ci auraient ainsi dû soit être exclus du rachat,
soit être rachetés mais au prix d’un terrain non constructible.
Certains dossiers font apparaître un écart important avec des
valeurs déclarées au service des impôts peu de temps auparavant, mais
manifestement sous-estimées. Cette situation interpelle d’autant plus que
les plus-values, normalement taxables pour les résidences secondaires,
ont été en l’espèce exonérées d’impôt. De telles méthodes ne sont pas
irrégulières au regard des règles de l’expropriation, mais celles-ci
mériteraient d’être modifiées, en particulier en cas d’acquisition amiable.
De façon plus générale, la règle établie par le code de
l’environnement selon laquelle le risque ne doit pas être pris en compte
pose question. Autant ne pas intégrer dans l’évaluation les effets directs
de l’évènement est compréhensible, autant ne prendre en compte aucune
des données sur les risques, y compris celles préexistant avant la tempête,
est discutable. Ne pas tenir compte de la situation de l’immeuble à l’égard
des zonages préexistants du plan de prévention, de sa protection par des
digues, voire de la vulnérabilité de la commune en matière de catastrophe
naturelle (mesurée par exemple par le nombre d’arrêtés dans ce domaine)
peut aboutir à survaloriser de manière injustifiée certains biens.
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En matière d’évaluation des biens, il serait préférable à l’avenir de
mieux distinguer la non prise en compte des effets directs de la crise,
notamment en choisissant des références antérieures, et au contraire la
prise en considération du zonage de risque d’avant la crise, souhaitable
par souci d’équité.
Certaines modalités d’évaluation suscitent des interrogations, en
particulier sur la valorisation du terrain attenant à une propriété,
l’existence d’un écart important avec des valeurs déclarées peu de temps
auparavant, ou l’absence de prise en compte des zonages du plan de
prévention du risque inondation. Si elles ne constituent pas des infractions
à la règlementation, ces constats posent des problèmes de principe ou
d’équité, d’autant plus sensibles dans un dispositif d’une telle ampleur.
7 -
L’obligation d’assurance et les terrains à bâtir ou en cours de
construction
Le code de l’environnement (article L. 561-1) prévoit qu’en cas de
risque prévisible menaçant gravement la vie humaine, l’Etat peut décider
une expropriation même si le bien n’est pas assuré. Il en va différemment
des acquisitions amiables préventives qui relèvent de l’article L. 561-3,
dont le deuxième alinéa indique que le fonds de prévention des risques
naturels majeurs peut « contribuer au financement des mesures de
prévention intéressant des biens couverts par un contrat d'assurance
mentionné au premier alinéa de l'article L. 125-1 du code des
assurances ». Dans ce cas, la loi prévoit donc explicitement une
obligation d’assurance.
La règle d’obligation d’assurance au moment de la crise pour un
rachat amiable a été appliquée pour les constructions achevées, mais avec
une exception dans le Var.
Les terrains nus ou en construction n’entrent pas en principe dans
le périmètre de l’acquisition amiable, puisqu’ils ne peuvent justifier d’un
danger affectant gravement la vie humaine. Par lettre du 25 janvier 2011
adressée au préfet de Vendée, avec copie au préfet de Charente-Maritime
et au chef du service de France Domaine, le directeur général de la
prévention des risques du ministère chargé de l’écologie donne
l’autorisation de considérer comme éligibles les dossiers situés en zone de
solidarité et bénéficiant d’une autorisation de permis de construire
délivrée avant la tempête. Il justifie cette mesure par des raisons de
sécurité, pour éviter que les propriétaires achèvent une construction à des
fins d’habitation dans une zone à risque mortel. Une des motivations, non
explicitées, est en outre de racheter ces terrains avant l’édification de
construction, leur prix devenant plus élevé après.
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COUR DES COMPTES
De ce fait, en Vendée, deux terrains, sur lesquels la construction
n’avait pas commencé avant la tempête, ont été indemnisés alors qu’ils
n’étaient pas assurés. Dans le Var, apparaît une situation similaire.
L’autorisation de racheter une construction non assurée ou assurée
seulement au moment de l’achat par l’Etat est pourtant contestable. La
logique de l’article L. 561-3 du code de l’environnement est de permettre
au fonds de prévention des risques naturels majeurs par des actions de
prévention, de diminuer de futures éventuelles indemnités versées par le
régime des catastrophes naturelles. Il est donc normal qu’il réserve
l’acquisition amiable (et non l’expropriation) à des biens assurés au
moment de la crise, qui ont déjà contribué par leurs primes à
l’alimentation du fonds des préventions des risques naturels majeurs et du
régime des catastrophes naturelles. Cette disposition, qui permet à l’Etat
des économies à hauteur des indemnités versées par les assurances,
n’aurait évidemment pas grand sens si l’obligation d’assurance ne
s’appliquait pas forcément au moment de la crise, mais après. Lorsqu’elle
n’est pas respectée, il y a de toute façon la possibilité de procéder à une
expropriation.
Pour deux biens rachetés à l’amiable en Vendée et un dans le Var,
aucun contrat d’assurance n’a pu être produit. Dans un autre cas, dans le
Var, le bien a été assuré postérieurement aux évènements. L’absence de
contrat d’assurance n’aurait pas dû permettre le rachat à l’amiable dans la
mesure où le code de l’environnement (article L. 561-3) prévoit que les
acquisitions amiables par l’Etat concernent « les biens couverts par un
contrat d'assurance mentionné au premier alinéa de l'article L. 125-1 du
code des assurances ». La production comme justificatif d’un contrat
d’assurance souscrit après la crise est contraire à la logique de la loi,
sinon à sa lettre même. Ces différents cas constituent des précédents
dangereux et sont source d’iniquité par rapport à ceux qui ont été refusés
pour cette raison d’absence de couverture d’assurance.
8 -
Le contrôle des indemnités des compagnies d'assurances
Dans les zones de solidarité, l’indemnité des assurances vient en
déduction du coût de rachat par l’Etat des biens concernés. Pour les
sinistrés vendant leur bien immobilier, le montant de ces indemnités n’a
donc aucune conséquence concrète sur le prix qui leur est versé. Il en a en
revanche pour l’Etat, puisqu’il vient en déduction des sommes consacrées
au rachat des maisons.
Par
plusieurs
lettres
du
14
avril
2010
aux
organismes
professionnels, la ministre des finances a demandé aux compagnies
d’assurance d’étendre au cas particulier des zones de solidarité de
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COMPLETES
MAIS
AVEC
DES
INCOHERENCES
159
Xynthia la non application du coefficient de vétusté qui minore, en
fonction de leur ancienneté, la valeur des biens et donc les indemnités.
Cette mesure en principe acceptée par les assureurs n’a en réalité été mise
en oeuvre que lorsque le taux de vétusté théoriquement applicable était
inférieur ou égal à 25 %, et non dans tous les cas.
Présentée comme un geste en faveur des sinistrés, elle n’a des
conséquences que pour ceux dont le bien n’est finalement pas racheté.
Pour les autres, le seul effet est de diminuer le coût du rachat par l’Etat.
Cependant son efficacité sur ce plan peut être réduite, voire inversée si les
assureurs, profitant de la nécessité qui en découle de connaitre le statut de
la maison par rapport à la zone de solidarité, anticipent et diminuent, sans
conséquence pour les sinistrés, les indemnités qu’ils leur versent.
Cette tentation a d’autant pu exister que l’essentiel des évaluations
s’est fait « à dire d’expert » et non sur devis, ce qui laisse aux experts une
marge d’appréciation plus grande. La plupart des indemnités d’assurance
ont en outre été décidées non seulement après l’annonce de la
délimitation des zones de solidarité, mais aussi dans plusieurs cas après la
transmission des propositions de rachat. Ce contexte, très différent de
celui du Var compte tenu de l’existence de zones prédéfinies de rachat
amiable, justifiait un contrôle minimal de la vraisemblance des
indemnités d’assurance, qui n’a été mis en oeuvre qu’en Charente-
Maritime et de manière non systématique. Un tel contrôle de
vraisemblance aurait pourtant pu être effectué à partir de la carte faisant
apparaître le niveau d’eau atteint.
Le contrôle des indemnités versées par les compagnies d’assurance
pour les biens rachetés par l’Etat a été insuffisant, alors qu’un examen
minimal de vraisemblance était faisable. Ceci est d’autant plus regrettable
que ces indemnités viennent directement en déduction des montants payés
par l’Etat.
9 -
La prise en compte des travaux effectués depuis la tempête
L’article L. 561-3 du code de l’environnement prévoit pour les
acquisitions amiables que sont déduites les indemnités versées par les
compagnies d’assurance « non utilisées aux fins de réparation des
dommages ». En fait, le message a été utilement transmis aux sinistrés par
les autorités et les assureurs qu’il ne fallait pas faire de travaux dans ces
maisons. Il a été globalement respecté.
Le fait que le dispositif règlementaire ne prévoit pas que le
montant de ces travaux reste à la charge du propriétaire mérite cependant
réflexion
.
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COUR DES COMPTES
III
-
L’indemnisation des agriculteurs
En Vendée, les terres agricoles inondées du Marais Poitevin sont
d’un bon rendement céréalier.
Une vingtaine d’exploitations agricoles a
été totalement sinistrée, et 140 autres exploitations partiellement
endommagées. La surface agricole utile inondée est de 10 718 ha. En
Charente-Maritime, les surfaces inondées sont estimées entre 22 000 et
23 000 hectares sur environ 800 exploitations. Dans le Var, environ
400 exploitations agricoles ont été sinistrées, majoritairement dans la
viticulture, mais aussi le maraîchage, l'horticulture, les pépinières et
l’élevage ovin (mais 259 dossiers seulement ont été déposés au titre de
l’indemnisation des calamités agricoles).
A - Le dispositif d’aide
L’indemnisation des activités agricoles
86
a reposé pour l’essentiel
sur des crédits d’Etat.
1 -
Les aides d’Etat
Pour Xynthia, deux mécanismes d'indemnisations correspondant
aux pertes de fonds et de récoltes ont été mis en place. Le fonds national
de gestion des risques en agriculture (FNGRA) dit « classique » a permis
l’indemnisation des récoltes et des éléments de pertes de fonds
habituellement
indemnisés
(nettoyage,
clôtures,
fossés,
etc.). Un
dispositif spécifique, dénommé FNGRA « ad hoc », a permis de verser
une aide pour compenser les pertes de fonds et de participer au coût du
gypsage suite au passage de l’eau de mer sur les terres cultivées
(cf. infra). Le total de dépenses estimées pour le FNGRA devrait être
de 21,8 M€, dont 10 M€ en Charente-Maritime, 10 M€ pour la Vendée, et
1,8 M€ pour la Gironde. Dans le Var, l’indemnisation serait comprise
entre 2 et 2,5 M€.
Quant au fonds d'allégement des charges financières (FAC), il a
autorisé la prise en charge des intérêts de prêts à court terme souscrits
après le sinistre. 3,45 M€ ont été dépensés, 2,7 M€ pour la Charente-
Maritime (343 dossiers) et 0,75 M€ pour la Vendée (136 dossiers). Pour
le Var, l’enveloppe prévisionnelle de 0,5 M€ a été ouverte en juillet 2010.
Les dépenses réelles n’ont concerné que 17 dossiers déposés et quatre
éligibles pour un montant de 10 546 €. Ce dispositif est clos.
86
Les aides d’urgence en agriculture ont déjà fait l’objet d’une insertion au rapport
public annuel 2012 de la Cour des comptes.
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La mutualité sociale agricole (MSA) a pris en charge certaines
cotisations sociales dans le cadre d’un programme pour aider les
exploitants en difficulté. Pour Xynthia, elle a ainsi utilisé 2,5 M€ sur sa
caisse d'action sociale (1 060 dossiers). Pour le Var, les dépenses de ce
type ont représenté 0,88 M€ (200 dossiers).
Pour Xynthia, des aides particulières ont en outre été accordées
aux conchyliculteurs et aux pisciculteurs pour la reconstitution du
matériel détruit. Une enveloppe initiale de 20 M€ a été mise en place, les
dossiers déposés ont représenté un total de 7 M€ (dont 583 examinés en
Charente-Maritime), 3,46 M€ étaient payés à la fin de l’exercice 2011.
Les saliculteurs ont enfin été aidés pour la perte des stocks de sel
entreposés sur les zones de production et des frais de nettoyage ou
travaux sur les mêmes zones. Les dossiers éligibles ont été transmis à
hauteur de 30 000 € mais aucun paiement n’était effectué fin juin 2011.
S’agissant des dépenses fiscales, un dégrèvement de la taxe
foncière est prévu proportionnellement aux pertes de certaines récoltes au
titre de l’article 1398 du code général des impôts (CGI).
2 -
Les autres aides
Elles proviennent surtout des départements et abondent celles de
l’Etat, pour le gypsage, la prise en charge d’une partie du différentiel
entre le coût des dégâts et le remboursement des assurances (Vendée,
Charente-Maritime), ou encore l’indemnisation des conchyliculteurs
(Charente-Maritime). Celle-ci inclut une aide exceptionnelle pour
compenser aux communes et établissements publics concessionnaires la
décision d’exonérer les conchyliculteurs sinistrés de la redevance
d’occupation du domaine portuaire départemental.
Dans le Var, le fonds européen agricole pour le développement
rural (FEADER) a été mobilisé dans le cadre de la mesure 126 du
programme de développement rural hexagonal (reconstitution du
potentiel de production agricole endommagé par des catastrophes
naturelles), en contrepartie du financement des collectivités (région et
département). Un cofinancement du FEADER a ainsi pu intervenir à
parité avec les interventions des collectivités locales dans la limite d’un
taux plafond d’aide publique de 80 % (dépenses du
FEADER : 0,19 M€).
Au total, le coût des inondations provoquées par la tempête
Xynthia en matière agricole (plus de 33 M€ de crédits d’Etat) est élevé,
même si, proportionnellement, il est plus faible à l’hectare que dans le
Var. Le rapport entre les inondations du Var et Xynthia est de 1 à 50 pour
les surfaces inondées (700 ha contre 35 000 ha), contre environ 1 à 10
pour
les
dépenses.
L’importance
des
montants
consacrés
à
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l’indemnisation des dégâts de Xynthia justifierait une réflexion,
particulièrement en Vendée, sur les cultures à privilégier sur les terres
agricoles menacées de submersion.
Des efforts ont été faits pour essayer de regrouper au maximum les
dossiers à déposer, comme par exemple en Charente-Maritime entre
l’Etat, la région et le département. Il reste que l’existence de plusieurs
procédures, sans doute difficilement évitable compte tenu de l’ampleur de
la catastrophe et de la diversité des filières concernées, a rendu d’autant
plus nécessaire la coordination assurée par les directions départementales
des territoires et de la mer.
B - Les problèmes d’application de certains dispositifs
Le bilan des dépenses fait apparaître un écart important entre les
estimations initiales des dégâts et ceux réellement constatés. Dans le Var,
par exemple, les pertes de récolte déclarées à la chambre départementale
d’agriculture initialement évaluées à 43,6 M€ ont été ramenées à 11,6 M€
et l’enveloppe de crédits déléguées s’est limitée à 3,5 M€.
Le montant initial des enveloppes d’aides a en outre été souvent
surestimé. Le fonds national de garantie des calamités agricoles,
initialement doté pour Xynthia en Charente-Maritime de 18 M€, n’a par
exemple dépensé dans ce département qu’un peu plus de 9 M€ fin 2011.
Pour le fonds d’allègement de charges dans le Var, des aides ont été
ouvertes pour un montant substantiel, mais elles n’ont pas été dépensées.
Le paiement des aides est parfois intervenu assez lentement. Sur le
littoral atlantique, par exemple, une enveloppe de 20 M€ a été ouverte
pour les aquaculteurs sur la base des premières estimations fournies par la
profession. Les dossiers déposés ont représenté un total de 7 M€. En mars
2011, 26 seulement étaient payés à hauteur de 0,3 M€. Il est vrai que pour
procéder aux paiements, il a fallu attendre les décisions des assurances,
les indemnités venant dans ce cas en complément de leurs versements.
La technique du gypsage des terres, déjà utilisée, notamment après
la tempête de 1999, permet en principe de rétablir plus rapidement à leur
niveau antérieur le rendement de terres ayant absorbé du sel. Les résultats
obtenus apparaissent en effet très variables en fonction de la qualité et de
la quantité de gypse apporté, des caractéristiques de la terre (labourée ou
non avant la submersion) ainsi que de la pluviométrie après épandage.
Certains agriculteurs ont fait état d’une efficacité du gypsage moindre
qu’attendue, et en ont tiré argument pour demander des aides
complémentaires, qui ont été refusées.
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Un bilan sur l’efficacité du gypsage est à établir, ainsi que
l’envisage le ministère chargé de l’agriculture, après la réalisation des
derniers apports de gypsage à l’automne 2012.
Si le gypsage est une technique éprouvée, son coût aurait mérité
qu’une analyse préalable plus précise de son intérêt économique soit
effectuée. Celle-ci devra être faite a posteriori.
IV
-
L’aide aux autres acteurs économiques
A - L’indemnisation des activités économiques
1 -
Le bilan des aides
Les crédits consommés au titre du fonds d’intervention pour les
services,
l’artisanat
et
le
commerce
(FISAC)
se
sont
élevés
respectivement à 0,74 M€ en Vendée, où les communes sinistrées
comptent un nombre restreint de petites et moyennes entreprises, 2,3 M€
en Charente-Maritime et 4,83 M€ dans le Var.
Plusieurs aides complémentaires aux entreprises sont intervenues
dans le Var (fonds national de l’emploi-formation, fonds national
d’aménagement et de développement du territoire). 410 établissements
concernant 3 201 salariés ont enfin été pris en charge au titre du chômage
partiel pour un montant d’aides autorisées de 3,1 M€. Une exonération de
0,843 M€ des cotisations patronales s’y ajoute. Des aides ont également
été accordées à hauteur de 0,768 € par la chambre des métiers du Var et
0,763 M € par le régime social des indépendants (RSI)
Là où le problème était le plus sensible, dans le Var, le bilan de
ce dispositif est plutôt positif. Seulement neuf entreprises employant
vingt salariés au total ont cessé leurs activités. Au 1
er
février 2011, quatre
établissements étaient toujours bénéficiaires du chômage partiel, qui
concernait 111 salariés (aides estimées à 0,33 M€ en 2011).
L’importance de l’aide apportée via le chômage partiel mérite
d’être soulignée. Il s’agit là d’une modalité particulièrement efficace
lorsque l’entreprise emploie des salariés.
2 -
La gestion du dispositif
En Charente-Maritime, un fonds d’intervention d’urgence (FIU
créé par la région et le département (3 M€ par chaque collectivité) et géré
par ce dernier a permis la mise en place d’un dossier de demande d’aide
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commun et la prise en compte des complémentarités entre les fonds
d’État (FISAC, calamités agricoles) et le fonds région/département.
En revanche, en Vendée, la coexistence des systèmes d’aides,
l’attente des décisions de l’Etat en matière d’aléa marin de référence et
les incertitudes sur les montants remboursés par les compagnies
d’assurance ont eu pour conséquence une consommation assez réduite des
crédits en matière économique et pour la remise en état des infrastructures
portuaires et routières. Les avances remboursables proposées par la
région aux différentes entreprises et activités économiques (0,61 M€
initialement prévus dont 0,46 M€ mandatés fin 2011) ont rencontré un
écho limité. Certains taux d’utilisation des crédits régionaux sont peu
élevés (ex : 14,1 % pour les travaux de reconstruction des équipements
portuaires). En février 2012, le conseil général avait liquidé 0,36 M€ de
subventions aux aménagements et équipements touristiques, soit 52 % du
total attribué dans ce domaine, et 0,61 M€ d’aides à la voirie communale,
soit 61 % du total.
Il serait souhaitable de prévoir le mode de pilotage et de mise en
oeuvre de ce type d’aides d’urgence, avec une collectivité coordinatrice.
B - Le rachat par l’Etat des biens à usage professionnel
en zone de solidarité
L’article L. 561-3-I/1° du code de l’environnement réserve la
procédure d’acquisition amiable à « un bien exposé à un risque
prévisible ». Cette formulation inclut donc les biens à usage professionnel
mais ne précise pas si leur évaluation doit inclure la valeur du fonds de
commerce. La note d’instruction de la direction générale des finances
publiques, approuvée par le ministre, du 2 avril 2010 ne prévoit aucune
disposition particulière pour ces biens.
Lors de trois réunions interministérielles en mai, octobre et
novembre 2010, le cabinet du Premier ministre écarte le principe de
l’indemnisation des fonds de commerce. La lettre du 19 octobre 2010
de
la direction générale des finances publiques et de la direction générale de
la prévention des risques au préfet de Charente-Maritime avec copie à
celui de Vendée confirme la position. Il y est précisé que seuls les biens
« à usage commercial abritant une activité nocturne dite de sommeil, et
notamment les hôtels et les campings » pourront être rachetés.
1 -
En Vendée
La procédure pour les biens professionnels a été engagée très tôt
en Vendée, avant même la tenue d’une réunion interministérielle
précisant le régime qui leur est applicable. L’administration centrale, sur
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un sujet sensible et compliqué, n’aurait pas dû laisser sa direction
départementale prendre si vite l’initiative, alors que parallèlement celle de
Charente-Maritime décidait de ne traiter ce sujet que dans un deuxième
temps, en se concentrant d’abord sur les biens à usage d’habitation.
Trois dossiers seulement ont été concernés, localisés à
L’Aiguillon-sur-Mer. Le montant total à la charge de l’Etat s’élève à
896 863 €.
Pour une entreprise située à l’Aiguillon-sur-Mer dans des locaux
annexes à son habitation principale, l'artisan s'est réinstallé dans la même
commune et n'a donc perçu aucune indemnité de nature professionnelle.
Le rachat par l’Etat s’est effectué sur la base de l’indemnisation des seuls
murs, soit 99 500 €. Aucune indemnité d’assurance n’a été déduite et n’a
donc été a priori versée au sinistré, ce qui est surprenant dans un secteur
qui a été inondé.
La situation et la procédure suivie pour les deux autres biens
professionnels concernés sont récapitulées dans l’encadré ci-dessous.
Le rachat de deux restaurants à L’Aiguillon-sur-Mer
Les deux restaurants (« l'Oasis » et « Les P'tits Bouchots ») sont
situés respectivement route de la Pointe et 11 chemin de la Baie à
L’Aiguillon-sur-Mer. Ils figurent en zone de solidarité.
Sur la base de la note d’avril 2010, qui prévoit une méthode pour
l’acquisition amiable analogue à celle de l’expropriation, la DDFIP adresse
en mai-juin 2010 des propositions de rachat y compris le fonds de commerce.
Pour L’Oasis, une évaluation est préparée par la DDFIP en mai 2010
pour le rachat des murs (200 000 €), mais aucune proposition n’est transmise,
le terrain sur lequel est situé cet établissement étant la propriété d’un
organisme public, le syndicat de travaux de défense contre la mer de
L’Aiguillon-sur-Mer. La direction départementale des finances publiques
envoie en revanche le 17 mai à la gérante, personne différente de la
propriétaire, une proposition de rachat du fonds de commerce (196 000 €
portés à 231 450 € par diverses indemnités), qui est acceptée le 18 mai.
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Pour les Petits Bouchots, la direction départementale des finances
publiques envoie à la propriétaire le 2 juin 2010 une proposition de rachat
pour les murs du restaurant au prix de 280 000 €, auquel viendront s’ajouter
les indemnités de remploi de 29 000 €. Parallèlement, la DDFIP lui adresse
une proposition de rachat du fonds de commerce (230 000 €, portés à
277 911 € par diverses indemnités). Ces propositions sont acceptées par la
propriétaire le 4 juin 2010. Selon les informations disponibles, les parcelles
concernées n’auraient pas fait l’objet de permis de construire et l’avis du
service des domaines précise que le bâtiment se situe en contrebas de la digue
dans un terrain non constructible.
Le 26 mai, une réunion interministérielle écarte le principe du rachat
des fonds de commerce. La procédure est dès lors suspendue lors d’un des
contacts téléphoniques hebdomadaires de la direction départementale des
finances publiques avec France Domaine. Le 19 octobre 2010,
la lettre
commune de la direction générale des finances publiques et de la direction
générale de la prévention des risques sur l’indemnisation des biens
professionnels précise que seuls les biens «
à usage commercial abritant une
activité nocturne dite de sommeil
» pourront être indemnisés. Si l’existence
dans le même bâtiment du logement de la propriétaire/exploitante du
restaurant « Les Petits bouchots » est avérée, c’est plus discutable pour
« L’oasis » où n’existait qu’une pièce sommaire en sous-sol pouvant servir
occasionnellement à des salariés du restaurant.
Ces deux situations ne sont ensuite évoquées à nouveau qu’à
l’approche du premier anniversaire de la tempête Xynthia. Le compte rendu
de la réunion interministérielle du 21 janvier 2011 indique que «
le premier
restaurant n’entre pas dans les critères permettant de bénéficier du fonds
Barnier. Il décide que le second pourrait faire l’objet d’une indemnisation si
l’usage d’habitation est avéré
».
Une indemnisation paraît donc exclue pour
« L’Oasis » dès lors que le sol est une propriété publique. Pour « les P’tits
Bouchots », le document ne précise pas si le fonds de commerce peut
dorénavant être indemnisé.
La question est cependant tranchée par la réunion interministérielle
du 25 février 2011. Son compte rendu rappelle que, dans ces deux dossiers
d’indemnisation, des offres de rachat de fonds de commerce ont été
formulées par les services de l’Etat, antérieurement à l’établissement d’une
doctrine en sens contraire. Il indique que «
le cabinet du premier ministre
estime qu’il serait inopportun de déroger à la règle générale ainsi fixée et
renvoie à la procédure d’expropriation l’éventuelle indemnisation des fonds
de commerce en cause
».
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INCOHERENCES
167
Le 30 mai 2011, le conseiller chargé du développement durable du
cabinet du Président de la République adresse un courriel au directeur de
cabinet du préfet de Vendée. Ce document indique que la propriétaire du
restaurant « L’Oasis » a été reçue à la présidence de la République à sa
demande. Il précise qu’«
il lui a été indiqué que les difficultés juridiques qui
faisaient obstacle jusque-là à son indemnisation seraient levés dans les
prochains jours afin que l’Etat puisse mettre en oeuvre la proposition
d’indemnisation faite l’an passée à l’intéressée
». Selon ce document, «
il
restera à la procédure locale de se dérouler totalement
», étant précisé que
«
l’objectif, au total, est que le règlement de cette affaire n’aille pas au-delà
du mois de juin
» et que «
le ou les dossiers identiques bénéficieront du même
traitement. A priori, il n’y en a qu’un seul en Vendée.
»
Ce document est suivi d’une lettre du directeur de cabinet du
Président de la République à l’intéressée du 31 mai 2011 lui annonçant
qu’«
il a été finalement été décidé de mettre en oeuvre, dans les meilleurs
délais, la proposition d’indemnisation du 17 mai 2010
», en précisant que
«
les instructions nécessaires ont été données aux différents services
concernés
». En réalité, les deux dossiers de la direction départementale des
finances publiques transmis aux juridictions financières ne comprennent
aucune pièce de ce type. Ce service indique d’ailleurs avoir utilisé le courriel
précité comme instruction directement applicable.
Concernant « l'Oasis », la convention d'indemnisation du rachat de
fonds de commerce est signée entre l'Etat et les exploitants le 15 juin 2011
(206 419 € après déduction d’une indemnité d’assurance de 25 031 €).
L’indemnisation du propriétaire des murs, qui n’est pas l’exploitant, est en
cours de finalisation et devrait s’établir à 205 900 €. Pour « Les P'tits
Bouchots », elle s’est montée à 288 265 € pour les murs, après déduction de
l’indemnité d’assurance, de 20 735 €. Celle du fonds de commerce s’élève à
162 304 € après déduction d’une indemnité d’assurance de 115 606 €.
En réponse aux critiques de la Cour sur cette procédure, la direction
générale des finances publiques avance l’argument selon lequel les
propositions formulées par l’Etat avant les instructions du premier ministre
«
engageaient juridiquement les parties dans la mesure où il y avait accord
sur la chose et le prix
». Mais sa portée est fortement atténuée par le fait qu’il
n’a été avancé ni dans les diverses réunions interministérielles concernées,
comme le montrent leurs comptes-rendus, ni dans les différentes notes sur le
sujet. Si ce constat juridique était pleinement démontré, ce qui n’est pas
certain, il aurait dû conduire dès l’origine au respect de l’engagement de
l’Etat, en suivant les procédures normales en la matière.
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Les enseignements des inondations de 2010 sur le littoral atlantique (Xynthia) et dans le Var – juillet 2012
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168
COUR DES COMPTES
Au-delà des difficultés de procédure que soulève le déroulé des faits,
ces dossiers posent deux questions : la régularité incertaine du rachat en
fonction des caractéristiques des biens concernés (dans un cas une absence
d’habitation permanente et une construction sur un terrain propriété d’un
établissement public local dont l’objet est limité à la gestion du trait de côte,
dans l’autre une incertitude sur la situation régulière en matière d’autorisation
de construire), et la décision, contraire à celle prise pour tous les autres
dossiers comprenant un fonds de commerce, de procéder au rachat par l’Etat
de ce dernier, cette différence de traitement étant source d’iniquité.
2 -
En Charente-Maritime
Outre les trois campings à Aytré (cf. supra) et une pharmacie à
Charron, l’Etat a racheté un hôtel-restaurant à Aytré. Il s’agit de deux
bâtiments, contenant l’un l’hôtel et l’autre le restaurant, reliés par une
passerelle. Officiellement, il est impossible de les scinder, ce qui aurait
permis de ne racheter que l’hôtel mais une visite sur place ne permet pas
d’être certain de la réalité de cette impossibilité.
Les deux bâtiments ont fait l’objet d’une première évaluation en
juin 2010, avant que les règles ne soient fixées. Celle-ci se monte à
4 180 000 €, y compris les deux fonds de commerce évalués au total à
2 120 000 €. Ceci aurait dû conduire à une proposition à 2 060 000 €, très
éloignée de la demande des propriétaires (11 M€). Ce dossier a fait l’objet
de plusieurs interventions de parlementaires et du syndicat national des
hôteliers restaurateurs, cafetiers et traiteurs.
