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Réf : 2005-0296/BQF/DE
Monsieur le Ministre,
Par lettre du 26 janvier 2006, je vous ai communiqué le rapport d'observations définitives de la
chambre régionale des comptes concernant la gestion de la Région Lorraine pour les exercices
2001 à 2003.
Je vous prie de bien vouloir trouver ci-joint le rapport d'observations définitives, accompagné des
réponses, étant précisé qu'en application de l'article L241-11 du code des juridictions financières,
ces réponses engagent la seule responsabilité de leurs auteurs. L'ensemble sera communiqué
par vos soins à votre assemblée délibérante, dès sa plus proche réunion. Inscrit à son ordre du
jour, il est joint à la convocation adressée à chacun des membres de l'assemblée et donnera lieu
à débat.
Après information de l'assemblée délibérante, le rapport d'observations devient un document
communicable à toute personne qui en fera la demande, conformément aux dispositions de la loi
du 17 juillet 1978, relative à la communication des documents administratifs.
Je vous prie de croire, Monsieur le Ministre, à l'expression de ma haute considération.
Gérard TERRIEN
Monsieur Jean-Pierre MASSERET
-
Président du conseil régional de Lorraine -
Place Gabriel
Hocquard
-
57036 METZ CEDEX
RAPPORT D'OBSERVATIONS DEFINITIVES
-
REGION LORRAINE
Le présent rapport est composé de la façon suivante :
1. Rapport d'observations définitives du 26 janvier 2006
2. Réponse de M. Jean-Pierre MASSERET, président du conseil régional de Lorraine par lettre du
24 février 2006.
3. Réponse de M. Gérard LONGUET, ancien président du conseil régional de Lorraine par lettre
du 13 février 2006.
S O M M A I R E
SYNTHESE
INTRODUCTION
1. PRESENTATION
2. EXAMEN DE LA FIABILITE DES COMPTES
2.1. Choix des méthodes comptables utilisées
2.2. Rattachement des charges (et des produits) à l'exercice
2.3. L'enregistrement des immobilisations
2.3.1. La présentation de l'état de l'actif
2.3.2. L'amortissement des immobilisations
2.3.3. L'inscription de dépenses d'investissement en section de fonctionnement
2.3.4. L'inscription des intérêts moratoires en dépenses d'investissement
2.3.5. L'inscription des acquisitions d'immeubles au compte administratif
2.4. Les provisions
2.5. L'absence d'inscription comptable au chapitre 940 Relations publiques
2.6. Etat de la dette
2.7. Les restes à réaliser
2.8. L'absence d'organe de contrôle interne
3. ANALYSE FINANCIERE
3.1. Méthodologie
3.2. Analyse du résultat comptable
3.2.1. Présentation de la situation d'ensemble
3.2.2. Les dépenses de fonctionnement
3.2.3. Les frais financiers
3.2.4. Les produits de fonctionnement
3.2.5. Les dépenses d'investissement
3.2.6. Les recettes d'investissement
3.2.7. Evolutions de l'autofinancement et de l'équilibre budgétaire
3.3. Analyse du bilan
3.3.1. Le fonds de roulement
3.3.2. La trésorerie
3.4. Conclusion sur la situation financière
4. LES MARCHES DE TRAVAUX DES LYCEES DE LA REGION LORRAINE
4.1. Présentation
4.2. Les outils de la mise en oeuvre du Projet Lorrain
4.2.1. Les programmes prévisionnels des investissements
4.2.2. La réalisation des PPI
4.2.3. L'évaluation des PPI
4.3. Les principales faiblesses observées
4.3.1. L'absence de motivation du rapport de présentation
4.3.2. Le recours abusif à la procédure des avenants
4.3.3. Un usage incohérent des retenues de garantie envers les sous-traitants
4.3.4. Une pratique parfois excessive des ordres de service
4.3.5. Des avances forfaitaires ignorant les sous-traitants
4.3.6. De longs délais de paiement
4.3.7. L'attribution particulière des marchés de prestations intellectuelles
4.4. Les conventions de mandats
4.4.1. La modification du lien juridique entre mandant et mandataire
4.4.2. La définition de la mission dévolue aux mandataires
4.4.3. Les dispositions de contrôle des avances
4.4.4. Les modalités de rémunérations des mandataires
4.4.5. Les délais de livraison
5. LE SERVICE REGIONAL DE TRANSPORTS DE VOYAGEURS ET L'INTERVENTION
REGIONALE EN MATIERE FERROVIAIRE
5.1. Historique et cadre juridique général
5.2. La préparation de la régionalisation en Lorraine
5.2.1. Organisation des services régionaux
5.2.2. Etats des lieux et études préparatoires
5.3. La mise en oeuvre de la régionalisation
5.3.1. Le niveau de maîtrise du risque contractuel
5.3.2. Les services transférés
5.3.3. Financement des charges transférées et des nouvelles charges
5.4. Risques et enjeux futurs de l'action régionale en matière de transport ferroviaire,
5.4.1. Le rôle de RFF dans l'exercice des compétences régionales
5.4.2. La question des transports interrégionaux
5.4.3. La réglementation européenne
6. LES INTERVENTIONS ECONOMIQUES
6.1. Le dispositif régional d'aides aux entreprises
6.1.1. Cadre général, le Projet Lorrain
6.1.2. Les objectifs généraux fixés par le projet
6.1.3. Les règlements d'intervention
6.1.4. Les conventions et l'application de la loi du 13 août 2004
6.1.5. Les moyens financiers mis en oeuvre
6.1.6. L'organisation retenue
6.1.7. Le processus de mise en oeuvre
6.1.8. Les moyens de l'évaluation régionale des résultats
6.2. Quantification des aides économiques
6.2.1. La présentation par nature
6.2.2. Les aides directes
6.2.3. Les aides indirectes
6.3. La mesure de l'efficacité de l'intervention
6.3.1. L'analyse des aides distribuées en 2000
6.3.2. Un volume d'entreprises aidées qui reste modeste
6.3.3. Une répartition géographique pas toujours adaptée
6.3.4. La prime régionale à la création d'entreprise : un effet retardateur
6.3.5. Le soutien à l'équipement industriel de production, renforcement des fonds propres des
entreprises
6.3.6. L'effet relatif de la prime régionale à l'emploi
6.4. Le coût de l'aide aux entreprises lorraines
6.5. La coordination de l'intervention économique
6.5.1. La sensibilisation à la création
6.5.2. Les actions en faveur de l'exportation
6.5.3. Le soutien aux fonds propres
6.5.4. La participation à des fonds de garantie
6.5.5. L'absence de relation avec les comités de bassin d'emploi
6.5.6. Le réseau de développement technologique
6.6. La problématique des «Grands projets»
6.7. Le plan de soutien conjoncturel
6.7.1. Les actions économiques du plan conjoncturel
6.7.2. Présentation du volet social
6.7.3. Une absence de cadre juridique suffisamment précis
6.7.4. Une absence de mise en compétition
6.7.5. Une pratique des conventions inappropriée
6.7.6. Des relations avec les prestataires indirects ambiguës
6.8. Le contrôle de l'effectivité des aides
7. LE SUIVI DES OBSERVATIONS DU CONTROLE PRECEDENT:
7.1. La formation professionnelle continue
7.1.1. Le cadre juridique de l'intervention de la Région et les objectifs régionaux
7.1.2. Les objectifs en matière de formation professionnelle continue
7.1.3. Les moyens financiers mis en oeuvre et les outils d'évaluation
7.1.4. Les relations avec les organismes associés
7.1.5. L'élaboration du programme régional
7.1.6. L'exécution des conventions passées avec les organismes de formation
7.1.7. Les relations entre la Région et certains tiers
7.1.8. Le dispositif de contrôle
7.1.9. L'analyse des indus
7.2. L'apprentissage
7.2.1. L'identification des objectifs régionaux
7.2.2. Les caractéristiques de l'apprentissage en Lorraine
7.2.3. Les modalités de financement des centres
7.2.4. La politique de contrôle des centres
SYNTHESE
Le contrôle de la Chambre régionale des comptes sur la Région Lorraine est intervenu à mi-
exécution du Projet Lorrain 2000-2006.
L'examen de la fiabilité des comptes révèle que des principes comptables essentiels, tels celui de
la permanence des méthodes, ne sont pas complètement respectés. Ainsi, la règle de
rattachement des charges et des produits à l'exercice n'est pas suivie avec rigueur. La
suppression totale de la journée complémentaire intervenue à un moment inopportun a encore
accentué cette faiblesse. La présentation de l'état de l'actif n'est pas contredite par un état des
biens meubles et immeubles normalement produit par l'ordonnateur. La définition du volume des
amortissements en souffre et des erreurs notables sont commises dans celui des immobilisations
des matériels acquis par la collectivité territoriale. La comptabilité des matériels, elle-même
s'avère déficiente tant dans leur prise en compte que dans la mise à jour de leurs valeurs.
Une certaine confusion préside dans l'inscription des dépenses en fonctionnement et en
investissement et un taux anormalement élevé d'erreurs est constaté. L'inscription des immeubles
n'est pas toujours reportée de façon précise dans le compte administratif. Enfin, des
manquements susceptibles d'entacher et la sincérité et l'image fidèle des comptes ont été relevés
: carence récurrente dans les provisions à effectuer, absence d'inscriptions comptables au
chapitre dédié aux relations publiques malgré des dépenses conséquentes, distorsions dans
l'élaboration de l'état de la dette destiné à être voté par l'assemblée plénière.
De même, la comptabilisation des restes à réaliser met en lumière de profondes inexactitudes du
fait d'une élaboration singulière des reports de crédits et d'un suivi comptable des engagements
déficients. L'analyse des pièces comptables a enfin révélé des calculs de liquidation erronés. (§ 8-
66)
Dans sa réponse aux observations provisoires, le président du conseil régional a précisé sur tous
ces sujets que les dispositions nécessaires ont été prises à compter de 2005 dans le cadre de
l'application de l'instruction M 71.
Sur le plan de l'organisation comme de la fiabilisation des dispositifs comptables et administratifs,
la Région Lorraine souffre de l'absence d'un organe de contrôle interne, indépendant et efficace.
(§ 67-69)
Au plan financier, la Région est marquée par une progression conséquente des dépenses réelles
totales de 42 % entre 2001 et 2004. Ces dépenses subissent l'impact des reversements
exceptionnels de subventions FSE et FEDER en 2002 mais surtout celui de la forte progression
du poste «subventions» notamment du fait du transfert du service régional des voyageurs.
Les frais de personnels qui ne représentaient que 5,66 % des dépenses totales restent en deçà
de la moyenne nationale. Ils connaissent toutefois une progression notable dont l'effet s'inscrira
dans la durée en raison du recrutement envisagé de soixante agents supplémentaires. Dans le
même temps, les produits de fonctionnement n'ont augmenté que de 39 %. Ils restent en dessous
de la moyenne nationale sur la même période. (§ 70-83)
Les dépenses d'investissement, d'un niveau moyen inférieur à la moyenne nationale des régions,
ont augmenté de façon significative lors de l'exercice 2004. Pour y faire face, la Région a accéléré
son recours à l'emprunt accroissant ainsi la différence entre remboursement de dette et
croissance des emprunts. En effet, entre 2002 et 2004, le recours à l'endettement s'est accru de
169 %. (§ 84-89)
La diminution de l'autofinancement disponible est liée à l'accélération des dépenses de
fonctionnement et d'investissement sur l'exercice 2004. Cette situation conjoncturelle est
aggravée de façon notable par une insuffisance dans le suivi des dépenses engagées et un défaut
majeur de rattachement des charges à l'exercice. (§ 90-93)
Sur le plan patrimonial, cette évolution a conforté la diminution du fonds de roulement de la
Région. Une inversion du financement du cycle d'exploitation induite par la suppression de la
journée complémentaire et des ratios de rotations des dettes fournisseurs, extrêmement réduits,
caractérisent l'exercice 2004.
Dans sa réponse, l'actuel ordonnateur indique ne pas partager l'analyse de la Chambre. Il précise
que "le solde d'exécution budgétaire négatif en 2004 n'est nullement dû à un dérapage des
dépenses ou à une insuffisance du suivi des dépenses engagées. Il résulte d'une volonté de
diminuer un fonds de roulement trop important, souvent assimilé à une "cagnotte" et à la volonté
d'appeler les emprunts au bon moment".
Il en résulte toutefois que l'ensemble se conjugue pour tendre la situation de la trésorerie. Faute
de disposer de prévisions de trésorerie, la gestion de celle-ci s'opère sans réelle visibilité. En effet,
la situation mensuelle moyenne de trésorerie disponible n'autorisait en 2004 que le financement
de deux jours de dépenses de fonctionnement contre 33 en 2001. (§ 94-112)
Une telle situation, conjuguée à des modalités de financements privilégiant le recours à des
crédits long terme renouvelables peut s'avérer rapidement délicate à défaut d'une maîtrise stricte
des dépenses engagées. Elle oblige en tout état de cause, la Région Lorraine à mobiliser ses
marges de manoeuvre, notamment en matière de fiscalité. (§ 113-114)
Dans sa réponse, le président du conseil régional indique «que la Région Lorraine a affiché à
plusieurs reprises déjà des soldes d'exécution budgétaire négatifs. Celui-ci a même atteint 17,4
M.Euros en 1999. De plus, si l'épargne d'exploitation et l'épargne brute marquent effectivement un
recul en 2004, elles atteignent un niveau nettement supérieur à celui de 2001». Il ajoute que "en
ce qui concerne les marges de manoeuvres de la Région Lorraine, elles restent importantes".
Dans sa réponse, l'ordonnateur précédent insiste, lui, sur «la rupture intervenue en 2004 avec une
réduction significative des marges de manoeuvre".
L'action de la Région Lorraine en faveur de l'investissement dans les lycées s'est élevée à 97
M.Euros sur la période 2001 à 2004 ainsi que le prévoyait le programme prévisionnel
d'investissement (PPI). Si les PPI 2000 à 2006 constituait un objectif initial ambitieux, force est de
constater que ce dernier n'a été réalisé qu'à hauteur de 75 %. Son exécution souffre de décalages
importants dans le temps mais aussi de surcoûts significatifs. (§ 115-118).
Dans sa réponse, l'ordonnateur actuel, sans contester l'analyse, indique que trois raisons peuvent
expliquer ce taux d'exécution moyen : "l'évolution démographique entre le moment où l'opération a
été envisagée et celui de la phase opérationnelle d'étude et de réalisation (...), l'évolution des
formations offertes (...) et les multiples réformes du code des marchés publics [qui] nous ont
conduit à réexaminer et modifier les procédures, ce qui a entraîné des délais supplémentaires".
Ces difficultés sont liées à une estimation initiale des travaux insuffisante sans véritables études
préparatoires approfondies et sans programmation adaptée. (§ 119-138)
Dans sa réponse, le président du conseil régional a indiqué sa volonté de mettre en oeuvre les
recommandations de la Chambre.
Si les évaluations initiales se révèlent parfois en cohérence avec les besoins à satisfaire, leur
réalisation se heurte à des éléments techniques non identifiés au départ. Cette absence d'analyse
approfondie conduit à la reprise périodique des mêmes opérations de travaux pour un même objet
quelques années seulement après l'achèvement des premiers. (§ 139-152)
L'élaboration du budget et sa déclinaison en autorisations de programme sont effectuées en
majorant les crédits de façon à compenser les écarts financiers de réalisation et à faire face aux
aléas. Cette surcouverture des autorisations de programme encourage l'ouverture de travaux
complémentaires non prévus initialement. (§ 156-159)
Tout en admettant cette pratique qu'il juge de bonne gestion, le président du conseil régional,
dans sa réponse, indique que les "coûts de réalisation par m2 étaient inférieurs à ceux pratiqués
par d'autres pour des constructions similaires en Lorraine».
Bien qu'elle leur donne un caractère prioritaire affirmé, la Région Lorraine se révèle incapable de
réaliser les programmes fixés. Moins de 30 % des travaux prévus au PPI 2000 à 2003 ont été
ainsi achevés dans les délais, tandis que près du tiers des opérations sont encore en cours de
réalisation au 31 janvier 2005, voire ont été reportées. (§ 153-155)
Les modalités de passation des marchés publics correspondant aux travaux réalisés sont
marquées par des faiblesses : rapports de présentation insuffisamment renseignés et motivés,
incohérences dans le déroulement des procédures aboutissant notamment à la désignation des
titulaires des marchés avant l'autorisation de l'assemblée ou la signature des conventions de
mandat, voire notification des marchés quatre années après le début de l'engagement de
l'opération. (§ 160-173)
Le recours à la procédure des avenants pour modifier les masses et les définitions des travaux
pour des montants qui excèdent le plus souvent 15 % des marchés initiaux est en réalité
constitutif d'une procédure de gestion usuelle qui doit être dénoncée. (§174-180)
Dans sa réponse, le président du conseil régional "reconnaît cette dérive ponctuelle dans l'usage
des avenants tant pour les opérations gérées en régie que pour celles gérées par le biais de
mandataires". Il précise que "cette dérive est effectivement due à une définition préalable
insuffisante des besoins". Il indique que "des instructions ont immédiatement été diffusées et
rappelées aux services compétents ainsi qu'aux mandataires entre 2002 et 2004 (sous forme de
notes, de rappels à la réglementation, d'informations à la commission des marchés publics...)
tendant, pour l'avenir, à interdire purement et simplement la passation d'avenants supérieurs à
15 %. Durant ce laps de temps, le Conseil Régional a du gérer au mieux les opérations déjà
lancées et affectées par ces insuffisances dans la définition des besoins".
La procédure technique de mise en oeuvre des marchés est en outre entachée par de
nombreuses irrégularités : signature des marchés publics par des personnes non autorisées,
pratique incorrecte des retenues de garantie, comme des ordres de services ou des avances
forfaitaires envers les sous-traitants. (§ 181-213)
Dans sa réponse, le président du conseil régional ne conteste pas cette observation mais il
indique que "conscient des difficultés induites par ces dispositifs, le conseil régional les a revu les
uns après les autres pour aboutir aujourd'hui à un dispositif de délégations qui se veut exhaustif.
Cette exhaustivité va dans le sens de la sécurisation juridique des actes et des délégataires".
Les conventions de mandats conclues avec la SEBL et la SOLOREM ont été modifiées à
plusieurs reprises par la signature d'avenants dont deux étaient postérieurs à la validation
rétroactive par la loi urbanisme et habitat n° 2003-590 du 2 juillet 2003. Ils sont donc, de fait,
dépourvus de base légale. La définition de la mission déléguée aux mandataires reste insuffisante
en matière de procédure de choix des titulaires des marchés. Les modalités de rémunération sont
en outre incohérentes. En effet, la rémunération des mandataires est assise, non pas sur les
réalisations effectives mais sur le montant toutes taxes comprises des autorisations de
programmes allouées. Enfin, le règlement des avances dues aux mandataires s'effectue de façon
anormale avec plusieurs semaines d'avance. (§ 214-233)
Dans sa réponse, le président du conseil régional indique que "les nouveaux contrats de mandats
conclus depuis fixent un mode de rémunération forfaitaire (marché à prix définitif, forfaitaire".
La loi du 13 décembre 2000 a entériné la décentralisation du transport ferroviaire de voyageurs,
en confiant aux régions le rôle d'autorité organisatrice de transports collectifs d'intérêt régional à
compter du 1er janvier 2002. (§ 236-241)
Afin de s'y préparer, la Région a confié à des cabinets conseils l'expertise préalable de l'outil.
Cette expertise a été réalisée suffisamment en amont sauf dans un cas, pour être utilement
exploitable. Ces études établissent un constat globalement négatif des moyens affectés au TER
lorrain. L'état des infrastructures d'accueil des voyageurs ainsi que la vétusté du parc de matériel
roulant desservant les lignes régionales, notamment, mettent en lumière une carence financière
certaine de l'exploitant. (§ 242-247)
En ce qui concerne la vétusté du matériel, la SNCF, dans sa réponse aux observations
provisoires, affirme que "cette situation, qui était connue des parties lors de la mise en oeuvre de
la régionalisation, a pu se traduire à la fois par une prise en compte par l'Etat dans la
détermination des ressources transférées à la Région Lorraine au titre du besoin de
renouvellement du matériel, et également par la formalisation par la SNCF d'un schéma directeur
du matériel prévoyant un renouvellement progressif mais rapide du parc, avec la participation
financière du Conseil Régional. La réalisation des opérations de modernisation et des acquisitions
programmées de matériel neuf doit se traduire par un parc neuf ou modernisé à 100 % en 2009".
Au demeurant et malgré l'absence, non contestée, de l'avenant prévu dans le contrat initial, la
SNCF et la Région Lorraine, dans leurs réponses aux observations provisoires, attestent que le
délégataire s'est acquitté de ses obligations conventionnelles en matière d'investissements liés au
matériel roulant et au-delà.
Fruit d'une préparation minutieuse du conseil régional, autant que de l'expérience retirée d'une
précédente convention de partenariat sur les années 1997 à 2001, la convention passée le 8 mars
2002 entre la Région et la SNCF est conforme aux exigences de la loi et elle pose le cadre
juridique des relations entre l'autorité régionale et l'exploitant. (§ 236-282)
Des contrôles effectués pour évaluer la mise en oeuvre de cette convention et la prise en charge
de cette compétence par la Région, il ressort que le niveau de service en gare est précisément
mesuré. Cependant, on peut s'interroger sur le rapport coût/activité commerciale de nombreux
points de vente. Il participe, au sein d'un panel très diversifié de critères, d'une mesure de la
qualité produite et perçue. Les résultats de cette mesure fondent le niveau d'intéressement de
l'exploitant, par application d'un système de boni-mali financiers, qui gagnerait à être mieux
présenté et commenté. Un des volets de ce système n'est, par ailleurs, pas appliqué dans les
faits, en contravention avec les engagements conventionnels. Les organes de concertation,
facultatifs selon la loi, ont été créés en Lorraine et leur fonctionnent est satisfaisant. Enfin, les
partenariats sont quasi inexistants au niveau interrégional, en cours de développement sur une
approche intermodale et billettique au niveau infrarégional. Il existe par ailleurs des accords
transfrontaliers, mais, pour le cas du Luxembourg, la compétence juridique de la Région pour
contracter avec un Etat souverain étranger est sujette à caution. (§ 294-312)
Dans sa réponse, le président du conseil régional présente sur ce point une analyse différente :
«Le partenariat développé avec le Luxembourg /.../ ne s'appuie pas sur une convention entre le
Conseil Régional de Lorraine et l'Etat du Grand Duché de Luxembourg, mais sur un protocole -
cadre sans transaction financière directe entre les parties.»
La Région Lorraine a engagé la réalisation du schéma régional des infrastructures et des
transports prévu par la loi du 13 août 2004. Bien que le processus soit encore inachevé, la
Lorraine semble dans ce domaine en avance sur les autres régions. (§ 313-315)
Si la consistance des services transférés n'appelle pas d'observations critiques, il en va autrement
pour la dévolution de leur exploitation à la seule SNCF. La loi n'autorise en effet cette exception à
la règle de mise en concurrence que pour le transport ferroviaire. Or, les transports routiers de
substitution ont également été confiés à l'établissement ferroviaire. (§ 316-330)
Dans sa réponse, la SNCF indique que «son intervention dans l'attribution et la gestion des
services routiers repose sur une volonté commune des parties d'intégrer cette mission dans le
périmètre de la convention TER du 18 mars 2002, dans un souci d'efficacité du service public
rendu aux voyageurs, compte tenu de la charge de travail correspondante, et d'absence de
rupture des contrats en cours avec les transporteurs routiers.»
Le système de compensation par l'Etat des charges transférées présente de nombreuses
carences et failles : il est assis sur une base comptable de référence pour l'année 2000 dont
certains chiffres-clefs ne sont pas fiables et il ne réalise qu'une couverture incomplète des charges
liées aux tarifs sociaux nationaux. De plus, il ne compense que partiellement les charges
importantes que la Région a eu et a toujours à assumer afin d'engager une remise à niveau de
moyens transférés dans un état médiocre. (§ 331-357)
Si l'on rajoute à cet effort de rattrapage, la politique manifestement volontariste de développement
menée par la Région dès sa prise de compétence, il apparaît que la régionalisation du transport
ferroviaire de voyageurs s'est traduite par une augmentation importante des dépenses régionales
Les charges financières pesant sur la Région à ce titre continueront de croître. (§ 358-361)
L'exclusion du champ de la convention d'un des acteurs majeurs de ce domaine d'activité, à
savoir l'EPIC Réseau Ferré de France (RFF), ne facilite pas l'action de l'autorité régionale
organisatrice des transports. Outre un déficit critiquable de communication, il s'avère que le
réseau présente des carences d'entretien qui ont des incidences directes sur la qualité des
performances du trafic. Pourtant, la charge financière des péages versés à RFF n'a cessé, sur la
période examinée, de croître dans des proportions considérables. (§ 362-372)
En définitive, la Région paraît avoir globalement pris la mesure des compétences transférées et
elle soutient une politique ambitieuse par un niveau d'analyse opérationnelle élevé et par des
moyens financiers conséquents. Toutefois, le périmètre de son activité en tant qu'autorité
organisatrice des transports (AOT) pourrait à l'avenir, et notamment dans la perspective de la
renégociation de la convention en 2006, subir des modifications sensibles, tant lors de la mise en
service du TGV Est, que dans le cadre de la mise en place des transports interrégionaux ou bien
dans l'orientation que prendra finalement la réglementation européenne en matière de transport
ferroviaire. (§ 373-386)
En matière de développement économique, la loi du 13 août 2004 a fait de la Région la collectivité
territoriale coordonnatrice des actions d'intervention. Or, force est de constater qu'en l'absence de
convention avec l'ensemble des collectivités locales partenaires, la Région n'est pas en mesure
d'assumer cette mission.
Dans sa réponse, le président du conseil régional indique qu' «eu égard à la diversité des aides
attribuées par les différents niveaux de collectivités et l'absence de moyens mis à disposition par
la loi, il est indéniable que le Conseil Régional de Lorraine rencontrera des difficultés pour établir
ce bilan des aides».
La déclinaison des moyens financiers engagés met en lumière plusieurs incohérences liées au
partage des fonds définis préalablement entre plusieurs intervenants. Ainsi, est-il courant
d'observer des votes en faveur d'une augmentation des crédits de paiement suivi par des
réalisations en baisse proportionnellement inverse. (§ 387-441)
Le processus d'attribution fait appel à des partenaires extérieurs. Il comporte donc les risques
inhérents à la gestion de fait, par l'institution de «maîtres d'ouvrage délégués» permettant de
contourner le régime d'attribution des aides directes. (§ 442-463)
Dans sa réponse, le président du conseil régional précise que le «Conseil Régional a cessé de
recourir à ce système de maîtrise d'ouvrage discutable à compter de la Commission Permanente
du 30 septembre 2005 pour les aides à l'immobilier dédiées aux Très Petites Entreprises et
artisans» et que «les modalités de mise en oeuvre de l'aide à l'immobilier, par versement direct à
l'entreprise ou à un maître d'ouvrage réel, ont été adaptées de façon à être en conformité avec les
règles de comptabilité publiques et supprimer tout risque d'immixtion dans la gestion des deniers
publics par des organismes n'ayant pas la qualité de comptable public.»
L'évaluation des aides et leur contrôle ne sont que partiellement et insuffisamment réalisés. Il
s'agissait pourtant là de l'un des axes forts du projet lorrain. Les recommandations des
organismes extérieurs, lorsqu'ils sont sollicités ne sont pas suivies. (§ 464-475)
Les délais d'obtention des aides restent importants et supérieurs aux objectifs affichés avec plus
de 150 jours dans le meilleur des cas. L'analyse des aides sur la période montre que la Région
Lorraine a favorisé l'installation et le renforcement des entreprises déjà soutenues. En effet, les
aides immobilières régionales ont représenté plus de 62 % de l'ensemble au détriment des
aménagements de zones qui restent très inférieurs aux moyennes nationales avec seulement 9 %
des dépenses. (§ 476-511)
L'examen des aides montre que ces dernières sont peu importantes en nombre et qu'elles
concernent moins de 1 % des entreprises créées en Lorraine sur les quatre dernières années.
Elles ne paraissent pas en adéquation avec les bassins d'emploi les plus créateurs ni même avec
ceux qui souffrent du taux de défaillance d'entreprises le plus élevé. (§ 512-559)
Le coût global de l'aide apportée devient significatif, à 0,29 euros pour 1 euros distribué en 2004.
(§ 512-513)
L'action de la Région Lorraine reste modeste et en deçà des objectifs fixés. L'action régionale en
faveur des grands projets n'a concerné que vingt-et-une entreprises dont seules quatre entraient
réellement dans les critères d'attribution pourtant fixés par l'assemblée régionale. Les grands
projets soutenus n'ont pour la plupart pas tenu leurs engagements en matière de création
d'emplois et ils n'ont débouché que sur 60 % des effectifs primés. (§ 560-569)
Enfin, le volet social du plan de soutien conjoncturel établi par l'assemblée plénière du 15
novembre 2002 est entaché de dysfonctionnements graves. Les mesures d'actions ne sont pas
toutes prévues par des règlements d'intervention et elles ne semblent donc pas compatibles avec
les régimes notifiés par la commission européenne. Les bénéficiaires des missions confiées par la
Région Lorraine ont été choisis sans mise en compétition conforme aux dispositions applicables
du code des marchés publics. Les conventions passées entre la Région Lorraine et les
prestataires interviennent trop souvent à titre de régularisation pour des actions de formation déjà
réalisées. De plus, plusieurs actions de formation ne sont pas effectuées par les prestataires
retenus, ce qui engendre un surcoût substantiel, mais par des sociétés sous-traitantes avec
lesquelles des relations incertaines sont parfois entretenues. (§ 570-609).
Dans sa réponse, le président du conseil régional a indiqué que «la notion de marché public (...)
ne s'applique pas à ce contexte bien spécifique».
En matière de suites données par la Région aux observations définitives de la Chambre (25
novembre 2002) concernant la formation professionnelle continue et l'apprentissage, il a été
relevé que les nouvelles dispositions résultant de la loi n° 2004-391 du 4 mai 2004 et de la loi
n° 2004-809 du 13 août 2004 sont progressivement prises en compte. Si les moyens financiers
mis en oeuvre restent substantiels, les outils d'évaluation devraient être encore améliorés et les
relations avec les organismes associés (INFFOLOR, OREFQ) revues, particulièrement dans leur
volet financier. La Région prend désormais en compte les obligations liées au code des marchés
publics pour la sélection des organismes de formation, mais si elle a renforcé son dispositif de
suivi, celui de contrôle reste à parfaire. (§ 610-632)
S'agissant de l'apprentissage, un plan régional de développement de la qualité de l'apprentissage
est mis en application, les effectifs étant marqués par la stabilité. Un contrôle accru des CFA
paraît toutefois nécessaire. (§ 633-640)
INTRODUCTION
1.1. Le contrôle des comptes et l'examen de la gestion de la Région Lorraine relèvent du
programme de travail pour 2005 de la Chambre régionale des comptes de Lorraine et il concerne
les comptes des exercices 2001 à 2003 de la collectivité territoriale.
Le président du Conseil Régional a été informé par lettre du président de la Chambre du 3 janvier
2005 de l'engagement de la procédure d'examen de la gestion, une information étant également
faite à destination de l'ordonnateur précédent, le même jour.
1.2. Conformément aux dispositions de l'article L241-7 du code des juridictions financières, les
entretiens préalables avec les ordonnateurs concernés se sont tenus les 4 et 20 mai 2005.
La Chambre, dans sa séance du 21 juin 2005, a arrêté des observations provisoires concernant
l'examen de la fiabilité des comptes, l'analyse de la situation financière, les marchés de travaux
des lycées, le service régional ferroviaire de voyageurs, les interventions économiques, ainsi que
les suites données par la Région au rapport d'observations définitives du 25 novembre 2002 relatif
à la formation professionnelle continue et à l'apprentissage.
Ces observations provisoires ont été communiquées aux deux ordonnateurs concernés le 27
juillet 2005.
Par lettre en date du 16 septembre 2005, le président de la Chambre régionale des comptes de
Lorraine a accordé un délai de réponse supplémentaire d'un mois au précédent président ainsi
qu'au président en exercice et l'actuel comme le précédent ordonnateur ont fait connaître leurs
réponses à ces observations provisoires les 3 et 26 octobre 2005.
Conformément aux dispositions de l'article
R241-12 du code des juridictions financières, des
extraits des observations provisoires les concernant ont été communiqués, le 2 août 2005 aux
sociétés Pro Accis, SADEPAR, SEBL, SOLOREM ainsi qu'au Cabinet LAMOTTE, à RFF, à la
SNCF, aux départements de la Meurthe et Moselle, de la Meuse, des Vosges, à la CA2M, à la
CUGN, à 3i Lorraine, à une vice présidente du conseil régional, à la ville de Thionville, à ILP et à
SOFARIS.
Les réponses à ces extraits d'observations provisoires ont été enregistrées par le greffe de la
Chambre dans les conditions ci-après : le 23 août de SADEPAR, le 2 septembre de la CUGN, le 5
septembre de la CA2M et du département de la Meurthe et Moselle, le 21 septembre du cabinet
LAMOTTE, le 28 septembre de la SOLOREM, le 29 de la SEBL, le 30 de la société PRO ACCIS,
le 5 octobre de la vice présidente de la Région Lorraine et de 3i Lorraine et enfin le 10 octobre de
la SNCF.
Tout en prenant en compte l'absence de réponse des autres tiers concernés, la Chambre, dans sa
séance du 1er décembre 2005 a arrêté les observations définitives ci-après développées.
1. PRESENTATION
D'une superficie qui couvre 4,3 % du territoire français et peuplée de 2,3 millions d'habitants, la
Lorraine a longtemps représenté l'archétype d'une région mono industrielle durement touchée par
les restructurations des activités industrielles ayant modelé son histoire. Elle apparaît aujourd'hui
comme une région plutôt diversifiée qui ne présente plus de handicap structurel. L'évolution du
produit intérieur brut régional est cependant restée inférieure à la croissance nationale.
L'empreinte industrielle encore très présente est aujourd'hui complétée par les activités de
production de transport et logistique, étroitement liées aux industries fortement internationalisées.
Le diagnostic de la situation économique lorraine a permis d'identifier les enjeux territoriaux de la
politique régionale, tels ceux de la croissance dans les territoires en difficultés et le
développement d'une aire métropolitaine autour de l'axe Nancy Metz, mais aussi, «le
développement de l'attractivité sur une population de jeunes actifs, et la diversification du tertiaire
marchand».
Avec un montant de dépenses réelles totales inscrites pour un montant de 609,3 M.Euros au
budget primitif pour l'exercice 2004, dont 283,5 M.Euros de dépenses d'investissement, le budget
régional lorrain se situe au neuvième rang des régions métropolitaines hors Ile de France.
Ce budget met en lumière la part importante des dépenses de fonctionnement réservée à la
formation (42,6 %), et aux dépenses correspondant au transfert de compétences en matière
ferroviaire (32,9 %), les interventions économiques ne représentant que 7,6 % des dépenses
réelles de fonctionnement prévues.
Les dépenses d'investissement consacrent quant à elles, la prédominance des actions conduites
en faveur des transports et des télécommunications (51,3 %) lesquels représentent en outre 69,5
% des subventions d'équipement allouées en 2004. Près du quart des dépenses d'investissement
était en outre destiné à la formation continue et à l'investissement dans les établissements
d'enseignement du second degré.
Le champ du contrôle, mentionné en introduction (1.2)
repose donc sur l'examen de près du tiers
des dépenses réelles de fonctionnement et de plus des deux tiers des dépenses d'investissement.
Les comptes produits et examinés par la juridiction s'inscrivent à mi-chemin de l'exécution du
Projet Lorrain 2000 à 2006 voté les 16 et 17 décembre 1999. Ce dernier, à partir des trois axes
stratégiques que sont le renforcement de la compétitivité du carrefour lorrain, de la solidarité
régionale pour favoriser la cohésion sociale et territoriale et enfin des performances du tissu
économique, décline huit projets fédérateurs, vingt-quatre programmes d'action et des contrats de
projets liant les partenaires. Les thèmes retenus par la Chambre ont été examinés au travers des
objectifs et des moyens ainsi arrêtés et alloués.
Le changement de majorité lors des dernières élections régionales a conduit d'une part au
remodelage de l'organisation des services, et d'autre part à l'élaboration d'un budget
supplémentaire marquant les nouvelles "impulsions données à la politique économique" en
respectant cependant les axes déclinés par le Projet Lorrain.
2. EXAMEN DE LA FIABILITE DES COMPTES
2.1. Choix des méthodes comptables utilisées
En matière de comptabilité, le principe de permanence des méthodes formalisé lors de l'adoption
du plan comptable général de 1982, constitue un principe général intangible qui s'impose à tous
les organismes quelles que soient ses origines. Afin de pouvoir s'assurer que les méthodes
comptables employées sont rigoureusement respectées et suivies d'un exercice sur l'autre, ces
dernières doivent avoir été définies par l'assemblée délibérante, notamment en ce qui concerne
les modalités d'amortissement, les reprises sur subvention et la détermination des charges à
étaler sur plusieurs exercices.
Sur ce sujet et en réponse aux observations de la Chambre, le président du conseil régional a
précisé que "les modalités d'amortissement ont été décidées en 1972, lors de la création de
l'établissement public régional par le Préfet et le Trésorier Payeur Général. En 1983, lors de
l'établissement du premier budget de la Région en tant que collectivité locale, dans le respect du
principe de permanence des méthodes comptables, les modalités des amortissements ont
continué à s'appliquer".
Pour sa part, l'ordonnateur précédent indique dans sa réponse à ce propos que «de façon
générale, la Région avait posé comme principe de fixer ses règles d'intervention à l'occasion de la
publication de la nouvelle nomenclature comptable M71. Or celle-ci a beaucoup tardé: attendue à
partir de 2000, elle n'a trouvé à s'appliquer que depuis 2005 Dans l'attente de la parution de la
M71, la Région n'a pas investi sur le toilettage de pratiques globalement non codifiées par la
M51».
Tout en prenant en compte ces réponses, la Chambre constate qu'à la fin 2004, la Région
Lorraine n'avait pas arrêté les principales modalités de suivi comptable indispensables à une
présentation comptable fidèle de la réalité de la collectivité territoriale sur la période soumise à
l'examen. Une délibération relative aux modalités d'amortissement des biens acquis a toutefois
été adoptée par l'assemblée délibérante le 11 février 2005.
2.2. Rattachement des charges (et des produits) à l'exercice
La revue des comptes a conduit à vérifier pour les dépenses de fonctionnement l'application du
principe de rattachement des charges.
L'examen du compte 631 sur les exercices concernés a mis en lumière le défaut de rattachement
de charges à l'exercice supportant l'exécution de la commande ou du service. Ainsi, le sondage
pratiqué sur l'exercice 2002 (100 % du compte 631) montre que près de 3 % des mandats émis
auraient dû être comptabilisés sur l'exercice 2001. En effet, la commande, l'attestation du service
fait et la réception de la facture sont intervenues avant le terme de la journée complémentaire
tandis que le mandatement était effectué avec plus d'un mois de délai sur l'exercice suivant. Le
délai entre la réception de la facture et le règlement par le comptable public a pu être arrêté à 105
jours pour les factures non rattachées de l'exercice 2001.
Les dépenses de fonctionnement rattachables à un exercice sont les dépenses ayant fait l'objet
d'un engagement préalable. Elles concernent les opérations dont la constatation du service fait est
intervenue jusqu'au 31 décembre de l'exercice, mais dont les factures ou mémoires s'y rapportant
ne sont pas parvenues à l'ordonnateur avant la fin de la journée complémentaire. Ces charges
doivent être rattachées à l'exercice dans la mesure où les crédits nécessaires ont été prévus au
budget. Dans les cas où les factures et mémoires sont parvenus à l'ordonnateur avant la fin de la
journée complémentaire, ces charges sont rattachées de plein droit.
La même observation a pu être faite pour l'inscription des achats de biens meubles en dehors des
opérations prévues. L'instruction M51 disposait pourtant que les recettes et les dépenses sont
inscrites dans la comptabilité régionale dès que l'ordonnateur a émis les titres et les mandats ;
l'émission des titres ou des mandats intervient sitôt que les droits et les obligations de la Région
sont établis et non pas au moment de l'encaissement ou du décaissement des sommes
correspondantes.
En outre, la M51 alors applicable précisait que la journée comptable du 31 décembre est
prolongée jusqu'au 31 janvier de l'année suivante pour l'émission des mandats et des titres
correspondants à des services faits et à des droits acquis au cours de l'exercice considéré,
ressortissant à la section de fonctionnement. Tous les services faits au cours d'une année,
affectant la section de fonctionnement, doivent avoir fait l'objet, sans exception, d'un
ordonnancement pour le dernier jour de janvier de l'année suivante au plus tard. Les mandats et
les titres complémentaires établis à cet effet, du 1er janvier au dernier jour de janvier, doivent être
inscrits sur les bordereaux de mandats et de titres sous la date du 31 décembre précédent.
La Chambre précise que pour les exercices à venir, ces principes d'indépendance des exercices
et de rattachement des charges sont rappelés par la nouvelle instruction M71. Celle-ci stipule en
effet que «la comptabilité d'un exercice budgétaire est arrêtée à la date du 31 décembre.
Toutefois, une journée complémentaire permet d'une part, à l'ordonnateur d'émettre, pour les
seules opérations de la section de fonctionnement et de stocks ainsi que pour les opérations
d'ordre, les mandats et les titres de recettes correspondant à des droits se rapportant à l'année qui
s'est achevée, et, d'autre part, au comptable de comptabiliser les mandats et les titres émis durant
cette même période».
Au demeurant le rapport d'exécution budgétaire réalisé par la Région Lorraine précisait que «la
comptabilité de la Région est une comptabilité des droits constatés : elle enregistre non pas des
mouvements de fonds effectifs mais des ordres donnés au comptable». Il conviendrait que la
réalité des faits au plan comptable corresponde avec les intentions affichées par la Région.
L'absence de rattachement des charges et donc de respect du principe d'indépendance des
exercices ne permet pas de garantir la sincérité de la présentation des résultats votés par la
commission permanente.
2.3. L'enregistrement des immobilisations
2.3.1. La présentation de l'état de l'actif
L'instruction M51 prévoyait que l'ordonnateur établissait à l'appui du compte administratif un état
des biens meubles et immeubles. Celui-ci consistait «en un inventaire détaillé des biens dont la
Région est propriétaire, affectataire ou locataire. Une fiche d'identification ouverte par bien ou par
groupe de biens permet de retracer la localisation du bien, ses caractéristiques physiques, son
coût d'acquisition, sa durée d'amortissement...»
La correspondance exacte entre le contenu de l'inventaire tenu par l'ordonnateur et le fichier des
immobilisations servi par le comptable doit pouvoir être réalisée à tout moment. Or, le seul
document produit est l'état de l'actif du comptable. En effet, lors du contrôle, la collectivité a
indiqué qu'elle ne procédait pas à l'inventaire détaillé des biens dont elle était propriétaire,
affectataire ou locataire. En conséquence, aucun état des biens meubles et immeubles de la
Région n'était produit.
Dans sa réponse aux observations provisoires, l'ordonnateur a confirmé que "la Région Lorraine
ne présentait pas d'état de l'actif dans son compte administratif. Seul l'état présenté à l'appui du
compte de gestion du payeur régional était présenté à l'assemblée régionale». La Chambre prend
acte qu'«à partir de 2005, l'instruction M71 s'appliquant, ces dispositions ont été mises en
oeuvre».
2.3.2. L'amortissement des immobilisations
2.3.2.1. Bâtiments (compte 212)
L'examen de l'état de l'actif a révélé de nombreuses lacunes. Ainsi, les valeurs comptables et les
durées d'amortissement sont incohérentes en ce qui concerne l'immeuble «Place de la
bibliothèque», pour lequel seules quatre annuités ont été appliquées au lieu de quatorze, pour le
«logement concierge-immeuble enseignement Terville» où le nombre d'annuités déjà pratiquées
devrait être de quatorze, et le «Worlde Trade Center» où le nombre d'annuités déjà pratiquées est
effectivement de onze, ce qui équivaut à une somme de 407 148,73 euros et non de 380 209,24
euros.
En réponse aux observations de la Chambre, l'ordonnateur, confirmant les erreurs matérielles
constatées a également indiqué que «l'ensemble de ces opérations seront apurées en fin d'année,
conformément à la délibération du Conseil Régional n° 3-2005 du 10 février dernier qui reprend la
procédure décrite dans la circulaire du 30 juillet 2004».
2.3.2.2. Matériel, outillage et mobilier (compte 214)
De la revue des comptes, il est ressorti que l'ensemble des biens acquis en 1987 n'avait pas été
totalement amorti. En effet, le document faisait apparaître une valeur comptable nette de 2 444,80
euros, alors que ce type d'immobilisation était supposé amortissable sur cinq ans. Quant à
certains biens acquis en 1990, ils se soldent par une valeur comptable nette négative de 1 378,70
euros (1 303,74 euros +74,96 euros) incompréhensible, hormis dans le cas où il aurait été omis
de constater la plus value réalisée en débitant le compte 214 par le crédit du compte 116
«différences sur réalisations de biens meubles et immeubles».
A ce propos, l'instruction M71 préconise, dès 2005, une nouvelle procédure de passation de ces
écritures, en l'occurrence les comptes 675 «valeurs comptables des immobilisations cédées»et
775 "produits des cessions d'immobilisations» retraceront les plus ou moins-values réalisées.
En outre, parmi les biens acquis en 2002, un grand nombre n'est pas identifiable, à défaut d'avoir
été correctement inventorié. Il s'agit, en l'espèce, de matériels dont la valeur d'achat est
significative, tel l'achat de serveurs de fichiers et de messagerie, et d'un dispositif de sauvegarde
d'achats de rayonnages, de divers matériels et outillages informatiques tels que switch, répartiteur
de réseau, serveur et imprimante, mais aussi de trois appareils photo numériques, de mobilier de
bureau, des poubelles mobiles, lesquels doivent effectivement être assimilés à des
immobilisations, mais parallèlement être identifiés.
En revanche, il est relevé que divers petits matériels sont imputés en investissement alors que
leur prix unitaire est inférieur au seuil de prise en charge des biens dans cette section, soit 80
euros (décision adoptée par délibération n° 17-2001 en date du 20 décembre 2001). De même
l'état de l'actif mentionnait la somme de 114 643,99 euros, relative au mandat 013870, correspond
au paiement des matériels informatiques mis à la disposition des élus. Or, conformément aux
dispositions de la convention adoptée le 7 février 2002 par décision n° 87-2002, bien que la
Région ait participé au financement de cette opération à raison de 50 %, les élus sont
propriétaires des matériels après règlement total de leurs échéances (x 25 mois) de
remboursement (titres 2002 : 23 698,80 euros). Les matériels n'étant pas la propriété de
l'administration, leur coût n'a pas à être imputé en investissement, mais en fonctionnement.
Enfin, il a été relevé que plusieurs inscriptions étaient de nature à entacher la sincérité de
l'inventaire présenté. Il en est ainsi du règlement d'un audit qui n'est pas rattaché à un marché ou
à une opération d'investissement, de l'inscription des sommes de 324 724,02 euros et de 32
650,80 euros correspondant respectivement à des retenues de garantie et à une avance
forfaitaire, au paiement d'une subvention au LPR «Blaise Pascal» de Forbach, au titre de la
décision n° 261-1999 de la commission permanente du 30 avril 1999.
2.3.2.3. Matériel de transport (compte 215)
L'examen des comptes a mis en lumière que la ligne relative au véhicule XM Exclusive,
immatriculé 323 ALV 57 et acquis en 2000, présentait une valeur comptable nette négative de 10
000 euros.
Là encore, si certains biens n'ont pas été identifiés, à juste titre, car ils n'avaient pas
lieu d'être imputés en section d'investissement, le non respect de certaines règles de comptabilité
des matériels telles que la mise en oeuvre de la retenue de garantie et de l'avance forfaitaire s'est
accompagné contre toute logique d'une dispersion des écritures de passation comptable à l'état
de l'actif. La lisibilité et l'utilité de cet état de l'actif ont donc été fortement amoindries.
Sur des marchés importants d'achat de matériel informatique (cf. n° 1999120481), le recours à la
procédure d'avance forfaitaire a été écarté au profit d'un système de règlement de trois acomptes
inscrits chacun séparément à l'état de l'actif. Dès lors, les mêmes matériels se trouvent
mentionnés trois fois, pour 50, 30 et 20 % de leur valeur. Le suivi et une procédure de réforme des
matériels ainsi comptabilisés sont donc très difficiles.
La tenue d'un état des biens meubles et immeubles, qui consiste en leur inventaire détaillé,
constitué de fiches d'identification par bien retraçant leur localisation, leurs caractéristiques
physiques, leur coût et leur durée d'amortissement, est indispensable pour les écritures de sorties
de ces biens de l'actif de la collectivité. La connaissance de la composition du patrimoine doit
faciliter sa gestion par les autorités responsables de façon, en particulier, à prendre les mesures
de renouvellement et de conservation nécessaires, en prévoyant les moyens financiers
appropriés.
En vertu du principe de permanence des méthodes, et à l'appui des dispositions de l'instruction
M71 introduisant l'obligation d'amortir leurs biens aux régions, la Région Lorraine ne peut faire état
d'une option de «reconstitution facultative des amortissements des biens acquis avant le 1er
janvier 2005». Contrairement à la délibération n° 3-2005 des 10 et 11 février 2005, la Région n'est
pas en mesure d'arrêter d'amortir ses biens acquis avant le 1er janvier 2005. Elle doit les
recenser, ou à défaut les sortir de l'actif selon la procédure décrite au chapitre 2 de la circulaire
CD 2184 du 30 juillet 2004, et reconstituer, voire régulariser, leurs amortissements conformément
aux termes des deux derniers alinéas du 2 du chapitre ci-dessus cité [...reconstituer la part des
amortissements...constatés avant le 1er janvier 2006...]. Au demeurant les biens sortis
progressivement de l'actif continueront d'être amortis jusqu'à leur date de sortie.
2.3.2.4. Matériel informatique
La décision 854-2001 du 30 novembre 2001 a autorisé, en son article 1, le président du Conseil
Régional à approuver les procédures de consultation suivies, le choix du titulaire et le résultat de
la négociation nécessaires à la création d'un site intranet. En son article 2, elle a autorisé non
seulement la signature du marché de réalisation et de mise en oeuvre du site Intranet avec la
Société Cap Gemini & Young France pour un montant de 53 609,91 euros, mais aussi la signature
du marché» avec l'attributaire qui sera désigné par la Commission des Marchés Publics dans le
cadre de la procédure d'appel d'offres ouvert en vue de l'acquisition du serveur, des micro-
ordinateurs et des imprimantes». Le marché n° 2001120511 relatif à l'acquisition des micro-
ordinateurs et des imprimantes a donc été signé sans approbation de l'acte d'engagement par
l'assemblée délibérante. Le rapport de présentation DPR n° 289-2002 mentionnait d'ailleurs que la
référence de la décision d'assemblée dans le choix du titulaire était sans objet.
Mais un organe exécutif local ne peut valablement contracter au nom de la collectivité que si la
délibération l'y autorisant approuve l'acte d'engagement tel qu'il sera signé, en indiquant
notamment l'identité des parties et le montant des prestations (cf. CAA Lyon, 5 décembre 2002,
Commune de Montélimar c/ préfet de la Drôme, décision confirmée par CE 13 octobre 2004). Cet
arrêt n'a pas eu pour effet d'introduire de nouveaux éléments de procédure, mais il est venu
préciser les conditions dans lesquelles doit intervenir la seule délibération autorisant l'exécutif
local à signer le marché. L'ordonnance n° 2005-645 du 6 juin 2005, relative aux procédures de
passation des marchés publics des collectivités territoriales, a confirmé qu'une délibération de
l'assemblée en amont pouvait autoriser l'exécutif à lancer et signer un marché.
Ainsi, l'article L4231-1 du code général des collectivités territoriales a seulement pour objet
d'habiliter l'exécutif local à prendre les mesures qu'appellent les délibérations adoptées par
l'assemblée délibérante. Toutefois, selon l'article L4231-8 du code général des collectivités
territoriales, résultant des dispositions de la loi n° 2001-1168 du 11 décembre 2001, dite loi
MURCEF, le président du conseil régional, par délégation du conseil régional, peut être chargé,
pour la durée de son mandat, de prendre toute décision concernant la préparation, la passation,
l'exécution et le règlement des marchés de travaux, de fournitures et de services qui peuvent être
passés "sans formalité préalable" (désormais dits «marchés à procédure adaptée», cf. art. 26 du
Code des Marchés Publics) en raison de leur montant, et lorsque les crédits sont inscrits au
budget. Le montant préconisé par le code des marchés 2001 devait être inférieur à 90 000 euros,
il est de 230 000 euros depuis 2004. Un article L4231-8-1 a été ajouté par l'ordonnance du 6 juin
2005 précité. Il dispose que «la délibération du conseil régional ou de la commission permanente
chargeant le président du conseil régional de souscrire un marché déterminé peut être prise avant
l'engagement de la procédure de passation de ce marché. Elle comporte alors obligatoirement la
définition de l'étendue du besoin à satisfaire et le montant prévisionnel du marché. Le conseil
régional ou la commission permanente peut, à tout moment, décider que la signature du marché
ne pourra intervenir qu'après une nouvelle délibération, une fois connus l'identité de l'attributaire et
le montant du marché. Les dispositions du présent article ne s'appliquent aux marchés visés à
l'article L4231-8 que lorsque le président du conseil régional n'a pas reçu la délégation prévue à
cet article".
En réponse aux observations de la Chambre, le président du conseil régional a indiqué que «la
Commission Permanente a, par décision du 30 novembre 2001 référencée DCP n° 854-2001,
autorisé a priori la signature du marché n° 2001120511 (DPR n° 2892002), ce alors même que les
composantes essentielles de celui-ci (titulaire, montant) n'étaient alors pas connues, faute pour la
Commission des Marchés Publics d'avoir déjà désigné son titulaire». Il a précisé que «le Conseil
Régional a, jusqu'au 1er septembre 2004, longtemps privilégié l'option d'en différer la mise en
oeuvre, ce dans l'attente, soit d'une prise de position du Conseil d'Etat, soit d'une intervention, du
législateur». L'ordonnateur justifie la solution retenue en indiquant que «le caractère opposable de
la jurisprudence établie par la Cour Administrative d'Appel de Lyon aux marchés conclus par le
Conseil Régional de Lorraine semblait discutable au plan du droit, l'arrêt susvisé pouvait à cet
égard être envisagé comme un cas d'espèce non transposable aux marchés conclus après appel
d'offres par le Conseil Régional de Lorraine et dont l'attribution relève par principe des seules
compétences de la commission d'appel d'offres du Conseil Régional de Lorraine. Au plan
opérationnel, l'application stricte de la solution retenue par la Cour Administrative d'Appel de Lyon
engendrait un formalisme supplémentaire non négligeable. Elle avait des implications pratiques
préjudiciables, parmi lesquelles un allongement conséquent (de l'ordre d'un mois à un mois et
demi) des délais de notification des marchés régionaux».