A la suite d’une expertise, la directrice de la direction nationale
d’interventions domaniales (DNID) a adressé le 5 novembre 2010 au chef
du service de France Domaine une nouvelle évaluation. Dès lors que le
fonds de commerce n’est pas retenu, cette note estime qu’il faut évaluer
les murs non occupés mais libres d’occupation, ce qui aboutit à une
évaluation de 3 522 000 €, faite par l’Etat début novembre et acceptée
(après diverses interventions ministérielles) le 4 mars 2011. Le montant
net du rachat, payé le 10 mai 2011, s’est finalement élevé, en tenant
compte des indemnités et déduction faite du versement des assurances, à
3 220 158 €.
Le rachat des biens professionnels, pourtant en nombre limité, a
soulevé des difficultés. Les situations de blocage et de désarroi ont
conduit à rechercher des solutions ponctuelles sur la base de modalités de
traitement différentes selon les cas, ce qui est source d’iniquité. Il serait
souhaitable pour l’avenir que les règles applicables dans ce genre de cas
soient clarifiées et unifiées.
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LES
INDEMNISATIONS :
TRES
COMPLETES
MAIS
AVEC
DES
INCOHERENCES
169
V
-
Le bilan financier pour les collectivités locales
Les trois régions ont mis en place des plans d’aide aux sinistrés,
aux activités économiques et aux communes.
Le plan tempête de la région des Pays de la Loire, voté à la suite de
Xynthia, s’élève à 20 M€ de crédits ouverts (11,2 M€ de dépenses fin
2011). En Vendée, déduction faite des dons et des subventions reçus, la
région enregistre un coût net de 6,6 M€ en 2010-2011.
En Poitou-Charentes, la région a ouvert un montant de crédits de
15,3 M€ en 2010 (6,4 M€ de dépenses fin 2011). Les dépenses de
fonctionnement ont consisté pour l’essentiel dans le versement de
chèques d’urgence solidaire directement aux sinistrés.
Pour la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, le total des crédits
ouverts à la fin de 2011 s’est élevé à 4,57 M€, dont 1,71 M€ au titre des
aides exceptionnelles aux sinistrés et aux agriculteurs et 2,86 M€ pour des
dépenses d’investissement.
A - Les conséquences financières pour les communes et
les départements
1 -
Les collectivités départementales
En déduisant les subventions particulières de l’Union Européenne
(FSUE, FEDER), de l’Etat (ex : MOUS, programme 122 cf. infra) ou
d’organismes publics nationaux (ex : ANAH), ainsi que les dons perçus
de particuliers et les indemnités d’assurance, le coût net final de la crise
s’élève
sur
2010-2011
pour
les
départements
à
6,5 M€
en
Vendée, 15,8 M€ en Charente-Maritime, et 25 M€ dans le Var, sans
compter les investissements qui restent à programmer dans les années à
venir.
Pour les collectivités départementales, les deux crises ont pesé sur
leurs investissements, notamment pour financer les travaux d’urgence et
remettre en état la voirie et les bâtiments départementaux. Il serait
souhaitable
que
les
choix
faits
dans
les
programmes
futurs
d’investissement
prennent
pleinement
en
compte
les
risques
d’inondations.
2 -
Les communes et les intercommunalités
Pour les communes, la charge nette par habitant (dépenses
supplémentaires moins indemnités et subventions reçues) a été nulle ou
très faible (moins de 150 €) dans le Var et en Charente-Maritime. Elle est
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170
COUR DES COMPTES
comprise entre 150 et 250 € dans les trois communes de Sud-Vendée.
Lorsqu’il s’est avéré nécessaire, l’ajustement s’est le plus souvent opéré
par un redéploiement des investissements. D’autres communes ont
préféré recourir davantage à l’emprunt. La Faute-sur-Mer a relevé ses
taux d’imposition.
Pour les communes ou intercommunalités de surface financière
plus importante, les dépenses d’investissement supplémentaires ne sont
pas négligeables (en 2010-2011, Draguignan 7,4 M€, communauté
d’agglomération Dracénoise 3,2 M€, La Rochelle 9,9 M€) mais
l’ajustement budgétaire s’est opéré sans difficultés majeures du fait des
recettes supplémentaires (indemnités d’assurance, subventions de l’Etat,
des autres collectivités locales et de l’Europe).
A La Faute-sur-Mer et L’Aiguillon-sur-Mer, Xynthia a détérioré
l’équilibre budgétaire de manière limitée compte tenu notamment des
dons, des subventions reçues et des indemnités d’assurance. Le coût net
fin 2011 s’élève à 0,15 M€ à La Faute-sur-Mer et 0,58 M€ à L’Aiguillon-
sur-Mer, hors impact du rachat de maisons par l’Etat.
Celui-ci a des conséquences non négligeables pour La Faute-sur-
Mer (recettes fiscales 2011 à taux constant en diminution de 13 %
environ par rapport à celles de 2010) et pour Charron (diminution de
2010 à 2012 de 17 % et 12,5 % des bases de taxe d’habitation et de taxe
foncière sur les propriétés bâties). Ces données ne sont pas en outre
définitives puisque des biens immobiliers restent à exproprier. La
situation limite la marge de manoeuvre de ces deux communes dans les
années à venir.
B - L’indemnisation des collectivités locales par l’Etat
1 -
Le dispositif
Les dommages subis sur les biens non assurables des collectivités
locales sont subventionnés par l’Etat au titre du programme 122
« concours spécifiques et administration » au sein de la mission
« relations avec les collectivités territoriales ».
Pour Xynthia et le Var, la liste des opérations éligibles a été
étendue aux digues avec une maîtrise d’ouvrage de la collectivité, aux
circulations « douces » et aux équipements touristiques et de loisirs, y
compris à des espaces naturels à remettre dans leur état antérieur (plages,
cordons dunaires, etc.). La liste comprend notamment la remise en état
d’un cimetière (Trans-en-Provence), des pistes de défense de la forêt
contre l’incendie (DFCI), des stades et des terrains de camping. La
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LES
INDEMNISATIONS :
TRES
COMPLETES
MAIS
AVEC
DES
INCOHERENCES
171
circulaire du 7 octobre 2011 récapitule ces nouvelles règles en matière de
biens éligibles.
Il serait souhaitable que la définition des biens indemnisables soit
stabilisée. Une réflexion mérite par ailleurs d’être engagée entre l’Etat et
les collectivités locales sur la possibilité d’accroître le nombre de biens
assurés lorsque cela est possible.
2 -
Les dommages et les subventions versées
Sur le littoral atlantique, les dommages éligibles au programme
122 (y compris les travaux de phase 2 sur les digues, mais non ceux de
phase 1, financés directement par l’Etat sur les crédits d’urgence, et non
ceux de phase 3) s’élèvent à 86,5 M€, dont 50 M€ en Charente-Maritime
et 24,9 M€ en Vendée. L’essentiel est dû à la submersion marine, les
dégâts sur les équipements publics non assurés liés au vent étant limités
(7,7 M€, dont 5,9 M€ en Vendée et 1,6 M€ en Charente-Maritime).
Pour 2010-2011, et pour un montant de travaux de 24,4 M€, les
autorisations d’engagement et les crédits de paiement ouverts se montent
en Vendée à 9,3 M€ et 5,3 M€ (7,8 M€ d’autorisations d’engagement
(AE) engagés et
4,2 M€ de crédits de paiement mandatés fin 2011). Les
taux de subvention sur les biens hors protection varient de 10 %
(équipements portuaires) à 25 % (voirie, réseaux). Toutefois, ce dispositif
semble rencontrer des exceptions : les dommages de la voirie de La
Faute-sur-Mer sont indemnisés à 22,5 %, alors que partout ailleurs le taux
de 25 % s’applique, et les dégâts de pontons à La Faute-sur-Mer sont
couverts à 25 % tandis que les équipements portuaires des autres
collectivités le sont à 10 %. Le souci d’éviter un sur-financement peut
constituer une explication, pas pleinement convaincante cependant.
En Charente-Maritime, les autorisations d’engagement et les
crédits de paiement ouverts sur 2010-2011 se montent respectivement à
17 M€ et 9,6 M€ (12,9 M€ d’AE engagés et 7,6 M€ de crédits de
paiement mandatés fin 2011).
Pour le Var, plus de 17,7 M€ d’AE
87
et 12,5 M€ de crédits de
paiement ont été ouverts en 2010-2011 pour 50 collectivités. Sur la base
d’un premier recensement effectué fin août 2010, des avances à hauteur
de 2,3 M€ ont été versées à 25 collectivités. Fin 2011, 17,6 M€
d’autorisations d’engagement ont été engagés et 5,5 M€ de crédits de
paiement mandatés.
87
23,7 M€ en intégrant l’annonce par le Président de la République de crédits
supplémentaires à hauteur de 6 M€. La délégation d’autorisations d’engagement est
arrivée en préfecture le 5 avril 2012.
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172
COUR DES COMPTES
L’écart d’évaluation des biens considérés comme non assurables
des départements de la Vendée et de la Charente-Maritime témoigne
d’une absence de critères suffisamment précis pour ce type d’estimation,
ce que la circulaire de 2011 devrait à l’avenir régler. La différence de
taux de subvention sur certains équipements, non liée à la richesse de la
commune, reste difficilement compréhensible.
3 -
L’enlèvement et le traitement des déchets
Pour ce genre de catastrophe, le nettoyage, l’enlèvement et le
traitement des déchets constituent des actions indispensables. En Sud-
Vendée, leur enlèvement par le syndicat mixte départemental a généré un
coût supplémentaire limité (0,01 M€, pour l’essentiel des frais de
personnel). Le coût de traitement sur les trois communes étudiées s’est
élevé à 0,4 M€. En Charente-Maritime, le coût global s’est élevé 1 M€.
Dans le Var, les opérations de nettoyage et d’enlèvement des
embâcles et des déchets divers ont eu des coûts plus élevés (2,8 M€),
mais, contrairement à Xynthia, ont été aidées par l’Etat. 2,2 M€ ont été
versés au titre des crédits d’extrême urgence du programme 128 par la
direction chargée de la sécurité civile au ministère de l’intérieur, direction
générale de la sécurité civile et de la gestion des crises, ce qui laisse un
coût net de 0,6 M€ à la charge des collectivités locales.
Si l’aide de l’Etat à l’enlèvement des déchets dans le Var peut
apparaître logique compte tenu du coût élevé de ces actions, leur prise en
charge sur des crédits d’extrême urgence de la sécurité civile est plus
discutable. La nouvelle circulaire d’octobre 2011 prévoit explicitement
que le programme 122 peut dorénavant financer ces opérations, ce qui
devrait dans l’avenir constituer la règle.
__________
CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
________
Le système d’indemnisation est très complet, mais il a souffert
d’incohérence,
en
particulier
des
différences
de
méthode
peu
compréhensibles pour les victimes, des difficultés de procédure pour les
rachats de biens immobiliers et d’un manque de coordination de certains
dispositifs. Il serait souhaitable que ses dispositions soient, dans ses
grandes lignes, davantage définies à l’avance.
C’est pourquoi la Cour et les chambres régionales des comptes
formulent les recommandations suivantes :
Pour l’Etat
4.1 élaborer un guide définissant les modalités d’aides directes
aux victimes ;
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INDEMNISATIONS :
TRES
COMPLETES
MAIS
AVEC
DES
INCOHERENCES
173
4.2 fixer à l’avance le mode de pilotage et de mise en oeuvre des
indemnisations, avec une collectivité locale coordinatrice ;
4.3 fusionner les deux procédures existantes pour le rachat
amiable de biens immobiliers dans des situations d’extrême danger en
précisant leurs modalités et en les faisant respecter strictement, en
particulier au regard de l’autorisation de construire ;
4.4 faire en sorte que les aides de l’Etat attribuées aux communes
à la suite de ce genre de crise soient définies davantage en fonction des
situations budgétaires réelles ;
Pour les collectivités territoriales et l’Etat :
4.5 conduire une réflexion conjointe sur l’accroissement de
l’assurance des biens propriétés de ces collectivités ;
4.6 améliorer la lisibilité et l’efficacité du dispositif d’aides aux
agriculteurs en réduisant le nombre des différentes procédures et de
guichets utilisées.
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Conclusion
La submersion marine provoquée par la tempête Xynthia et les
inondations du Var de 2010 ont été de terribles catastrophes. Leur bilan
humain est dramatique : 64 personnes ont perdu la vie, deux ont été
portées disparues, des centaines d’autres ont été blessées, ont perdu leurs
maisons et tous leurs biens. Leur bilan financier apparaît très lourd, près
de 660 M€ de crédits publics et plus de 1,3 Md€ d’indemnités des
assurances, dont 640 M€ pris en charge par le régime d’assurance des
catastrophes naturelles qui bénéficie de la garantie de l’Etat. Plusieurs
initiatives ont été prises pour en tirer les leçons, à partir de ce qui a été
indiqué dans les rapports parlementaires et de retours d’expériences.
Face aux carences des dispositifs de vigilance, d’alerte et de
secours, des progrès ont été accomplis depuis ces crises, mais il reste
beaucoup à faire, en particulier pour disposer d’un réseau d’alerte de la
population
performant.
Pour
les
secours,
plusieurs
situations
insatisfaisantes subsistent, comme la localisation de locaux des services
départementaux d’incendie et de secours en zone inondable ou la
planification des moyens aériens. S’agissant de l’indemnisation, le
dispositif s’est révélé très complet, mais parfois peu cohérent ou mal
coordonné.
L’application de la décision de l’Etat, dans le cas de Xynthia,
d’acheter un nombre important d’habitations dans les zones les plus
dangereuses suscite de nombreuses observations. Le caractère précipité
des premières décisions a entraîné de lourdes conséquences, avec des
approximations,
des
compromis,
voire
des
transgressions
de
la
règlementation, et au bout du compte des dépenses se révélant
redondantes ou inutiles. L’importance des dépenses a montré le coût des
négligences voire des irrégularités constatées en matière d’urbanisme.
Le plus sage pour la protection des vies humaines et le moins
coûteux pour les deniers publics serait d’empêcher les constructions dans
des zones à risque fort non encore urbanisées. Face à la volonté de
construire des populations, volonté relayée, voire encouragée, par leurs
élus et les promoteurs immobiliers, l’Etat s’était montré souvent faible
dans son action de prévention, comme le montrent les trop nombreux
exemples analysés dans le présent rapport.
La volonté nouvelle qui se fait
jour dans ce domaine devra impérativement être complétée et prolongée
dans la durée, sur la base d’un pilotage national.
Pour le bâti existant, la définition d’une stratégie reste à établir. Un
effort a été accompli en urgence pour réparer et consolider les ouvrages
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COUR DES COMPTES
de protection contre la mer dans les zones littorales et le plan submersions
rapides conduira à de nouveaux travaux plus ambitieux. Mais il faut
rendre cohérentes les priorités, en privilégiant les zones les plus
dangereuses du littoral, et en choisissant la méthode la plus efficace.
S’agissant des digues, leur entretien, et donc leur fiabilité, ne seront
assurés que si des responsables clairement identifiés les prennent en
charge, mais la question de leur gouvernance n’est pas réglée.
Dans le Var, la défaillance de la gouvernance est également criante
en ce qui concerne les rivières, qui, n’étant pas domaniales, appartiennent
selon la loi à des riverains dans l’incapacité financière et matérielle de les
entretenir. La mise en place indispensable d’une stratégie globale à
travers un programme d’actions de prévention des inondations ne doit pas
empêcher de prendre des mesures plus urgentes avant son aboutissement.
Conformément à la directive cadre européenne de 2007, une
stratégie nationale face aux risques d’inondation doit être définie, en
particulier dans les territoires à risque important. C’est en effet une
stratégie cohérente, avec des mesures adaptées à chaque zone de risque, et
l’organisation ainsi que les moyens correspondants, qui permettront de
progresser.
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Récapitulation des recommandations
Sur l’alerte
Pour L’Etat :
1.1 donner une cohérence d’ensemble aux mesures prises par les
communes en matière d’alerte, en articulation avec le futur système
d’information et alerte des populations (SAIP) ;
1.2
formaliser la coordination pour la prévision des submersions
marines ;
1.3 mettre à jour sans délai les schémas de couverture des risques
(SDACR) et les plans de secours (ORSEC) dans les départements les plus
à risque ;
1.4 mettre en place une planification a priori de l’intervention des
moyens aériens nationaux ;
Pour les conseils généraux et les services départementaux
d’incendie et de secours dans les zones concernées :
1.5 supprimer ou relocaliser dans les meilleurs délais les centres de
secours situés en zone inondable ;
Pour les communes dans les zones concernées :
1.6 mettre au point et actualiser régulièrement leur plan communal
de sauvegarde ;
1.7 compléter leur système d’alerte, y compris sur une base
intercommunale lorsque cela est nécessaire ;
Sur la prévention en matière d’urbanisme
Pour l’Etat :
2.1 arrêter la stratégie nationale des risques d’inondation imposée
par la loi « Grenelle 2 » et appliquer la directive européenne relative aux
inondations, en respectant les délais fixés ;
2.2 veiller, dans l’application de la directive européenne, à ce que
l’évolution des instruments existants ne retarde pas la mise en place
urgente des dispositifs décidés après les catastrophes de 2010 ;
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COUR DES COMPTES
2.3 faire assurer la diffusion complète des cartes relatives aux
risques et relancer le dispositif « information des acquéreurs et
locataires » ;
2.4 faire aboutir dans le délai prévu les plans prioritaires de
prévention des risques ;
2.5 conduire les communes à disposer de documents d’urbanisme
actualisés, au besoin en fixant par la voie législative une obligation en la
matière ;
2.6 soutenir l’administration préfectorale
pour un contrôle de
légalité efficace sur les décisions d’urbanisme des collectivités locales ;
2.7 instaurer un pilotage national, avec des objectifs et des
remontées régulières d’informations de l’autorité préfectorale, sur les
dispositifs les plus sensibles, comme l’établissement et la diffusion de la
cartographie des risques, l’aboutissement des plans de prévention,
l’actualisation du dispositif « information des acquéreurs et locataires » ;
Pour les communes et intercommunalités :
2.8 arrêter les DICRIM et bien informer les habitants sur les
risques, selon les dispositions légales ;
2.9 apporter à l’autorité préfectorale une contribution positive pour
l’adoption rapide des plans de prévention ;
2.10 remplacer les POS obsolètes, particulièrement là où existent
des risques, par des documents d’urbanisme de nouvelle génération ; faire
aboutir les SCOT ;
Sur la protection dans les zones bâties :
Pour les collectivités territoriales et l’Etat :
3.1 déplacer ou, si c’est possible, adapter à la situation les
caractéristiques des bâtiments de service public en zone inondable ;
3.2 veiller à la stricte application de la règlementation des
campings ;
Pour l’Etat :
3.3 identifier précisément les zones dangereuses sur l’ensemble du
littoral et les traiter dans des délais rapides ;
3.4 faire contribuer les collectivités locales au rachat de biens
immobiliers dans des situations d’extrême danger ;
3.5 engager, après établissement du bilan de l’action des préfets en
matière de gouvernance des digues et des rivières, les modifications
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RECAPITULATIF DES RECOMMANDATIONS
179
législatives nécessaires. Veiller à la mise en place des financements et à la
continuité de l’effort ;
3.6 faire déboucher la réforme du régime catastrophes naturelles
dans les meilleurs délais, en particulier pour la modulation des primes
pour les entreprises et l’exclusion des biens construits sans base
règlementaire ;
Sur le système d’indemnisation :
Pour l’Etat
4.1 élaborer un guide définissant les modalités d’aides directes aux
victimes ;
4.2 fixer à l’avance le mode de pilotage et de mise en oeuvre des
indemnisations, avec une collectivité locale coordinatrice ;
4.3 fusionner les deux procédures existantes pour le rachat amiable
de biens immobiliers dans des situations d’extrême danger en précisant
leurs modalités et en les faisant respecter strictement, en particulier au
regard de l’autorisation de construire ;
4.4 faire en sorte que les aides de l’Etat attribuées aux communes à
la suite de ce genre de crise soient définies davantage en fonction des
situations budgétaires réelles ;
Pour les collectivités territoriales et l’Etat :
4.5 mettre en place une réflexion conjointe de l’assurance des
biens propriétés de ces collectivités ;
4.6 améliorer la lisibilité et l’efficacité du dispositif d’aides aux
agriculteurs en réduisant le nombre des procédures et de guichets utilisés.
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Liste des sigles
ACSÉ
Agence nationale pour la cohésion sociale et l’égalité
des chances
ADPC
Association départementale de protection civile
ADS
Application du droit des sols
AFPCN
Association
française
pour
la
prévention
des
catastrophes naturelles
ANAH
Agence nationale pour l’amélioration de l’habitat
ANTARES
Adaptation nationale des transmissions aux risques et
aux secours (réseau de télécommunication de la
sécurité civile française)
AP/CP
Autorisation de programme / crédit de paiement
APIC
Avertissement sur les pluies intenses au niveau
communal
ARS
Agence régionale de santé
ASA
Association syndicale autorisée
ASLV
Association syndicale de la vallée du Lay
ASMF
Association syndicale des marais de La Faute
ATFV
Avis de très fortes tempêtes
AZI
Atlas des zones inondables
BLS
Bateaux légers de sauvetage
BOP
Budget opérationnel de programme
CA
Communauté d’agglomération
CAD
Communauté d’agglomération dracénoise
CCAS
Centre communal d’action sociale
CAF (1)
Capacité d’autofinancement brute
CAF (2)
Caisse d’allocations familiales
CC
Communauté de communes
CCI
Chambre de commerce et d’industrie
CCR
Caisse centrale de réassurance
CDIF
Centre des impôts fonciers
CEMAGREF
Centre d'étude du machinisme agricole, du génie rural,
des eaux et forêts
CEPRI
Centre européen de prévention du risque d’inondation
CEST
Contrat exceptionnel de solidarité territoriale
CET
Contribution économique territoriale
CETE
Centre d'études techniques de l'équipement
CETMEF
Centre d'études techniques maritimes et fluviales
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182
COUR DES COMPTES
CGCT
Code général des collectivités territoriales
CGEDD
Conseil
général
de
l'environnement
et
du
développement durable
CGI (1)
Centre de gestion des interventions
CGI (2)
Code général des impôts
CGPPP
Code général de la propriété des personnes publiques
CIADT
Comité
interministériel
d’aménagement
et
du
développement du territoire et d’attractivité régionale
CIS
Centre d’incendie et de secours
CM
Charente-Maritime
CMA
Chambre des métiers et de l’artisanat
CNAA
Comité national de l’assurance en agriculture
CNDS
Centre national de développement du sport
CNE
Commune
CNSC
Conseil national de sécurité civile
COD
Centre opérationnel départemental (préfecture)
CODERST
Conseil départemental de l'environnement et des
risques sanitaires et technologiques
CODIS
Centre opérationnel départemental d'incendie et de
secours (SDIS)
COGIC
Centre opérationnel de gestion interministérielle des
crises
COPOLEN
Coordination des polices de l’environnement
COS
Commandement des opérations de secours
COZ
Centre opérationnel de zone
CPER
Contrat de projets Etat-région
CPL
Commission de protection du littoral
CRC
Chambre régionale des comptes
CS
Centre de secours
CSP
Centre de secours principal
CYPRES
Centre d’information pour la prévention des risques
majeurs
DCM
Défense contre la mer
DDAF
Direction départementale de l’agriculture et de la forêt
DDE
Direction départementale de l’équipement
DDEA
Direction départementale de l’équipement et de
l’agriculture
DDRM
Dossier départemental sur les risques majeurs
DDTM
Direction départementale des territoires et de la mer
DFCI
Défense de la forêt contre l’incendie
DGALN
Direction générale de l'aménagement, du logement et
de la nature
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LISTE DES SIGLES
183
DGCCRF
Direction
générale
de
la
concurrence,
de
la
consommation et de la répression des fraudes
DGCL
Direction générale des collectivités locales
DGF
Dotation globale de fonctionnement
DGFiP
Direction générale des finances publiques
DGSCGC
Direction générale de la sécurité civile et de la gestion
des crises
DGPR
Direction générale de la prévention des risques
DICRIM
Document d'information communal sur les risques
majeurs
DIG
Déclaration d’intérêt général
DIREN
Direction
régionale de
l’environnement
(devenu
DREAL)
DNID
Direction nationale des interventions domaniales
DPM
Domaine public maritime
DUP
Déclaration d’utilité publique
EAA
École d’application de l’artillerie
EALAT
École d’application de l’aviation légère de l’armée de
terre
EHPAD
Établissement d'hébergement pour personnes âgées
dépendantes
ENTPE
École nationale des travaux publics de l'État
EPCI
Établissement public de coopération intercommunale
EPF
Établissement public foncier
EPF PC
Établissement public foncier de Poitou-Charentes
EPRI
Évaluation préliminaire des risques
ETPT
Équivalent temps plein travaillé
FAC
Fonds d’allègement des charges
FARU
Fonds d’aide au relogement d’urgence
FC TVA
Fonds de compensation de la TVA
FEADER
Fonds européen agricole pour le développement rural
FEDER
Fonds européen de développement régional
FFSA
Fédération française des sociétés d’assurance
FIJ
Formation inter-juridiction
FISAC
Fonds d’intervention pour les services, l’artisanat, et
le commerce
FIU
Fonds d’intervention d’urgence
FNGCA
Fonds national de garantie des calamités agricoles
FNRGRA
Fonds de gestion nationale des risques en agriculture
FORMISC
Formation militaire de la sécurité civile
FPRNM
Fonds de prévention des risques naturels majeurs
FRIL
Fonds régional d’intervention locale
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184
COUR DES COMPTES
FSUE
Fonds de solidarité de l’Union européenne
GEMA
Groupement des entreprises mutualistes d’assurance
GFE
Groupement foncier agricole
HLL
Habitation légère de loisir
IAL
Information des acquéreurs et des locataires
IDSC
Inspection de la défense et de la sécurité civiles
IGA
Inspection générale de l’administration
IGF
Inspection générale des finances
IGN
Institut géographique national
IHTS
Indemnités horaires pour travaux supplémentaires
INSEE
institut national de la statistique et des études
économiques
ISF
Impôt de solidarité sur la fortune
LNHE
Laboratoire national d'hydraulique et environnement
LPO
Ligue pour la protection des oiseaux
MCP
Mission de coordination et de pilotage des services de
l’Etat
MEDDAT
Ministère de l''écologie, du développement durable, de
l'aménagement du territoire
MEDDTL
Ministère de l'écologie, du développement durable,
des
transports
et
du
logement
MEEDDM
Ministère
de
l’écologie,
de
l'énergie,
du
développement durable et de la mer
MOUS
Maîtrise d’oeuvre urbaine et sociale
MSA
Mutualité sociale agricole
NGF
Nivellement général de la France
ONEMA
Office national de l’eau et des milieux aquatiques
ONF
Organisme national des forêts
ORSEC
Organisation de la réponse de la sécurité civile
PACA
Provence-Alpes Côte d’Azur
PACT
Propagande et action contre les taudis
PAPI
Programme d'actions de prévention des inondations
PC
Poitou-Charentes
PCS
Plan communal de sauvegarde
PEC MSA
Prise en charge de la mutualité sociale agricole
PGRI
Plan de gestion des risques inondations
PIG
Projet d’intérêt général
PHE
Plus hautes eaux
PLU
Plan local d'urbanisme
POS
Plan d'occupation des sols
PPI
Plan particulier d’intervention
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LISTE DES SIGLES
185
PPR
Plan de prévention des risques naturels prévisibles
PPRI
Plan de prévention des risques d’inondations
PPRL
Plan de prévention des risques littoraux
PPRN
Plan de protection des risques naturels
PRV
Point de rassemblement des victimes
PSR
Plan de submersion rapide
PSS
Plan de secours spécialisé
RETEX ou REX
Retour d’expérience
RGE
Référentiel à grande échelle
RGPP
Révision générale des politiques publiques
RIC
Règlement de surveillance, de prévision et de
transmission de l’information sur les crues
RHyTMME
Risques
hydrométéorologiques
en
territoire
de
montagne et méditerranéen
SAGE
Schéma
d'aménagement
et
de
gestion
des eaux
SAIP
Système d'alerte et d'information des populations
SARL
Société à responsabilité limitée
SCHAPI
Service central d’hydrométéorologie et d’appui à la
prévention des inondations
SCI
Société civile immobilière
SCOT
Schéma de cohérence territoriale
SDACR
Schéma départemental d'analyse et de couverture des
risques
SDAGE
Schéma directeur d’aménagement et de gestion des
eaux
SDHOP
Surface développée hors oeuvre pondérée
SDIS
Service départemental d’incendie et de secours
SDPC
Schéma directeur de prévision des crues
SGAR
Secrétariat général à l’action régionale
SHOM
Service hydrographique et océonographique de la
marine
SIACIA
Syndicat intercommunal pour l’aménagement du
cours inférieur de l’Argens
SIAHC
devenu
SIEAHGC
Syndicat intercommunal d’aménagement hydraulique
du bassin versant du Curé
SIAN
Syndicat
intercommunal
d’aménagement
de
la
Nartuby
SIDPC
Service interministériel de défense et protection civile
SIEAHGC
Syndicat intercommunal d’études, d’aménagement et
de gestion hydraulique du Curé
SIG
Système d’information géographique
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COUR DES COMPTES
SIVU
Syndicat intercommunal à vocation unique
SMACL
Société d’assurance mutuelle à cotisations fixes
SMICTOM
Syndicat mixte de collecte et de traitement des ordures
ménagères
SMMP-BL
Syndicat mixte du Marais Poitevin, bassin du Lay
SMMP / SMMP-
VSA
Syndicat mixte du marais poitevin, bassins de la
Vendée, de la Sèvre et des Autizes
SNA
Système national d’alerte
SNSM
Société nationale de sauvetage en mer
SPC
Service de prévision des crues
SRHML
Service des ressources humaines, des moyens et de la
logistique
SYNHA
Syndicat mixte de coordination hydraulique du Nord
Aunis
TGAP
Taxe générale sur les activités polluantes
TGN
Tempête-grêle-neige
TH
Taxe d’habitation
TP
Taxe professionelle
TRI
Territoire à risque important d’inondation
TRIVALIS
Syndicat mixte départemental d'étude et de traitement
des
déchets
ménagers et assimilés en Vendée
UIISC
Unités d'instruction et d'intervention de la sécurité
civile
UNIMA
Union des marais de la Charente-Maritime
ZA
Zone d’activités
ZAC
Zone d’aménagement concerté
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RÉPONSES DES
ADMINISTRATIONS, DES
ORGANISMES ET DES
COLLECTIVITES CONCERNES
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SOMMAIRE
Ministre de l'égalité des territoires et du logement et ministre de l'écologie,
du développement durable et de l'énergie
193
Ministre de l’intérieur
200
Ministre de l'agriculture et de l'agroalimentaire
202
Directeur du conservatoire du littoral
205
Président-directeur général de Météo-France
206
Présidente-directrice générale de la caisse centrale de réassurance
209
Co-Président d'ARTELIA
210
Président du conseil administration EGIS International
211
Président du conseil supérieur du notariat
212
Département de la Charente-Maritime
Présidente de la région Poitou-Charentes
213
Préfète de la Charente-Maritime
215
Directeur de l'administration pénitentiaire, ancien préfet de la Charente-
Maritime (2008-2011)
221
Président du conseil général de la Charente-Maritime
222
Maire d'Aytré
226
Maire de Saint-Trojan-les-Bains
227
Maire de Saint-Pierre d'Oléron
228
Maire de La-Flotte-en-Ré
229
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190
COUR DES COMPTES
Maire de La Rochelle
230
Maire de Saint-Georges-d’Oléron
231
Maire de Châtelaillon-Plage
232
Maire de Loix
233
Maire d'Yves
234
Maire de Port des Barques
235
Maire de Fouras-les-Bains
236
Ancien maire de Charron
237
Président du syndicat intercommunal d'études, d'aménagements et de
gestion hydraulique du Curé
238
Président du syndicat intercommunal du Littoral Yves-Chatelaillon
239
Président du syndicat mixte de l'
union des marais de la Charente-
Maritime
240
Président du syndicat mixte du marais Poitevin
241
Président du SDIS
242
Anciens propriétaires du restaurant « La suite »
243
Département de la Vendée
Préfet de la Vendée
245
Préfet du Finistère, ancien préfet de la Vendée (janvier 2010 – janvier
2012)
249
Directeur général des services de la région Rhône-Alpes, ancien préfet de
la Vendée (juillet 2007 - janvier 2010)
250
Préfet de la région Franche-Comté, préfet du Doubs, ancien préfet de la
Vendée (janvier 2005 – juillet 2007)
251
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REPONSES DES ADMINISTRATIONS, DES ORGANISMES ET DES
COLLECTIVITES CONCERNES
191
Ancien préfet de la Vendée (juillet 2002 - janvier 2005)
252
Présidente du conseil régional des Pays de la Loire
253
Président du conseil général de Vendée
256
Ancien président du conseil général de la Vendée
257
Maire de la Tranche-sur-Mer
258
Maire de L'Aiguillon-sur-Mer
259
Maire de la Faute-sur-Mer et adjointe à l'urbanisme
260
Président de l'association syndicale
de la Vallée du Lay
269
Président de l'association syndicale des marais de La Faute-sur-Mer
270
Président du SDIS de la Vendée
272
Gérante du restaurant L'Oasis
273
Département du Var
Préfet du Var
274
Préfet de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, préfet des Bouches-du-
Rhône, ancien préfet du Var (juin 2009 - octobre 2010)
276
Directeur général de l'agence régionale de santé du Centre, ancien préfet
du Var (juillet 2007- juin 2009)
277
Préfet du Val-de-Marne, ancien préfet du Var (juillet 2007-juin 2009)
278
Président du conseil général du Var
279
Président de la communauté d'agglomération dracénoise
280
Maire de Draguignan
282
Maire de Fréjus
286
Maire de Trans-en-Provence
289
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COUR DES COMPTES
Maire de La Motte
290
Maire du Muy
291
Maire des Arcs-sur-Argens
292
Maire de Roquebrune-sur-Argens
293
Maire de Chateaudouble
294
Président du Syndicat Intercommunal d’Aménagement de la Nartuby
301
Ancien président du Syndicat Intercommunal d’Aménagement de la
Nartuby
301
Président du SDIS du Var
302
Président-directeur général de ROXIM
303
Administrations, collectivités et organismes n’ayant pas répondu
305
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REPONSES DES ADMINISTRATIONS, DES ORGANISMES ET DES
COLLECTIVITES CONCERNES
193
REPONSE DU MINISTRE DE L’EGALITE DES TERRITOIRES ET DU
LOGEMENT ET DU MINISTRE DE L’ECOLOGIE, DU
DEVELOPPEMENT DURABLE ET DE L’ENERGIE
Une présentation des principaux axes d'actions de l'Etat en matière de
prévention des inondations et quelques observations sur les sujets liés à
l'urbanisme, au regard en particulier des observations et préconisations
faites par la Cour des comptes.