La Chambre note toutefois que selon l'ordonnateur, «c'est après que le Préfet de Région a
questionné, par courrier du 7 mars 2004, la pratique du Conseil Régional, et à l'issue du dialogue
qui a suivi sur le terrain juridique avec les services préfectoraux en charge du contrôle de la
légalité des actes régionaux, que le Conseil Régional a, avec l'accord du Préfet de région, fait
application de la jurisprudence «Commune de Montélimar» à compter du 1er septembre 2004».
Nonobstant les observations ci-dessus détaillées, le marché n° 2001120511 précité appelle
d'autres observations. Sans préjuger de la forme de ce contrat [soit un marché à bons de
commande au motif que ni le rythme ni l'étendue exacte des besoins ne pouvaient être
entièrement arrêtés, conformément aux termes de l'article 72 du Code des Marchés Publics
(CMP) 2001 (art. 71 CMP 2004)], celui-ci a été signé pour des montants minimum et maximum
respectifs de 120 000 et 480 000 euros TTC. Or, le CCTP du marché en question indique
explicitement en pages 2, 3, 4 et 8 qu'à titre estimatif l'étendue et le rythme des besoins du conseil
régional étaient de cinquante ordinateurs et cinquante imprimantes pour une mise à disposition
souhaitée en janvier/février 2002. Au vu de la «fiche marché» remise par le comptable le 21
janvier 2005 (ce même marché est clos depuis le 31 mars 2004), près de quarante-cinq matériels
ont été réellement acquis pour un montant total de 126 129,42 euros TTC seulement. Si le
montant minimum a été respecté, en revanche l'estimation maximum des besoins a été
inopinément surévaluée de plus de 200 000 euros, sachant qu'en l'occurrence le nombre de
bénéficiaires éventuels des matériels était constant.
En définitive, non seulement ce marché a été signé sans approbation de l'assemblée délibérante,
mais en sus il a contrevenu aux dispositions de l'article 1er du code des marchés publics. En effet,
la définition préalable des besoins n'a pas été effectivement assurée.
2.3.3. L'inscription de dépenses d'investissement en section de fonctionnement
L'analyse par sondage des pièces comptables fournies à l'appui des mandats de dépenses de la
Région Lorraine, pour les exercices 2001 à 2003, a mis en lumière que le compte 631 a enregistré
de façon irrégulière de véritables acquisitions ou travaux d'amélioration, les imputations
comptables erronées se montant à 4,92 % de l'addition des dépenses inscrites au compte 631
«Entretien et réparation».
L'objectif des états financiers étant de donner une image fidèle du patrimoine, de la situation
financière ainsi que du résultat comptable, les dépenses qui ont pour résultat l'entrée d'un nouvel
élément destiné à rester durablement dans le patrimoine de la collectivité ainsi que les dépenses
d'amélioration ayant pour effet soit d'augmenter la valeur et/ou la durée de vie de l'actif existant,
soit de permettre une diminution du coût d'utilisation, doivent être immobilisées.
2.3.4. L'inscription des intérêts moratoires en dépenses d'investissement
L'imputation d'intérêts moratoires aux comptes 2140 «Mobilier et matériels administratif», 2323
«Travaux de bâtiments» et 239 «Travaux sur biens reçus à disposition» a été relevée. Or, selon
l'instruction M51, applicable au moment de ces opérations, les intérêts moratoires constituent des
charges inhérentes à la gestion des marchés publics et ils ne peuvent donc s'inscrire dans le
patrimoine de la collectivité. Ainsi, l'instruction comptable précisait qu'ils devaient être
comptabilisés dans le compte 6716 «intérêts de retard». A compter du 1er janvier 2005,
l'instruction M71 a créé un compte spécifique 6711 «intérêts moratoires».
Même si les montants en cause sont modestes, l'inscription comptable des intérêts moratoire doit
être surveillée avec attention, la transmission des informations financières entre les différents
services de la Région Lorraine devant sans doute être améliorée.
2.3.5. L'inscription des acquisitions d'immeubles au compte administratif
L'examen des annexes obligatoires au compte administratif 2003 a montré que l'état des
acquisitions comportait des lacunes notables. En effet, l'état des acquisitions immobilières
effectuées en 2003 mentionne l'achat de bureau et de salles de réunion pour un montant de 502
350 euros HT. Or, si le mandat de paiement a bien été émis en décembre 2003, il a été rejeté par
le comptable public pour défaut de pièces justificatives et absence de crédits disponibles. Le
mandatement n'est en réalité intervenu qu'au cours de l'exercice 2004. En conséquence,
l'acquisition n'aurait pas dû figurer dans l'état susvisé. A l'inverse, deux acquisitions plus
significatives ont été omises par les services financiers de la Région Lorraine. Ainsi, la Région
Lorraine s'était portée acquéreur de locaux cédés (cession de bail à construction) par l'EPCI du
Pays de Colombey les Belles et du Toulois, le CERFAV en étant locataire, pour un montant de
363 743,36 euros, et surtout de l'immeuble de «Blida» pour un montant de 4 903 600 euros. Les
mandats de dépenses ont été respectivement émis le 4 juillet 2003 et le 18 février 2003. Au
demeurant, la somme de 87 970,58 euros relative aux frais de commercialisation des locaux de
l'immeuble de Blida, a également été imputée en investissement, alors que ce type de frais est
une charge de fonctionnement (compte 635 de la M51, et désormais 622 de la M71).
En outre, s'agissant de l'immeuble de Blida, l'évaluation produite par le service des domaines le
15 mai 2002, et réajustée en fonction des surfaces le 28 mai 2002, d'un montant de 3 483 000
euros HT est assez éloignée du prix définitif d'achat (4 100 000 euros HT) par décision de la
commission permanente du 31 mai 2002. La loi du 11 décembre 2001 dite loi «MURCEF» a, par
son article 23, confirmé l'obligation instituée par la loi du 1er décembre 1942 relative au domaine
immobilier de l'Etat, de consulter le service des domaines préalablement à toute acquisition. La
simple obligation de délibérer au vu de l'avis du service domanial remplace désormais la décision
expresse de passer outre des collectivités qui entendaient, le cas échéant, poursuivre l'opération
en retenant des conditions financières supérieures. Toutefois, eu égard aux sommes en jeu, qui
représentent plus de 15 % du prix de vente définitif, il aurait été logique que la Région Lorraine
appuie sa délibération par un avis motivé.
2.4. Les provisions
Alors qu'elles sont habituellement enregistrées dans le compte 15 selon l'instruction M51, il a été
relevé qu'aucune provision n'a été comptabilisée dans les comptes de la Région de 2001 à 2003.
Evaluées en fin d'exercice, les provisions sont destinées à couvrir des risques et des charges
nettement précisés quant à leur objet, dont la réalisation est incertaine, mais que des évènements
survenus ou en cours rendent probables. Ainsi, les provisions, qui ont un caractère provisoire
jusqu'à la réalisation de l'évènement, peuvent être établies dans deux cas : lorsque le risque n'est
pas certain ou lorsqu'il n'est pas connu pour son montant exact. Ainsi en est il des provisions pour
risques financiers consécutifs à l'octroi de garanties d'emprunts et les provisions pour litiges dans
le cadre de procédures contentieuses. De plus, les provisions peuvent être destinées à étaler sur
plusieurs exercices, le financement de travaux au titre d'exercices budgétaires à venir.
Sur la période examinée, la Région Lorraine a réglé plusieurs contentieux. La liste des contentieux
clos et des instances arrêtée au 1er janvier 2005 montre l'importance des procédures introduites à
l'encontre de la Région. Ainsi, au cours de la période 2001 à 2004, la Région a été condamnée
notamment au versement d'indemnités, pour un montant de 386 051,22 euros, à la Société
WEILER pour une instance introduite en 1999. En outre, vingt autres instances restent pendantes
dont près de la moitié tendent à l'obtention d'une indemnisation pour un montant global estimatif
de 523 073,31 euros.
Au cours des exercices examinés, la collectivité n'a pourtant pas procédé à la mise en oeuvre de
provision. La Région a indiqué s'être fondée sur la marge disponible d'exécution du budget pour
couvrir ses besoins en l'espèce. Mais l'absence de constitution de provision pour risques et
charges modifie la perception qui doit être faite des comptes de la collectivité territoriale.
Dans sa réponse sur ce sujet, l'ordonnateur indique que «la M51 laisse aux régions la possibilité
de constituer des réserves, il ne s'agit en aucun cas d'une obligation. Les provisions réglementées
telles qu'elles peuvent exister dans le plan comptable général ou l'instruction M14, ne sont pas
applicables aux régions. L'instruction M71, tout en rappelant le principe de prudence issu du plan
comptable général, entend laisser aux régions le plein exercice de leur responsabilité en matière
de gestion des risques. S'agissant d'une véritable mise en réserve, contrairement aux provisions
réglementées, leur utilisation n'est pas neutre au regard de la problématique budgétaire. Ainsi
dans le cadre des provisions pour risques en matière de contentieux, il convient de relativiser les
sommes en jeu».
La Chambre souhaite cependant rappeler que le principe de prudence associé à la constitution
des provisions doit, selon le Conseil National de la comptabilité, se traduire par une évaluation
précise des incertitudes et des
risques éventuels. Si l'instruction comptable M51 n'imposait pas
son application comme le souligne à bon droit l'ordonnateur, il n'en reste pas moins que les
provisions répondent à ce principe de prudence, nullement écarté par l'instruction M51. La
Chambre prend note de l'analyse de la Région selon laquelle des tensions budgétaires peuvent
survenir lors de la reprise de la provision car une recette d'investissement doit la financer. Elle
indique cependant qu'afin de simplifier les procédures et de réaffirmer leur logique prudentielle,
les provisions ont depuis mars 2004 un caractère semi-budgétaire (débudgétisation de la
provision en section d'investissement, la dotation en section de fonctionnement restant
budgétaire. Ce mécanisme permet d'écarter la tension budgétaire au moment de la reprise de la
provision.
2.5. L'absence d'inscription comptable au chapitre 940 Relations publiques
L'analyse des dépenses de restauration et de prestations destinées aux fêtes et cérémonies a mis
en évidence que, lors des exercices 2001 à 2003, les mandats de paiement ont été comptabilisés
au compte par nature 660 «Fêtes et cérémonies» et intégrés au chapitre 934 «Administration
générale». Pour le seul exercice 2002, un montant total de 475 687 euros a pu être arrêté.
Pourtant, l'instruction comptable M51 dispose que les frais relatifs aux relations publiques sont
comptabilisés dans le compte par nature 660 mais ventilés par catégorie dans le chapitre 940
«Relations publiques» en distinguant les formalités (9401), les informations (9402) et les fêtes
publiques, cérémonies parrainages, jumelage... (9403). Lors de la mise en oeuvre de l'instruction
comptable M71, les dépenses relatives aux relations publiques devront être regroupées dans les
sous-comptes 6232 «fêtes et cérémonies» et 6234 «réceptions» puis ventilées au sein de
chacune des fonctions auxquelles les prestations sont destinées.
L'absence d'inscriptions comptables dans le chapitre 940, dans le cadre d'un vote du budget
primitif effectué par fonction, ne contribue pas à la transparence des dépenses prévisionnelles
présentées à l'assemblée délibérante.
2.6. Etat de la dette
De l'examen des données concernant la dette, récapitulées dans les comptes de gestion et les
comptes administratifs, il ressort que des inscriptions comptables n'avaient pas été réalisées.
Ainsi, un emprunt dit «Allègre», de type crédit long terme multi index, contracté auprès de la
Caisse régionale du crédit agricole de Lorraine le 9 décembre 2002, pour un montant de 22
M.Euros a été inscrit dans l'état de la dette pour 2002. L'encours ainsi autorisé doit donner lieu à
des remboursements annuels décalés, prenant effet à compter du 15 décembre 2005. Toutefois,
si l'emprunt figure bien dans l'état de la dette présenté à l'appui du compte administratif, aucun
mouvement équivalent n'a été effectué au compte 165.
La décision n° 1027-2002 de la commission permanente du 15 novembre 2002 précise bien que
«la mise à disposition des fonds résultant de l'exécution du présent contrat donne lieu à
l'inscription sur le compte 16 au moyen d'un titre de recette, l'emprunteur pouvant à son gré et
dans la limite des plafonds effectuer des remboursements et des tirages». En outre, les
instructions de la direction générale de la comptabilité publique précisent que «l'ouverture de
crédit est à prévoir au budget primitif à la fois au débit et au crédit du compte 165 (en M51) : cette
inscription permet à la collectivité d'effectuer les tirages et les remboursements à hauteur du
plafond autorisé. Cette inscription intervient en complément de la recette d'emprunt prévue au
compte 165 et de la prévision d'amortissement. Les mouvements infra annuels sont imputés par le
comptable public sur les comptes 515 et 519». Le compte 165 n'enregistre que les opérations de
tirages et de remboursements réalisés sur le contrat long terme n° 10 101. L'absence d'inscription
comptable porte atteinte à la fiabilité des comptes soumis au vote de l'assemblée délibérante.
2.7. Les restes à réaliser
L'analyse de la fiabilité des comptes de la Région Lorraine repose enfin sur une évaluation de la
sincérité des inscriptions comptables effectuées et par ce biais de l'exactitude des informations
relatives aux restes à réaliser présentés au vote de l'assemblée délibérante. L'examen des
comptes administratifs 2001, 2002 et 2003 a permis de relever de profondes inexactitudes en la
matière. Ainsi, le compte administratif 2002, voté en juin 2003, comporte la mention de restes à
réaliser en dépenses d'investissement et de fonctionnement qui représentent en réalité une
approximation algébrique des reports de crédits à effectuer.
Pour la présentation du compte administratif 2003, plus de rigueur a été apportée à la réalisation
des opérations d'inventaire. Toutefois, si sont mentionnées les prévisions telles qu'elles résultent
des délibérations de l'assemblée délibérante à la suite des votes des budgets primitif et
supplémentaire et des décisions modificatives, ainsi que les réalisations en concordance avec les
soldes présentés au compte de gestion, le compte administratif 2003 ne fait apparaître que les
reports tels qu'ils figurent dans l'état des reports de crédits entériné en avril de chaque année.
Trois observations sont alors à formuler : une absence de présentation des restes à réaliser à
l'assemblée régionale, une procédure pour le moins singulière suivie en matière d'élaboration de
l'état des reports de crédits et enfin un suivi de la comptabilité des engagements, qui paraît pour le
moins déficient.
Déterminés à partir des engagements réels de la collectivité, les restes à réaliser ne
correspondent pas systématiquement à la différence arithmétique entre les prévisions et les
réalisations. Les restes à réaliser doivent correspondre à la différence entre le montant des droits
ou obligations nés au profit ou à l'encontre de la Région, le montant des titres de recettes ou de
mandatement effectivement émis. Il s'agit, en d'autres termes, du montant réel des crédits qu'il
convient de maintenir et de reporter pour permettre le règlement des dépenses engagées mais
non encore mandatées, et la perception des recettes juridiquement certaines n'ayant pas donné
lieu encore à l'émission d'un titre.
Il importe donc de mesurer avec précision la nature et le montant des engagements réels avant de
procéder à l'édition d'un état de reports de crédits aléatoire. En effet, la comptabilité de
l'ordonnateur débute par la constatation de l'engagement de la dépense (article 29 du décret n°
62-1587 du 29 décembre 1962), elle se poursuit par l'inscription des émissions de titres et de
mandats ; elle s'achève par la confection d'états spéciaux en fin d'exercice. En conséquence, la
sincérité des comptes doit reposer sur une comptabilité précise des engagements. Les modalités
d'établissement de cette comptabilité ont été fixées par l'arrêté du 26 avril 1996, pris en
application de la loi du 6 février 1992. L'engagement, constituant la première phase de la
dépense, se décompose en un engagement comptable et un engagement juridique.
L'engagement juridique est l'acte par lequel la collectivité ou l'établissement public crée ou
constate à son encontre une obligation de laquelle résultera une charge. L'engagement comptable
a pour objet de réserver les crédits correspondant à cette charge sur le budget de la collectivité ou
de l'établissement public. Il doit être préalable ou concomitant à l'engagement juridique.
Or, sur un taux d'affectation moyen d'autorisations de programme de 70,43 %, les autorisations de
programme à reporter, ajoutées aux autorisations de programme à annuler ne représentaient que
30 % des autorisations disponibles. De surcroît, pour l'exercice 2003, l'écart entre autorisations
votées et autorisations affectées a été inférieur de plus de 36 M.Euros au montant matérialisant
les autorisations disponibles. Enfin, les reports de crédits en investissement réellement votés en
avril ont été, sur les deux derniers exercices, supérieurs aux autorisations de programme à
reporter telles qu'elles apparaissaient dans le compte administratif.
Cette imprécision, conjuguée à l'absence, déjà mentionnée, de rattachement des charges à
l'exercice, conduit la Région Lorraine à présenter dans un premier temps un état des crédits à
reporter fin janvier, voire fin février qui sera modifié par la production d'un état définitif fin avril. Les
instructions applicables à la comptabilité des régions précisent pourtant que l'ordonnateur établit
en fin d'exercice un état des crédits à reporter. Cet état sert à indiquer au comptable les
paiements qu'il peut effectuer en dépassement sur le budget de l'exercice suivant jusqu'au vote de
la première décision modificative. Or, en Lorraine, la production d'un double état de report établi
bien après la clôture de l'exercice est utilisée en guise de variable d'ajustement budgétaire.
Dans sa réponse, l'ordonnateur précédent conteste cette analyse ; il indique néanmoins que la
pratique était la suivante : «présentation d'un état provisoire des restes à réaliser début janvier,
puis travaux avec les services lors des commissions de report, permettant de purger toutes les
opérations en retard ou annulées de sorte que le seul état de report intégré au compte
administratif faisait apparaître un résultat d'exercice de fait plus sincère en évitant de mobiliser
prématurément des ressources budgétaires».
Il conviendrait que soient précisément affichés dans le compte administratif les montants des
restes à réaliser à l'appui de la comptabilité des dépenses engagées dont ils doivent en toute
régularité être issus. Pour être efficace, la procédure des autorisations de programme doit
s'accompagner de prévisions précises et réalistes ainsi que d'un suivi rigoureux des dépenses
engagées. A défaut, cette procédure de pilotage budgétaire de l'action régionale perd tout son
sens et elle expose la collectivité à des risques non négligeables de dérapages financiers ainsi
que le confirme l'exécution de l'exercice 2004.
Dans sa réponse, le président du conseil régional indique que «la Région maîtrise ses
engagements. Elle les connaît avec précision. Par contre, considérant la spécificité des actions
régionales, à caractère majoritairement indirect, il est plus exact de dire que les échéanciers ne
sont pas toujours maîtrisables».
2.8. L'absence d'organe de contrôle interne
L'examen effectué a mis en évidence la faiblesse du contrôle interne. En effet, l'organigramme de
la Région Lorraine se décline en six missions dont cinq peuvent être
comptable et budgétaire.
Ainsi, les départements administratifs et financiers ont pour rôle de suivre la comptabilité des
engagements de la mission à laquelle ils sont rattachés. Cette comptabilité consolidée est par
ailleurs disponible en temps réel au sein de la mission ingénierie et ressources. Les distorsions
relevées tant dans l'exécution du budget que dans le suivi des dépenses engagées ou du
rattachement des charges à l'exercice montrent les limites de la surveillance exercée.
Si une direction du contrôle et de l'évaluation est intégrée au sein de cette même mission, elle n'a
été créée qu'en juillet 2004 et son rôle se limite en réalité à un contrôle de gestion qui prend ici la
forme de tableau de bord. La dimension du contrôle interne échappe totalement à cette direction
laquelle s'oriente vers l'analyse et le suivi des organismes associés (associations, SEM). En outre,
le rattachement de cette direction au sein de la seule mission fonctionnelle n'est pas de nature à
lui conférer une indépendance suffisante en matière de contrôle interne.
Les carences relevées devraient conduire à la mise en place d'un outil de contrôle interne rattaché
à la direction générale ou à la présidence et doté d'un plan annuel de vérification, le budget
dépassant 900 millions d'euros.
3. ANALYSE FINANCIERE
3.1. Méthodologie
L'analyse financière présentée ci-après examine la structure et la situation financière de la
Région. Pour ce faire, elle s'appuie sur un retraitement du bilan comptable en reclassant au sein
des financements de la trésorerie, les crédits à moins d'un an sur les achats d'immobilisations, les
avances inhabituelles des redevables, les produits financiers ou exceptionnels constatés
d'avance, les dettes différées à court terme au-delà de leur échéance normale. Cette analyse
repose enfin, pour sa totalité, sur les dispositions comptables de l'instruction M51 dont 2004 est la
dernière année d'application.
Dans sa réponse aux observations provisoires de la Chambre sur ce sujet, l'ordonnateur a objecté
que «La méthodologie utilisée s'appuie sur des principes de comptabilité privée qui ne sont pas
utilisés en comptabilité publique. Les enjeux et les stratégies sont différents entre le secteur public
et le secteur privé. Cette assimilation public/privé aboutit à des observations infondées. Ainsi : «la
suppression de la journée complémentaire et la réduction observée des délais de paiement ont
pour effet que la Région Lorraine paie plus rapidement ses dettes qu'elles n'obtient le règlement
des ses créanciers».
Tout en prenant en compte cette réponse, la Chambre précise que le principe de la séparation
des ordonnateurs et des comptables se traduit, il est vrai,
dans l'exécution des budgets des
collectivités territoriales, par une différenciation entre opérations administratives et opérations
comptables et, en conséquence, par la tenue de deux comptabilités : comptabilité administrative
de l'ordonnateur, comptabilité financière du comptable du Trésor. Ces comptabilités décrivent les
opérations réalisées au cours d'un exercice. La Chambre souligne également que la comptabilité
publique locale s'inspire du plan comptable général et que les réformes comptables concernant
les collectivités territoriales ont repris les principes comptables généraux d'indépendance des
exercices, de régularité, de non compensation, de permanence des méthodes, de sincérité des
comptes et de prudence. Ces règles se sont traduites par l'introduction des techniques
comptables de rattachement des produits (recettes) et des charges (dépenses) à l'exercice. Cela
signifie que la comptabilité est tenue en droits constatés, c'est-à-dire qu'elle constate les
engagements pris mais aussi les droits acquis par la collectivité. D'autres techniques ont été
introduites, comme l'amortissement obligatoire des biens renouvelables afin d'apprécier le coût de
ce renouvellement et donc inciter à dégager les ressources correspondantes, ainsi que le
provisionnement, notamment pour les garanties d'emprunt, les litiges et contentieux et le
remboursement différé de la dette.
Comme les budgets locaux s'exécutent en gestion, cela signifie que les comptes doivent décrire
les opérations réalisées au cours d'une seule année, sachant toutefois que
le 31 décembre est
prolongé fictivement jusqu'au 31 janvier de l'année suivante pour les opérations de
fonctionnement, de manière à permettre le rattachement à la gestion des opérations déjà
engagées. Il en résulte donc que la suppression de la journée complémentaire a imposé un
traitement accéléré des bons de commandes et qu'elle a donc restreint les délais existants entre
le mandatement et le paiement tandis qu'à l'inverse l'encaissement des recettes régionales a
continué, lui, à s'effectuer selon un rythme plus lent ce qui a ainsi modifié les modalités de
financement du cycle d'exploitation de la Région.
3.2. Analyse du résultat comptable
3.2.1. Présentation de la situation d'ensemble
Les dépenses réelles totales inscrites aux comptes administratifs votés par l'assemblée régionale
se sont élevées en moyenne à 686 millions d'euros (période 2001 à 2003). Leur progression de
42 % a marqué ainsi le début des transferts de responsabilité et de compétences souhaités par le
législateur. La croissance entre chacun des exercices est ainsi apparue extrêmement soutenue :
de 40 % entre 2001 et 2002, de 10 % entre 2002 et 2003 et enfin de 17 % entre 2003 et 2004.
3.2.2. Les dépenses de fonctionnement
Entre 2001 et 2004, les dépenses réelles de fonctionnement de la Région ont progressé de 139 %
si l'on prend en compte les dispositifs imposés par la loi «démocratie de proximité» et par la
hausse des charges transférées au titre des services ferroviaires régionaux de voyageurs. En
structure, cette hausse des charges a été marquée par la très forte augmentation en 2003 des
charges exceptionnelles et des allocations et subventions (+326 %), ces dernières représentant,
en moyenne observée sur la période, 47 % des dépenses constatées. S'agissant des charges
exceptionnelles enregistrées, il s'agit du reversement de trop-perçus de subventions obtenues au
titre du Fonds Social Européen (FSE) ou du Fonds Européen de Développement Régional
(FEDER) pour un montant total de 1 376 654,90 euros.
L'analyse des frais de gestion générale et de transport enregistrés sous le compte 66 montre une
croissance significative de 52 %. On relève la hausse substantielle des sommes engagées au titre
de l'impression et des reliures et autres prestations de services (+111 %) lesquelles représentent
en moyenne plus de la moitié du compte (52,21 %). La progression de ces dépenses est liée aux
opérations de soutien scolaire telles que celle dite «carte à puce» destinée à faciliter l'accès aux
livres scolaires pour les lycéens.
Enfin, l'augmentation des subventions et allocations comptabilisées au compte 65 et dont la quasi-
totalité est enregistrée au sous-compte 657 «subventions» est à relever. Leur hausse est
principalement due au transfert de l'activité de transport ferroviaire des voyageurs (+100 M.Euros)
et au soutien accentué apporté à l'enseignement supérieur (+309 %), à l'action culturelle (+80 %),
au soutien économique accordé aux PME et PMI (+73 %), à l'environnement (+96 %) et enfin à la
formation professionnelle (+64 %). Les comptes 64 «participations au bénéfice de tiers» et 65
«allocations et subventions» traduisent l'effort financier conduit en faveur des dépenses
consacrées aux missions transférées.
Avec une moyenne de 13,7 M.Euros, les frais de personnels ne représentent toutefois que 5,66 %
des dépenses de fonctionnement, soit en dessous de la moyenne nationale, mais ils sont en nette
progression (+27 %). Cette hausse est supérieure à la moyenne nationale et elle devait se
poursuivre en 2004 et 2005, la Région Lorraine ayant d'ores et déjà procédé à des recrutements
et envisageant de créer soixante postes supplémentaires afin d'assumer les compétences
transférées.
L'évolution des charges de personnels est liée à des facteurs structurels, tels que la mise en
oeuvre du régime des trente cinq heures ou le glissement vieillesse technicité. Depuis les
dernières élections, l'augmentation du nombre de directeurs généraux adjoints (plus deux) pèse
également. La Région Lorraine éprouve aussi des difficultés pour mesurer les impacts des
transferts de compétences sur les fonctions des travailleurs sociaux et médico-sociaux et plus
généralement pour évaluer les besoins nécessaires pour satisfaire les missions nouvelles. Lors du
contrôle, les services de la Région ont indiqué «qu'à titre de précaution, un nombre de personnel
a été projeté, en réalisant un rééquilibrage au profit des personnels des directions de soutien au
détriment des directions opérationnelles, favorisées par le passé».
Au cours de l'exercice 2004, les dépenses réelles totales de la Région ont augmenté selon un
rythme plus soutenu que celui observé pour la moyenne des régions métropolitaines.
3.2.3. Les frais financiers
Les frais financiers ont nettement diminué sur la période 2001 à 2004 (- 48 %). Leur baisse illustre
la politique de gestion de la dette conduite par la Région Lorraine, malgré une légère
augmentation sur l'exercice 2004. Sur la même période, les charges financières, après avoir
connu une diminution, se sont stabilisées à 2,54 % de la moyenne des dépenses de
fonctionnement, soit très en deçà de la moyenne nationale (4,3 %). Selon les services régionaux,
"cette minimisation des frais financiers est en partie le fruit de la gestion active du stock de dette.
En effet, grâce à l'optimisation de la trésorerie par l'utilisation de prêts de type revolving, la Région
a réalisé 1,4 M.Euros d'économie sur ce poste». Ainsi, le taux d'intérêt moyen est en baisse
sensible (-66 %) et il se situe à compter de 2003 en dessous des taux moyens observés sur les
marchés financiers consacrés aux collectivités territoriales (2,62 % contre 4,61 %).
3.2.4. Les produits de fonctionnement
Atteignant en moyenne 404 M.Euros sur la période, les recettes de fonctionnement de la Région
se composent d'impôts directs (40,09 %) et indirects (20,04 %) et enfin de dotations (23,02 %) et
de subventions diverses (16,37 %). Les recettes d'exploitation, en nette progression (+39,37 %)
sur la période 2001 à 2003, ont augmenté de 9,9 % entre 2003 et 2004, sous l'effet du
financement des transferts de compétence. Pour l'exercice 2004, les fonds alloués au titre de la
nouvelle dotation globale de fonctionnement, qui rassemble dotation forfaitaire et dotation de
péréquation, s'élèvent à 194 736 187 euros. Les recettes globales de fonctionnement de la
Région Lorraine, avec une somme de 214 euros par habitant en 2004, restent en dessous de la
moyenne nationale, les produits de la fiscalité étant inférieurs aux moyennes des autres régions
françaises.
Se fondant sur un coefficient de mobilisation du potentiel fiscal modéré (0,98 en 2004 contre 1,11
en moyenne), la Région Lorraine a opté à compter de 2005, comme le précise le président du
conseil régional dans sa réponse, pour une croissance des taux de la fiscalité plus soutenue. En
s'appuyant sur des taux inférieurs aux moyennes nationales, la Région Lorraine a recouvré, en
2004, un produit fiscal par habitant de 47 euros à comparer à la moyenne des régions à pression
fiscale plus élevée (56 euros). En outre, la fiscalité indirecte est peu productive en raison de
l'absence de taxe sur le permis de conduire, qu'une taxe sur les cartes grises parmi les plus
élevée de l'hexagone ne suffit pas à compenser. Même si le transfert des personnels techniques
de l'enseignement (TOS) n'aura des incidences budgétaires qu'à compter de l'exercice 2006, la
fiscalité régionale, ainsi que cela apparaissait dans le projet de budget primitif 2005, doit
s'accroître de près de 10 %. Sur la période, les dotations et participations de l'Etat ont progressé
de 613 % du fait de l'intégration des transferts de compétences. Toutefois, avec 135 euros par
habitant, les transferts reçus en 2004, malgré une nette progression, restent inférieurs à la
moyenne nationale (hors Ile de France).
3.2.5. Les dépenses d'investissement
L'évolution des dépenses d'investissement, sur la période 2001 à 2004 a été examinée en ne
tenant compte que des dépenses réelles effectivement supportées par la Région Lorraine. Ces
dépenses ont progressé de 39 % entre 2001 et 2004, soit un niveau nettement inférieur à celui
constaté pour la moyenne des régions de métropole (+64,89 %). La croissance des dépenses
d'investissement sur 2004 (3,02 %), hors remboursement de la dette, reste également en dessous
de la moyenne nationale (3,31 %), malgré l'augmentation de la part des dépenses
d'investissement dans le total des dépenses réelles. Alors qu'en 2001, ces dernières
représentaient 47,2 % des dépenses totales, elles atteignaient, pour l'exercice 2004, 52,99 %,
pourcentage qui s'avère significatif en regard de la moyenne nationale (44,7 %).
La structure des dépenses d'investissement par nature de la Région s'écarte de la structure
nationale «type» et elle révèle des différences significatives dans les politiques poursuivies. La
part des dépenses consacrées au remboursement de la dette et à l'équipement des lycées est
nettement inférieure à la moyenne nationale. A contrario, on relève le niveau élevé de subventions
consenties (61,4 % contre 45,3 %) et notamment en matière ferroviaire (9,4 % contre 6,3 %). Le
volume moyen des dépenses d'investissement par domaine d'action montre l'importance que
revêtent les transports et les télécommunications en Région Lorraine, avec 51,3 % des dépenses
d'investissement (25,2 % en moyenne nationale). Enfin, si les dépenses d'investissement par
habitant se situent en dessous de la moyenne nationale malgré un niveau d'endettement
modeste, cette tendance a été observée principalement en 2004 sur l'ensemble des fonctions à
l'exception des transports. L'effort produit en matière de formation professionnelle et d'équipement
scolaire est, lui, inférieur de 21 % et 17 % aux moyennes nationales.
3.2.6. Les recettes d'investissement
Les ressources consacrées aux dépenses d'investissement hors opération d'ordre ont atteint, en
2004, 172 M.Euros, en hausse de 41,08 % depuis l'exercice 2001, et de 10,63 % de 2003 à 2004.
Du fait des transferts de compétences réalisés, l'effort accompli en matière d'investissement a été
réel. Alors que la Région Lorraine peut-être classée au dixième rang parmi les régions
métropolitaines eu égard à sa population, le volume de ses investissements rapporté au nombre
d'habitants ne la plaçait qu'au dix-huitième rang en 2002 (41,85 euros/hab). Pour 2004, elle atteint
le douzième rang (65,4 euros/hab). Toutefois, les recettes d'investissement se situent encore pour
2004 à 8,81 % en dessous de la moyenne nationale. La structure moyenne des ressources
d'investissement comprend des emprunts à long terme pour 73,85 % et des participations reçues
pour travaux d'équipement (21,58 %). On relève toutefois un net recul des participations reçues (-
16,19 %) et la progression substantielle des emprunts en contrepartie (+90,26 %).
A l'image des autres régions de France, les emprunts réellement contractés par la Région
Lorraine ont été inférieurs aux flux de remboursement du capital emprunté jusqu'en 2002. A
compter de l'exercice 2002, la Région a accéléré son flux d'emprunt accroissant ainsi l'écart entre
remboursement et augmentation de l'encours. Ainsi, entre 2002 et 2004, le recours à
l'endettement s'est accru de 169 % hors gestion active de la dette. Par ailleurs, le recours aux
opérations financières liées à la gestion des crédits à long terme renouvelable s'est développé de
manière significative.
Au 31 décembre 2004, l'encours de la dette, d'un montant de 175,42 M.Euros, se répartissait en
vingt-deux contrats d'emprunts dont 44,53 % étaient souscrits à taux fixe, 7,84 % à taux variable
et 47,63 % à taux révisable. Afin de couvrir le risque de taux, la Région s'est dotée d'outil de
couverture depuis l'exercice 1994, pour un montant de 15,24 M.Euros. L'analyse des mécanismes
mis en oeuvre n'appelle pas d'observation. Enfin, la gestion de la dette est complétée par l'usage
d'outils de financement long terme et de gestion financière dits «revolving» ou «crédits long terme
renouvelable». En raison de leur souplesse d'utilisation, ces produits permettent à la Région
Lorraine à la fois de gérer la trésorerie, d'éviter le surcoût lié à la mobilisation de l'emprunt et de
mieux répartir le risque pesant sur la variabilité des taux d'intérêt. Enfin, ils peuvent se transformer
en emprunt «classique» par consolidation de tout ou partie des sommes empruntées. La gestion
active de la dette ainsi entendue se portait à 66,3 M.Euros en 2003 et elle représentait, pour 2004,
63,7 M.Euros.
En outre, les crédits renouvelables sont utilisés pour procéder en fin d'exercice comptable au
remboursement de la ligne de trésorerie, puis, dès le 2 janvier de l'exercice suivant, remboursés
au profit de la ligne de trésorerie à nouveau ouverte. Ce fut le cas à la clôture de l'exercice 2004.
La Région Lorraine a procédé à l'émission de titres de recettes en décembre 2004 pour un
montant de 63 758 811,67 euros, tandis qu'en janvier 2005 étaient mandatés 63 758 811,67
euros. Le montant de l'encours pour 2004 s'élevait à 91,5 M.Euros tandis que les intérêts versés
se portaient à 146 455,47 euros et les commissions de non utilisation à 14 199,97 euros pour ce
seul exercice.
3.2.7. Evolutions de l'autofinancement et de l'équilibre budgétaire
L'exécution budgétaire a révélé une gestion prudente et adaptée des ressources disponibles sur
la période 2001 à 2003, l'exercice 2004 se soldant, lui, par un déficit d'exécution de 8 443 055,42
euros. Ce déficit est lié à l'accélération des dépenses de fonctionnement et d'investissement sur
l'exercice 2004, mais aussi, et malgré les outils mis en place, à l'insuffisance du suivi des
dépenses engagées. Ce résultat budgétaire ne repose pourtant pas sur l'émission inconsidérée
de mandats en fin d'exercice. En effet, le flux de mandats, s'il s'est accéléré en fin d'année, est
resté cohérent sur la période examinée. Ainsi les mandats émis en décembre 2004 ont représenté
8 % du total des mandats annuels, soit un volume nettement inférieur à celui observé sur les
exercices précédents (11 %). En outre, sur la période, les recettes réelles de fonctionnement ont
progressé de 52,39 %, soit une augmentation moyenne annuelle de 16 %. Dans le même temps,
la hausse des dépenses réelles de fonctionnement a été de 54,37 %, soit une progression
moyenne annuelle de 22 %. L'augmentation des dépenses plus soutenue que celle des produits a
entraîné une baisse du taux d'autofinancement de 43,19 % en 2002 à 34,51 % en 2004.
Ainsi, alors que, pour la section d'investissement, l'excédent de financement total atteignait plus
de 38 M.Euros en 2001, c'est un besoin de financement de 56 M.Euros qui a été constaté en
2004. Cette situation préoccupante marque la disparition de l'épargne disponible de la Région
après distribution des subventions. Le recul de l'épargne de gestion de 9 % en est à l'origine. Il
conviendrait donc que la Région adopte une attitude prudente en matière de prévision, de
planification et de suivi budgétaire tout autant que de contrôle de la comptabilité des
engagements.
Cette analyse n'est pas partagée par le président du conseil régional qui précise, dans sa
réponse, que «le solde d'exécution budgétaire négatif en 2004 n'est nullement dû à un dérapage
des dépenses ou à une insuffisance du suivi des dépenses engagées. Il résulte d'une volonté de
diminuer un fonds de roulement trop important, souvent assimilé à une «cagnotte» et à la volonté
d'appeler les emprunts au bon moment. Comme il est indiqué (...), ce constat peut être effectué au
plan national. Au 31 décembre 2003 le fonds de roulement était de 22 jours avec une moyenne
nationale de 8 jours. Au 31 décembre 2004, il a été ramené à 15 jours avec une moyenne
nationale de 9 jours. Il est important de remarquer que la Région Lorraine a affiché à plusieurs
reprises déjà des soldes d'exécution budgétaire négatifs. Celui-ci a même atteint 17,4 M.Euros en
1999. De plus, si l'épargne d'exploitation et l'épargne brute marquent effectivement un recul en
2004, elles atteignent un niveau nettement supérieur à celui de 2001. En ce qui concerne les
marges de manoeuvres de la Région Lorraine, elles restent importantes».
L'ordonnateur précédent indique, lui, dans sa réponse, que «la conclusion de la Chambre est
explicite de la rupture intervenue en 2004 avec une réduction significative des marges de
manoeuvre, la dégradation budgétaire s'inscrivant dans une évolution profonde, (réduction de
l'autofinancement, augmentation des charges de personnel, déficit consolidé)».
3.3. Analyse du bilan
3.3.1. Le fonds de roulement
Sur la période analysée, le fonds de roulement, après une hausse importante lors des trois
premiers exercices, s'est amoindri pour atteindre 23,9 M.Euros en 2004. La hausse globale
observée sur les quatre exercices reste néanmoins de 28 %. Il ne représentait que vingt-six jours
de dépenses d'exploitation en 2004 contre 42 jours en 2003. Le ratio de sécurité financière (149
jours en 2001) n'était plus que de vingt-et-un jours en 2004. Le maintien d'un fonds de roulement
positif ne résulte que de la hausse des emprunts réalisés (51 %) supérieure à l'augmentation des
immobilisations qu'ils sont supposés financer (+24 %).
3.3.1.1. Analyse des financements stables
Les financements stables ont augmenté de 15,14 % et cette progression est supérieure à celle
des besoins de financement (+14,27 %). Ils se composent en moyenne de réserves pour 38,38 %,
de participations à des travaux d'équipement pour 8,47 % et de dotations pour 5 %. Les
amortissements et les provisions représentaient chacun moins de 3 % des ressources stables,
ces dernières étant réduites en moyenne de 39,6 % par des frais d'investissement (compte 13).
Le capital des emprunts souscrits, malgré une hausse significative de plus de 51 %, ne
représentait toutefois que 2,83 % du montant moyen total des financements stables. Les réserves
(compte 11), en progression de plus de 38 %, agrègent les mouvements comptables relatifs aux
excédents de fonctionnement capitalisés (+156 M.Euros) alors que les écarts sur réalisation
d'immobilisation restent stables à hauteur de 1 065 341 euros. Les amortissements ont été
constitués d'une manière régulière par le comptable public selon les durées préconisées par les
instructions comptables M51 dès lors que l'option pour l'amortissement était faite, puis M71.
Les dotations aux amortissements du budget principal ont progressé de plus de 18 % sur la
période. Le coefficient de vétusté est resté stable à 1,64 %. La quasi-inexistence de politique
d'amortissement jusqu'à la mise en oeuvre des dispositions de l'instruction M71 met en lumière la
faiblesse de la collectivité régionale en ce domaine et souligne l'effort financier supplémentaire à
réaliser lors du renouvellement des matériels. Cette absence de prévision dans le renouvellement
des matériels s'éloigne des bonnes pratiques de gestion.
Les frais d'investissement, composés majoritairement de subventions d'équipement versées ou à
verser pour 93 % du total du compte, ont connu une hausse continue significative de 12 %. Les
frais spécifiques d'études et de recherches ne représentaient en 2004 que 2 % des sommes
comptabilisées, alors que les participations versées aux établissements scolaires en progression
de 9 % se portaient en fin d'exercice à 5 % des frais globaux enregistrés dans le compte 13. Les
provisions pour risques et charges, en dépit des risques évoqués, n'ont fait l'objet d'aucun
mouvement comptable sur la période en examen. L'encours de la dette, d'un montant de 115,9
M.Euros en 2001, a diminué jusqu'en 2002 puis a subi une hausse significative pour atteindre
175,4 M.Euros en 2004. L'augmentation globale sur la période a été portée à 51,32 %. Toutefois,
l'emprunt ne représente que 13,71 % des financements stables. La hausse de l'endettement est
supérieure à la moyenne des régions de France (+50,50 %). Ce recours important à l'emprunt
s'est effectué toutefois dans un contexte de taux d'intérêt bas.
Pour l'ensemble des exercices examinés, la dette de la Région est restée modeste. La Région a
recours aux crédits revolving et elle a employé à bon escient les crédits de trésorerie. En 2004, la
structure de la dette comprenait 44,53 % d'emprunts à taux fixe, 7,84 % à taux variable et 47,63 %
à taux révisable. La Région Lorraine se situe parmi les régions peu endettées, mais la progression
de sa dette est à surveiller du fait de la faible pression fiscale.
En réponse aux observations de la Chambre l'ordonnateur a indiqué que «le taux d'endettement
de la Région Lorraine est (...) de 4,7 % pour (...) 2003, alors que la moyenne nationale de
métropole est (...)
de 9,3 %».
3.3.1.2. Analyse des biens stables
Les biens stables ont été composés, en moyenne sur la période, d'immobilisations corporelles et
incorporelles pour 622 M.Euros, soit 67 % des biens stables, d'immobilisations en cours pour 179
M.Euros, soit 19 % des biens stables, et de prêts et avances à long terme pour 113 M.Euros. Les
immobilisations corporelles et en cours ont progressé sur la période de 24 % et de 4 %. On relève
parmi les principaux équipements et travaux, l'équipement, la restructuration la construction et la
rénovation des lycées publics et privés, l'action économique et enfin les transports. Le poids de
ces derniers est en nette progression depuis 2002 en raison du transfert effectif de la compétence
du service régional du transport ferroviaire des voyageurs. L'essentiel des dépenses
d'investissement prend la forme de subventions d'équipement attribuées à des organismes publics
ou semi-publics (SNCF, SEML), à des organismes relais ou directement à des entreprises privées
dans le cadre de dispositifs d'aide régionaux. La hausse du montant de ces subventions, modérée
en 2004 pour l'ensemble des régions métropolitaines (+2,9 %), a été sensiblement plus accentuée
en Lorraine (+3,02 %). En outre, alors que les avances consenties à des tiers pour la réalisation
de travaux étaient, en 2003, en moyenne de 2 % des emplois stables pour l'ensemble des
régions, elles représentaient 11 % de ceux de la Région Lorraine. Le niveau des fonds ainsi
mobilisés reste élevé et il affaiblit d'autant le fonds de roulement régional qui au demeurant a suivi
la tendance nationale en 2004 (- 8,4 millions pour la Région Lorraine).
3.3.1.3. Le besoin en fonds de roulement
Le besoin en fonds de roulement, en nette diminution sur les trois premiers exercices, s'est
transformé en 2004 en excédent de financement global du fait de la suppression de la journée
complémentaire.
Au plan national et sur la période, les besoins en fonds de roulement des régions ont été faibles
voire négatifs en raison du faible montant des créances à court terme. L'excédent des dettes sur
les créances d'exploitation ainsi dégagé a permis un supplément de fonds de roulement de six
jours de dépenses. Cela n'a été le cas pour la Région Lorraine qu'en 2004, le financement
complémentaire du fonds de roulement étant de 4,5 jours de dépenses d'exploitation. Les
évolutions décrites rendent nécessaire un suivi précis des opérations de recettes et de dépenses
de façon à assurer une situation de trésorerie normale.
3.3.1.4. Les biens circulants du cycle d'exploitation
L'actif circulant en valeur brute a connu une baisse notable sur les trois premiers exercices en
examen (-78 %) avant de progresser sensiblement en 2004 (+308 %). Il était composé en
moyenne de créances détenues à l'égard des débiteurs ordinaires (compte 41) pour 4,9 M.Euros
soit 88 % du montant total, de débiteurs divers pour 9 % et de sommes inscrites sur les comptes
de régularisation et d'attente (3 %).
Les créances concernant des débiteurs ordinaires, après avoir fortement diminué pour ne plus
représenter que 10 % du montant moyen en 2002, ont connu une hausse continue les ramenant à
leur niveau de 2001. Le nombre de titres pris en charge a progressé à due concurrence. Pour
l'exercice 2004, le solde du compte 410 (administrés exercice courant) se montait à 8 030 681,68
euros soit 94 % du total des biens circulants pour 1 187 titres.
Le niveau de recouvrement des créances sur l'exercice courant 2003 atteignait 99,97 % au 31
mars 2004 (99,98 % pour les exercices antérieurs). Toutefois, le recouvrement des restes à
recouvrer de l'exercice 2003 constatés par l'émission des titres correspondants au 30 juin 2003
n'atteignait que 87 %. Le total des restes à recouvrer au 31 décembre 2004, dont le recouvrement
n'était pas intervenu dans le délai de quatre ans, représentait 31 % des titres restant à recouvrer
pour 24 % des sommes mobilisables.
3.3.1.5. Le financement du cycle d'exploitation
Les financements d'exploitation ont diminué de 94 % sur la période et se sont stabilisés à hauteur
de 4,193 M.Euros. Cela résulte principalement de la suppression de la journée complémentaire.
Les financements ont essentiellement été composés des comptes de créanciers ordinaires (87 %)
et des comptes des services à comptabilité distincte (7 %), tous deux en très forte diminution sur
les exercices analysés.
La décroissance des financements d'exploitation est restée très supérieure à celle constatée pour
les biens d'exploitation (-15 %). Il en a résulté une inversion du financement du cycle
d'exploitation. La transformation du besoin en fonds de roulement en excédent de financement
d'exploitation en est la traduction financière logique. Il est apparu que la collectivité réglait
toutefois plus vite ses dettes qu'elle n'obtenait le remboursement de ses créanciers, ce qui
implique soit la consommation d'une partie du fonds de roulement, soit la diminution à hauteur de
la trésorerie positive. Les restes à payer identifiés sur les comptes fournisseurs, d'un montant
moyen de 29,5 M.Euros sur les exercices analysés, ont représenté en moyenne 2 % des
montants pris en charge au 31 décembre de l'exercice.
3.3.2. La trésorerie
Au cours de la période 2001 à 2003, le montant de la trésorerie nette au 31 décembre de chaque
exercice s'élevait en moyenne à 58,6 M.Euros et elle présentait un plancher de 48 M.Euros. Ce
niveau important de trésorerie, qui satisfaisait pleinement aux rythmes de remboursement des
fournisseurs, cumulé à un montant important de crédits long terme renouvelables, a permis de
financer, sans beaucoup recourir à l'emprunt, les opérations immobilières. Mais cette stratégie
combinée à la baisse du fonds de roulement a conduit à réduire la trésorerie courante. Au 31
décembre 2004, la trésorerie s'élevait à 19,6 M.Euros, soit une réduction de 73,9 %. Il est vrai que
le passage de 95 % de la dotation globale de décentralisation (DGD) au sein de la nouvelle
architecture de la dotation globale de fonctionnement a permis de lisser les recettes régionales
puisque cette dernière était versée par douzième tandis que la DGD faisait l'objet de deux
versements annuels. Mais le ratio de sécurité financière, qui était en 2001 de 149 jours, n'était
plus en 2004 que de 21 jours (contre 35 jours en moyenne nationale). Cette dégradation a
cependant été atténuée par l'amélioration du coefficient de trésorerie immédiate qui a augmenté
favorablement entre 2001 et 2004 (1,02 en 2001 contre 4,68 en 2004). Il en résulte que la
collectivité assure le règlement de l'ensemble de ses dettes au cours de leur exercice de
rattachement.
L'analyse mensuelle des mouvements opérés sur le compte 56 montre la volonté de la Région de
«maintenir l'encaisse à un niveau proche de zéro, afin de réduire les frais financiers». La Région,
ne lissant pas les flux de subvention à verser, se trouve contrainte de financer sur sa trésorerie
propre le décalage de versements de la dotation globale de fonctionnement. Pour ce faire, la
Région a mis en place un système de gestion journalière de la ligne de trésorerie, relayé,
notamment en fin d'exercice, par le recours aux crédits long terme renouvelables précédemment
évoqués.
Deux lignes avaient été ouvertes pour un montant maximum autorisé fixé en 2003 à 30 M.Euros.
Elles ont été complétées par l'ouverture d'une ligne de trésorerie auprès de la banque Calyon, le 9
juillet 2004, pour un montant équivalent. La collectivité a indiqué vouloir porter le montant ouvert à
100 M.Euros.
Cette réduction de la trésorerie disponible soulève des questions en l'absence de prévisions de
besoin de trésorerie par chacune des missions. Les documents élaborés, quand ils existent, sont
peu fiables et ils ne permettent pas l'établissement d'une prévision de trésorerie sincère. Cette
prévision est établie sur une durée de douze mois et selon un découpage mensuel voire
hebdomadaire. Elle met en évidence les flux d'entrées et de sorties de fonds Elle doit être
élaborée de façon aussi exacte que possible (d'où l'importance de budgets prévisionnels exacts)
et être contrôlée aussi bien en cours qu'en fin d'exercice.
La trésorerie moyenne disponible s'est réduite de 84,47 % sur la période en examen et elle ne
représentait plus en 2004, compte tenu du recours à la ligne de trésorerie, que deux jours de
dépenses de fonctionnement. Cette tension sur la trésorerie, aggravée par la hausse des besoins
immédiats de financement, a pesé sur le fonctionnement normal de la collectivité et elle a rendu
nécessaire une augmentation du montant mobilisable sur la ligne de trésorerie.
3.4. Conclusion sur la situation financière
Outre les réserves relatives à la fiabilité des comptes de la Région, la situation financière de la
collectivité a été marquée par une réduction significative des marges de manoeuvre au cours de
l'exercice 2004. La dégradation budgétaire s'est inscrite dans une évolution profonde. En effet, la
réduction de l'autofinancement disponible devrait conduire la Région Lorraine à rechercher des
solutions externes de financement. L'augmentation significative des charges de personnels dès la
fin de l'exercice 2006 devrait inciter à une réorientation. Dès l'exercice 2004, la structure
budgétaire de la collectivité est devenue fragile pour plusieurs raisons. L'accélération des
mandatements et des opérations financières de la Région Lorraine sur le deuxième semestre
2004 est intervenue alors que les recettes pour financer le dispositif mis en oeuvre étaient
insuffisantes. Le déficit, d'un montant de 8,9 M.Euros, a toutefois été compensé par l'importance
des reports à nouveau. Le déficit constaté a donc réduit le fonds de roulement et la capacité de la
Région à financer de façon durable ses investissements dès l'exercice 2005.
La suppression de la journée complémentaire et la réduction observée des délais de paiement ont
eu pour effet que la Région Lorraine a payé plus rapidement ses dettes qu'elle n'obtenait des
règlements de ses créanciers. Il en est résulté des tensions sur la trésorerie et un recours à des
crédits long terme renouvelables. Cette évolution, si elle se confirmait, impose une maîtrise des
dépenses engagées, la Région Lorraine devant en outre mobiliser ses marges de manoeuvre,
notamment en matière de fiscalité. Il conviendrait donc que l'évaluation des besoins financiers soit
affirmée et que soient renforcées en interne la connaissance et l'évaluation en temps réel des
effets financiers et comptables des décisions prises.
4. LES MARCHES DE TRAVAUX DES LYCEES DE LA REGION LORRAINE
4.1. Présentation
Depuis l'exercice 1986, les régions ont la charge des équipements scolaires du second cycle du
second degré. En Région Lorraine, on compte 134 lycées de filière classique, agricoles,
professionnels et établissements régionaux d'enseignement adapté accueillant entre 90 000 et
100 000 jeunes lorrains. Cinquante-six établissements privés et onze maisons familiales et rurales
sous contrats d'association avec les ministères de l'éducation nationale ou de l'agriculture
viennent compléter le dispositif. A la rentrée 2004, la Région comptait 103 335 élèves scolarisés
dont 81,47 % poursuivaient leurs études au sein d'établissements publics.
Les études et constats réalisés par la direction de l'évaluation et de la prospective du ministère de
l'éducation nationale montrent que l'évolution au plan national du nombre d'élèves du second
degré est marquée par une nette réduction des effectifs. Alors qu'à la rentrée 1993, on dénombrait
5 830 000 lycéens, on n'en comptait plus que 5.581 000 à la rentrée 2003. Le nombre global
d'élèves scolarisés est donc en régression sensible (-2,53 %). En outre, la proportion des élèves
inscrits dans les établissements publics diminue (82,23 % en 2001 contre 81,47 % en 2004) au
profit de celle observée pour les établissements privés sous contrat (15,76 % en 2001 et 16,58 %
en 2004).
Le nombre moyen d'élèves scolarisés par établissement lorrain (564 élèves par établissement), se
situe très en deçà de la moyenne nationale, (effectif moyen de 1 287 élèves par lycée).
L'équipement disponible en Région Lorraine est donc fortement marqué par des établissements
de taille moyenne. Si cet état du parc de lycées facilite la répartition géographique, il conduit à une
dispersion des moyens alloués et il pèse sur les programmes de construction et de rénovation. En
effet, le coût d'une opération de rénovation d'un établissement de 1 500 élèves est inférieur à la
somme des opérations engagées pour trois établissements de 500 lycéens. La répartition
moyenne par département paraît homogène (autour de 590 élèves par établissement) à
l'exception du département des Vosges qui compte en moyenne 460 lycéens par établissement.
Cet écart de cent trente lycéens illustre la volonté des partenaires régionaux et académique de
maintenir une présence uniforme dans les principaux bassins de population vosgiens. Les
établissements étaient au début de l'année scolaire 2004-2005 dotés de 115 internats et 169
demi-pensions.
L'action du conseil régional en la matière s'inscrit dans le cadre du projet fédérateur n° 4 du Projet
Lorrain pour 2000-2006. Elle complète celle conduite au travers des trois premiers plans qui
visaient à apporter une réponse aux besoins en capacité d'accueil. Le plan voté par l'assemblée
régionale s'est fixé pour objectif de développer et de renforcer les actions en faveur du
multilinguisme et des techniques d'information et de communication, d'adapter le dispositif de
formation aux évolutions pédagogiques modernes, d'assurer l'accompagnement des projets et des
initiatives des établissements et enfin de mettre en oeuvre les normes d'hygiène et de sécurité.
4.2. Les outils de la mise en oeuvre du Projet Lorrain
Les dépenses de fonctionnement et d'investissement consacrées à l'enseignement ont représenté
en moyenne, sur la période 2001 à 2004, 17,16 % des dépenses globales en s'établissant à
117,74 M.Euros. La stratégie régionale en ce domaine peut se décliner en trois actions majeures :
les interventions sur les locaux atteignent 50 % des dépenses, le soutien accordé à l'entretien et
l'acquisition d'équipements, 12 % et enfin le versement d'allocations destinées à garantir le
fonctionnement quotidien des établissements, 37 %.
Le Projet Lorrain relatif à la modernisation de l'outil scolaire prévoit des travaux assumés
directement par l'institution régionale, des subventions d'équipement versées aux établissements
afin qu'ils réalisent les aménagements et améliorations nécessaires et enfin des travaux réalisés
sous convention de mandat par l'intermédiaire de la société d'équipement du bassin lorrain
(SEBL) et de la société SOLOREM. La moyenne des avances consenties dans ce cadre atteint 13
M.Euros, soit 25 % des dépenses consacrées aux infrastructures.
Deux programmes prévisionnels d'investissement ont eu une incidence financière au cours de la
période : le PPI 1997 à 1999 et le PPI 2000 à 2006, lequel se scinde en deux PPI, le premier pour
la période 2000-2003 et le second pour la période 2004-2006. Ces derniers s'inscrivent dans le
projet fédérateur n° 4 du Projet Lorrain d'un montant global de 584 M.Euros. Les PPI 2000 à 2006
s'inscrivent pour un montant global de 97,37 M.Euros. La ligne directrice financière de 584
M.Euros se décline au plan budgétaire en autorisations de programme et en crédits de paiement.
Toutefois, au regard des orientations affichées par le projet pour l'amélioration des conditions de
travail et de vie dans les lycées, la réalisation des objectifs reste faible avec un taux moyen
d'emploi des crédits disponibles inférieur à 60 %. L'utilisation des crédits affectés souffre de la
même sous-consommation le taux d'exécution moyen global étant de 79 % sur les crédits
affectés.
En réponse aux observations de la Chambre sur ce sujet, l'ordonnateur a précisé que «outre les
aléas techniques inhérents à ce type de chantier, en ce qui concerne le taux d'exécution moyen
de 79 %, 3 raisons peuvent expliquer le phénomène :
* l'évolution démographique entre le moment où l'opération a été envisagée et celui de la phase
opérationnelle d'étude et de réalisation a conduit à resserrer les capacités d'accueil offertes tant
en externat demi pension, qu'en internat ;
* L'évolution des formations offertes : le rectorat, année par année, modifie la carte des formations
dispensées et cela nous a conduit, dans un certain nombre de cas à revoir les projets initialement
prévus et qui avaient reçu son accord ;
* les multiples réformes du code des marchés publics nous ont conduit à réexaminer et modifier
les procédures, ce qui a entraîné des délais supplémentaires».
Pour les quatre exercices budgétaires, la réalisation des opérations projetées n'a pas atteint les
trois-quarts de l'enveloppe budgétaire allouée. En ce qui concerne le programme prévisionnel
d'investissement des établissements publics, la consommation de crédit n'excède pas non plus 70
%.
4.2.1. Les programmes prévisionnels des investissements
Depuis 1986, la Région Lorraine a consacré 350 M.Euros pour la réalisation de six programmes
prévisionnels d'investissement. Le PPI 1997 à 1999 était destiné plus spécifiquement à améliorer
les conditions d'accueil de la population scolaire notamment dans les internats et demi-pensions.
Le programme prévisionnel des investissements, défini au sein du programme d'action spécifique
du projet fédérateur n° 4, vise, au travers de l'adoption d'un programme triennal ou quadriennal de
construction, d'extension, de rénovation, à adapter les locaux aux nouvelles demandes des
utilisateurs dans le respect des normes d'hygiène et de sécurité. Ce programme, centré sur
l'amélioration des conditions de vie et de travail, avait fixé comme critères de choix prioritaires la
restructuration des installations de restauration collective ne satisfaisant pas aux normes
minimales d'hygiène, l'adaptation des ateliers et des centres de documentation aux nouvelles
pratiques pédagogiques, la création de lieux de vie scolaire dans les établissements les plus
sensibles, le réaménagement des internats vétustes et la construction d'une halle de sport par
département.
Le programme prévisionnel d'investissement des établissements publics 2000 à 2003 a été
initialement fixé par le conseil régional lors de ses séances des 3 et 4 février 2000 à 92,23
M.Euros. Il a été complété par un programme prévisionnel des investissements des
établissements privés sous contrat d'association voté dans le cadre du budget primitif 2002 pour
un montant de 5,5 M.Euros.
Le PPI 2004 à 2006, voté par le Conseil Régional le 17 octobre 2003, a retenu soixante et une
opérations «lourdes» comportant quinze restructurations de demi-pension, huit rénovations
d'internat, treize restructurations d'externat, sept rénovations d'ateliers, la restructuration de quatre
gymnases, l'aménagement de quatre CDI et dix opérations d'amélioration de la vie scolaire
(maison des lycéens, amphithéâtre ...). Le PPI 2004 à 2006 représente ainsi un effort financier de
79,12 millions d'euros, entièrement à la charge du Conseil Régional.
4.2.2. La réalisation des PPI
Le programme prévisionnel, en sa première tranche 2000 à 2003, a fixé les autorisations de
programme pour trente et une opérations de reconstruction, rénovation ou réaménagement en
maîtrise d'ouvrage directe, cinquante en maîtrise d'ouvrage déléguée concernant les lycées
publics et quarante et une relatives aux lycées privés sous contrat d'association.
La mise en oeuvre du programme prévisionnel des investissements pour les établissements
publics de 2000 à 2006 a représenté en réalité un coût prévisionnel initial de 98,72 M.Euros,
conventions de mandat comprises. Le conseil régional avait fixé dans le cadre du Projet Lorrain
les préoccupations majeures du programme prévisionnel d'investissement : le respect des normes
de sécurité et d'hygiène, la création de locaux de vie scolaire (maisons des lycéens, salles de
travail, installations sportives). A l'analyse, il apparaît que l'activité de rénovation et de
reconstruction s'est essentiellement orientée, en nombre d'opérations prévues, vers les demi-
pensions et les facilités de restauration collective (23 %), l'édification de salles de travail et
d'atelier (19 %) et enfin la modernisation et la restructuration des internats (17 %). En terme
d'investissements prévisionnels, les opérations destinées aux internats ont constitué 30 % des
fonds alloués au titre du PPI tandis que les opérations portant sur la restauration collective et sur
l'amélioration des conditions de travail en ont représenté respectivement 23 % et 13 %.
En matière de réalisation ou d'opérations engagées, sur la période 2000 à 2004, il apparaît que
les programmes prévisionnels d'investissement ne couvrent que 75 % à 80 % des objectifs fixés
initialement. Ainsi, sur la période de pleine mise en oeuvre du PPI 2000 à 2006, évaluée pour un
montant global d'autorisations de programmes en moyenne annuelle de 24,68 M.Euros, le
montant des réalisations reste très nettement en dessous des seuils fixés comme objectif. En
outre, les programmes prévisionnels souffrent de décalages importants dans le temps, ce qui
engendre des surcoûts significatifs, matérialisés par une succession d'avenants.
4.2.3. L'évaluation des PPI
4.2.3.1. Une estimation initiale des travaux insuffisante
Lors des entretiens conduits au cours de l'instruction, il a pu être établi que la définition des
besoins incombait directement aux services régionaux. La programmation des travaux à effectuer
dans les établissements était issue d'une initiative interne qui se fondait sur des indicateurs établis
par analyse historique notamment. Toutefois, certaines opérations n'ont pas fait l'objet d'études
préparatoires suffisamment précises. Ainsi, le programme prévisionnel 1997 à 1999 prévoyait la
construction d'une halle des sports à l'établissement régional d'enseignement adapté de Flavigny
sur Moselle (EREA). L'opération initiale a dû être suspendue devant l'impossibilité de concilier
l'accès des handicapés à l'équipement et la surface disponible. Le projet initial reposait sur la
construction contiguë de la salle des sports aux bâtiments existants, mais faute de prévisions
adaptées, l'opération a enregistré un surcoût significatif. La Région Lorraine a donc dû retarder le
projet afin d'en redéfinir les contours architecturaux et financiers.
Dans sa réponse, le président du conseil régional a précisé que «compte tenu du manque
d'installations sportives existant à FEREA de Flavigny, la réalisation d'une halle de sport avait été
décidée à la demande de l'établissement. Le terrain de construction appartenant à l'OHS devait
être contiguë à l'établissement. Deux évènements ont contribué à retarder l'opération et à la
surenchérir. En premier lieu, la position de nos partenaires a évolué : volonté de faire de cette
halle de sports un gymnase spécifique à vocation régionale ou interrégionale pour la pratique de
sports par les handicapés physiques. Bien que Mme le Préfet de Région ait été saisie de ce
problème et malgré les assurances que l'on ait pu obtenir, aucun financement supplémentaire
n'est intervenu, alors qu'un nouveau projet avait vu le jour. En outre le terrain initialement prévu
par l'OHS a fait l'objet d'une construction par ce même OHS et le terrain dédié à cette halle de
sports s'est trouvé relégué sur un emplacement à la fois plus éloigné de l'établissement et
comportant une forte déclivité. La notion de halle de sports ne pouvait plus donc tenir; il a donc
fallut refaire une étude comportant des vestiaires,des sanitaires, des fondations spécifiques et
créer un chemin d'accès adapté aux personnes en fauteuil roulant».
De même, l'extension de la restructuration du gymnase du Lycée Régional «Henri Poincaré» de
Nancy, estimée initialement à un montant global de 1,59 M.Euros, a dû être réévaluée à 2,89
M.Euros, soit une majoration de près de 81 % de l'opération. En effet, lors de l'estimation initiale
des travaux, l'avis de l'architecte des bâtiments de France avait été négligé, le caractère
patrimonial de l'établissement scolaire et de son environnement dont plusieurs édifices sont
inscrits à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques n'avait pas non plus été pris en
compte. Le maître d'ouvrage était pourtant au fait des difficultés attachées à cet établissement
puisque, lors des travaux lancés pour la construction du centre de documentation et d'information
en 2000, la prise en compte des impératifs du périmètre protégé avait conduit à une majoration de
8 % de l'enveloppe financière pour tenir compte des investigations spécifiques.
Pour éclairer la réalisation de ce dossier particulier l'ordonnateur a indiqué qu'«étant donné les
problèmes prévisibles de reconstruction sur site, il a été demandé à la ville de Nancy et à la
Communauté Urbaine du Grand Nancy de nous procurer un terrain d'assise à proximité de ce
lycée pour cette opération. Faute de réponse positive, nous avons dû nous résigner à démolir et
reconstruire sur place».
En matière de construction de gymnases et de salles de sport, la définition initiale ne correspond
pas toujours non plus aux besoins des établissements concernés. Ainsi, la construction d'une
halle des sports au lycée agricole «Philippe de Vilmorin» à Bar le Duc, n'a pas pris en compte le
caractère inondable des locaux existants ni même la vétusté des vestiaires attenants. L'opération
de construction d'une halle des sports au lycée professionnel «Emile Gallé» de Thaon-les-Vosges,
distante de plus de 500 mètres de l'établissement principal, avait omis la construction d'un local à
destination de vestiaires et sanitaires. Ces défauts dans l'évaluation des besoins indispensables
au bon fonctionnement des équipements mis à disposition des lycées précités ont été la cause de
surcoûts respectivement fixés à 228 674 euros et 457 347 euros.
Dans d'autres cas, l'évaluation initiale a été cohérente avec les besoins avancés mais ensuite une
traduction technique erronée de leur réalisation a été retenue. Ainsi, la reconstruction de la demi-
pension du lycée «Les grands bois» de Hayange avait pour corollaire le déplacement et la
reconstruction en site propre de la chaufferie. Cette dernière opération a dû être avancée et
réalisée de concert. Le rapport de présentation de l'opération précisait en outre que l'activité des
cuisines pouvant être maintenue, il n'était pas nécessaire de créer les installations temporaires de
restauration collective initialement prévues. Si l'ajout de l'opération de reconstruction de la
chaufferie s'est soldé par l'augmentation des fonds alloués d'un montant de 457 347 euros, la
suppression de l'opération de construction d'une cuisine collective provisoire ne semble pas s'être
traduite par une réduction des sommes destinées à ce marché de travaux.
L'exemple de la restructuration de la demi pension du lycée régional «Pierre et Marie Curie» de
Freyming-Merlebach apporte un éclairage distinct mais complémentaire sur la définition initiale
des opérations. Dans ce cas, l'étude initiale qui a servi de support au vote de l'assemblée paraît
pour le moins superficielle. En effet, faisant suite à l'accord formel, des études plus précises ont
relevé une absence de conformité des superstructures métalliques et la présence d'une chaufferie
au charbon générant des risques potentiels d'accident. Ce constat a abouti à un complément
budgétaire de 47 % des autorisations de programme déjà allouées pour cette opération.
Les services de la Région ont indiqué que pour remédier aux erreurs commises lors de la
réalisation du plan prévisionnel 2000 à 2003, une enveloppe budgétaire destinée à financer
l'assistance à la maîtrise d'ouvrage avait été constituée. Les bureaux d'études devraient être,
dans le cadre du PPI 2004 à 2006, mandatés pour réaliser les études de faisabilité, la pré
programmation ainsi que la programmation technique détaillée. Il en résulte que la
programmation, qui constitue le complément indispensable de la définition des besoins, devrait se
traduire par une redéfinition de l'organisation à même de conduire les tâches essentielles
d'estimation des travaux à réaliser et de leur planification budgétaire et temporelle.
En réponse aux observations de la Chambre, le président a indiqué sa volonté de mettre en
application ses recommandations et la Chambre en prend acte.
4.2.3.2. Des travaux itératifs
La modernisation des installations de restauration scolaires collectives et d'hébergement a donné
lieu à d'importantes opérations de construction et de rénovation. Toutefois, la reprise de certaines
opérations de travaux, peu de temps après une précédente rénovation, laisse craindre un usage
intensif et déraisonnable des installations.
Ainsi, la demi pension du Lycée «Emile Levassor» à Dombasle-sur-Meurthe a fait l'objet d'une
opération en 2000 et elle fait l'objet d'une nouvelle planification pour le PPI 2004 à 2006. La
restructuration de la demi-pension du lycée régional «Jean Zay» à Jarny a été une première fois
réalisée en 1988 et elle est à nouveau prévue avant 2004. Les opérations consécutives de
construction du self service en 1990 et d'une demi pension en 1998 sont complétées par la
prévision de l'installation d'une cuisine centrale pour 2006 au lycée «Jacques Marquette» à Pont-
à-Mousson. De même, les installations de restauration collective du lycée «Jean-Auguste
Margueritte» à Verdun ont été une première fois restructurées en 1993 puis restructurées et
étendues en 1996. A Thionville, la demi-pension du lycée «Charlemagne» doit être le siège de
deux opérations. La restructuration de la demi-pension du lycée «Jean de Pange» à
Sarreguemines entreprise en 1992 est de nouveau planifiée pour 2006. Il en est de même pour
l'internat du lycée «Georges de la Tour» à Metz rénové en 1994 puis restructuré en 2004. Des
constats similaires peuvent être mis en avant pour l'internat du lycée «Pierre Mendès-France» à
Epinal, rénové en 1992, puis restructuré en 1999 et 2003, et enfin pour le lycée «Louis Lapicque»
dont l'internat a été rénové une première fois en 1993 puis restructuré en deux tranches deux
années plus tard.
En réponse aux observations de la Chambre, le président du conseil régional a indiqué que :
«Concernant les demi-pensions, 2 types de politique ont été menées: la 1ère consistait à annuler
et à réinscrire sur un autre PPI, des opérations que les études et une modification de programme
avaient rendues indispensables. 2°) Dans les autres cas de demi-pensions, une logique
d'améliorations successives des services de restauration a été mise en place. Ensuite, l'évolution
de la réglementation sanitaire (HACCP) nous a conduit à la restructuration des espaces de
production des repas. S'agissant des internats, il s'agit d'opérations successives d'amélioration,
les premières ayant souvent consisté à s'occuper des sanitaires pour se tourner ensuite vers le
confort des élèves». La Chambre prend note de ces explications mais objecte d'une part que la
répétition de travaux en matière d'équipement de restauration génère des surcoûts que l'on ne
peut écarter, et d'autre part que la transposition de la démarche HACCP (hazard analysis critical
control point) a été effectuée depuis le 29 septembre 1997, et que cette démarche au contraire du
principe de «marche en avant» réside en une méthodologie de réduction des risques en
restauration collective ce qui rend d'autant moins crédible les améliorations successives réalisées
préalablement.
De telles distorsions en matière de planification périodique des rénovations et restructurations
devraient inciter la collectivité à affiner la connaissance des besoins d'adaptation des
établissements.
4.2.3.3. La «sur couverture» des autorisations de programme encourage l'ouverture de travaux
complémentaires
L'insuffisante maîtrise de la technique budgétaire des autorisations de programme et des crédits
de paiement et les difficultés d'exécution des opérations dans les délais initialement programmés
ont incité les services de la Région à utiliser les reports de crédits afin de financer des travaux qui
devraient faire l'objet d'opérations nouvelles individualisées et aussi parfois à élargir le projet de
construction initial.
En réponse aux observations de la Chambre, le président du conseil régional a confirmé que «lors
de l'estimation de chaque opération, il est en effet prévu un % de l'estimation correspondant aux
aléas et imprévus liés à l'avancement des chantiers. Cela permet d'indiquer aux élus le coût
réaliste de l'opération qui va se réaliser et en cas d'une utilisation incomplète des crédits, ceux-ci
sont enlevés de l'opération. «L'ordonnateur a précisé en outre que malgré cette pratique qu'il juge
de bonne gestion, les coûts de réalisation par m2 étaient inférieurs à ceux pratiqués par d'autres
pour des constructions similaires en Lorraine».
Pour le PPI 2000 à 2003, l'ensemble des estimations ayant servi de base au vote de l'assemblée
délibérante et à la distribution des couvertures financières a été arrêté à 93,36 M.Euros, tandis
que les autorisations de programmes accordées se portaient à 98,85 M.Euros. Pour justifier cette
situation, la mission en charge du patrimoine des lycées expliquait «qu'une partie de l'enveloppe
relative aux travaux est conservée sous forme de réserve pour faire face rapidement aux aléas et
imprévus liés à l'avancement des chantiers». Cette enveloppe a pour effet pervers d'engendrer un
recours abusif à la procédure des avenants. Mais il ne s'agit pas là du seul effet négatif du
système budgétaire ainsi créé. En effet, à l'examen des comptes-rendus d'opération, il apparaît
qu'aux travaux originels sont parfois rattachées des opérations qui n'étaient pas comprises dans la
définition initiale du marché.
A titre d'exemple, il convient de relever l'opération d'extension des ateliers de l'EREA de Verny.
Elle avait pour objet la construction d'ateliers pour une surface de 180 m² et un montant estimatif
de 275 000 euros, inscrit au PPI 2000 à 2003. Afin d'apporter une réponse à l'avis défavorable de
la commission départementale de sécurité à l'occupation des bâtiments, émis en juin 1999, les
services régionaux ont proposé, le 22 décembre 2000, l'inscription d'une autorisation de
programme complémentaire d'un montant de 274 408 euros, destinée à couvrir les travaux de
démolition de trois bâtiments préfabriqués et de leur reconstruction. Toutefois, le délai constaté
entre l'avis défavorable de la commission et l'autorisation de programme complémentaire souligne
que le caractère d'urgence et de sécurité de ces deux opérations, distinctes dans leur objet et leur
nature, était discutable.
L'adjonction au marché de reconstruction de la demi-pension du lycée professionnel régional «La
Rochotte» à Gérardmer, d'une restructuration du sous-sol et du rez-de-chaussée pour un montant
représentant 42 % de l'autorisation de programme initiale, relevait de la même démarche.
En l'espèce sur ce sujet, l'ordonnateur a indiqué que «la redéfinition de la demi- pension du Lycée
«La Rochotte» à Gérardmer a été induite par la nécessité de restructurer les réserves alimentaires
qui se trouvaient au sous-sol et de procéder à la rénovation du clos et couvert du bâtiment». Ces
précisions n'enlèvent rien au constat initial car ces travaux n'étaient pas initialement programmés.
Cette «sur couverture» des autorisations de programme permet également aux services
régionaux de réaliser des travaux initialement envisagés sous forme de tranches conditionnelles
qui sont en l'occurrence notifiées concomitamment aux tranches fermes. A titre d'exemples, le
marché 2003060295, relatif au remplacement de revêtement de sol amianté au LTR hôtelier de
Gérardmer, et le marché 2002120492 relatif au transfert des ateliers de formations chauffage et
plomberie au LPR «Emmanuel Héré» à Laxou dont les montants respectifs des tranches
conditionnelles s'élèvent à 34 783,87 et 805 546,77 euros TTC.
En réponse aux observations de la Chambre, le président a indiqué que «sur la période
considérée, les tranches fermes concernaient ce qui était indispensable à l'opération et dont le
financement était assuré sur l'année, et les tranches conditionnelles, d'autres travaux, tributaires
de la situation de la concurrence au moment de l'appel d'offres».
Cette réponse confirme ainsi le recours abusif à la procédure des tranches conditionnelles. Cette
procédure peut donner une souplesse d'organisation et permettre de résoudre les difficultés de
programmation, mais son usage systématique ne peut être érigé en règle de gestion.
En effet, le recours à la tranche conditionnelle ne s'impose que lorsque l'étendue des besoins à
satisfaire ne peut pas être entièrement arrêtée dans le marché, pour des raisons économiques,
techniques ou financières, sachant que cette même tranche ne pourra être affermie qu'en cas de
disponibilités budgétaires. De plus, chaque autorisation de programme doit couvrir une tranche
représentant une unité individualisée formant un ensemble cohérent.
4.2.3.4. Une incapacité à réaliser les programmes fixés
Le volume ambitieux des opérations à lancer dans le cadre des programmes prévisionnels
d'investissement, combiné aux difficultés relevées en matière d'évaluation des projets, a conduit la
Région Lorraine à opérer des «glissements» d'opérations significatifs et à en reporter certaines. Il
en est ainsi de la restructuration de la demi-pension du lycée «Marie Marvingt» à Tomblaine,
laquelle était pourtant jugée «urgente au regard des normes actuelles d'hygiène et de sécurité».
De même, la construction d'une cuisine centrale au lycée «Marquette» à Pont à Mousson, estimée
à 3,2 M.Euros, et inscrite au budget primitif 1998, reposait sur un partenariat entre la ville de Pont
à Mousson et le conseil général de la Meurthe et Moselle. Toutefois, lors de la clôture de
l'exercice 2002, l'opération n'était pas engagée, car l'expropriation des terrains indispensables à la
réalisation de l'équipement collectif n'était pas lancée même si 260 000 euros en frais d'étude
avaient été dépensés.
Malgré le caractère prioritaire de la remise aux normes des installations de restauration collective,
trois opérations (sur un total de treize opérations confiées en maîtrises d'ouvrage déléguées)
inscrites dans le programme prévisionnel 2000 à 2003 n'étaient toutefois pas entamées à la fin de
l'exercice 2004. Il s'agissait des opérations de restructuration des demi-pensions des lycées
«Emile Levassor» à Dombasle, «Louis Vincent» à Metz et «Gustave Eiffel» à Talange. En outre,
l'analyse d'ensemble des opérations retenues par l'assemblée régionale dans le cadre du PPI
2000 à 2003 met en lumière la difficulté à respecter les plans initialement votés. En effet, l'examen
arrêté au 31 janvier 2005 des opérations engagées ou planifiées montre que seuls 29,63 % des
travaux prévus ont été achevés dans les délais. De plus, 28 % des opérations ont été livrées, plus
d'un an après la date initiale d'achèvement des travaux présentés à l'assemblée délibérante, 9,9
% à plus de deux ans, tandis que près du tiers des opérations étaient en cours de réalisation voire
reportées sans pour autant que soit constatée une diminution équivalente de la charge budgétaire.
Lors du contrôle, les services de la Région ont précisé qu'«aucune des opérations en maîtrise
d'ouvrage régionale définie par le programme prévisionnel des investissements 2004 - 2006
n'avait réellement débuté depuis 2004». De façon logique, la responsabilité de l'exécution des
travaux dans les délais fixés pèse sur les maîtres d'oeuvre. La mise en jeu de cette responsabilité
donne normalement lieu à l'application des pénalités prévues par les marchés. Il ne semble pas
que ces procédures de pénalité soient mises en oeuvre.
4.2.3.5. L'absence de système d'analyse des performances des entreprises titulaires des marchés
En raison de l'importance des opérations à lancer chaque année, la Région contractualise avec en
moyenne plus de sept cent entreprises et cinquante architectes et bureaux d'études. Dans ce
contexte et malgré les financements conséquents alloués, aucun système d'évaluation des
travaux réalisés par les entrepreneurs n'a été mis en oeuvre. Pourtant, il serait utile de collationner
le nombre et la gravité des non-conformités relevés dans le processus de réalisation, ainsi que le
nombre et la gravité des dysfonctionnements résultant des défauts de programmation des
chantiers. L'établissement d'indicateurs de performance utilisables par le maître d'ouvrage
permettrait de mesurer la capacité de chacune des entreprises co-contractantes à s'acquitter des
prestations contractuelles.
En réponse aux observations de la Chambre, le président du conseil régional a précisé que le
dispositif régional «d'analyse des performances» des entreprises a toujours été binaire : soit un
prestataire dispose de références sur prestations antérieures globalement satisfaisantes lui
permettant de prétendre à l'attribution de marchés de la Région (.../...), soit il est exclu pour
l'avenir des consultations régionales pour mauvaise exécution de prestations régionales
antérieures. Le Conseil Régional a ainsi, en permanence, une liste d'une dizaine d'entreprises qui
ne sont plus admises, pour ce motif et pour une période plus ou moins longue en fonction des
difficultés rencontrées, à concourir aux consultations qu'il lance». Il a précisé en contradiction
avec ce qui précède que «Un système plus évolué d'évaluation, s'il est intéressant en théorie, ne
présente que peu d'intérêt dans le cadre des consultations lancées par le Conseil Régional. En
effet, le Conseil Régional procède dans la majorité des cas par la voie de l'appel d'offres ouvert.
Le Conseil Régional a donc, en la matière et compte tenu de la procédure qu'il a choisi d'utiliser,
exploité au mieux les possibilités offertes par le code des marchés publics». Il a ajouté : «En
revanche, pour l'avenir, une réflexion a été lancée afin d'étudier les modalités de mise en oeuvre
d'une telle évaluation, pas tant dans l'optique de permettre une sélection des candidatures, sauf à
généraliser le recours à la procédure de l'appel d'offres restreint, mais dans l'optique de mettre en
oeuvre une démarche interne de suivi utile notamment pour les procédures moins formalisées
(MAPA) et en tout état de cause transparente pour les entreprises candidates». Ce dispositif
devrait voir le jour début 2006.
L'ordonnateur a précisé en outre que «(il) serait juridiquement critiquable de tenir compte de
l'évaluation des chantiers réalisés antérieurement par une entreprise, dans la mesure où cela
relève de ses références qui ne peuvent être appréciées qu'au stade de la première enveloppe.
La Chambre rappelle toutefois que selon le code des marchés publics du 7 janvier 2004 modifié
que : «(...) II. - Pour attribuer le marché au candidat qui a présenté l'offre économiquement la plus
avantageuse, la personne publique se fonde sur divers critères variables selon l'objet du marché,
notamment le coût d'utilisation, la valeur technique de l'offre, son caractère innovant, ses
performances en matière de protection de l'environnement, le délai d'exécution les qualités
esthétiques et fonctionnelles, le service après-vente et l'assistance technique, la date et le délai
de livraison, le prix des prestations. D'autres critères peuvent être pris en compte s'ils sont justifiés
par l'objet du marché (...). Ces critères sont pondérés ou à défaut hiérarchisés». Dans la circulaire
du 7 janvier 2004 portant manuel d'application du code des marchés publics, l'attention des
acheteurs publics a été appelée «sur l'obligation et l'intérêt de la pondération des critères, ou à
défaut de leur hiérarchisation, telle que publiée en amont dans l'avis de publicité ou leur règlement
de consultation". Il est donc acquis que l'acheteur public demeure dès lors libre de pondérer ou à
défaut de hiérarchiser les critères au rang desquels figurent
les délais d'exécution.
4.3. Les principales faiblesses observées
4.3.1. L'absence de motivation du rapport de présentation
4.3.1.1. Une présentation limitée de la procédure
Si, pour certains dossiers, une brève note explicative est jointe à l'ensemble des documents
destinés au contrôle de légalité, ces derniers se limitent le plus souvent à une présentation
sommaire de l'opération sans préciser, arguments à l'appui, les éléments qui ont conduit la
commission d'appel d'offres à retenir le fournisseur choisi.
4.3.1.2. Les lacunes dans la présentation des critères de choix
L'analyse des rapports de présentation des marchés relatifs au PPI 2000 à 2003 fait ressortir
l'absence systématique de l'exposé de l'économie générale du marché et de son déroulement
prévu, plus particulièrement en ce qui concerne les opérations mandatées à la SEBL. Seul le
mode de passation du marché est indiqué, sans aucun motif de son choix. Ainsi, les critères
présidant au choix de l'offre économiquement la plus avantageuse ne sont pas toujours servies en
dépit des critères de sélection des offres affichés. Seul, le critère «prix» semble avoir été retenu
sachant que le motif du choix du titulaire est systématiquement» Offre conforme, entreprise la
mieux disante, ce qui paraît succinct.
Toutefois, depuis 2003, la trame du rapport de présentation de la SEBL a été revue conformément
à la réglementation alors en vigueur, soit l'article 75 du code des marchés publics de 2001. Malgré
l'effort notable consenti en ce domaine par la société délégataire, les rubriques ne sont pas
encore parfaitement renseignées. En effet, celles relatives aux motifs de rejet des candidats non
retenus restent vierges.
4.3.1.3. Des incohérences dans le déroulement des procédures
Le rapport de présentation du marché de maîtrise d'oeuvre concernant la «Restructuration du
magasin et de l'infirmerie du LPR Pierre Mendès France de Contrexéville» a été signé par le
mandataire, la SEBL, le 6 mars 2002. Le marché auquel il se rapporte n'aurait donc été notifié
qu'après cette dernière date, soit plus d'un an après que la commission permanente ait approuvé
le choix de son titulaire par décision en date du 22 décembre 2000.
Dans sa réponse aux observations de la Chambre, le président du conseil régional «confirme la
chronologie décrite», et il précise que «lors de la passation des conventions de mandat, pour
mémoire exclues du champ d'application du code des marchés publics à l'époque, il peut être fait
le reproche au Conseil Régional d'avoir privilégié le démarrage et la réalisation d'opération par ses
mandataires, au détriment de la formalisation immédiate et préalable de ces partenariats. A sa
décharge, le Conseil Régional tient à préciser qu'à l'époque, il entretenait des relations de
partenariat fort avec ses mandataires dans la mesure où, ces prestations étant exclues du code
des marchés publics, celles-ci étaient fondées sur le principe du dialogue permanent qui
transcendait la formalisation écrite de ces partenariats».
Ce marché de maîtrise d'oeuvre, comme celui des lycées de Charmes («Marcel Goulette»), Epinal
(«Louis Lapicque»), Remiremont («André Malraux»), Saint-Dié («Georges Baumont») illustre une
défaillance des procédures de mise en compétition. Dans ce cas précis, la procédure d'appel à
candidatures a été lancée le 9 juin 2000, date à laquelle la SEBL n'avait pas encore obtenu le
mandat de délégation de maîtrise d'ouvrage, qui n'a été signé que le 10 novembre 2000.
Dans leurs réponses, les mandataires ont confirmé que «les rapports de présentation ont en effet
été signés par le Directeur de SEBL entre juin et novembre 2000 alors que la convention de
mandat datée du 10 novembre 2000 n'a été notifiée que le 13 novembre 2000. Néanmoins la
Région Lorraine avait décidé dès le début de l'année 2000 l'attribution d'une convention de
mandat de maîtrise d'ouvrage à SEBL pour les opérations concernées».
La Chambre rappelle que le respect des règles de forme en matière de contrat public constitue
une obligation substantielle qui outre la pertinence et la régularité du lien juridique apporté, est la
base de la bonne exécution des prestations contractuelles.
Si les titulaires de ces derniers marchés ont été choisis après ratification de la convention de
mandat, il n'en va pas de même pour les opérations relatives aux établissements de Saint-Dié
(«Jules Ferry»), Epinal (EREA), Thaon les Vosges («Emile Gallé») et Gérardmer («La Rochotte»).
Pour ces cas, les procédures ont été lancées le 25 février 2000, le choix des titulaires a été
approuvé le 28 avril 2000 et les rapports signés par le directeur général de la SEBL du 15 juin au
9 novembre 2000.
Les procédures des marchés de «Coordination de sécurité», de «Contrôle technique» et d'«OPC»
relatifs aux onze opérations confiées à la SEBL au titre du PPI 2000 à 2003 pour le département
des Vosges ont également été lancées avant signature du mandat, soit le 28 avril 2000, les
titulaires choisis par la commission des marchés publics le 23 juin 2000 et les rapports y afférents
signés par le directeur général de la SEBL en juin/juillet 2000. La SOLOREM a procédé de la
même façon, que ce soit en matière de marchés de maîtrise d'oeuvre ou de prestations
intellectuelles.
Par ailleurs, les lots 1, 2, 3, (lot 4 non fourni) 8 et 15 du marché relatif à la restructuration de
l'externat du LPR «Jean Charles Pellerin» d'Epinal (procédure engendrée par la Région elle-
même) ont nécessité le recours à la procédure négociée à la suite d'un appel d'offres
«infructueux», sans autre commentaire. Pour ces dossiers, les nécessités ayant conduit à la
passation d'un marché négocié n'apparaissent pas de façon explicite. En effet, aucun motif de
non-conformité des offres à la demande, voire de leur absence, n'était précisé dans le rapport de
présentation de chaque marché et la mise en compétition initiale était infructueuse sur près de 60
% de l'enveloppe globale attribuée à l'opération (9 MF). A cet effet, l'article 308 du code des
marchés publics applicable à l'époque précisait que les discussions préalables à la passation d'un
marché négocié ne pouvaient être engagées qu'après avis favorable de la commission d'appel
d'offres, avis devant être joint au rapport de présentation.
S'agissant de la restructuration de la demi-pension du lycée «La Rochotte» à Gérardmer (lots 1,
10, 11), la SEBL, chargée du lancement de la mise en compétition, n'a même pas détaillé la
procédure d'appel d'offre infructueuse et elle a rapporté directement la procédure négociée dans
le rapport de présentation.
Enfin, les marchés de travaux relatifs à la construction d'un internat et à la restructuration des
anciens locaux du lycée régional «J.B Vuillaume» à Mirecourt ont été notifiés près de quatre
années après la fin de l'exécution des travaux.
4.3.1.4. Une absence de respect des délais
Les délais de réception des candidatures en matière de marchés de maîtrise d'oeuvre ne sont pas
toujours respectés, que ce soit à l'initiative de la Région ou de ses mandataires. Le code des
marchés publics antérieur à 2001 préconisait un délai de vingt-et-un jours à compter de la date
d'envoi de l'avis à la publication, l'urgence, permettant la réduction de ce délai à quinze jours.
L'analyse de la passation des marchés relatifs aux travaux de rénovation du lycée «Pierre et
Marie Curie» à Neufchâteau fait apparaître que les délais de réception des candidatures à la
maîtrise d'oeuvre ont été inférieurs au seuil légal alors même que les marchés de travaux ont été
passés entre un et
cinq ans après cette première étape.
4.3.2. Le recours abusif à la procédure des avenants
4.3.2.1. Un recours institué en procédure de gestion
Au cours de la période examinée, une pratique quasi systématique d'avenants prenant en compte
les modifications apportées aux marchés initiaux par les maîtres d'oeuvre et d'ouvrage a été
relevée. Le caractère systématique des avenants révèle l'imprécision de la définition préalable des
besoins et les faiblesses dans la conception des marchés des lycées.
La totalité des marchés de travaux relatifs aux lycées des exercices 2002 et 2003 a été analysé,
soit un montant global de dépenses de 168 M.Euros. Au cours de ces deux années, les marchés
initiaux ont fait l'objet de 77 modifications par voie d'avenanst dont 43 étaient supérieures à 5 %
mais inférieures à 15 % du montant initial du marché tandis que 34 autres excédaient largement le
seuil de 15 % atteignant même parfois plus de 50 %.
En réponse aux observations de la Chambre, l'ordonnateur précise que «le Conseil Régional
reconnaît cette dérive ponctuelle dans l'usage des avenants tant pour les opérations gérées en
régie que pour celles gérées par le biais de mandataires. Cette dérive est effectivement due à une
définition préalable insuffisante des besoins. Des instructions ont immédiatement été diffusées et
rappelées aux services compétents ainsi qu'aux mandataires entre 2002 et 2004 (sous forme de
notes, de rappels à la réglementation, d'informations à la commission des marchés publics...)
tendant, pour l'avenir, à interdire purement et simplement la passation d'avenants supérieurs à
15 %. Durant ce laps de temps, le Conseil Régional a du gérer au mieux les opérations déjà
lancées et affectées par ces insuffisances dans la définition des besoins».
L'avenant est l'acte par lequel les parties à un contrat conviennent d'adapter ou de compléter une
ou plusieurs de ses clauses. Cette modification ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de
substituer au contrat initial un autre contrat, soit parce que son économie en serait bouleversée,
soit parce que son objet ne serait plus le même. La seule exception à cette règle concerne les
sujétions techniques imprévues rencontrées au cours de l'exécution du contrat, c'est-à-dire des
obstacles non imputables aux parties et constitutifs de difficultés imprévues et exceptionnelles».
En outre, comme en dispose l'article 49-1 de la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993, «tout projet
d'avenant à un marché de travaux, de fournitures ou de services ou à une convention de
délégation de service public entraînant une augmentation du montant global supérieure à 5 pour
cent est soumis pour avis à la commission d'appel d'offres ou à la commission visée à l'article 43.
L'assemblée délibérante qui statue sur le projet d'avenant est préalablement informée de cet avis.
Dans sa réponse, le président du conseil régional précise qu' «en tout état de cause, la passation
de ces avenants à fort pourcentage, certes juridiquement critiquables pour la plupart (certains
étaient toutefois effectivement justifiés par des circonstances imprévisibles au sens des
dispositions du code des marchés publics), l'a été en conscience des risques encourus (tous ont
en effet fait l'objet d'une validation hiérarchique, d'un avis favorable de la commission des
marchés publics et d'une décision de la commission permanente». La Chambre constate toutefois
que ces avis ne suffisaient pas à conférer aux avenants validés supérieurs à 15 % un caractère
externe de légalité.
Il semble que ces dispositions ont été perdues de vue par la Région et qu'au demeurant la
jurisprudence du Conseil d'Etat (CE, 8 mars 1996, commune de Petit Bourg et plus récemment,
CE, 30 juillet 2003, commune de Lens) soit mal maîtrisée.
4.3.2.2. La signature de marchés publics en dehors de délégation de signature ou de pouvoir
De l'analyse des pièces justificatives fournies à l'appui des mandats de paiement relatifs aux
marchés publics des lycées, il est ressorti que des actes d'engagement, des actes spéciaux de
sous-traitance et des certificats administratifs autorisant la substitution de cautions bancaires à
des retenues de garantie avaient été signés par des personnes non habilitées par délégation
expresse de signature ou de pouvoir de la part de la personne responsable des marchés, en
l'occurrence, le président de la Région. Les montants en cause se sont élevés à 386 818,39
euros.
En effet, des actes d'engagement de marchés publics et des actes spéciaux de sous-traitance ont
été signés par la quatorzième vice présidente du conseil régional de Lorraine, pour la période du
25 octobre 2001 1998 au 2 avril 2004. La ratification d'autorisations de substitution de cautions
bancaires à des retenues de garantie a, elle, été faite par le directeur financier de la Mission
Politique Educative.
L'analyse des délégations de signature et de pouvoir établies avant les récentes élections
régionales a montré que si la vice présidente concernée bénéficiait bien de délégations de
fonction du président du conseil régional, ces délégations ne couvraient pas les opérations en
cause. Par arrêté du 29 octobre 2001, le président de la Région Lorraine avait délégué en effet à
cette dernière la «responsabilité de la gestion du fonds de rénovation et de maintenance des
lycées auquel s'ajoutent le financement des équipements liés aux services d'hébergement, les
échanges franco-allemand des lycéens et la liaison avec l'institut des langues et cultures
régionales». L'article 2 de ce même arrêté précisait le champ de la délégation «Dans le domaine
de sa délégation de fonction, Madame M
.........
a compétence pour signer au nom du président du
Conseil Régional de Lorraine :
* toute correspondance relative à la préparation et à l'instruction des dossiers préparatoires aux
décisions de l'assemblée plénière et de la commission permanente ;
* les rapports soumis à la commission permanente ;
* les actes pris en application des décisions de l'assemblée plénière et de la commission
permanente».
En réponse aux observations de la Chambre, le président a indiqué que «le Conseil Régional ne
conteste pas le fait que les actes dont il est fait mention n'étaient pas expressément cités dans les
délégations de fonction ou de signature accordées aux personnes visées. Il convient cependant,
en guise d'éclairage, de se reporter au système de délégation alors en vigueur à l'époque. Le
dispositif se voulait très souple et attractif, à tel point qu'il s'est sans doute trouvé insuffisamment
précis». Il indique en outre que, «conscient des difficultés induites par ces dispositifs, le conseil
régional les a revu les uns après les autres pour aboutir aujourd'hui à un dispositif de délégations
qui se veut exhaustif. Cette exhaustivité va dans le sens de la sécurisation juridique des actes et
des délégataires».
Par ailleurs, un arrêté du 17 janvier 2003 déléguait la présidence de la commission des marchés
publics à un élu, autorisé à exercer ses fonctions sous la surveillance du président du conseil
régional de Lorraine. La délégation de signature formalisée ne prévoyait toutefois pas
l'autorisation de signer les actes d'engagement et les actes spéciaux de sous-traitance pour le
compte du président de la Région Lorraine.
Le président du conseil régional, en réponse aux observations de la Chambre a objecté que «Ce
dispositif n'est enfin absolument pas contradictoire avec la délégation accordée à Monsieur V en
2003 en sa qualité de président de la commission des marchés publics. Ce dernier n'avait pas
délégation pour signer les actes d'engagement des marchés publics, ce que, sauf erreur (et sauf
période d'intérim officiel du Président dûment autorisé par un arrêté de délégation spécifique), il
n'a jamais fait, mais simplement pour signer «les courriers de notification des décisions de la
commission...» (c'est-à-dire les décisions de non recevabilité des candidatures principalement).
La Chambre souligne toutefois que la délégation,
pour une période d'intérim, emporte les mêmes
effets que les délégations permanentes. Elle rappelle également que la personne responsable du
marché est chargée de mettre en oeuvre les procédures de passation et d'exécution des marchés,
de signer les marchés et qu'elle peut se faire représenter dans l'exercice de ses fonctions
(organisation matérielle des procédures) sauf pour le choix de l'attributaire et la signature du
marché.
En outre, un arrêté DPR n° 1440-2002 du 22 avril 2002 avait délégué, entre autres, au directeur
financier de la Mission Politique Educative, en cas d'absence ou d'empêchement de l'adjoint au
chef de cette même mission, la signature de certificats administratifs relatifs à la conformité des
copies d'actes, pièces et documents. Cet arrêté précisait également que délégation était donnée à
l'effet de signer les correspondances de gestion courante ne comportant pas de décision. Or,
accepter une caution bancaire en remplacement d'une retenue de garantie par une caution
bancaire est, conformément aux termes de l'article 100 du code des marchés publics, une prise
de décision relevant de la personne responsable du marché.
Le code général des collectivités territoriales stipule en son article L4231-2 que «le président du
conseil régional est seul chargé de l'administration. Il peut déléguer par arrêté, sous sa
surveillance et sa responsabilité, l'exercice d'une partie de ses fonctions aux vice-présidents, et,
en l'absence ou en cas d'empêchement de ces derniers, à d'autres membres du conseil régional».
En conséquence, le président du conseil régional est de droit personne responsable des marchés.
Sous sa surveillance et sa responsabilité s'exécutent donc tous les achats. Ainsi, le code général
des collectivités territoriales dispose en son article L4231-8 que «le président du conseil régional,
par délégation du conseil régional, peut être chargé, pour la durée de son mandat, de prendre
toute décision concernant la préparation, la passation, l'exécution et le règlement des marchés de
travaux, de fournitures et de services qui peuvent être passés sans formalités préalables en raison
de leur montant, lorsque les crédits sont inscrits au budget. Dès lors, en accord avec les
dispositions de l'article L4231-9 : "le président peut subdéléguer les attributions confiées par le
conseil régional dans les conditions prévues par l'article L4231-3".
En définitive, les arrêtés établis en faveur de la vice présidente ne retenaient pas de délégation de
pouvoir et de signature en matière de marchés publics. De la même façon, la délégation accordée
au directeur financier de la Mission politique éducative ne l'autorisait pas à signer des actes ayant
des incidences financières en matière de marchés publics.
Dans sa réponse, le président du conseil régional indique que «la signature des actes
d'engagement et autres actes spéciaux de sous-traitance était fondée sur les dispositions de son
arrêté de délégation qui, comme cela est rappelé, s'appliquait aux «actes pris en application des
décisions de l'assemblée plénière et de la commission permanente». Or les marchés signés
faisaient systématiquement l'objet d'un rapport - généralement préalable - en commission
permanente ou en assemblée plénière (à titre d'exemple, le vote du PPI s'accompagnait d'un
dispositif d'autorisation de signature de l'ensemble des actes liés à sa mise en oeuvre). Il estime
donc que la personne concernée «était en conséquence tout à fait habilitée à signer les marchés
relevant de son secteur de compétence» .
A ce sujet, la Chambre rappelle que l'autorité compétente pour signer les marchés publics peut
accorder des délégations de compétence ou de signature pour la passation des marchés. Les
délégations doivent toutefois préciser les catégories et les montants pour lesquels elles sont
attribuées, ce qui n'était pas le cas en l'espèce.
4.3.3. Un usage incohérent des retenues de garantie envers les sous-traitants
L'exécution des marchés relatifs aux lycées fait apparaître le peu de cohérence en matière de
retenue de garantie appliquée aux sous-traitants. En effet, si une retenue de garantie est
appliquée sur les acomptes versés aux sous-traitants de certains marchés, pour d'autres
marchés, le titulaire supporte la totalité de la retenue de garantie.
Outre l'incohérence du caractère variable selon les titulaires et les sous-traitants du recours à la
retenue de garantie, il importe de souligner une autre faiblesse du dispositif retenu. En effet,
l'absence d'application systématique de la retenue de garantie prive la Région d'un moyen
d'action financier sur les contractants.
4.3.4. Une pratique parfois excessive des ordres de service
Dans les pièces justificatives, ont été également relevés des commandements effectués par la
voie d'ordre de service. En 2003, le recours à cette procédure a été limité. Mais ces ordres de
services signifient le démarrage des travaux aux titulaires des marchés publics, et ce à chaque
fois que la lettre de notification du marché ne porte pas exécution immédiate.
Par ailleurs, les ordres de services fixant la date de début des travaux ont été fréquemment établis
de façon postérieure aux démarrages des travaux qu'ils étaient censés ordonner. C'est
notamment le cas pour les opérations de réfection de la couverture du Lycée «Jean Moulin» à
Forbach, de la rénovation de la sous-station primaire au lycée «Condorcet» à Schoeneck, de la
mise en conformité électrique du lycée régional «Daubié» à Rombas, de la mise en sécurité des
façades du lycée régional «Marquette» à Pont-à-Mousson, du remplacement de la chaudière au
lycée «Lazard» à Sarreguemines ou du remplacement du chauffage au lycée «Curie» à Freyming-
Merlebach.
Enfin, dans le cadre du marché de mise en conformité électrique du lycée «Julie Daubié» à
Rombas, un usage anormal des ordres de service a été relevé. En effet, un ordre de service de
démarrage des travaux a été émis par la personne responsable du marché le 13 août 2003, alors
que la réception des travaux était effectuée et acceptée le 15 mars 2003 par le maître d'oeuvre et
validée par le maître d'ouvrage le 13 août de la même année. Un tel usage des ordres de service
est peu conforme aux pratiques de bonne gestion des risques et des aléas, tout autant qu'à un
suivi administratif et financier normal des marchés publics.
4.3.5. Des avances forfaitaires ignorant les sous-traitants
En 2003, pour neuf marchés, une somme globale de 74 692,99 euros a été versée à tort au titre
d'avances forfaitaires. En effet, certains marchés ont été attribués à des soumissionnaires qui ne
pouvaient exécuter seuls l'ensemble des prestations, mais ils n'ont déclaré leur(s) sous-traitant(s)
qu'en cours de marché, voire deux semaines après la notification. A la signature de l'acte
d'engagement, ils ont sollicité des avances de fonds pour des prestations qu'ils savaient ne pas
pouvoir exécuter seuls. Ainsi, le marché 2002120492 était, au vu de la situation n° 7, composé de
treize sous-traitants dont le montant global atteint 72,10 % du marché, et pour lequel une somme
de 47 136,50 euros a été avancée à tort.
Par ailleurs, selon les termes du CCAP type de la collectivité, les modalités de remboursement de
l'avance se font en une fois lorsque le montant des prestations exécutées au titre du marché
atteint 70 %. Or, dans le cas du marché 2003060225, la situation 5 qui atteignait 79,52 % ne
permettait pas de défalquer la totalité de l'avance mais seulement une somme de 932,94 euros
sur 15 834,35 euros sachant qu'à ce moment là, la part à régler aux sous-traitants était plus
importante que celle à régler au titulaire. Dans le cas du marché 2003010014, l'avance n'a pu être
défalquée qu'à la situation 4, alors qu'à la situation 3 le marché atteignait déjà 83,19 % de
réalisation.
Un autre cas d'espèce (marché 2002060357) montre qu'en raison de la part du montant du
marché attribuée aux sous-traitants, l'avance n'avait plus lieu d'être versée au titulaire. De plus, la
multiplicité des étapes et des agents de vérification des dépenses de travaux engendrait des
erreurs de suivi dans la récupération des avances qui pouvaient être défalquées deux fois sur un
même état d'acompte (mandats 019215 et 019595).
En réponse aux observations de la Chambre, le président a indiqué que l'absence d'obligation
pour les entreprises de présenter leur demande de sous-traitance en phase de consultation, au
moment de la constitution de leur offre, engendre donc par nature des difficultés de mise en
oeuvre des droits à avance forfaitaire consacrés tout à la fois au bénéfice des entreprises titulaires
et de leurs sous-traitants.
Il conviendrait donc que le suivi des avances soit assuré de façon plus rigoureuse, le code des
marchés 2004 réduisant d'ailleurs le seuil de 90 000 euros à 50 000 euros.
4.3.6. De longs délais de paiement
Plusieurs faiblesses ont été relevées : des retards de paiement allant jusqu'à plus de trois ans,
des prises en charge de factures cinq mois après leur réception (publicité), voire le paiement du
solde de travaux en août 2003 alors que le procès-verbal de réception de ces mêmes travaux était
daté du 4 octobre 2000 (mandats 015951+015952), le marché ayant été notifié le 4 juillet 2000 et
comportant un délai d'exécution de trois mois. Or, selon le décret n° 2002-232 du 21 février 2002,
en l'absence d'apposition de timbre à la date d'arrivée chez le destinataire, c'est la date de la
demande de paiement augmentée de deux jours qui fait foi.
Par ailleurs, alors que les CCAP des marchés de maîtrise d'oeuvre font mention de pénalités en
matière de retard dans les délais de vérification des projets de décompte des entreprises, ces
dispositions n'ont pas été appliquées même lorsque les maîtres d'oeuvre ne respectaient pas les
termes de leur contrat au regard de l'apposition des dates de réception des documents en
question.
Au demeurant, les étapes de vérification des dépenses de travaux étaient longues et elles
associaient plusieurs intermédiaires (maître d'oeuvre, conducteur d'opération, technicien régional,
et service finances de la mission concernée) avant pré-mandatement et mandatement définitif.
Les dispositions du décret n° 2002-231 du 21 février 2002 n'ont pas été respectées. En
l'occurrence, le délai maximum de paiement dans les marchés publics était de soixante jours pour
toutes procédures engagées jusqu'au 31 décembre 2002, et de cinquante jours pour les
procédures engagées entre le 1er janvier et le 31 décembre 2003. Il est de quarante-cinq jours
depuis le 1er janvier 2004. Conformément à l'article 7 du décret n° 2002-232 du 21 février 2002, le
comptable dispose, afin d'exercer les missions règlementaires qui lui incombent, d'un délai
maximum de quinze jours ; la collectivité ne dispose donc que de trente jours de délai de
mandatement.