La politique de prévention des inondations
La politique de prévention des inondations fait l'objet d'une action
construite dans la durée par l’Etat, en collaboration étroite avec les
collectivités territoriales, conciliant la gestion globale de l'eau et des
politiques locales d'aménagement et d'urbanisme.
Pour mener une politique efficace de prévention des inondations, tous
les axes de la prévention doivent être développés : amélioration de la
connaissance, vigilance-alerte, maîtrise de l'urbanisation, réduction de
vulnérabilité de l'existant, mise en place ou renforcement d'ouvrages de
protection, information de la population et amélioration de la culture du
risque, organisation de la gestion de la crise pour la mise en sécurité des
personnes et permettre un retour à la normale. Des mesures de
délocalisation peuvent également être conduites lorsque aucune solution de
protection ou de sauvegarde n'est possible techniquement ou financièrement
atteignable.
Il serait en effet déraisonnable de s'appuyer sur un seul axe, par
exemple en ne mettant en oeuvre que des dispositifs de vigilance et d'alerte ou
des dispositifs de protection, car d'une part ceux-ci restent faillibles, d'autre
part les autres axes permettent également de diminuer la vulnérabilité des
territoires et ainsi de les rendre plus résilients. L'action du gouvernement
vise donc à développer l'ensemble de ces champs d'actions.
Les actions réalisées et en cours
Les principales mesures mises en oeuvre par le gouvernement ces
dernières années sont les suivantes :
- L'élaboration de plans de prévention des risques naturels (PPRN)
pour maîtriser l'urbanisation, voire l'interdire, dans les zones à risque. Plus
de 9 000 communes sont d'ores et déjà couvertes par un PPRN approuvé. Le
rythme d'approbation est de 500 communes supplémentaires couvertes par
un PPRN par an. 303 communes de la métropole ont été plus spécifiquement
identifiées pour lesquelles un plan de prévention des risques naturels
littoraux doit être établi en priorité, dans un délai de trois ans. Au 1
er
juin
2012, 229 étaient d'ores et déjà prescrits. De manière générale, dans chaque
région un programme de PPRN prioritaires a été établi, en particulier pour
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COUR DES COMPTES
les crues soudaines de type de celle connue dans le Var. La politique visant à
empêcher les constructions dans des zones à risque fort non encore
urbanisées constitue bien une priorité sur laquelle l'accent a été mis.
- La mise en place d'un système de vigilance crues-inondations sur un
réseau de 23 000 kms de cours d'eau. Les services de prévisions des crues
constituent un réseau resserré de 22 centres (ciblés sur les bassins
hydrologiques), coordonnés par un service national du ministère, le service
central d'hydrométéorologie et d'appui à la prévision des inondations
(SCHAPI). Le réseau est étendu chaque année, en particulier sur les
estuaires ou des cours d'eau à réaction rapide (pour lesquels la prévision est
techniquement difficile).
- Météo France a mis en place en octobre 2011, en partenariat avec le
Service hydrographique et océanographique de la Marine (SHOM), et en lien
avec les ministères chargés de l'écologie et de l'intérieur, la nouvelle
vigilance vagues-submersions marines, concept initié dès 2009 par la
commission sécurité civile de Météo France.
- Le nouveau dispositif d'avertissement pluies intenses observées à
l'échelle communale (APIC), fondé sur l'observation en temps réel des pluies
grâce aux radars, mis en oeuvre par Météo France est opérationnel depuis
début décembre 2011, les préfets incitant dans le même temps les maires à
intégrer ce dispositif dans leurs plans communaux de sauvegarde (PCS).
Plus de 2 500 communes y étaient déjà abonnées fin mars 2012.
- Une convention pluriannuelle entre Météo France et le ministère de
l'écologie vise à rénover et compléter le réseau de radars météorologiques et
l'observation pluviométrique au sol, action nécessaire pour améliorer les
performances des dispositifs de prévision et d'alerte.
- Le plan submersions rapides (PSR) lancé en février 2011, qui,
couplé avec l'appel à projets PAPI (plans d'actions de prévention des
inondations), permet de financer un ensemble d'actions cohérent sur un
territoire et encourage l'émergence de gestionnaires uniques des ouvrages de
protection sur ce territoire. Le plan submersions rapides a bien pour
vocation de constituer un dispositif d'urgence pour augmenter la sécurité des
populations dans les zones de danger. Il est doté de 500 M€ sur 6 ans
(provenant essentiellement du Fonds de prévention des risques naturels
majeurs) qui doit permettre de conforter 1 200 à 1 500 kms de digues. A ce
jour, 19 programmes d'action de prévention des inondations, dont quatre
concernent la Vendée et la Charente-Maritime, ont été retenus pour un
montant total de 296 M€ dont une participation de l'Etat de 103 M€, ce qui
est en ligne avec le rythme de financement prévu. Une vingtaine de projets
sont en cours d'examen pour une décision de financement à l'été.
- Le contrôle de la sécurité des ouvrages de protection a été renforcé :
les effectifs des services de l'Etat ont été portés à 80 personnes contre
30 personnes il y a quelques années (en 2008).
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REPONSES DES ADMINISTRATIONS, DES ORGANISMES ET DES
COLLECTIVITES CONCERNES
195
- Le recensement des digues, tant maritimes que fluviales, est
quasiment finalisé, la ministre de l'écologie a demandé aux préfets, par
circulaire en date du 20 octobre 2011, de finaliser ce recensement et
d'aborder l'étape cruciale d'identification des points à enjeux pour faire
émerger des gestionnaires compétents et des programmes de renforcement.
- Le projet de décret d'application de la loi Grenelle 2 sur la
réglementation des digues et les limites de la responsabilité de leurs
gestionnaires a fait l'objet de consultations approfondies, en particulier avec
les associations de collectivités territoriales, et pourra être adressé au
Conseil d'Etat à l'été 2012. Des réflexions seront également engagées,
pouvant mener à des évolutions législatives, pour créer des services publics
locaux de prévention des inondations s'appuyant sur les collectivités locales
volontaires, et afin d'assurer la gestion pérenne de ces ouvrages de
protection par des maîtres d'ouvrage compétents et de leur permettre de lever
des recettes locales pour assurer le financement de ces ouvrages de
protection.
- Afin d'améliorer l’information préventive et plus particulièrement le
dispositif d’information acquéreur locataire, une mission sera confiée au
Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD)
sur le sujet.
- La nécessité de veiller à la bonne application de la réglementation
sur les campings est bien identifiée au sein du plan submersions rapides et
fera l'objet d'une priorité particulière ces deux prochaines années.
Mise en oeuvre de la directive Inondation et pilotage national
L'ensemble de ces actions s'intègre dans le cadre de la mise en oeuvre
de la directive Inondation. Ainsi les travaux menés ces dernières années pour
identifier les communes devant faire l'objet de PPRN de façon prioritaire ou
de plans d'action vont permettre d'alimenter les plans de gestion des risques
d'inondation demandés par la directive. La directive demande également la
mise en place de stratégies locales à mettre en place pour ces territoires, qui
sont préfigurées par les démarches PAPI.
Il est à noter que les délais pour mener l'évaluation préliminaire des
risques d'inondation ont été respectés. La stratégie nationale de gestion des
risques d'inondation sera arrêtée d'ici mi 2013.
Les actions urgentes décidées en 2010 et traitées dans le cadre du
PSR sont mises en oeuvre sans délais : elles alimentent les futurs plans de
gestion des risques d'inondation (PGRI).
Le pilotage national et local a été également renforcé avec notamment
la mise en place de la commission mixte inondation, commission pluripartite
rattachée au CNE et au COPRNM au niveau national, qui examine et veille à
la cohérence des programmes d'action de prévention des inondations
labellisés, et au sein de laquelle sont discutées les orientations stratégiques et
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196
COUR DES COMPTES
les évaluations de la politique de prévention. Au niveau des bassins, des
instances de concertation sont également mises en place car le relais et
l'implication des acteurs de terrain sont essentiels pour la réussite de cette
politique. Enfin, une nouvelle feuille de route a été adressée aux préfets en
février 2012, leur demandant d'élaborer des stratégies régionales assorties
de
plans
d'actions
départementaux
et
d'en
restituer
régulièrement
l'avancement à l'administration centrale. Les actions prioritaires comme les
PPR, les PAPI, le PSR font l'objet d'un suivi régulier par l'administration
centrale, qui veille aussi à renforcer l'appui technique auprès des services
déconcentrés.
Traitement des zones à risque élevé pour la vie humaine
En ce qui concerne plus spécifiquement les zones où il existe un risque
élevé pour la vie humaine, il s'agit de constater que l'urbanisation de ces
zones a été une erreur qu’il est indispensable de corriger aussi rapidement
que possible, dans le respect des principes fondamentaux portant sur les
libertés individuelles. Dans ce but, la politique s'inscrit dans l'esprit des
articles L. 561-1 et suivants issus de la loi du 30 juillet 2003 relative à la
prévention des risques technologiques et naturels et à la réparation des
dommages. Si aucune solution de protection n'est possible techniquement ou
moins onéreuse, alors la
délocalisation des biens, par acquisition à
l'amiable, puis si nécessaire expropriation, est recherchée. De telles
démarches ont été effectuées par le
passé (Séchilienne, Blois, Gard, Xynthia,
Var), et une opération d'identification spécifique sur le littoral a été lancée
en avril 2010. Elle nécessite des études complémentaires et ces situations
sont actuellement examinées pour remédier aux situations identifiées.
Le rapport de la Cour des comptes souligne bien la difficulté à mettre
en oeuvre ces dispositions, notamment du point de vue de l'acceptabilité par
les personnes concernées. Dans le cas de Xynthia, une approche
effectivement volontairement rapide a été privilégiée afin de pouvoir
apporter dans des délais courts une solution aux personnes et leur permettre
de reconstruire leur cadre de vie quotidien. Dans un premier temps, des
zones d'acquisition à l'amiable ont ainsi été définies. Puis dans un second
temps, sur la base de rapports détaillés du Conseil général de l'écologie et du
développement durable (CGEDD), le périmètre de ces zones a été affiné pour
définir les habitations proposées à la procédure d'expropriation. Les experts
du CGEDD ont pu également mener des entretiens de terrain plus
approfondis avec les services locaux de l'Etat, les élus locaux, et des
sinistrés.
Afin d'apporter une réponse rapide aux personnes concernées tout en
traitant un nombre très significatif de biens, le principe de cette approche, en
déterminant des zones initiales d'acquisition à l'amiable les plus restreintes
possibles, semble rester le plus approprié. Néanmoins, l'expérience de
Xynthia montre que cette approche doit être associée à une communication
claire dès le début de sa mise en oeuvre, vis-à-vis des populations et des élus.
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COLLECTIVITES CONCERNES
197
Ces orientations pourront faire utilement l'objet d'un retour d'expérience
formalisé.
Cette méthode a pu conduire à racheter des maisons qui in fine ne
seront pas dans la zone finale d'expropriation (et inversement à l'étendre à
quelques maisons qui initialement n'étaient pas identifiées dans la zone
d'acquisition à l'amiable). Il n'en reste pas moins que les habitations qui ne
seront finalement pas expropriées restent dans des sites dangereux, soumis à
des risques d'inondation, potentiellement importants pour la vie humaine
dans certains cas, qui entraînent chaque fois des dégâts matériels à
indemniser. Le rachat conserve donc un intérêt en termes de diminution de la
vulnérabilité et a permis de régler des situations individuelles difficiles,
permettant à des victimes de se reconstruire.
La mission confiée dans un deuxième temps au CGEDD visait à
préserver les habitations qui peuvent être protégées, que ce soit par des
protections individuelles ou collectives. Ceci a notamment conduit à retirer
des zones proposées à la procédure d'expropriation les maisons comportant
un étage habitable, considérant que le risque pour la sécurité des personnes
s'en trouvait réduit et pouvait devenir acceptable, au regard des habitants
qui avaient clairement manifesté un désir de rester. En revanche, des espaces
refuges accessibles via des échelles n'ont par exemple pas été acceptés, car
l’expérience montre que si la submersion intervient pendant le sommeil des
personnes, il est alors extrêmement difficile de rejoindre un tel espace refuge
une fois le logement envahi par l'eau. Seuls les étages existants ont été pris
en compte, car il serait inopportun d'augmenter les enjeux dans de telles
zones dangereuses, le rehaussement avec des étages pouvant entraîner une
augmentation de la population au cours du temps. En outre, la loi ne permet
d'imposer (et de les subventionner en partie par le fonds de prévention des
risques naturels majeurs) des travaux prescrits par le règlement d'un PPR
que dans la limite de 10 % de la valeur vénale du bien. Or la construction
d'un étage dépasse largement cette limite.
Une dernière difficulté réside dans l'acceptabilité et la crédibilité de
solutions de protections collectives lorsque certaines sont identifiées pour
sauvegarder des maisons. Car il convient de s'assurer que ces solutions
seront bien mises en oeuvre alors qu'elles reposent sur des maîtres d'ouvrage,
quand ils sont identifiés, qui ne relèvent pas de l’autorité de l'Etat. Il est
nécessaire pour accepter de telles solutions qu'un maître d'ouvrage soit
clairement identifié, soit techniquement compétent et avec une assise
financière permettant de raisonnablement garantir que ces travaux seront
bien effectués et que les ouvrages resteront bien entretenus dans la durée.
Dans certains cas, de telles solutions n'ont pu être assurées qu'à l'issue de
délais assez longs, ce qui conforte la nécessité de mener une expertise plus
approfondie via une mission type CGEDD dans une deuxième phase. Il est à
noter que ces solutions sont très différentes d'un site à l'autre, en fonction de
la topographie, et nécessitent un examen au cas par cas.
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198
COUR DES COMPTES
Enfin, la méthode déployée dans le Var, qui concernait un nombre
potentiel de maisons plus faible, a visé à obtenir directement l'expertise
définitive sur chaque maison. Les délais associés à ces études restent longs et
sont aussi sources de mécontentements pour les habitants concernés, qui
souhaitent généralement connaître au plus vite leur situation. Cette méthode
peut être menée dans le cadre d'un nombre limité de biens potentiellement
concernés.
Observations sur les sujets liés à l'urbanisme
La principale recommandation est de « faire en sorte que les
communes disposent de documents d'urbanisme actualisés, au besoin en
fixant par la voie législative une obligation en la matière ».
II est exact, comme l'indique la Cour, qu'aucune disposition
d'ensemble n'a été prise pour que les communes remplacent les POS
obsolètes, même si diverses dispositions résultant soit du code de
l'urbanisme, soit de mesures incitatives, conduisent à faire évoluer les POS et
à les remplacer progressivement par des PLU.
Cette situation qui voit perdurer des POS, sans autre motif, le plus
souvent, comme indiqué dans le rapport que « la volonté affichée de laisser
se développer une urbanisation diffuse », plus de dix ans après la création
des PLU par la loi Solidarité et renouvellement urbain du 13 décembre 2000,
appelle à l'évidence une réflexion de fond, et nous prenons en conséquence
bonne note sur ce point de la recommandation formulée par la Cour.
La situation concernant les SCOT nous paraît différente, puisque,
d'une part, la loi du 12 juillet 2010 portant Engagement national pour
l'environnement a prévu l'objectif de couverture du territoire français d'ici
2017 de schémas de cohérence territoriaux, et que, d'autre part, les anciens
schémas directeurs seront tous frappés de caducité au 1
er
janvier 2013.
La Cour demande par ailleurs à l'État de « soutenir l'administration
préfectorale pour un contrôle de légalité efficace sur les décisions
d'urbanisme des collectivités locales ».
Le contrôle de légalité a fait l'objet de plusieurs circulaires
(circulaires des 17 janvier 2006, 1
er
septembre 2009, 25 janvier 2012), qui
toutes mentionnent clairement les actes d'urbanismes en zones à risques
comme devant faire l'objet d’une vigilance particulière ; il appartient dès
lors à l’autorité préfectorale, en charge de la mise en oeuvre de ce contrôle
de légalité, de savoir-faire pleinement usage des prérogatives qui lui sont
conférées par la loi.
Nous prenons note à ce sujet de la réflexion rapportée par la Cour et
touchant à l'organisation administrative, selon laquelle le fait que les préfets
pourraient se trouver en charge à la fois de l'instruction des demandes de
permis de construire pour certaines communes et de l'exercice du contrôle de
légalité, pourrait être un des facteurs explicatifs de l'insuffisance du contrôle.
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COLLECTIVITES CONCERNES
199
Concernant le rachat par l'Etat des biens sinistrés, la Cour note que
« l'absence de contrôle systématique de la situation des biens au regard des
règles d'urbanisme (permis de construire ou décision de régularisation) est
regrettable, car elle prive l'Etat d'un instrument de dissuasion des
constructions illégales notamment en zone de grave danger ». On ne peut
bien entendu que souscrire à cette observation même si on ne peut ignorer
par ailleurs la
jurisprudence suivie en matière d'expropriation, au terme de
laquelle, comme le rappelle la Cour, le juge ne tient compte de l'absence de
permis de construire qu'à condition que l'autorité compétente ait engagé une
procédure contre la construction illégale, ce qui n'est possible que dans le
délai de prescription.
Vous trouverez, en outre, en annexe une note factuelle apportant des
précisions sur divers points techniques, dont des actualisations de données
chiffrées, et sur quelques rares points d'interprétation sur lesquels nous ne
sommes pas totalement d'accord avec la Cour. Cette note n'a pas vocation à
être publiée et est à l'usage de la Cour si elle souhaite ajuster son rapport.
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200
COUR DES COMPTES
REPONSE DU
MINISTRE DE L’INTERIEUR
Je souhaite insister plus particulièrement sur les éléments de réponse
suivants.
S'agissant en premier lieu des systèmes d'alerte et de l'organisation
des secours, le préfet de département a la responsabilité de mobiliser les
moyens de secours relevant de l'Etat, des collectivités territoriales et des
établissements publics. La démarche portant sur l'amélioration globale de la
cohérence d'ensemble des mesures prises par chacun des acteurs locaux
impliqués est largement engagée. Elle s'appuiera notamment sur le
déploiement du futur système d'information et d'alerte des populations (SAIP)
dont les premières expérimentations doivent intervenir en 2013, en
articulation avec les systèmes d'alerte existant.
La refonte des schémas de couverture des risques (SDACR) ainsi que
celle des plans de secours (ORSEC) est prévue, mais ne sera optimale qu'à la
condition qu'elle implique la réalisation d'exercices ainsi que la définition et
la formalisation de protocoles.
Il faut rappeler également qu'un travail de clarification doctrinale de
la coordination des moyens aériens est en cours sous la direction du
secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale. Ce travail qui
associe mes services et ceux du ministère de la défense, vise à actualiser
l'instruction interministérielle du 13 janvier 2004 relative à la gestion des
moyens aériens en cas de crise localisée sur le territoire national.
S'agissant, en deuxième lieu, de la prévention des catastrophes, je
tiens à souligner ma détermination à renforcer les outils à disposition des
préfets en vue de garantir une meilleure prise en compte des risques dès
l'élaboration des documents d'urbanisme. A cet égard, la proposition de loi
issue des travaux des sénateurs RETAILLEAU et ANZIANI tendant à assurer
une gestion effective du risque de submersion marine, qui a fait l'objet d'une
première lecture au Sénat le 3 mai 2011, comporte plusieurs mesures visant
à assurer une meilleure articulation entre les documents d'urbanisme et les
plans de prévention des risques.
Par ailleurs, le contrôle de légalité opéré par les préfets sur les
décisions d'urbanisme des collectivités locales fait l'objet d'instructions
précises et régulièrement renouvelées. Ainsi, la circulaire du 17 janvier 2006
avait initié la mise en place de stratégies locales et la définition de catégories
d'actes prioritaires dont les décisions d'urbanisme. Elle a été renforcée par
la circulaire du 1
er
septembre 2009 et plus récemment par celle du 25 janvier
2012.
S'agissant, en troisième lieu, de la protection dans les zones bâties, la
proposition donnant au préfet la faculté d'interdire la délivrance des permis
tacites en zones inondables me paraît intéressante. Cette mesure a d'ailleurs
été incluse dans la proposition de loi précitée.
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COLLECTIVITES CONCERNES
201
A l'inverse, il me paraît difficilement envisageable de faire participer
les collectivités locales au rachat de biens immobiliers, notamment lorsque la
décision de déclaration d'utilité publique relève de l'Etat.
Enfin, j'ai bien noté votre proposition de réformer, au besoin
législativement, le régime de gestion des digues. Des réflexions en ce sens
sont menées par la direction générale de la prévention des risques,
auxquelles mes services sont associés.
S'agissant en dernier lieu des indemnisations, je souscris à la
recommandation de la Cour demandant que soit engagée une réflexion entre
l'Etat et les collectivités territoriales sur l'extension du périmètre des biens
assurés des collectivités.
Je souhaite par ailleurs rappeler que le fonds d'aide au relogement
d'urgence (FARU) a été fortement mobilisé afin d'aider les communes ayant
pris en charge le relogement des sinistrés de la tempête Xynthia et des
inondations dans le Var. Le Parlement a depuis lors décidé de prolonger le
FARU pour cinq années supplémentaires, jusqu'en 2015.
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202
COUR DES COMPTES
REPONSE DU MINISTRE DE L’AGRICULTURE ET
DE L’AGROALIMENTAIRE
Sur l'intervention du fonds national de gestion des risques en
agriculture (FNGRA) dans le cadre de la tempête Xynthia :
Le régime des calamités agricoles vise à indemniser par le biais du
FNGRA les dommages résultant de risques non assurables dus à des
phénomènes
climatiques
exceptionnels.
Par
construction,
les
biens
considérés comme sinistrés au titre de cette procédure ne peuvent donc pas
être assurés. En revanche, il est vrai que, pour être éligibles à la procédure
des calamités agricoles, les exploitants agricoles doivent apporter la preuve
que les éléments principaux de leur outil de production sont assurés.
En ce qui concerne la tempête Xynthia, deux types d'indemnisation ont
été mis en place dans le cadre des calamités agricoles :
le dispositif d'indemnisation « classique » qui recouvre l'ensemble des
pertes de récolte et de fonds habituellement indemnisées dans le cadre des
calamités agricoles. En l'espèce, il s'est agi principalement :
≈
pour les pertes de récoltes, de dommages en maraîchage, viticulture
et arboriculture ;
≈
pour les pertes de fonds, de dommages physiques au sol (nettoyage
des parcelles agricoles, rectification du profil des sols,...) et aux ouvrages
(clôtures, fossés ...).
le dispositif « ad hoc », validé par la Commission européenne, qui ne
couvre que des pertes de fonds. Il s'agit d'une part de compenser les pertes de
potentiel de production des sols submergés par la mer (potentiel
agronomique diminué sur plusieurs années), et d'autre part, de participer
aux frais de traitement au gypse de ces sols afin d'accélérer l'élimination du
sel.
Sur le coût pour l'Etat des indemnisations suite à la tempête Xynthia
et aux inondations dans le Var :
La Cour relève que le coût de la tempête Xynthia pour le secteur
agricole a été nettement plus élevé que celui des inondations dans le Var.
Elle estime que ce constat devrait conduire à une réflexion sur les cultures à
privilégier sur les terres agricoles menacées de submersion marine.
Tout d'abord, les surfaces agricoles concernées pour chacun de ces
deux sinistres sont significativement différentes. En ce qui concerne la
tempête Xynthia, ce sont de l'ordre de 35 000 ha de terres agricoles qui ont
subi des dommages. Pour les inondations dans le Var, seuls 700 ha ont été
sinistrés, soit un rapport de 1 à 50 en termes de surfaces concernées (à
comparer à un rapport de l'ordre de 1 à 10 en termes de dépenses).
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203
Par ailleurs, même s'il s'agit dans les deux cas d'inondations, ces
sinistres demeurent de nature très différente et ne permettent donc pas de
comparaison directe pertinente. En effet, la submersion marine sur les terres
agricoles suite à la tempête Xynthia constitue un événement plus grave
qu'une inondation d'eau douce telle que celle survenue dans le Var.
Au-delà
de
la
question
des
surfaces
concernées
évoquées
précédemment, les inondations marines, si elles ne causent guère davantage
de dommages directs que les inondations d'eau douce, elles ont en revanche
pour spécificité de générer en plus des dommages indirects (dépérissement
des cultures pérennes, diminution du potentiel agronomique des sols
inondés).
Sur l'existence de plusieurs « guichets » concourant à l'indemnisation
des agriculteurs sinistrés :
Concernant les dispositifs mis en place pour la tempête Xynthia et les
inondations du Var, la Cour a observé d'une part, l'existence de plusieurs
guichets, et d'autre part, une certaine lenteur dans le décaissement des aides
mises en place.
Tout d'abord, il faut noter que ces évènements climatiques ont pu
affecter plusieurs filières distinctes au sein du secteur agricole, chacune
connaissant des problématiques spécifiques. Ainsi, dans le cadre de la
tempête Xynthia, trois types de populations (agriculteurs, conchyliculteurs et
saliculteurs) sont concernés avec la nécessité de mettre en place des
dispositifs adaptés pour chacune d'entre elles.
Par ailleurs, en cas d'évènement climatique exceptionnel, pour
assurer la pleine efficacité de l'intervention publique, il est souvent
nécessaire
d'actionner
plusieurs
leviers,
à
la
fois
par
le
biais
d'indemnisations mais aussi d'allègements des charges (financières, sociales,
fiscales). C'est l'ensemble de ces mesures qui permettent de préserver l'avenir
des exploitations sinistrées.
En outre, la mise en oeuvre de ces dispositifs a reposé essentiellement
sur les directions départementales des territoires et de la mer (DDTM).
Celles-ci ont coordonné la mise en oeuvre de ces mesures dans le cadre de
comités de suivi. Elles ont assuré une communication centralisée sur
l'ensemble des mesures auprès des publics concernés, relayée par les
organisations agricoles (en particulier les chambres d'agriculture). Elles
étaient gestionnaires directes de la grande majorité de ces mesures. En
pratique, aucune difficulté particulière n'a été remontée en matière de
méconnaissance ou de difficulté d'accès aux dispositifs mis en place.