4.3.7. L'attribution particulière des marchés de prestations intellectuelles
En matière de marchés de prestations intellectuelles, il a été constaté à plusieurs reprises qu'un
seul marché était passé pour un ensemble d'opérations et d'ouvrages différents. Aussi, ces
marchés semblent avoir été assimilés à des marchés de services ne concourant pas à la
concrétisation d'un ouvrage, tels que définis par le code des marchés publics de 2001 précisant,
en son article 27, que pour déterminer le choix de la procédure applicable en fonction d'un seuil, il
convenait d'estimer la valeur totale des services pouvant être considérés comme «homogènes»,
soit en raison de leurs caractéristiques propres, soit parce qu'ils constituaient une unité
fonctionnelle.
Si les marchés de prestations intellectuelles se rattachant à un marché de travaux disposent de
caractéristiques propres et constituent une unité fonctionnelle, il convient toutefois de tenir compte
des notions d'opérations et d'ouvrages relatives aux marchés de travaux, sachant que les
marchés de prestations intellectuelles y sont directement rattachés. Les prestations intellectuelles
ne peuvent donc être dissociées des marchés de travaux.
En réponse aux observations de la Chambre, le président du conseil régional a justifié cette
procédure, et a indiqué qu'avait été «privilégiée, dans certains cas, la passation d'un marché de
prestations intellectuelles recoupant plusieurs prestations. Deux raisons nous y ont conduit, un
gain financier certain, cette solution permet de couvrir des opérations de faible importance ou des
opérations situées dans des lieux éloignés des grands centres, qui faute de quoi auraient du mal à
être attractifs et donc attribués. Au regard de ces avantages, cette approche par lots, qui relève du
libre choix consacré par l'article 10 des codes 2001 et 2004 au bénéfice de la personne
responsable du marché, a conduit à la mise en oeuvre systématique d'une procédure de
consultation par appel d'offres ouvert».
Autre particularité de ces marchés, ils ont été passés à prix «global et forfaitaire», «ferme, non
actualisable et non révisable». De telles dispositions pourraient être synonymes de bonne gestion
dans la mesure où les marchés de travaux, portant exécution des marchés de prestations
intellectuelles, sont parfois attribués deux ans, voire quatre ans après ces derniers. Toutefois, il
apparaît que des opérations de travaux, objet de ces marchés de prestations intellectuelles, ont
été annulées au fil des mois. Or, le mécanisme du prix global et forfaitaire engage la collectivité
sans aucune réfaction possible. Il en a été ainsi de la restructuration du bâtiment Ermitage du
lycée hôtelier de Gérardmer comme de l'acquisition et de l'aménagement de locaux de vie scolaire
au lycée régional «Louis Majorelle» de Toul, opérations supprimées du PPI 2000 à 2003 dès les
avenants 3 du 28 mai 2002 signés respectivement avec la SEBL et la SOLOREM, alors que les
marchés de prestations intellectuelles y afférents avaient été passés en juin/juillet 2000.
Enfin, l'étude de la répartition des marchés de prestations intellectuelles selon les départements
de la Région montre que les prestataires retenus selon cette procédure singulière sont toujours
restés les mêmes. Ainsi, dans le département des Vosges, la SEBL n'a jamais obtenu d'autres
offres que celle de SOCOTEC pour les marchés de «Contrôle Technique». Cette société a
d'ailleurs été systématiquement retenue en matière de marché de «Coordination de Sécurité». De
la même façon, il est apparu que la SOLOREM confiait exclusivement à la société SFERE les
marchés groupés, la mission d'ordonnancement pilotage et coordination (OPC) sur le
département de la Meurthe et Moselle. Enfin, il est apparu que la Région Lorraine, lorsqu'elle
agissait en tant que maître d'ouvrage, attribuait également à la société SOCOTEC la plupart de
ses marchés de contrôle technique.
En outre, la passation d'un marché unique à prix global forfaitaire de prestations intellectuelles
pour un ensemble de marchés de travaux dont ni le déroulement temporel ni la localisation
géographique ne sont communs, ne semble pas conforme aux dispositions du code des marchés
publics. Cette technique conduit au demeurant la Région Lorraine à assumer le coût de
prestations intellectuelles annulées. Enfin, les procédures accélérées d'analyse des offres et de
réception des candidatures conduisent à retenir toujours les mêmes entreprises par
départements.
En réponse aux observations de la Chambre, le président du conseil régional a indiqué que «cette
décomposition autorise à tout le moins, en tant que de besoin, un ajustement «au juste coût» du
montant des rémunérations dues par voie de résiliation partielle du marché en cas d'abandon
d'une opération». Pour sa part, dans sa réponse, la Solorem, mandataire d'une partie des
opérations précise que «Toutefois, dans un souci de bonne gestion et bien que les marchés
correspondants aient été passés à prix global et forfaitaire, les avenants correspondants ont été
passés aux titulaires qui les ont acceptés avec, le cas échéant, le versement d'indemnités quand
elles étaient prévues dans les marchés». Cette réponse montre la pertinence du risque financier
inhérent à ce montage. De même l'autre mandataire, la SEBL a précisé, dans sa réponse, que
«des missions supprimées suite à non réalisation de marchés vont donner lieu à des résiliations
partielles de marchés». Ces opérations ne seront pas, elles non plus, neutres sur le plan
économique.
4.4. Les conventions de mandats
Afin d'augmenter le nombre et l'amplitude des opérations susceptibles d'être conduites sur une
période restreinte, la Région Lorraine a choisi de déléguer la maîtrise d'ouvrage des opérations de
construction et de rénovation des lycées conformément aux dispositions de la loi n° 85-704 du 12
juillet 1985 relative à la maîtrise d'ouvrage publique. Elle a par conséquent fait appel à deux
sociétés d'économie mixte à vocation régionale, la société d'équipement du bassin lorrain (SEBL)
et la société Lorraine d'économie mixte d'aménagement urbain (SOLOREM). Deux conventions
de mandats de maîtrise d'ouvrage ont été conclues le 10 novembre 2000 en accord avec les
décisions de la commission permanente n° 3716-2000. Une répartition géographique a été opérée
: à la SEBL la réalisation d'une fraction des opérations destinées aux lycées des départements de
la Moselle et des Vosges, la SOLOREM obtenant une partie de la maîtrise d'ouvrage des
établissements meurthe-et-mosellans.
Le montant total des opérations financées sous convention de mandat était estimé à 51,4
M.Euros, la rémunération des sociétés d'économie mixte agissant en tant que mandataires, fixée
forfaitairement à 3,30 %, se portait à 1,96 M.Euros, soit en réalité 3,82 % de l'enveloppe
prévisionnelle allouée.
4.4.1. La modification du lien juridique entre mandant et mandataire
Pour cette partie du programme prévisionnel des investissements publics 2000 à 2003 dont elle a
délégué la maîtrise d'ouvrage, la Région a conclu des conventions de mandat de maîtrise
d'ouvrage. Conformément aux stipulations de l'article 3-7° du code des marchés publics alors en
vigueur, qui excluait les mandats du champ d'application des dispositions régissant la commande
publique, ces conventions de mandats ont été attribuées sans mise en compétition préalable.
Chacune de ces conventions a été ensuite modifiée par voie d'avenant à cinq reprises. Sur cinq
avenants signés entre les parties, deux sont intervenus de façon postérieure à l'arrêt du Conseil
d'Etat du 5 mars 2003 UNSPIC et un an après la promulgation de la loi relative à l'urbanisme et à
l'habitat n° 2003-590 du 2 juillet 2003.
Il convient de rappeler que le Conseil d'Etat dans l'arrêt du 5 mars 2003 précité a annulé l'article
3-7° du code des marchés publics de 2001. Il en résulte que l'exclusion des contrats de mandat
du champ d'application du code des marchés publics était réputée n'avoir jamais existé. Les
contrats conclus antérieurement au 6 mars 2003 et les actes qui en découlaient tels que les
avenants et les marchés passés sur ces bases étaient donc illégaux.
L'article 77 de la loi urbanisme et habitat n° 2003-590 du 2 juillet 2003, a mis fin à cette difficulté
en disposant que «sous réserve de toute décision passée en force de chose jugée, les contrats de
mandat conclus avant le 6 mars 2003 sont réputés valides nonobstant l'irrégularité dont ils
pourraient être entachés du fait de l'annulation des dispositions du 7° de l'article 3 du code des
marchés publics».
Toutefois, si cette validation rétroactive des conventions de mandat de maîtrise d'ouvrage
conclues préalablement à la promulgation de la loi a eu pour effet de figer la situation juridique des
actes concernés, il n'apparaît pas que cet article 77 ait autorisé la modification par voie d'avenant
des conventions visées. En effet, la validation législative d'un acte illégal ne peut constituer une
base juridique suffisante pour en autoriser la modification contractuelle postérieurement à la
régularisation dont il a fait l'objet. Ainsi, le Conseil d'Etat a considéré que la modification d'un
contrat couvert par une validation législative rétroactive ne peut valablement bénéficier du même
régime juridique et qu'elle se trouve dès lors frappée de nullité (Conseil d'Etat 29 janvier 2003 -
Ville d'Annecy).
4.4.2. La définition de la mission dévolue aux mandataires
L'examen des conventions de mandats signées avec la SEBL et la SOLOREM a mis en lumière
que la mission du mandataire consistait notamment en la définition des conditions administratives
et techniques nécessaires à la réalisation des ouvrages à exécuter (article 5). Cette disposition
était assortie d'une procédure de validation et de contrôle qui reposait essentiellement sur
l'approbation des avant-projets conformément aux dispositions de la loi n° 85-704 du 12 juillet
1985 relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d'oeuvre privée.
Toutefois, si les études conduites ont été discutées par les services de la Région, il n'apparaît pas
que les avants projets sommaires ou définitifs aient été expressément validés par le maître
d'ouvrage.
En outre, si selon l'article 8 de la convention de mandat, «le choix des titulaires des contrats à
passer par le mandataire doit être approuvé par le maître d'ouvrage. Cette décision devra faire
l'objet d'une décision écrite du maître de l'ouvrage, le cas échéant, après l'examen par la
commission des marchés publics», l'annexe 3 qui définissait les missions du mandataire précisait
que le mandataire signait les marchés de maîtrise d'oeuvre et de travaux après accord de la
Région Lorraine, la même procédure étant reproduite en ce qui concerne les marchés d'études de
fournitures et de travaux.
Au cas d'espèce, ces dispositions semblaient s'écarter du cadre de la loi sur la maîtrise d'ouvrage.
Si le choix des titulaires des marchés était bien réalisé par la commission d'appel d'offre de la
Région Lorraine, le signataire des marchés était le maître d'ouvrage délégué. En outre,
l'approbation des avants projets sommaires n'apparaissait pas expressément.
4.4.3. Les dispositions de contrôle des avances
Selon la convention initiale, la SEBL a bénéficié d'une avance forfaitaire de 5 % du montant total
des travaux prévisionnels soit 1,72 M.Euros. Le dispositif institué par la loi MOP prévoit cette
possibilité mais elle impose également la justification périodique de l'emploi des fonds mis à
disposition du mandataire. Les conventions établies par la Région Lorraine prévoyaient seulement
que le mandataire fournisse un décompte détaillé et au 1er mars de chaque année civile, la
transmission d'un certificat du comptable attestant l'exactitude des facturations effectuées au
cours de l'année précédente. Certes, l'article 8 des conventions laissait au maître d'ouvrage la
possibilité d'effectuer les contrôles techniques nécessaires sur pièces et sur place, mais cette
procédure n'a pas été mise en oeuvre durant la période en examen.
Bien que l'analyse des pièces comptables justificatives jointes aux mandats ait montré que les
mandataires présentaient bien des attestations et des factures obtenues des fournisseurs et
titulaires des marchés, la totalité des justificatifs n'a pas été fournie et ce notamment pour les
opérations les plus importantes. En effet, pour l'ensemble des mandats analysés, 35 % des pièces
comptables ont été produites à l'appui des mandats justifiant moins de la moitié des sommes
avancées. Cependant, prenant en compte les réponses apportées sur ce point par le président du
conseil régional, la Chambre convient que les pièces étaient mises à disposition du mandant mais
que ce dernier ne procédait pas à une vérification exhaustive systématisée.
4.4.4. Les modalités de rémunérations des mandataires
S'agissant de la rémunération des mandataires, les conventions de mandats 3716-2000 et 3717-
2000 modifiées par avenants successifs précisaient en leur article 11 leurs modalités. Pour
l'exercice de leurs missions, les mandataires ont reçu une somme de 1 619 748 euros
correspondant à l'application du taux de 3,30 % hors taxes sur le montant toutes taxes comprises
des autorisations de programme travaux études et mobiliers.
La convention de maîtrise d'ouvrage déléguée conclue avec la SEBL a fait l'objet de cinq
avenants échelonnés de février 2001 à septembre 2004. Compte non tenu des révisions de prix,
ces avenants ont porté la rémunération du mandataire à 1 169 228,44 euros hors taxes, soit une
augmentation de près de 3 % de la rémunération initialement fixée. Dans le même temps, le
montant toutes taxes comprises des travaux confiés a augmenté de 3,84 %. S'agissant de la
convention liant la collectivité régionale à la SOLOREM, elle a été modifiée par avenant à cinq
reprises dont la dernière est datée du 10 novembre 2004. La rémunération du mandataire, qui a
progressé dans des proportions similaires à celles énoncées précédemment, s'est élevée à 450
514 euros HT.
Si la croissance de la rémunération des mandataires est restée modeste, les bases contractuelles
de la rémunération étaient surprenantes. En effet, de façon générale, la rétribution des services
d'un prestataire porte sur le travail accompli. Le prix est donc fixé en regard des travaux ou
prestations dont la réalisation effective n'est pas discutable. Or, en l'espèce, la rémunération du
mandataire a été assise sur le volume financier des autorisations de programme de travaux,
d'études et de mobilier, soit sans rapport précis avec les sommes réellement engagées et
liquidées. Cette base de rémunération était d'autant plus surprenante que les autorisations de
programme excédaient généralement les montants estimatifs des travaux prévus. De plus, la
rémunération forfaitaire de 3,30 % hors taxes se fondait sur le montant toutes taxes comprises
des autorisations de programme allouées. En conséquence, le prestataire a perçu une rétribution
sur des sommes incluant les taxes fiscales. Enfin, les modalités de versement de la rémunération
ont contrevenu au dispositif institué par les conventions de mandats. En effet, alors que ces
dernières fixaient avec précision les échéances et leur montant, la Région Lorraine procédait au
règlement des prestations liées aux conventions avec plusieurs semaines d'avance. Lors du
contrôle, il a été confirmé que le paiement de la rémunération du mandataire était effectué en
même temps que la demande d'avance complémentaire la plus proche.
La Chambre prend acte de la réponse faite à ses observations selon laquelle «les nouveaux
contrats de mandat conclus depuis fixent un mode rémunération forfaitaire (marché à prix définitif,
forfaitaire). Cela a été pris en compte dans les nouveaux contrats de mandats».
4.4.5. Les délais de livraison
Les délais de livraison des ouvrages définis à l'annexe 1 de chaque convention, et qui
s'échelonnaient de septembre 2001 à septembre 2003, ne pouvaient manifestement pas être
respectés, les avenants n° 5 aux conventions étant conclus le 24 septembre 2004 pour la SEBL et
le 4 novembre 2004 pour la SOLOREM.
En effet, l'analyse des opérations rectifiées entre les avenants 4 (signés en mai 2003) et 5 a
montré un réajustement du coût réel des travaux semble-t-il pour certaines, mais aussi des rajouts
de travaux au regard des sommes mise en jeu, en l'occurrence de 70 000 F (10 671 euros) à 400
000 F (60 979,61 euros) pour la SEBL, et de 314 700 F (47 975,71 euros) pour la SOLOREM. Les
délais liminaires ne pouvaient donc pas être respectés, sachant que selon l'article 2 des
conventions «toutes modifications des enveloppes financières devaient faire l'objet d'avenants
avant la mise en oeuvre de ces modifications par le mandataire». Or, les avenants n'ont
aucunement fait état de prolongation de délais ; la mention de ces derniers a par ailleurs
totalement disparu à compter de l'avenant 2 pour chacun des mandataires.
Aucune pénalité n'a pourtant été imputée en l'espèce aux mandataires, comme le prévoyait
l'article 2 des conventions. Dans la mesure où les retards auraient été le fait des mandataires, les
avenants régularisaient des prestations antérieurement réalisées sans approbation préalable du
maître de l'ouvrage, ou avec son consentement tacite mais non écrit.
En réponse aux observations de la Chambre, les mandataires ont précisé qu' «il est vrai que les
délais de livraison prévus dans la convention d'origine n'ont pas été respectés, qu'ils n'ont pas été
adaptés au travers des différents avenants et qu'ils n'ont pas non plus donné lieu à pénalités. Ces
décalages d'opérations, leur modification et même leur suppression échappent à la maîtrise du
mandataire auquel elles n'ont pas été sans poser de réels problèmes de gestion. Si l'adaptation
des échéanciers n'a pas été formalisé contractuellement, elle a été toutefois régulièrement
évoquée au cours des réunions mensuelles de maîtrise d'ouvrage et fait l'objet de remarques de
la part du mandataire dans les documents transmis trimestriellement, comme évoqué ci-dessus,
au travers de l'actualisation du calendrier prévisionnel et de la note de conjoncture».
La loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 dite loi MOP, précise en son article 2 que le programme et
l'enveloppe financière prévisionnelle sont définis avant tout commencement des avant-projets. Ils
peuvent toutefois être précisés par le maître de l'ouvrage avant tout commencement des études
de projet, ou encore, dans le cas de réutilisation ou de réhabilitation d'un ouvrage existant, ils
peuvent se poursuivre pendant les études d'avant-projet, en conséquence en aucun cas après le
début des travaux. Les mandats de délégation de maîtrise d'ouvrage de la Région Lorraine se
sont donc écartés des dispositions de la loi précitée car leurs avenants ont modifié les projets
initiaux.
5. LE SERVICE REGIONAL DE TRANSPORTS DE VOYAGEURS ET L'INTERVENTION
REGIONALE EN MATIERE FERROVIAIRE
Comme l'ensemble des régions, la Lorraine a été érigée par la loi, au 1er janvier 2002, en autorité
organisatrice des transports (AOT) d'intérêt régional. Pour examiner ce domaine à forts enjeux, la
Chambre s'est concentrée sur la période 2001-2002, notamment afin d'évaluer les mesures
préparatoires prises par la Région, l'impact de la prise en charge du rôle d'AOT et le niveau de
réalisation de ses premiers objectifs en la matière, ainsi que le niveau d'accompagnement
financier consenti par l'Etat.
Il n'est pas possible, à l'heure actuelle, de disposer d'un échantillon de données suffisantes pour
mesurer le succès de la régionalisation des transports ferroviaires. En Lorraine, la mise en service
du TGV Est devrait au demeurant modifier profondément l'organisation des liaisons TER. Ce
domaine d'activité, désormais régionalisé, présente par ailleurs des caractéristiques ou des
perspectives d'évolutions externes essentielles qui échappent pour beaucoup à la maîtrise de la
Région.
5.1. Historique et cadre juridique général
Dans les dernières décennies, les deux chocs pétroliers (1971, 1973-1974) ont été à l'origine du
développement du transport collectif en France, les collectivités territoriales prenant une part
croissante dans les processus de décision et de gestion. Ainsi, en 1971, un avenant a-t-il été
passé à la convention de 1937 liant l'Etat à la SNCF, modifiant le cahier des charges de cette
dernière. Ses missions de service public ont été redéfinies et elle a été autorisée à négocier des
conventions avec les collectivités territoriales (notamment les Etablissements publics régionaux
(EPR), créés en 1972). De cette compétence, sont nés en 1976 les premiers conventionnements
locaux ferroviaires.
La Régionalisation s'est, elle, amorcée dès 1974, au travers des premiers schémas régionaux de
transport (en Pays de la Loire, Lorraine et Limousin). Le plus achevé de ces schémas régionaux,
celui du Nord Pas de Calais (1978), a fait l'objet d'une convention tripartite, Etat, Etablissement
Public Régional et SNCF, qui a préfiguré les conventions actuelles.
La loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs, dite «LOTI», a
consacré les transports publics de voyageurs comme un service public relevant de la compétence
exclusive des collectivités publiques, affirmé le principe d'un droit au transport et elle a offert aux
régions la possibilité facultative d'intervenir dans ce domaine. A partir de 1984, la SNCF a donc
proposé aux régions de signer des conventions «à la marge» permettant d'augmenter ou de
diminuer les services existants mais sans pouvoir réorganiser le réseau régional. Celles-ci se sont
généralisées assez rapidement et elles ont conduit la SNCF à rééquilibrer sa stratégie
commerciale et de développement, jusqu'alors très fortement concentrée sur le TGV et les
grandes lignes, autour d'un nouveau concept multimodal. C'est ainsi qu'en 1987, le TER
(Transport Express Régional) a vu le jour.
Poursuivant cette orientation, la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement
et le développement du territoire (LOADT) a retenu, dans son article 67, une expérimentation en
région à l'issue de laquelle «les conditions dans lesquelles [les modalités d'organisation et de
financement des transports collectifs d'intérêt régional] seront attribuées aux régions». Sept
régions (Alsace, Centre, Nord-Pas-de-Calais, PACA, Pays de la Loire et Rhône-Alpes, rejointes
deux ans plus tard par le Limousin) ont participé à cette phase expérimentale, prolongée par
l'article 21 de la Loi n° 99-533 du 25 juin 1999 «jusqu'au 31 décembre 2001 au plus tard».
L'expérimentation a ensuite gagné de nouvelles régions, qui ont décidé d'anticiper sur le futur
transfert de compétences en signant des conventions dites «intermédiaires» avec la SNCF :
Haute-Normandie le 8 Septembre 1997, Midi-Pyrénées le 25 Novembre 1997, Bourgogne le 28
Novembre 1997, Picardie le 21 Janvier 1998 et Lorraine le 5 Février 1998.
Le bilan de l'expérimentation, quoique financièrement contrasté d'une région à l'autre, a été
globalement positif en terme de partenariat Régions-SNCF et la loi n° 2000-1208 du 13 décembre
2000, relative à la solidarité et au renouvellement urbain (dite «SRU») a définitivement consacré la
régionalisation, en confiant aux régions le rôle d'autorité organisatrice de transports collectifs
d'intérêt régional à compter du 1er janvier 2002. Le décret n° 2001-1116 du 27 novembre 2001
relatif au transfert de compétences en matière de transports collectifs d'intérêt régional a précisé
les modalités de mise en oeuvre de la loi et notamment le lien conventionnel entre chaque Région
et la SNCF.
Cette convention fixe les conditions d'exploitation et de financement des services ferroviaires
relevant de la compétence régionale, conformément à l'article 129 de la loi SRU. Elle doit ainsi
préciser les modalités selon lesquelles la Région exercera son rôle d'Autorité Organisatrice des
Transport et fera ainsi face à ses nouvelles responsabilités de service public au plus près des
besoins et dans le cadre plus général de l'aménagement et du développement de son territoire.
5.2. La préparation de la régionalisation en Lorraine
5.2.1. Organisation des services régionaux
A la veille de la prise en charge de la compétence d'autorité organisatrice des transports, la
Région Lorraine disposait depuis septembre 2000, parmi les cinq missions confiées chacune à un
directeur général adjoint, d'une mission des infrastructures et transports composée de cinq
personnes (trois cadres et deux secrétaires). La légèreté de cette organisation s'expliquait en
partie à l'époque par l'investissement relativement limité fait par la Région sur le service
ferroviaire. Ne faisant en effet pas partie des sept régions expérimentatrices, son intervention
dans le domaine se limitait pour l'essentiel à des participations financières dans des projets
touchant le transport ferroviaire régional. Les dépenses directement consacrées au transport
ferroviaire, c'est-à-dire non compris les charges communes telles que le personnel, représentaient
ainsi en valeur, pour l'exercice 2001, environ 5 % des dépenses mandatées dans l'année par la
Région.
Les faibles moyens dont disposait la Région Lorraine expliquent le recours quasi-systématique à
des cabinets conseils pour les études majeures en ce domaine : états des lieux avant transfert sur
les infrastructures et le matériel roulant, assistance pour la définition du cadre juridique et pour la
passation de la convention, organisation de la compétence ferroviaire. Dans ce dernier cas, une
demande d'assistance auprès du cabinet Lamotte a été effectuée par lettre du directeur général
des services en date du 7 novembre 2001. Si l'on peut s'interroger sur le faible délai courant entre
cette commande et la date de prise en charge de la compétence par la Région (le 1er janvier
2002), le temps effectivement consacré à cette mission paraît encore plus réduit. Le cabinet a, en
effet, émis la note d'honoraires relative à sa prestation le 13 novembre, soit trois jours ouvrables
après la lettre de commande, si l'on fait abstraction des délais de poste.
De fait, bien que constituant une prospective globale des missions à assumer en interne, le
rapport de synthèse présenté par le cabinet Lamotte est succinct (21 pages) et il semble plus
correspondre à une énumération des points principaux de la réflexion sur le sujet qu'à un
ensemble de propositions directement applicables, malgré un coût significatif [82 524 F (12 580,70
euros) TTC, soit 4,50 % des dépenses mandatées en 2001 pour la réalisation d'études liées au
transfert de compétence. En outre, l'imputation de telles insertions au chapitre de dépenses
d'investissement 908, compte 18 «subventions d'équipement à des entreprises privées» est
erronée.
Dans sa réponse aux observations provisoires de la Chambre, le cabinet Lamotte précise que le
rapport de synthèse figurant à l'appui des pièces comptables repose sur la production préalable
de documents plus étoffés. La Chambre prend acte de cette remarque, à l'appui de laquelle,
cependant, aucune copie desdits documents n'a été produite.
Cette mission d'assistance à l'étude organisationnelle des services régionaux, bien que réalisée
dans l'urgence, semble néanmoins avoir eu de réelles conséquences. En effet, l'organigramme de
la mission infrastructures et transports dont le Conseil régional a rendu compte pour l'année 2002
a été renforcé sur des points essentiels, relevés au travers du rapport de synthèse du cabinet
Lamotte et qui figuraient dans un organigramme prospectif proposé par le cabinet en page 6 du
rapport. En effet, outre un conseiller sécurité, une organisation en cinq pôles, dont une direction
des finances et du contrôle et deux directions orientées clientèle (total de 17 personnes), a été
retenue.
Relativement modeste en moyens humains, au regard des volumes financiers de l'activité
«transport» en général et ferroviaire en particulier, la mission a semblé, dès la première année de
la prise en charge par la Région de ses nouvelles compétences, structurée pour faire face à ses
missions, au bénéfice d'une politique d'externalisation des études les plus importantes.
5.2.2. Etats des lieux et études préparatoires
Dans la perspective de la prise de compétences des services ferroviaires d'intérêt régional, la
Région a décidé de compléter l'expérience acquise lors de la convention de partenariat 1997 à
1999, prorogée par avenant sur 2000 et 2001, par un «programme global d'expertise des
équipements nécessaires à l'activité TER»(rapport d'orientation stratégiques, juin 2001). Ainsi,
hormis un «point zéro» de mesure de la qualité produite sur le réseau TER réalisé fin 2001 par la
société Effia Voyageurs pour un coût de 164 914,94 F (25 141,12 euros), la phase préparatoire et
d'étude a été organisée selon les axes suivants :
- Un recensement analytique et critique des moyens devant être transférés (gares et haltes
ferroviaires, matériel roulant)
- Une validation contradictoire des comptes 2000 présentés par la SNCF pour le TER Lorraine ;
- Une étude juridique approfondie en vue de la négociation, puis de la rédaction de la convention ;
- Une réorganisation interne des services.
Si le volet de la réorganisation interne, déjà évoqué, présente des limites, les trois premiers ont
été menés suffisamment en amont et de façon approfondie pour fournir en temps utile un
référentiel indispensable à la Région. La constitution d'une telle base de données, tant financières
qu'opérationnelles, était d'autant plus nécessaire qu'elle conditionnait les futurs grands équilibres
financiers de la régionalisation et notamment la contribution financière de l'Etat à l'équilibre
d'exploitation du TER, basée sur les comptes d'exploitation 2000 certifiés, avec une actualisation
au 1er janvier 2002 et la contribution financière de l'Etat liée au renouvellement du matériel
roulant. Cette dernière contribution ne pouvait être validée qu'après la connaissance précise de
l'état du parc transféré. En outre, pour apprécier l'engagement attendu de l'Etat, dans le soutien
financier des programmes de rénovation des gares à vocation régionale, un état des lieux pré-
transfert fiable était nécessaire.
A cet égard, le fait que la Région ait mandaté un cabinet conseil pour effectuer un inventaire des
gares et haltes, patrimoine qui n'avait pas vocation à être transféré en termes de droit de propriété
à la future autorité organisatrice, met en évidence que, dès l'origine, la Région entendait faire
porter son effort au-delà des obligations législatives et au-delà même de son engagement en
faveur de l'aménagement du territoire pris dans le cadre du CPER.
5.2.2.1. Le réseau ferroviaire lorrain, données générales et caractéristiques avant régionalisation
Avec 1 848 kilomètres de voies (soit 5,8 % du réseau ferré national), la Lorraine présente un
réseau important, dans une configuration fortement maillée, mais avec de grandes disparités.
Héritage de l'histoire industrielle et minière de la Région, autant que conséquence de sa
répartition démographique, les voies sont concentrées principalement dans le cour de la Région et
dans sa partie nord, autour de trois axes soit un axe principal nord-sud, le sillon Lorrain, qui
dessert les quatre principales agglomérations de la Région (Epinal, Nancy, Metz, Thionville) et se
prolonge vers le Luxembourg et deux axes d'orientation est-ouest, vers l'Alsace et vers la Sarre.
Ce réseau ferroviaire autorise, sur l'essentiel de ces voies, une vitesse de circulation théorique
supérieure à 120 km/h, voire à 140 km/h. Ces performances dépendent cependant à la fois du
niveau d'entretien des voies et de la vitesse de circulation propre au matériel roulant employé. En
2001, seule la moitié du réseau était électrifiée, avec une forte concentration de lignes électrifiées
en 25000 volts au nord. Le déficit se situait, à l'époque, principalement au sud de la Région, à l'est
de la Moselle et au centre de la Meuse. Ce réseau présentait également, en termes de trafic, un
flux important de fret (la Lorraine représente plus de 20 % du fret SNCF(1)), principalement sur le
sillon Lorrain. Enfin, des rebroussements (transfert de la locomotive vers l'autre extrémité du train,
pour les rames non réversibles) sont nécessaires pour certaines liaisons, dans quatre gares, dont
les plus importantes (Nancy, Metz, Saint-Dié, Sarrebourg). Ces rebroussements sont pénalisants
à la fois en temps de parcours et en capacité des infrastructures.
Avec la région PACA (Avignon-Marseille), la Lorraine est la seule région qui présente sur son
territoire deux nouds ferroviaires (Metz-Nancy) référencés comme «majeurs» par la SNCF. Ces
nouds sont en Lorraine très rapprochés géographiquement et ils relient les deux agglomérations
les plus importantes, qui drainent le plus de trafic sur un axe commun (le cour du sillon Lorrain).
De ce fait, et compte tenu de la concentration sur cet axe du sillon lorrain des principaux flux de
trafic voyageurs et marchandises, les nouds ferroviaires de Metz et Nancy, mais également de
Frouard et Thionville sont affectés par des phénomènes de congestion qui limitent aux heures de
pointe les possibilités de développement des liaisons TER projetées. Les possibilités de dérivation
du fret ferroviaire sur d'autres axes nord-sud étaient au moment du transfert réduites, du fait
notamment du gabarit limité des tunnels qui interdit la circulation de convois acheminant de
grands conteneurs et concentre plus encore le trafic sur un nombre d'axes limité.
5.2.2.2. L'état des gares et haltes ferroviaires
La loi SRU ne prévoyait aucun transfert de compétence en matière d'infrastructures, la SNCF
demeurant propriétaire et exploitant de ce patrimoine. Dans ces conditions, la décision prise par la
Région Lorraine de diligenter en 2000-2001 une étude approfondie sur les gares et haltes
ferroviaires, pour un coût total TTC hors publicité de 538 200 F (82 048,06 euros) peut surprendre.
Cette étude, confiée par marché à la société d'aménagement recherche et pôles d'échanges
(AREP), groupe de conseil et filiale de la SNCF visait à réaliser un inventaire du patrimoine
existant (état des lieux, surfaces, équipements...), un diagnostic qualitatif, un recensement des
activités, prestations commerciales, opérations d'entretien et de maintenance, puis, dans une
deuxième phase, et au regard des prestations précédemment effectuées, la réalisation d'une grille
de référence par catégorie assortie de propositions hiérarchisées et chiffrées d'action. Si l'on se
réfère aux obligations normales du propriétaire en matière d'entretien, de mise en conformité et,
dans le cas de la régionalisation, de niveau de service en gare, il faut relever l'absence de la
SNCF dans ce marché alors que l'étude traitait d'un domaine qui relevait alors de sa
responsabilité et l'est resté après le transfert de compétence.
Dans sa réponse aux observations provisoires de la Chambre, la SNCF affirme qu'elle «disposait
bien à cette date d'un état des gares, qui a fait l'objet de la liste constitutive de l'annexe 7 à la
convention TER du 18 mars 2002, mais n'avait pas formalisé de programme d'actions de
rénovation pour chacune des gares régionales». Cependant, ladite annexe se résume, à une carte
de la Région portant les implantations des gares et une liste typologique desdites gares, classées
par importance commerciale, ce qui ne saurait être considéré comme un inventaire exploitable.
La SNCF n'a pas non plus participé à son financement. Il semble que la SNCF n'était pas en
mesure, à ce moment là, de présenter un état des lieux fiable, pas plus qu'une solution alternative
évaluative crédible. L'absence de l'exploitant dans cette évaluation a été relevée par ses
commissaires aux comptes et par le cabinet Arthur Andersen lors de la validation du compte de
résultat 2000.
Les réponses fournies par la Région Lorraine et la SNCF aux observations provisoires de la
Chambre dans ce domaine sont concordantes : «la Région n'a pas souhaité associer la SNCF à la
conduite de cette étude» (réponse SNCF), «Le fait de ne pas associer la SNCF /.../ relevait d'un
choix délibéré de la Région Lorraine qui souhaitait disposer d'une expertise indépendante, la plus
objective possible /.../» (réponse Région).
En tout état de cause, la prise en charge par la Région et sur ses crédits d'une étude portant sur
un domaine non inclus dans le transfert de compétence marque une volonté d'intervention allant
au-delà du cadre strict des nouvelles obligations. Cette étude a sans doute permis à la Région de
connaître l'état de ce patrimoine et d'évaluer ses faiblesses.
Déduction faite des surfaces relevant de Réseau ferré de France (RFF) les quarante-cinq
principales gares TER Lorraine représentent une surface projetée (superficie des bâtiments au
sol) totale de 26 869 m² (600 m² en moyenne par gare) et une surface développée (superficie
totale du bâtiment) totale de 41 218 m² (900 m² par site en moyenne).
L'évaluation du patrimoine des installations fixes commandée par la Région en 2001 au cabinet
AREP a mis en lumière un surdimensionnement quantitatif des bâtiments, avec une efficience
commerciale très relative (12 % des surfaces seulement dévolues aux voyageurs TER (hall, salle
attente, toilettes), pour 15
% de logements et 73 % d'autres surfaces (exploitation, sécurité
SNCF, sans utilisation). Ce dernier point d'ailleurs n'a pas été précisément évalué.
La société AREP a établi des préconisations chiffrées en matière d'investissements à réaliser sur
ce patrimoine. Les fourchettes de dépenses établies représentent au total, une fois ajoutés les
coûts de maîtrise d'oeuvre et d'ouvrage (estimés à 15 %), une charge globale estimée, en fonction
des solutions retenues, entre plus de 310 MF (47,26 M.Euros) et environ 550 MF (83,85 M.Euros),
à comparer aux 5,2 F (0,79 euros) que la SNCF a indiqué avoir consacré à l'entretien des gares
pour l'exercice 2000.
5.2.2.3. L'inventaire du parc de matériel roulant TER
En 2001, la Région Lorraine a mandaté le cabinet ITER, afin d'expertiser le parc du matériel
roulant affecté au TER Lorraine, d'en réaliser un inventaire précis, de déterminer les besoins de
renouvellement et d'établir des propositions d'utilisation de ce matériel pour l'avenir. Les
principales conclusions de cette étude ont été que le parc de matériel roulant était disparate et
sous dimensionné. Neuf types de matériels différents étaient représentés dans les cent deux
unités alors en ligne. Cet effectif apparaissait insuffisant pour répondre à la demande aux heures
de pointe sur les sillons les plus demandés. Il est ainsi apparu que le parc était ancien, avec
comme corollaire une dégradation progressive de la fiabilité et de la disponibilité des matériels,
ainsi qu'une augmentation inéluctable des charges d'entretien. La moyenne d'âge de ces
matériels était arrêtée à vingt-sept ans, pour une durée de vie technique moyenne de trente ans. Il
en résultait que le confort du matériel roulant ne répondait pas aux attentes des clients. Selon les
critères typologiques retenus, le TER lorrain ne disposait d'aucun matériel classé «bon niveau de
confort», 38 % était classé «correct» et 62 % classé «médiocre». Le parc avait vocation à
diminuer de façon mécanique du fait de l'intervention des radiations techniques. De 102 unités
hors locomotives, en 2001, il était, en l'état, susceptible de descendre à 87 éléments dès 2006 (-
15 unités) et 54 en 2015 (-48) et ceci, malgré les dépenses consenties par la Région au profit du
matériel roulant TER préalablement au transfert de compétence. En termes de places assises, à
horizon 2006, l'offre risquait de perdre 10 % de son potentiel (20 000 en 2000, 18 000 en 2006) et
de s'effondrer à 50 % en 2015 (11 000 places assises).
En l'absence d'un rajeunissement et d'une modernisation significatifs du parc TER Lorraine avant
le transfert, et alors même que la Région Lorraine avait investi, sur la période 1996 à 1998, 100
MF (15,24 M.Euros) dans ce domaine et que des provisions pour renouvellement du matériel
roulant lui étaient facturées dans les charges de capital de la convention pré-transfert, l'étude
commandée par la Région Lorraine a montré toute son utilité.
Dans sa réponse aux observations provisoires de la Chambre, la SNCF affirme que «cette
situation, qui était connue des parties lors de la mise en oeuvre de la régionalisation, a pu se
traduire à la fois par une prise en compte par l'Etat dans la détermination des ressources
transférées à la Région Lorraine au titre du besoin de renouvellement du matériel, et également
par la formalisation par la SNCF d'un schéma directeur du matériel prévoyant un renouvellement
progressif mais rapide du parc, avec la participation financière du Conseil Régional. La réalisation
des opérations de modernisation et des acquisitions programmées de matériel neuf doit se
traduire par un parc neuf ou modernisé à 100 % en 2009".
De plus, si l'expertise réalisée par le cabinet conseil a fait ressortir un âge moyen du parc affecté
au TER Lorraine de vingt-sept ans, chiffre que la Région Lorraine présente comme supérieur à la
moyenne nationale, les locomotives présentaient un état particulièrement dégradé.
En 2000, l'âge moyen du parc s'élevait en effet à 39 ans, pour une durée de vie technique estimée
à environ 40-45 ans. En juin 2001, le rapport d'orientations stratégiques concernant la
décentralisation du TER en région, soulignait que la SNCF n'avait toujours pas «précisé les
mesures qu'elle comptait mettre en oeuvre pour procéder au renouvellement de la durée de vie
des locomotives nécessaires à la traction des 22 rames circulant sur le réseau régional".
Ce matériel est particulièrement important durant la période transitoire précédant l'entrée en
service des automoteurs thermiques ou électriques à grande capacité destinés à le remplacer.
L'examen de l'évolution du parc de locomotives a montré en première analyse que, depuis le
début de la mise en oeuvre de la convention 2002, l'exploitant a, dans une certaine mesure, tenu
compte des préoccupations de la Région en la matière. L'âge moyen s'établissait ainsi à 36,48
ans pour 23 locomotives au 31 décembre 2001 et il est resté inférieur aux chiffres de 2000 les
deux années suivantes, malgré une tendance au vieillissement : 37,54 ans pour 24 engins fin
septembre 2002 et 38,57 ans pour 21 locomotives fin septembre 2003. Toutefois, sur ces trois
années, la part des engins de 39 ans d'ancienneté et plus, a augmenté, passant de 56,52 % en
2001, à 62,50 % en 2002 et 76,19 % en 2003. De plus, les locomotives électriques, qui
représentent environ les 3/4 du parc, ont fait l'objet de moins d'efforts de la part de l'exploitant et
leur ancienneté moyenne, de 38,68 ans en 2001, est passée à 39,65 en 2002 et 39,7 en 2003.
Ainsi, la diminution de l'ancienneté moyenne globale qui ressort de l'analyse initiale est plus liée à
la logique statistique selon laquelle, pour des effectifs réduits, un seul exemplaire significativement
plus récent améliore les résultats, qu'à un réel effort de rénovation structurelle du parc. En 2003,
par exemple, l'adjonction au parc d'une seule locomotive électrique relativement récente (27 ans)
a permis pour l'ensemble du parc d'éviter de franchir la barre des 39 ans d'ancienneté moyenne
globale.
La quasi totalité du parc de locomotives souffre donc d'une évolution tendancielle au vieillissement
et présentait toujours, en 2003, les mêmes caractéristiques d'âge élevé que celles qui avaient
suscité l'inquiétude de l'Autorité Organisatrice en 2000-2001.
Dans sa réponse aux observations provisoires de la Chambre, la SNCF mentionne que «que l'âge
élevé du parc, et notamment celui des locomotives, mis en avant par la Chambre, n'a pas eu pour
conséquence de perturber ou dégrader le fonctionnement du service»
Enfin, et au delà de la compensation de l'Etat prévue par la loi, la Région avait obtenu que la
SNCF s'engage par convention sur «le principe d'un investissement lié au matériel roulant en
lorraine en moyenne sur 3 ans de 80 % de la dotation aux amortissements nets des reprises de
subvention (...)» (Convention 2002, article 56). Le même article précisait qu'un avenant à la
convention devait dans les six mois suivant la signature de celle-ci, venir préciser les modalités de
cette participation.
Des sept avenants à la convention, seul le premier, du 19 septembre 2001, est intervenu dans un
délai proche des six mois et il ne comporte aucune mention relative à l'engagement contractuel
pris à l'article 56 de la convention.
Malgré l'absence de l'avenant prévu dans le contrat initial, laquelle n'est pas contestée, la SNCF
et la Région Lorraine, dans leurs réponses aux observations provisoires de la Chambre, attestent
que le délégataire s'est acquitté de ses obligations conventionnelles en matière d'investissements
liés au matériel roulant et au-delà puisque sur la période 2002-2004, un tableau d'analyse (produit
par la SNCF à la Région le 9 mai 2005) présente un effort financier consenti par la SNCF à
hauteur de 134 % de la dotation aux amortissements nets de reprises de subventions.
5.2.2.4. Le référentiel financier des comptes TER Lorraine pour 2000
L'article 125 de la loi SRU, codifié à l'article L1614-8-1 du code général des collectivités
territoriales, précise que le calcul de la contribution pour l'exploitation des services ferroviaires
d'intérêt régional est effectué par référence aux comptes SNCF de l'année 2000 relatifs à ces
services. Produits par la SNCF sur la base d'une affectation essentiellement analytique des
charges jusqu'alors suivies au niveau national, les comptes 2000 des TER, sorte de budget base
zéro, ont fait l'objet d'un audit externe visant à leur attestation.
Dans son rapport (juin 2001) d'attestation du compte de résultat 2000 présenté par la SNCF pour
le TER Lorraine, le cabinet Arthur Andersen avait, au delà d'ajustements spécifiques et de
corrections méthodologiques, formulé deux réserves de principe (réserves également formulées,
d'après le cabinet, par les commissaires aux comptes de la SNCF). La première indiquait qu'au 31
décembre 2000, le système de suivi des recettes entrait dans sa phase finale de déploiement et
qu'il n'était donc pas à même d'assurer une correspondance exacte entre le volume des ventes
encaissées et celui des produits enregistrés. Certes, cette discordance concernant les comptes
d'ensemble de la SNCF, il n'était pas assuré qu'elle ait une incidence sur ceux du TER Lorraine.
Cependant, le doute n'avait pu être levé à l'époque de l'établissement du compte de résultat 2000.
La seconde réserve concernait l'absence d'un inventaire des installations fixes exhaustif et
suffisamment détaillé retraçant et valorisant ces immobilisations. Cette lacune rendait incertaine
l'assiette de certains produits et charges calculés au compte de résultat de l'activité TER
LORRAINE (dotation aux amortissements, et reprises de subventions, entretien et maintenance
de installations fixes, taxe professionnelle, taxe foncière, autres taxes, frais financiers, soit environ
3 % des charges de l'activité). La solution trouvée par la SNCF pour asseoir sa ventilation de
charges et de produits a été un fichier des surfaces occupées en m² pondéré selon le type
d'utilisation. Ce fichier (mis en place en 1997 à la suite d'une étude du cabinet Coopers, non mise
à jour par la suite) a été qualifié d'insuffisamment fiable par le cabinet A. Andersen.
Or, sur ce dernier point, et ainsi qu'évoqué précédemment, l'inventaire détaillé du patrimoine
gares et haltes, réalisé à l'initiative de la Région en 2001, a mis en lumière de grands
déséquilibres dans la destination d'usage des surfaces. Selon cet inventaire, des surfaces «sans
emploi», dont l'importance n'a été, de surcroît, évaluée nulle part, auraient été incluses dans la
surface totale retenue pour constituer cette base de calcul. Rien ne justifie pourtant que des
surfaces non utilisées pour la réalisation du service de transport soient incluses dans les bases de
calcul analytiques des charges transférées à la nouvelle AOT régionale.
Dans les surfaces consacrées à l'activité, il semble logique d'incorporer celles consacrées au
personnel chargé de sa réalisation, même s'il demeure rattaché à la SNCF. Ceci comprend les
logements, mais il conviendrait que soit démontré que leur parc ne présente pas une dimension
sans rapport avec les besoins, aucune assurance n'ayant été produite à cet égard sur ce sujet.
Enfin, il est à relever que les données effectivement retenues par la SNCF pour mesurer la
surface en m² pondérés affectée au TER Lorraine afin de calculer les charges impliquant cette
référence ne sont présentées dans aucun document et notamment pas au chapitre III. «Eléments
caractéristiques de l'Activité TER Lorraine pour l'exercice 2000». Le rapprochement et la
comparaison avec les surfaces relevées et expertisées en 2001 par le cabinet AREP pour le
compte de la Région ne peuvent, de ce fait, être effectué.
De plus, tant les comptes présentés en 2000 par la SNCF que les modèles de comptes
d'exploitation que l'exploitant s'engage à produire chaque année à l'AOT ne permettent qu'une
évaluation globale des postes de dépenses et une vision très générale de l'activité : dix-neuf
postes de charges et cinq de recettes seulement, vision par activités, calculs de répartitions
analytiques de charges. Une telle globalisation des données rend très difficile un contrôle détaillé
de l'exploitation par l'AOT. La Région ne dispose donc pas d'éléments suffisamment précis lui
permettant d'évaluer, et donc d'anticiper, l'incidence financier réelle de l'évolution des services et
des conditions de leur réalisation.
A cet égard, les dépenses de personnel SNCF constituent l'une des charges les plus importantes
dans les coûts du service délégué. Cependant, ces dépenses s'imposent à la Région et elles sont
tendanciellement, à effectifs constants, à la hausse. Au sein du compte de résultat présenté pour
2000, qui sert de base à tout le dispositif financier de la convention, ces dépenses sont fondues
dans des agrégats analytiques qui incorporent d'autres types de charges. L'analyse du rapport
d'attestation pré-conventionnelle réalisé en juin 2001 par le cabinet Arthur Andersen consulting ne
permettait d'ailleurs de les isoler que sur 38,57 % de la valeur totale des charges.
Certes, les charges relatives au TER Lorraine sont, pour partie (et notamment les charges de
personnel), encadrées dans un système de forfait et leur actualisation est indexée sur des indices
nationaux de coût (article 54 de la convention). Cependant, comme tout élément conventionnel, ce
système d'actualisation peut être remis en question, lors de négociations bipartites, en cours de
contrat. Dans cette hypothèse, il n'est pas certain que la Région dispose d'une information
financière détaillée et propre à lui permettre de valider en toute connaissance de cause les
éventuelles modifications demandées par le délégataire, appréciation que la Région, dans sa
réponse aux observations provisoires de la Chambre, affirme partager. Elle précise également
que «Les négociations relatives à la préparation de la convention avaient d'ailleurs conduit la
Région à proposer à plusieurs reprises à la SNCF des modèles de décomptes très exhaustifs,
mais ces attentes n'avaient pu aboutir en raison du refus opposé par la SNCF à ce sujet. Le
Conseil Régional souhaite d'ores et déjà, pour la prochaine convention, renouveler une
négociation spécifique dans cette direction pour s'inscrire dans une démarche de progrès".
Il est à relever, enfin, que le Région Lorraine est actuellement en cours de négociation de la
convention, suivant la clause de «rendez-vous» prévue à l'article 44-2. La discussion concerne le
réexamen de l'imputation au compte de résultat de la partie des charges forfaitaires concernant la
part salariale de la taxe professionnelle et le montant des charges liées aux installations fixes.
5.3. La mise en oeuvre de la régionalisation
5.3.1. Le niveau de maîtrise du risque contractuel
5.3.1.1. La conformité de la convention avec les impératifs de la loi
L'article 124 de la loi SRU et l'article 21-1 de la loi no 82-1153 du 30 décembre 1982 (LOTI) ont
défini la mission de la Région, en tant que nouvelle Autorité Organisatrice des transports, comme
suit : «/.../
la Région décide, sur l'ensemble de son ressort territorial, le contenu du service public
de transport régional de voyageurs et notamment les dessertes, la tarification, la qualité du service
et l'information de l'usager, en tenant compte du schéma national multimodal de services collectifs
de transport de voyageurs et du schéma régional de transport, dans le respect des compétences
des départements, des communes et de leurs groupements, de la cohérence et de l'unicité du
système ferroviaire dont l'Etat est le garant./.../ .
La Convention entre la Région Lorraine et la SNCF, conclue le 8 mars 2002, respecte les
dispositions de la loi et de son décret d'application n° 2001-1116 du 27 novembre 2001 (article 3).
Ces textes prévoyaient qu'elle devait fixer :
- La consistance et la nature des services demandés par la Région à la SNCF : titre II, IV, V de la
convention Région Lorraine- SNCF et annexes correspondantes ;
* L'inventaire du parc de matériel affecté aux services mis en oeuvre sur les directives de la
Région : titre II de la convention et annexes correspondantes ;
* Les conditions techniques et commerciales dans lesquelles la SNCF s'engage à réaliser ces
services : titres IV de la convention et annexes correspondantes ;
* Les objectifs de niveau de service, de qualité et de productivité fixés à la SNCF : titre II et
annexes correspondantes, notamment l'article 7 ;
* Les modalités de concertation dans les cas où des modifications du plan régional de dessertes
TER auraient un impact important sur les trains grandes lignes de la SNCF (ou l'inverse) : titre IX
de la convention et annexes correspondantes ;
* Les relations financières entre les deux contractants : titre VII de la convention et annexes
correspondantes ;
L'ensemble de ces dispositions a été retenu et la convention prévue à l'article 21-4 de la loi LOTI
(créée par la loi SRU du 13 décembre 2000 et conclue par la Région Lorraine et la SNCF le 8
mars 2002) offre les garanties juridiques nécessaires au plein exercice par la Région de ses
responsabilités d'autorité organisatrice.
5.3.1.2. Evaluation dans plusieurs domaines de la mise en oeuvre de la Convention et de la
compétence régionale en matière de transport ferroviaire
A - Le niveau des services en gare
Le niveau des services en gare est traité par l'article 5 de la convention du mars 2002. Il s'agit en
l'espèce des moyens de commercialisation des titres de transport, qu'ils soient humains (guichets)
ou mécaniques (distributeurs). Grâce aux états des lieux réalisés en 2001, la Région disposait, à
la signature de la convention, d'une base «année zéro» fiable décrivant les services offerts en la
matière par la SNCF.
Ayant intégré ce critère dans ses grilles d'analyse de la qualité du service, la Région devait se
doter des moyens d'en contrôler l'évolution. La convention offre, à cet égard, toutes les garanties,
puisque sur la base de l'inventaire au 1er janvier 2002 des services en gares et haltes du réseau
TER lorrain (annexé à la convention), la SNCF ne peut décider que de modifications mineures très
encadrées (modifications d'horaires d'ouverture, compatibles avec les horaires de desserte, d'au
plus 1 heure ; modifications d'équipements en machine sans remise en question du niveau de
service ou de l'ouverture à la vente de la gare), dont, de plus, la Région doit être tenue informée.
Les modifications plus importantes entrent, elles, dans le cadre de la redéfinition annuelle des
services et elles nécessitent donc l'accord express de l'autorité organisatrice des transports.
L'intégration du niveau de service en gare dans les critères d'évaluation de la qualité est
pertinente. En effet, malgré le développement par la SNCF d'une offre de commercialisation «à
distance» (téléphone «ligne directe» et, plus récemment site Internet avec possibilité d'obtenir
l'envoi à domicile des titres de transport), la clientèle demeure, en France, attachée au système
de guichets. La Lorraine ne fait pas exception, puisque les recettes réalisées aux guichets des
gares et boutiques SNCF sur le périmètre du TER Lorraine représentent 81 % en 2001 et 80 % en
2002 des recettes commerciales (hors compensations) tous canaux de distribution confondus.
Cependant, les résultats commerciaux obtenus par les différents points de vente présentent des
situations très différenciées : forte concentration des ventes sur les villes principales et extrême
atomisation sur le reste du territoire de la Région. En 2002, sur soixante-trois points de vente, cinq
gares (Metz, Nancy, Pont-à-Mousson, Thionville, Epinal) assuraient à elles seules 46 % des
ventes et seuls six autres points de vente dépassaient le taux de 2 % des ventes. Ces données
semblaient structurelles, puisqu'en 2003, sur soixante-deux points de vente, les cinq mêmes
gares drainaient 45 % des ventes et les mêmes six autres points de vente présentaient une part
des ventes inchangée par rapport à l'exercice précédent.
Cette répartition, pour fidèle qu'elle soit de la répartition de la population et de l'activité sur le
territoire Lorrain, n'est cependant pas sans conséquences sur les coûts du service. Un maillage
commercial aussi fin, pour des recettes parfois extrêmement faibles (en 2003, vingt points de
vente sur soixante-trois, soit presque le tiers, réalisaient chacun moins de 1 % des ventes) et dont
le rapport coût/efficacité est à évaluer, a des incidences financières sur les comptes du TER
Lorrain. Cette appréciation est particulièrement vraie par les boutiques SNCF, si l'on considère les
résultats obtenus : aucune, même celles situées à Nancy ou à Metz, ne réalise plus de 1 % des
ventes.