En ce qui concerne la vitesse de décaissement des aides mises en
place, il faut noter, concernant la tempête Xynthia, que le paiement des aides
à la compensation des pertes de potentiel de production des sols (dispositif
FNGRA « ad hoc ») a débuté dès la fin juin 2010, soit moins de 4 mois après
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COUR DES COMPTES
la survenance du sinistre, alors que la seule notification d'un dispositif à
l'Union européenne nécessite habituellement environ 6 mois de délai.
Par ailleurs, plus globalement, les constats de la Cour relèvent peut-
être moins d'une lenteur de mise en oeuvre des aides décidées que d'une
différence notable entre prévision et exécution pour les dispositifs mis en
place.
Sur le fond, il faut noter la difficulté technique des estimations de
dommages réalisées généralement dans des délais contraints. De plus, il est
souvent très difficile d'appréhender complètement l'effet de l'ensemble des
critères d'éligibilité des dispositifs d'aides à un moment où, par construction,
aucun agriculteur n'a encore déposé de dossier de demande d'aide.
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205
REPONSE DU DIRECTEUR DU CONSERVATOIRE DU LITTORAL
Je n’en ai que deux à formuler à la lecture de ces documents.
1.
Rachat des biens immobiliers dans la zone des Boucholeurs
(encadré)
Les trois solutions décrites et présentées comme possibles pour établir
une protection contre l’envahissement par la mer ne sont pas équivalentes, ni
sur le plan financier et technique, ni sur le plan de l’évolution hydro-
sédimentaire, ni au regard du rôle propre de la réserve en matière de
protection de la biodiversité, notamment avicole. C’est pourquoi le
Conservatoire qui ne s’oppose pas à l’édification d’une digue sur sa
propriété comme l’indique la Cour, dès lors qu’il n’en est pas constitué
ensuite responsable, souhaite que les solutions possibles soient soumises
préalablement à la Ligue pour la protection des oiseaux, gestionnaire du site,
et au Conseil national pour la protection de la nature.
2.
La protection définitive des zones où les maisons ont été rachetées
La Cour dit que « [seule] la dévolution au Conservatoire du littoral
constituerait une solution offrant le plus de garanties sur le long terme. C’est
pourquoi celle-ci, actuellement envisagée pour certains terrains, est à
recommander, à condition bien sûr qu’il s’agisse de sites cohérents sur les
plans naturel et paysager et en prévoyant des projets de gestion conformes
aux missions de l’établissement ». Je voudrais seulement souligner
l’importance de ces conditions complémentaires que la Cour prend soin, à
juste titre, de mentionner. De leur prise en considération dépendent le
respect de l’objet spécifique de l’établissement et la force même de la
garantie foncière recherchée sur le long terme.
En effet, la mission du Conservatoire s’inscrit plus naturellement et de
manière beaucoup plus profitable lorsqu’il est associé à l’avance à la
conception d’ensemble d’un projet de territoire que s’il devait simplement
être appelé à garantir a posteriori l’inconstructibilité de parcelles sinistrées,
éparses et dégradées. Dans le premier cas, le Conservatoire exerce sa
vocation propre, au bénéfice des populations, de la nature et des paysages –
en résumé, de la qualité du territoire – et contribue effectivement à limiter les
risques à ce titre ; dans le second cas, si la mission spécifique de
l’établissement était méconnue, le moyen (l’acquisition sans retour possible)
risquerait de devenir une fin en soi, un palliatif de circonstance plus ou
moins bien accepté socialement, affaiblissant les fondements de l’action de
l’établissement public.
La proposition finale de la phrase du projet de rapport public citant
ces
importants
paramètres
de
l’opportunité
de
l’intervention
de
l’établissement public est donc indispensable.
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206
COUR DES COMPTES
REPONSE DU PRESIDENT-DIRECTEUR GÉNÉRAL DE MÉTÉO-
FRANCE
Au vu des extraits du rapport public thématique relatif aux
enseignements des inondations de Xynthia et du Var communiqués à
l’établissement public, Météo-France partage assez largement les analyses
de la Cour. Il convient toutefois d’apporter quelques nuances ou précisions
importantes.
Prévision météorologique des événements marqués par des pluies
intenses
En ce qui concerne les pluies intenses, la Cour évoque le nouvel
épisode pluvieux exceptionnel qui est intervenu en novembre 2011 dans le
sud-est de la France. Elle indique que la qualité des prévisions de Météo-
France a permis une meilleure alerte en comparaison de 2010. C’est
l’occasion de revenir sur la forte différence entre les événements de juin
2010 et ceux de novembre 2011. Dans le premier cas, il s’agit d’un
événement de petite échelle, violent et très bref ; dans le second d’un
événement de plus grande échelle, long bien qu’intense. Ils conduisent tous
deux à des précipitations très importantes, mais avec des modalités très
différentes. Le premier se situe encore aujourd’hui à la limite des
connaissances scientifiques en matière de prévision très fine, le second est en
revanche beaucoup mieux maîtrisé. Cela explique la différence dans la
gestion des deux crises et le meilleur préavis constaté dans la seconde. Au
demeurant, la prévision de juin 2010, avec ses limites, était conforme à l’état
de l’art.
La différence dans la prévision entre 2010 et 2011 ne correspond
donc pas à une amélioration réalisée entre les deux années. La prévision très
précise (intensité et localisation) d’un phénomène orageux stationnaire et
très intense tel que celui de juin 2010 reste aujourd’hui encore largement
hors de portée. Ainsi que la Cour le note, Météo-France conduit
d’importants travaux de recherche sur les situations convectives du type de
celle de juin 2010 et espère apporter d’ici quelques années des résultats en
cette matière. Il faut enfin observer que le rôle de service de prévision des
crues assuré par Météo-France dans le sud-est permettra une articulation
étroite entre les progrès en matière météorologique et leur utilisation en
matière d’hydrologie.
Submersions marines
La Cour semble lier l’amélioration à court terme de la prévision des
surcotes à des progrès substantiels des modèles océanographiques côtiers. Il
faut être très prudent sur ce lien. En effet, les modèles de surcote sont eux-
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mêmes déterminés par les modèles atmosphériques (« forçage » de l’un par
les données de l’autre). Or, dans le cas de Xynthia, deux modèles
météorologiques de grande qualité pouvaient donner des prévisions induisant
ensuite une fluctuation de la surcote entre 1 mètre et 1,50 mètre. Les
incertitudes inhérentes aux modèles atmosphériques peuvent donc être
dominantes, ce qui fait qu’aussi précis que soit le modèle côtier, le résultat
final sur la surcote contiendra la part d’incertitude issue du modèle
atmosphérique. Il faut donc avoir conscience que les progrès sur les modèles
océanographiques côtiers, en lien avec la bathymétrie fine, pourraient de ce
fait avoir une utilité limitée tant que les incertitudes sur les modèles
atmosphériques n’auront pas, elles-mêmes, été réduites.
De surcroît, la Cour fait mention d’un potentiel défaut de
coordination entre les acteurs sur le thème de la submersion marine. Ce
constat mérite d’être nuancé. Les études en amont font l’objet d’une
coopération fructueuse entre les divers acteurs. Le partenariat noué entre le
service hydrographique et océanographique de la Marine (SHOM) et Météo-
France en est un exemple parmi d’autres. Concernant la gestion des
avertissements, à l’instar de ce qui se fait pour les crues, l’existence d’une
vigilance vagues submersions offre désormais l’outil approprié pour
coordonner les progrès en la matière avec la prise en compte progressive
dans le dispositif des avancées réalisées pour mieux connaître l’aléa
(prévision) et la vulnérabilité (connaissance du territoire concerné) afin de
définir au mieux l’avertissement associé (déclenchement de la vigilance).
Actions menées par Météo-France pour améliorer la situation
actuelle
Depuis ces événements dramatiques, Météo-France a, en lien avec ses
partenaires, mené deux actions principales : la mise en place de la vigilance
« vagues-submersions », qui a notamment permis de rendre beaucoup plus
visibles pour le public les avertissements relatifs aux surcotes marines, et le
développement du service d’avertissement à destination des communes en
cas de pluies intenses, fondé sur l’observation en temps réel des pluies en
cours par les radars.
Au-delà de ces premières réalisations concrètes, les équipes de
Météo-France sont mobilisées pour améliorer encore les systèmes de
prévision numérique du temps. Cela se traduit par la priorité donnée, dans le
contrat d’objectifs de Météo-France, signé fin 2011, à la recherche (physique
de l’atmosphère, modèles numériques,…) et aux investissements associés
pour la transcrire en avancée opérationnelle (réseau d’observation,
supercalculateur pour les modèles numériques et leurs évolutions). C’est à ce
prix que, sur le long terme, la qualité des prévisions météorologiques
continuera de progresser comme elle l’a fait par le passé (la fiabilité de
prévision a jusqu’ici gagné un jour par décennie, c'est-à-dire que les
prévisions à trois jours sont aussi fiables que l’étaient les prévisions à deux
jours il y a dix ans). Ces progrès, ainsi que la prise en compte du retour
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d’expérience des situations réelles, permettront ainsi d’améliorer la
pertinence des avertissements météorologiques.
Le fonctionnement de la chaîne d’avertissement et d’alerte appelle
également une remarque. Il s’agit de trouver un équilibre, toujours délicat,
entre la fiabilité des avertissements (message d’avertissement adressé à bon
escient) et les fausses alertes. Météo-France s’attache à progresser sur les
deux volets. Il faut avoir conscience qu’une démarche qui majorerait
systématiquement l’avertissement par prudence conduirait à décrédibiliser
ce dernier, ce qui explique pourquoi Météo-France s’efforce de contrôler
strictement le déclenchement de vigilance de couleur orange ou rouge. De ce
point de vue, une vigilance orange constitue déjà un signal d’avertissement
fort pour la population que l’on ne saurait minimiser. Il faut également
préciser que la vigilance, désormais bien connue des Français, est
efficacement relayée par les médias et permet une sensibilisation du public
avant même tout relais par les autorités qui, elles, interviennent en déployant
toute la chaîne d’alerte.
***
En conclusion, Météo-France est convaincu que des marges de
progrès existent, en particulier grâce aux avancées à venir de la recherche et
de l’observation. Cela devrait se traduire par des prévisions plus fiables,
assorties de seuils de probabilité et offrant un appui à la décision encore plus
efficace pour les autorités publiques, gestionnaires de la chaîne d’alerte.
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209
REPONSE DE LA PRESIDENTE-DIRECTRICE GENERALE
DE LA CAISSE CENTRALE DE REASSURANCE (CCR)
J’ai l’honneur de vous faire savoir que je n’ai pas d’observations à
formuler concernant cet extrait.
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210
COUR DES COMPTES
REPONSE DU CO-PRESIDENT D’ARTELIA
Nous n’avons aucune observation à formuler sur l’exposé des faits
nous concernant.
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211
REPONSE DU PRESIDENT DU CONSEIL D’ADMINISTRATION
D’EGIS INTERNATIONAL
En réponse, nous souhaitons que soient prises en considération les
précisions suivantes :
→
veuillez noter que :
. Egis BCEOM International est devenue Egis International
depuis le 1
er
janvier 2011,
. que l’activité Eau de Egis BCEOM International, qui a réalisé le
schéma directeur le lutte contre les inondations de la Garonne,
du
Pédégal
et
du
Valescure
pour
la
Communauté
d’Agglomération, a été apportée en juillet 2007 à la société Egis
Eau, également citée dans le rapport ;
→
il nous semble utile de préciser : « Le risque d’inondation du site
du projet est confirmé »
juste avant le texte « Des travaux y sont
prévus pour mettre hors d’eau la zone du projet » ;
→
il n’est pas fait état dans le rapport de la validation par le
CEMAGREF de l’étude BCEOM (Egis Eau), ce qui semble être le
cas puisque les hypothèses de pluie et de débit pour établir le
dossier du Plan de Prévention des Risques inondation révisé sont
issues des résultats de l’étude.
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COUR DES COMPTES
REPONSE DU PRESIDENT DU CONSEIL SUPERIEUR DU
NOTARIAT
Après une lecture attentive de ce dossier, je vous indique que je n’ai
aucune observation à formuler quant au contenu de ce rapport.
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213
REPONSE DE LA PRESIDENTE DE LA REGION POITOU-
CHARENTE
Les observations de la Cour des comptes reprennent les actions mises
en oeuvre par la région pour venir en aide aux communes, aux personnes et
aux entreprises sinistrées par la tempête. Il est intéressant à ce titre de noter
que la région Poitou-Charentes a consacré plus de 15,3 M€ en affectations,
principalement répartis comme suit :
Soutien à l'activité économique : 5 939 000 €,
Soutien aux collectivités (communes essentiellement) : 2 450 000 €,
Aides aux services publics régionaux : 2 616 000 € + 214 000 € pour
le mode de transport de substitution,
Aides aux personnes sinistrées : 1 660 000 €.
Comme l'ont judicieusement relevé les magistrats chargés du
contrôle, pourrait s'ajouter, au titre de l'engagement humain de la région
Poitou-Charentes, la forte mobilisation de ses personnels en tenant
notamment compte de l'installation d'une cellule régionale de solidarité à
La Rochelle, dans les locaux de l'Agence régionale de la formation, dès le
lendemain de la tempête et maintenue pendant plusieurs semaines auprès des
maires et des populations sinistrées. Plusieurs dizaines d'agents régionaux
ont
ainsi
parcouru
les
37 communes
sinistrées
du
littoral
de
Charente-Maritime pour apporter le soutien et l'écoute de la collectivité
régionale et recueillir l'ensemble des besoins exprimés, tant auprès des élus
que de la population.
Comme cela est évoqué dans le rapport, il convient également
d'insister
sur
la
solidarité
de
l'ensemble
des
représentants
des
administrations publiques pour que les aides régionales parviennent
rapidement aux sinistrés. Ainsi, il faut saluer l'implication particulière du
payeur régional et des payeurs municipaux qui ont été des acteurs essentiels
dans le déploiement des aides aux communes et aux personnes. Il faut
également relever la bonne coordination avec les services de l'État et les
autres collectivités territoriales (le département de Charente-Maritime pour
les aides économiques, les agglomérations de La Rochelle et de Rochefort
ainsi que les communes pour l'aide aux personnes). Les modalités d'actions
que nous avons retenues ont permis cette efficacité de la collaboration entre
les différents acteurs qui pourrait être utilement transposée dans d'autres
situations de crise.
De manière plus générale, dans le cadre d'une réflexion nationale sur
la gestion des risques naturels, la région Poitou-Charentes est disponible
pour apporter son témoignage et ses analyses sur l'action publique telle
qu'elle s'est déployée durant les semaines qui ont suivi la tempête Xynthia.
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COUR DES COMPTES
Les rapports parlementaires du Sénat du 10 juin 2010 sur « Les
conséquences de la tempête Xynthia » et de l'Assemblée nationale du
1
er
juillet 2010 sur « Les raisons des dégâts de la tempête Xynthia », ainsi
que celui de la mission interministérielle de mai 2010 sur « Tempête
Xynthia : retour d'expérience, évaluation et propositions d'action », ont
analysé les causes probables et les conséquences de cette tempête et émis des
propositions d'actions dont il conviendrait d'examiner les conditions de mise
en oeuvre rapidement.
En conclusion, j'insisterai sur 1'efficacité particulière du dispositif de
cellule régionale de solidarité mis en place. C'est, en effet, dans un cadre
innovant pour une collectivité régionale que cette cellule a démontré la
pertinence d'une intervention régionale coordonnée avec l'État et les autres
collectivités. Le sens de la solidarité et du service public a ainsi trouvé sa
pleine concrétisation auprès des élus et des populations victimes de la
tempête.
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REPONSE DE LA PREFETE DE LA CHARENTE-MARITIME
Le rapport établi par la Cour des Comptes, à la lecture des deux
catastrophes de Xynthia et du Var, confirme, si cela était nécessaire, que
l’Etat reste le mieux placé pour gérer les épisodes exceptionnels de crise.
Même s’il évoque l’insuffisance de certains dispositifs,
il reconnaît de
fait, en soulignant les actions conduites et par les recommandations qu’il
formule, le rôle essentiel que joue l’Etat dans les catastrophes majeures
(prévention, gestion de crises) et sa capacité à tirer les leçons de chaque
crise, en temps réel, pour adapter au mieux la réponse à l’aléa rencontré.
Cette « culture du risque » est en effet un fil conducteur de l’action de
l’Etat sur le territoire national et répond à une demande sans cesse
réaffirmée par nos concitoyens. Il n’en reste pas moins que la volonté de
l’Etat à ce titre, pour atteindre sa pleine efficacité, doit se conjuguer avec
celle des partenaires locaux, et que cela sous-entend de leur part une culture
du risque commune et partagée.
Il semble nécessaire dans ce cadre de mettre l’accent sur trois
considérations.
I - Les systèmes d’alerte et de secours : un outil indispensable
•
La qualité de la diffusion de l’alerte est un des premiers exemples de
cette nécessaire coordination entre l’action de l’Etat et celle des élus locaux.
Le rôle des Maires est en la matière essentielle, comme le souligne le
rapport, pour diffuser, auprès des populations, les messages d’alerte
transmis par les préfectures.
On retrouve là cette notion impérieuse de culture du risque, évoquée
ci-dessus, qui, lorsqu’elle est insuffisante, peut conduire certains élus à ne
pas donner aux informations des préfectures toute la portée requise. Cela est
d’autant plus vrai dans des communes littorales, où les épisodes de forts
vents font partie de la culture ancestrale voire de la vie courante.
Par ailleurs, pour Xynthia, et le rapport le note, malgré leur teneur,
les messages d’alerte de la préfecture de Charente-Maritime ont été compris
à la lecture de la tempête Martin de 1999.
•
S’agissant de la qualité des prévisions de Météo France, force est de
constater qu’en l’absence d’une modélisation océanographique côtière
adaptée à chaque territoire, les conséquences de ce type d’événement
climatique
sont difficiles à évaluer avec une absolue certitude.
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COUR DES COMPTES
Elles dépendent en effet non seulement des coefficients de marée et de
la force du vent mais aussi de la distance à laquelle s’est formée la houle et,
s’agissant du littoral charentais et de ses pertuis, de la direction des vents,
ainsi que de la topographie des lieux.
Les mesures prises pour l’amélioration des outils de prévision comme
la mise en oeuvre de la procédure de vigilance « vague/submersion » sont de
nature à éviter la répétition de ces difficultés.
•
Les documents de planification doivent, comme cela est rappelé,
faire l’objet d’une actualisation et d’une adaptation constante aux nouvelles
connaissances sur les aléas. Il en est notamment ainsi des plans communaux
de sauvegarde, insuffisamment réalisés jusqu’alors par manque de prise de
conscience du risque quelle que soit sa nature, et dont la réalisation s’est
fortement accélérée depuis 2010.
Ceci étant, l’expérience des crises passées démontre que la principale
difficulté réside dans le fait que l’aléa peut toujours dépasser les prévisions
les plus pessimistes et les mesures planifiées au regard de ces prévisions. Les
dispositifs existants peuvent de ce fait, quel que soit leur niveau, se révéler
insuffisants voire inadaptés.
II - Les dispositifs de prévention : une démarche permanente
•
La connaissance et la manifestation des risques est à la base de la
conception et la réalisation des dispositifs de prévention. Il en est ainsi des
documents à usage d’information des populations comme de ceux à caractère
réglementaire.
Pour atteindre leur pleine efficacité, ces documents doivent recevoir
l’adhésion des élus, voire de la population. La difficulté réside dans le fait
d’obtenir une adhésion sur des documents évoquant un aléa qui ne s’est pas,
ou que peu, produit.
L’histoire des risques en Charente-Maritime a mis en exergue le
risque « feux de forêt », notamment à partir de l’incendie de la forêt de la
Coubre en 1976 et du risque récurrent d’incendie dans la zone boisée du
département commune avec celui de la Charente. Elle a également souligné
le risque « crues de la Charente » que ce soit en 1982 ou en 1994.
La prise de conscience, que la manifestation de ces risques avait
générée au niveau des habitants, a naturellement conduit à l’élaboration des
documents d’information (DDRM, DICRIM, Atlas) et des plans de prévention
de risques correspondant à ces aléas, de même qu’à l’information des
acquéreurs et des locataires à leur sujet.
Le risque « submersion », pour sa part, ne revêtait pas la même acuité
dans la mémoire de la population, les submersions historiques, auxquelles
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217
fait référence le rapport, ne mettant pas en cause à l’époque de lieux
fortement habités.
La tempête Martin de 1999 a quant à elle tracé les contours de l’aléa
de référence, sachant qu’il s’agissait plus de dommages créés par le vent que
par la submersion.
Elle a toutefois conduit à une évolution des plans de prévention vers
la prise en compte du risque submersion. Ceci étant, le travail de pédagogie
auprès des élus a été plus ou moins difficile à conduire, car directement lié
au ressenti de cet événement climatique, influant ainsi directement sur la
rapidité de concrétisation de ces documents.
Ce n’est en fait qu’après Xynthia que la réalité du risque de
submersion a commencé à être admise par les habitants des communes
littorales. La volonté de l’Etat s’en est trouvée renforcée, puisqu’il est
constaté depuis deux ans, le rapport en fait état, une forte progression dans
la réalisation de ces documents, en lien avec les directives ministérielles,
qu’il s’agisse de leur révision, de leur prescription ou de leur mise en
application anticipée. L’information des populations et celle des acquéreurs
et des locataires s’enclenche directement derrière ce processus.
•
S’agissant des documents d’urbanisme et du contrôle de légalité, le
rapport souligne à juste titre la forte pression locale sur ce sujet, souvent
relayée, comme cela est dit, par des élus locaux voire nationaux, et ce
d’autant plus que le risque n’était pas reconnu.
Dans le contexte immédiat de l’après Xynthia, alors que le
traumatisme était encore vivace, les mesures prises ont pu être à la hauteur
de la réponse à donner au risque puisque, simultanément avec l’information
donnée aux maires de ne plus délivrer de permis de construire, les permis
accordés ont été suspendus en vertu de l’article R. 111-2 du code de
l’urbanisme
et les « porter à la connaissance » du nouvel aléa communiqués
pour être intégrés dans les PLU et les SCOT.
Pour que cette fermeté se maintienne dans le temps, il est essentiel,
ainsi que cela est recommandé, que l’administration préfectorale soit
soutenue dans sa mission de contrôle de légalité sur les décisions
d’urbanisme des collectivités locales.
III - La protection des zones bâties : une priorité pour l’avenir
Le
rapport
fait
clairement
apparaître
la
complexité
de
la
problématique. Il n’est pas envisageable de réduire la protection à
l’existence d’ouvrages et de digues en front de mer. La solution devra passer,
dans les cas les plus sensibles, par un abandon de certains secteurs, mais se
pose dans cette hypothèse la question de la gestion future de ces zones.
•
La mise en oeuvre de protections de côtes efficaces sous-entend la
convergence de moyens juridiques et financiers. Les réflexions qui ont suivies
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la tempête Xynthia ont amené l’Etat à définir neuf bassins de risque en
Charente-Maritime. Les collectivités territoriales se sont appropriées ces
bassins de risque pour élaborer huit programmes d’action de prévention des
inondations (PAPI), qui doivent notamment permettre la réalisation de
défenses adaptées dans un horizon proche. Plusieurs projets sont labellisés
ou en voie de l’être par la commission mixte inondation.
Si l’identification des maîtres d’ouvrage des travaux prévus dans les
PAPI a pu se faire rapidement, la question de la responsabilité de la gestion
et la gouvernance des ouvrages à l’avenir fait toujours débat et l’objet de
réticences de la part des collectivités.
La principale difficulté vient de l’implantation des ouvrages sur le
domaine public, maritime ou non, et d’une gestion autrefois assurée par
l’Etat. A cela se rajoute par endroit la complexité d’identification des
responsables et propriétaires d’ouvrages, la multiplicité des intervenants ne
permettant pas de faire aboutir les classements alors même que le travail de
recensement est très avancé.
Pour assurer la pérennité des protections,
il semble indispensable
que le législateur donne à l’Etat, et plus précisément aux préfets de
départements, les moyens de désigner plus simplement le maître d’ouvrage et
le gestionnaire des ouvrages de protection implantés sur le domaine public
de l’Etat. Cela paraît le moyen le plus sûr d’aboutir à leur classement
derrière un responsable clairement identifié.
•
En parallèle, les moyens financiers nécessaires à l’amélioration et à
l’entretien des protections doivent être fiabilisés. Si l’Etat, dans le plan
submersion rapide, a prévu la hauteur de son effort financier, la question
mérite d’être posée, en complément de la participation des collectivités
territoriales, d’une intervention financière de l’Europe dans le cadre
d’éventuels prochains contrats de plan, les territoires ainsi protégés
contribuant à l’activité économique.
Bien plus, s’agissant des digues privées, leurs propriétaires devraient
être associés à ces financements, puisqu’ils bénéficient à ce jour d’une
protection supportée par les seules collectivités.
Indépendamment de l’efficacité des solutions qui pourraient être
mises en oeuvre pour leur gouvernance et leur entretien, il est nécessaire de
rappeler que tout système de protection est faillible. S’agissant du risque
submersion et inondation, les PAPI ne doivent pas créer une « fausse
sécurité » tendant à persuader les populations qu’elles sont totalement à
l’abri derrière ces ouvrages.
•
Il est donc indispensable d’intégrer dans la réflexion la notion de
« repli stratégique », et concevoir un nouvel aménagement des zones
littorales. Pour assurer ce « repli stratégique », dans les zones où le risque
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est particulièrement élevé, deux possibilités sont ouvertes : les procédures
d’expropriation pour risque et l’acquisition amiable à titre préventif.
C’est cette seconde démarche qu’a souhaité développer l’Etat après
Xynthia, pour répondre à la demande pressante des habitants ayant vécu le
traumatisme de la tempête. Le périmètre de ces zones, défini à partir des
critères contenus dans la circulaire du 18 mars 2010, a été validé dans sa
grande majorité, et le tracé de la zone d’expropriation lui coïncide.
Les différences de zonage constatées dans le rapport résultent en fait
de l’évolution de la doctrine retenue par la mission Pitié, dans la mesure où,
pour les dernières d’entre elles, ont été introduites la présence d’un étage, ce
qui n’était pas le cas auparavant, et la référence à une côte de seuil
minimale.
Même s’il peut faire l’objet de critiques, du fait de ces évolutions, le
recours aux zones de solidarité, probablement d’ailleurs à cause des débats
que ces critiques ont suscité, a interdit que la tempête Xynthia ne disparaisse
trop rapidement des mémoires des élus et des habitants, et a permis de
maintenir, comme le souligne le rapport, une véritable « culture du risque ».
Ce risque se matérialise d’ailleurs dans quelques situations humaines
difficiles qui perdurent. En effet, la démarche engagée par l’Etat au titre du
« repli stratégique » ne permet pas de trouver de solution pour les personnes
ayant acheté avant Xynthia des terrains à bâtir au prix fort, qui sont
désormais inconstructibles et sans valeur.
Le contour des zones de solidarité a ainsi ancré dans les esprits
l’existence du risque sur le littoral de la Charente-Maritime et, en parallèle,
le caractère impératif des actions à mener pour l’avenir, qu’il s’agisse de la
prévention ou de la protection.
En tout état de cause, l’analyse a posteriori permet de conclure que
toute démarche de « repli stratégique » rencontrera une forte opposition non
seulement des élus mais aussi des citoyens. La démarche future engagée ne
pourra réussir que grâce à une autorité sans faille de l’Etat, tant au plan
national que local.
Il conviendrait donc que l’Etat se dote des outils lui permettant de
déterminer, dans des secteurs identifiés, et dans des proportions admissibles
tant au niveau des territoires qu’au plan financier,
les zones dans lesquelles
devraient
être
conduites,
avec
un
cofinancement
Etat,
collectivités
territoriales, voire Europe, les acquisitions amiables rendues urgentes par la
nécessité de ce « repli stratégique » face à un extrême danger.
•
L’impossibilité de reconstruire devra également être garantie,
question qui se pose actuellement pour les territoires où les habitations ont
été achetées suite à Xynthia.
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COUR DES COMPTES
Au-delà du classement en zone inconstructible dans les plans de
prévention des risques, la solution de long terme pour préserver l’avenir est
certainement, ainsi que l’indique le rapport, la dévolution au Conservatoire
du littoral. Cet établissement devra être doté pour ce faire de moyens
juridiques et financiers adaptés.
*
Telles sont les réflexions que je souhaitais vous apporter à la lumière
du vécu d’un événement « extraordinaire », qui, par-delà le traumatisme
immédiat, marquera de manière irrémédiable l’action de l’Etat et des
partenaires locaux, mais également l’esprit des habitants des territoires
concernés.
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REPONSE DU DIRECTEUR DE L’ADMINISTRATION
PENITENTIAIRE,
ANCIEN PREFET DE LA CHARENTE-MARITIME
Je vous confirme que le projet de rapport public n’appelle pas en
l’état de réponse particulière de ma part.
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REPONSE DU PRESIDENT DU CONSEIL GENERAL
DE LA CHARENTE-MARITIME
Je souhaite apporter les observations suivantes :
1° – Sur le chapitre II - II - C - 1
« La localisation en zone inondable
des centres de secours des services départementaux d’incendie et de
secours »
S’agissant de la reconstruction de certains centres de secours du
Service départemental d’incendie et de secours, situés en zone inondable, en
particulier ceux du Château d’Oléron et de Rochefort, la Cour indique
« qu’aucune décision n’a encore été prise sur ces différents projets ». Or
l’Assemblée départementale réunie en session plénière le 17 décembre 2010
a décidé la construction de ces deux centres de secours, ainsi que ceux situés
sur les communes de Jonzac et Courçon. A cet effet, une autorisation de
programme de 9,6 M€ a été votée, ainsi qu’un crédit de 100 000 €, destiné à
financer les premières études de maîtrise d’oeuvre.
Depuis le 10 avril 2012, le département est propriétaire des terrains
d’emprise, mis à disposition par la commune, afin de construire le centre de
secours du Château d’Oléron. Le projet est aujourd’hui estimé à 2,05 M€.
S’agissant du centre de secours de Rochefort, les études sont en cours,
le projet est estimé à 4,05 M€. L’acte d’acquisition n’a pas encore été passé
avec la communauté d’agglomération du Pays Rochefortais, propriétaire des
terrains. En effet, ceux-ci sont aujourd’hui occupés par des constructions qui
nécessitent une démolition (estimée à 250 000 €), voire une éventuelle
dépollution du site. La prise en charge de ces coûts supplémentaires est en
cours de discussion avec la Communauté d’Agglomération. Il n’en demeure
pas moins que les études sont bien engagées, au vu du pré-programme
élaboré par le Service départemental d’incendie et de secours de la
Charente-Maritime et que le département n’entend pas remettre en cause sa
maîtrise d’ouvrage sur ce projet.