Dans sa réponse aux observations provisoires de la Chambre dans ce domaine, la SNCF affirme
que «d'une part le surdimensionnement mentionné doit être relativisé, puisqu'il répond à une série
de contraintes liées à l'organisation de l'exploitation ferroviaire ; d'autre part, le faible niveau de
recettes enregistré dans un grand nombre de petites gares régionales est une caractéristique du
service public régional de transport de voyageurs. Consciente de cette situation, la SNCF est
amenée à proposer des évolutions dans l'organisation de la distribution en gare (horaires
d'ouverture, vente par automate par exemple). Elle doit pour ce faire prendre en compte les
orientations politiques de l'Autorité Organisatrice qui peuvent notamment s'exprimer par des
exigences de maintien du service public en zones diffuses».
B -Les partenariats intermodaux, interrégionaux et transfrontaliers
*** Les coopérations transfrontalières :
Avec le Luxembourg : Le partenariat entre Région, Grand Duché, SNCF et CFL (chemins de fer
luxembourgeois) est ancien et il a été marqué, depuis les années 1990, par six réalisations
importantes dans des domaines variés : accroissement des relations, correspondances
intermodales à Luxembourg, création d'arrêts supplémentaires, aménagement de haltes
ferroviaires (Hettange-Grande en 2000, Volmerange-lès-Mines en 2003), tarifications intermodales
réciproques (abonnement Flexway en 1993, par exemple). Cette coopération s'est concrétisée par
la signature le 10 avril 2001 d'un protocole entre le Grand Duché et le Conseil Régional de
Lorraine.
Avec le Land de Sarre : Sur la base d'un protocole signé le 30 novembre 2000 entre le Conseil
Régional de Lorraine et le Land de Sarre, des opérations communes ont été menées à bien, telles
que l'acquisition coordonnée de nouveaux matériels roulants (autorails polyvalents de type
X73900, capables de rouler sur les deux réseaux), la tarification multimodale transfrontalière
(Abonnement Flexfahrt en 2003) et des études relatives à l'extension éventuelle du tram-train de
l'agglomération de Sarrebruck vers Forbach et le bassin houiller lorrain.
Si l'on se réfère aux dispositions de l'article 133 de la loi SRU, il apparaît que «La Région peut, le
cas échéant, conclure une convention avec une autorité organisatrice de transport d'une région
limitrophe d'un Etat voisin pour l'organisation de services ferroviaires régionaux transfrontaliers de
voyageurs dans les conditions prévues par le code général des collectivités territoriales et les
traités en vigueur. A défaut d'autorité organisatrice de transport dans la région limitrophe de l'Etat
voisin, la Région peut demander à la Société nationale des chemins de fer français de conclure
une convention avec le transporteur compétent de l'Etat voisin pour l'organisation de tels services
transfrontaliers.".
Au cas d'espèce, les dispositions de l'article L1112-5 du code général des collectivités territoriales,
selon lesquelles «Aucune convention, de quelque nature que ce soit, ne peut être passée entre
une collectivité territoriale ou un groupement et un Etat étranger. «étaient donc applicables. Il ne
semble donc pas la Région Lorraine avait compétence pour contracter avec le Grand Duché, Etat
souverain.
Le président du conseil régional, dans sa réponse aux observations provisoires de la Chambre,
présente sur ce point une analyse différente : «Le partenariat développé avec le Luxembourg /.../
ne s'appuie pas sur une convention entre le Conseil Régional de Lorraine et l'Etat du Grand
Duché de Luxembourg, mais sur un protocole-cadre sans transaction financière directe entre les
parties".
*** Les coopérations interrégionales
Elles sont pour l'heure très largement couvertes par l'offre grandes lignes de la SNCF. Cette
dernière a cependant prévu de supprimer la quasi-totalité des liaisons Est-Ouest lors de la mise
en service du TGV Est. Il en résulte que les TER interrégionaux devraient venir compléter l'offre
en dessertes notamment entre Châlons et Nancy, Strasbourg et Nancy, Châlons et Metz. Au delà
des partenariats à développer dans cet objectif avec les régions Champagne-Ardennes et Alsace,
la Lorraine entend également adapter l'axe TER nord-sud Nancy-Epinal-Belfort, avec une possible
extension vers Dijon, dans le cadre de la mise en service du futur TGV Rhin-Rhône. De tels
partenariats sont prévus par l'article 21-5 de la loi LOTI, inséré par l'article 133 de la loi SRU.
*** La coopération intrarégionale
A l'initiative de la Région, la coopération intra régionale, bien que peu développée pour l'heure,
repose sur des coopérations ponctuelles déjà engagées. Elle semble cependant s'orienter vers
une coordination plus forte. En effet, en 2003, une charte pour le développement de l'inter
modalité des transports collectifs en Lorraine a été élaborée en collaboration avec les vingt-trois
autorités organisatrices de transport de Lorraine. Seize d'entre-elles ont, à ce jour, ratifié cette
charte. Cet engagement vise la coordination des différents modes et réseaux de transport, la
diffusion réciproque des informations relatives aux différents réseaux, un projet de tarification et
de billettique intermodale («carte orange lorraine» avec un protocole d'interopérabilité des
systèmes billettiques en Lorraine approuvé en octobre 2004 par le Conseil régional et signé
depuis par douze AOT lorraines.
La charte pour le développement de l'inter modalité des transports collectifs en Lorraine est
conforme à la loi SRU. Cette loi ne prévoyait pas de possibilité de subdélégation de la
compétence exclusive accordée à l'AOT régionale en matière de transports ferroviaires et routiers
de substitution, mais elle ouvrait la porte au développement de coopérations intermodales sur la
base d'un syndicat mixte ou de coopérations conventionnelles (partenariats spécifiques). Aucun
syndicat mixte n'a pour l'heure vu le jour en Lorraine, mais la charte pourrait, s'il était un jour
envisagé de créer une telle structure, en préfigurer l'ossature. En revanche, en matière de
reconfiguration des périmètres de services routiers, aucune redistribution n'a été opérée,
notamment entre la Région et les départements. En 2001, la Région envisageait pourtant la
possibilité, dès la régionalisation, d'intégrer certaines lignes d'autocars dans le réseau TER et, à
l'inverse, de reverser les transports routiers de proximité aux départements.
Dans sa réponse aux observations provisoires de la Chambre, le président précise qu' «une
première redistribution est bien intervenue conformément à l'enjeu identifié. Le Département de
Meurthe-et-Moselle a ainsi décidé de prendre à sa charge, en 2003, l'ancienne ligne routière
régionale Nancy/Château-Salins, dont les scolaires vers Nancy représentaient près de 80 % des
usagers".
C - Contrôle qualité et système d'intéressement
Pour le suivi et le contrôle de la qualité des prestations fournies par le service, la Région Lorraine
a mis en oeuvre une démarche originale. Anticipant sur la prise de compétences au 1er janvier
2002, la Région a décidé, en juin 2001, de créer un observatoire de la qualité des services
ferroviaires régionaux de voyageurs. Fidèle à la règle retenue antérieurement d'externalisation en
matière d'étude et de conseil, la Région a eu recours à des prestataires extérieurs pour la
réalisation des enquêtes statistiques et de mesure.
A l'automne 2001, une première étude a visé à constituer un référentiel de la qualité produite sur
le réseau ferroviaire régional avant la mise en oeuvre de la convention selon trois axes, à savoir la
qualité à bord des trains sur les lignes, la qualité dans les gares et celle du matériel roulant.
L'indice de satisfaction global de référence a ainsi été arrêté à 85,01 % pour 2001 et l'annexe à la
convention de 2002 a fixé un objectif de 86 % pour cet exercice. La mesure de la qualité perçue a
été effectuée par le biais d'interviews et de questionnaires clientèle. 800 interviews d'une
soixantaine de questions ont ainsi été réalisées, pour moitié en gare grandes lignes, pour moitié
en gares régionales. La mesure de la qualité produite (conformité) a été faite au moyen de
mesures réalisées par des enquêteurs mystères, sur huit champs d'observations : information,
accueil, propreté, maintenance et fonctionnement des équipements, ponctualité, confort du
matériel roulant, réalisation du service, inter modalité. Six vagues d'enquêtes ont été réalisées, sur
un rythme bisannuel, de 2002 à 2004
Ces contrôles, initialement réalisés par la société EFFIA, ont été, pour la période 2002-2004,
confiés au cabinet BVA, la première société conservant la responsabilité d'enquêtes thématiques
portant, chaque mois depuis septembre 2003, sur la ponctualité des trains circulant sur l'axe
principal Nord-Sud Nancy-Metz-Thionville-Luxembourg. Ce contrôle de la qualité, qui s'appuie sur
des normes reconnues, est pris en compte dans la définition des actions engagées par le conseil
régional en matière de transport ferroviaire. Chaque année, il est rendu compte à l'assemblée
régionale des résultats obtenus, avec analyse des écarts éventuels constatés, et les objectifs
relatifs aux taux de conformité à atteindre durant l'exercice à venir sont négociés et
contractualisés dans chaque avenant annuel de la convention. Ce dernier point a, pour ce qui
concerne la qualité produite, une incidence financière directe sur la conduite de la convention,
puisqu'il sert de base à l'appréciation de l'intéressement de l'exploitant à la qualité, au moyen d'un
système de bonus/malus. Basé sur des objectifs chiffrés mis à jour et renégociés chaque année,
le contrôle de la qualité est donc confié à des consultants qui travaillent sur la base de normes
reconnues et les résultats de ce contrôle font l'objet d'une exploitation.
Les articles 47 à 51 de la Convention Région-SNCF du 8 mars 2002 ont instauré un système
développé d'intéressement de l'exploitant. En fonction des résultats obtenus au cours de
l'exercice, confrontés aux objectifs fixés contractuellement, celui-ci se voit appliquer un bonus, en
cas de dépassement significatif des objectifs et un malus dans le cas contraire. Le décompte
s'effectue au regard des réalisations constatées dans quatre domaines :
* Article 48 : Un malus est applicable en cas de déficience dans la réalisation du service, c'est-à-
dire quand le nombre de trains supprimés ou en retard de plus de 30 minutes dépasse une
franchise de 2 % du total des trains ou cars-kilomètres annuels du service de référence. La SNCF
fournit mensuellement à la Région un suivi précis des retards et des suppressions (avec ou sans
substitution) ;
* Article 49 : La qualité du service, mesurée comme cela été indiqué précédemment dans les
gares et trains, peut donner lieu à un bonus/malus ;
* Article 50 : La SNCF est intéressée à l'évolution du trafic par un système de bonus-malus, en
fonction des résultats obtenus comparés à des objectifs-cadres de croissance annuelle de la
fréquentation, définis par référence à ceux arrêtés aux schémas de services collectifs établis au
printemps 2001 (soit 4 % sur les lignes principales et 2 % sur le reste du réseau), mais inscrits à la
convention pour la moitié de leur valeur (2 % et 1 %) ;
* Article 51 : L'évolution des recettes est, elle aussi, placée sous un système de bonus-malus.
Un tel système existait déjà dans la convention signée entre la Région et la SNCF pour les
années 1997 à 2001, en ce qui concerne les interruptions de service (article 24) et la mesure de la
qualité (article 7.3). Il a pu être vérifié qu'il était effectivement appliqué, par réfaction ou ajout au
décompte définitif produit par la SNCF pour la facturation de la contribution financière régionale.
En revanche, il est à souligner qu'un récapitulatif des résultats obtenus et de leur incidence
financière n'apparaît pas de façon détaillée dans les rapports d'activités annuels produits par
l'exploitant conformément à l'article 63 de la convention. Si les décomptes définitifs qui y figurent
affichent bien les intéressement sur recettes (recettes de 199 613 euros pour l'année 2002 et 703
426 euros pour 2003), ainsi que sur l'évolution du trafic (recette de 75 000 euros pour 2003), les
boni-mali relatifs à la qualité et à la réalisation du service ne sont pas présentés. Or, la mention
des boni-mali effectifs constitue un bon indicateur des résultats qualitatifs d'ensemble obtenus par
l'exploitant, notamment s'ils sont commentés quant à leurs faits générateurs et, à ce titre, ils
pourraient utilement figurer au rapport d'activité annuel.
Par ailleurs, la convention prévoit à son article 52 des pénalités en cas de retard dans la
production, par la SNCF ou par la Région, des documents d'information à fournir au cocontractant
(voir annexe 13 à la convention - page 326). Ces pénalités n'ont jamais été appliquées depuis la
mise en oeuvre de la convention. Interrogée à ce sujet, la Région a confirmé que ces pénalités ont
été abandonnées en pratique en raison du climat de confiance, de communication et de respect
mutuel régnant entre l'AOT et son délégataire. Cette entente, gage du bon fonctionnement du lien
conventionnel, ne saurait cependant expliquer l'abandon d'une obligation contractuelle. Si une
telle précaution est jugée d'une sévérité excessive par les deux parties, il conviendrait de la retirer
du dispositif conventionnel, à l'occasion d'un futur avenant.
Enfin, lors du contrôle, la Région a signalé que l'observatoire de la qualité ne sera pas reconduit
en 2005, du fait de l'engagement pris en 2004 par SNCF d'obtenir une certification NF service sur
la ligne Metz-Nancy avec une extension progressive sur l'ensemble du réseau Métrolor. Un comité
tripartite Conseil Régional, associations de consommateurs et SNCF a été constitué pour définir le
recueil des engagements de service correspondants, lequel devrait s'articuler autour de champs
d'analyse de la qualité semblables à ceux précédemment déterminés par la Région.
En raison de l'incidence financière des résultats concernant la qualité obtenus par l'exploitant, il
serait sans doute utile, quel que soit le référentiel retenu, de maintenir une forme de contrôle
contradictoire. En effet, même si son coût n'est pas négligeable (le marché BVA 2002-2004
représente une dépense TTC de 128 928,80 euros), l'intervention d'un organisme extérieur
indépendant constitue pour la Région une source d'information fiable. Ce recours lui donne
également le moyen de valider les boni/mali imputés au compte d'exploitation annuel.
Le président du conseil régional, dans ses réponses aux observations provisoires de la Chambre,
signale que «les boni relatifs à la qualité n'ont pas lieu de figurer dans les décomptes définitifs, car
les résultats se situaient en deçà du seuil conventionnel qui les déclenchait» et «Pour ce qui
concerne la réalisation du service et la ponctualité, l'application des formules retenues n'a
occasionné aucun bonus/malus en 2002». La Chambre précise à cet égard que son observation
souligne l'intérêt qu'il y aurait à voir adjoints aux rapports d'activité annuels, un point sur les
résultats obtenus par rapport aux objectifs fixés, en matière d'évolution de l'activité, des recettes et
de la qualité du service. Cette précision serait utile que lesdits résultats aient emporté une
incidence financière en termes de boni/mali, ou pas. L'absence même d'un tel impact financier est
en effet, en soi, une information de gestion intéressante et susceptible d'être commentée et
comparée entre N et N-1, voire sur plusieurs exercices.
D - La concertation
La loi SRU a prévu la création facultative de deux types d'organes de concertation. L'article 124
de la loi SRU autorise la création un comité régional des partenaires du transport public. Le
Comité du Suivi du schéma régional des transports, créé en 1998, a évolué en Comité Lorrain des
partenaires des transports publics de voyageurs le 17 décembre 2001. Sa composition est
conforme à la loi et il offre même une plus grande diversité dans sa composition. Il fait l'objet de
l'article 35 de la convention Région-SNCF.
L'article 135 de la loi SRU permet, lui, la création de comités de lignes. Des «comités de
dessertes territoriales», au nombre de sept, ont ainsi vu le jour en Lorraine en 2002. La Région a
choisi, au terme d'un débat auquel ont été associées les associations d'usagers, ce concept plutôt
que celui de «ligne» afin notamment de rationaliser le travail sur des secteurs desservis par
plusieurs lignes et afin d'assurer une «réelle représentativité», sans «hiérarchisation des
territoires» (plan de développement du transport régional de voyageurs, mars 2002). Le principe
de leur création et la définition de leur rôle avaient été actés à l'article 36 de la convention.
Ces comités sont actifs et ils se réunissent régulièrement. Ils remplissent leur rôle de force de
proposition par le biais de fiches de liaison à destination de l'AOT régionale, laquelle est
représentée dans chacun d'entre eux par un de ses vice-présidents. A la consultation des sites
Internet de certaines associations d'usagers, il apparaît que le dialogue qui leur est proposé est
apprécié, même si de nombreux sujets semblent avoir donné lieu à des débats animés. Il semble
d'ailleurs que la récente entrée en service de matériels rénovés ait contribué à améliorer
largement l'appréciation des usagers et donc, celle des associations qui les représentent. Par
ailleurs, le traitement et le suivi des réclamations des usagers par la SNCF font l'objet d'un
compte-rendu analytique trimestriel, conformément à l'article 28 de la convention de 2002.
5.3.1.3. L'adaptation de la convention aux prescriptions de la loi du 13 août 2004 : le schéma
régional des infrastructures et des transports
Si, en matière de transports, la loi relative aux libertés et responsabilités locales du 13 août 2004
concerne surtout les départements, elle a néanmoins confié aux régions la responsabilité
d'élaborer un schéma régional des infrastructures et des transports (SRIT). L'idée d'un document
de synthèse et de coordination de cette nature n'est pas nouvelle. Les premiers schémas
régionaux des transports ont en effet vu le jour, dès 1974 dans trois régions, dont la Lorraine.
Cette première initiative s'était poursuivie en Lorraine jusqu'à l'approbation en 1996 du schéma
régional de transport de Lorraine, lequel a servi de référence au cours de la convention de
partenariat conclue entre la Région et la SNCF de 1997 à 2001.
A cette date, et en vue de la régionalisation au 1er janvier 2002, le schéma a fait l'objet de
nombreux rapports, études et débats afin d'intégrer les incidences de la loi SRU du 13 décembre
2000. Ces travaux ont permis l'édition de documents de référence fondamentaux tels les
orientations stratégiques de juin 2001, le plan de développement du transport régional de
voyageurs de mars 2002 et le schéma intermodal de développement des transports,
infrastructures et de la logistique en Lorraine de décembre 2003. Ces documents illustrent qu'une
analyse stratégique approfondie et évolutive, s'appuyant sur une connaissance approfondie du
service, a été conduite. Sur ces bases, la Région a engagé, en octobre 2004, la réalisation du
nouveau schéma régional des infrastructures et des transports. Si ce schéma a été mis en
chantier quelques semaines après la loi qui en confiait la réalisation à la Région, il n'est pas, à
l'heure actuelle, achevé.
Le projet en cours ne traite pour l'instant que des infrastructures routières, deux autres phases
d'étude et de débat étant cependant prévues. La première concernera les transports ferroviaires
de voyageurs et elle est prévue pour mi 2005. Elle a d'ailleurs déjà fait l'objet d'un rapport d'étude,
présenté au conseil économique et social, ainsi qu'à l'assemblée délibérante, respectivement les
11 et 17 mars 2005. Cette phase concernant le TER voyageurs sera suivie du volet fret (tous
vecteurs), en vue de la réalisation en final d'une synthèse intermodale. La Région souligne que,
même incomplet, le SRIT lorrain est en avance sur de nombreuses régions. Au 7 avril 2005, sur
une quinzaine de régions participantes à une réunion de l'Association des régions de France,
seule la Lorraine avait engagé le processus prévu par la loi.
5.3.2. Les services transférés
5.3.2.1. La consistance des services transférés
La loi SRU a confié à la Région, en qualité d'AOT, l'organisation des transports collectifs «d'intérêt
régional». Une telle notion, relativement générale (la portion d'une ligne TGV reliant deux villes
d'une région représentant indéniablement un «intérêt régional»), devait être précisée afin de
définir la consistance des services transférés. Le décret n° 2001-1116 du 27 novembre 2001,
relatif au transfert de compétences en matière de transports collectifs d'intérêt régional, dans son
article 1er, a défini plus précisément le périmètre des services transférés à la compétence
régionale. Lorsque la Région a conclu une convention avec la SNCF (cas de la Lorraine), les
services ferroviaires faisant l'objet de la convention et, le cas échéant, les services assurés par les
express d'intérêt régional qui, sans être couverts par la convention, figurent au compte attesté de
la SNCF au titre de l'exercice 2000 ainsi que les services routiers créés pour remplacer en tout ou
en partie des services ferroviaires supprimés et qui figurent au compte attesté de la SNCF au titre
de l'exercice 2000, sont concernés.
En Lorraine, la consistance des services transférés, qui se comprend en pratique comme un
ensemble de liaisons ferroviaires et routières et les matériels roulants destinés à les desservir, qui
figure en annexe de la convention du 8 mars 2002 et objet d'un arrêté conjoint du ministre chargé
des transports et du ministre de l'Intérieur, est conforme à la typologie définie par le décret. Sur
cette base de services transférés, la politique régionale en matière de développement de l'offre a,
depuis lors, fait l'objet d'une mise à jour régulière lors de réunions de travail bisannuelles
consacrées à l'harmonisation des dessertes. Cette concertation préalable, conforme à l'article 39
de la convention, consiste à examiner les projets de modifications de l'offre tant régionale que
nationale (pour la partie intéressant la Lorraine), leur effet sur les dessertes demeurant du ressort
de la SNCF et les modifications nécessaires à la compatibilité TER-grandes lignes, notamment en
matière de correspondances.
Ce système de concertation opérationnelle fonctionne de façon satisfaisante en Lorraine et les
évolutions des dessertes font systématiquement l'objet d'un avenant ad hoc à l'annexe de la
convention décrivant la partie «liaison» des services transférés.
5.3.2.2. Les transports routiers de substitution
Comme cela a été indiqué, les transports routiers de substitution ont été inclus, à bon droit, dans
la consistance des services transférés à la Région Lorraine, suivant probablement en cela les
recommandations du cabinet LATOURNERIE, WOLFROM & ASSOCIES. Ce rapport du 4 mai
2001, relatif au volet n° 1 de l'étude juridique sur le TER Lorraine dans le cadre de la
décentralisation des transports ferroviaires régionaux de voyageurs (pages 5 à 8), estimait que le
législateur avait «probablement» souhaité que les transports routiers de substitution soient
intégrés au corpus conventionnel et ce «pour des raisons de texte et de cohérence de la politique
des transports régionaux».
Cependant, cette inclusion des transports routiers de substitution dans le champ conventionnel de
régulation de l'exploitation des services régionaux de transports de voyageurs n'emportait pas
nécessairement la dévolution de leur exploitation à la SNCF dans le cadre du monopole que la loi
SRU du 13 décembre 2000 lui accorde. En effet, l'article 21-4 de la loi LOTI, tel qu'il résulte de
l'article 129 de la loi SRU, prévoit qu'"une convention passée entre la Région et la Société
nationale des chemins de fer français fixe les conditions d'exploitation et de financement des
services ferroviaires relevant de la compétence régionale". Il semble donc réserver aux seules
lignes de chemin de fer une telle dévolution. Cette analyse est confortée par le décret
d'application susmentionné qui stipule en son article 3 que «La convention entre la Région et la
SNCF /.../ précise les engagements respectifs de la Région et de la SNCF, chargée par la Région
de l'exploitation des services ferroviaires régionaux de voyageurs transférés".
Enfin, la circulaire conjointe des ministres de l'Intérieur et de l'Equipement, des Transports et du
Logement du 5 décembre 2001, qui traite du transfert de compétence aux régions de
l'organisation et du financement des services ferroviaires régionaux de voyageurs, vient confirmer
cette interprétation. Elle souligne qu'il n'y pas d'obstacle «à ce que la Région puisse désigner la
SNCF pour l'exploitation de ces services routiers dès lors que cette désignation intervient dans le
respect des règles de la concurrence». Or, il apparaît que la convention signée par le Conseil
Régional et la SNCF le 8 mars 2002 désigne précisément, en ses articles 9 et 17 la SNCF comme
exploitant exclusif des services routiers de substitution «avec les moyens qu'elle juge appropriés,
sous sa seule responsabilité». Il n'y a donc pas eu, à cet égard de mise en concurrence. La SNCF
a disposé là d'un monopole dans l'exploitation desdits services avec ses propres moyens,
monopole que la loi ne lui accordait pas.
Dans sa réponse aux observations provisoires de la Chambre, la SNCF signale que «son
intervention dans l'attribution et la gestion des services routiers repose sur une volonté commune
des parties d'intégrer cette mission dans le périmètre de la convention TER du 18 mars 2002,
dans un souci d'efficacité du service public rendu aux voyageurs, compte tenu de la charge de
travail correspondante, et d'absence de rupture des contrats en cours avec les transporteurs
routiers".
L'annexe 1 de la convention 1997-2001 présente la situation contractuelle de vingt-deux lignes de
liaisons routières TER avant le transfert de compétence. Ces liaisons font l'objet de vingt-trois
contrats de sous-traitance conclus par la SNCF. Ces contrats concernent six sociétés différentes,
avec une forte prédominance de la société CARIANE EST, titulaire de quinze d'entre d'eux. Les
plus récents contrats sont datés du 12 juillet 1997, mais le plus ancien remonte à août 1973 (ligne
Remilly-Sarrebourg, CARIANE EST). Dix-sept d'entre eux sont des contrats d'un an
renouvelables, ce qui implique, compte tenu de leur ancienneté, qu'il s'agit en l'espèce d'une tacite
reconduction. Enfin, seize d'entre eux reposent sur de simples lettres d'accord. Nombre des
caractéristiques de l'ensemble contractuel ainsi constitué avec la SNCF ne répondent donc
d'évidence pas aux principes permettant de garantir une mise en concurrence réelle et
transparente.
A la signature de la convention du 8 mars 2002, la SNCF semblait présenter toutefois une
situation plus conforme aux exigences d'une mise en concurrence véritable. L'annexe 5 de la
convention de 2002 décrit les liaisons routières de substitution. Le tableau présenté (page 298)
permet de constater que les vingt-deux lignes d'autocars (vingt-et-un) ou de taxi (un)
conventionnées à l'origine ont été effectivement transférées. Elles sont référencées au sein du
tableau par des «marchés», dont les numéros sont précisés. De plus, la diversité des
cocontractants s'est accrue (ils sont désormais au nombre de quatorze) et la société CARIANE,
légèrement moins présente (titulaire ou co-titulaire sur douze lignes). Le plus ancien contrat date
de novembre 1996. Enfin, les années au cours desquelles la remise en concurrence par «appel
d'offre» des lignes doit intervenir, sont également mentionnées, sauf pour la ligne Thionville-
Apach, dont la convention est pourtant datée de décembre 1996.
Cependant, malgré cette apparente amélioration, la véritable nature des procédures d'appel
d'offres suivies pour conclure ces marchés n'est pas précisée. Il est donc difficile d'apprécier la
réalité et la portée réelle de la mise en concurrence réalisée. En outre, certains de ces «marchés»
présentent des informations qui laissent à penser qu'ils sont demeurés sous leur ancien régime
contractuel :
La convention comprend également des clauses permettant à la Région de répondre aux
exigences de la mise en concurrence, soit en rompant le monopole d'exploitation de la SNCF, soit
en s'assurant à tout le moins que l'exploitant observe les règles de mise en concurrence. Ainsi, la
Région peut décider de prendre elle-même en charge le conventionnement des transporteurs, à
l'occasion d'une révision du plan de transport ou à l'échéance des contrats passés entre la SNCF
et ses sous-traitants (article 9 de la convention). La Région peut également contrôler les
conditions de renouvellement ou de prorogation des contrats souscrits par la SNCF et les
transporteurs, qui doivent aux termes de l'article 9 de la convention faire l'objet d'un accord
préalable de sa part (article 9 de la convention) «/.../quant aux procédures de consultation /.../»
(article 17 de la convention) ;
La Région semble d'ailleurs avoir pris conscience de l'irrégularité de cette situation d'ensemble,
puisqu'elle a adressé un courrier à la SNCF en septembre 2003, à la suite des conclusions du
cabinet LANDWELL. Cette lettre signifiait à l'exploitant qu'il devait reprendre l'organisation des
appels d'offre pour l'exploitation des lignes routières de substitution TER. Un avenant à la
convention TER est donc envisagé. Cependant, aucun des avenants ultérieurs (5e de décembre
2003, 6e de janvier 2004 ou 7e de novembre 2004) ne traite effectivement de cette question. Il
importe donc de régulariser cette situation dans les meilleurs délais.
Par ailleurs, il ressort des pièces comptables qu'une ligne d'autocars interurbaine est
conventionnée et financée en direct par la Région (Nancy-Château Salins). Les dépenses pour la
réalisation de ce service étaient, en 2001, de 800 009,83 F (121 960,71 euros), en incluant la
couverture des pertes de recettes liées à l'acceptation, par l'exploitant de la carte de réduction
départementale à 50 % du plein tarif. Or, le troisième avenant à la convention du 7 mars 1994
pour la gestion de la ligne entre la Région et la société» Rapides de Lorraine-Cariane Est», conclu
le 13 novembre 2001, concernait la prorogation de ladite convention pour une durée d'un an, en
dehors de tout appel à la concurrence.
Dans sa réponse aux observations provisoires de la Chambre, la SNCF précise que les
attributions de marchés d'affrètement s'appuient «sur la mise en oeuvre par la SNCF de la
procédure de sélection des prestataires et d'attribution des marchés qui lui est applicable au titre
des règles de mise en concurrence communautaire".
La Région Lorraine quant à elle précise, dans sa réponse, les contrôles dont elle dispose en la
matière à savoir : La communication, par la SNCF, du projet de contrat et du cahier des charges
fonctionnel et ses annexes spécifiques, puis d'une copie du dossier de consultation établi sur la
base des ces documents. La Région est également «invitée à assister au dépouillement des
dossiers de candidature et à la commission d'ouverture des appels d'offres de la SNCF", à l'issue
de laquelle «une dernière concertation entre le Conseil Régional et la SNCF peut être engagée,
de manière à décider du choix final de l'attributaire du marché". La Région est enfin destinataire
d'une copie du dossier complet, après signature du contrat d'affrètement. La Région confirme par
ailleurs qu'elle s'est engagée dans «la préparation de la prise en charge du conventionnement
direct des transports routiers à l'occasion de l'expiration des contrats d'affrètement SNCF prévue
fin décembre 2006".
5.3.3. Financement des charges transférées et des nouvelles charges
5.3.3.1. Le principe de compensation
Le principe de la compensation par l'Etat des charges induites par les transferts de compétences
s'applique en matière de régionalisation des TER. L'article 125 de la loi SRU (codifié à l'article
L1614-8-1 du code général des collectivités territoriales) en a posé les bases. Sont ainsi prévues
une contribution pour l'exploitation des services transférés, une dotation complémentaire pour le
renouvellement du parc de matériel roulant affecté aux services transférés et une dotation visant à
compenser les tarifs sociaux mis en oeuvre à la demande de l'Etat
L'article 128 de la même loi prévoit l'engagement de l'Etat de soutenir financièrement la
rénovation des gares régionales dans le cadre d'un programme quinquennal. Au delà de la
participation de l'Etat ainsi définie, et de ses dispositions de révision prévues aux derniers alinéa
de l'article 125 susvisé, la loi SRU a également prévu une forme d'adaptation de sa participation.
L'article 127 dispose que "Les modifications des services d'intérêt national, liées à la mise en
service d'une infrastructure nouvelle ou consécutives à une opération de modernisation
approuvée par l'Etat et qui rendent nécessaire une recomposition de l'offre des services régionaux
de voyageurs, donnent lieu à une révision de la compensation versée par l'Etat au titre du
transfert de compétences dans des conditions prévues par décret en Conseil d'Etat".
Cette disposition devrait trouver à s'appliquer en Lorraine lors de la mise en service du TGV Est,
prévue à l'horizon 2007. En effet, à cette date, la SNCF devrait procéder à la suppression de
lignes actuellement classées «grandes lignes» ou «interrégionales» au bénéfice des dessertes
TGV sur les mêmes axes. Une telle évolution pourrait amener la Région Lorraine à créer des
lignes TER ou interrégionales de remplacement, afin de maintenir un service d'intérêt régional à
un niveau dont elle a seule, de par la loi, l'appréciation. Le risque de surcoût d'un tel
accroissement de l'offre de service TER devrait, en l'espèce, rester limité pour la Région, pour
autant que la compensation financière que la loi impose à l'Etat de verser dans ce cas, soit
justement calculée. Le décret du 27 novembre 2001 prévoit à cet égard que la révision des
compensations versées par l'Etat sera fondée sur la base d'une évaluation du service disparu,
c'est-à-dire du nombre de kilomètres parcourus par les trains supprimés.
Evoquant un cas semblable et saisi d'une question orale parlementaire le 1er février 2005, le
secrétaire d'Etat aux transports et à la mer a précisé que l'article 127 de la loi SRU, ainsi que les
dispositions de l'article R1614-113 du code général des collectivités territoriales qui le complètent,
ont trouvé à s'appliquer lors de la mise en service du TGV Méditerranée, avec le versement de
compensations Etat supplémentaires à la région Rhône-Alpes (52 M.Euros), Provence-Alpes-Côte
d'Azur (44 M.Euros) et Languedoc-Roussillon (23 M.Euros).
5.3.3.2. La contribution pour l'exploitation des services transférés
Conformément à l'article R1614-109 du code général des collectivités territoriales, «Le montant de
la contribution qu'en application du troisième alinéa de l'article L1614-8-1 l'Etat verse à chaque
région pour l'exploitation des services transférés est égal à la somme nécessaire pour assurer
l'équilibre du compte attesté de la SNCF, au titre de l'exercice 2000, relatif aux services régionaux
de voyageurs de cette région, à l'exclusion des charges non récurrentes et après déduction de la
contribution propre de la région telle que déterminée ci-après : /.../ la contribution propre de la
région /.../ correspond aux concours financiers de la Région à la SNCF, figurant au compte attesté
de l'exercice 2000".
Ce montant devait donc représenter le déficit de l'activité TER tel que constaté au compte SNCF
2000 attesté par le cabinet Arthur Andersen :
* déduction faite de l'effort de la Région au cours cette même année de référence,
* hors charges ponctuelles (en l'espèce coût du passage à l'euro et dépenses d'audit externe),
* et indexé, conformément aux dispositions de l'article L1618-8-1 du code général des collectivités
territoriales, sur le taux d'évolution de la dotation globale de fonctionnement pour 2001 et 2002.
Sur ces bases, la part de la compensation financière versée par l'Etat destinée à financer le déficit
d'exploitation a été fixée initialement à 65 535 153 euros pour 2002. Selon la Région, cette
somme correspondrait aux prévisions inscrites au budget primitif 2002 (Plan de développement du
transport régional de voyageurs, p.43). Cependant, les bases de calcul de cette partie de la
contribution de l'Etat à la régions dans le cadre de la compensation des charges transférées
appellent des observations.
Outre les réserves quant à l'établissement du référentiel comptable 2000, évoquées
précédemment, il convient de noter que l'évaluation de la contribution propre des régions en 2000
a été menée en faisant masse de la totalité des contributions versées par les régions avant la
régionalisation. Or, les crédits consacrés par les régions au TER avant la régionalisation
comportaient des compensations pour des tarifs subventionnés par la Région, des participations à
l'entretien des infrastructures ou à l'acquisition de matériels, contributions qui n'avaient pas une
nature de subvention d'équilibre. De même, selon la Région lorraine, un amendement apporté à la
loi de finances rectificative pour 2004 (JO 30 décembre 2004) réduirait la contribution financière
de l'Etat en faveur de la Région, fixée par l'arrêté interministériel d'août 2002, de 4,47 M.Euros.
5.3.3.3. La dotation complémentaire nécessaire au renouvellement du parc de matériel roulant
affecté aux services transférés
Le dispositif retenu par l'Etat pour calculer la part de la compensation financière versée aux
régions dite «dotation complémentaire pour renouvellement des matériels roulants» repose sur les
bases de calcul suivantes :
* un parc de référence correspondant aux services effectués au cours de l'année 2000 ;
* une durée de vie des matériels fixée à trente ans ;
* une valeur moyenne nationale établie à 1 677 000 euros l'unité pour le matériel autotracté et à 1
143 000 euros l'unité pour le matériel tracté ;
* une équivalence de 1,25 voiture pour une voiture à deux étages ;
* une valorisation de 15 % du parc ainsi défini, représentant le financement d'une modernisation
du parc à mi-vie ;
* la déduction du montant annuel de dotation ainsi obtenu, des amortissements nets des reprises
de subvention.
Le parc de référence retenu par l'Etat pour la Lorraine, à la suite de l'attestation par le cabinet
Arthur Andersen des comptes SNCF du TER pour l'année 2000, se décompose en 175
automoteurs représentant 193 «caisses» (unités) ; 92 voitures tractées, représentant 74 caisses et
18 locomotives. La dotation qui a résulté de l'application à ce parc des règles de calcul prévues
s'est élevée à 10 881 491 euros pour 2002.
Si la mise en oeuvre des règles de calcul n'appelle pas d'observation particulière, les principes qui
ont guidé leur définition semblent, eux, plus contestables. La consistance des services transférés
s'entend, comme cela a déjà été indiqué, autant en termes de lignes que de matériel roulant voué
à les desservir. Or, le parc a été transmis en 2002 en Lorraine dans un état de vieillissement
avancé, présentant des risques en termes de disponibilité (il ressort des études statistiques
menées sur les retards et annulations de trains, que le matériel roulant en demeure très nettement
la principale cause), des surcoûts d'entretien-maintenance, un niveau de confort insuffisant et des
perspectives inquiétantes en terme de tassement de l'offre de places assises.
Ainsi, même à service constant, le rattrapage qualitatif aurait donc été en tout état de cause
nécessaire et urgent compte tenu des projections, déjà exposées, relatives à l'évolution du parc à
horizon 2006 et plus encore, 2015. La Région Lorraine entendait également marquer de façon
positive sa prise en charge de l'activité, par un développement de l'offre ferroviaire. La conjonction
de ces deux éléments ne pouvait avoir qu'un effet de progression des coûts. La valorisation du
parc des régions a été effectué sur une base complètement forfaitaire et non sur une évaluation
de la valeur unitaire réelle des matériels effectivement transférés. L'application de cette règle de
calcul unique, sous forme de moyenne, pour une région dont le parc était hétérogène et d'une
faible qualité moyenne ne pouvait avoir que des effets pénalisants.
Ainsi, en septembre 2004 (rapport «le matériel roulant ferroviaire en Lorraine : situation de
référence et programme pluriannuel d'acquisition et de modernisation», page 29 «récapitulatif
financier»), l'effort total de la Région Lorraine en faveur de la rénovation du parc de matériel
roulant s'élevait à plus 300 M.Euros sur la période 2002 à 2006 en prenant pour hypothèse une
actualisation des prix de base conventionnés de +2,5 % l'an, pour 55 engins acquis en propre et
41 modernisés. Sur la même période, la dotation complémentaire accordée par l'Etat à partir de
2002 et qui a vocation à s'étaler sur trente années, ne couvrait environ que le sixième de la
dépense.
5.3.3.4. La dotation de compensation des tarifs sociaux mis en oeuvre à la demande de l'Etat
La composante de la contribution financière de l'Etat relative à la compensation des tarifs sociaux
nationaux devait correspondre aux pertes de recettes induites par l'application des tarifications
préférentielles aux services d'intérêt régional.
Ces tarifs sociaux mis en oeuvre par la SNCF à la demande de l'Etat concernent :
* Les familles nombreuses ;
* Les handicapés ;
* Les billets populaires de congés annuels ;
* Les abonnements pour les élèves, étudiants et apprentis (AEEA) ;
* Les abonnements de travail ;
* La promenade d'enfants.
Les sommes transférées par l'Etat aux régions dans ce cadre ne comprennent pas les tarifs
consentis aux militaires, ceux-ci faisant l'objet d'une convention particulière entre le Ministère de la
Défense et la SNCF, au niveau national. Le calcul du montant de la compensation financière de
l'Etat à reverser aux régions est basé sur les données de l'année 2001, réparties par la SNCF
entre les différentes activités (grandes lignes, TER,...) au prorata des volumes de trafic et de
recettes. Dans ces conditions, il convient de relever la différence entre le montant de la
compensation prévu pour l'année 2002 sur des bases calculées par la SNCF (soit 12,5 M.Euros)
et celui qui figure au devis de la même année, présenté, également par la SNCF (soit 15,5
M.Euros). La différence, qui représente un manque à gagner pour la Région Lorraine de 20 %
environ des coûts facturés par l'exploitant, est sensible.
De fait, le décompte définitif pour 2002 (Rapport d'activité TER Lorraine 2002, Annexe 1) présente
une contribution pour tarifs sociaux nationaux imputée à la Région pour un montant de 14,7
M.Euros HT, soit 15,5 M.Euros une fois imputée la TVA à 5,5 %, ce qui laisse environ 3 M.Euros à
la charge de la Région. A ce propos, la Région indique avoir mené plusieurs démarches. Suite à
la communication par lettre du préfet de Région en date du 18 décembre 2001, du projet d'arrêté
fixant le montant de la compensation globale allouée aux régions, et dans le délai réglementaire
de deux mois laissé au conseil régional pour émettre un avis, le président du conseil régional de
Lorraine a signalé cet écart au représentant de l'Etat par courrier du 25 janvier 2002 et a émis le
souhait d'une rectification de la dotation lors des procédures de révision prévues par la loi. Puis,
par courrier du 15 février 2002, il a présenté au Premier ministre, ainsi qu'aux trois ministres
concernés (Economie, Finances et Industrie, Intérieur et Equipement), un recours gracieux sur les
mêmes bases. Enfin, les mêmes réserves ont été réitérées par courrier du 8 avril 2002 destiné au
ministre de l'Intérieur et au ministre de l'Equipement, portant avis sur les projets d'arrêtés
interministériels relatifs au montant de la compensation financière allouée pour l'année 2002. A ce
jour, la Région signale qu'il n'a pas été donné de suite favorable à ses demandes, sans que les
justifications de l'existence d'un tel écart non compensé ne soient données.
Cependant, la part de la compensation de l'Etat versée au titre des tarifs sociaux nationaux pour
les exercices 2003 et 2004 n'ayant pas été présentée, leur comparaison avec le montant du coût
inscrits aux comptes SNCF, soit respectivement 15,65 M.Euros (décompte définitif) et 15,49
M.Euros (devis prévisionnel), n'est pas, à ce stade, possible.
5.3.3.5. La contribution de l'Etat à l'effort de modernisation des gares à vocation régionale
Sur la base de l'inventaire du patrimoine et des propositions de programme de
rénovation/modernisation réalisé par le cabinet AREP pour le compte de la Région en 2001
(évoqué précédemment), l'assemblée délibérante a approuvé les 27 et 28 juin 2002, un
programme de rénovation et de modernisation des gares ferroviaires lorraines pour la période
2002 à 2006.
Ce programme, auquel sont associés les comités de desserte, ne semble cependant pas avoir
entraîné de réalisations pour l'année 2002, aucun mandat de dépense ne figurant aux pièces
comptables dans ce domaine pour cet exercice. Par ailleurs, ce n'est qu'en 2003 que l'Etat a mis
en oeuvre un début d'application de l'article 128 de la loi SRU, c'est-à-dire l'engagement pris de
soutenir financièrement la rénovation des gares régionales dans le cadre d'un programme
quinquennal. Une convention-cadre quadripartite entre l'Etat, le Conseil Régional de Lorraine,
RFF et la SNCF a été signée en octobre 2003 pour un coût estimatif total sur les cinq années de
8,2 M.Euros, pour l'hypothèse basse, et de 15,8 M.Euros dans l'hypothèse haute.
Bien que le recul nécessaire manque pour évaluer la mise en oeuvre de cette convention,
plusieurs observations peuvent toutefois être formulées.
Les engagements financiers sont de très loin inférieurs à l'évaluation formulée en 2001, qui allait
de 310 à 550 MF (soit de 47 ,26 M.Euros à 83,85 M.Euros). Or, il ne semble pas qu'un effort
financier significatif, qui seul pourrait expliquer une telle révision à la baisse des besoins, ait été
réalisé par les exploitants en 2001 et 2002. Dans ces conditions, si la Région devait poursuivre la
réalisation des objectifs et priorités définis en 2001-2002, elle aurait à faire face seule au
financement du reste du programme, soit dans le cas le moins coûteux (hypothèse haute des
travaux financés au travers de la convention cadre de 2003, hypothèse basse du programme de
travaux établi après l'inventaire de 2001) quelques 30 M.Euros.
Dans sa réponse aux observations provisoires de la Chambre, la SNCF signale que «les
propositions d'action de l'étude AREP mentionnée fournissent des propositions d'actions qui ne
correspondent pas nécessairement au minimum nécessaire à la pérennité du patrimoine gares ;
en outre, ces propositions ne tiennent pas compte des capacités de financement des partenaires,
contrainte fondamentale dans la contractualisation des études et travaux de modernisation.»
L'effort financier global serait d'autant plus significatif que déjà la part des travaux couverte par la
convention-cadre de 2003 et donc, cofinancée, reposera majoritairement sur la Région. En effet,
la répartition des niveaux de contribution financière décrite à l'article 12.1 de la convention-cadre
s'établit, pour les emprises ferroviaires, à 25 % pour la SNCF et 15 % pour RFF, dans les limites
de leur périmètre de maîtrise d'ouvrage, la participation de l'Etat demeurant incertaine ("l'Etat
pourra participer...") et régie par les modalités d'un document cadre du 6 janvier 2003. En ce qui
concerne les emprise d'accès et d'inter modalité, les engagements sont plus imprécis encore,
voire strictement limités : "la SNCF et RFF n'ont pas vocation à investir systématiquement sur les
emprises non ferroviaires, mais peuvent le cas échéant y participer au cas par cas (...)" ; "Pour ce
qui concerne les aménagements intermodaux, la participation de la SNCF (...) est plafonnée à 0,3
M.Euros".
Pour ce qui la concerne, la SNCF, dans sa réponse aux observations provisoires de la Chambre,
souligne qu'"en dépit de sa capacité d'autofinancement limitée,[elle] participe de façon
permanente, sur fonds propres, au financement des opérations relatives aux gares et pôles
d'échanges, à hauteur de 25 % des dépenses d'investissement. Elle assure pleinement son rôle
de maître d'ouvrage pour les opérations relevant de son périmètre et participe aux côtés de la
Région à la recherche de partenariats financiers complémentaires avec les collectivités locales".
Dans le cadre de cette convention la coopération est limitée, tant au vu de la faiblesse de ses
objectifs au regard des besoins identifiés, qu'en ce qui concerne la relative modestie des
engagements financiers consentis. Il faudra attendre, il est vrai, de connaître les résultats des
actions effectivement réalisées sur les exercices à venir, le programme ayant commencé avec
deux ans de retard (dans l'hypothèse de la réalisation effective d'une tranche en 2003). Toutefois,
en matière de rénovation des gares et haltes, la Région et les collectivités territoriales qui
accepteraient de s'engager à ses côtés, devraient être en première ligne et avoir à supporter ainsi
une charge financière importante.
Dans sa réponse aux observations provisoires de la Chambre, le président du conseil régional fait
état de «difficultés rencontrées dans la mobilisation des dotations annuelles de l'Etat (faiblesse
des montants/annonces + retard des affectations
, lesquelles ont entraîné la décision «à
l'occasion du vote du Budget Primitif 2005 du Conseil Régional d'adapter le mode opératoire initial
pour permettre une réalisation globalement plus rapide des chantiers et de mobiliser la
contribution attendue de l'Etat sur les projets les plus importants, sans péjorer les travaux à mener
sur les haltes TER de proximité».
5.3.3.6. Conclusion : estimation du bilan global de la régionalisation du transport ferroviaire de
voyageurs en termes de charges transférées
En définitive, il apparaît que la dotation d'exploitation versée par l'Etat a été assise sur des
comptes 2000 non complètement fiabilisés et notamment sur des points importants comme
l'inventaire des infrastructures. En outre, le parc de matériel transféré à la Région Lorraine
accusait un fort vieillissement, nécessitant un investissement régional immédiat et important, alors
que l'aide de l'Etat, calculée de surcroît sur un état moyen du parc global, s'étalera sur trente ans.
La dotation de compensation des tarifs sociaux nationaux est inférieure, au moins en 2002, aux
charges correspondantes imputées par la SNCF au compte d'exploitation du TER. Enfin, la
participation de l'Etat à la rénovation des gares semble sans commune mesure avec les besoins
identifiés par la Région.
Ainsi, à l'analyse, le système de compensation des charges transférées paraît présenter de
nombreuses insuffisances. Au demeurant, cet effort financier semble avoir pris en compte de
façon limitée le rattrapage qu'impose l'état médiocre des moyens transférés (gares et haltes,
réseau, matériel roulant). Il est vrai que le niveau de «suffisance» d'une telle mise à niveau est
sujet à débat et que la Région Lorraine a pris, dès 2002, des mesures en faveur de
développement qualitatif et quantitatif de l'offre, au-delà d'une simple reconduction à l'identique du
service préexistant. Dès lors, il s'avère difficile de distinguer précisément, au sein des dépenses
engagées par la Région Lorraine, ce qui serait rattachable à une nécessaire remise à niveau des
moyens transférés et aux dépenses nouvelles et supplémentaires dues aux décisions de
développement prises à l'initiative de la seule AOT régionale.
Cependant, il est possible d'avancer une estimation sur la période 2002 à 2006 en retenant la
méthode suivante. Il faut tout d'abord exclure le fait que les subventions autres que d'exploitation
versées par la Région avant le transfert de compétence n'auraient pas dû entrer dans le calcul et
donc, auraient dû abonder d'autant la dotation d'exploitation versée par l'Etat. Il importe également
de considérer que les investissements réalisés ou à réaliser par la Région Lorraine en matière de
matériel roulant ne sont compensés sur cette période quinquennale qu'au sixième par l'Etat, soit
une charge d'environ 250 M.Euros. Il convient ensuite de retenir la différence, inexpliquée, de 3
M.Euros entre le devis de la SNCF et les sommes effectivement transférées pour compenser les
tarifs sociaux nationaux, soit un manque à gagner annuel pour la Région sur ce poste de recette
d'environ 15 M.Euros au total. Enfin, il importe de retenir, pour ce qui concerne les gares,
l'hypothèse évoquée précédemment, représentant l'écart le plus faible entre les besoins évalués
en 2001 et les engagements financiers pris par convention quadripartite en 2003, soit environ 30
M.Euros. En définitive, il est possible d'estimer sur cinq ans à près de 300 M.Euros les dépenses
dont la Région devrait assumer seule le financement, sans compensation, à tout le moins
immédiate.
Certes, cette première période, qui suit immédiatement le transfert de compétence, ne devrait pas
être représentative du rythme moyen des dépenses sur le long terme, le rythme des
investissements baissant sans doute de façon significative par la suite. De même, l'essentiel de
ces dépenses relève des acquisitions et modernisations de matériels roulants, pour lesquelles la
compensation de l'Etat sera étalée sur trente années. En tout état de cause, il est certain que la
Région Lorraine a, depuis le transfert, adopté une stratégie volontariste de développement,
soutenue par un effort financier significatif. Ce choix a, compte tenu de son ampleur, une
incidence très significative sur les finances de la collectivités : en 2005, plus du tiers du budget est
consacré à la compétence ferroviaire.
5.4. Risques et enjeux futurs de l'action régionale en matière de transport ferroviaire,
5.4.1. Le rôle de RFF dans l'exercice des compétences régionales
5.4.1.1. Un partenaire ne participant pas au système conventionnel
La loi SRU ne prévoit pas d'intervention de Réseau ferré de France (RFF) en matière de
nouveaux services régionaux de transport de voyageurs, bien que cet établissement public
industriel et commercial en soit l'un des acteurs essentiels. En effet la séparation institutionnelle
entre infrastructure et services d'exploitation opérée en 1997 entre RFF et la SNCF a été peu
prise en compte dans la régionalisation. De fait, l'article 124 de la loi SRU mentionne que les
transports ferroviaires transférés sont «effectués sur le réseau ferré national». Or, ce réseau est
du ressort de RFF, maître d'ouvrage unique et la capacité des lignes, la disponibilité des sillons, la
qualité de la maintenance, les vitesses autorisées sont autant d'éléments déterminants de l'offre
de service.
Sur la question fondamentale de l'attribution des sillons (l'attribution d'un droit à circuler pour une
liaison ferroviaire, sur un itinéraire de réseau et à des horaires donnés, dont on retrouve une
forme comparable dans les créneaux d'exploitation dévolus aux compagnies aériennes sur un
aéroport), la loi renvoie à des arbitrages à rendre par le ministre chargé des transport, en cas de
désaccord entre les parties prenantes (Article 129, loi SRU/article 21-4 nouveau loi LOTI : /.../ «Le
ministre chargé des transports tranche les litiges relatifs à l'attribution des sillons ferroviaires /.../».
En tout état de cause, cette procédure de règlement ne concerne que les litiges qui pourraient
naître entre une région et la SNCF, cette dernière assurant la gestion de l'attributions des sillons
pour le compte de RFF, dans le cadre de ses missions de gestion du trafic et des circulations sur
le réseau ferré national et en application de l'article 1er de la loi du 13 février 1997 portant création
de l'établissement public Réseau ferré de France en vue du renouveau du transport ferroviaire.
Par ailleurs, la loi n'impose aucune obligation formelle de concertation entre RFF, la SNCF et les
régions en ce qui concerne les choix d'investissement sur le réseau et la définition des priorités de
financement. De même, aucune garantie n'est apportée ni aucun engagement pris quant à la
capacité et au niveau de qualité des infrastructures mises à disposition par RFF pour l'exécution
des services régionaux de transport de voyageurs. Ces infrastructures peuvent pourtant avoir une
incidence majeure sur le niveau des prestations fournies par la SNCF à l'AOT régionale et sur la
capacité de cette dernière à obtenir la réalisation effective de ses décisions en termes d'évolution
des services. La convention prévue par la loi SRU ne lie donc la Région qu'à l'un des deux
opérateurs concourrant à la réalisation du service régional de transport ferroviaire de voyageurs.
La SNCF demeure donc en position centrale dans le dispositif, avec d'une part, un lien
conventionnel avec l'AOT régionale et, d'autre part, une convention de gestion avec RFF. Au
regard des objectifs affichés par la loi LOTI modifiée visant au transfert d'une compétence pleine
et entière aux régions, cette absence de l'un des opérateurs nuit à l'efficacité du dispositif.
5.4.1.2. Un déficit d'information, des résultats à surveiller quant à l'évolution capacitaire du réseau
et une charge financière en progression
L'absence de lien contractuel entre la Région et RFF a des conséquences négatives dans les
domaines du contrôle de l'activité et de la réalisation des objectifs fixés pour le service, deux
compétences expressément conférées par la loi à l'AOT. N'ayant aucun lien contractuel avec
RFF, la Région en est réduite à demander les informations dont elle a besoin en termes de
capacité du réseau, sans assurance de les obtenir. A cet égard, le Conseil régional rapporte avoir
demandé dès avant la régionalisation (rapport d'orientation stratégiques de juin 2001, page 11) à
RFF de porter à sa connaissance le montant et la nature des opérations d'entretien-maintenance
conduites sur chacune des lignes ferrées lorraines. Il apparaît que cette requête, dont l'intérêt
pour une AOT ne fait pas de doute, n'a jamais été satisfaite.