2° – Sur le chapitre IV - I - D
« Les biens immobiliers publics »
Le rapport indique que, lors de la construction des bâtiments abritant
le siège du département de la Charente-Maritime à La Rochelle et la maison
de la Charente-Maritime à Rochefort, le risque de submersion marine était
connu, mais non pris en compte. Cette affirmation n’est pas fondée car,
contrairement à ce qu’écrit la Cour, le risque de submersion marine n’était
pas avéré dans l’emprise des bâtiments concernés.
2-1 Construction de la Maison de la Charente-Maritime à La Rochelle
S’agissant de la Maison de la Charente-Maritime à La Rochelle, le
permis de construire a été déposé le 7 novembre 1997 et accordé par l’Etat
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223
le 23 février 1998. L’arrêté de délivrance du permis ne fait aucune mention
du risque de submersion marine, ce qui n’est pas étonnant car
l’administration ne disposait d’aucun élément permettant d’étayer un risque
de submersion dans ce secteur. En effet, l’atlas des risques littoraux, qui
n’avait d’ailleurs aucune portée juridique,
établi pour l’ensemble du littoral
charentais-maritime a été terminé fin 1999 juste avant la tempête Martin et
diffusé en 2001. Le terrain d’assiette du bâtiment sur l’atlas se situe au
nord-ouest de la zone submersible, et en dehors de cette dernière. Lors de la
tempête Martin, le bâtiment alors en cours de construction n’a pas été
inondé, ce qui explique que nous n’ayons pas été conduits à chercher des
solutions techniques permettant de réduire la vulnérabilité du bâtiment.
Par ailleurs, pour les zones incluses dans le périmètre de submersion
à l’atlas, dont je rappelle que le bâtiment du conseil général était implanté en
dehors de telles zones, la submersion générée par Xynthia a été beaucoup
plus importante et les laisses de mer relevées ont été significativement plus
élevées (supérieures à 6 m NGF), ce qui explique l’inondation du sous-sol du
bâtiment.
L’importance
de
cette
inondation
ne
pouvait
donc
être
appréhendée, ni au moment de la délivrance du permis de construire, ni lors
du passage de l’ouragan Martin pendant sa construction.
En outre, ce ne sont pas des portes étanches qui ont été mises en place
à la Maison de la Charente-Maritime de La Rochelle suite à la tempête
Xynthia, mais un système de barrières étanches et amovibles de type
batardeaux, qui peuvent être installées en cas de risque de submersion.
2-2 Construction de la Maison de la Charente-Maritime à Rochefort
Quant à la construction des bureaux situés sur le port de commerce de
Rochefort, le permis, plus ancien, a été délivré en 1997. Leur localisation a
été choisie pour être en cohérence avec leur destination puisqu’ils abritent
les services en charge des
milieux maritime et fluvial, en particulier
l’activité dragage des ports. De même que pour le siège du département à La
Rochelle, l’atlas et le document mémoire de 1999 n’existaient pas encore au
moment de l’instruction du permis et aucun élément relatif au risque de
submersion n’était disponible à cette date. Au moment de Martin, le secteur
du port n’a là encore pas été inondé et rien ne laissait présager l’inondation
du bâtiment de Rochefort.
Un système de barrières étanches, identique à celui qui est installé à
La Rochelle, est à l’étude sur le site de Rochefort.
Quant à la destruction des véhicules, si la flotte automobile en
sous-sol a bien été submergée à La Rochelle, aucune voiture n’a été détruite
à Rochefort.
3° - Sur le chapitre V - II - B - 4 - b) « Les problèmes de gestion »
Au sujet des indemnisations, la Cour note qu’aucune règle de
non-cumul n’a été mise en place, s’agissant des dons versés aux sinistrés. Or
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la cellule de crise mise en place par le département dès le lundi 1
er
mars
2010, relayée par la Maîtrise d’oeuvre urbaine et sociale (MOUS) dès le
22 mars 2010,
s’est attachée au contraire à examiner chaque situation de
manière individuelle afin d’y répondre le plus efficacement et le plus
justement possible. Une commission de coordination de l’aide au relogement,
dénommée « relogement/accompagnement social » mise en place par le
préfet de la Charente-Maritime, se réunissait deux fois par semaine. Cette
instance, à laquelle participaient notamment, outre les représentants du
département et de l’État, la caisse d’allocations familiales et la Mutualité
sociale agricole, ainsi que des représentants de communes sinistrées et
d’associations, a recensé les différents types d’aides, les bénéficiaires et les
montants attribués, y compris les montants remboursés par les assurances.
Les documents, mis à jour lors de chaque rencontre par les services du
département, ont été communiqués à tous les participants. Chaque
interlocuteur pouvait de la sorte connaître avec précision la nature et les
sommes versées aux sinistrés.
4° - Sur le chapitre V - II - B - 5 « L’aide au relogement »
En ce qui concerne la mise en oeuvre du dispositif MOUS, si la
convention a bien été signée en mai 2010, il n’en reste pas moins vrai que
dès le 1
er
mars, lendemain de la catastrophe, tous les moyens humains,
matériels et financiers ont été mobilisés pour secourir et assister les
charentais-maritimes sinistrés afin de les reloger. Les délais inhérents à la
formalisation du protocole d’accord n’ont en aucune manière affecté l’aide
apportée aux habitants en détresse puisque les services du département
avaient à ma demande mis en place une cellule d’urgence, dont l’efficacité et
la pertinence ne sont plus à démontrer.
Enfin, la Cour recense 111 ménages en recherche de logement,
identifiés comme restant à accompagner en février 2011. En réalité, nombre
d’entre eux ont refusé de quitter leur logement situé en zone de solidarité et,
à ma connaissance, seuls 34 ménages sur 1 629 recensés au moment de la
catastrophe demeuraient en attente de logement.
Quant aux crédits effectivement consacrés au titre de la MOUS, la
Cour a relevé que les crédits engagés au titre de l’Etat se seraient élevés à
250 000 €. Je souhaite qu’il soit également porté à la connaissance des
lecteurs du rapport que le département de la Charente-Maritime a engagé à
ce titre 692 211 €.
5° - Sur le chapitre V - IV - 2 « La gestion du dispositif »
La Cour souligne la nécessité de prévoir un mode de pilotage des
dispositifs d’aide apportés par les différents partenaires ; je confirme
effectivement que la gestion d’un fonds d’intervention d’urgence, commun au
département et à la région, avait été expérimenté lors de la tempête Martin.
Il a été réactivé pour traiter les dossiers liés à Xynthia et a donné entière
satisfaction.
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6° - Sur le chapitre V - V - A - 1 « Les collectivités départementales »
La Cour évalue le coût net final de la crise à 15,8 M€ ; si ce chiffre ne
concerne que la seule collectivité départementale, les modalités de calcul
doivent
être
précisées.
En
effet,
pour
le
département
de
la
Charente-Maritime, le solde net des dépenses réalisées et des recettes
perçues est arrêté à 7,49 M€ au 31 décembre 2011 ; il se chiffre à 12,28 M€
au 31 mars 2012.
Enfin, la Cour insiste sur la nécessité que les collectivités
départementales
puissent
prendre
en
compte
à
l’avenir
le
risque
d’inondation
dans
les
programmes
futurs
d’investissement.
Cette
recommandation, bien sûr appliquée dès lors qu’il s’agit de préserver des
vies humaines, doit être analysée avec grand soin pour la réalisation
d’infrastructures de type réseaux. Il est en effet nécessaire de trouver un
équilibre entre la probabilité de survenance de ce type de risques et le
surcoût engendré par sa prise en compte.
En vous faisant part de ma satisfaction quant à la qualité des
échanges effectués,
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REPONSE DE LA MAIRE D’AYTRE
Ce projet de rapport n’appelle de ma part aucune observation
particulière tant il reflète de façon quasi exhaustive, la réalité des différentes
interventions et notamment l’extrême célérité avec laquelle les représentants
de l’Etat à cette époque, ont traité l’ensemble des protagonistes, à savoir :
sinistrés, associations de victimes et représentants de la commune.
Le traitement de cette affaire, dramatique au demeurant, a été fait au
détriment de toute concertation, écoute, partage d’information et je dois le
dire, contre tout bon sens.
A titre d’exemple, outre l’incompréhensible « découpage » des zones
dites de solidarité, et au vu du chiffrage figurant dans ce rapport que je
découvre (environ 140 millions d’euros), pour l’ensemble des acquisitions, et
au vu des chiffres annoncés (environ 8 millions d’euros), pour des défenses
côtières envisagées sur le seul bassin de risques AYTRE - ANGOULINS, je
m’interroge sur l’utilisation des deniers publics.
J’aimerais d’ailleurs connaître le montant précis des 93 acquisitions
qui ont eu lieu sur Aytré.
La connaissance de ces chiffres ne peut rendre que plus amers les
sinistrés, les habitants et les élus d’Aytré.
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REPONSE DU MAIRE DE SAINT-TROJAN-LES-BAINS
Aucune correction ou rajout n’est à apporter sur le fond.
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REPONSE DU MAIRE DE SAINT-PIERRE D’OLERON
L’extrait du projet de rapport public thématique n’appelle pas
d’observation particulière de ma part.
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REPONSE DU MAIRE DE LA-FLOTTE-EN-RE
Je n’ai pas d’élément complémentaire à ajouter à ce rapport qui
contient des remarques objectives sur la situation de la commune de
La Flotte.
En outre, je vous précise que je serai le correspondant particulier
désigné pour ce rapport.
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REPONSE DU MAIRE DE LA ROCHELLE
Lors de la séance de travail qui s'est tenue en mairie de La Rochelle le
20 octobre 2011, et à l'occasion de l'examen du dossier que je vous avais
remis au sujet de l'impact de la tempête Xynthia sur les finances de la Ville
de La Rochelle, j'avais souligné le fait que pour la Ville, cet impact s'élevait
à environ 20 millions d'euros, ce qui représente une année d'investissement.
Même si la couverture financière de la réparation de ces dégâts a pu en effet
être en partie assurée par des subventions ou par des indemnités versées par
les assurances, il n'en demeure pas moins que la tempête Xynthia a contraint
la Ville à différer d'un an des projets d'investissement importants.
La constatation faite en octobre 2011 est malheureusement encore
plus vraie aujourd'hui au moment où la prise en considération des
prescriptions de l'Etat à l'occasion de l'élaboration des Programmes
d'Actions de Prévention des Inondations (PAPI) va conduire la Ville à
réaliser dans les années qui viennent des travaux beaucoup plus importants
que ceux qui étaient prévus initialement.
Dans l'état actuel des estimations, le montant du PAPI de la Ville de
La Rochelle pourrait s'élever à 22 millions d'euros, montant qui s'ajoute
naturellement aux travaux déjà réalisés dans l'urgence en 2010 et 2011, et
dont le montant s'est élevé à 9,9 millions d'euros.
C'est pourquoi, au travers de la présente réponse, il m'apparaît
important de souligner la nécessité de prendre en considération, dans toute
leur ampleur, et dans une perspective pluriannuelle, les conséquences de la
tempête Xynthia.
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REPONSE DU MAIRE DE SAINT-GEORGES D’OLERON
Je tiens à vous faire part des remarques suivantes sur le projet de
rapport public thématique :
1.
La délimitation des zones de solidarité n'a pas fait l'objet d'une
concertation minimale, mais seulement d'une information de la part du
représentant de l'État dans le département, lequel n'a pas pris en compte
les demandes répétitives des élus locaux de travailler en amont sur des
protections éventuelles, afin de définir une zone de réel danger pour la
population, qui aurait, qui plus est, eu un impact psychologique moindre
pour les habitants.
2.
De par la précipitation dans les décisions, les rachats à l'amiable
n'ont pas pu prendre en compte les préconisations de protection qui
ressortent de l'étude EGIS-EAU commandée par le conseil général de la
Charente-Maritime.
Par conséquent, la zone d'expropriation telle que prévue conduit
inévitablement à un mitage parcellaire auquel se rajoute les problèmes
inhérents au non-entretien des habitations achetées par l'État (vols,
squatts, déchetteries sauvages…).
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REPONSE DU MAIRE DE CHÂTELAILLON-PLAGE
Je vous informe qu’après lecture des informations contenues dans le
document joint au courrier, la mairie n’a pas de commentaire particulier à
formuler.
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REPONSE DU MAIRE DE LOIX
J’atteste ne pas avoir d’observations particulières à formuler.
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REPONSE DU MAIRE D’YVES
J’ai l’honneur de vous informer que la lecture de ce rapport n’appelle
pas d’observation particulière de ma part.
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REPONSE DU MAIRE DE PORT DES BARQUES
Je
vous
confirme
que
nous
n’avons
pas
d’observations
complémentaires à vous fournir.
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RÉPONSE DU MAIRE DE FOURAS-LES-BAINS
Je vous informe que ce projet de rapport n’appelle pas d’observation
de ma part.
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REPONSE DE L’ANCIEN MAIRE DE CHARRON
J’ai l’honneur de vous informer que je n’ai aucune observation à
formuler sur ce rapport.
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REPONSE DU PRESIDENT DU SYNDICAT INTERCOMMUNAL
D’ETUDES, D’AMENAGEMENT ET DE GESTION HYDRAULIQUE
(SIEAGH) DU CURÉ
Dans cette lettre, vous m’invitez à vous faire part de ma réponse avant
le 22 juin.
Ainsi, après lecture de ce document, je tiens à vous apporter les
précisions suivantes : ce document n'appelle pas, de ma part, d’observations
particulières.
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REPONSE DU PRESIDENT DU SYNDICAT INTERCOMMUNAL
DU LITTORAL D’YVES CHÂTELAILLON-AIX-FOURAS (SILYCAF)
Je vous informe qu’après lecture des informations contenues dans le
document joint au courrier, le syndicat n’a pas de commentaire particulier à
formuler.
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REPONSE DU PRESIDENT DU SYNDICAT MIXTE DE L’UNION
DES MARAIS DU DEPARTEMENT DE LA CHARENTE-MARITIME
(UNIMA)
Dans l'ensemble, ce document n'appelle pas d'observations, ni sur le fond, ni
sur les chiffres exposés.
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REPONSE DU PRESIDENT DU SYNDICAT
MIXTE DU MARAIS POITEVIN
Je tenais à vous informer que les informations nous concernant sont
exactes et n’attirent de notre part aucune remarque.
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REPONSE DU PRESIDENT DU SERVICE DEPARTEMENTAL
D’INCENDIE ET DE SECOURS DE LA CHARENTE-MARITIME
Après lecture, j’ai l’honneur de vous faire savoir que je n’ai pas de
commentaire à apporter, la majeure partie des documents que vous m’avez
fait parvenir étant de la compétence de l’Etat, s’agissant de la mise en oeuvre
des secours.
Je tiens néanmoins à souligner la clairvoyance et l’efficacité du
Service
départemental
d’incendie
et
de
secours
(SDIS)
de
la
Charente-Maritime
qui
a,
sous
l’autorité
de
Monsieur
le
Préfet,
prépositionné les secours sur une grande partie de la côte et des îles et
réalisé de nombreux sauvetages de vies humaines.
J’ajoute que je suis favorable à ce que le SDIS travaille en étroite
collaboration avec les services de l’Etat pour tout ce qui concerne la
planification, la défense côtière et les plans communaux de sauvegarde afin
d’améliorer sa capacité à anticiper, préparer et mettre en oeuvre les secours.
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RÉPONSE DES ANCIENS PROPRIÉTAIRES DE L’HÔTEL
RESTAURANT LA MAISON DES MOUETTES A AYTRÉ –
RESTAURANT LA SUITE
Comme vous l'indiquez dans l’introduction de votre projet de rapport,
le bilan des inondations du mois de février 2010 est effectivement
« dramatique » en ce qui concerne notre ancien établissement, la Maison des
Mouettes à Aytré, qui est actuellement en cours de démolition.
Si la Maison des Mouettes a été durement touchée par Xynthia, il
aurait été tout à fait envisageable d'entreprendre des travaux de rénovation
dans la mesure où « seul » le rez-de-chaussée a été inondé.
L'annonce du classement en zone de solidarité de la Maison des
Mouettes a alors été vécue comme un couperet puisque tous les efforts
consentis depuis des années pour hisser notre établissement parmi les
meilleurs hôtels restaurants de la région étaient réduits à néant.
L'annonce du classement en zone de solidarité de manière définitive a
en outre été très mal vécue compte tenu des nombreuses tergiversations et
revirements qu’il y a eus. Un moment donné il était question de « zones
oranges » puis de « zones noires » et à la fin de « zone de solidarité ». Il y a
eu indiscutablement un problème de communication dans la gestion de cette
crise par l'État et les acteurs locaux.
Après l'amertume, c’est l'incompréhension qui domine aujourd’hui.
Lorsque nous avons acheté le fonds de commerce de restauration en 1997,
nous n'avons jamais été alertés du risque d'inondation sur la commune
d’Aytré. De même, nous n'avons nullement été mis en garde lorsque nous
avons engagé de lourds travaux en vue de l'édification de la partie hôtel de la
Maison des Mouettes qui a ouvert seulement quatre mois avant la tempête.
Si le risque d'inondation est si important aujourd'hui au point que la
commune d’Aytré a été classée en zone de solidarité, pourquoi avoir permis
une urbanisation aussi proche du littoral ?
En ce qui concerne l'indemnisation de la Maison des Mouettes, plus
encore que l'incompréhension c'est un sentiment d'injustice qui nous anime
aujourd’hui.
Comme indiqué dans votre rapport, la Maison des Mouettes est
évaluée à 11 millions d'euros. En revanche, ce montant n'a pas été fixé
arbitrairement par nos soins mais par notre Notaire, Me Daniel NYZAN qui
a évalué le bien et le fonds de commerce à 10 641 000 € :
→
6 661 000 € pour l'ensemble immobilier (murs de l'hôtel et du
restaurant),
→
1 180 000 € pour le fonds de commerce de restaurant,
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COUR DES COMPTES
→
2 800 000 € pour le fonds de commerce hôtel.
Une expertise est actuellement en cours pour une nouvelle évaluation
et semble confirmer le montant retenu par le Notaire.
Pour autant, France Domaine a indemnisé les murs de l'hôtel du
restaurant seulement à hauteur de 3 522 000 € au lieu des 6 661 000 €
retenus par le Notaire.
En ce qui concerne le fonds de commerce, et comme vous l'évoquez
dans votre pré rapport, aucune indemnisation n'a été prévue au motif que
l'article L. 561-3 du code de l'environnement réserve la procédure
d'acquisition amiable à « un bien exposé à un risque prévisible », ce qui
exclut selon la Direction Générale des Finances Publiques et la Direction
Générale de la Prévention des Risques, l'indemnisation d'un fonds de
commerce.
Cette interprétation nous apparaît biaisée dans la mesure où, si
l'article L. 561-3 du code de l'environnement ne prévoit pas expressément
l'indemnisation d'un fonds de commerce, il ne l'exclut pas pour autant.
Quoi qu'il en soit, nous accusons aujourd'hui une perte sèche de près
de 7 millions d'euros puisque notre établissement, évalué à 10 641 000 €
avant la tempête, n'a été indemnisé qu'à hauteur de 3 522 000 €.
En outre, malgré cette perte sèche de 7 millions d’euros, le Trésor
Public a considéré que nous avions réalisé une plus-value de 1 992 726 €
(1 419 621 € en ce qui concerne la vente des murs du restaurant et 573 105 €
en ce qui concerne la vente des murs de l'hôtel).
Cette plus-value étant imposable à l’IS, nous devons aujourd'hui
reverser 664 242 € (1 992 726 / 3) sur les 3 522 000 € versés par France
domaine.
Nous avons le sentiment aujourd'hui que nous avons été oubliés par
l'État et les collectivités locales alors que ces derniers ont une part de
responsabilité non négligeable dans le préjudice que nous subissons
aujourd’hui. Nous rappelons qu’à aucun moment nous n’avons été dissuadés
de nous implanter sur la commune d’Aytré.
Bien plus qu’une perte financière, c’est le fruit de 20 ans de travail et
de sacrifices que nous perdons aujourd’hui.
L’Etat doit retenir l’échec de la gestion de cette crise et surtout
reconnaître sa part de responsabilité et celle des acteurs locaux qui n’ont pas
été en mesure d’appliquer une politique urbaine et de gestion des sols
cohérente au vu de l’ampleur de la catastrophe Xynthia.
Nous espérons que ces éléments vous permettront de compléter votre
rapport et d’envisager, pour l’avenir, une prise en compte plus aboutie des
préjudices endurés par les sinistrés de Xynthia.
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REPONSE DU PREFET DE LA VENDÉE
Concernant le chapitre consacré aux systèmes d'alerte et de secours,
et plus particulièrement l'organisation des exercices, je tiens à préciser que
depuis plusieurs années déjà la préfecture de la Vendée est engagée dans un
rythme annuel de deux ou trois exercices. Aussi, je ne voudrais pas que la
phrase « Contrairement aux années précédentes, en 2010-2011, deux
exercices portant sur les inondations et la submersion ont été organisés »
puisse conduire le lecteur à penser qu'aucun exercice n'était organisé en
Vendée, précédemment à la tempête Xynthia. Par l'organisation d'exercices
réguliers portant sur différentes thématiques, l'Etat affirme sa volonté de se
préparer à la gestion des crises, de toute nature (incendie, pollution,
explosion, ...).
Concernant le SDACR, les critiques sur l'insuffisante
couverture en
bateaux légers de sauvetage du Sud-Vendée me semblent parfaitement
infondées. En effet, si la couverture en bateaux doit tenir compte de la
surface du territoire submersible, elle doit prendre en considération
beaucoup d'autres paramètres, parmi lesquels, à l'évidence, l'importance de
la population exposée au risque.
Au sujet de la planification, je souhaite insister sur le travail
important réalisé en Vendée pour sensibiliser et accompagner les communes.
Ainsi, dans les jours qui ont suivi la tempête, l'intérêt du DICRIM et du PCS
a été rappelé à l'ensemble des maires du département par lettre du préfet
avec une attention particulière pour les communes littorales. Plusieurs
communes ont alors manifesté leur l'intention d'engager une démarche
d'élaboration d'un plan, notamment sur le littoral. Les sous-préfets ont
organisé des réunions d'information à l'intention des maires intéressés. Une
équipe d'appui composée de représentants de la préfecture (cabinet -
SIDPC), du SDIS, de la•DDTM, et de la gendarmerie ou de la DDSP a
participé aux différentes réunions de travail organisées dans les communes.
Le 7 octobre 2010, à l'initiative de l'association départementale des
maires, en partenariat avec l'assemblée des communautés de communes de
Vendée, plus de 150 élus ont participé à une rencontre d'information sur le
thème « la gestion et la prévention des risques dans les collectivités ». Le
dispositif départemental pour le développement des DICRIM et PCS y a été
présenté.
En fin d'année 2010, l'association des maires de Vendée a décidé de
recruter un chargé de mission pour accompagner les communes dans
l'élaboration de leur DICRIM et PCS. Ce chargé de mission a pris ses
fonctions en avril 2011. A la demande du président de l'association des
maires, un comité technique d'appui a été mis en place avec des
représentants du SDIS, de la DDTM et de la préfecture.
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Par ailleurs, s'il est évidemment essentiel que les PCS de communes
d'une même aire géographique doivent être cohérents, je suis beaucoup plus
réservé quant au développement de plans intercommunaux. En effet, le maire
doit être au centre du dispositif, comme le prévoit explicitement la loi de
modernisation de la sécurité civile du 13 août 2004, notamment en son
article 16.
Concernant la relocalisation du centre de secours de l'Aiguillon-sur-
Mer, le choix d'un nouveau terrain d'implantation est conditionné par le
zonage du PPRI qui devrait être approuvé dans le courant de l'été 2012.
Enfin, je souhaite porter à la connaissance de la Cour que le DDRM
2012 est achevé, conformément à l'ambition affichée et reprise dans le
rapport. Sa maquette a été présentée par le prestataire au comité de pilotage
le 10 mai dernier et une présentation aux maires et aux présidents des
communautés de communes est prévue le 11 septembre 2012 à la maison des
communes.
Concernant le chapitre consacré à la prévention et à l'urbanisme, il
n'est pas juste, comme le fait le rapport à plusieurs reprises, de remettre en
cause la rigueur des instructions menées au titre de la loi sur l'eau,
notamment pour le lotissement des Voiliers, celles-ci, concernant le volet «
risque », s'appuyant sur les études PPR qui prévalaient alors (bande
inconstructible de 50m en arrière de la digue).
Par ailleurs, je souhaite préciser que les atlas des zones inondables
sont systématiquement intégrés aux porter à connaissance du préfet, lors de
l'élaboration des PLU. En outre, le préfet vérifie, dans l'avis des personnes
publiques associées sur le projet de PLU, que les contraintes de l'atlas des
zones inondables sont bien prises en compte. Et pour conclure sur le sujet
des AZI, je me permets de rappeler que le déféré portant sur l'autorisation
d'aménager le parc résidentiel de loisirs « La Vieille Prise » à La Faute-sur-
Mer était fondé sur l'atlas, ce qui, comme le souligne le rapport public, n'a
pas empêché la Cour administrative d'appel de Nantes de le rejeter le 26
décembre 2003.
S'agissant des moyens affectés au contrôle de légalité de l'urbanisme,
ceux de la DDE ont été intégralement transférés à la préfecture au 1er
janvier 2010 et les effectifs ont été maintenus depuis ce transfert, ne
permettant nullement de conclure que « toutes ces réorganisations ont
conduit à un amoindrissement des effectifs consacrés au contrôle de légalité
».
Concernant le chapitre consacré à la protection, et en particulier le
périmètre des zones de solidarité, je voudrais redire que celles-ci ont été
dimensionnées vis-à-vis d'un risque potentiel de submersion lié à un aléa de
référence équivalent à Xynthia mais avec des conditions différentes et
aggravantes comme par exemple la rupture de la digue Est.
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247
S'agissant de l'implication financière de l'Etat dans l'entretien des
digues, le taux de 50 % appliqué par l'Etat entre 2000 et 2006 l'a
été à titre
exceptionnel, suite à la tempête de 1999. En « droit commun », selon les
principes généraux•du fonds Barilier, l'Etat participe aux travaux de
protection pour un taux compris entre 25 et 40 %, le taux maximum étant
appliqué lorsque l'opération se situe sur un territoire où le PPR est approuvé
(voire simplement prescrit par dérogation jusqu'en 2013). D'expérience, on a
pu observer que la qualité des projets et de leur maîtrise d'ouvrage reste un
facteur bien plus limitant que la disponibilité des crédits pour l'avancement
des opérations. Ainsi, comme le souligne la Cour, les financements octroyés
sont directement liés au nombre et à la qualité des projets présentés, qui
dépendent des capacités techniques et financières des maîtres d'ouvrage. Le
fort investissement de la Communauté de communes de l'île de Noirmoutier
et d'autres maîtres d'ouvrage du nord de la Vendée en matière de « défense
contre la mer » contribue ainsi à la disparité entre le nord et le sud du
département.
Dans le sud, la question de la maîtrise d'ouvrage a, à l'évidence,
progressé plus lentement. Pour autant, l'ensemble des études et projets
présentés sur les communes de la Faute et l'Aiguillon-sur-Mer, à deux
exceptions près (problème d'éligibilité à la convention s'agissant de travaux
portuaires pour l’un et travaux partiellement liés à l'action de la mer
pour
l’autre), ont été subventionnés de manière prioritaire par la commission
entre 2007 et 2009.
Au-delà de la participation financière de 1'Etat, aurait pu être
soulignée la bonne coordination des cofinanceurs (Etat, région, deux
départements), assurée depuis 2007 dans le cadre de la commission
d'attribution des financements sur les actions de confortement des ouvrages
ou de prévention de l'érosion côtière.
Enfin, concernant les montants consacrés par l'Etat à l'entretien des
digues littorales du Sud-Vendée, il peut paraître étonnant de mettre en
regard les financements de l'Etat destinés aux grosses réparations des digues
dans un programme pluriannuel défini par convention (0,54 M€ par an en
moyenne) et les sommes mises en oeuvre immédiatement après Xynthia pour
réparer les ouvrages qui étaient hors fonction après la tempête (3,2 M€ en
2010).
Concernant le chapitre consacré aux indemnisations, je m'étonne que
la Cour puisse avancer que 62 biens immobiliers, pour lesquels aucun permis
de construire n'a été délivré, ont été achetés par l'Etat. Si la Cour n'a pas
retrouvé trace de permis de construire pour ces 62 biens, cela ne signifie
absolument pas, compte tenu des durées d'archivage de ces éléments et de
l'ancienneté des biens en question, qu'aucun permis n'a été délivré. J'ajoute
que ne pas procéder à l'acquisition des biens construits illégalement, comme
le suggère le rapport aurait conduit, compte tenu des délais de prescriptions
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en urbanisme, à maintenir en place des personnes soumises à un risque
grave, et ce, en toute connaissance de cause.
Quant au contrôle de vraisemblance des indemnités versées par les
assurances sur la base d'une « carte
faisant apparaître le niveau d'eau
atteint », celui-ci aurait été très complexe, la modélisation des niveaux d'eau
concernant le terrain naturel alors même que les dégâts dans les habitations
sont liés au niveau de leur seuil.
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249
REPONSE DU PREFET DU FINISTERE,
ANCIEN PREFET DE LA VENDEE (JANVIER 2010 – JANVIER 2012)
J’ai l’honneur de vous indiquer que ce document n’appelle de ma part
aucune réponse.
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REPONSE DU DIRECTEUR GENERAL DES SERVICES DE LA
REGION RHÔNE-ALPES,
ANCIEN PREFET DE LA VENDEE (JUILLET 2007 – JANVIER 2010)
Je vous informe que je ne souhaite pas formuler d’observation à ce
stade.
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251
REPONSE DU PREFET DE LA REGION FRANCHE-COMTE
PREFET DU DOUBS,
ANCIEN PREFET DE LA VENDEE (JANVIER 2005 – JUILLET 2007)
Pour répondre à votre demande, je tiens à signaler à votre attention
la formulation actuelle du rapport, concernant la délivrance, par mes soins
semble-t-il, le 26 septembre 2005, d’une autorisation d’un projet de
remblaiement en zone humide intéressant le lotissement « Les Voiliers » à la
Faute-sur-Mer.
Le projet de rapport formule l’observation suivante : « Au total, il est
permis de se demander si, dans le cadre de la loi sur l’eau, un refus ne devait
pas être opposé à ce projet de remblaiement en zone humide, alors même que
l’autorisation de lotir avait été accordée. En l’occurrence, cette loi a été
interprétée d’une façon très compréhensive pour le lotisseur et la commune,
avec une prise en compte insuffisante des exigences liées à la police de
l’eau ».
Cette formulation exprime assez clairement le sentiment que
l’autorisation n’a pu être accordée qu’avec une interprétation très
compréhensive de la loi pour le lotisseur et la commune.
Je tiens à exprimer mes plus vives réserves sur ces affirmations et
formulations, tout en signalant que je n’ai eu ni le temps ni l’opportunité de
me référer aux pièces du dossier, aux avis formulés par les services et à leurs
propositions de décisions, pour étayer une appréciation définitive.
Je me contente en conséquence de cette « réserve de principe ».
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REPONSE DE L’ANCIEN PREFET DE LA VENDEE
J’ai l’honneur de vous faire connaître que j’ai quitté mes fonctions de
Préfet de la Vendée le 9 janvier 2005 et que je ne possède, ni n’ai accès à
aucun élément autre que celui figurant dans votre projet de rapport public.
Par conséquent, je ne suis pas en mesure de lui apporter réponse.
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REPONSE DU PRESIDENT DU CONSEIL REGIONAL DES PAYS DE
LA LOIRE
Compte tenu du caractère parcellaire des éléments transmis, la
lecture et l’analyse du rapport de la Cour n’est pas aisé pour la région. Afin
d’éclairer le débat public sur le traitement de la catastrophe générée par
Xynthia, je vous transmets donc l’ensemble des précisions et réponses, que
j’ai par ailleurs adressées au Président de la chambre régionale des
comptes, en réponse aux observations de cette dernière.
1.
Sur le coût pour les finances publiques de la catastrophe
La CRC des Pays-de-la-Loire considère dans ses observations que le
coût pour les finances publiques de la catastrophe est « très élevé ». Or, il
ressort de son rapport que près des trois quarts de ce coût (153 808 966 €
pour l’Etat, sur un montant global dépensé par les pouvoirs publics de
208 916 574 €) est lié à la mise en oeuvre dans l’urgence du rachat et de
la
destruction des maisons en zones de solidarité, dispositifs prévus dans le
cadre du fonds dit Barnier.
J’observe que les magistrats constatent par ailleurs que des efforts
financiers bien moindres, auraient permis de mettre en place de véritables
outils d’alerte et de suivi utiles à la protection du littoral ; à ce jour ces
dispositifs n’ont toujours pas été mis en oeuvre.
S’il est apparu nécessaire d’intervenir rapidement pour déterminer
des zones de danger et procéder à des premières acquisitions amiables puis
démolitions, la région considère pour sa part que le plan de rachat et de
destruction aurait dû être davantage concerté, et adopté dans un contexte
moins médiatique. Cela aurait sans doute permis de réduire d’au moins 25 %
les zones de solidarité (et donc le coût pour les finances publiques). Il sera à
ce titre éclairant d’examiner les conclusions des enquêtes d’utilité publique
de la phase actuelle des expropriations.
J’observe par ailleurs qu’il pourrait résulter de la définition
précipitée des « zones de solidarité », où l’habitat existant a dû être
partiellement déconstruit, un aménagement mité où des milieux naturels
sensibles coexisteraient à proximité immédiate de territoires urbanisés.
2.
Sur la coordination des pouvoirs publics
Tout en notant que la gestion de la crise n’a pas marqué de
dysfonctionnement majeur, la CRC des Pays-de-la-Loire relève un manque
de coordination des acteurs. La région aurait souhaité plus de précisions
sur
ce sujet.
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COUR DES COMPTES
En effet, si cela vise un défaut de coordination en matière d’aide à la
protection du littoral, la région souhaite souligner son engagement continu
depuis 2000 en la matière. La région regrette que dès 2006 l’action
coordonnée des pouvoirs publics ait perdu en lisibilité, l’Etat n’ayant pas
accepté, en dépit des demandes répétées des collectivités et de la région, de
maintenir cette action dans le cadre du CPER. Elle déplore également qu’à
cette occasion, au-delà de perdre en lisibilité, l’effort des pouvoirs publics
pour la protection du littoral ait perdu de son efficacité notamment, du fait
d’une diminution du taux d’intervention de l’Etat (rappelée page 35 du
rapport de la chambre).
S’il s’agit d’un défaut de coordination des aides économiques, la
région rappelle que s’il était bien dans l’intention du législateur que la loi du
13 août 2004 installe les régions en chefs de file de l’action économique, le
Gouvernement de l’époque a préféré retirer cette orientation, laissant ce
champ d’intervention sans pilote, ce que les régions n’ont cessé de regretter
depuis.
S’il s’agit enfin du défaut de concertation des administrations énoncé
par Monsieur le maire de la commune de la Faute-sur-Mer, l’ensemble des
pouvoirs publics et des acteurs privés très fortement mobilisés dans la
gestion de la tempête, seront sans doute comme moi surpris de ces propos,
que l’on peut considérer comme déplacés, notamment au vu de ses propres
difficultés de gestion, relevées par la Chambre, et de son manque de
transparence motivé selon lui par le secret de l’instruction devant les
juridictions pénales.
3.
Sur les moyens engagés par la région dans le cadre de son
plan tempête
La région prend acte des appréciations portées par la chambre
régionale des comptes des Pays-de-la-Loire sur les moyens engagés par la
région dans le cadre de son plan Tempête et sur leur taux de réalisation
qu’elle considère satisfaisant. Elle souhaite toutefois préciser et compléter
deux points.
S’agissant du calcul des coûts nets pour les budgets publics, repris
dans le Projet du rapport public de la Cour, il peut paraître inexact de
prendre en en compte l’intégralité des dons reçus par la région, tous n’étant
pas à destination des trois communes visées par l’analyse de la Cour.
Par ailleurs, le rapport de la CRC des Pays-de-la-Loire fait référence
aux moyens supplémentaires en personnel déployés pour faire face aux
conséquences de la tempête Xynthia, sans citer toutefois les dispositions
prises par la région. La région précise simplement qu’en sus des emplois
tremplins accordés pour les trois communes, elle a mis en place à son niveau
une cellule « tempête » pour assurer l’orientation et la diffusion des
demandes d’aides des victimes (habitants, entreprises, communes…) et
coordonner les 20 mesures de son Plan Tempête.
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255
4.
Sur l’avenir des territoires touchés par la tempête
Au-delà de la gestion de la crise et de ses conséquences immédiates,
la région considère qu’il est urgent désormais que l’Etat accepte, avec les
territoires, de tracer des perspectives d’avenir, relatives à la gestion du trait
de côte et à l’aménagement et au développement de ce territoire meurtri par
ce sinistre.
Concernant la gestion du trait de côte, la région a approuvé en
commission permanente du 6 février dernier, une convention d’objectifs
2011-2016 avec l’Etat et les départements de Loire-Atlantique et de Vendée,
afin de développer une vision globale de la gestion du littoral. Elle a pour
objectifs de bâtir un cadre et une stratégie régionale concertée relative à la
protection des personnes et des biens exposés aux risques littoraux, en les
inscrivant dans une perspective de gestion durable du trait de côte,
respectueuses des espaces naturels littoraux et de leurs dynamiques ; de
contribuer à la mise en oeuvre de cette stratégie au travers d’actions
d’information, de coordination, d’impulsion et de financement des démarches
de gestion globale ; de favoriser l’approfondissement, la valorisation et le
partage des connaissances entre acteurs du littoral.
Au-delà de cette convention, la région Pays-de-la-Loire confirme sa
volonté d’une plus grande mutualisation des connaissances, notamment sur
des éléments cartographiques communs qui pourraient être formalisés dans
le portail GEOPAL et autour du projet de centre de ressources « Litoralis »,
qui a émergé dans le cadre du projet de contrat de solidarité régional du sud
Vendée Littoral.
Lors des ateliers de concertation mis en oeuvre par la région dans le
cadre de ce projet de contrat régional, l’intercommunalité a été jugée
nécessaire pour porter et coordonner les projets proposés et mettre en oeuvre
plus globalement le projet de territoire. La région se réjouit que la Chambre
régionale des comptes des Pays-de-la-Loire recommande la mise en place
d’une telle structure intercommunale. La région en ce qui la concerne a
accompagné le territoire pour faire avancer la réflexion en ce sens.
Au-delà de ces évolutions, la définition d’un nouveau projet
d’aménagement et de développement pour ces territoires constitue également
un enjeu majeur, dans lequel l’Etat doit prendre toute sa part. A cet égard, la
région considère qu’il est désormais important que l’Etat participe
activement aux arbitrages de réemploi des zones de déconstruction qui ne
peuvent être laissées à l’abandon.
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REPONSE DU PRESIDENT DU CONSEIL GENERAL DE LA VENDÉE
L’analyse réalisée par la Cour à la suite de la tempête Xynthia
appelle simplement quelques précisions de la part du Département de la
Vendée.
Pour ce qui concerne la nécessaire coordination face au risque de
submersion marine, il faut noter que le Département a contribué avec les
services de l’Etat et de la Région à la mise en place d’une démarche de type
(programmes d’actions de prévention des inondations (PAPI) sur l’ensemble
du littoral vendéen (7 PAPI labellisés ou en cours de préparation
actuellement).
Parallèlement, un travail concerté entre l’Etat, la Région et le Département a
été engagé depuis 2000 pour soutenir des opérations relatives aux digues
dans le cadre de plusieurs procédures contractuelles (convention, contrat de
projets Etat-Région…). Les études et travaux ainsi réalisés, l’ont été dans le
cadre d’un cofinancement coordonné entre l’Etat, la Région et le
Département.
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REPONSE DE L’ANCIEN PRESIDENT DU CONSEIL GENERAL
DE LA VENDEE
Je vous informe que ce document n’appelle pas de commentaire
particulier de ma part.
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COUR DES COMPTES
REPONSE DU MAIRE DE LA TRANCHE-SUR-MER
Le présent document n’appelle pas d’observations particulières de ma part.
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REPONSE DU MAIRE DE L’AIGUILLON-SUR-MER
Mes observations portent sur les paragraphes et alinéas ci-dessous :
Chapitre II I - B - 2 - L’alerte des maires : En tant que maire, je
pouvais difficilement prévenir le préfet de l’état de submersion auquel était
confrontée ma commune à 4 h du matin ; dès 3 heures j’étais à la mairie avec
mon adjointe à gérer les conséquences de la submersion, en compagnie du
service départemental d’incendie et de secours (SDIS) et un appel
téléphonique des services de l’Etat m’avait été signifié vers 1 heure du matin
à ce sujet.
Chapitre II I - B - 3 - b) L’amélioration des dispositifs communaux
d’alerte depuis la crise : au titre des systèmes d’alerte de ma commune, je
tiens à préciser que l’acquisition d’un panneau d’information à LED
implanté avenue Amiral Courbet, près de l’Office de Tourisme et du Port, est
également en cours.
Chapitre II II - A - 3 - c)
Le
format
et
le
contenu
des
plans
communaux de sauvegarde (PCS): Le PCS est de surcroît un document
d’essence et d’efficience communal ; je vois difficilement comment il aurait
pu être élaboré conjointement avec la commune de la Faute-sur-Mer,
d’autant plus que nos deux communes en 2011 n’avaient pas encore opté
pour leur intégration dans la Communauté de Communes du Pays née de la
Mer - option aujourd’hui levée avec l’intégration prévue au 1
er
janvier 2013.
Chapitre V V - A - 2 - Les communes et les intercommunalités :
Concernant les recettes fiscales, je souhaite rappeler que la commune a subi
une perte nette de ses ressources fiscales, hors réforme de la fiscalité faisant
suite à la disparition de la taxe professionnelle.
Tels sont les éléments que je souhaitais soumettre à votre Cour en vue
d’amender votre rapport avant adoption définitive.
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REPONSE COMMUNE DU MAIRE DE LA FAUTE-SUR-MER
ET DE SON ADJOINTE CHARGEE DE L’URBANISME
Au titre de ce contrôle, la Cour des comptes a, en particulier, étudié la
gestion de la tempête Xynthia par la commune de La Faute-sur-Mer.
La commune entend y apporter les précisions suivantes.
Au préalable, il convient de rappeler que la Chambre régionale des
comptes (ci-après « CRC ») des Pays-de-Loire a également examiné la
gestion de la catastrophe naturelle par les différents acteurs locaux, la
commune de La Faute-sur-Mer en particulier.
Dans ses réponses au rapport d’observations provisoires de la CRC
des Pays-de-Loire, la commune notait d’une part l’impossibilité de faire
valoir, dans le cadre de cette procédure, certains éléments relevant du secret
de l’instruction et appréciés par la juridiction pénale saisie sur ce dossier,
d’autre part, le caractère extraordinaire de la tempête Xynthia dont la
gestion excédait amplement la compétence de la commune
Elle revenait également sur certaines présupposées déficiences dans
la gestion de la tempête par la commune, supputées par la CRC. Certains de
ces arguments ont été pris en compte par la Chambre, dans ses observations
définitives. La commune de La Faute-sur-Mer a ainsi montré en quoi nombre
des défaillances qui lui étaient reprochées ne relèvent, en fait, pas de sa
compétence ou concernent des domaines dans lesquels elle n’a, en réalité
que peu de prise.
1.
Sur les systèmes d’alerte et de secours
Votre Cour relève des prétendus dysfonctionnements dans la gestion,
par la commune de La Faute-sur-Mer des systèmes d’alertes d’une part (i) et
dans l’organisation des secours d’autre part (ii).
(i) Sur les systèmes d’alerte
Ainsi, votre Cour déplore que le maire de La Faute-sur-Mer n’ait pas
fait usage des pouvoirs de police qui lui sont reconnus par l’article L. 2212-4
du Code général des collectivités territoriales (ci-après « CGCT »). Il en
aurait résulté une mauvaise information du préfet, gênant, par là-même,
l’alerte aux populations.
Or, l’article L. 2212-4 du CGCT n’est pas applicable dans le cas
d’une catastrophe naturelle telle que la tempête Xynthia. En ce sens, la
gestion de celle-ci, y compris en matière d’alerte des populations, relève
exclusivement de la compétence des services déconcentrés de l’Etat.
En effet, l’article L. 2212-1 du CGCT confie au maire la
responsabilité de la police municipale sur le territoire de sa commune en ce
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qu’il dispose que « le maire est chargé, sous le contrôle administratif du
représentant de l'Etat dans le département, de la police municipale, de la
police rurale et de l'exécution des actes de l'Etat qui y sont relatifs ».
Les pouvoirs de police conférés au maire sont détaillés par l’article
L. 2212-2 du CGCT qui liste les composantes de la police municipale. Le
cinquième alinéa de l’article L. 2212-2 prévoit ainsi que la police municipale
comprend, entre autre, « le soin de prévenir, par des précautions
convenables, et de faire cesser, par la distribution des secours nécessaires,
les accidents et les fléaux calamiteux ainsi que les pollutions de toute nature,
tels que les incendies, les inondations, les ruptures de digues, les
éboulements de terre ou de rochers, les avalanches ou autres accidents
naturels, les maladies épidémiques ou contagieuses, les épizooties, de
pourvoir d'urgence à toutes les mesures d'assistance et de secours et, s'il y a
lieu, de provoquer l'intervention de l'administration supérieure ».
Dans cette hypothèse, le maire est en outre tenu d’adopter les mesures
de sûreté nécessaires dans les conditions suivantes :
« En cas de danger grave ou imminent, tel que les accidents naturels
prévus au 5° de l'article L. 2212-2, le maire prescrit l'exécution des
mesures de sûreté exigées par les circonstances.
Il informe d'urgence le représentant de l'Etat dans le département et
lui fait connaître les mesures qu'il a prescrites » (article L. 2212-4 du
CGCT).
Ces articles consacrent donc la compétence du maire en matière de
police municipale, de maintien de l’ordre public, de la sécurité, de la sûreté
et de la tranquillité publique, notamment face à divers accidents dont
l’ampleur n’excède pas le territoire de sa commune.
En effet, l’exercice des pouvoirs de police administrative générale est
partagé entre le maire, le préfet et les ministres. Ce partage est strictement
encadré, notamment par le CGCT. Ainsi, les compétences du maire rappelées
ci-dessus sont limitées par celles reconnues à l’article L. 2215-1 du CGCT
aux préfets ou aux ministres en matière de gestion de phénomène de grande
ampleur, notamment.
Le troisième alinéa de cet article dispose en ce sens que « la police
municipale est assurée par le maire, toutefois […] le représentant de l’Etat
dans le département est seul compétent pour prendre les mesures relatives à
l’ordre, à la sûreté, à la sécurité et à la salubrité publiques, dont le champ
d’application excède le territoire d’une commune ».
La jurisprudence administrative fait une application constante de
cette répartition des compétences en matière de police administrative
(voir par exemple, CE, 5 avril 2011, Mme Mina A., n° 347949).
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COUR DES COMPTES
La Cour administrative d’appel de Lyon a ainsi jugé, s’agissant de
l’échouage d’une péniche « que l’opération [de secours] ne peut relever des
pouvoirs de police générale du préfet intervenant au nom de l’Etat que si les
conséquences de l’accident excèdent les limites du territoire communal ».
Elle en a déduit que l’échouage de la péniche concernée n’excédait les
limites du territoire de la commune où est survenu l’accident et que, dès lors,
l’organisation des secours relevait des pouvoirs de police du maire
(CAA Lyon, 7 juillet 2011, Société Lyon Parc Auto, n° 10LY00446).
En l’occurrence, il est bien évident que la tempête de Xynthia a touché
un territoire excédant celui de la seule commune de La Faute-sur-Mer. Dès
lors, l’exercice des pouvoirs de police ne relevait pas de la compétence du
maire de La Faute-sur-Mer mais de celle du préfet de Vendée.
En outre, et en tout état de cause, en cas d’alerte de niveau rouge, la
diffusion de l’information et l’actionnement des dispositifs d’alerte sont
effectués par le Préfet, comme l’explique la circulaire interministérielle
relative
à
la
procédure
de
vigilance
et
d’alerte
météorologique
(NOR : IOCE1123223C).
A cet égard, il est manifeste qu’au-delà de l’évidente compétence du
Préfet, lui seul disposait de la capacité, des réseaux d’information et des
moyens pour diffuser efficacement l’alerte auprès des populations et
déployer les mesures de sûreté adaptées.
Enfin, la commune rappelle que l’analyse des messages d’alerte
donnés aux maires a révélé des dysfonctionnements qui ne sont pas le fait des
communes.
Ainsi, le Rapport d’information de l’Assemblée nationale sur les
raisons des dégâts provoqués par la tempête Xynthia (M. Jean-Louis
Léonard, enregistré le 1
er
juillet 2010), le Rapport d’étape du sénateur Alain
ANZIANI Tempête Xynthia, Retour d’expérience, évaluation et propositions
d’action (enregistré le 10 juin 2010) et le Rapport d’information fait au nom
de la mission commune d’information sur les conséquences de la tempête
Xynthia soulignent que les messages d’alerte des 26 et 27 février 2010,
diffusés par les services du Préfet, recommandaient le confinement aux
populations et insistaient davantage sur les risques de forts vents que sur
ceux de submersion marine.
Les victimes de la catastrophe seront précisément celles qui
respecteront ces consignes de confinement.
L’évacuation des populations n’a jamais été clairement recommandée
(par exemple Rapport de l’Assemblée nationale précité, p. 33).
Comme le souligne la mission d’information du Sénat au sujet des
bulletins d’alerte :
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263
« Il apparaît clairement que l’impact réel de la tempête sur les
activités et équipements humains n’a pas été parfaitement anticipé
dans
sa
nature
(le
risque
« inondation »
n’y
est
évoqué
qu’accessoirement, parmi d’autres risques potentiels, alors qu’il s’est
révélé être le principal risque), ni dans son intensité (il n’est
aucunement fait état de l’ampleur majeure de l’évènement et de ses
conséquences potentiellement catastrophiques.
De la même façon les conseils de comportement, qui certes ont été
prodigués et ont eu le mérite d’exister, ne semblent pas totalement
adaptés au degré exceptionnel du sinistre et à son caractère
potentiellement meurtrier. Ils laissent plutôt entrevoir un phénomène
d’importance certes substantielle, mais ne requérant pas pour autant
les précautions fondamentales, notamment d’évacuation, qui auraient
dû s’imposer pour un évènement de ce type » (Rapport du Sénat
précité, p. 22).
Le rapport interministériel précité explique que la mission « a
constaté que les conseils prodigués aux maires dans les messages d’alerte
transmis par les préfectures, lors de l’élévation des niveaux d’alerte au cours
de la tempête Xynthia, ne rappelaient que dans un seul cas l’opportunité
d’ouvrir des lieux de regroupement prêts à accueillir les habitants en cas de
nécessité » (Rapport interministériel précité, p. 19).
Il ajoute que « les évacuations étaient rendues très délicates par
l’impossibilité de caractériser finement en temps et en lieu la survenance des
phénomènes de submersion annoncés de manière générale dans les messages
d’alerte, sauf aux préfets à ordonner et à organiser l’évacuation préventive
de l’ensemble des zones menacées, mesure qui a semblé irréaliste à la
mission dans cette circonstance, et que les vents violents annoncés auraient
pu rendre dangereuse » (Rapport interministériel précité, p. 20).
En tout état de cause et d’un point de vue pratique, un maire, qui plus
est d’une petite commune comme La Faute-sur-Mer, ne dispose ni des
moyens nécessaires ni des compétences pour faire évacuer, dans l’urgence,
toute une population, dans une situation telle que celle de la tempête Xynthia.
Ces derniers éléments doivent guider l’examen de la gestion de
l’alerte aux populations de la commune de La Faute-sur-Mer, en gardant en
mémoire que c’est l’ensemble du dispositif d’alerte qui a été remis en cause à
la suite de la tempête Xynthia, confirmant son inadaptation à des
phénomènes de telle ampleur.
(ii) Sur l’organisation des secours
S’agissant de l’organisation des secours, votre Cour regrette
l’absence de plan communal de sauvegarde (ci-après « PCS ») sur la
commune de La Faute-sur-Mer et l’absence de coordination entre la
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COUR DES COMPTES
commune de La Faute-sur-Mer et la commune de L’Aiguillon-sur-Mer pour
l’élaboration de ces plans.
Votre Cour juge ainsi qu’ « en tout état de cause, l’absence de plan
communal n’a pas facilité le regroupement de la population dans des lieux
sécurisés, en particulier à La Faute-sur-Mer ».
Or, comme le souligne votre Cour, l’absence de plan communal de
sauvegarde (PCS) dans la commune de La Faute-sur-Mer résulte tout
simplement du dispositif légal et réglementaire applicable (loi n° 2004-811
du 13 août 2004 de modernisation de la sécurité civile, décret n° 2005-1156
du 13 septembre 2005, relatif au plan communal de sauvegarde et pris pour
application de l’article 13 de la loi n° 2004-811 du 13 août 2004 de
modernisation de la sécurité civile). Il n’appartient pas à la commune de
juger de l’opportunité de cette réglementation.
Ainsi, l’adoption d’un PCS est régie par la loi du 13 août 2004 de
modernisation de la sécurité civile précitée. Son article 13 dispose que :
« Le plan communal de sauvegarde regroupe l'ensemble des
documents de compétence communale contribuant à l'information
préventive et à la protection de la population. Il détermine, en
fonction des risques connus, les mesures immédiates de sauvegarde et
de protection des personnes, fixe l'organisation nécessaire à la
diffusion de l'alerte et des consignes de sécurité, recense les moyens
disponibles
et
définit
la
mise
en
oeuvre des
mesures
d'accompagnement et de soutien de la population. Il peut désigner
l'adjoint au maire ou le conseiller municipal chargé des questions de
sécurité civile. Il doit être compatible avec les plans d'organisation
des secours arrêtés en application des dispositions de l'article 14.
Il est obligatoire dans les communes dotées d'un plan de prévention
des risques naturels prévisibles approuvé ou comprises dans le champ
d'application d'un plan particulier d'intervention.
Le plan communal de sauvegarde est arrêté par le maire de la
commune et pour Paris par le préfet de police.
Dans les établissements publics de coopération intercommunale à
fiscalité propre, un plan intercommunal de sauvegarde peut être établi
en lieu et place du plan prévu au premier alinéa. En ce cas, il est
arrêté par le président de l'établissement public et par chacun des
maires des communes concernées.
La mise en oeuvre du plan communal ou intercommunal de sauvegarde
relève de chaque maire sur le territoire de sa commune.
Un décret en Conseil d'Etat précise le contenu du plan communal ou
intercommunal de sauvegarde et détermine les modalités de son
élaboration ».
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COLLECTIVITES CONCERNES
265
Le décret n° 2005-1156 du 13 septembre 2005 relatif au plan
communal de sauvegarde et pris pour application de l'article 13 de la loi
n° 2004-811 du 13 août 2004 de modernisation de la sécurité civile a précisé,
dans son article 8, que « les communes pour lesquelles le plan communal de
sauvegarde est obligatoire doivent l'élaborer dans un délai de deux ans à
compter de la date d'approbation par le préfet du département du plan
particulier d'intervention ou du plan de prévention des risques naturels, ou à
compter de la date de publication du présent décret lorsque ces plans existent
à cette date ».
La commune de La Faute-sur-Mer étant dépourvue de plan de
prévention du risque d’inondation approuvé, elle n’était pas tenue de définir
un plan. Il n’appartient pas à la commune de juger de l’opportunité de cette
réglementation. L’absence de PCS dans sa commune résulte tout simplement
du dispositif législatif et réglementaire.
Sur le fond, la Commune de La Faute-sur-Mer entend rappeler qu’elle
a pris l’initiative d’informer dès 2006 l’ensemble des professionnels de
l’immobilier exerçant sur son territoire - notaires, agents immobiliers,
loueurs en meublés - des obligations d’information leur incombant au titre
des risques naturels et technologiques identifiés et les invitant à prendre
connaissance des documents complémentaires afférant à ces risques en
mairie et en préfecture.
Par courrier du 26 juillet 2007 la commune a informé les services de
la DDE de cette initiative et a sollicité auprès d’eux conseils et assistance,
sur le point de savoir si ces mesures d’informations étaient suffisantes ou si
elles devaient être complétées par d’autres, telles que signal d'alerte sonore,
point de rassemblement sur un lieu élevé.
Pour seule réponse, les services de la direction départementale de
l’équipement (DDE) transmettront à la commune de La Faute-sur-Mer un lot
de plaquettes d’information préventive sur le plan de prévention du risque
inondation (PPRI) de l’estuaire du Lay, qui seront effectivement mises à
disposition des habitants.
En d’autres termes, la commune de La Faute-sur-Mer a bien
interrogé les services de la DDE sur le caractère suffisant des mesures
d’information et de sauvegarde prises ; l’ensemble des préconisations
obtenues auprès de ces services à l’initiative de la commune - qui
n’incluaient pas l’établissement d’un PCS - a été mis en oeuvre.
En toute hypothèse, les missions d’information parlementaires ont
souligné les difficultés que connaissent les communes, surtout celles de petite
taille, pour établir ces PCS.
La mission d’information de l’Assemblée nationale rapporte au sujet
de la définition des PCS que « quel que soit le département, certaines
[communes] n’en ont ni les compétences ni les moyens. (…) La structure des
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COUR DES COMPTES
plans communaux de sauvegarde n’est pas adapté aux petites communes
pour lesquelles il devrait exister une procédure simplifiée » (Rapport de
l’Assemblée nationale précité, p. 36).
La commune de La Faute-sur-Mer compte environ 1 000 habitants.
Malgré ces difficultés, constatées sur l’ensemble du territoire français
pour les communes de taille modeste, la commune de La Faute-sur-Mer a
désormais approuvé son PCS, en février 2011.
Par ailleurs, l’absence de coordination locale entre les trois
communes littorales dans l’élaboration du PCS actuel relève du pouvoir
d’appréciation des communes. En ce sens, la coopération intercommunale
n’est qu’une simple faculté et il n’est nullement établi qu’elle permette une
meilleure efficacité en la matière.
2.
Sur la prévention et l’urbanisme
Sur ce sujet, la commune de La Faute-sur-Mer rappelle qu’elle
dispose d’une influence réelle restreinte, d’une part parce que les diverses
demandes d’urbanisme sont également instruites ou contrôlées par les
services déconcentrés de l’Etat et, d’autre part, parce que la commune
dispose de moyens trop faibles, compte tenu de la taille réduite de son service
d’urbanisme, pour évaluer le développement urbain sur son territoire et les
risques encourus.
Ce constat doit être dressé, même si le maire de La Faute-sur-Mer est
compétent pour délivrer les permis de construire.
Le contrôle de l’urbanisation du territoire municipal ainsi que de son
adéquation aux risques encourus demande en effet une expertise et un
investissement que l’on ne peut raisonnablement attendre d’une commune de
1 000 habitants.
C’est d’ailleurs ce que souligne votre Cour en rappelant que « de
façon générale, le contrôle de légalité sur les décisions d’urbanisme s’est
révélé trop faible », qu’ « à La Faute-sur-Mer, au lieu-dit « l’anse de Virly »,
où le plus grand nombre de décès a été constaté lors de la catastrophe, trois
autorisations de lotir avaient été accordées par le maire, avec l’avis
favorable du préfet et de services de l’Etat », que le lotissement « les
Voiliers » à La Faute-sur-Mer avait été autorisé par le maire « avec l’accord
du préfet au titre de l’article L. 146-4-II du code de l’urbanisme ».
Au contraire, les préfectures disposent des moyens nécessaires pour
mettre en oeuvre une politique d’urbanisation conforme aux risques encourus
sur le territoire de communes tel que celui de La Faute-sur-Mer.
Ainsi, aux termes de l’article L. 422-8 du Code de l’urbanisme :
« Lorsque la commune comprend moins de 10 000 habitants ou
lorsque
l'établissement
public
de
coopération
intercommunale
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compétent groupe des communes dont la population totale est
inférieure
à
20 000 habitants,
le
maire
ou
le
président
de
l'établissement public compétent peut disposer gratuitement des
services déconcentrés de l'Etat pour l'étude technique de celles des
demandes de permis ou des déclarations préalables qui lui paraissent
justifier l'assistance technique de ces services. Pendant la durée de
cette mise à disposition, les services et les personnels agissent en
concertation avec le maire ou le président de l'établissement public
qui leur adresse toutes instructions nécessaires pour l'exécution des
tâches qu'il leur confie.