Seul un état chiffré des «opérations individualisées de régénération», annexé à une lettre datée
du 7 juillet 2004, du président de RFF au président du Conseil régional de Lorraine a donné, trois
ans plus tard, quelques informations. Ce document ne répondait cependant pas à la demande de
la Région, pas plus qu'aux règles de base en matière de présentation de charges financières,
dans la mesure où il ne couvrait que les opérations de régénération et non celles d'entretien-
maintenance, ne permettant pas ainsi une appréciation du volume total des dépenses consenties
par RFF sur le réseau lorrain. En outre, il ne décrivait les dépenses réalisées en régénération du
réseau que pour la seule année 2003, n'autorisant donc pas de comparaison dans le temps.
La Région ne dispose donc pas d'informations suffisantes pour évaluer la faisabilité de ses projets
d'extension d'activité ou pour définir avec précision son effort financier en faveur des
infrastructures ferroviaires. Autre exemple significatif de ce déficit d'information, lors de la réunion
de l'instance lorraine de concertation sur les sillons ferroviaires, tenue le 30 novembre 2004, la
SNCF et RFF ont annoncé leur décision de limiter, à compter du 12 décembre 2004, la vitesse de
circulation sur certains tronçons de lignes. Or, l'Autorité régionale des transports n'avait pas été
précédemment informée de cette évolution. La Région semble donc avoir été mise devant le fait
accompli d'un changement des conditions de réalisation du service.
Ces limitations permanentes de vitesse, s'ajoutant au ralentissement à 60 km/h décidé à l'été
2003 entre Arches et Bruyères (ligne Saint-Dié-Epinal, quatre minutes supplémentaires), sont les
suivantes :
* Ralentissement à 60 km/h entre Vézelise et Poussay (ligne Nancy-Merrey, + 2 à 5 minutes) ;
* Ralentissement à 60 km/h entre Bitche Camp et Lemberg/Rohrbach (Ligne Sarreguemines-
Bitche, +1 à 2 minutes) ;
* Ralentissement à 60 km/h entre Etain et St Jean les Buzy (ligne Conflans-Verdun, +3 à 4
minutes supplémentaires).
Certes l'impact horaire de telles décisions est faible. Ces réductions de vitesse interviennent
cependant au moment où entrent en service des matériels modernes, financés par la Région, et
capables de rouler à plus de 120 km/h (voire jusqu'à 160 km/h). Au demeurant, ces limitations
semblent liées à des crédits alloués par RFF aux travaux d'entretien, jugés insuffisants par la
SNCF pour assurer la circulation à vitesse normale. Or, sur le même exercice, le poids financier
des péages RFF en Lorraine a doublé, passant de 12 à 24 M.Euros annuels. Ce poste de
charges, qui s'impose à la Région, ne fait pas l'objet d'une réelle négociation préalable. Seule une
procédure d'information et de consultation étant prévue à l'article 132 de la loi SRU : "Tout projet
de modification des modalités de fixation des redevances d'infrastructures ferroviaires au sens de
l'article 13 de la loi no 97-135 du 13 février 1997 portant création de l'établissement public
«Réseau ferré de France» doit faire l'objet d'une consultation et d'un avis de la ou des régions
concernées".
L'arrêté du 29 décembre 2003, publié au Journal Officiel du 31 décembre 2003, fixant le barème
des redevances d'utilisation du réseau ferré national modifie, a, notamment, étendu à la totalité
des gares, même les plus petites, le versement du droit de réservation lors des arrêts voyageurs.
Cette évolution a touché sans conteste plus directement les TER que le fret et grandes lignes
(dont les péages avaient été augmentés précédemment). En effet, les transports ferroviaires
régionaux assurent de nombreuses lignes «omnibus», c'est-à-dire qui opèrent de nombreux arrêts
afin de desservir de petites localités. Or, la part du coût des péages sur le prix des billets de
transport ferroviaire est significative. A l'été 2004, 28 % du prix du billet était destiné à financer les
péages versés par la SNCF à RFF pour l'usage de son réseau.
De plus, la hausse des péages a vocation, si elle se poursuit, à reposer au plan financier sur les
seules régions pour les dessertes qu'elles créeraient à partir de 2004, l'Etat n'accordant sa
compensation que pour les services existants en 2003. La diminution de la capacité du réseau et
l'augmentation très importante des péages, jugée inacceptable par la Région, ont conduit le
président du conseil régional à adresser une lettre le 8 décembre 2004 au ministre chargé des
transports, au délégué régional RFF et au directeur régional de la SNCF.
Dans une lettre du 15 décembre 2004, le directeur de Metz-Nancy de la SNCF a admis que ses
services auraient dû informer plus tôt la Région des limitations de vitesse. Il a attribué la
diminution des performances constatée sur le réseau au «maintien, depuis plusieurs années, en
monnaie courante, du montant de la convention de gestion qui lie RFF et la SNCF «et il a signalé
la mise en oeuvre d'un audit externe afin d'expertiser l'état général du réseau, l'efficience de la
politique et des procédures de maintenance, ainsi que l'efficacité économique de leur mise en
oeuvre. En raison de l'importance du domaine audité pour la qualité du service TER de Lorraine et
pour l'évaluation de la capacité du réseau à répondre aux évolution du service décidées par l'AOT,
il serait logique que la Région soit associée à cette démarche, et plus encore qu'elle soit consultée
sur les suites effectives à retenir.
5.4.2. La question des transports interrégionaux
Depuis le 1er janvier 2002, les régions décident, en tant qu'AOT, de l'organisation des transports
collectifs d'intérêt régional. La loi SRU, en son article 124, exclut explicitement de ce champ de
compétence les services d'intérêt national et les services internationaux. Plus encore, la loi SRU
semble même n'avoir pas envisagé d'autoriser une quelconque forme de coopération
interrégionale, au delà de conventions entre deux régions limitrophes prévues à l'article 133 de la
loi. Dans ces conditions, et de façon logique, les liaisons ferroviaires intéressant plusieurs régions
sont demeurées sous la responsabilité de la SNCF, dans le portefeuille de l'activité «Grandes
lignes», sauf cas particuliers qui ont fait l'objet d'accords spécifiques.
Cette solution semble cependant être remise en question par la SNCF. En effet, dans le cadre de
sa politique de recherche d'économies pour parvenir à l'équilibre de ses comptes, la SNCF, en
2003-2004, s'est engagée en concertation avec les régions concernées, dans la refonte de quatre
liaisons parmi les plus déficitaires (Lille-Strasbourg, Nantes- Bordeaux, Nantes-Lyon et Bordeaux-
Lyon). Pour ces liaisons, il a été proposé de scinder le parcours en trains reliant des régions
voisines, dans le cadre de contrats de type TER. Par ailleurs, la SNCF a décidé de distinguer,
dans l'ensemble des relations CORAIL, celles qui transportent majoritairement des voyageurs sur
des distances relativement courtes entre plusieurs régions, voire à l'intérieur d'une seule, et les
rattacher à sa branche transport public (TP) sous une nouvelle dénomination «Activité trains
interrégionaux (TIR)».
Les vingt-cinq lignes répertoriées «TIR» par la SNCF accusent, en 2003, un déficit cumulé de 155
M.Euros à comparer toutefois aux quelques 1 600 M.Euros de dépenses publiques totales
engagées en 2002 pour les TER. Cela étant, les TIR représentent malgré tout 7,3 % du chiffre
d'affaires et 10,6 % des charges de la SNCF en 2003. Cinq de ces liaisons représentent près de
40 % du déficit total et parmi elles, la ligne Lille-Strasbourg, intéresse la Lorraine.
Globalement, le rapport produits/charges des lignes TIR est de 0,69, avec de fortes disparités, la
ligne Nantes-Lyon n'atteignant que 0,46 En moyenne nationale, le ratio équivalent pour les TER
(produits y compris compensations pour tarifs sociaux mais hors contribution des régions/charges)
est de 0,41 en 2003.
Malgré l'opposition de la plupart des régions concernées, la liaison Lille-Strasbourg, qui intéresse
la Région Lorraine, a été partiellement réorganisée dans le sens proposé par la SNCF. En
décembre 2004, la Région Nord Pas de Calais a intégré dans sa convention TER la desserte
entre Lille et Hirson et la Région Alsace a fait de même entre Strasbourg et Metz. Le tronçon
central Hirson-Metz est resté classifié en TIR, sous la responsabilité de la SNCF.
Faute d'accord général sur ce projet, la SNCF a proposé une diminution importante des dessertes
permettant de réduire le déficit de moitié. Les régions concernées ayant manifesté leur désaccord,
l'Etat, en juillet 2004, a demandé à la SNCF de limiter les adaptations de dessertes en décembre
2004 (service 2005). A l'initiative du ministre chargé des transports, un groupe tripartite réunissant
l'Etat, la SNCF et l'association des RF, mais n'associant pas RFF, a engagé dès l'automne trois
travaux prioritaires visant à définir le cahier des charges d'un audit des comptes 2004 des
relations TIR et une méthodologie de refonte des dessertes et faire un inventaire précis du
matériel roulant utilisé.
Pour l'heure, la question du financement des lignes TIR (régionalisées ou pas), n'a pas été
abordée. En ce domaine, les enjeux financiers en cause sont importants. En cas de transfert de
ces lignes dans le cadre des TER, outre le déficit structurel d'exploitation qui grève ces liaisons,
un effort financier supplémentaire serait nécessaire en investissement (matériel roulant). En effet,
selon un rapport du conseil supérieur du service public ferroviaire (CSSPF) de mars 2005, les
quelques 1121 voitures (CORAIL pour l'essentiel) affectées par la SNCF aux TIR affichent une
ancienneté moyenne de plus de vingt ans, et la plupart des 200 locomotives (de ligne ou de
manoeuvre) ont plus de trente ans (soit au delà de leur durée d'amortissement comptable).
De par la loi, seuls les services de transports ferroviaires inventoriés dans la convention initiale et
modifiés depuis par avenants (donc par consentement mutuel des parties) sont placés sous la
responsabilité de l'AOT régionale, tous les autres services relèvent de la seule responsabilité de la
SNCF.
Une extension de ces services, y compris l'incorporation de parties de liaisons TIR dans le
périmètre TER, ne pourrait donc être opérée qu'avec l'accord de la Région. Depuis le 8 mars
2002, la Région lorraine n'a d'ailleurs repris aucune ligne nationale à sa charge. Au demeurant, la
Région Lorraine n'est concernée que par le tronçon non transféré de l'ancienne liaison Lille-
Strasbourg (évoquée plus haut), soit la ligne Hirson (Picardie)-Metz, et par la radiale Paris-Nancy-
Remiremont qui demeure classée en TIR.
La stratégie prudente adoptée par la Région Lorraine en matière d'extension du périmètre des
transports régionaux à des lignes issues des TIR de la SNCF semble reposer sur des bases
juridiques solides et être fondée sur une motivation économique et financière argumentée. Au
demeurant, et en l'absence de comptes d'exploitation TIR dûment validés et dans la
méconnaissance du parc qui pourrait ensuite être transféré, il semble logique d'attendre la mise
en service du TGV Est.
5.4.3. La réglementation européenne
Sur la base des conclusions du Conseil européen de Lisbonne du 28 mars 2000 visant à
«accélérer la libéralisation dans les domaines tels que (...) le transport», une proposition de
règlement européen relative à l'action des Etats membres en matière d'exigences de service
public (dit «OSP») et à l'attribution de contrats de service public de transport de voyageurs a été
adoptée le 26 juillet 2000 par la Commission européenne (JOC 365 E 19 décembre 2000) et la
procédure codécisionnelle Parlement/Conseil (prévue à l'article 251 du Traité CE), est, à l'heure
actuelle, toujours en cours.
Cette proposition réaffirme le rôle essentiel du service public là où le marché n'est pas en mesure
d'assurer un niveau de service de transport suffisant et elle prévoit l'allocation de financements
publics. La proposition retient aussi le renouvellement périodique, par appel d'offres, de droits
d'exploitation exclusifs permettant à un opérateur d'exploiter les services de transport de
voyageurs «sur une ligne, un réseau ou dans une zone donnée». Cette proposition de règlement,
si elle était finalement adoptée en son état actuel, concernerait directement les TER.
Par ailleurs, le 3e Paquet ferroviaire, dont le projet a été rendu public par la Commission
européenne le 3 mars 2004 comprend une proposition de directive modifiant la directive n° 91/440
du Conseil relative au développement des chemins de fer communautaires. Cette proposition
projette d'ouvrir à la concurrence les services internationaux de transport de voyageurs par
chemin de fer (y compris le cabotage) à échéance du 1er janvier 2010.
Dans le cadre de cette directive, les nouveaux entrants pourraient emprunter le réseau ferré
national sur la base du libre accès. Or, le réseau ferré national est déjà largement saturé, sur
certains axes et notamment dans les zones périurbaines, ce qui pourrait entraîner des conflits
d'intérêt entre les services TER, les services fret et les lignes nationales en matière d'attribution
des sillons. Les régions seraient alors en position extrêmement délicate, puisque la loi ne leur
confère aucune autonomie décisionnelle en la matière, leurs demandes étant instruites par la
SNCF, pour le compte de RFF.
6. LES INTERVENTIONS ECONOMIQUES
6.1. Le dispositif régional d'aides aux entreprises
6.1.1. Cadre général, le Projet Lorrain
Le dispositif régional institué par la Région Lorraine en faveur de l'activité économique a été fixé
lors du vote du Projet Lorrain 2000 à 2006 en décembre 1999. L'objectif 3 vise à «optimiser les
performances du tissu économique lorrain en stimulant la créativité, l'innovation et l'esprit
d'entreprise». Il se décline en deux projets fédérateurs «entreprendre en Lorraine» et «préparer la
Lorraine à la société de l'information» et en cinq programmes d'actions, qui trouvent enfin leur
traduction financière par l'instauration de quatre fonds régionaux individualisés par domaine
d'intervention.
L'examen de la Chambre s'est concentré sur le projet fédérateur n° 7 «entreprendre en Lorraine».
6.1.2. Les objectifs généraux fixés par le projet
L'objectif stratégique du Projet Lorrain était de proposer une réponse globale aux besoins et aux
projets des entreprises et des porteurs de projets, «intégrant toute la problématique de leur
développement, de la formation initiale et continue jusqu'à la constitution du capital en passant par
l'outil de production, l'approche des marchés, l'accès à l'innovation et aux technologies,
l'exploitation d'informations stratégiques».
Les objectifs de la Région visaient simultanément et en complémentarité le développement des
petites et moyennes entreprises et industries ainsi que des très petites entreprises. Il s'agissait de
susciter un accroissement de leur nombre, un renforcement de leurs capacités financières et
commerciales et une fédération de leurs compétences.
La Région Lorraine a en outre élaboré des axes prioritaires à la réduction des freins à l'initiative, à
la décision et à l'esprit d'entreprise, à l'information, l'accès aux technologies et à l'innovation,
l'approche collective et structurante par filière et par secteur géographique, les démarches
d'ingénierie, d'accompagnement et de conseil, la recherche de forme d'intervention limitant les
effets d'aubaine et strictement adaptées aux besoins financiers réels des projets présentés et la
construction d'une chaîne financière destinée à répondre aux besoins en fonds propres des petits
projets et des projets innovants.
Toutefois, dans ce Projet Lorrain, la détermination des objectifs à atteindre est peu précise. Ainsi
le Projet Lorrain indique que «la poursuite de l'effort en faveur du renouvellement et de la
structuration du tissu économique, (doit s'accomplir) tant par l'apport extérieur que par le
développement des capacités endogènes».
Afin de décliner ces orientations, la Région a arrêté des principes destinés à gouverner son action.
L'intervention de la collectivité se fonde essentiellement sur la mobilisation des aides directes et
indirectes, et plus particulièrement sur la prime régionale à la création d'entreprises (PRCE) et la
prime régionale à l'emploi (PRE) pour les cessions-reprises d'entreprises. L'aide doit en outre se
traduire par une bonification en points de taux d'intérêts, des prêts bancaires, des interventions de
l'Institut Lorrain de participation en apport de capital, des appuis aux fonds de garantie et de
développement du capital-risque pour les petites entreprises, et enfin, des subventions à
l'investissement pour des opérations de mises aux normes environnementales ou de sécurité.
Selon les préconisations générales arrêtées par la Région Lorraine, l'intervention ne pourra se
faire qu'à titre subsidiaire dans le plan de financement afin de déclencher l'accord d'autres
partenaires financiers. Elle doit de plus tenir compte de la faiblesse de l'autofinancement des
entreprises et des plans de financement déjà mis en oeuvre. Cette démarche vise à éviter le
recours souvent dénoncé à une logique de guichet et elle s'appuie sur une analyse financière
approfondie du projet à subventionner.
Enfin, la collectivité régionale a choisi de privilégier une stratégie de financement des fonds
propres et le développement de formules de garantie tout en mettant l'accent sur le regroupement
et à la constitution de réseaux. Chaque programme se décline en objectifs, cibles, actions
prioritaires, modes opératoires et suivi puis évaluation.
Si la Région a défini des orientations et des principes, ceux-ci restent très généraux et ils ne fixent
que rarement des objectifs précis et quantifiés. Ainsi, les programmes d'action établissent des
cibles larges, concernant «l'ensemble des lorrains, étudiants ou lycéens souhaitant s'ouvrir à
l'esprit d'entreprendre, salariés ou demandeurs d'emploi souhaitant s'engager dans un projet
personnel «pour le programme relatif à la stimulation de la création et de la reprise d'entreprise,
«les PME PMI et artisanales de production» pour le programme visant à l'optimisation de
l'environnement décisionnel et enfin, «les PMI PME, les exploitants agricoles et forestiers, les
investisseurs extérieurs et les organisations agissant au profit des filières» pour les actions
prévues au sein du programme de renforcement des filières économiques.
Néanmoins, la Région Lorraine a imposé au sein de chaque programme des actions prioritaires.
Ces dernières, appuyées des modes opératoires, traduisent plus précisément la volonté de
l'assemblée délibérante en matière de politique économique régionale. La Région Lorraine semble
donc s'être dotée d'objectifs suffisamment larges qui lui permettent de décliner librement leurs
modalités au sein des règlements d'intervention.
6.1.3. Les règlements d'intervention
La collectivité régionale avait adopté le 25 octobre 2001 un règlement des aides et interventions
économiques permettant l'application du dispositif arrêté dans le cadre du Projet Lorrain 2000 à
2006. Ce règlement a été une première fois modifié pour intégrer les changements substantiels
résultant de la loi n° 276-2002 du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité par
décision du conseil régional n° 7-2002 en date des 27 et 28 juin 2002. Une version plus élaborée
et plus pratique pour les utilisateurs a été adoptée le 19 décembre 2003 par l'assemblée régionale
par décision DCR n° 27-2003.
Dans sa déclinaison initiale, le recueil des règlements d'intervention collationne dix-neuf
règlements individualisés, tandis que la version 2003 rassemble dix-neuf mesures définies avec
précision.
L'ensemble des outils d'intervention peut être regroupé en quatre catégories principales illustrant
les domaines privilégiés de l'action économique de la Région.
Neuf mesures tombent totalement ou partiellement dans le champ d'application du règlement
communautaire de minimis. Il s'agit des aides apportées par la Région Lorraine sous couvert des
règlements d'intervention relatifs aux aides pré
- opérationnelles, aux bourses jeunes créateurs,
aux aides régionales à la création d'entreprise, à la reprise transmission, à la reprise transmission
soutien à l'emploi, à l'immobilier d'entreprise, au développement technologique, aux bourses
régionales de transfert et enfin aux grands projets.
En réponse aux observations de la Chambre, le président du conseil régional a précisé sur ce
sujet des "aides relatives aux études pré opérationnelles, [qu'elles] ont pour objectif de soutenir
les démarches de «validation " d'un projet de création d'entreprise présentant un caractère
innovant en termes de produit de marché, de procédé, ... Il s'agit donc d'une subvention destinée
à financer partiellement (maximum 75 % du coût TTC de l'étude) le recours à une étude préalable
à la création: étude de marché, de faisabilité... Intervenant avant la création de l'entreprise, elle
est donc attribuée à une personne physique n'ayant pas encore une activité économique relevant
du champ concurrentiel. Par conséquent, elle ne relève pas de la réglementation relative aux
aides aux entreprises a fortiori non plus du règlement communautaire relatif aux aides de
minimis".
Les règlements d'intervention régionaux se rapportant à ce régime d'exemption mentionnent les
bénéficiaires des aides et les conditions d'octroi ainsi que leurs combinaisons avec des régimes
notifiés. Ainsi, les mesures d'application recourent le plus souvent à la définition des bénéficiaires
par la proposition générique «toutes entreprises relevant des secteurs d'activité éligibles aux aides
régionales». Les activités éligibles sont définies dans le préambule du règlement des interventions
économiques. Ainsi, sont éligibles à l'intervention régionale les entreprises relevant des secteurs
de la production industrielle, de l'activité du bâtiment limitée aux seules activités de préfabrication
industrielle, de la logistique définie comme intégrant nécessairement outre le transport, le
stockage et la distribution, des activités à forte valeur ajoutée, des activités de recherche et
développement ou de traitement laboratoires, des activités d'hôtellerie restauration de la norme
deux étoiles au moins, de la maintenance de matériel informatique et maintenance de matériel de
production, de l'informatique de gestion et informatique industrielle, de la publicité communication
marketing, de l'ingénierie et études techniques, du conseil en entreprises, de la recherche de
l'information et enfin de la traduction interprétariat.
Le règlement (CE) n° 69/2001 de la commission du 12 janvier 2001 concernant l'application des
articles 87 et 88 aux aides de minimis édicte que le régime de notification et d'autorisation
préalable des aides n'est pas applicable en deçà du seuil cumulatif de 100 000 euros d'aides
obtenues sur une période de trois ans. Toutefois, ce règlement exclut de son champ d'application
les secteurs de la sidérurgie, des transports et des activités liées à la production, transformation
ou commercialisation des produits de la pêche, de l'aquaculture et agricoles, des aides en faveur
d'activités liées à l'exportation, c'est-à-dire les aides directement liées aux quantités exportées, à
la mise en place et au fonctionnement d'un réseau de distribution ou d'autres dépenses courantes
liées à l'activité d'exportation, les aides subordonnées à l'utilisation de produits nationaux de
préférences aux produits importés.
Force est de constater que les règlements d'intervention de chacune des mesures d'aide
économique ne mentionnent pas expressément les dispositions relatives à l'aide de minimis. Par
ailleurs, lorsque les exclusions sont mentionnées à l'appui des régimes complémentaires exercés
sous l'empire du régime dérogatoire de la prime à l'aménagement du territoire, ces dernières sont
incomplètes. En effet, il convient d'ajouter aux exclusions mentionnées, les aides à l'exportation et
celles subordonnées à l'utilisation de produits nationaux par préférence aux produits importés.
En réponse aux observations, le président du conseil régional a précisé que «l'aide régionale a un
fondement juridique qui diffère et s'adapte. Ce schéma explique les différentes références de
textes inscrites sous l'intitulé des mesures du règlement régional. Par conséquent, la précision de
l'ensemble des règles spécifiques, notamment les exclusions, dans la description de chaque
mesure rendrait le règlement régional beaucoup plus complexe voire incompréhensible, pour les
bénéficiaires potentiels et les partenaires du Conseil Régional de Lorraine. Toutefois, pour
repréciser le cadre général de ces aides, l'assemblée a opté pour l'intégration d'une annexe,
précisant les références des règlements d'exemption et régimes notifiés mobilisables et les
conditions restrictives, notamment les exclusions, propres à chacun».
Enfin, le règlement d'intervention précité ne mentionne pas les limites supérieures de subvention
potentielle. En effet, si les régimes d'aides notifiés au titre du fonds de développement des PME-
PMI (FDPMI) ou de la PAT précisent que sont éligibles les programmes spécifiés dans la limite de
30 % de leur montant net, tel n'est pas le cas du tableau de correspondance du règlement
d'intervention sur lequel figure un montant maximum de 33 % brut. Il est en outre précisé,
s'agissant du FDPMI, que les investissements du projet global de développement de l'entreprise
bénéficiaire doivent être financés à hauteur de 25 % des dépenses sans aides publiques. Cette
condition n'est pas reprise par le règlement d'application de la mesure.
L'ordonnateur a indiqué en réponse qu'«à ce titre, il convient de souligner qu'avec l'effet de la
fiscalité, par exemple l'impôt sur les sociétés (taux de 33 %), l'aide est «amputée» de 33 % de son
montant après fiscalisation. Par conséquent, un taux net de 30 % correspond à un taux brut
d'environ 40 %. Dès lors, le taux brut maximum de 33 %, retenu par le Conseil Régional de
Lorraine, est très nettement en retrait par rapport aux possibilités d'aides offertes par la
Commission en taux net. La règle précisant que l'entreprise bénéficiaire doit financer à hauteur
d'au moins 25 % son investissement sans aides publiques est reprise par divers règlements
d'exemption, encadrements communautaires ou régimes d'aides notifiés (N70/2001, annexe 1 des
lignes directrices concernant les Aides à Finalité Régionale (AFR) 98/C 74/06, régime N198/99,
décret n° 2005-584 du 27 mai 2005, ... ). Par conséquent, cette disposition a acquis un caractère
quasi général. Aussi, considérant qu'elle doit s'appliquer à l'ensemble de ses aides relatives à des
projets d'investissements, le Conseil Régional de Lorraine a rappelé cette règle dans le préambule
du règlement régional la qualifiant de condition particulière.
Tout en prenant acte de cette réponse, la Chambre précise que la traduction en équivalent
subvention net (ESN) suppose une actualisation sur la base de l'équivalent subvention brut
préalablement à sa fiscalisation.
De plus, les dispositions contenues dans la mesure 19 «Fonds régional de garantie Lorraine et
sous fonds Lorraine capital» semblent contrevenir au régime notifié n° 449/2000 adopté par la
commission européenne le 8 mai 2001. En premier lieu, le dispositif mis en oeuvre par la Région
Lorraine ne rappelle pas les règles spécifiques édictées pour les secteurs encadrés (fibres
synthétiques, automobile, construction navale, transports, CECA) qui sont plus restrictives. En
second lieu, le calcul de l'aide en application de la convention SOFARIS et de ses avenants est
encadré par la limitation de la «quotité garantie au maximum à 70 % en co-garantie avec
SOFARIS. Elle est portée à 80 % pour les prêts personnels créateurs. S'agissant des opérations
en fonds propres et quasi-fonds propres (fonds régional de garantie Lorraine ou sous fonds
Lorraine Capital), la quotité garantie est limitée au maximum à 70 %». Le dispositif ayant obtenu
l'agrément de la commission européenne précise pourtant que «la quotité maximale des prêts
couverte par la garantie peut atteindre 70 % des concours financiers souscrits (80 % pour les
entreprises en création. Les garanties octroyées par des sociétés de garantie au moyen de fonds
mis à leur disposition par les collectivités territoriales ne pourront excéder 50 % de la quotité de
l'emprunt ou 65 % en cas de création d'entreprise». Le dispositif régional qui s'applique par
l'intermédiaire de la société SOFARIS va donc bien au-delà du dispositif autorisé.
En réponse aux observations de la Chambre, la président a indiqué que «le dispositif régional qui
s'applique intervient en co-garantie du dispositif propre à SOFARIS. Le taux maximal de quotité
garantie (70 voire 80 %) doit s'entendre comme le cumul des taux de quotité d'emprunts garantis
par le Fonds Régional de Garantie Lorraine et par SOFARIS. Ainsi, le taux de quotité d'emprunt
garanti est de 35 % (ou 40 % en cas de création) pour SOFARIS et le Fonds Régional de Garantie
Lorraine. Ceci permet donc de respecter le régime notifié N449/2000 approuvé par la Commission
Européenne le 8 mai 2001 qui plafonne à 50 % (ou 65 % en cas de création) le taux de quotité
d'emprunt garanti par des sociétés de garantie au moyen de fonds mis à leur disposition par les
collectivités territoriales, dans le cadre de laquelle définition rentre le Fonds Régional de Garantie
Lorraine. Il convient de préciser qu'en cas d'intervention de crédits européens dans le dispositif de
garantie, cette condition est à nouveau respectée puisque dans le cadre d'une co-garantie à 70 %,
la part du Fonds Régional de Garantie Lorraine s'établit à 26,25 % et à 17,5 % pour le FEDER.».
La Chambre prend acte de ces précisions mais relève que ce dispositif n'apparaissait pas aussi
explicitement dans le contenu de la mesure 19. Enfin, et malgré la mention en ce sens, il ne
semble pas que le régime des aides à l'export ait fait l'objet d'une procédure achevée de
notification auprès de la commission européenne. Dès lors, les aides accordées dans ce cadre
pourraient être frappées d'annulation.
En réponse aux observations de la Chambre, il a été indiqué que «le Conseil Régional de
Lorraine, concomitamment à la Direction Régionale du Commerce Extérieur, a modifié début 2005
son règlement d'intervention, en supprimant les aides à l'implantation et en restreignant les
possibilités d'aides sur le marché européen. Les recommandations de la DGTPE s'appuyant sur
les règlements CE N70/2001 et N69/2001, étaient d'exclure les aides directement liées aux
quantités exportées, à la mise en place et au fonctionnement d'un réseau de distribution ou à
d'autres dépenses courantes liées à l'activité d'exportation. En revanche, les coûts de participation
à des foires commerciales, le coût d'études ou de services de conseil nécessaires au lancement
d'un nouveau produit ou au lancement d'un produit existant sur un nouveau marché ne constituent
normalement pas des aides à l'exportation».
Lors du contrôle, les services en charge de la mission économique ont expliqué que les
règlements d'intervention étaient empreints d'une volonté pédagogique de simplification à
destination des futurs bénéficiaires, et que le recueil des règlements d'intervention mentionnait
comme seule référence légale les règlements d'exemption ou les régimes notifiés auprès de la
commission européenne. Il importe toutefois de rappeler que les règlements d'intervention votés
par la commission permanente constituent les documents supports opposables qui régissent
l'action de la Région Lorraine et qu'en ce sens ils doivent être strictement conformes avec la
réglementation européenne.
Si l'effort de simplification et de clarification effectué est réel, la présentation synthétique réalisée
fin décembre 2003 s'éloigne parfois de manière significative des régimes et notifications qu'elle
est censée représenter. Les processus d'instruction des dossiers restent sommaires et ils ne
précisent que les avis requis sans indiquer avec précision les organismes accompagnateurs. A
l'exception de la mise en oeuvre des fonds de garantie, le processus de décision est lui
précisément mentionné.
6.1.4. Les conventions et l'application de la loi du 13 août 2004
Dans sa réponse, l'ordonnateur indique que «le contrôle opéré par la Chambre Régionale des
Comptes couvre la période 2000-2004. L'action du Conseil Régional de Lorraine en matière de
développement économique, y compris dans le cadre de ses relations avec les autres collectivités
territoriales et leurs groupements, obéissait aux textes législatifs et règlementaires en vigueur à ce
moment (lois et décrets de 1982, 1986, 2001, 2002) au titre desquels la loi n° 2002276 du 27
février 2002 relative à la démocratie de proximité». La Chambre précise, à ce propos, que
conformément aux dispositions du code des juridictions financières, l'examen de la gestion qu'elle
a effectué a pu être étendu jusqu'au 30 avril 2005 et par conséquent être observé à la lumière du
dispositif mis en oeuvre par la loi du 13 août 2004.
Cette loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales a confié à la Région le
rôle de coordination en matière d'intervention économique sans pour autant lui confier une
mission de chef de file. La collectivité régionale doit, selon les termes de la loi, collecter
l'ensemble des informations concernant les dispositifs d'aides mis en oeuvre, en assurer la
cohérence territoriale, et l'adéquation avec les régimes communautaires. La loi ne confère pas
pour autant à la collectivité régionale une prédominance sur les autres collectivités territoriales.
Trois principaux axes de la réforme modifient le cadre général de l'action économique. Ils visent
d'une part à l'édification d'une coordination renforcée en cas d'atteinte à l'équilibre régional, ils
autorisent à titre expérimental l'élaboration en concertation d'un schéma régional de
développement économique et enfin ils imposent à la Région de dresser un bilan annuel des
aides attribuées par les collectivités territoriales de la Région.
En Lorraine, si plusieurs conventions ont été signées avec les principales collectivités territoriales,
aucune convention n'a été conclue entre le conseil général de la Moselle et la Région Lorraine. En
outre, lors du contrôle, aucune information relative aux aides et aux régimes afférents n'avait été
transmise à la Région par ses partenaires.
Toutefois, le président du conseil régional, dans sa réponse, précise «qu'il s'est rapproché des
quatre conseils généraux, principales collectivités après la Région à attribuer des aides directes
ou indirectes aux entreprises, au cours du second semestre 2002 (courrier du 16 septembre
2002). Cette démarche a débouché sur la signature d'une convention avec les conseils généraux
de la Meuse le 12 septembre 2003, des Vosges le 17 octobre 2003 et de la Meurthe-et-Moselle le
20 janvier 2004, puis la Communauté Urbaine du Grand Nancy et la Communauté
d'Agglomération de Metz Métropole le 25 mars 2004».
La signature des conventions, anticipant le nouveau régime légal, a montré la volonté de la
Région de mettre en cohérence le dispositif d'intervention. Ces conventions sont toutefois
intervenues sous l'empire de l'article 102 de la loi du 27 février 2002 relative à la démocratie de
proximité. Cette loi avait renforcé le rôle régional en matière d'aides dites «directes» telles qu'elles
étaient définies par l'article L1511-2 du code général des collectivités territoriales alors applicable.
L'objet des conventions établies avant la mise en application de la loi du 13 août était donc bien
de coordonner le régime des aides directes applicables sur un territoire donné. L'article 5
prévoyait en outre une disposition d'information mutuelle sur les aides accordées à une même
entreprise tandis que l'article 7 retenait un suivi général du dispositif et l'établissement d'un bilan
annuel des aides attribuées en application de la convention. Il est à relever que cette partie du
dispositif n'a jamais été mise à exécution.
Les conventions conclues entre la Région Lorraine et trois des départements ont été reconduites
de façon tacite comme le prévoyait la loi n° 2002-276 du 27 février 2002. Toutefois, ces
conventions devraient être revues pour couvrir le champ d'application de la loi du 13 août 2004
notamment en matière d'obligation de transmission de tous les types d'aides économiques.
A l'occasion du contrôle, les services de la Région Lorraine ont souligné les difficultés de réunir
les informations légales et les incertitudes concernant la mise en application de cette partie du
dispositif légal.
En réponse au constat de la Chambre, le président du conseil régional indique que «L'article 199
de la loi du 13 août 2004, précise que les dispositions du titre 1er, relatif au développement
économique, au tourisme et à la formation professionnelle, sont applicables à compter du 1er
janvier 2005 à l'exception de celles nécessitant l'adoption d'un décret en Conseil d'État. Il est
juridiquement inconcevable, selon le principe de non rétroactivité, qu'une loi puisse fixer des
obligations portant sur des aides allouées avant son entrée en vigueur».
La Chambre qui mesure les difficultés de mise en oeuvre de la loi ne partage pas l'analyse
juridique de la collectivité régionale. En effet, conformément aux dispositions de l'article 21 de la
Constitution du 4 octobre 1958, les lois entrent en vigueur dès leur publication sauf si elles en
disposent autrement. Le Conseil d'Etat, a précisé selon une jurisprudence constante les
conditions dans lesquelles il pouvait être dérogé au principe de l'applicabilité immédiate. Ainsi,
dans un arrêt de principe (CE 20 mars 1992 Préfet du Calvados), le Conseil d'Etat a fixé que le
caractère suffisamment précis du texte était la condition de son applicabilité immédiate. De plus,
le Conseil d'Etat a considéré que même si un décret d'application est prévu par le texte législatif,
la loi peut être souvent appliquée au moins en partie préalablement à la parution des décrets en
portant application. Or en l'espèce, il n'apparaît pas que la loi ait suspendu la mise en vigueur de
cette disposition à la parution d'un décret.
Par circulaire NOR LBLB0410088C du 21 décembre 2004, la Ministre déléguée à l'intérieur a
précisé les modalités d'entrée en vigueur de la loi précitée. Ce texte indique que l'article premier
de la loi relatif au développement économique est applicable à compter du 1er janvier 2005, à
l'exception des règles de plafond et de zone relatives à l'immobilier d'entreprises qui doivent faire
l'objet d'un décret en Conseil d'Etat.
Il apparaît donc qu'à la mi-2005, la Région ne disposait pas de tous les moyens pour assurer les
missions fixées par la loi en matière de coordination de l'action économique en Lorraine.
Dans sa réponse, le président du conseil régional précise qu'«il semblerait que les services de la
Direction Générale des Collectivités Locales (Ministère de l'Intérieur) élabore une circulaire
relative à l'application de l'article L1511-1 CGCT comportant cette obligation d'établir le rapport
des aides et régimes d'aides mis en oeuvre sur le territoire régional. Selon cette interprétation, il
reviendrait au Conseil Régional de Lorraine de collationner les aides accordées par l'ensemble
des collectivités au cours de l'exercice 2005 en vue d'une transmission au représentant de l'État
avant le 30 juin 2006. La tâche de procéder à ce recensement pour les aides accordées en 2004,
relèverait donc encore des services de l'État. A ce sujet, le Président du Conseil Régional de
Lorraine a saisi Monsieur le Préfet de Région par courrier en date du 11 avril 2005, lui demandant
des précisions concernant les modalités d'application de l'article L1511-1. Faute de réponse, un
second courrier a été adressé à Monsieur le Ministre délégué aux Collectivités Territoriales le 23
août 2005. Eu égard à la diversité des aides attribuées par les différents niveaux de collectivités et
l'absence de moyens mis à disposition par la loi, il est indéniable que le Conseil Régional de
Lorraine rencontrera des difficultés pour établir ce bilan des aides».
Dans leurs réponses, la Communauté urbaine du Grand Nancy et la Communauté
d'agglomération de Metz Métropole ont apporté les précisions suivantes. La CA2M indique que la
convention cadre relative au développement économique a été conclue avec la Région le 25 mars
2005 et elle indique qu'elle a été associée par la Région à l'élaboration du schéma régional de
développement économique qui vient d'être engagée. La CUGN souligne qu'elle a mis en oeuvre
les dispositions prévues par la convention du 25 mars 2004
en transmettant le 11 juillet 2005 à la
Région un tableau récapitulatif des aides accordées aux entreprises localisées sur son territoire
de compétence.
6.1.5. Les moyens financiers mis en oeuvre
Le Projet Lorrain 2000 à 2006, adopté les 18 et 19 décembre 1999, prévoyait une ligne budgétaire
régionale directrice de 384,2 M.Euros (2 520 MF) sur la durée du plan. Ce budget prévisionnel,
décliné pour chacun des cinq programmes d'action, se scindait en réalité en quatre fonds
régionaux.
Tels qu'ils ont été votés par l'assemblée régionale, les crédits de paiement ont atteint 97,57 % de
l'objectif fixé initialement. Les fonds alloués directement à la stimulation de la création, au
renforcement des filières économiques et à l'optimisation de l'environnement de décision ne
représente en réalité que 37 % des crédits disponibles, et le fonds destiné à l'amélioration des
compétences (prestations d'accompagnement et de formations professionnelles) consomme 35 %
des montant alloués. Il convient toutefois de relever la forte progression des dépenses consacrées
au soutien aux entreprises sur la période 2000 à 2004. En effet, les réservations de crédits
effectuées au profit du fonds de développement des entreprises et de l'innovation ont cru de 113
% tandis que celles destinées au fonds d'adaptation des compétences augmentaient de 55 %.
Dans sa réponse, le président du conseil régional conteste cette analyse chiffrée. Tout en prenant
en compte ce point de vue, la Chambre rappelle que les informations ont été établies selon les
données fournies par les services de la Région.
La réalisation effective des dépenses projetées, telle qu'elle apparaît en fin d'exercice comptable
et budgétaire distingue les crédits ayant fait l'objet d'une affectation de ceux affectés et mandatés.
La modération du niveau des mandatements effectués peut être relevée. En effet, le taux de
réalisation effectif des crédits mis en place n'atteint que 80 % de l'objectif. Par ailleurs, la majeure
partie des fonds employés est destinée au renforcement des filières économiques régionales (62
% hors filière agricole et forestière). Les crédits alloués à ce programme d'action sont destinés à
soutenir financièrement, à apporter des garantie en faveur de la construction de bâtiments
industriels et artisanaux, ainsi qu'à financer les équipements de production et l'investissement
environnemental. Dans ce contexte, les actions de développement de l'esprit d'entreprise et le
soutien aux porteurs de projet et les aides financières allouées sous forme de primes ne
représentent que 16 % des montants dépensés. La démarche d'intelligence économique et de
soutien à l'innovation représente 22 % des mandatements effectués.
En outre, l'évolution inverse des crédits de paiements accordés par l'assemblée plénière avec les
mandatements réalisés est à souligner. Ainsi, si les crédits de paiements dévolus au fonds
régional des entreprises et de l'innovation ont progressé entre 2000 et 2004 de 113 %, les
mandatements effectifs ont sur la même période diminué de 54 %. De même, les crédits de
paiement alloués au fonds régional d'accès à la société de l'information ont augmenté sur la
période de 118 %, les mandatements les concernant ont diminué dans le même temps de 99 %
n'atteignant que 0,05 M.Euros en 2004.
Enfin, pour apprécier les moyens déployés en faveur de l'action économique, il convient d'ajouter
les financements dédiés aux sociétés d'économie mixte, associations, Chambres consulaires et
sociétés privées partenaires, qui représentent une masse financière totale de 24,3 M.Euros sur les
quatre derniers exercices.
En premier lieu, on relève une augmentation globale des montants alloués (+37 %), hors
organismes de garanties et de soutien aux fonds propres. En ce sens, les sommes allouées au
financement des actions en faveur des réseaux et des actions sur les partenaires relais ont
progressé sur la période (37 %-10,8 M.Euros). Un effort particulier a été consenti en faveur
d'Alexis boutique de gestion qui a bénéficié sur la période 2000 à 2004 d'une participation
financière régionale en hausse de 268 %. Il en est de même des financements apportés aux
établissements consulaires (+63 %).
En réponse aux observations de la Chambre, le président a expliqué que «l'accroissement de
l'aide régionale à destination des réseaux de soutien à la création d'entreprise est notamment lié à
l'accroissement de l'activité de ceux-ci. Ainsi pour Alexis boutiques de gestion de Lorraine, le
nombre de projets concrétisés est-il passé de 86 en 2000, à 275 en 2004, soit une évolution de
219 %, à comparer à la hausse de 268 % de l'intervention régionale en faveur de cette
association. Cette hausse s'explique en outre par l'octroi en 2003 d'une subvention de 60 000
euros pour la construction du nouveau siège social de cet organisme».
L'action à l'égard des réseaux technologiques est particulièrement significative (près du cinquième
des fonds attribués sur la période en examen).
Il apparaît toutefois que la Région Lorraine n'avait mis en place, au 31 mars 2005, aucun fonds
d'investissement de proximité.
En réponse au constat opéré par la Chambre l'ordonnateur a précisé que «Au terme de cette loi,
la participation à un Fonds d'Investissement de Proximité relève du libre arbitre des collectivités.
S'agissant d'outils financiers ayant le statut de fonds commun de placement à risque, ces FIP ont
pour objectif principal de développer l'épargne de proximité en faveur des PME régionales par le
recours à l'épargne publique. A ce titre, les investisseurs bénéficient d'avantages fiscaux. Par
ailleurs, les collectivités ne peuvent détenir de parts des sociétés de gestion des FIP, ne pouvant
ainsi prendre part à la décision d'investissement des fond . Les stratégies d'investissements des
FIP en projet ne correspondant pas aux objectifs du Conseil Régional de Lorraine, aucune
souscription n'avait été envisagée dans un premier temps».
La Chambre prend acte toutefois que «cette position a évolué suite aux démarches de la société
SIGMA GESTION porteuse du FIP CROISSANCE GRAND EST. Un rapport relatif à une
souscription de parts de ce fonds sera soumis à la Commission Permanente du 30 septembre
2005».
6.1.6. L'organisation retenue
La mission de développement économique est organisée en cinq directions opérationnelles,
chargées respectivement du développement des entreprises et du commerce extérieur, de
l'agriculture de la forêt et des industries agro-alimentaires, de l'innovation et des transferts de
technologies, de l'enseignement supérieur et de la recherche et enfin du commerce et de
l'artisanat. Cet organigramme est complété par un département administratif et financier et une
cellule de communication.
Cette organisation ne correspond pas aux quatre programmes d'actions que les directions doivent
mettre en oeuvre, ni aux trois fonds censés supporter ces actions. De plus, alors que l'effectif
théorique est de cinquante-deux agents, il n'est satisfait qu'à hauteur de 73 % et des postes
importants comme celui réservé à la communication ou celui destiné au suivi, au contrôle et à
l'évaluation des aides sont vacants. La direction innovation et transfert de technologie ne dispose
que de 55 % de l'effectif prévu et la direction commerce et artisanat les deux tiers. Plus de la
moitié des postes non pourvus sont normalement destinés à des chargés d'études ou de mission
qui devraient exercer un relais entre les programmes d'actions et les entreprises de façon à
garantir l'efficacité optimale de la politique régionale en matière de développement économique.
Dans sa réponse, l'ordonnateur précise pour justifier la distorsion observée que «la nouvelle
stratégie régionale ne fait plus référence à ces quatre programmes d'actions. De même que la
nouvelle architecture budgétaire ne fait plus référence à ces trois fonds».
Il est à souligner que huit postes font actuellement l'objet d'un recrutement et qu'ils devraient être
pourvus d'ici la fin du premier trimestre 2006.
En réponse aux observations de la Chambre, le président du conseil régional a indiqué que pour
les «effectifs de la mission, la création des postes nécessaires au bon fonctionnement est
intervenue lors du vote du budget prévisionnel 2005. Toutefois, pour permettre d'accueillir ces
personnels supplémentaires dans les meilleures conditions, les postes ainsi créés seront pourvus
en trois phases au cours de l'année».
6.1.7. Le processus de mise en oeuvre
6.1.7.1. Un processus de décision qui repose sur des réseaux
Le mécanisme de l'attribution des primes et aides régionales repose en majeure partie sur une
externalisation de la recherche des créateurs et repreneurs. Cette mission est confiée aux
réseaux et partenaires consulaires. Après la détection du créateur, le projet est transmis aux
services de la Région Lorraine qui préparent en liaison avec les réseaux un dossier de demandes
d'aides. Ce dossier détaillé présente l'entreprise, son projet et le marché visé, et il s'appuie sur un
plan de financement précis. Il est complété par des engagements fermes de la part du futur
bénéficiaire de l'aide et enfin par les conditions de son versement. L'aide à l'élaboration du
«business plan» et à la constitution du dossier est apportée par les organismes partenaires de la
Région Lorraine. Les services régionaux ne rencontrent qu'une fois le porteur de projet, voire deux
fois dans les cas de grands projets nécessitant un accompagnement plus appuyé.
Jusqu'en 2002, l'expertise ou l'évaluation ex ante des projets soumis revenait à la société
d'économie mixte SOLOREX, avec laquelle un marché public à bons de commande avait été
passé au début de l'exercice 2001 pour l'analyse des demandes d'aides au conseil. Après la
disparition de la société, dissoute le 1er septembre 2002, la Région Lorraine a perdu une capacité
d'expertise spécifique des projets soumis. Cette capacité d'expertise préalable étant limitée parmi
les services de la Région Lorraine, un système d'avis a été institutionnalisé de manière à éclairer
la décision de la commission chargée de l'approbation.
Dans sa réponse, l'ancien ordonnateur précise sur ce sujet qu' «Il convient cependant de valider
leurs analyses par des avis d'autres partenaires des politiques économiques publiques (Chambres
consulaires, services de l'Etat, ...) afin de disposer du maximum d'éléments de décision".
Il convient de relever qu'outre le travail de détection, les membres des réseaux réalisent
également un premier filtrage des dossiers. Ce premier avis s'accompagne de ceux requis auprès
de la Banque de France, de la trésorerie générale (payeur régional) et le cas échéant de la DRIRE
de Lorraine lorsque les projets soumis comportent une dimension industrielle et technique, ou
enfin du comité régional du tourisme lorsqu'il s'agit de projets relevant de sa compétence.
Un dossier synthétisant les différents avis est alors constitué par les services régionaux et il est
présenté au comité technique. Ce comité comprend des représentants régionaux mais également
les partenaires bancaires qui sont parties au financement du projet. Ce comité, présidé par le vice-
président délégué aux interventions économiques, est composé de deux membres de la
commission régionale chargée des interventions économiques, des représentants de la Banque
de France et de la Trésorerie générale, du délégué régional au commerce et à l'artisanat, des
représentants de la chambre régionale de commerce et d'industrie et enfin des représentants de
la chambre régionale des métiers. L'organisation de ce comité n'a été formalisée qu'à compter du
vote des règlements d'intervention 2005. La réunion du comité technique permet de déterminer
les conditions de financement et la répartition des interventions. L'avis prononcé par ce comité a
vocation à être repris par les services régionaux en vue de sa présentation à la commission des
interventions économiques. Une fiche retrace par dossier subventionnable la nature de
l'entreprise, la définition sommaire du projet, son plan de financement et la mention de la
participation d'autres partenaires publics ou l'obtention d'autres aides régionales, une synthèse de
l'action à conduire et enfin la récapitulation de l'aide régionale proposée. L'avis de la commission
des interventions économiques précède celui de la commission permanente qui n'intervient en
réalité que comme une chambre d'enregistrement.
A l'examen des dossiers constitués, la qualité du travail réalisé par les équipes régionales peut
être relevé. Toutefois, la démarche décisionnelle gagnerait à être plus formalisée. Enfin, si le
débat qui s'instaure en comité technique paraît justement documenté, tel n'est pas le cas pour
celui qui sert de support à l'avis de la commission spécialisée. En effet, les fiches de synthèse qui
sont soumises aux membres ne résument pas les avis sollicités auprès des organismes extérieurs
(Banque de France, Trésorerie Générale...), ce qui fait douter des motivations des décisions
prises.
Les délais d'obtention des aides restent toutefois longs, compte tenu de l'exclusion du décompte
de la phase préparatoire. En effet, le délai présenté comme objectif par les directions de la
mission développement économique ne court qu'à compter de la réception d'une lettre d'intention
du porteur de projet. La phase d'analyse préparatoire exécutée par les membres du réseau (PFIL,
Pépinières, Alexis Boutique de gestion...) n'est donc pas prise en compte. Le délai moyen minimal
objectif fixé pour l'instruction d'un dossier est de 96 jours entre la réception de la lettre d'intention
et la notification de la décision de la commission permanente. En réalité, en 2003, le délai moyen
observé, tous types d'aide confondus, n'a jamais été inférieur à 150 jours.
6.1.7.2. Un système de «maîtrise d'ouvrage» discutable
A l'analyse des pièces comptables, il est apparu que la Région faisait appel à un organisme
intermédiaire dans le processus de versement des subventions, ce dernier étant alors dénommé
«maître d'ouvrage». Cette notion ne s'apparente pas à la définition de la loi sur la maîtrise
d'ouvrage publique. Cette «maîtrise d'ouvrage» est confiée aux collectivités locales aux sociétés
d'économie locales et aux établissements consulaires du ressort territorial de l'entreprise aidée.
Ce système est principalement utilisé dans l'attribution des aides régionales à l'immobilier. Lors de
l'attribution initiale de l'aide, la Région Lorraine, le bénéficiaire et le «maître d'ouvrage» s'engage
par convention tripartite. Cette convention fait suite à la décision d'attribution de la commission
permanente qui mentionne expressément le recours à un «maître d'ouvrage» public.
La convention fixe les obligations de chacune des parties. Ainsi, il revient au «maître d'ouvrage»
de produire à la Région Lorraine les pièces justifiant l'engagement et l'achèvement des travaux, la
copie des factures et un tableau récapitulatif des dépenses. En contrepartie, le «maître
d'ouvrage» qui produit les demandes de versement d'acomptes et de solde de subvention reçoit la
subvention et dispose de dix jours pour la reverser à l'entreprise bénéficiaire. Si le recours à un
intermédiaire apparaît pleinement justifié dans le cas d'une maîtrise d'ouvrage réelle, c'est à dire
lorsqu'il agit en tant que propriétaire d'un bien loué à une entreprise, tel n'est pas la situation en
l'espèce. En effet, la plupart des aides régionales à l'investissement immobilier ont pour but
d'apporter une aide à un porteur de projet qui construit des bâtiments à usage professionnel dont
il sera ou est déjà propriétaire. Dès lors, le transit des subventions par un intermédiaire ne semble
pas adapté à un régime d'aide à l'entreprise tel qu'il ressort des règlements d'intervention votés
par l'assemblée plénière.
En outre, l'immixtion dans la gestion de deniers publics par les organismes qualifiés de «maître
d'ouvrage» paraît s'apparenter à une gestion de fait au sens de l'article 60-XI de la loi de finances
n° 63-156 du 23 février 1963. L'organisme intermédiaire, qu'il s'agisse d'une collectivité locale,
d'une chambre consulaire ou d'une société d'économie mixte fait en effet usage des fonds alloués
pour payer des dépenses relevant de la responsabilité de la collectivité et non au titre de son
action.
En réponse aux observations de la Chambre, le président a indiqué que le «Conseil Régional a
cessé de recourir à ce système de maîtrise d'ouvrage discutable à compter de la Commission
Permanente du 30 septembre 2005 pour les aides à l'immobilier dédié aux Très Petites
Entreprises et artisans». Il a également précisé «que les modalités de mise en oeuvre de l'aide à
l'immobilier, par versement direct à l'entreprise ou à un maître d'ouvrage réel, ont été adaptées de
façon à être en conformité avec les règles de comptabilité publiques et supprimer tout risque
d'immixtion dans la gestion des deniers publics par des organismes n'ayant pas la qualité de
comptable public.»
6.1.7.3. Un règlement financier insuffisamment respecté
Les aides économiques apportées par la Région Lorraine sont régies par des modalités dont le
contenu et la procédure ont été validés par l'assemblée délibérante lors du vote du règlement
financier ou lors de celui des règlements d'intervention. Chaque catégorie d'aide suit ainsi, soit
des modalités financières spécifiques, soit se rattache à la règle générale définie par l'article 13 du
règlement financier régional. L'article 13 du règlement financier institue un dispositif d'acomptes
pour les subventions supérieures ou égales à 8 000 euros tandis que l'article 14 détermine que
l'aide régionale allouée pour les subventions inférieures à 8 000 euros fait l'objet d'un versement
unique sur production des pièces justificatives.