En outre, une assistance juridique et technique ponctuelle peut être
gratuitement apportée par les services déconcentrés de l'Etat, pour
l'instruction des demandes de permis, à toutes les communes et
établissements publics de coopération intercommunale compétents ».
L’existence d’un tel dispositif montre bien que le législateur a bien
conscience que la politique en matière d’urbanisation ne peut être assumée
seule par des petites communes.
En l’espèce, la commune de La Faute-sur-Mer compte environ
1 000 habitants et se situe bien en-dessous du seuil de 10 000 habitants posés
par la loi.
La commune avait ainsi fait le choix de confier l’instruction de
l’ensemble des demandes de permis de construire aux services de la DDE,
également chargés de la vérification de la conformité des ouvrages aux
permis accordés.
L’ensemble des permis de construire attribués sur le territoire de la
commune l’a donc été sur avis conforme des services de la DDE, par ailleurs
destinataire de l’étude des risques de submersion marine de décembre 2000
et auteurs de l’Atlas de l’aléa de submersion marine de juin 2002. Ces
services ont été pleinement associés à l’établissement du PPRI ainsi qu’à son
opposabilité immédiate.
En outre, d’autres moyens étaient à la disposition des préfectures
pour sanctionner des autorisations d’urbanisme dangereuses, dans le cadre
du contrôle de légalité par exemple.
En définitive, l’urbanisation du territoire de la commune de La Faute-
sur-Mer, sans doute excessive, est donc le fait d’une conjonction d’acteurs et
de responsabilités, sur lesquels la commune de La Faute-sur-Mer avait,
somme toute, assez peu de prise.
3.
Sur la protection des zones bâties
En sus de ce qui a été rappelé ci-dessus en matière d’urbanisation,
parfois dans les zones dangereuses, la commune de La Faute-sur-Mer
partage le constat selon lequel le dispositif réglementaire de protection face
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COUR DES COMPTES
au risque de submersion marine, et en particulier de gestion des digues, est
vétuste et trop peu efficace.
4.
Sur les indemnisations
Comme le rappelle votre Cour, la commune de La Faute-sur-Mer a
décidé d’édicter des critères lors de l’attribution des aides aux victimes. Cela
lui paraissait juste et nécessaire à la bonne gestion des deniers publics
affectés à l’aide aux sinistrés.
La commune a ainsi versé des aides conséquentes aux sinistrés (en
moyenne 625 € par victime), dans le délai de trois mois, ce qui constitue un
délai tout à fait raisonnable.
Votre Cour ne relève d’ailleurs pas de défaut dans la gestion de ces
dépenses.
Elle signale en revanche « la faible mobilisation par la commune de
La Faute-sur-Mer de son CCAS ». Ce choix, qui relève de la seule
appréciation de la commune, n’a néanmoins pas emporté de difficultés dans
la gestion de l’aide aux victimes.
*
Tels sont les éléments de réponse que je souhaitais apporter à vos
observations.
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269
REPONSE DU PRESIDENT DE L’ASSOCIATION SYNDICALE
DE LA VALLEE DU LAY
Ce
projet de rapport conduit de ma part la formulation des
observations
suivantes
:
Dans
votre projet, vous indiquez que
selon
les indications verbales
du
président
de l'Association
syndicale
des Marais de la
Faute-sur-
Mer
(ASMF), il
existerait
un partage tacite
de responsabilité
avec
l'ASVL, celle-
ci
se chargeant
des gros
travaux
d'entretien
et
l'Association syndicale de la
Vallée du Lay (ASMF), gardant
seule
l'entretien
courant
de la digue.
L'ASVL
entend
préciser qu'elle intervient
sur
demande
expresse
du
président
de l'ASMF.
Elle
est
intervenue
en
2002 pour
la pose
d'enrochements
sur
un linéaire d'environ 50 ml,
sur
commande expresse du
président de l'ASMF.
L'ASVL entend dès lors contester un quelconque partage tacite de
responsabilité entre l'un et l'autre de ces acteurs locaux. Cette intervention
ponctuelle, sur commande, ne saurait se traduire en un partage de
responsabilité.
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270
COUR DES COMPTES
REPONSE DU PRESIDENT DE L’ASSOCIATION SYNDICALE
DES MARAIS DE LA FAUTE SUR MER
Cette association ayant été dissoute le 5 avril 2012 par Monsieur Le
Préfet de Vendée, c'est à titre personnel que j'y réponds.
De plus, une partie de ce rapport ne concerne pas l'ASA des Marais
de La Faute, mais l'aménagement urbain de la commune qui n'est pas du
ressort de l'ASA des marais de La Faute.
Vous trouverez ci-dessous mes remarques dont je vous remercie de
bien vouloir tenir compte.
Vous indiquez que le lotisseur tente, en un premier temps, de contester
le besoin d'une telle autorisation. Vous oubliez de préciser un point
important figurant dans le rapport de la commission des sites ; à savoir la
position de la direction départementale de l'agriculture : ce dossier ne se
situe pas dans une zone humide. Cela figure en toutes lettres dans le rapport
de la commission (intervention de M. COLLINEAU). C'est cet avis que j'ai
rappelé dans mes courriers au préfet. De plus, lors de la phase de
préparation de ce lotissement, il avait été bien évidemment demandé la
position du service chargé de l'application de la loi sur l'eau. Nous avions
reçu un récépissé de déclaration le 28/02/2002, ce qui montre que nous
avons respecté le formalisme. C'est le nouveau service instructeur de la
police de l'eau qui a eu un avis différent du précédent et qui a classifié ce
secteur en zone humide nécessitant une autorisation et non une simple
déclaration. J'avais déjà indiqué cela dans mon courrier à la chambre
régionale des comptes en date du 29/11/2011. Vous n'avez nullement tenu
compte de mes remarques.
Votre rapport ne relate pas les faits tels qu'ils se sont produits, qui ont
pour but d'orienter le lecteur de ce rapport. J'avais déjà dénoncé cela dans
mon courrier du 29/11/2011 à votre direction régionale, mais je constate que
cela perdure. Les aménagements de mise en place d'un clapet anti retour,
d'un décanteur déshuileur et d'une pompe de relevage étaient prévus dans les
travaux de la 2ème tranche. Les services de la DDE m'ont demandé de faire
ces travaux dès ce moment-là, au cas où la 2ème tranche du lotissement ne
serait pas réalisée. J'ai donc fait ces travaux comme demandé. Votre
imprécision laisse supposer que je ne réalisais pas les travaux prévus.
Les propos indiqués relèvent de la diffamation. Comme je l'avais déjà
indiqué dans mon courrier du 29/11/2011, je constate que la Cour des
comptes succombe aux sirènes de l'acharnement médiatique. Premièrement,
l'ASA des Marais de La Faute ne donne pas d'avis quant à l'aménagement de
lotissements faits sur la commune. Il n'y a donc pas de lien entre les deux.
Quant à la position de Mme BABIN Françoise, je vous rappelle que, comme
vous l'avez indiqué, que l'instruction d'une demande d'autorisation de lotir se
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COLLECTIVITES CONCERNES
271
fait par les services de l'État qui ont tous donné leur accord. L'enquête
pénale n'a relevé aucune prise illégale d'intérêt. Est-ce que la Cour des
comptes aurait des éléments montrant le contraire dont n'aurait pas eu
connaissance la justice ? Je ne peux admettre ces propos « faciles » et
dénués de fondement. Je transmets copie de ce courrier à mon avocat et me
ferai un plaisir de donner une suite judiciaire si votre rapport définitif
contenait une quelconque allégation diffamante à mon intention et à celle de
ma mère.
S’agissant de la dissolution de l'ASA. Je ne sais pas comment vous
avez pu déterminer que l'ASA n'était pas dissoute en mars 2012 aux motifs
que de procédures judiciaires en cours avec des particuliers pour certains
biens à transférer. Une fois encore, comme je l'ai dénoncé dans mon courrier
du 29/11/2012, vous faites des raccourcis très hasardeux. Il y a eu par le
passé des procédures faites par des particuliers qui ont eu pour conséquence
d'empêcher la procédure de dissolution. Ces procédures se sont achevées en
2009, ce qui a permis de convoquer l'assemblée générale des propriétaires
de l'ASA du 24 octobre 2009 qui a demandé la dissolution de l'ASA. A cause
de la tempête, l'instruction de la procédure de dissolution a été mise en
suspend et n'a été reprise qu'en 2011. Il a fallu attendre la clôture des
comptes 2011 de l'ASA pour que la dissolution soit prononcée le 5 avril
2012.
S’agissant des liens entre les différents acteurs intervenants dans la
gestion des digues. Il peut être facile de qualifier la situation d’« imbroglio
juridique » mais cela n'a pas empêché que les actions engagées par les
différents acteurs de ce dossier (Mairie, ASA Marais de la Faute, ASVL) suite
à l'arrêté Préfectoral du 7 juillet 2005 demandant un diagnostic de l'état des
digues et la mise en place d'un programme de travaux. En page 12, vous
indiquez « un exemple de travaux non réalisés avant la tempête ». Le temps
écoulé entre le diagnostic et le démarrage de la 1ère tranche de travaux est
certes long mais si vous prenez la peine de lister toutes les actions, études,
enquêtes publiques qui ont été réalisées avant de pouvoir donner le 1er coup
de pelle, vous comprendrez mieux ce délai. D'ailleurs, il est curieux
qu'aucune critique n'ait été faite de votre part sur ces procédures
interminables, coûteuses et redondantes pour certaines qui ont abouti à ce
que les travaux ne soient lancés que beaucoup plus tard. Je me permets de
rappeler que ces travaux avaient pour but de se prémunir d'évènements
climatiques pouvant arriver dans une centaine d'années du fait de la montée
des eaux estimée.
Je constate à la lecture de votre rapport, que des omissions dans la
chronologie des faits perdurent encore, ayant pour conséquence d'orienter le
lecteur.
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272
COUR DES COMPTES
REPONSE DU PRESIDENT DU SERVICE DEPARTEMENTAL
D’INCENDIE ET DE SECOURS (SDIS) DE LA VENDEE
Comme vous me le proposez le cas échéant dans votre courrier du
22 mai dernier, je vous informe de mon souhait de vous apporter ci-dessous
la réponse au rapport de la Cour, sur deux éléments :
→
« 2 – L’adaptation du schéma départemental d’analyse et de
couverture des risques (SDACR) »
Le SDACR du SDIS de la Vendée a été approuvé par le préfet le
14 février 2011 après avis conforme exprimé par le Conseil d’administration
du SDIS lors de sa séance du 13 décembre 2010.
Il s’agit d’un document d’orientation. Les études réalisées à ce titre
qui étaient lancées lors de la tempête ne sont pas, à ce jour, obsolètes. Une
mise à jour est toutefois en cours.
En ce qui concerne la couverture en bateaux, celle-ci tient compte non
seulement de la surface du territoire submersible mais aussi, et surtout, de
l’importance de la population exposée au risque. Tous les centres de secours
du littoral sont équipés en bateaux pneumatiques pour la mer.
→
«1 – La localisation en zone inondable des centres de secours des
services départementaux d’incendie et de secours»
Le choix d’un nouveau terrain permettant la relocalisation du
casernement du centre de secours de L’Aiguillon-sur-Mer est conditionné
par le zonage du Plan de prévention du risque inondation (PPRI) en cours
d’élaboration qui devrait être approuvé par le préfet de la Vendée d’ici la fin
de l’année 2012.
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273
REPONSE DE LA GERANTE DU RESTAURANT L’OASIS
Je n’ai aucune observation particulière, si ce n’est que le temps, entre
la catastrophe et les indemnisations, a été très long (1 an et demi).
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274
COUR DES COMPTES
REPONSE DU PREFET DU VAR
Je tiens tout d’abord à souligner à nouveau le caractère tout à fait
fructueux des échanges avec la Cour des comptes qui a contribué à conforter
la stratégie partenariale que l’Etat doit poursuivre dans le département avec
les collectivités territoriales, pour entreprendre des travaux visant à
anticiper et à réduire les risques en matières d’inondations, en particulier
sur le volet urbanistique.
D’une manière générale, les observations que vous formulez
rejoignent les stratégies actuellement engagées dans le département pour
rechercher toutes les pistes d’amélioration comme cela s’est déjà traduit
dans la mise en oeuvre par anticipation de 12 des 13 Plans de prévention du
risque inondation (PPRI) des communes les plus touchées par les deux
inondations.
Je souhaite toutefois apporter quelques précisions concernant
l’exercice du contrôle de légalité sur les actes ADS (application du droit des
sols) que vous évoquez dans le rapport global.
Dans cette partie du document, la pratique du contrôle des actes
d'urbanisme est qualifiée d'insuffisante en raison du rapport entre les actes
transmis au contrôle de légalité et le nombre de lettres d'observations et de
déférés du préfet.
Ce nombre apparaît plus faible que dans le reste de la France pour
les trois départements concernés en ce qui concerne les lettres d'observations
et supérieur au niveau national pour le Var pour le taux de déféré.
Tout d'abord, il convient de préciser que les actes contrôlés
comprennent la totalité des actes transmis, dont les certificats d'urbanisme
qui, hormis les certificats d’urbanisme de type b(CU b), ne font pas l’objet de
contrôle systématique, car ne figurant pas au nombre des actes prioritaires.
Si le pourcentage de lettres d'observations et de déférés est par construction
de l’indicateur nécessairement faible, en revanche le pourcentage de déférés
gagnés (de 94 %) dans le Var démontre la réussite de l'action du contrôle de
légalité.
Il est, d'ailleurs, important de signaler la progression des déférés et
des référés du préfet de 2007 à 2011. Durant cette période, le nombre de
déférés passe de 10 (en 2007) à 59 (en 2011) et les référés de 6 à 44.
Par ailleurs, le contrôle de légalité des actes d'urbanisme demeure un
enjeu fort dans le département du Var avec un personnel affecté sur cette
mission important : 7 agents en direction départementale des territoires et de
la mer (DDTM) et 2 agents en préfecture, dont un agent de la DDTM.
La DDTM exerce le contrôle technique des actes d'urbanisme et les
propositions de lettres d'observation, et la préfecture établit les déférés,
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275
référés-suspension et assure la représentation de l'Etat aux audiences devant
le tribunal administratif.
Une
collaboration
entre
les
deux
services
permet
le
bon
fonctionnement de cette mission avec le concours occasionnel, en cas de
besoin, du service juridique de la DDTM.
Chaque année, la stratégie du contrôle de légalité est examinée par
mes services avec la volonté permanente de conserver en première priorité la
sécurité des personnes et des biens.
Tels sont les éléments que je souhaite mettre en évidence sur cet
aspect de votre rapport, étant précisé que ma détermination est profonde à
mobiliser mes services pour conseiller et venir en appui auprès des
collectivités, pour les guider dans la réalisation de leur stratégie urbaine et
environnementale.
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COUR DES COMPTES
REPONSE DU PREFET
DE LA REGION PROVENCE-ALPES-COTE D’AZUR,
PREFET DES BOUCHES-DU-RHONE,
ANCIEN PREFET DU VAR (JUIN 2009 – OCTOBRE 2010)
La lecture de l’extrait transmis n’appelle pas d’observation de ma
part, ni de réponse particulière aux éléments objectifs que contient ce
rapport.
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REPONSE DU DIRECTEUR GENERAL DE L’AGENCE REGIONALE
DE SANTE DU CENTRE,
ANCIEN PREFET DU VAR (JUILLET 2007 – JUIN 2009)
Je vous informe que je n’ai pas d’observations à formuler concernant
l’extrait du projet de rapport public thématique.
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COUR DES COMPTES
REPONSE DU PREFET DU VAL-DE-MARNE,
ANCIEN PREFET DU VAR (JUILLET 2007 – JUIN 2009)
Je vous informe que ce projet de rapport n’appelle pas
d’observation de ma part.
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279
RÉPONSE DU PRESIDENT DU CONSEIL GÉNÉRAL DU VAR
Le rapport prend en compte les interventions aussi bien de l’Etat que
des collectivités territoriales. Pour ce qui concerne le Conseil général du
Var, je confirme le chiffre de 25 M€ qui correspond au coût net de la
catastrophe des 15 et 16 juin 2010, sans compter les investissements qui
restent à programmer dans les années à venir, comme le souligne la Cour
des comptes.
Je préciserai à ce sujet que la réfection de la route des gorges de
Châteaudouble est estimée à 37 M€ et que la reconstruction du pont de
Taradeau est chiffrée à 3 M€.
La Cour des comptes souligne à juste titre que cette crise a pesé sur
les investissements, notamment pour financer les travaux d’urgence et
remettre en état la voirie et les bâtiments départementaux.
Ceci est d’autant plus préoccupant que les finances départementales
ont à supporter dans le même temps l’augmentation importante des charges
de fonctionnement, notamment dans le secteur social.
Par ailleurs, la Cour des Comptes a pris acte de la volonté du Conseil
général du Var de piloter un Programme d’action de prévention des
inondations (PAPI) sur le bassin versant de l’Argens afin de trouver des
solutions pour les années futures.
Je rappellerai simplement en conclusion que le Conseil général a su
être réactif lors de cette catastrophe aussi bien dans les jours que dans les
mois suivants pour apporter une aide à la population, aux communes, aux
entreprises, aux agriculteurs et remettre en état les liaisons routières qui
avaient été endommagées.
Le département a aussi confirmé son rôle de proximité et de solidarité
envers la population varoise.
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COUR DES COMPTES
REPONSE DU PRESIDENT DE LA COMMUNAUTÉ
D’AGGLOMÉRATION DRACÉNOISE
Je prends acte des observations et recommandations formulées par la
Cour et vous prie de bien vouloir trouver ci-après nos éléments de réponse,
intégrant un certain nombre d’évolutions à venir.
Chapitre II - les systèmes d’alerte et de secours : des progrès à
poursuivre
II A 3c : le format et le contenu des plans communaux de sauvegarde
Le management des risques est abordé par la Communauté
d’Agglomération Dracénoise (CAD), comme l’une de ses politiques
publiques institutionnelles.
A cet effet, la CAD a placé l’ingénierie et l’appui aux communes
comme fil conducteur de sa nouvelle organisation interne.
Ainsi, dans la direction Protection et valorisation de l’environnement,
un service management des ressources et gestion des risques a été créé.
Parallèlement, une cellule de crise et gestion des risques majeurs a
été créée et placée sous l’autorité directe de la direction générale des
services et du Président.
C’est dans ce cadre que l’élaboration d’un plan intercommunal de
sauvegarde (PICS) a été lancée.
La CAD souhaite ainsi résolument s’organiser en interne et en soutien
de ses communes membres afin de pouvoir gérer au mieux ces épisodes
météorologiques. Cette démarche ne s’arrête d’ailleurs pas au risque
inondation, mais se veut plus globale au regard des risques majeurs
potentiels auxquels est exposé son territoire.
Ainsi, l’ambition est une gestion des risques en réseau avec les
communes et les différents services de la CAD concernés, dans l’objectif de
créer un véritable système de management des risques au niveau
intercommunal.
La cellule de crise, quant à elle, aura pour vocation d’apporter tout le
soutien nécessaire aux communes en regard de leurs besoins dans le cadre
des compétences communautaires.
Pour aboutir dans cette démarche, le directeur des transports suit,
depuis le mois d’octobre 2011, une formation certifiée au Registre National
des Certifications Professionnelles, spécialisée en gestion des risques sur les
territoires.
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281
Ce Mastère a pour objectif de former des « risk manager » des
secteurs public et privé au terme d’une année de formation de 350 heures.
Chapitre V - les indemnisations : très complètes mais avec des
incohérences
II - les dons, l’aide et l’indemnisation des particuliers
La Cour relève que les dons ont été imputés au compte 7713
« libéralités reçues » sans affectation spéciale.
Je souhaite préciser qu’à ce jour, la CAD a perçu 202 588,41 € de
dons mais que, sur cette somme, 680 € provenaient de quatre particuliers, le
solde émanant de collectivités, notamment la Principauté et la ville de
Monaco pour un total de 111 500 € et de l’Association des Maires du Var
pour 63 000 €. Même si aucune réglementation n’impose de rendre compte
aux donateurs de l’utilisation de ces dons, un numéro « hors série » de la
revue communautaire « Dracénie Mag », paru dès juin, et les numéros de
l’automne 2010 et de l’été 2011 ont permis de remercier tous ceux,
collectivités, associations, particuliers, qui ont participé, sous quelque forme
que ce soit, et notamment par des dons, au relèvement de la Dracénie.
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COUR DES COMPTES
REPONSE DU MAIRE DE DRAGUIGNAN
Je ne peux que constater comme vous, le dramatique bilan des
inondations du 15 juin 2010 qui renouvelle le triste évènement de 1827 et la
vulnérabilité des dispositifs publics.
La prévention et les documents d’urbanisme (PPRI, POS)
Le Plan de prévention du risque inondation (PPRI) de l’époque
présentait des incohérences que la commune avait déjà soulevées dans un
courrier adressé à la Direction Départementale de l’Équipement (DDE) en
date du 22 décembre 2000 et réitérées lors de l’enquête publique. L’avis
défavorable du commissaire enquêteur précisait dans sa conclusion :
« j’estime que le projet de PPRI présenté à l’enquête publique (…) comporte
trop d’approximations, d’incohérences ».
En 1996, la commune demandait au bureau d’étude SOGREAH une
étude sur les conditions d’écoulement de la Nartuby à Draguignan et sur les
risques d’inondation pour une crue centennale.
Compte tenu des risques relevés, en 1998 une étude hydraulique
complémentaire
devait
conduire
à
la
définition
des
aménagements
nécessaires pour réduire ces risques et à la détermination de leurs impacts
sur la propagation des crues.
Le PPRI du 30 décembre 2005, annexé au Plan d’occupation des sols
(POS) par arrêté du maire le 7 septembre 2006, a été appliqué dès son
adoption par le Préfet. Ce document constitue une servitude d’utilité
publique qui s’impose aux documents d’urbanisme. Par conséquent, le PPRI
ayant été scrupuleusement respecté par la commune, la modification ou la
révision du POS en vue de mettre le zonage d’urbanisme en cohérence avec
les secteurs inondables du PPRI n’aurait eu pour seul avantage que de
synthétiser sur une seule cartographie (zonage PLU) les contraintes
appliquées à partir de deux (PLU + PPRI).
De plus, la révision générale du POS et sa transformation en Plan
local d’urbanisme (PLU) décidée par délibération du conseil municipal
n° 2008-126 en date du 15 octobre 2008, donc antérieurement à la
catastrophe du 15 juin 2010 n’a pu aboutir du fait d’évènements exogènes.
Par ailleurs, le POS en vigueur datant de 1989 - et donc antérieur au
PPRI - comporte des règles propres aux secteurs inondables. Ainsi, la zone
UD du POS correspondant aux zones d’activités comprend un sous-secteur
UDb « dans lequel, en raison des risques d’inondation, l’édification de
nouvelles constructions ne peut être autorisée que si une mise hors d’eau de
l’emprise des bâtiments a été faite au préalable ». Il en va de même pour la
zone 1NA, dont le sous-secteur 1NAb est soumis aux mêmes dispositions.
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283
Le POS de Draguignan avait donc intégré, bien avant l’adoption du
PPRI par le Préfet, des dispositions réglementaires contraignantes destinées
à limiter le risque d’inondation, principalement dans les zones d’activité.
Le futur PLU quant à lui, intégrera donc de fait au travers de son
zonage, le nouveau PPRI.
Plan Local d'Urbanisme qui sera conforme à la « philosophie »
d'aménagement de la loi Solidarité et Renouvellement Urbain, c'est-à-dire
que le développement de la ville se fera « sur elle-même ». L'accroissement
du nombre de logements s'effectuera en priorité par de la densification de
l'habitat dans les quartiers non impactés par le risque inondation et ils sont
nombreux.
L’atlas des zones inondables a été transmis au maire par le préfet du
Var par courrier du 8 juin 1995. Le préfet rappelait à cette occasion qu’il
n’existait alors aucun document opposable en matière de prévention des
risques pour la commune de Draguignan.
Pourtant, dès le 14 février 1995, le Maire délivrait un certificat
d’urbanisme négatif motivé entre autres par le fait que « le lot C est situé
dans le lit majeur de la rivière la Nartuby où les constructions doivent
obligatoirement faire l’objet au préalable d’une mise hors d’eau de l’emprise
de tout bâtiment »
Les risques liés aux mouvements de terrains et aux thalwegs ont
également été pris en compte dès la connaissance du risque, et avant la
prescription du PPR le 7 janvier 1997.
Ainsi, tant le risque de crue de la rivière que celui de ruissellement
des vallons ont été pris en compte dans les autorisations d’urbanisme, et ce
avant la communication de l’atlas des zones inondables et avant la
prescription des PPR, et alors même que le POS de 1989 délimitait déjà des
zones inondables où les constructions étaient soumises à prescriptions
particulières.
La commune entend également souligner le fait que, dès 1992, elle a
imposé, dans la plupart des autorisations de lotir, des dispositifs de rétention
des eaux pluviales issues des surfaces imperméabilisées.
Enfin, bien que le Maire soit l’autorité compétente en matière de
délivrance des autorisations d’urbanisme, l’instruction de ces demandes a
été assurée par les services de l'Etat et en l’occurrence la DDE du Var
jusqu’à la création de la Communauté d’Agglomération Dracénoise au début
des années 2000.
Les services de l’État élaboraient donc les documents de référence en
matière de gestion des risques, établissaient les POS pour le compte des
communes (dont celui de Draguignan en 1989), et instruisaient les demandes
d’autorisation d’urbanisme. Il en est ainsi du permis de construire délivré le
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COUR DES COMPTES
24 janvier 1956 d'habitations au quartier de la Clappe et du quartier du
Dragon, bien avant les lois de décentralisation. Mais également du permis du
centre pénitencier en date du 5 juillet 1979, modifié le 10 juin 1994, qui sont
des permis « Etat », délivrés par le Préfet, sans instruction ou avis du Maire
de la Commune.
Les documents d'information et de gestion de crise (DICRIM et PCS)
Lors de la survenance de la catastrophe du 15 juin 2010, la commune
était en train de formaliser son DICRIM à l'attention de la population. Le
PCS ne prenait en effet pas suffisamment en compte le risque inondation,
puisqu'il se basait sur le PPRM transmis par le Préfet en 2005. Un travail de
recherche historique, aurait pu, il est vrai, faire émerger cette problématique
sous-estimée tant par la commune que par les services de l'Etat, garants de
la sécurité des personnes et des biens.
Depuis juin 2010, et après la période de gestion opérationnelle post-
crise, la Commune a engagé la mise à jour de son PCS et la finalisation du
DICRIM.
En août 2011 a été présenté à Monsieur le Directeur de Cabinet du
Préfet et à la mission d'appui aux collectivités locales un PCS et DICRIM
amendés par l'expérience de 2010.
Suite à cette réunion de travail, il a été décidé, plutôt que d'amender
le PCS de 2007 et son DICRIM, de refondre totalement ces documents, qui, il
est vrai, n'étaient pas suffisamment opérationnels. Un chargé de mission
ayant l'expérience de la mise en place d'un document similaire a été recruté
dans cet objectif. Le PCS se présente donc aujourd'hui, conformément aux
prescriptions de la Direction de la Défense et de la Sécurité Civile au travers
du « guide pratique d'élaboration » et documents annexes, sous une forme
plus opérationnelle tels les plans ORSEC des Préfectures. Le PCS inclut
dorénavant par exemple, des fiches thématiques par aléa, d'émargement de
personnes sinistrées accueillies sur les sites d'hébergement d'urgence, des
modèles d'arrêtés.
Ce document est finalisé et
de plus la décision a été prise de créer
une réserve communale de sécurité civile, au sein de laquelle le CCFF de
Draguignan sera intégré.
Dès présentation à la mission d'appui, ce PCS sera proposé à
l'assemblée délibérante de la commune de Draguignan. Par la suite, le PCS
sera mis à jour en fonction de l'évolution du PPRM et des moyens matériels
et humains de la Commune et il est envisagé de procéder à des exercices
« d'état major » afin de vérifier entre autre l'efficacité des procédures, la
chaîne
d'information
ascendante
comme
descendante.
Exercices
qui
pourraient d'ailleurs se dérouler en coordination avec les services de l'Etat à
l'occasion d'exercices de gestion de crise organisés par le Préfet du Var.
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Quant au DICRIM, sa forme pourra évoluer selon le retour des
services de l'Etat sur le PCS.
L'alerte
Avant juin 2010, la commune n’avait recours en cas de crise qu’aux
sirènes situées à l’hôtel de ville. Depuis, il est apparu indispensable de
compléter ce dispositif par un système moderne pouvant diffuser des
messages d’alerte, informer la population et délivrer des consignes précises
à suivre impérativement. Fin 2011, le choix s'est porté sur une solution
externalisée, pilotée depuis un simple accès internet afin de sécuriser son
usage au maximum (un ordinateur, une tablette ou un simple smartphone
permet de lancer les alertes).
Cette application permet de transmettre, sur ordre du Maire ou de son
représentant, en quelques dizaines de minutes, des messages d'alerte, ou de
retour à la normale, par SMS, émail ou vocal, que ce soit vers des numéros
fixes ou de portables. La base de données comporte à la fois des numéros
issus des « pages blanches et jaunes» de Draguignan, ce qui statistiquement
représente environ 75 % des foyers et entreprises et selon un principe
déclaratif des usagers, par les numéros de portables et adresses émail qui
seront rentrés à partir d'une page web spécifique, accessible depuis le portail
de la ville.
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COUR DES COMPTES
REPONSE DU MAIRE DE FREJUS
Ce point particulier du projet de rapport m'amène
à
apporter les
réponses objectives liées à la chronologie administrative ci-après exposée :
. Le secteur de Valescure est couvert par un Plan de prévention du
risque inondation (PPRI) approuvé par arrêté préfectoral du 6 mai
2002
qui
classe en zone bleue, constructible sous conditions, le secteur en cause. Les
services de l'Etat, à l'initiative de ce document, ont en effet estimé que la zone
de Valescure n'était exposée qu'à des risques modérés qui pouvaient être
traités par la mise en oeuvre d'ouvrages nouveaux, ce qui justifiait alors la
possibilité d'y autoriser des constructions nouvelles sous réserve de
l'application de prescriptions particulières.