Enfin, l'article 20 portant sur le contrôle des opérations subventionnées dispose qu'«en dehors de
la vérification opérée au moment du versement de l'aide, les services de la Région sont habilités à
procéder à toute forme de contrôle, notamment sur place avant et après le versement de l'aide».
Faute de personnel en nombre suffisant, cette disposition n'est jamais pratiquée par les services
régionaux chargés de la mise en oeuvre de l'intervention économique.
L'analyse des pièces comptables sur l'exercice 2002 a montré que les modalités de versement
des subventions s'écartent des dispositions fixées initialement. Un acompte de 30 % est toujours
versé alors même que le montant de la subvention est inférieur à 8 000 euros. A l'inverse, un
acompte de 30 % n'est pas toujours versé même lorsque le dispositif de versement de la
subvention est rappelé par la décision portant attribution. L'analyse d'un échantillon test de
sommes payées au cours de l'exercice 2002 fait apparaître que le versement des subventions
n'obéit pas souvent au règlement financier régional. L'acompte de 30 % est parfois majoré.
En réponse aux observations de la Chambre, le président du conseil régional a précisé que
«l'application des dispositions ci-dessus présentées est également dépendante de l'évolution des
dossiers et de leur état d'avancement. L'acompte de 30 % n'est pas versé dans deux cas de
figure. La subvention est soldée en une seule fois car la première facture, permettant d'obtenir le
versement de l'acompte, n'a jamais été fournie auparavant par le bénéficiaire. Le premier acompte
est supérieur à 30 % car le bénéficiaire a fourni des justificatifs de dépenses permettant de verser
un montant excédant 30 % dans les conditions fixées par le règlement financier. S'agissant des
subventions inférieures à 8 000 euros, l'observation des aides attribuées sur la période objet du
présent contrôle fait ressortir que la pratique du versement d'un acompte de 30 % a concerné
certains types d'aides tels que les bourses jeunes créateurs d'entreprises. Dans ces cas, la
décision portant attribution de l'aide précisait les modalités et prévoyait le versement de
l'acompte».
Les mandats de paiement des subventions allouées par l'intermédiaire d'organismes relais doivent
aussi respecter les conventions signées. Ainsi, la Région Lorraine, dans le cadre du soutien à
l'agriculture, procède à la distribution d'aides par l'entremise du groupement d'intérêt économique
«Lorraine Elevage». Dans un premier temps, la commission permanente autorise l'attribution de
subventions globales destinées au soutien de l'élevage, de l'équipement laitier, des jeunes
agriculteurs. Les montants des subventions ainsi validés par la commission permanente sont
substantiels et ils excèdent pour la plupart les 100 000
euros. L'annexe à la décision de la
commission permanente comporte la mention des éleveurs bénéficiaires de l'aide. Dans un
deuxième temps, une convention est signée entre la Région Lorraine et le GIE Lorraine élevage,
confirmant le dispositif de distribution établi par la commission permanente. Les engagements des
parties y sont contractualisés ainsi que les modalités de versement de la subvention. Cette
situation s'apparente là encore à une gestion de fait.
En réponse aux observations de la Chambre, l'ordonnateur a précisé que «à compter du ler
janvier 2006, les règlements d'intervention en faveur des productions d'élevage seront modifiés
pour permettre un versement des aides régionales soit directement aux bénéficiaires finaux, soit
par l'intermédiaire de l'OFIVAL, agrée organisme payeur des fonds du FEOGA Garantie pour le
plan de modernisation des bâtiments d'élevage». La Chambre en prend acte.
6.1.8. Les moyens de l'évaluation régionale des résultats
6.1.8.1. Les préconisations du Projet Lorrain
Le Projet Lorrain institue un «dispositif de suivi et d'évaluation qui doit permettre d'actualiser les
contrats de projets négociés avec chaque partenaire de l'action régionale». Son articulation
repose sur l'utilisation de trois instruments dont le dernier qui concerne les contrats de projets
comprend «une évaluation précise de l'impact des actions publiques». La mise en place du
dispositif de suivi-évaluation a pour vocation d'apporter de la transparence aux autres collectivités
lorraines et d'instituer un outil d'aide à la décision. Il doit permettre de vérifier que l'action publique
répond à des besoins non couverts ou insuffisamment satisfaits, d'améliorer les interventions
grâce à l'examen des résultats et de leurs effets, une rétroaction sur les actions en cours, et, au
vu des résultats enregistrés, de confirmer ou d'infléchir, voire de supprimer les actions conduites
et enfin, de rendre compte, aux partenaires du Plan, des résultats obtenus et du bon emploi des
ressources affectées.
La Région Lorraine souhaitait donc faire de la démarche d'évaluation ex post un outil d'aide à la
décision, rendu autonome par la mise en place d'un conseil scientifique et garantissant la
transparence des résultats. Le projet Lorrain n'a cependant pas procédé à la définition précise
d'objectifs négociés pour chacune des actions économiques à conduire. Si l'objectif de la
démarche d'évaluation introduite dans son projet par la Région Lorraine est ambitieux, faute d'une
formalisation insuffisante des indicateurs de résultats, sa mise en oeuvre est hypothéquée.
6.1.8.2. Le compte-rendu annuel
La Région Lorraine a élaboré un compte rendu annuel de mise en oeuvre des politiques
régionales. Dans ce compte-rendu, sont détaillés les principaux éléments relatifs à l'évaluation
telle qu'elle est pratiquée par la Région Lorraine. Pour chaque partie de programmes d'action, des
indicateurs de ressources et d'activités sont présentés. Les indicateurs de ressources présentent
les décisions budgétaires annuelles décidées par l'assemblée délibérante et ils sont complétés
par des indicateurs de réalisation mentionnant le niveau des affectations de crédits et le volume
financier des mandatements correspondants. Enfin, ils sont parfois complétés par des indicateurs
d'impact.
La démarche d'évaluation consiste à rechercher si les moyens mis en oeuvre produisent les effets
attendus et atteignent les objectifs fixés. Or, il apparaît que les éléments présentés par le compte
rendu annuel comme indicateurs ne se rapportent pas à des objectifs préalablement fixés et qu'ils
ne donnent que très rarement une vision dynamique ne présentant le plus souvent que les actions
accomplies au cours de l'année.
Si la qualité de la description synthétique de l'action de la Région mérite d'être soulignée, le défaut
de prospective et de présentation dynamique en fonction d'objectifs préalablement assignés ne
permet pas de prendre des mesures correctives, en dépit des orientations du Projet Lorrain. De
même, une certaine confusion est relevée entre indicateurs de réalisation et indicateurs de
résultats. Ainsi, les indicateurs de réalisation «rendent compte de l'activité du prestataire et
correspondent aux dépenses effectives» tandis que les indicateurs de résultats «mesurent l'effet
immédiat des actions mises en oeuvre sur les bénéficiaires». Or en l'espèce, la Région Lorraine
présente le plus souvent des indicateurs de réalisations. En effet, et à titre d'exemple, la
présentation des indicateurs du programme d'action 20 est significative. Le compte-rendu annuel
présente parmi les indicateurs de réalisation le nombre de projets soutenus et les informations
liées et dans ce cadre, plus particulièrement les fonds et les missions de l'Institut de
développement des initiatives lorraines (IDIL) alors que les indicateurs de résultats mentionnent
les statistiques relatives à l'IDIL. Enfin, les indicateurs d'impact mêlent des indicateurs macro-
économiques tel celui consacré au «rang de la Lorraine au plan national» avec des indicateurs de
réalisation ou de résultats comme «approche géographique». Lorsque ces derniers sont
correctement définis, comme c'est le cas pour l'action "renforcer les filières économiques
régionales", ils ne font pas l'objet d'un développement dans la partie qui leur est normalement
consacrée. L'analyse des aides directes conduite en dehors du compte rendu annuel par les
services de la Région Lorraine reste partielle, et elles ne font pas l'objet d'un suivi durable. En
effet, seules une évaluation des aides directes à l'innovation pour la période 2000-2001 et une
évaluation des aides aux entreprises accordées en 2002, laquelle se résume à six graphiques, ont
pu être présentées.
En réponse aux observations de la Chambre, l'ordonnateur a précisé qu'«afin de donner une
portée à ce document et qu'il permette d'améliorer l'action du Conseil Régional de Lorraine, ce
document fera l'objet d'une complète réorganisation".
6.1.8.3. La mission dévolue à L'Institut Lorrain d'Etudes et d'Evaluation (IL2E)
La Région Lorraine a mis en place un dispositif complémentaire et externe institué dans le contrat
de plan Etat-Région puis repris par le Projet Lorrain et adapté aux besoins de la collectivité
territoriale. L'IL2E devait être le concepteur et l'animateur d'un système de référentiels et de
standards permettant une évaluation fiable et crédible. L'Institut Lorrain d'Etudes et d'Evaluation
(IL2E) est une association mise en place par le Conseil régional de Lorraine, en étroit partenariat
avec le Conseil économique et social de Lorraine, les quatre départements lorrains et les quatre
villes chefs-lieux de département. L'IL2E est notamment chargé d'entreprendre toutes recherches
et études permettant de faire des propositions concrètes et d'éclairer le choix de ses membres en
matière de politique publique, d'engager des actions d'évaluation du contrat de plan Etat-Région,
de mener l'évaluation du 2ème Plan lorrain et d'animer le réseau régional d'observation
économique du tourisme.
S'agissant des rapports commis entre 2001 et 2005 sur les politiques d'interventions économiques
régionales, une seule étude d'évaluation portant sur le dispositif relatif à l'initiative lorraine pour
l'emploi (ILE) a été produite par IL2E. Cette étude de trente-trois pages, achevée en mars 2002,
portait un point de vue critique sur l'efficacité de l'ILE et surtout sur le transfert de charge de cette
aide vers la Région Lorraine. Les missions d'évaluation confiées à l'IL2E en la matière ont donc
été limitées. Au demeurant, faute de moyens suffisants, l'IL2E ne semble pas en mesure d'évaluer
annuellement les régimes d'aides les plus significatifs élaborés par la Région.
Le président du conseil régional a précisé en réponse qu' «après discussion entre le président de
l'Association et le Conseil Régional, il a été convenu d'engager une démarche de dissolution de
l'IL2E. L'Assemblée Générale Extraordinaire de l'association, qui s'est réunie le 8 juillet dernier a
ainsi décidé à l'unanimité la dissolution de l'Institut Lorrain d'Études et d'Évaluation (IL2E) au 31
octobre prochain et nommé M. Jean Pierre Liouville, Président de l'IL2E, liquidateur de
l'association".
La Chambre prend acte de la dissolution arrêtée par l'assemblée délibérante et elle constate
l'abandon de la démarche externe d'évaluation.
6.1.8.4. Les interventions d'organismes extérieurs
Le dispositif de sensibilisation à la création d'entreprise, confié à l'Institut de développement des
initiatives lorraines (IDIL), a fait l'objet d'une évaluation comme cela était prévu par le contrat de
plan. Cette étude de soixante-sept pages, achevée en décembre 2003, a été confiée au cabinet
Mazars. Elle dresse un état des lieux critique de l'activité de l'IDIL, de l'encadrement et de la
définition de la fonction de «tête de réseau». Le rapport présente quatre recommandations
majeures destinées à améliorer le fonctionnement de l'IDIL et sa perception par les membres du
réseau en recentrant son action sur son rôle de tête de réseau, à faire de la tête de réseau une
force de réflexion, d'analyse et de propositions, à développer les synergies entre aides à la
création d'entreprises, innovation, transfert technologique et veille, et à mettre en adéquation les
missions de l'organisme et ses moyens. La Région Lorraine a précisé qu'aucune mesure
corrective correspondant aux recommandations énoncées par le cabinet d'audit n'avait été mise
en oeuvre. L'action en matière d'intervention économique reste donc encore peu évaluée, et cette
appréciation lorsqu'elle est effectuée manque de référence à des objectifs précisément établis et
individualisés. Par ailleurs, les études et missions d'évaluation confiées à des organismes
extérieurs ne sont pas toujours suivis d'effets malgré leurs coûts de revient élevés.
En réponse au constat réalisé par la Chambre, le président a indiqué que «la Région, même si
elle n'a pas procédé à la mise en oeuvre de mesures spécifiques issues du rapport d'évaluation
de l'IDIL, a toutefois commencé à se donner les moyens d'optimiser l'activité de cet organisme en
procédant, en décembre 2003, à la création de "3i Lorraine". Cette association est issue de la
fusion de l'IDIL avec l'association ATTELOR, elle visait à optimiser les compétences des deux
structures et faire bénéficier à la partie Initiative (ex-IDIL) l'expérience et le savoir-faire de
ATTELOR dans le rôle de «tête de réseau».
6.2. Quantification des aides économiques
6.2.1. La présentation par nature
Cette présentation repose sur la distinction aujourd'hui révolue entre aide directe et aide indirecte
selon la définition posée par le Conseil d'Etat (Conseil d'Etat 18 novembre 1991 Département des
Alpes Maritimes). Ainsi, une aide directe se traduit par la mise à disposition de moyens financiers
à l'entreprise bénéficiaire avec une conséquence comptable immédiate ou potentielle dans son
compte de résultat.
En réponse au constat effectué par la Chambre, l'ordonnateur a précisé que «le tableau
présentant la répartition des aides par nature a été élaboré sur la base des subventions
mandatées. La progression importante alors observée entre les exercices 2000 et 2001 (+169 %)
repose en partie sur le report du mandatement des aides décidées en 2000 sur l'exercice 2001.
En effet, la montée en puissance progressive de la mise en oeuvre des politiques régionales
issues du Projet Lorrain s'est traduite par une concentration des dossiers de demande d'aide
régionale au cours du second semestre 2000. A compter de l'exercice 2001, le rythme de
traitement des dossiers a été atteint. Par ailleurs, les deux années 2001 et 2002 ont été marquées
par un nombre substantiel de Grands Projets résultant de l'implantation d'Investissements Directs
Etrangers. La conjoncture économique particulièrement difficile observée à compter de l'année
2002 a contraint de nombreuses entreprises à retarder leurs projets d'investissements jusqu'à la
fin 2003, entraînant par la même une évolution en «dents de scie» du montant global des aides
allouées entre 2002 et 2003. Enfin, la modification de divers dispositifs du règlement régional des
aides (Prime régionale à la Création d'Entreprise Artisanale, Prime Régionale à l'Emploi) et le
développement d'outils en faveur de la reprise-transmission d'entreprise ont clairement contribué
à accroître le nombre de dossiers accompagnés dans un contexte de croissance du nombre de
créations d'entreprise entre autres».
Le montant global des aides allouées par la Région Lorraine entre les exercices 2000 et 2004 a
progressé de plus de 209 %, traduction chiffrée des dispositions incitatives contenues dans le
Projet Lorrain. Toutefois, alors qu'au plan national, le recours aux aides directes est très
largement privilégié (il représente 75 % des montants distribués), en Lorraine, les aides directes
ne représentent que 9 % des aides attribuées. L'évolution au plan national de 2000 à 2002 a été
marquée par un net recul des aides indirectes (-18 %) et une stabilisation des aides directes (+1
%). En Lorraine, les évolutions sont inverses puisqu'on constate une diminution des aides directes
de 14 % conjuguée à une hausse des aides indirectes de 153 %.
La répartition des aides économiques versées par secteur d'activité apporte une confirmation des
objectifs régionaux en matière de soutien aux filières avec une prépondérance marquée pour les
secteurs de l'industrie, du commerce et de l'artisanat. L'ensemble des secteurs soutenus a
bénéficié d'une progression constante des aides. Là encore, la Lorraine se distingue des
évolutions nationales. Au plan national, les filières industrie commerce et artisanat ont affiché un
recul de 25 % de même que le secteur du tourisme alors que le soutien à l'agriculture a continué
de progresser (+17 %). L'action de la Région Lorraine a, au contraire, été accentuée sur chacun
de ces secteurs avec des hausses significatives de 153 % pour l'industrie le commerce et
l'artisanat, 146 % pour l'agriculture et enfin 229 % pour le tourisme.
Enfin, la part des aides allouées à chacun des secteurs montre que le soutien accordé par la
Région au secteur agricole est supérieur à la moyenne nationale, au détriment des secteurs du
bâtiment et des travaux public et du logement qui ne bénéficient pas d'aides régionales. En
moyenne, au plan national, les régions consacraient 0,9 % de l'intervention économique au
secteur du BTP et 11,30 % au logement en 2002. La répartition des aides par nature et par
secteur activité montre que seul le secteur de l'industrie du commerce et de l'artisanat bénéficie
d'aides directes.
6.2.2. Les aides directes
Les subventions représentent l'essentiel des aides directes accordées par la Région (95 %) avec
une progression continue et significative. Les primes régionales à la création d'entreprise
représentent les deux tiers des sommes distribuées en pleine cohérence avec l'observation faite
au plan national.
Toutefois, la modestie des aides directes consenties par la Région Lorraine explique que la quasi-
totalité des fonds disponibles sont utilisés au financement des PRCE (65 %) et des PRE (35 %)
alors que ces primes représentent en moyenne au plan national moins de 2 % des aides
distribuées. Toutefois, à compter de 2002, l'utilisation de ces modalités d'intervention s'est
nettement accrue (340 %). Le soutien destiné à l'artisanat, et donc par la même aux très petites
entreprises, a constitué un trait essentiel de l'action régionale en matière de prime. En effet, sur la
période analysée, les primes régionales à la création d'entreprises artisanales ont représenté près
des deux tiers des primes accordées. D'autre part, l'objectif fixé par l'exécutif régional d'attribuer
un minimum de cent primes par année budgétaire n'a été atteint qu'à compter de l'exercice 2003.
Enfin, le niveau des primes à l'emploi est resté très limité, la Région Lorraine n'accordant pas une
grande importance à ce type d'aide.
La Région Lorraine n'utilise pas non plus tous les instruments d'intervention mis à la disposition
des collectivités territoriales. En effet, le recours à la bonification d'intérêt n'a été effectif qu'à
compter de 2003, et pour une seule entreprise, tandis que le lease back et les avances en
garantie d'emprunt n'ont jamais été développés. En revanche, le recours aux prêts et avance a
disparu à compter de l'exercice 2004. Ces derniers représentent pourtant plus de 13 % des fonds
utilisés en moyenne pour l'ensemble des régions de métropole. En Lorraine, ce type d'aide n'a été
employé que ponctuellement afin de soutenir le financement des six groupements d'employeurs
de Lorraine pour un montant total de 213 428,60 euros et une durée de deux années prorogeable
une année.
6.2.3. Les aides indirectes
Alors qu'au plan national, les aménagements de zone, les aides immobilières et les autres aides
indirectes constituent à part égales les moyens privilégiés de l'intervention, la Région Lorraine,
elle, a favorisé les aides immobilières régionales. Elles représentent 62 % de l'ensemble et sont
en nette progression (+17 %). Les aides immobilières prennent entre 2000 et 2004 la forme
d'aides régionales à l'immobilier consenties pour la réalisation des biens d'équipement et visent
aussi bien les PME (83 %) que l'artisanat (14 %). Le dispositif est complété par le
subventionnement de l'investissement environnemental (3 %). Le financement moyen annuel
d'une aide immobilière individualisée a pu être arrêté à 67 466 euros pour l'aide allouée aux PME
(ARIE) tandis qu'elle ne représentait que 15 483 euros pour les entreprises à vocation artisanale.
Le nombre des dossiers traités initiés par les PME est en augmentation continue sur la période
(+5 %) alors que celui des entreprises artisanales est marqué par une baisse inverse (-6 %).
Les aménagements de zone qui représentent au plan national plus de 28 % des fonds dévolus
aux interventions toutes collectivités confondues n'ont représenté que 9 % des dépenses
réalisées par la Région Lorraine. Toutefois, l'effort lorrain, est, en cette matière significatif puisque
cette composante a représenté 8,4 % des fonds distribués en moyenne. Sur la période 2000 à
2004, ont été soutenus l'aménagement d'une zone industrielle et le financement de deux zones
d'activités à Metzange et Gondreville Fontenoy, en complément de l'effort consenti par les autres
collectivités territoriales.
L'action de la Région reste orientée vers les réseaux qu'elle soutient dans le cadre du Projet
Lorrain, et plus particulièrement les pépinières qui possèdent par nature une capacité
d'hébergement en complément des services qu'elles procurent aux porteurs de projets. Dans cet
esprit, la Région Lorraine apporte un financement prévu par un contrat de projet qui contribue à
l'investissement immobilier initial, au processus de certification, à l'acquisition de matériel et à la
bonification des loyers.
Sur cinq exercices, un montant global de 1,6 M.Euros a été consacré au soutien de onze
pépinières. Plus de 54 % de ces fonds ont été utilisés pour l'accompagnement des porteurs de
projets et le tiers pour les bonifications de loyers. Enfin, l'effort spécifique conduit en faveur des
prestations de services au bénéfice des entreprises reste faible. (11 % des fonds distribués contre
cependant 17 % en moyenne nationale toutes collectivités confondues). Bien qu'en nette évolution
supérieure à la moyenne nationale (+26 %), ces aides restent inférieures à la moyenne régionale
des subventions distribuées (27 %). En Lorraine, elles sont principalement destinées à financer
des aides au conseil (47 %) et à l'exportation (50 %). En effet, seules onze études ont été lancées
sur la période, tandis que les aides au conseil ont concerné 496 entreprises, soit un montant
moyen alloué de 4 557 euros par aide. Toutefois, 18 % des porteurs de projets ont bénéficié de
plusieurs aides au conseil. Les aides à l'exportation ont été distribuées à 140 porteurs de projets
soit un montant par aide de 17 076 euros.
6.3. La mesure de l'efficacité de l'intervention
6.3.1. L'analyse des aides distribuées en 2000
Pour porter une appréciation, la Chambre s'est rapprochée de l'ensemble des entreprises, à
l'exception des sociétés d'économie mixte et des établissements consulaires ayant reçu des aides
en 2000. L'évaluation portait principalement sur l'évolution de la situation financière des
bénéficiaires mais également sur une appréciation qualitative. 152 entreprises ont été
questionnées. Sur cet échantillon, il est apparu que trente sociétés avaient disparu, ou étant
placées en liquidation ou redressement judiciaire, n'étaient pas en mesure de répondre, soit
quinze sociétés sur trente, les autres avaient cessé leur activité ou avaient été cédées (deux). Les
aides apportées ont été payées sur l'exercice 2000 et elles n'ont donc pu produire d'effets
mesurables qu'à compter de 2001. L'échantillon a donc été étudié jusqu'en 2004 au plan
comptable et jusqu'au 31 mars 2005 pour mesurer la survie des entreprises.
Dans un premier temps, le taux élevé de défaillance à court terme parmi l'effectif sondé doit être
relevé. Ainsi, avec un taux de disparition de 19,73 % moins de quatre ans après le versement de
l'aide, il apparaît que les entreprises lorraines soutenues sont en proportion moins «résistantes»
que la moyenne nationale sur la même période (12,3 %). Toutefois, l'analyse du dispositif
d'évaluation ex ante est nécessaire. En effet, si six sociétés ont été placées en liquidation
judiciaire, deux entreprises ont été liquidées avant la fin de l'exercice 2001. Le comportement des
entreprises bénéficiaires des aides en 2000, étudié sur la période 1999 à 2004 permet de mesurer
l'incidence à long terme du soutien régional même si ce dernier ne peut être considéré comme le
seul fait générateur du comportement observé. En effet, 98 % des entreprises analysées avaient
bénéficié d'aides d'autres partenaires ou même d'une multiplication de ces dernières.
La progression générale des entreprises ayant sollicité et obtenu des subventions doit être
soulignée. En effet, en moyenne, les entreprises lorraines soutenues ont connu une forte
progression de leurs indicateurs financiers. Toutefois, cette amélioration générale est à relativiser,
par l'effet induit sur la moyenne de quelques progressions spectaculaires.
En effet, si la hausse du chiffre d'affaires à l'exportation des entreprises interrogées s'avère
spectaculaire, seules certaines d'entre-elles sont concernées. Près de 41 % de l'échantillon a en
effet subi une baisse du chiffre d'affaires à l'exportation malgré le soutien obtenu. De même, alors
que l'ensemble de l'échantillon affiche une progression modeste des résultats nets comptables,
plus de 59 % des entreprises présentent une nette diminution de leurs bénéfices. Enfin, la
croissance modérée des effectifs moyens masque mal une diminution de l'emploi pour plus du
tiers des entreprises subventionnées. Dès lors, l'aide régionale n'a sur cette période produit que
des effets limités sur l'ensemble de l'échantillon examiné. Cet effet déclencheur doit être distingué
en réalité entre les entreprises solidement ancrées au plan commercial qui ont bénéficié d'un
renforcement structurel, et celles pour lesquelles l'aide suffit à permettre un développement du
chiffre d'affaires et à maintenir l'emploi.
En complément du constat effectué par la Chambre, le président a précisé que «la présence à
l'export d'une entreprise suppose un investissement dans le temps à moyen terme pour percer sur
les marchés visés et un effort continu pour maintenir une activité d'exportation. Or, le contexte
économique international est particulièrement défavorable depuis 2002 pour les exportateurs
lorrains, notamment en présence de la parité euro/dollar. Cette difficulté se traduit au niveau
régional par un recul des exportations (chiffres de l'export lorrain). Dès lors, l'observation d'une
croissance de chiffre d'affaires export pour une majorité d'entreprises soutenues illustre l'apport de
l'aide régionale à l'exportation. De même, compte tenu du contexte rappelé ci-dessus, l'aide
contribue, pour certaine PME, à se maintenir sur les marchés étrangers malgré des efforts
financiers considérables».
La perception par les entreprises de l'aide et de son processus d'attribution semble plutôt
favorable à la Région Lorraine, même si près de la moitié des entreprises aidées regrettent que
plus d'un organisme soit intervenu dans le processus d'attribution de l'aide. Ces dernières
reconnaissent majoritairement la lisibilité du processus, la satisfaction du besoin exprimé et enfin
la simplicité de la démarche. Les deux tiers des porteurs de projets estiment «normale» la durée
s'écoulant entre l'initiation du dossier et le versement de l'aide, ce qui, en regard des constats
nationaux (52 % d'insatisfaits source DRCE) constitue un gage de bonne perception de l'action
régionale en la matière.
6.3.2. Un volume d'entreprises aidées qui reste modeste
Le tissu économique lorrain est caractérisé par une part d'entreprises unipersonnelles
(principalement artisanales) plus faible que la moyenne nationale. Par voie de conséquence, la
Lorraine compte proportionnellement plus de PME et de grandes entreprises que la moyenne des
régions. Une étude récente de l'INSEE a souligné la forte influence des groupes de dimensions
internationales en Lorraine. En effet, plus de la moitié des emplois du secteur marchand non
agricole dépendent de groupes dont le centre de décision est extérieur à la Région Lorraine. Cette
analyse est complétée par la forte imprégnation du tissu économique par les capitaux étrangers.
Enfin, l'INSEE Lorraine a indiqué que le tissu productif lorrain se renouvelait fortement, en
progressant cependant au même rythme que la moyenne française, principalement dans le sillon
lorrain et à l'est de la Région.
De plus, la Lorraine se démarque de l'évolution nationale dans le processus de transfert
d'entreprises en perdant des établissements au profit d'autres régions. Le tissu productif lorrain se
renouvelle néanmoins grâce à une dynamique soutenue de créations ex nihilo d'entreprises.
Dans sa réponse aux observations de la Chambre, le président a indiqué que «l'efficacité d'une
aide à la création ne semble pas pouvoir être mesurée par le nombre de bénéficiaires, leur
augmentation accompagnant alors une évolution générale du nombre de créations. La sélectivité
des dossiers lors de l'instruction a ainsi pour but d'identifier les projets pour lesquels l'aide aura un
effet incitatif ou de renforcement financier eu égard aux besoins générés».
La Chambre relève toutefois que l'action de soutien institutionnelle est souvent le catalyseur de la
création et du renforcement du tissu économique compte tenu de l'effet limité des aides aux
créateurs.
En dépit d'une progression notable en fin de période, le rapport entre le nombre d'entreprises
aidées chaque année et le nombre d'entreprises créées en Lorraine, reste en moyenne inférieur à
2,2 %. En outre, les aides distribuées aux entreprises déjà installées n'intéressent pas plus de 0,7
% de l'ensemble des entreprises lorraines. Ces indications mettent en lumière que l'action
conduite par la Région ne concerne qu'un nombre restreint d'entreprises sur la durée pour pouvoir
prétendre à une réelle efficacité sur le tissu économique. Enfin, l'analyse de l'ensemble des aides
accordées entre les années 2000 à 2004 met en évidence que, contrairement à la volonté
régionale d'éviter une logique de guichet ou un effet d'aubaine, plus de 40 % (40,43 %) des
entreprises aidées ont bénéficié d'au moins deux aides compte non tenu des dispositifs de PRE et
de PRCE ou PRCEA.
6.3.3. Une répartition géographique pas toujours adaptée
Le Projet Lorrain pose le principe d'une intervention économique indépendante des considérations
territoriales. Pour analyser ce sujet, l'unité retenue par la Chambre a été, outre le département, la
zone d'emploi telle qu'elle apparaît définie par les services de l'INSEE. Le territoire métropolitain
est divisé en 348 zones d'emploi. Une zone d'emploi est constituée par le regroupement d'un
certain nombre de communes appartenant toutes à la même région, mais pas nécessairement au
même département. Une zone d'emploi est un espace géographique à l'intérieur duquel la plupart
des actifs résident et travaillent. Selon cette analyse, la Région lorraine est découpée en dix-sept
zones d'emploi.
Dans sa réponse, l'ancien ordonnateur a précisé qu' «une collectivité régionale n'a pas vocation à
intervenir de façon purement arithmétique et comptable. Au contraire, dans un souci de
péréquation, le Conseil Régional se doit d'intensifier ses aides en faveur des secteurs
géographiques les moins favorisés ou confronté à des difficultés majeures, telles que des
fermetures de sites industriels importants. Les aides économiques des collectivités publiques ont
pour vocation première de permettre la réalisation d'investissements ou la création d'emplois, qui,
à défaut, n'auraient pu aboutir».
La création d'entreprises en Lorraine est en hausse continue depuis l'exercice 2001, après avoir
marqué un bref recul conjoncturel après le niveau de création observé en 2000. La performance
de la Région Lorraine en 2004 (+13 %) est nettement supérieure à la moyenne nationale (+9 %).
Sur l'ensemble de la période examinée, les progressions les plus importantes ont été enregistrées
dans les départements de la Meuse (+26 %) et de la Moselle (+22 %). La répartition géographique
entre départements lorrains a montré que près de la moitié des créations ont eu lieu en Moselle
(45 %) et près du tiers en Meurthe et Moselle (31 %). Dans le même temps, les Vosges ont
accueilli 18 % des entreprises créées et le département de la Meuse, 7 %.
Au plan national, la moitié seulement des entreprises créées au cours d'une année est toujours
active cinq ans plus tard. Selon la définition de la Banque de France, «est considérée comme
défaillante une entreprise qui a fait l'objet d'une ouverture de procédure judiciaire durant une
période d'observation donnée». Entre 1993 et 2003, si la diminution des défaillances a été en
Lorraine moins marquée qu'au plan national (-26,3 % contre 32,9 %), les défaillances ont eu des
répercussions importantes sur l'emploi. En effet, la structure même du tissu économique lorrain
génère des effets multiplicateurs significatifs lors de la fermeture des grandes entreprises telles
que les trois unités du groupe DAEWOO, MULLER frères, STAHV ou enfin BATA HELLOCOURT.
La Moselle a été le département le plus affecté par les défaillances de ses entreprises car elle a
enregistré 51 % de l'ensemble des procédures judiciaires, la Meurthe et Moselle, 28 % et les
Vosges 16 %. Les départements de la Moselle et des Vosges ont connu en outre une forte
progression de ces défaillances.
Dans le même temps, l'action régionale mesurée en nombre d'aides distribuées a été plutôt
orientée vers la Moselle (34 %), les Vosges (31 %) et la Meurthe et Moselle (25 %). Le
département de la Moselle a enregistré la progression la plus conséquente des aides accordées
avec une hausse de 116 %. Toutefois, le niveau élevé des défaillances en Moselle peut en partie
s'expliquer par les dispositions spécifiques du droit local qui autorise les faillites personnelles.
L'analyse par zone d'emploi met en lumière plusieurs distorsions notables. Ainsi, certaines zones
ont bénéficié proportionnellement d'un niveau d'aide très inférieur à celui des créations
enregistrées. En effet, les zones de Briey, Toul, Metz et Thionville ont présenté un ratio d'aide sur
création très défavorable. A titre d'exemple, le nombre d'aides allouées pour la zone d'emploi de
Thionville a constitué 6 % du total des aides accordées alors que cette zone a été le terrain de la
création de 12 % des entreprises lorraines entre 2001 et 2004. Les fonds alloués n'ont en outre
représenté que 7 % des sommes totales distribuées.
A l'inverse, certaines zones d'emploi ont bénéficié d'aides en nombre plus élevé que le taux de
création d'entreprise observé. Ainsi, les zones de Bar le Duc, de Sarrebourg, des Vosges de
l'Ouest et de Remiremont ont obtenu un nombre d'aides non corrélé avec le nombre de créations
constaté. En effet, à titre d'exemple, la zone d'emploi Remiremont-Gérardmer a représenté 12 %
des dossiers d'aides pour 9 % des fonds distribués, alors qu'elle n'a enregistré la création que de
4 % des entreprises en Lorraine.
6.3.4. La prime régionale à la création d'entreprise : un effet retardateur
La Chambre a analysé le taux de survie des entreprises aidées par le biais de la prime régionale à
la création d'entreprise (PRCE). L'échantillon test a été constitué de l'ensemble des entreprises
bénéficiaires de la PRCE au cours de l'exercice budgétaire 2000. Cela a permis une comparaison
utile avec le taux de survie mesuré au plan national à trois et cinq ans. Au cours de l'exercice
2000, trente-neuf entreprises (de type PME) ont bénéficié de la prime régionale pour un montant
total de 938 476,15 euros soit un montant moyen par entreprise de 24 463,50 euros. Au 31 mars
2005, onze entreprises avaient cessé d'exister soit 28,2 % de l'effectif total. Le taux de survie à
cinq ans des entreprises aidées (71,8 %) reste supérieur sur la même période à celui observé au
plan national (53,6 %). Toutefois, deux entreprises avaient cessé leur activité dès le mois de
janvier 2001, soit moins d'un an après le versement de l'aide. Cette analyse de la survie des
entreprises bénéficiaires de l'aide régionale à la création a été aussi effectuée en 2003 sur
l'ensemble de la population des entreprises aidées. Cet exercice offre l'avantage de rassembler
des entreprises ayant pour la plupart initié la demande et obtenu le versement de l'aide lors du
même exercice. Seules quatre aides sur quarante deux ont été générées en 2002. Durant
l'exercice 2002, quarante-deux entreprises (de type PME) ont bénéficié de la prime régionale pour
un montant total de 808 300,00
euros soit un montant moyen par entreprise de 19 245,00 euros.
Avec un taux de défaillance à un an de 14,29 % les entreprises aidées en Lorraine résistent mieux
que l'ensemble des entreprises françaises sur la même période (14,79 %). Toutefois, les
cessations prématurées doivent être relevées, car elles mettent en lumière les difficultés d'analyse
des dossiers soutenus.
Dans sa réponse, le président du conseil régional a indiqué que «l'analyse réalisée démontre que
le soutien régional, par le biais de la prime régionale à la création d'entreprise (PRCE), contribue à
consolider les entreprises en création en augmentant leur capacité à survivre au-delà des deux
étapes souvent fatidiques que représentent les troisième et cinquième années. Ce point met en
évidence que le renforcement de la structure financière d'une entreprise, objectif de la PRCE, est
essentiel pour accroître l'espérance de vie d'une entreprise. Elle démontre aussi le caractère
incitatif de l'aide qui recèle indubitablement une part de prise de risques pour la collectivité. La
disparition de deux entreprises accompagnées par la Région au cours de la première année
illustre ce propos et le rôle substantiel de la phase d'instruction, qui consiste notamment à évaluer
cette prise de risque».
6.3.5. Le soutien à l'équipement industriel de production, renforcement des fonds propres des
entreprises
Enfin, pour faire suite à une enquête conjointe de l'INSEE et des chambres régionales de
commerce et d'industrie, qui relevait en 2000 que le principal soutien recherché par les porteurs
de projets était celui portant sur l'équipement productif, une attention particulière a été portée sur
le soutien à l'équipement industriel de production dispensé en 2002. Trente-huit projets ont
bénéficié du soutien régional seul ou en complémentarité avec les partenaires économiques
territoriaux, pour un montant total de subventions versées de 1 280 569,80 euros soit 33 699,21
euros par projet, soit 11,06 % des dépenses subventionnables. Sur l'ensemble des entreprises
soutenues par la Région Lorraine, trois ont fait l'objet d'une liquidation judiciaire, deux de
cessation d'activité, une a été dissoute tandis qu'une autre subissait une fusion absorption. Même
s'il convient de noter que deux entreprises aidées ont utilisé l'effet d'aubaine pour se séparer de
leur outil de production remis à neuf, ces cas restent marginaux. Ils ne modifient pas la perception
d'ensemble qui reste celle d'un renforcement des fonds propres des sociétés aidées. En effet,
l'effet mécanique de l'amortissement des subventions a généré dans ces cas un effet de
consolidation du haut de bilan et donc par voie de conséquence, de pérennisation du financement
durable des immobilisations par stabilisation du fonds de roulement. Au 31 mars 2005, huit
sociétés (21,05 %) avaient de ce fait procédé à l'augmentation de leur capital social.
Dans sa réponse, le président du conseil régional précise que «l'aide» soutien aux équipements
de production "est mobilisée sur la base d'un programme d'investissement en matériel de
production en contribuant à son financement. A ce titre, elle peut être mobilisée pour
accompagner la préparation d'un projet de transmission d'entreprise. En effet, il est avéré que
l'obsolescence de l'outil de production est une cause de non aboutissement de telles opérations,
condamnant par là même l'entreprise à terme".
6.3.6. L'effet relatif de la prime régionale à l'emploi
Pour compléter l'analyse des aides apportées, la situation des entreprises soutenues a été
examinée au regard des engagements initialement pris. Dans ce cadre, l'ensemble des
entreprises ayant bénéficié d'une aide en 2001 au titre de la prime régionale à l'emploi (PRE) a
été examiné par le biais des déclarations annuelles des données sociales (DADS).
Dix entreprises ont été soutenues lors de l'exercice 2001 pour un montant total de primes
accordées de 856 205 euros, soit une aide par emploi créé comprise entre 1 525 euros et 4 600
euros. Le volume financier analysé correspond à 27 % des montants globaux distribués sur la
période 2000 à 2004. Les primes accordées ont donné lieu à la signature d'une convention
relative à l'attribution d'une prime régionale à l'emploi. Cette dernière a fixé les engagements de
chacune des parties et notamment ceux de l'entreprise en matière de reprise d'emploi ou de
création. Il convient de s'étonner que la PRE était versée au prorata des emplois repris ou créés
sur présentation d'une attestation sur l'honneur du dirigeant, alors que la Région est
contractuellement destinataire des déclarations annuelles des données sociales. Sur l'ensemble
des entreprises suivies au travers des DADS, une d'entre elles avait été radiée avant la fin de
l'exercice 2004. Au-delà du faible nombre d'aides attribuées dans le cadre de la prime régionale à
l'emploi, il apparaît que près de 50 % des entreprises ne remplissent pas les engagements
souscrits lors du versement de cette prime régionale. Il conviendrait donc de revoir les régimes
d'attribution des primes et de mesurer leur efficacité en organisant un contrôle de la
transformation en acte des engagements pris par les entreprises primées.
6.4. Le coût de l'aide aux entreprises lorraines
Le coût moyen du dispositif général mis en place par la Région Lorraine (0,27 euros par euro
d'aide distribué sur les exercices 2000 à 2004) se révèle supérieur à celui observé lors d'une
enquête de la DRIRE de Franche Comté sur l'exercice 2000. Toutefois, le coût élevé de
l'intervention de la Région Lorraine est en partie lié aux orientations du Projet Lorrain qui visent à
une intervention sur le tissu économique pour en modifier le comportement. Dès lors, cette action
induit un financement des partenaires et des réseaux plus élevé. Enfin, l'augmentation signalée
des coûts de structure, qui se place jusqu'en 2004 au second rang, va être accentuée par les
effets induits de l'augmentation des effectifs de la mission en charge de ces questions au sein du
conseil régional.
De fait, plus les aides accordées sont modestes, plus leur coût de gestion est élevé. Il en est ainsi
pour les dispositifs relatifs à la PRE, PRCE et surtout PRCEA. En conséquence, les frais de
distribution, conséquents et en progression continue (+26,9 %), qui atteignent globalement près
de 30 % des aides consenties justifient qu'une recherche systématique de leurs effets sur les
entreprises aidées soit effectuée.
6.5. La coordination de l'intervention économique
6.5.1. La sensibilisation à la création
Plusieurs entreprises et réseaux interviennent dans ce secteur complexe et concurrentiel qui mêle
à la fois interventionnisme économique, promotion, prospection et soutien à la création. Sur la
période examinée, qui a été marquée par la volonté de fédérer l'action régionale au travers de la
constitution de têtes de réseaux, cinq partenaires principaux ont pris le relais de l'action régionale.
Les liens contractuels ont été matérialisés soit dans le contrat de plan Etat-Région, soit au moyen
de conventions spécifiques.
En dehors de l'incubateur lorrain et de la branche de «3i Lorraine» représentant l'IDIL, les réseaux
lorrains de soutien à la création reposent sur trente acteurs, inégalement répartis
géographiquement. Ainsi, certains bassins d'emploi (selon le découpage établi par l'INSEE) sont
totalement dépourvus de ces organismes de proximité. Il est ainsi des bassins de Commercy, des
Vosges de l'Ouest, de Toul et de Briey.
En réponse aux observations de la Chambre, le président du conseil régional a toutefois précisé
que «plusieurs structures desservent des secteurs extérieurs à la zone d'emploi de leur siège. Il
en va ainsi de l'ADSN de Neuves Maisons (zone d'emploi de Nancy), qui englobe dans son
territoire d'intervention la zone d'emploi de Toul. De même, la pépinière Homégal et la Plate
Forme d'Initiative Locale Bassin de Briey Homécourt et Moyeuvre Initiative, localisée dans la zone
d'emploi de Briey, accueillent les porteurs du canton de Moyeuvre (zone d'emploi de Thionville)».
Un incubateur Lorrain, créé le 23 décembre 1999 sous la forme d'une association entre les quatre
universités de Lorraine, est soutenu dans le cadre du dispositif du contrat de plan Etat-Région. Sa
mission principale est d'accompagner les projets de création d'entreprises issus de la recherche
ou possédant une connotation scientifique marquée, voire innovante. L'action de l'incubateur se
déroule depuis la détection jusqu'au moment de la création effective matérialisée par la délivrance
du formulaire Kbis. Depuis 1999, seize entreprises ont été créées avec le soutien de l'incubateur
lorrain et sept projets sont actuellement en cours. Au regard des moyens mis en oeuvre et des
cibles fixées, les résultats sont limités. L'incubateur souffre de difficultés apparentes de
coordination entre les universités fondatrices et les membres de l'intervention économique.
L'interaction sur le même champ d'intervention des universités et des centres européens
d'entreprise et d'innovation semble manquer de clarté et de cohérence.
En réponse aux observations de la Chambre, l'ordonnateur a indiqué que les tutelles de
l'incubateur avaient insisté sur la nécessité "d'améliorer l'ensemble du processus d'aide à la
création d'entreprises innovantes en travaillant à la professionnalisation des différents opérateurs
intervenant tout au long du processus détection, preuve du concept, bonification des projets de
création, soutien aux porteurs, préparation de le sortie. Ces recommandations n'ayant pas été
suffisamment prises en compte ou en tout cas, la situation ne s'étant pas suffisamment améliorée,
les tutelles et en particulier le Conseil Régional, ont proposé de mettre à plat l'ensemble de la
question du soutien à la création d'activité à fort potentiel de croissance par une mise en réseau
des acteurs. Cette réflexion devrait conduire à une proposition de plan d'action soumis aux tutelles
au plus tard à la fin d'année 2005».
Le réseau lorrain des pépinières d'entreprise, qui comptait onze pépinières au 31 décembre 2003,
sert également de catalyseur à la création en rassemblant les porteurs de projet. Toutefois, les
pépinières rassemblent de nombreux projets à l'état embryonnaire qui ne débouchent la plupart
du temps sur aucune création effective et elles en hébergent encore moins. A titre d'exemple, lors
de l'exercice 2003, les pépinières de Lorraine ont accueilli 2 848 porteurs de projets, pour en
accompagner 937. Sur cet ensemble, seules 411 entreprises ont réellement été créées, alors
qu'enfin les pépinières n'en hébergeaient que 199.
Le Réseau lorrain des Plates-Formes d'Initiatives Locales compte douze PFIL. La vocation des
plateformes est d'apporter dès l'élaboration initiale du projet son expertise en validation, un
soutien financier par un offre de prêt sans intérêts ni demande de garantie et par un suivi post-
création de deux à trois années. L'intérêt de ces plates-formes réside dans l'effet de levier qu'elles
sont susceptibles de générer auprès des partenaires financiers potentiels en apportant le premier
financement par l'octroi d'un prêt d'honneur. L'action de ces PFIL lorraines, loin d'être négligeable,
a permis l'éclosion d'un nombre significatif de projets. Ainsi, en 2004, 458 prêts d'honneur ont
ainsi été décernés pour un montant de 2 647 795 euros, soit un montant moyen par projet de 5
782 euros. Ces prêts, d'un montant pourtant modeste, ont permis l'obtention de prêts principaux
des organismes financiers à hauteur de 21,2 M.Euros.
Toutefois, l'analyse des pièces comptables relatives à la contribution régionale au réseau des
PFIL montre des faiblesses dans son calcul et son versement. En effet, par décision n° 234-2001
en date du 27 avril 2004, la commission permanente a autorisé la subvention au fonds de dotation
des PFIL. Le contrat de projet DPR n° 3240-2001 ratifié par l'ensemble des partenaires le 6 juillet
2001 fixait les modalités de la participation régionale. L'aide devait être calculée en fonction d'une
évaluation des autres contributions devant être versées sur le fonds, dont la validation relevait de
l'attestation des subventions et participations à recevoir du commissaire aux comptes. Le montant
maximum était fixé à 20 % des sommes à recevoir. Or, il a été relevé un décalage systématique
dans le versement des subventions, la contribution 2001 étant versée durant l'exercice 2002 après
présentation des sommes effectivement perçues. De plus, la détermination de cette contribution
prévisionnelle est établie sur un simple certificat administratif et non au vu de la déclaration du
commissaire aux comptes prévue par le contrat de projet.
En réponse aux observations de la Chambre, l'ordonnateur a précisé que «le décalage dans le
versement des subventions s'explique en raison des modalités prévues par le contrat de projet. La
contribution régionale au fonds de dotation est indexée sur le montant des sommes à collecter
auprès des tiers. Ces derniers n'arrêtant souvent leur contribution qu'en milieu, voire fin d'année,
les PFIL, dans le souci légitime de percevoir le maximum d'aide régionale possible, sont amenées
à différer la production du document permettant le versement de leur subvention. La détermination
du montant de l'aide versée à chaque PFIL est intervenue sur la base d'un document récapitulatif
attesté par le commissaire aux comptes ou l'expert comptable joint aux mandats émis». L'absence
de respect des délais de paiement tout autant que les incertitudes de la détermination de la
contribution au fonds de dotation ne contribuent pas à améliorer la coordination dont la
responsabilité incombe à la Région.
La chaîne d'Alexis boutique de gestion (Atelier Lorrain pour l'Expérimentation et l'Innovation
Sociales) a pour mission d'accueillir et d'accompagner les porteurs de projets, de promouvoir et
soutenir la création et le développement des petites entreprises, de favoriser les initiatives
individuelles, d'accompagner les créateurs tout au long du projet et d'assurer un suivi de la jeune
entreprise. Les mêmes constats que ceux faits pour les pépinières peuvent être établis. En effet,
les boutiques de gestion sont confrontées à un grand nombre de projets qui n'aboutissent à une
création réelle que dans une faible proportion. Ainsi, sur 1 047 projets identifiés en 2003, seuls
181 ont été transformés en entreprises, soit un taux d'environ 17,23 %, supérieur à celui observé
pour les pépinières (14,43 %) et à la moyenne nationale pour la même année (14,73 %).
Dans cet ensemble, l'Institut de Développement des Initiatives Lorraines (IDIL) tient un rôle à part.
En effet, il est chargé, en tant que tête de réseau, de la coordination des actions conduites par les
partenaires en matière de création d'entreprises. Il est en outre responsable de la mise en place
des manifestations de promotion et d'information telles «le jardin des entreprises», les «semaines
régionales de la création», ou les «journées rencontre». L'IDIL joue également le rôle
d'observatoire sur les créations d'entreprises issues des Pépinières de Lorraine, avec un suivi
analytique sur plusieurs années. En 2002, la Région Lorraine a, dans cet esprit, confié à l'IDIL la
mise en oeuvre et le suivi d'un dispositif individualisé, le projet «PRACE» (programme régional
d'aide au créateur d'entreprise) destiné à promouvoir un accompagnement individualisé des
porteurs de projet par une pépinière support simultanément d'une formation du créateur par le
Centre National de l'Entreprenariat (CNAM).
L'action à conduire en faveur du développement de l'esprit d'entreprise, dont la coordination est
dévolue à l'IDIL, constitue une priorité majeure rappelée à plusieurs reprises par le Projet Lorrain.
Les moyens consacrés à cette mission sont, sur six exercices, substantiels (700 000 euros). La
mise en oeuvre, qui repose sur les «têtes» prédéfinies de chacun des réseaux évoqués, suppose
une parfaite coordination entre chacun des acteurs, et une impulsion directrice de la Région
Lorraine. Force est cependant de constater que le dispositif de coordination reste trop incertain.
En effet, bien que plusieurs projets communs entre réseaux aient été mis en oeuvre, la
coordination, qui repose sur une moyenne de trois séminaires «journées rencontres" organisés
par l'IDIL, reste à parfaire.
En outre, la coordination paraît également déficiente s'agissant de la connaissance et du suivi des
différents créateurs «portés» par les entités constitutives des réseaux. L'analyse des pièces
comptables démontre que les créateurs obéissant à une logique de guichet, bénéficient du
support indemnisé de plusieurs organismes facilitateurs. Ainsi, à titre d'exemple, outre les aides
au conseil obtenues directement de la collectivité régionale, des porteurs de projet ont été
simultanément supportés par l'incubateur lorrain et par une pépinière d'entreprise (IN CYTO TOX,
SYNTHELOR, WEB'AIR). La Région Lorraine a, dans ces cas précis, été conduite à verser une
double subvention censée participer à l'indemnisation des frais inhérents à l'accompagnement des
porteurs de projets. Certes, les montants en cause restent modestes (235 euros par création
supportée), mais le dispositif met en lumière des lacunes de coordination (les services régionaux
ont indiqué qu'un travail de recoupement devait désormais être mis en oeuvre).
En réponse, le président du conseil régional a précisé que «le suivi des dossiers émanant des
pépinières ayant le label Centre Européen d'Entreprises et d'Innovation (CEEI) et l'Incubateur
Lorrain est assuré depuis le second semestre 2004 par la Direction Innovation et Transfert de
Technologie. Cette organisation permet donc de détecter les risques de double subvention».
Enfin, malgré l'accent mis sur la sensibilisation à la création d'entreprises dans le Projet Lorrain, la
collectivité régionale ne diffuse aucun support à l'exception de l'information disponible sur le site
Internet du Conseil Régional. Aucun partenariat particulier n'est mis en place pour promouvoir les
dispositifs régionaux, cette fonction étant partiellement assurée par les réseaux de prescripteurs
chargés des missions d'accompagnement et de suivi des projets d'entreprises. En ce sens
l'absence d'une cellule de communication spécifique est à relever, le recrutement d'un chargé de
communication pour assurer la promotion des actions économiques étant en cours.
6.5.2. Les actions en faveur de l'exportation
L'analyse de la coordination et du partenariat relatifs à l'intervention en matière d'exportation a été
faite en distinguant avant et après mai 2003. Les aides individuelles accordées dans ce cadre ont
été surtout immatérielles puisqu'elles ont concerné la prospection commerciale pour 32 %, la
communication pour 24 % et la participation à des salons pour 16 %.
Une convention régionale à l'exportation a été conclue le 26 juin 1989 entre la Région Lorraine et
l'ensemble des partenaires du commerce extérieur dont les chambres de commerce, les
chambres des métiers, leur représentation régionale, la chambre régionale d'agriculture,
FONDEXLOR (créé en 1990, constitue le service export des Chambres de Métiers pour
accompagner les entreprises lorraines à l'export), le pôle lorrain de l'ameublement bois (PLAB
association loi 1901 créée en 1992), la bourse de sous-traitance de l'Est (BSTE), Lorraine
Habillement Textile (LORHATEX fédération de l'industrie textile habillement des Vosges),
Mecanica (association dirigée par la CCI 57), GIPEBLOR, l'ARES (Armée Recherche Economie
Science, association loi de 1901 qui rassemble 41 entreprises travaillant avec le domaine
aérospatial), le pôle plasturgie de l'Est, la Fédération des industries mécaniques, l'AIAL
(association des industries agro-alimentaire de Lorraine créée en 1978) ainsi que le comité
Lorraine des conseillers du commerce extérieur de la France et du club des exportateurs.
En réponse sur ce point, le président du conseil régional a indiqué qu' «il y a une confusion entre
la Convention Régionale de l'Exportation conclue en 1989 et le protocole d'accord entre l'Etat et la
Région Lorraine visant à anticiper le transfert au bénéfice de la Région des compétences
exercées par la DRCE Lorraine signée en 2003».
Tout en prenant acte de cette réponse, la Chambre indique qu'elle s'est appuyée, pour cette
analyse, sur les documents produits par la Région.
Cette convention s'appuyait sur un comité technique chargé d'instruire les demandes et de valider
les projets, présidé par la chambre régionale de commerce et d'industrie de la Lorraine. Outre la
mission «technique» dévolue à la tête de réseau consulaire, la CRCI a été chargée des opérations
de règlement des subventions et de la tenue d'un fonds d'avance réabondé de façon semestrielle
selon un montant forfaitaire de 300 000 euros dès lors que le fonds d'avance descendait en
dessous du seuil de 304 898 euros pour 2001, 30 000 euros pour 2002 et 2003 et 450 000 euros
pour 2004. Cette procédure conduit en pratique à maintenir un fonds de trésorerie permanent à
disposition de la compagnie régionale. Cette dernière n'a pas manqué de placer ces fonds afin
d'en obtenir des produits financiers complémentaires évalués à une moyenne annuelle de 6 400
euros. Les mouvements comptables ou financiers ne pouvant selon la convention initiale être
effectués que sur ordre de la Région Lorraine. Lors de l'examen de la gestion de la CRCI de
Lorraine, la Chambre a montré, à l'appui du solde du compte bancaire, que «le dispositif
conventionnel n'était pas totalement respecté puisque le seuil minimal n'était pas atteint». Les
services régionaux ont indiqué que les recomplètements budgétaires avaient été effectués en
fonction des agréments et non pas en fonction des disponibilités de trésorerie, et ils ont confirmé
que les écarts significatifs entre ces deux données ont entraîné des versements anticipés,
générateurs de trésorerie pour leur partenaire.