. De ce fait, la commune a institué un Programme d’aménagement
d’ensemble (PAE) sur ce secteur par délibération du
29
novembre
2004
sur
le fondement de l'article L.
332-9
du Code de l'Urbanisme afin de pouvoir
financer une partie de ces équipements et ouvrages hydrauliques nécessaires
à la réduction de la côte de la mise hors d'eau dans ce secteur passant, une
fois les travaux réalisés, de la côte
4,60 à
la côte
3,97
NGF.
. Au titre de ces équipements publics, il était ainsi prévu la réalisation
sous maîtrise d'ouvrage de la Communauté d'Agglomération de Fréjus/Saint-
Raphaël des travaux ci-dessous énoncés :
→
réalisation d'un bassin d'orages au « Castellas » de 20 000 m
3
,
→
recalibrage du « Valescure » et réalisation d'un bassin de
rétention,
→
acquisition
de
l'emprise
nécessaire
au
recalibrage
du
« Valescure ».
Cette délibération n'a fait l'objet d'aucune observation de la part de la
préfecture dans le cadre du contrôle de légalité.
Suite
à
l'institution de ce PAE, la société ROXIM Promotion,
propriétaire de parcelles acquises sur le secteur de Valescure, a déposé en
mairie de Fréjus, le 17 décembre 2004, un permis de construire pour la
réalisation d'un ensemble immobilier composé de cinq bâtiments comportant
157 logements dont 40 en locatif social. Dans le cadre de son dossier de
demande, le promoteur a produit une étude établie par le bureau d'études
« Eau et perspectives » de Grasse (06) qui démontrait que le projet était
strictement conforme aux prescriptions et mesures identifiées dans le PPRI
en vigueur. Une attestation concernant le respect de la réglementation du
PPRI était également produite, signée du concepteur du projet et du
pétitionnaire.
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La zone de Valescure était inscrite en zone
à
urbaniser 1 AU dans le
Plan
local
d’urbanisme
(PLU)
approuvé
le
19 janvier 2005.
Cette
classification n'a donné lieu
à
aucune critique de la part de la préfecture du
Var ni dans le cadre de l'élaboration du document d'urbanisme ni dans le
cadre du contrôle de légalité de ce même document.
C'est par arrêté du 23 février 2005 que le permis de construire est
délivré, conforme aux prescriptions du PPRI opposable ainsi qu'au PLU en
vigueur. Cet arrêté de permis de construire n'a fait l'objet d'aucun recours du
préfet dans le cadre de son contrôle de légalité.
Le projet de rapport fait état d'une délivrance du permis de construire
avant l'achèvement des travaux permettant, selon le PPRI de 2002, un
aménagement de la zone. Le PPRI prévoyait que les travaux et
aménagements devaient être réalisés par le SIVOM de Fréjus/Saint-Raphaël,
substitué par la communauté d'Agglomération, dans le délai de cinq ans
suivant l'autorisation délivrée au titre de la loi sur l'eau du 13 août 1999 et
que ce n'est qu'après la réalisation de ces travaux que la côte de 3,97 NGF
indiquée dans le PPRI pouvait être prise en compte. On notera que ces
travaux ont bien été engagés par la communauté d'agglomération fin 2004 et
ont été achevés au printemps 2005 puisqu'ils ont été réceptionnés sans
réserve par les services de la DDE en avril 2005. Ainsi les travaux ont bien
été réalisés dans le délai réglementaire prescrit. Par ailleurs, à la date du
23 février 2005, date de délivrance du permis de construire, ces travaux
étaient en voie d'achèvement, étant précisé que le permis ainsi délivré
à
la
côte de 3,97 NGF ne pouvait être mis en oeuvre avant l'expiration du délai de
recours, soit au plus tard le 23 juin 2005 donc deux mois après la réception
des ouvrages.
Pour autant, le secteur du Valescure a subi une inondation le
2 décembre 2006 alors même que la communauté d'agglomération avait
réalisé l'intégralité des travaux mis
à
sa charge conformément aux
prescriptions du PPRI approuvé par l'Etat. Sans attendre, la communauté
d'agglomération a pris l'initiative de rehausser la digue du bassin d'orages
du « Castellas », augmentant la capacité de rétention
à
32 000 m
3
permettant
d'obtenir 16 m
3
/seconde de débit de fuite en sortie d'ouvrage. En parallèle, la
commune a installé des pompes de sécurité ainsi qu'un groupe électrogène et
un transformateur lui appartenant (tarif vert), au niveau du cours d'eau du
Valescure pour assurer un débit maximum compris entre 4 m
3
/seconde et
5,3 m
3
/seconde. Ces travaux ont fait l'objet d'études et de procédures
réglementaires au titre de la loi sur l'eau.
En conclusion, Il est constant
à
l'exposé de ce rappel chronologique
des faits, des études et des travaux entrepris par la communauté
d'agglomération et la commune :
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COUR DES COMPTES
. que le maire de Fréjus n'a commis aucune faute en délivrant à la
société ROXIM Promotion un permis de construire strictement conforme aux
prescription du PPRI et du PLU en vigueur,
. que le permis de construire délivré le 23 février 2005, purgé du
recours administratif au 23 juin 2005, avait bien respecté les prescriptions
particulières
de
réalisation
des
ouvrages
techniques
hydrauliques
réceptionnés sans réserve par la DDE en avril 2005,
. que
l'Etat
n'a
déféré
aucune
des
décisions
administratives
concernant l'urbanisme du secteur de Valescure,
. qu'au vu des inondations de 2006, c'est bien la communauté
d'agglomération de Fréjus/Saint-Raphaël, sans attendre les nouvelles
prescriptions de l'Etat, qui a lancé de nouvelles études et engagé des travaux
supplémentaires sur le bassin d'orages du « Castellas » pour faire face
à
de
futurs évènements pluvieux sur ce secteur.
Enfin, il sera noté que la mise en révision du PPRI n'est intervenue
qu'en juin 2011.
•••
Pour ce qui concerne la prise en compte de l'aléa inondations dans le
plan communal de sauvegarde (PCS), la commune entend confirmer
à
la
Cour que dans le cadre de la révision de ce document cette problématique a
été parfaitement intégrée. Les procédures concernant les campings, tant en
matière d'information que pour les consignes d'évacuation ou de confinement
ont été clairement définies. De plus, les exploitants sont invités à effectuer
régulièrement des exercices en période d'ouverture afin de vérifier
l'efficience des dispositifs mis en oeuvre. Par ailleurs, la commune a
développé un système d'information et de consignes par envoi de messages
aux habitants résidant dans des secteurs identifiés
à
risque. Cette procédure
est, bien évidemment, complétée par une présence sur le terrain d'agents
communaux ou de membres de la réserve communale de sécurité.
Tels sont les éléments de réponse que je souhaitais porter à la
connaissance de la Cour.
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289
REPONSE DU MAIRE DE TRANS-EN-PROVENCE
Ce document n’appelle aucune observation particulière de ma part.
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290
COUR DES COMPTES
REPONSE DU MAIRE DE LA MOTTE
Je vous confirme que je n’ai pas de réponse à apporter à ce rapport.
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291
REPONSE DU MAIRE DU MUY
Je vous informe ne pas souhaiter apporter de réponse au rapport
concerné.
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292
COUR DES COMPTES
REPONSE DU MAIRE DES ARCS-SUR-ARGENS
Le projet de rapport appelle de ma part quelques observations :
Dans le chapitre intitulé les documents d’urbanisme on peut lire des
généralités du type « au plan local, pour de nombreux élus, le document
d’urbanisme est encore vécu comme le moyen de répartir des droits à bâtir ».
Si c’est le cas il faut clairement nommer les communes sinon s’abstenir de
mettre tous les élus dans le même sac.
Ou encore « la catastrophe de 2010 n’a pas influencé la prescription
des révisions des documents d’urbanisme par les élus ». Nous avons après
l’annulation de notre Plan local d’urbanisme (PLU) qui bien sûr tient
compte des enseignements de la catastrophe de 2010 du point de vue du
règlement, du zonage, du Plan de prévention du risque inondation (PPRI)
prescrit en ce début d’année par M. le préfet. Par conséquent là encore cette
généralité masque la réalité des Arcs. Pour information notre PLU sera
arrêté en conseil municipal lundi prochain.
Dans le chapitre « l’inadaptation de certains équipements publics de
bord de mer et de rivière » rubrique terrain de camping il est écrit en fin de
chapitre « … le coût pour une collectivité locale des dégâts sur un terrain
implanté de manière irrégulière ». La commune étant citée en début de
chapitre, on pourrait penser que le camping des Arcs est irrégulier, ce qui
n’est pas le cas.
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293
REPONSE DU MAIRE DE ROQUEBRUNE-SUR-ARGENS
J’ai l’honneur de vous informer que nous ne souhaitons pas apporter
de réponse à ce sujet.
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COUR DES COMPTES
REPONSE DU MAIRE DE CHATEAUDOUBLE
En ce qui concerne l’action publique quant à la gestion de la
catastrophe du 15 juin 2010. Pour notre Commune, nous ne pouvons que
féliciter tous les intervenants de leur rapidité de réaction, tant le 15 juin en
soirée que dans les jours qui suivirent. Nous considérons que l’action
publique a été largement à la hauteur de la situation lors de cette
catastrophe. Le seul bémol qui ne concerne pas l’action publique et qui n’est
pas spécifique aux inondations, ce sont les moyens de communication. Afin
de s’affranchir de ce dysfonctionnement, nous sommes en cours d’acquisition
de téléphones satellites.
En ce qui concerne la prévention : compte tenu des faits du 15 juin
2010, la seule action préventive efficace, nous concernant, aurait été
l’entretien du lit de la rivière en amont de Rebouillon. En effet, depuis
plusieurs années, les délégués de la Commune, auprès du gestionnaire de la
rivière (le SIAN), dénonçaient la présence de plus en plus massive de
végétation dans le lit mineur, principalement dans les deux branches des
gorges (Nartuby d’Ampus et Nartuby de Châteaudouble).
Les faits du 15 juin 2010 vous sont résumés ci-dessous :
Afin de bien comprendre le mécanisme de montée des crues, il faut
bien comprendre qu’en amont de Rebouillon, la Nartuby se divise en deux
branches, l’une allant vers AMPUS pour débuter dans la partie plane des «
Vergelins » et l’autre en direction de Montferrat. Sur son cheminement, elle
rencontre une partie plane au niveau du quartier dit « Le Plan » sur le
territoire de Châteaudouble. La configuration de ces deux bras est quasiment
identique ; une grande surface plane, réceptacle des eaux de ruissellement
des collines qui l’entourent, puis des gorges. Ces deux Nartuby se rejoignent
au lieu-dit « Les Frayères » pour ne former plus qu’une seule gorge jusqu’à
Rebouillon. En aval de ce village, la rivière serpente la nature jusqu’à
Draguignan, puis continue pour rejoindre l’Argens.
Vers 10 h en ce mardi 15 juin 2010, des pluies commencent à
s’abattre sur la Dracénie. Vraisemblablement plus prononcées au niveau de
la Commune d’Ampus, dans un premier temps. Compte tenu que cette partie
de rivière n’était plus nettoyée depuis plus d’une cinquantaine d’années et
que les fortes précipitations étaient devenues rares, vu la végétation, des
bouchons se forment occasionnant toute une série de retenues. Les habitants
situés en aval voient l’eau monter très lentement, sans se soucier de quoi que
ce soit. En temps normal, la rivière commence à rentrer en crue entre une
heure et une heure et demie après les premières précipitations. En effet, selon
les habitants, l’eau a réellement commencé à monter vers 15 h. Le principal
bouchon de la branche Ampus cède en libérant une masse importante d’eau.
Cette masse dévale le lit
en « nettoyant » tout ce qui est sur son passage. La
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première vague arrive à Rebouillon vers 15 h 52, obstruant le pont et faisant
trois victimes. En effet, les victimes connaissaient très bien le comportement
de la rivière en cas de crue. Elles ont donc été surprises par cette vague qui
leur a été fatale. L’obstruction artificielle du pont a obligé la rivière à se
frayer un autre passage. D’autres bouchons se sont produits en aval de
Rebouillon occasionnant une série de retenues et des déplacements artificiels
du lit de la Nartuby.
Vers 16 h 30, à la suite de la formation d’un embâcle conséquent au
niveau du début des gorges, le quartier du « Plan » à Châteaudouble est
totalement sous les eaux, avec des hauteurs allant jusqu'à 1,80 m (soit une
retenue d’environ 350 000 m3). Lorsque le « bouchon » a cédé, vers 16 h 40
selon les témoins, ce fut une « vague » d’une telle énergie qui dévala dans les
gorges, emportant tout sur son passage, allant même rogner, à chaque
courbe de la rivière, un pan de la rive opposée (y compris celui du CD 955).
Arrivée à Rebouillon, elle rencontra le bouchon du pont et se dévia en
creusant un lit parallèle. L’eau a commencé à arriver vers 17 h 35 à
Rebouillon pour atteindre son plus haut niveau vers 18 h. Cette masse d’eau
augmenta ainsi le niveau de la retenue formée par le bouchon du quartier du
« Clos » puis celui du quartier de la « Granégone ». Une brèche se créant
dans cet embâcle occasionna la formation d’un nouveau lit. Puis une
nouvelle retenue se créa au niveau du quartier de « la Clappe », ainsi de
suite jusqu’à l’entrée de Draguignan. Au niveau du quartier du « Dragon »,
c’était un lac de plus d’un mètre de haut qui était délimité par les collines ; il
faut rajouter l’eau de ruissellement des bassins versants concernés et les
eaux des résurgences karstiques présentes en aval de Rebouillon. Arrivée aux
portes de Draguignan, cette imposante masse d’eau a été dans l’obligation
de se frayer un passage ; ce qui explique la très rapide et soudaine
inondation de la ville.
Comme vous pouvez le constater, la prévention par l’entretien
minimal du lit des rivières est primordiale. Le 15 juin 2010, en toute
objectivité, si la rivière avait été entretenue, il y aurait eu des dégâts,
notamment
au
niveau
de
Draguignan
–
Trans-en-Provence,
mais
certainement pas dans les proportions que nous avons connues sur notre
Commune. En aval du village de Rebouillon, notamment après le secteur du
quartier de « La Clappe », d’autres phénomènes sont venus se rajouter aux
existants, comme des résurgences karstiques non négligeables. Depuis des
enseignements ont été tirés.
En ce qui concerne l’information des acquéreurs et locataires
: Nous
sommes en cours de rédaction de Plans Communaux de Sauvegarde, car
aujourd’hui nous focalisons sur les inondations, mais nous devons rester très
vigilants quant aux incendies de forêts. Certes, par le passé, cette mesure ne
concernait pas notre commune, puisqu’elle n’avait jamais été frappée par de
telles inondations (y compris en 1827) ; le pont de Rebouillon, qui s’est
bouché, date de 1926. Depuis cette date, il y a eu de nombreuses crues qui
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ont provoqué des dégâts significatifs en Dracénie, mais jamais sur notre
territoire.
Le
décès
des
trois
personnes
sur
notre
commune
est
principalement lié à « l’habitude » qu’elles avaient. Comme énoncé un peu
plus bas, ces personnes connaissaient parfaitement le fonctionnement
hydraulique de la rivière et ne s’attendaient pas à la formation de bouchons
en amont, puis à l’arrivée d’une vague. Certes, l’information est importante
et nécessaire ; dans le cas présent cela n’aurait rien changé à la situation.
En ce qui concerne la protection des zones bâties de notre commune
:
Il n’y avait pas de risque particulier si le lit de la rivière avait été entretenu
normalement. Les zones qui ont été inondées l’ont été soit parce qu’il y a eu
la formation d’embâcles plus ou moins importants liés à l’absence
d’entretien, soit, dans le cas de Rebouillon, parce que le pont s’est bouché
par la végétation présente en amont dans le lit de la rivière et qui, sous la
masse d’eau, est venue s’amalgamer en quelques secondes au pont,
provoquant un débord. Dans les prochaines semaines vont débuter des
travaux visant à supprimer le pont, à rétablir la capacité d’écoulement de la
rivière au niveau de Rebouillon (curage et élargissement du lit) et à réaliser
un nouvel ouvrage de franchissement qui sera submersible (pour éviter qu’un
bouchon se reproduise). A l’issue de ces travaux qui vont pratiquement
doubler la capacité d’écoulement de la rivière, les zones construites dans le
secteur
de
Rebouillon
seront
largement
sécurisées,
sans
autres
aménagements.
En ce qui concerne les deux maisons auxquelles vous faites référence,
il est très important que nous vous apportions un certain nombre de
précisions, car il n’y a pas de réel danger et un éventuel rachat au titre de la
« solidarité » ne se justifie pas (ou plus).
Comme le montre leur implantation sur le plan ci-après, elles ne sont
pas plus, si ce n’est moins, exposées que les habitations implantées en limite
de rivière. Ces dernières ont accepté la crue de 1827 comme elles ont
accepté toutes les autres crues et, pourtant, la rive opposée n’est distante que
de 17 mètres de leurs façades, pour une profondeur de lit variant entre 4 et 5
mètres au premier plancher de ses habitations. La distance respective par
rapport à la rive opposée est de 35 mètres pour la construction agricole (A),
55 mètres pour la première maison (B) et 80 mètres pour la maison des
victimes (C) ; la profondeur moyenne du lit, avant sinistre et dans cette zone,
était d’environ 5 mètres. Les constructions évoquées sont construites dans le
périmètre du village de Rebouillon et ne sont pas dans l’axe de la rivière, ni
trop près de cette dernière. Si le pont ne s’était pas bouché par la végétation
présente dans le lit en amont, il n’y aurait pas eu d’inondation de toute cette
zone. La suppression de ce pont, ainsi que les travaux de rétablissement de la
capacité d’écoulement vont définitivement résoudre ce problème sans
qu’aucune destruction ne soit justifiée.
Sur la Commune nous avons eu trois décès, ci-dessous les
circonstances :
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La première victime (70 ans), native du village et résidente sur la
commune d’Ampus, connaissait bien la réaction du milieu aquatique lors des
orages. Elle fut emportée par la première vague qui a totalement obstrué le
pont, alors qu’elle traversait ce dernier. En effet, il pensait pouvoir faire
cette traversée (16 m) puisque, lorsqu’il s’y était engagé, le niveau de l’eau
sous le pont était d’environ 2,80 m. A ce moment-là, le « vide d’air » sous le
pont était de près de deux mètres avant que l’eau n’atteigne le tablier et de
près de 2,90 m avant que cette dernière passe sur le pont. Il souffrait de
surdité de l’oreille gauche et n’a pas entendu la vague arriver.
Les deux autres victimes (83 et 84 ans) furent emportées par cette
même vague, alors que, profitant d’une accalmie et comme à leur habitude,
elles s’affairaient dans leur jardin, occupées à déplacer des cochons d’inde
qui étaient cantonnés dans une zone et qui risquaient de s’inonder par 0,30 m
d’eau « morte ». Depuis près de soixante ans qu’elles étaient installées dans
le village en qualité d’agriculteurs, elles connaissaient bien, tout comme la
première victime, le comportement de la Nartuby lors des orages. Certes,
lors de très violents orages, il n’était pas rare que la plus basse berge de leur
jardin s’inonde (là où étaient les cochons d’inde). C’est pour ce fait que les
bâtiments agricoles (poulailler et hangar) avaient été construits un mètre
plus haut que les plus hautes eaux connues. C'est-à-dire en 1974 où « le
tirant d’eau » passait, par moment, sur le pont. Elles n’ont pas, comme
certains médias l’ont dit, été emportées avec le hangar agricole à 18 h. Si
elles s’étaient réfugiées dans ce lieu, elles auraient largement eu le temps de
sortir entre les deux vagues. Il n’y avait pas d’abri de jardin. Si les victimes
étaient restées toutes les trois à leurs domiciles respectifs, elles n’auraient
pas été emportées par la première vague…
La maison (C) des victimes a été construite en 1989 en lieu et place
d’un bâtiment agricole dont le plancher était au niveau du terrain naturel. La
construction, qui a été réalisée en traditionnel et selon des règles
parasismiques, a le premier plancher situé à 1,20 m au-dessus du terrain
naturel. Le 15 juin 2010, alors que la première vague n’avait pas pénétré
dans la maison, la seconde vague l’a inondée avec une hauteur qui a varié
entre 0,80 m et 1,25 m. Les combles sont porteurs et accessibles, pour être en
harmonie avec le règlement du Pla de prévention des risques d’inondation
(PPRI), il ne reste qu’au propriétaire à réaliser une ouverture sur le toit. A la
suite des inondations qui n’ont fait que des dégâts « minimes » (peinture et
électricité) cette maison a été intégralement réhabilitée. Son propriétaire
souhaite la conserver en mémoire de ses parents et en faire son bureau. A
noter qu’un certain nombre des habitations anciennes situées en pied de
relief ont eu jusqu'à 1,75 m d’eau en rez-de-chaussée.
En ce qui concerne l’autre habitation (B), qui est de construction plus
ancienne et qui a un peu plus souffert que la maison (C) ci-dessus, nous,
commune, envisageons de la racheter en vue de la transformer en local
technique avec des W.C. publics. En effet, les propriétaires de cette
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habitation (résidence secondaire), grandement traumatisés par la disparition
des trois victimes, ne semblent pas envisager sa rénovation. Notre précédente
construction qui renfermait ces équipements et qui se trouvait près du pont a
été emportée. Cet équipement public complétera, comme par le passé, la
place du village que nous nous sommes engagés, auprès de la population, à
rétablir, après les travaux sur la rivière.
En ce qui concerne le bâtiment agricole (A) : ce dernier avait bien
résisté à la crue du 15 juin 2010. A la suite de cette dernière, nous avons
construit un passage à gué provisoire, qui ne devait durer que six mois. A la
suite d’un événement pluvieux, nous avions demandé au SIAN de réaliser un
curage préventif du lit de la rivière en amont du gué. En effet, le lit, par la
présence de l’ouvrage, s’était engravé sur une hauteur de près de 4 mètres
par rapport au lit d’origine. En novembre 2011, les pluies des 5 et 6 n’ont
fait qu’aggraver la situation. Par le manque de réactivité, l’angle nord-ouest
de cette construction a été affouillé, provoquant une déstabilisation de
l’ouvrage.
Ce
dernier
va
être
démoli
dans
les
prochains
jours.
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En application du « plan Nartuby » les travaux concernant la zone de
Rebouillon vont débuter en
septembre 2012
.
Pour conclure :
Vu la construction d’un ouvrage de franchissement submersible qui
aura comme particularité de favoriser les éventuels transports solides,
Vu la nature et la spécificité de la construction des personnes
décédées (C),
17m
35m
55m
80m
(A)- Bâtiment agricole
va être démoli
(B)- Maison :
souhait
de rachat
par la Commune pour faire un
local technique
(C)- Maison des victimes :
Réhabilitée
Lieu où ce tr
ouvait la première
victime quant elle fut emportée
par la 1
er
vague
Bâtiment agricole emporté :
Poulailler et hangar
agricole emporté :
Ces équipements agricoles
appartenaient aux secondes
victimes
Lieu où ce trouvait les
secondes victimes quant elles
furent emportées par la 1
er
vague
W.C. Publics et local
technique emportés
Pont
(obstrué totalement le 15
juin 2010 - va être détruit)
Vue de REBOUILLON avant le
15 JUIN 2010
Place publique de
l’AIRE
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Vu notre volonté d’acquérir l’autre habitation (B) pour la transformer
en local technique,
Vu notre volonté de reconstruire, presque à l’identique, la place du
village afin de recréer une « zone vie » dans ce secteur, comme avant le 15
juin 2010.
Rien ne justifie plus la destruction de constructions dans cette zone, ni
sur le restant de notre commune.
Comme vous le décrivez si justement, une action rapide, dans la
situation ci-dessus, aurait été moralement désastreuse et financièrement
injustifiée. En effet, dans notre cas, il a été important de bien comprendre les
faits qui ont conduit au drame que nous avons vécu.
Ce n’est ni l’urbanisation, ni le bétonnage, ni une quelconque
réduction de la capacité d’écoulement de la rivière qui a contribué à
l’inondation de ces zones qui ne l’avaient pas été jusqu'à ce 15 juin 2010.
C’est principalement la combinaison d’un lit de rivière rempli de végétation
avec de très violentes précipitations ; ce cocktail détonnant a formé des
embâcles en amont du village, puis un barrage au niveau du pont et a
naturellement inondé Rebouillon. Quels qu’aient été les moyens de
préventions mis en oeuvre, rien n’aurait permis de prévenir la première vague
meurtrière, la seconde vague n’ayant fait qu’aggraver la situation.
Aujourd’hui, nous prenons les dispositions utiles pour que si, dans quelques
années, de tels événements venaient à se reproduire, les conséquences ne
soient pas identiques.
En ce qui concerne le rachat des biens d’habitation pour notre
commune, seul un propriétaire a été concerné et son dossier est clos. Comme
je l’ai confirmé à la direction départementale des territoires et de la mer
(DDTM) du Var, sur notre commune il n’y a pas d’autre dossier qui justifie
cette procédure.
Le pont qui a été obstrué par la végétation présente dans le lit de la
Nartuby et qui généré tout ce désordre, va être détruit et la rivière élargie, le
risque d’inondation par débordement sera largement minimisé voire
supprimé, sécurisant ainsi tout le hameau.
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301
REPONSE DU PRESIDENT DU SYNDICAT INTERCOMMUNAL
D’AMENAGEMENT DE LA NARTUBY
Le présent document n’appelle pas d’observations particulières de ma
part.
REPONSE DE L’ANCIEN PRESIDENT DU SYNDICAT
INTERCOMMUNAL D’AMENAGEMENT DE LA NARTUBY (SIAN)
Je n’ai pas d’observation à apporter à ce rapport.
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REPONSE DU PRESIDENT DU CONSEIL D’ADMINISTRATION
DU SERVICE DEPARTEMENTAL D’INCENDIE ET DE SECOURS
DU VAR
A la lecture de ce projet, ce rapport n’appelle pas d’observation
particulière de ma part.
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303
REPONSE DU PRESIDENT-DIRECTEUR GENERAL DE ROXIM
Après avoir rappelé que vous assimilez notre dossier aux événements
dramatiques des communes de la Faute-sur-Mer et de Draguignan, auxquels
on ne peut être comparé faute d’inondations sur notre terrain en 2010, nous
souhaitons vous faire parvenir des observations en réponse qu’appelle, de
notre part, l’extrait de ce projet de rapport communiqué.
1) Il est regrettable que vous n’ayez pas pensé utile de relever que les
services de l’Etat dans le compte rendu de la séance du CODERST du
16 mars 2011 considéraient que notre projet « est certes conçu pour
s’adapter aux risques ... c’est le principe même de l’urbanisation de ce site
très dangereux qui est contesté ».
C’est le fond du problème qu’il nous semble essentiel de soulever
dans l’analyse des « enseignements » qui est la vôtre.
En effet, les constructeurs aménageurs sont à même de mettre en
oeuvre des dispositifs qui permettent d’assurer la sécurité des biens et des
personnes dans des secteurs à crue lente.
D’autant que le deuxième critère d’évaluation du risque concerne la
hauteur qui est interprétée selon les régions de manière plus ou moins
aléatoire.
Ainsi, le principe de précaution est apprécié de façon différente :
-
soit comme une incitation à ne rien faire (notre cas),
-
soit comme une incitation à agir en ayant pris la connaissance et
la mesure du risque (différents exemples ont été cités dans notre
dossier).
Vous évoquez « la multiplication des interventions du promoteur qui a
contribué à la longueur de la procédure loi sur l’eau ».
La lecture de vos écritures devrait vous inviter à conclure
différemment.
En
effet,
vous
avez
pointé
suffisamment
de
retard
et
dysfonctionnements des administrations dans ce dossier.
Par ailleurs, la « multiplication des interventions » nous semble un
vocabulaire inapproprié d’autant qu’il n’est pas démontré.
Il ne peut nous être, semble-t-il, reproché :
•
d’avoir fait part de nos observations aux différents
projets d’arrêtés préfectoraux, comme le prévoit
l’article R. 214-12 du code de l’environnement,
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304
COUR DES COMPTES
•
d’avoir cherché à concevoir un projet qui répondait
aux attentes des services de l’Etat qui nous invitaient à
proposer
un
aménagement
prenant
en
compte
l’importance de la crue de décembre 2006, comme il a
été accepté pour les établissements de plein air avec la
construction de plateformes de sauvegarde alors que la
quasi-totalité des tentes et des bungalows avait été
sinistrée.
Nous faisons référence à un article de presse paru dans le
VAR-MATIN du 11/05/2012, dont nous relatons, ci-après, un extrait :
« Après les inondations de 2010 et 2011, les établissements de plein
air doivent construire des plateformes de sauvegarde. Les dirigeants des
campings qui ont subi les inondations de juin 2010 et novembre 2011 de
plein fouet sont dans une situation de plus en plus difficile. L’Etat impose en
effet aux établissements qui ont été inondés de construire des plateformes de
sauvegarde, fort coûteuses. En gros, il s’agit de réaliser une terrasse à près
de trois mètres de hauteur, sur pilotis, ronde
pour que l’eau passe sans
affecter le sens du courant ».
Nous vous rappelons que notre projet ainsi que les voies d’accès
étaient conçus sur pilotis et sur des plateformes réalisées bien au-dessus du
risque évalué par les services de l’Etat.
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305
Egalement destinataires du projet de rapport de la Cour le ministre
de l’économie, des finances et du commerce extérieur, le
ministre délégué
auprès du ministre de l’économie, des finances et du commerce extérieur
chargé du budget, le ministre délégué auprès de la ministre de l’écologie, du
développement durable et de l’énergie chargé des transports et de
l’économie maritime, l’ancien directeur de cabinet de la Présidence de la
République,
l’ancien
conseiller
développement
durable,
transports,
aménagement du territoire auprès du Président de la République, l’ancien
directeur du cabinet du Premier ministre, deux anciens préfets de la
Charente-Maritime, le président de la communauté d’agglomération de
Fréjus,
les maires de Nieul-sur-Mer, de l’île d’Aix, de Taradeau,
les anciens
maires de la Tranche-sur-mer, l’ancien président du syndicat mixte du
Marais Poitevin, bassin de la Vendée, de la Sevre et des Autizes, les
propriétaires du restaurant « les ptis bouchots », ne lui ont pas adressé de
réponse.
Cour des comptes
Les enseignements des inondations de 2010 sur le littoral atlantique (Xynthia) et dans le Var – juillet 2012
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