La mise en oeuvre du dispositif a en outre souffert d'un retard significatif dans la signature des
conventions privant de bases légales les subventions accordées par la compagnie régionale. En
effet, les contrats de projet entre la Région Lorraine et la Chambre Régionale de Commerce et
d'industrie de Lorraine relatifs aux exercices 2001 et 2002 n'ont été validés par la Région Lorraine
que le 4 juin 2003 (décision DPR n° 2103-2003) et rendus exécutoires par transmission au
contrôle de légalité le jour même, soit, dans le meilleur des cas, plus de six mois après la clôture
du dernier exercice auquel ils se rapportaient. La même observation peut être faite pour le contrat
de projet portant sur l'exercice 2004, rendu exécutoire le 31 janvier 2005.
Ce dispositif s'apparente, là encore, à une gestion de fait. La chambre consulaire a en effet
procédé à une redistribution des fonds reçus, sur l'instruction expresse de l'autorité locale, hors du
contrôle du comptable public et souvent sans disposer de convention approuvée.
En réponse aux observations de la Chambre, le président a indiqué que «le Conseil Régional a
redéfini les modalités de gestion des aides à l'exportation lors de sa commission permanente du
24 juin 2005. Cette décision porte entre autre rupture anticipée du contrat de projet 2005 conclu
avec la Chambre Régionale de Commerce et d'Industrie. A compter de cette date, l'ensemble des
aides régionales à l'exportation est intégralement géré par la Région et les versements sont
effectués directement au profit des bénéficiaires».
Les subventions accordées concernent des opérations individuelles destinées à développer les
projets individuels d'entreprises ayant la capacité de développer leur vente à l'exportation et des
opérations collectives visant à faciliter les contacts avec l'étranger, entretenir une démarche
d'intelligence économique, par la connaissance des marchés étrangers et des investissements
exogènes et enfin par la mise en oeuvre d'actions ponctuelles à l'international pour les
entreprises. Les actions collectives ont représenté, sur la période 2001 à 2004, près de 42 % des
sommes versées,alors que l'objectif fixé initialement par le règlement d'intervention régional était
«de favoriser le développement à l'export des entreprises lorraines»les bénéficiaires visés étant
«les PME au sens communautaire relevant des secteurs d'activité éligibles aux aides
économiques régionales». Or, les aides collectives sont principalement dispensées aux membres
de la convention, tels que la chambre régionale d'agriculture, les chambres de commerce,
Mecanica, Fondexlor. Seules trois entreprises individuelles ont été dénombrées parmi les
bénéficiaires pour des montants alloués peu significatifs, tandis que le pôle lorrain de
l'ameublement bois a bénéficié non seulement d'aides collectives mais aussi d'aides individuelles
alors qu'il ne remplissait pas les conditions d'attribution. Il en résulte que près de la moitié des
aides a été versée aux membres de l'organisme chargé d'en assurer l'analyse et la distribution
jusqu'en 2003. L'emploi de ces fonds publics ne paraît donc pas avoir été entouré de toutes les
garanties nécessaires.
En mai 2003, le Conseil Régional et l'Etat ont signé un protocole de partenariat visant à anticiper
le transfert au Conseil Régional de Lorraine des compétences exercées par la Direction Régionale
du Commerce Extérieur. Une nouvelle organisation a été mise en place dès l'année 2003 qui a vu
la création et la mise place de trois comités distincts.
6.5.3. Le soutien aux fonds propres
La faiblesse des fonds propres dont disposent les entreprises créées est l'une des causes
principales des défaillances observées lors des deux premières années d'exercice. La plupart des
créateurs ne disposant pas de fonds suffisants à investir dans leur entreprise, ils sont contraints
de rechercher des financements externes complémentaires qui prennent la forme de subventions
à l'investissement, de prêts bancaires ou d'un renforcement des fonds propres. Mais le
financement par crédit bancaire, en particulier des plus petits projets, est limité par la faiblesse
des fonds propres, le coût d'instruction du dossier, élevé par rapport au montant du prêt, et le
besoin d'un accompagnement du créateur d'entreprise afin de réduire le risque de sinistre. De ce
fait, 22 % des créations d'entreprise seulement sont financées par crédit bancaire. En outre, le
taux de survie à trois ans est de 55 % pour les entreprises financées par crédit bancaire, contre 41
% pour les entreprises n'ayant pas eu d'accès au crédit. Sur la base de ces constats, la Région
Lorraine a décidé d'intervenir à la fois par un complément des fonds propres constitués et par
l'octroi de garanties bancaires aux emprunts consentis par les organismes prêteurs.
La SADEPAR et l'institut Lorrain de participation (ILP) sont deux partenaires qui apportent des
participations sous forme d'apport en capital aux projets soutenus par la Région Lorraine. Les
objectifs poursuivis sont de permettre une croissance externe, de renforcer les fonds propres et
corrélativement d'augmenter la capacité d'emprunt, de financer les investissements matériels et
immatériels et enfin de partager le risque lié à une stratégie de développement avec un capital-
risqueur.
A l'appui des réponses apportées par les deux organismes, la Chambre souligne que ces derniers
ne se limitent pas à une intervention complémentaire de celle initiée par la Région Lorraine.
Fondée en 1989, la SADEPAR est une société d'Investissement en Capital-Risque, dont l'objectif
est de soutenir les créations d'entreprises régionales et les Start-Up technologiques avec potentiel
de développement. En pratique, la SADEPAR apporte un financement aux projets de 30 000
euros à 125 000 euros tandis que l'institut lorrain de participation participe au capital social à partir
de 150 000 euros. Devant la faiblesse de l'offre de complément en capital des très petites
entreprises sur le marché, la Région a choisi d'entrer dans le capital de la SADEPAR en octobre
2000, ouvrant ainsi le champ d'action de ce partenaire à l'ensemble de la Lorraine. Par évolution
de son actionnariat, la SADEPAR est venue s'adosser à l'institut lorrain de participation dont elle
complète le champ d'intervention. En effet, l'ILP détient 20,76 % du capital tandis que la Région
Lorraine a contribué à l'augmentation de ce dernier en prenant 19,17 %, la CDC PME constituant
l'autre actionnaire essentiel avec une participation de 24,76 %. Un protocole d'actionnaires conclu
entre la SADEPAR et les organismes ayant participé à l'augmentation de capital a été signé le 7
juillet 2000. Il fixe notamment les modalités d'intervention de la nouvelle société de capital
investissement. La participation initiale ne peut excéder 125 000 euros lors de la première
intervention et 185 000 euros après une intervention complémentaire sans jamais excéder 36 %
du capital social. Les parts détenues par la SADEPAR dans la société soutenues ont vocation à
être revendues après cinq à sept années d'exercice.
En réponse aux observations de la Chambre, le président du conseil régional a indiqué que «deux
principes régissent l'action de la SADEPAR comme toute autre structure de capital
investissement: la prise de participation en fonds propres de façon minoritaire (maximum 36 % du
capital social). De fait, les entreprises individuelles ou les sociétés ayant un capital inférieur à 90
000 euros semblent exclues du champ d'intervention de SADEPAR. Afin de satisfaire aux objectifs
du Conseil Régional et proposer des solutions de financement à un segment de marché délaissé
par le secteur privé, le conseil d'administration de SADEPAR a décidé, le 21 avril 2005, de
développer les interventions sous forme de comptes courants d'associés. Cet outil permettra
d'accompagner des petites entreprises sans «diluer» le chef d'entreprise.
Les dossiers lui sont transmis soit par le biais de la CCI, de la Sodie, de l'ILP, de la Région
Lorraine ou des cabinets d'expertise comptable. Au 31 décembre 2003, les participations
accordées par la SADEPAR restaient modestes à l'échelle régionale mais elles correspondaient
toutefois à sa capacité d'action.
Selon l'ordonnateur, «SADEPAR est en phase d'investissement depuis 2001, année
d'augmentation de son capital social. En quatre années, la société a étudié 192 projets et a pris
une participation dans 37 d'entre eux pour un investissement total de 2 249 000 E. Son
portefeuille est composé d'entreprises nouvellement créées à hauteur de 55 %, dont 78
concernent des entreprises technologiques dites innovantes». Si la complémentarité avec l'ILP
semble s'imposer d'elle-même, toutefois, aucune action n'est menée en faveur des micro
entreprises ni même en liaison directe avec les boutiques de gestion, pépinières et PFIL.
L'ILP gère 23 M.Euros de capital et il participe par ce moyen aux fonds propres de soixante-cinq
sociétés (Capacité unitaire d'investissement : de 150 000 à 1 300 000 euros). Le portefeuille de
l'ILP se compose de 81 % d'actions et de 19 % d'obligations convertibles en actions. Son champ
d'action se décompose entre les créations d'entreprises pour 30 %, leur développement pour 60
% et enfin, la transmission pour 30 %. La répartition par secteur d'activité souligne la
prépondérance de la mécanique (19 %). Les industries du bois/verre/papier de l'agroalimentaire,
des services, des nouvelles technologies de l'électricité/électronique représentant chacun pour ce
qui le concerne 10 % de l'ensemble soutenu. A l'image de la SADEPAR la mission de l'ILP
consiste à prendre une participation au capital d'une société dans le but de soutenir un projet de
développement, de transmission ou de création, sans pour autant assumer la gestion de la
société. Le montant maximum de la participation reste donc limité à 40 % du capital social. La
rémunération de la participation s'effectue soit sous forme de dividendes représentants la quote-
part du bénéfice distribuable ou sous forme de plus-value de cession, réalisée lors de la vente des
titres détenus dans le capital de la société. L'intervention de l'institut lorrain de participation
s'avère essentielle lorsque la capacité de financement de l'entreprise est insuffisante pour couvrir
les besoins d'un projet de développement ou lorsque, face à un projet ambitieux, le chef
d'entreprise souhaite en partager les risques ou lorsqu'en cas de cession le repreneur choisi ne
dispose pas de moyens financiers suffisants. Outre l'effet d'accordéon partiel mais immédiat, la
participation permet de relever le plafond du niveau d'endettement et permettre à l'entreprise de
recourir à nouveau à l'emprunt.
Au 31 décembre 2004, l'institut lorrain de participation détenait pour 23 M.Euros de titres de
soixante-cinq sociétés. Toutefois, eu égard à la procédure et à l'étroitesse des cibles visées, l'ILP
ne s'engage qu'avec prudence dans le capital social. Ainsi, en 2003, sur cinquante-cinq dossiers
analysés seuls quatre ont connu une suite favorable. En revanche, l'ILP réalise une véritable prise
de risque puisqu'il ne se garantit pas directement des défaillances des entreprises soutenues. Ce
risque est réel puisque sur le même exercice cinq sociétés ont été contraintes au dépôt de bilan.
Si l'ILP ne se garantit pas lui-même, son principal actionnaire le fait au travers des garanties
SOFARIS et SOFARIS Régions.
Pour compléter l'analyse de la Chambre, l'ordonnateur a précisé que «l'activité de l'Institut Lorrain
de Participation (ILP) est identique à celle de SADEPAR : intervention en fonds propres et quasi
fonds propres. Toutefois, son niveau d'intervention est supérieur : tickets de 150 000 euros à 1
300 000 euros. Suite à de récentes orientations, l'ILP couvre prioritairement le champ des
transmissions et du développement d'entreprises, qui représentent respectivement 46 % et 43 %
de son portefeuille. Si ce dernier apparaît relativement sain, il faisait tout de même l'objet de
provisions pour risques à hauteur de 25 % au terme de l'exercice 2004. La traduction de cette
prise de risque s'est notamment fait ressentir au cours des exercices 2002, avec un résultat net
négatif de 2 032 000 euros résultant du provisionnement du risque pour plusieurs participations, et
2003 par la défaillance de 5 entreprises du portefeuille de l'ILP. L'ILP est caractérisé par une faible
rentabilité et une faible rotation de son portefeuille, de ce fait, il disposait d'une capacité
d'investissement restreinte jusqu'en 2003/2004. Les plus-values sur cessions de participations
réalisées au cours de l'exercice 2004 lui ont permis de dégager de nouvelles liquidités et de
disposer d'une capacité d'investissement reconstituée».
Enfin, s'agissant du soutien au fonds propres des entreprises lorraines, la Région Lorraine a lancé
plusieurs études destinées à évaluer les besoins en financement des structures et entreprises à
soutenir. Ainsi, une première étude a été initiée en coopération avec la Caisse des dépôts et
consignation en 1998. Elle a été suivie d'une deuxième étude visant à définir les conditions de
mise en place d'un outil de renforcement des fonds propres des structures soutenues par
l'initiative lorraine pour l'emploi confié en novembre 2001 à la société OPUS 3 tandis qu'une
troisième étude était confiée au cabinet KPMG Nancy en 2002. Les conclusions de la première
étude réalisée en 1998, afin de garantir efficacement la consolidation des intervenants précités,
préconisaient la constitution d'un fonds de garantie permettant le développement du recours au
crédit bancaire, le lancement d'un outil d'épargne solidaire par une banque partenaire afin de
permettre des interventions en fonds propres, une action pédagogique visant à permettre pour les
associations créatrices d'emploi, la constitution de fonds propres par des reports à nouveau.
Le cabinet OPUS 3 a conclu le 11 novembre 2001 à l'opportunité de créer un outil d'intervention
en fonds propre orienté vers la cible associative et les structures d'insertion par l'activité par la
création d'une cellule régionale d'animation et d'ingénierie. Au 31 mars 2005, seule la première
des préconisations émises en 1998 avait été suivie d'effet par la création d'un fonds de garantie
Lorraine. S'agissant des recommandations de l'étude réalisée en 2001, ces dernières ont abouti à
la création d'une association Lorraine Active le 9 novembre 2004. Cette entité, qui regroupe
autour de l'Etat et des collectivités territoriales les acteurs de l'économie sociale et de l'insertion
en Lorraine, a pour objet le renforcement des structures de l'économie sociale en facilitant leur
financement.
6.5.4. La participation à des fonds de garantie
Le fonds de garantie régional lorrain a été créé par le Conseil régional, les conseils généraux de
Meurthe et Moselle, de Meuse et le réseau France active en collaboration avec la Caisse des
Dépôts et Consignation. L'originalité du dispositif réside dans l'aide apportée par l'obtention des
prêts bancaires sollicités par les structures d'insertion par l'économique. Au 31 mars 2005, le
fonds restait directement administré par la Région Lorraine. Le faible nombre de créateurs et
d'organismes visés n'a pas permis un plein rayonnement de cet outil qui est resté limité à l'analyse
de quatorze dossiers pour l'octroi de dix garanties apportées pour seulement 45 % de 364 000
euros de crédits bancaires.
La Région Lorraine a procédé en fin d'exercice 2000 à la constitution de deux fonds régionaux de
garantie gérés par SOFARIS Régions : un fonds régional de garantie Lorraine - Forêt bois de 3
M.Euros le 22 août 2000 pour un volume de financement co-garanti par le fonds, et les fonds
nationaux de 40,5 M.Euros. La signature d'une convention Création Reprise Transmission avec
SOFARIS Régions par la commission permanente le 30 juin 2000 a permis la mise en oeuvre du
fonds régional correspondant le 11 septembre 2000, par reversement des fonds laissés libres
d'emploi sur les fonds de garantie utilisés jusqu'alors, soit un montant
Le fonds intervient en co-
garantie avec les fonds nationaux de SOFARIS, laquelle est par ailleurs bénéficiaire de
subventions nationales. La croissance de son activité a été réelle : «272 millions d'euros de
concours ont été garantis, soit une progression de 120 %. Près de 1 700 opérations ont bénéficié
depuis le lancement de cet appui régional». Malgré la large ouverture des bénéficiaires potentiels,
peu de prêts ont été cautionnés (six en 2001, onze en 2002 et six en 2003). La Région Lorraine a
précisé que cette situation était principalement due à un problème de communication n'ayant pas
permis d'atteindre les cibles fixées initialement : les petites entreprises. La Région Lorraine
semble donc n'avoir jamais été en mesure d'assurer une réelle coordination efficace des différents
acteurs de l'intervention économique. Il s'est plutôt agi d'une délégation sans que soient mis en
oeuvre des liens étroits de surveillance ou de comptes-rendus.
6.5.5. L'absence de relation avec les comités de bassin d'emploi
Les comités de bassin d'emploi ont été institués par l'article 49 de la loi n° 99-533 du 25 juin 1999,
d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire et portant modification
de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du
territoire. Les comités d'expansion et les agences de développement économique, associations de
la loi du 1er juillet 1901, créés à l'initiative des collectivités territoriales, ainsi que les comités de
bassin d'emploi peuvent assister les collectivités territoriales dans l'élaboration et la mise en
oeuvre de leurs stratégies de développement économique. Alors que la Région Lorraine comptait
au 26 avril 2005, cinq comités de bassin d'emploi, la collectivité territoriale n'a noué aucun contact
avec eux.
6.5.6. Le réseau de développement technologique
Le Réseau de Développement Technologique permet aux PME peu familiarisées avec le
processus d'innovation d'identifier leurs besoins technologiques, de construire un projet, et de
trouver les compétences nécessaires. Le réseau de développement technologique lorrain figure
parmi les premiers réseaux créés (1989) et il est constitué comme un outil incontournable du
développement régional de l'innovation en faveur des entreprises.
Depuis 1993, une convention
entre l'Anvar et le Conseil régional constitue le cadre du fonctionnement du RDT régional. La
Région a confié l'animation du réseau à 3i Lorraine (ATTELOR). Le financement est réalisé en
partenariat entre la Région, l'Etat et l'ANVAR.
L'action du réseau repose sur la stratégie définie par le comité de pilotage qui comprend le
Conseil Régional de Lorraine, l'ANVAR, la DRIRE, la DRRT. Le réseau Lorrain compte 27
membres : sept Centres de Ressources Technologiques (CRT), trois Centres Régionaux
d'Innovation et de Transfert de Technologie (CRITT), six Chambres Consulaires/deux agences de
création d'entreprise, un Centre Technique Industriel et huit agences de coordination technique.
Enfin, six organismes dits «associés» viennent compléter le dispositif : le rectorat de l'Académie
de Nancy-Metz, l'Institut National Polytechnique de Lorraine, l'Université Henri Poincaré,
l'Université de Metz, l'Université Nancy 2 et l'INRIA. Le maillage du territoire met en lumière qu'en
dehors des spécialisations territoriales marquées les relais technologiques sont concentrés autour
des villes universitaires, Verdun faisant exception à la règle.
Dans le cadre des actions du réseau technologique, le programme Lorraine Technologie a été mis
en place. Il vise à sensibiliser les petites et moyennes entreprises peu innovantes. Les visites en
entreprises font l'objet d'un compte-rendu dont les informations sont conservées dans une base
de données détenue par 3i Lorraine, de manière à constituer un observatoire régional des besoins
des entreprises en matière d'innovation. La mise en oeuvre du programme, malgré des moyens
humains et financiers élevés, n'est à l'origine en moyenne que de trente-trois actions d'entreprises
et de quarante-sept actions de projets techniques, soit un peu plus de deux actions annuelles par
acteur. En outre, il convient de relever la faiblesse des conventions de recherche pour les
techniciens supérieurs (CORTECHS), vingt-quatre en moyenne. L'objectif initial était pourtant
d'inciter les PME-PMI à confier à un jeune technicien supérieur (bac+2) un projet de
développement technologique sur un an en partenariat avec un centre de compétence.
Les réseaux de développement technologique sont devenus des observateurs des besoins des
entreprises, sans, comme en Lorraine, disposer pour autant de plan de prospection. Le nombre de
visites effectuées par le réseau de développement technologique lorrain, place la Région au
13ème rang parmi les membres du RDT national.
Au regard des observations faites au plan national, le réseau lorrain, qui n'a formé ses personnels
prospecteurs que durant sept jours en moyenne, réalise un volume de prestations technologique
en baisse continue (-40 %). Les très petites entreprises, cour de cible de l'institution sont moins
prospectées qu'en moyenne nationale (50 % contre 58 %. Les secteurs les plus représentés sont
ceux des entreprises de fabrication de machines et équipements alors qu'au plan national, l'action
se concentre en faveur des industries alimentaires.
Devant les faibles résultats du réseau, la Région Lorraine a décidé de remettre à plat l'ensemble
du dispositif. Selon la collectivité régionale, les distorsions des résultats seraient l'expression de
l'inadaptation de la cellule d'animation du réseau qui ne permettait plus de valoriser ni d'exploiter
les informations.
6.6. La problématique des «Grands projets»
Un grand projet suppose l'intervention combinée de plusieurs acteurs économiques pour mener à
terme le financement, selon le phénomène du «tour de table». Cette démarche s'inscrit
pleinement dans une logique de guichet que la Région Lorraine a entendu pourtant exclure. En
effet, l'intervention régionale peut avoir pour objet de soutenir l'ensemble des phases du projet,
qu'il s'agisse de la construction ou de la location immobilière, de l'aménagement des zones
industrielles personnalisées ou de la formation.
Les règlements d'intervention précisent que l'aide apportée peut s'inscrire dans un
«conventionnement avec l'Etat et selon la taille des projets et doit faire l'objet d'une notification
individuelle à la Commission Européenne». Une limite maximale de 4 600 euros par emploi créé a
été fixée par le conseil régional de Lorraine. Cette aide pouvant être complétée par l'intervention
d'autres collectivités.
Pour bénéficier de l'aide, les porteurs de projet doivent présenter un dossier d'investissement d'un
montant minimal de 6 M.Euros HT, conduisant à la création de quarante emplois. Les règlements
d'intervention régionaux ont toutefois prévu la possibilité de passer outre les seuils précités, dès
lors que le projet est susceptible d'avoir un effet structurant sur le territoire ou sur une filière
économique. Il apparaît que la définition des exceptions particulièrement large, permet en
définitive tous les types d'intervention.
Les grands projets comprennent des actions conduites par les collectivités territoriales, des
établissements consulaires ou des sociétés d'économie mixtes. En effet, figurent dans le soutien
aux grands projets, les opérations relatives à l'aménagement de l'aéroport régional (28,2
M.Euros), les aides accordées au district de Freyming Merlebach, à la commune de Thionville,
aux syndicats mixtes de Gondreville Fontenoy et de la réalisation de zones industrielles à Nancy,
enfin les interventions en faveur des opérations conduites par la chambre de commerce et
d'industrie de la Moselle, des Charbonnages de France et par la société d'équipement du bassin
lorrain (SEBL). Si l'on excepte les opérations précitées, qui concernent des acteurs publics ou
parapublics, le soutien aux grands projets n'a concerné que vingt et une entreprises pour un
montant de 12,6 M.Euros.
En réponse aux observations de la Chambre, le président du conseil régional a précisé que «Le
dispositif d'aide intitulé «Grands Projets» a été institué pour doter le Conseil Régional d'un outil lui
permettant de mobiliser des moyens adaptés aux caractéristiques de certains projets
d'implantation ou de développement d'entreprises, plus particulièrement les Investissements
Directs Etrangers (IDE). Sa mise en oeuvre découle de la stratégie régionale de prospection
d'IDE, via APEILOR puis ADIELOR, et complète les actions menées en la matière. Dans la
majorité des cas, il est utilisé pour des projets économiques associant l'ensemble des partenaires
publics compétents en matière de développement économique: Etat, départements, voire
Etablissements Publics de Coopération Intercommunale».
Au demeurant, le régime des exceptions fixées est en réalité devenu la règle. Ainsi, sur
l'ensemble des grands projets subventionnés, seuls cinq dépassaient le seuil d'éligibilité en
investissement minimum et pour l'un d'entre eux la condition de création minimale de quarante
emplois n'était pas satisfaite. De plus, le montant maximum de l'aide par emploi créé de 4 600
euros n'a pas été respecté. A titre d'exemple, les montants des aides par emploi allouées aux
entreprises Eurostamp (5 211,93 euros), MGE (7 445,18 euros), Pilkington Glass France (18
504,16 euros), se situent bien au-delà des plafonds d'intervention. Selon la réponse de
l'ordonnateur, l'aide «Grands Projets» est "calculée sur la base du nombre d'emplois prévus, mais
liquidée au prorata de la justification des investissements réalisée".
Enfin, force est de constater que les engagements en terme de création d'emplois ne sont pas
toujours tenus, trois ans après le versement de la subvention régionale. Ainsi, l'exploitation des
DADS 1 a montré que le nombre d'emplois créé n'atteint que 80 % de ceux prévus dans le projet
de subvention. A titre d'exemple, la société Pilkington qui s'était engagée à créer 245 emplois n'en
a créé que 132 et la société Eurostamp 63 contre 117 initialement prévus.
La Région Lorraine a par ailleurs participé au financement complémentaire de l'aménagement de
zones dans le cadre de la politique des grands projets. Ainsi, une convention n° 2743-2002 du 24
juillet 2002 liant la Région Lorraine, la ville de Thionville et la société d'équipement du bassin
lorrain (la décision de l'assemblée plénière en date du 25 octobre 2001) a entériné la participation
régionale à l'édification du parc logistique de Metzange. Le montant total des travaux
d'aménagement de la zone d'aménagement concerté de Metzange Buchel a été initialement fixé à
12 820 962,35 euros. Par cette convention, la Région Lorraine, a mis à disposition de la ville de
Thionville une avance remboursable de 1 036 653,32 euros. L'article 2 de la convention prévoyait
en outre le reversement de cette aide indirecte à la société aménageur du site, la SEBL. L'article 3
de cette même convention retenait les modalités de remboursement de l'avance remboursable
selon un échéancier précis par la commune de Thionville compte tenu d'un différé de
remboursement contractuel de 18 mois. Le dispositif prévoyait en outre l'obligation pour la
commune de Thionville de transmettre, en même temps que le règlement des échéances, un bilan
récapitulatif précis des emplois à durée indéterminé créés sur la zone par l'ensemble des
entreprises concernées. Force est de constater qu'aucun des versements exigibles n'a été
effectué selon l'échéancier fixé.
Aucun titre de recette n'a été émis à l'encontre de la commune de Thionville, cette dernière ayant
demandé une prorogation du différé de remboursement de deux ans. La commission permanente
a, par décision du 7 novembre 2003, fait droit à cette demande. Un avenant modifiant le contrat
initial entre les trois parties a été rédigé puis signé par les deux collectivités. Toutefois, la SEBL,
malgré plusieurs relances de la Région Lorraine, n'a jamais procédé à la signature de l'avenant
privant ainsi de base juridique les reports d'échéances autorisés.
Par ailleurs, le dispositif conventionnel prévu par la loi impose qu'un conventionnement direct soit
établi, ce qui ne semble pas avoir été le cas en l'espèce. La réponse apportée par le mandataire
corrobore par ailleurs l'analyse de la Chambre en ce qu'il soutient que «concernant l'opération de
la zone de Metzange à Thionville, la SEBL a transmis la convention à la ville de Thionville son
concédant, en sollicitant de la part de cette dernière sa transmission à la Région Lorraine».
6.7. Le plan de soutien conjoncturel
Afin de faire face à la conjoncture économique défavorable frappant depuis le printemps 2002 les
secteurs majeurs d'activité, le Conseil Régional de Lorraine a voté la mise en oeuvre d'un fonds
de soutien conjoncturel aux difficultés d'entreprises lors de l'assemblée plénière du 15 novembre
2002.
Le plan élaboré visait le soutien des filières régionales en difficultés telles le bois, l'ameublement
et le textile. Il était complété par l'adoption de mesures pouvant bénéficier à l'ensemble des
entreprises. Le deuxième volet du plan était destiné aux salariés licenciés ou menacés de
licenciement. L'objectif était de proposer aux salariés dont l'emploi était fragilisé des bilans de
compétences et des orientations de réinsertion, et pour les personnels licenciés de mettre en
place un catalogue de formation appuyé par des cellules de reclassement. L'action globale de la
Région Lorraine s'est avérée significative au plan budgétaire puisque près de 5 M.Euros ont été
affectés directement à ces mesures.
Selon la réponse de l'ancien ordonnateur, le plan de soutien conjoncturel pouvait être mobilisé de
«manière offensive, en soutien à un projet de renforcement des compétences d'une entreprise
confrontée à un contexte économique difficile. Dans ce premier cas de figure, il s'agit d'abonder le
plan de formation de l'entreprise, à sa demande, en application». Ce plan pouvait également être
mis en application «de manière défensive, lors de la mise en oeuvre d'un plan social».
6.7.1. Les actions économiques du plan conjoncturel
Selon la réponse apportée par le président du conseil régional, «le volet économique du plan de
soutien conjoncturel avait pour objet d'accompagner les entreprises des filières régionales
traditionnelles, bois, ameublement et textile, dans leur recherche de gains de productivité compte
tenu des spécificités de leur marché. Il s'agissait plus particulièrement de soutenir les entreprises
de ces secteurs qui s'engageaient dans une démarche d'anticipation dans un contexte de
renforcement de la concurrence. La mise en oeuvre s'est traduite par la création d'un fonds de
soutien conjoncturel représentant une enveloppe financière supplémentaire de 1 500 000 euros
dès le budget primitif 2003. Ce fonds était destiné à financer des actions collectives ou des projets
individuels».
L'application du dispositif économique prévu a reposé sur l'aide à l'investissement et en premier
lieu la modernisation de l'outil de production, puis l'aide à la reprise des entreprises en difficulté.
Cet effort a été complété par une hausse du niveau des garanties apportées par la collectivité
régionale au travers des fonds de garantie auxquels elle participe. Cinquante-cinq dossiers ont été
analysés dans le cadre de ce plan conjoncturel en 2003. Selon les services régionaux, «eu égard
au cadre règlementaire des aides publiques aux entreprises, il s'agissait d'optimiser l'utilisation
des outils régionaux existants par la mobilisation de crédits supplémentaires».
L'ordonnateur en réponse aux observations de la Chambre précise que «L'assemblée avait
également décidé de doter à nouveau le Fonds Régional de Garantie Lorraine de 750 000 euros
non prélevés sur le fonds, en vue de garantir une partie du risque encouru par les établissements
prêteurs appelés à financer les projets de développement (investissements matériels et
immatériels) et de faciliter ainsi l'accès au crédit. Cette modification, pouvant bénéficier à toutes
les entreprises, correspondait pleinement aux besoins d'investissement des entreprises des
filières retenues».
Il apparaît toutefois à l'examen des pièces produites à la Chambre que l'usage du fonds n'a pas
été exclusivement réservé aux situations de crise. Les opérations qui auraient pu être primées par
ailleurs ont représenté 75 % des projets aidés. Ainsi, les opérations d'investissement et de conseil
faisaient l'objet de mesures spécifiques et elles n'avaient pas vocation à peser sur le budget
réservé au plan conjoncturel.
6.7.2. Présentation du volet social
Ce plan se décline en trois parties
: le soutien à la mise en oeuvre de bilan de compétences
approfondis au profit des personnels salariés dont l'emploi est menacé et qui s'orientent vers une
réinsertion professionnelle, l'amélioration des moyens des cellules de reclassement, et enfin, le
soutien à la démarche de gestion prévisionnelle des compétences au sein d'entreprises
s'engageant dans la reconversion des salariés ou lors de reprises collectives de salariés sous le
coup de procédure de licenciement.
Pour être éligibles les entreprises doivent avoir engagé un plan social, employer plus de dix
salariés et avoir un impact significatif sur l'équilibre économique et social du bassin d'emploi
concerné. Le budget consacré à cette seule mesure, en 2003, a été significatif (1 250 000 euros),
et il a concerné l'atténuation de vingt-six plans sociaux.
L'annexe 4 «Fonds de soutien conjoncturel» du recueil des règlements d'interventions précise les
conditions d'applications des subventions. En cas de processus de licenciement engagé hors
procédure judiciaire, l'accent est mis sur la prévention et l'atténuation des plans sociaux par la
mise en oeuvre d'une démarche «compétences», sur le retour à l'emploi des personnels licenciés
par le renforcement des bilans individuels de compétences par appel à un prestataire extérieur,
par l'amélioration du budget de la cellule de reclassement lorsque ce dernier est insuffisant et
dans la limite du plafond de 1 607,14 euros par personne, et enfin, par l'augmentation du nombre
de cellule de reclassement, sans pour autant que la Région se substitue à l'entreprise.
En cas de procédure judiciaire, l'action régionale s'oriente vers la formation pour les personnels en
situation de demandeurs d'emploi (selon le bassin et le projet professionnel), vers
l'accompagnement individuel pour garantir l'intégration professionnelle et vers le reclassement des
personnels licenciés en finançant la cellule de reclassement.
Cette même annexe précise que «les moyens mis en oeuvre restent ceux autorisés par le
règlement des aides et interventions économiques régionales arrêté par référence aux textes
européens». Le recueil des règlements d'intervention définit trois modalités de subventionnement
au travers du programme d'action «soutenir les salariés lors de restructurations économiques» :
l'établissement de bilans approfondis pour salariés concernés par une restructuration
économique, la mise en oeuvre d'un processus de gestion prévisionnelle des compétences en
entreprise liée à un processus de restructuration économique et le dispositif de recherche active
d'emploi.
6.7.3. Une absence de cadre juridique suffisamment précis
L'analyse des décisions prises par la Région Lorraine en la matière montre que six types de
dispositifs ont été en réalité subventionnés pour trois régimes votés : les projets pédagogiques
innovants, les opérations collectives, les actions expérimentales, les bilans de compétences, la
formation de réinsertion et enfin la gestion des compétences en entreprises. Les moyens dévolus
à chacune de ces mesures ont atteint, pour les exercices 2003-2004, 4,6 M.Euros.
Ainsi, il apparaît que la moitié des mesures n'a pas été exécutée dans le cadre de règlements
d'intervention votés par l'assemblée délibérante, qui avait pourtant fixé un cadre précis lors de
l'élaboration du plan conjoncturel et de la validation des modalités d'intervention. Or, l'article
L1511-2 du code général des collectivités territoriales alors applicable disposait que «les aides
directes revêtent la forme de subventions, de bonifications d'intérêts ou de prêts et d'avances
remboursables. Elles sont attribuées par la Région, et leur régime est déterminé par délibération
du Conseil Régional.»
Le dispositif issu de l'article 102 de la loi du 27 février 2002 a permis aussi bien à la Région de
décider l'attribution d'aides individuelles au cas par cas que d'instituer un régime d'aide plus
général qui a vocation à bénéficier à plusieurs entreprises. En l'espèce, ces régimes ont été mis à
profit pour soutenir plus d'une entité. Le régime des aides doit déterminer avec précision les
bénéficiaires, le montant et l'assiette éligible. Le règlement de la commission n° 68/2001 du 12
janvier 2001, concernant l'application des articles 87 et 88 du traité CE aux aides à l'emploi,
prévoit notamment que l'Etat membre communique à la commission dans un délai de vingt jours
ouvrables les régimes d'aide en question. Les Régions doivent donc transmettre les délibérations
qui instituent le régime d'aide ou, s'il s'agit d'une aide n'entrant pas dans le champ d'application du
régime d'exemption, une demande de notification en application de la circulaire du Ministère de
l'Intérieur DGCL, 16-01-2003, NOR : LBL0310007C.
Il apparaît qu'en l'absence de régime d'intervention dûment validé par l'assemblée délibérante, la
Région Lorraine n'est pas en mesure de remplir ses obligations et qu'elle s'expose à l'annulation
des aides accordées.
6.7.4. Une absence de mise en compétition
En outre, les volumes et les bénéficiaires des opérations montrent qu'un montant important de
prestations a été confié à douze prestataires. A l'exception des opérations collectives, lesquelles
peuvent être réparties aisément dans l'une des cinq autres catégories, le seuil des marchés
publics de service tel qu'il est institué par l'article 28 du code des marchés publics a été franchi
sans mise en concurrence.
En réponse aux observations provisoires, l'ordonnateur, qui ne partage pas l'analyse de la
Chambre, a indiqué que «La collectivité territoriale n'est jamais à l'origine du besoin: par
conséquent, la notion de marché public, qui se définit comme un contrat conclu à titre onéreux par
une personne morale de droit public en vue de répondre à ses besoins en matière de travaux, de
fournitures ou de services (art. 1 du code des marchés publics)», ne s'applique donc pas à ce
contexte bien spécifique des PSE. Par contre cette situation relève plus de la subvention qui se
définit comme une «aide financière versée par une collectivité publique au titre d'activités
concourrant à l'intérêt général dont elle n'a ni l'initiative ni la responsabilité et qui ne constitue pas
le prix d'acquisition d'un bien ou d'un service» : en effet, comme nous l'avons précisé
précédemment, la collectivité n'est pas à l'origine de la commande (ce sont les services de l'Etat,
ou un cabinet privé financé sur fond de l'Etat), cela ne vise pas à satisfaire ses besoins propres
(les actions formations sont définies par les opérateurs de la cellule de reclassement financée par
l'Etat et s'adressent à des personnes en reconversion, sous statut de membres de cette cellule de
reclassement, et non pas de demandeurs d'emploi de droit public), et enfin le montant affecté
n'est pas la contrepartie intégrale des prestations fournies dans le cadre de ces PSE qui sont
aussi financés par les Assedic pour la formation et les services de l'Etat pour le financement des
cabinets de reclassement. Dans ce contexte, non seulement la mise en compétition n'est pas
obligatoire, mais elle est totalement impossible et notre intervention relève donc plus de la
subvention d'actions décidées par d'autres en fonction d'objectifs qui ne sont pas du ressort du
Conseil régional».
Les conseils régionaux, à l'instar des autres financeurs publics de formation professionnelle
continue, peuvent financer les actions contenues dans leurs programmes en octroyant des
subventions. Les financeurs publics intervenant dans le champ de la formation professionnelle,
dont les conseils régionaux, peuvent en effet choisir d'octroyer des subventions à des structures
qui veulent réaliser des activités conformes à une politique publique dont le financeur a la charge.
Ces subventions sont alors une contribution financière de la personne publique à une opération
initiée et menée par un tiers pour répondre à des besoins que ce tiers a, lui seul, définis.
Les acteurs publics peuvent également retenir la passation de marchés à des prestataires pour
commander et acheter des prestations précises qu'ils ont eux-mêmes déterminées. En effet, de
telles actions, lorsqu'elles peuvent précisément être analysées comme des prestations acquises à
titre onéreux et non comme le soutien financier à des actions propres à l'organisme de formation,
relèvent des règles de la commande publique. La réforme du code des marchés publics
intervenue en 2004 a complété l'état du droit sur ce point, le mettant en conformité avec la
directive du Conseil des Communautés européennes du 18 juin 1992 portant coordination des
procédures de passation des marchés publics de services, modifiée par la directive du Parlement
européen et du Conseil du 13 octobre 1997.
Dans ce cas, s'il s'agit d'action d'insertion ou de qualification professionnelles, un recours à la
procédure allégée prévue à l'article 30 du code des marchés publics était possible. La rédaction
de l'article 30 telle qu'elle résulte de la modification règlementaire instituée par le décret nº 2005-
1008 du 24 août 2005, précise que «La personne responsable du marché peut décider qu'un
marché sera passé sans publicité, voire sans mise en concurrence, s'il apparaît que de telles
formalités sont, du fait des caractéristiques du marché, manifestement inutiles ou impossibles à
mettre en oeuvre». Toutefois, le Conseil d'Etat (CE, 7 octobre 2005, Région Nord Pas de Calais) a
précisé que la publicité devait être adaptée à l'objet du marché et pas seulement au montant,
invalidant en cela un marché adapté de 35 000euros. Ces deux stratégies de financement,
fonction de la finalité du soutien financier attribué par le financeur public, sont exclusives l'une de
l'autre. Ce choix est sans incidence sur le mode de contractualisation sous la forme de
«convention» prévu aux livres III et IX du code du travail.
Or en l'espèce, l'existence de liens directs ne peut-être contestée et il ne semble pas s'agir de
soutien financier à des actions propres à des organismes de formation. En effet, ces actions se
sont rattachées au volet social du plan adopté par le Conseil Régional de Lorraine dans le cadre
de la mise en oeuvre d'un fonds de soutien conjoncturel aux difficultés des entreprises en
novembre 2002.
Par ailleurs, les dispositions de l'article 30 du code du 7 janvier 2004 stipulait que «quelque soit
leur montant, les marchés publics de services qui ont pour objet des prestations de services ne
figurant pas à l'article 29 sont soumis, en ce qui concerne leur passation, aux seules obligations
relatives à la définition des prestations par références à des normes, lorsqu'elles existent, ainsi
qu'à l'envoi d'un avis d'attribution lorsque leur montant atteint 230 000 euros HT». Les prestations
de services ayant pour objet la formation n'étant pas incluses dans le champ d'application de
l'article 29, le dispositif relatif à la procédure dite «allégée» devait être suivi avec attention.
La circulaire du 7 janvier 2004 portant manuel d'application du Code des Marchés publics, précise
que «dans certains cas expressément définis, le code ne prévoit pas d'obligation de publier un
avis d'appel public à la concurrence ni de procéder à une mise en concurrence. .../...Dans un
souci de préservation des deniers publics il est toutefois recommandé aux acheteurs publics,
lorsque l'environnement économique et concurrentiel le permet, de procéder à une publicité pour
permettre une mise en concurrence efficace». Or, il ne semble pas que la Région Lorraine, malgré
le niveau élevé de ses engagements, ait procédé à la mise en oeuvre de la procédure allégée.
Au demeurant, de telles procédures ne peuvent plus être employées par la collectivité territoriale
depuis le 5 février 2005. En effet, le Conseil d'Etat (CE, section du contentieux, 7ème et 2ème
sous-sections réunies, 4 février 2005, Association pour la transparence et la moralité des marchés
publics (ATMMP) et autres) a annulé le premier alinéa de l'article 30 portant sur les services en
procédure allégée, et sa mention faite dans l'article 40-I, ainsi que l'article 3-5 du code des
marchés publics. Le Conseil d'Etat a considéré qu'en vertu des principes de l'article 1er du Code,
le premier alinéa de l'article 30 «ne pouvait, sans méconnaître les principes de liberté d'accès à la
commande publique, d'égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures,
dispenser de façon générale la passation de tous ces contrats d'une procédure adéquate de
publicité et de mise en concurrence». En conséquence, la Région Lorraine doit désormais mettre
en oeuvre une procédure de mise en concurrence respectant le code des marchés publics.
6.7.5. Une pratique des conventions inappropriée
D'importantes faiblesses ont pu être relevées dans la distribution de ces aides. En effet, les
actions de formation ont été le plus souvent engagées en l'absence d'un accord formalisé par
convention, la Région étant alors mise devant le fait accompli par le prestataire et contrainte
d'accorder les financements correspondants.
Ainsi à titre d'exemple la formation d'assistante technique de commerce réalisée par le cabinet
Michel Gérard et dont le début d'exécution est intervenue le 26 avril 2004 n'a été autorisée que le
28 juillet de la même année par convention n° 3074-2004. De même, la formation en
radioprotection prévue du 14 au 25 juin 2004 et la formation BEPECASER du 27 septembre n'ont
été validées que par une convention du 26 novembre 2004. De même, certaines formations
effectuées pour le compte d'Intra conseils par la société PRO ACCIS en juillet et septembre 2003
n'ont été autorisées par une convention en assurant le financement que le 27 octobre 2003,
laquelle entérinait également une formation bureautique dont l'ouverture était datée du 16
septembre (Créci).
Ces pratiques illustrent le détournement de la procédure et la validation a posteriori par le conseil
régional, d'actions, dans le meilleur des cas, déjà engagées sinon déjà terminées.
6.7.6. Des relations avec les prestataires indirects ambiguës
Les relations entretenues avec les prestataires indirects sont à souligner. En effet, certaines
entreprises sous-traitantes de partenaires que la Région subventionne dans le cadre de
conventions bipartites semblent avoir été avantagées.
Ainsi, la société PRO ACCIS, dans une lettre du
7 octobre 2004, indiquait qu' «à la suite de
l'entretien du vendredi 1er octobre (...), je vous transmets à nouveau l'offre de prestation de Pro
Accis en direction des salariés de l'usine Sarmode de Sarrebourg. A la suite de mon récent
entretien avec la
vice-Présidente du Conseil Régional de Lorraine (...), celle-ci m'a demandé
qu'une nouvelle demande de prestation lui soit transmise par Intra conseils afin que le
financement de cette prestation soit inscrit à l'ordre du jour de la prochaine commission
permanente de novembre 2004. Je vous joins donc une version révisée de l'offre de Pro Accis et
vous remercie pour votre collaboration"
En réponse aux observations de la Chambre, l'ordonnateur a tenu à préciser la chronologie de
cette opération. Il a indiqué : «Compte tenu des difficultés rencontrées en 2004 par la société
Sarmode, une cellule de reclassement a été mise en place par l'Etat et confiée par ce dernier à la
société Intra Conseils. Afin de mener à bien la mission qui lui a ainsi été confiée, en réalisant
notamment des actions ciblées de formation (action de remotivation), la société Intra Conseils, et
elle seule, a jugé utile de s'adjoindre les compétences de la société Pro Accis. Dans ce cadre, la
société Intra Conseils a ensuite sollicité un soutien financier du Conseil Régional. Cette demande
a été, dans un premier temps, rejetée par les services du Conseil Régional en charge de
l'instruction de ces dossiers, peu persuadés à l'époque de l'intérêt d'une telle action de formation,
s'agissant notamment de la dimension remotivation. Face à ce refus, la société Intra Conseil a
sollicité (...) la vice-Présidente en charge notamment de la reconversion professionnelle, afin
qu'elle reconsidère la position des services précités. Afin de se faire une juste opinion de l'intérêt
de l'action envisagée, cette dernière a souhaité que la société Pro Accis lui en explicite le contenu
et la finalité".
Dans sa réponse, la vice-présidente a indiqué, elle aussi le déroulement de ce dossier. Elle a
précisé que «cette demande a été, dans un premier temps, rejetée par les services du Conseil
Régional de Lorraine en charge de l'instruction de ces dossiers, peu persuadés à l'époque de
l'intérêt d'une telle action de formation. Face à ce refus, la société Intra Conseils m'a sollicitée afin
que sa demande de soutien financier puisse être reconsidérée. Pour me permettre de me faire
une juste opinion de l'intérêt de l'action envisagée, j'ai souhaité que la société Pro Accis m'en
explicite le contenu et la finalité. Je tenais, par cette démarche préalable à la décision définitive de
la Commission Permanente, m'assurer de la pertinence de l'intervention envisagée tout autant
que du bon usage des crédits régionaux".
Dans sa réponse aux observations provisoires, la société Pro-Accis a, elle, indiqué qu'«En 2004,
la société Intra Conseils, qui travaille avec Pro Accis depuis 2 ans, est en charge de la cellule de
reclassement de la société Sarmode à Sarrebourg. Intra Conseils rencontre des difficultés pour
finaliser le reclassement de personnels féminins qui ont peu de perspectives et peu de
motivations. A cette époque, le cabinet Intra Conseils sollicite Pro Accis pour réaliser une
prestation de remotivation sur une partie de l'effectif féminin de la société Sarmode. Pro Accis fait
une offre le 16 juillet 2004 et Intra Conseils sollicite alors la Région Lorraine pour une participation
au financement de la prestation. Cette demande a été rejetée par le Directeur Général Adjoint en
charge de cette mission, sous prétexte qu'il ne voyait pas l'intérêt de réaliser une telle intervention
et qu'il ne souhaitait pas qu'une prestation pour une cellule de reclassement soit confiée à un
cabinet privé ! Nous reprécisons qu'à ce stade le choix de Pro Accis est de la seule responsabilité
du cabinet Intra Conseils. Intra Conseils persuadé de la nécessité de réaliser cette action sur la
cellule de Sarmode, a contacté directement la vice-présidente de la Région Lorraine, en charge
des dossiers de reclassement, (...) pour demander de reconsidérer la position de la Région
Lorraine. C'est à ce moment que (la vice présidente) a demandé à Pro Accis de venir présenter
son concept d'accompagnement pour lui donner des éléments de résultats et apprécier l'intérêt de
la demande et la pertinence de l'intervention que souhaitait réaliser Intra Conseils à Sarrebourg.
Les responsables de Pro Accis se sont rendus à l'Hôtel de Région à Metz le 29 septembre 2004
pour rencontrer (la vice présidente). A l'issue de la présentation de Pro Accis, (la vice présidente)
a bien perçu l'intérêt de l'action à mener sur le personnel de Sarmode et a donné son accord pour
que le dossier d'Intra Conseils reformulé soit représenté à la Région Lorraine pour être soumis à
la Commission Permanente de novembre 2004. Et c'est alors qu'à la demande d'Intra Conseils,
Pro Accis a communiqué les coordonnées des services de (la vice présidente) pour reformuler la
demande de financement à la Région Lorraine et faire en sorte que le dossier soit adressé au
service compétent. Le dossier de demande d'Intra Conseils a été présenté à la Commission
Permanente qui l'a validé».
Il apparaît ainsi que le cabinet Intra Conseils a conclu une convention avec la société Pro Accis
pour une partie des prestations qui lui étaient confiées par la Région Lorraine dans le cadre du
plan conjoncturel. La société précitée est également intervenue dans le cadre des actions
apportées en soutien à l'entreprise DAEWOO, tandis qu'elle travaillait également avec un autre
prestataire de service direct de la Région Lorraine, le cabinet Lennox conseils, dans le processus
de la cellule de reclassement de l'entreprise BOUSSAC. Ainsi, la Région Lorraine a mandaté
globalement au profit de l'entreprise Pro Accis, pour les prestations effectuées, un montant de 108
830 euros.
La procédure qui consiste à régler des prestations à une entreprise signataire d'un contrat, puis à
indiquer à cette dernière le sous-traitant qu'elle doit retenir ou bien à intervenir directement dans le
processus de négociation entre le dispensateur de la formation et le co-contractant rend
transparent le rôle dévolu par contrat au prestataire retenu pour l'exécution de la mission.
6.8. Le contrôle de l'effectivité des aides
En matière de suivi et de contrôle des interventions économiques, les services de la Région ont
indiqué que l'évaluation prenait la forme de questionnaire d'enquête adressé aux entreprises à
chaque fin de programme. La Région a précisé en outre que les dossiers de prime régionale à la
création d'entreprise et de prime régionale à l'emploi faisaient l'objet d'un suivi annuel depuis le
début de l'année 2003.
La Région Lorraine a dispensé dans le cadre du Projet Lorrain 2000 à 2006 ses interventions
économiques sous forme d'aides conditionnées par la réalisation d'investissement ou la création
d'emploi. Dans les deux cas, les aides ont été apportées en contrepartie de conditions «objectifs».
A ce titre, l'article 1-1° des conventions fixe les engagements de l'entreprise en nombre d'emploi
et en volume d'investissement tandis que le 2° précise les conditions de reversement après
contrôle de la Région, des subventions versées. Les écarts importants entre les deux conditions
tout autant que leur concomitance, conjugués à l'absence de contrôle réel font de cet article un
artifice qui autorise le maintien des primes versées dans des conditions minimales assez peu
réalistes. Ainsi, une entreprise qui s'engageait à créer 250 emplois et des investissements de 2,5
M.Euros ne s'est vue imposer que la création de trois emplois, seuil minimum d'attribution de la
prime concernée. Trois ans après le versement de la prime, seuls cent trente emplois avaient été
créés.
La mise en oeuvre d'un système de contrôle de l'effectivité des aides octroyées semble donc
nécessaire. Il semble toutefois que, faute de moyens, la Région Lorraine ne soit pas en mesure de
s'assurer de la transformation en emploi ou en investissement des aides attribuées. L'exemple de
la société Jet-plan aviation qui a, en tous points, respecté les procédures d'attribution est à cet
égard révélateur. Malgré la preuve irréfutable de la libération du capital social, la société n'a pas
vu le jour.
L'absence de contrôle des aides octroyées par la Région Lorraine ne garantit donc pas l'absence
d'usage non conforme des fonds mis à disposition.
7. LE SUIVI DES OBSERVATIONS DU CONTROLE PRECEDENT:
7.1. La formation professionnelle continue
7.1.1. Le cadre juridique de l'intervention de la Région et les objectifs régionaux
A compter de 2003, la Région a organisé un processus de concertation afin d'élaborer un
nouveau Plan Régional de Développement de la Formation (PRDF) 2005 à 2009. Cette démarche
a pris en compte les dispositions de la loi du 13 août 2004, et il a été présenté en séance plénière
le 17 mars 2005. En ce qui concerne le Comité de coordination régional de l'emploi et de la
formation professionnelle (CCREFP), la Région semble désormais bien déterminée à lui faire
jouer son rôle de coordinateur et de pilote dans le suivi du plan régional. A cet effet, une réunion
d'installation de ce comité a dû avoir lieu le 2 mars 2005. Quant aux contrats d'objectifs, la Région
a inscrit leur concrétisation au PRDF 2005-2009
7.1.2. Les objectifs en matière de formation professionnelle continue
Malgré l'adaptation permanente de ses actions aux évolutions du contexte économique et social,
la Région a indiqué ne pas être en mesure de changer les mentalités des
personnes qui
continuent de préférer des solutions d'emplois précaires en temps réel plutôt que de se projeter
sur l'avenir en participant à des formations qualifiantes.
7.1.3. Les moyens financiers mis en oeuvre et les outils d'évaluation
La Région a confirmé que les outils d'évaluation actuels ne sont pas probants, mais elle a indiqué
qu'elle n'a pas pour autant engagé de démarches afin d'en rechercher de plus adaptés à ses
besoins. Le choix d'une évaluation par un organisme indépendant, retenu dans le cadre du contrat
de plan, lui paraît à l'usage imparfait. Elle a donc engagé des réflexions avec l'AFPA, l'ASSEDIC
et l'OREFQ (Observatoire Régional de l'Emploi, de la Formation et des Qualifications) en vue de
déterminer l'approche la plus pragmatique d'une évaluation qui pourrait être confiée à l'OREFQ.
7.1.4. Les relations avec les organismes associés
En ce qui concerne INFFOLOR, la Région a décidé, à compter de 2005 seulement, de déduire le
montant de certaines actions spécifiques de la subvention annuelle accordée, après recentrage
des activités de cette association avec le CARIF. Elle a indiqué par ailleurs que ces actions
feraient l'objet d'une mise en concurrence le cas échéant. Il a été confié à INFFOLOR depuis 2004
une nouvelle mission concernant les Métiers d'art. Celle-ci a engendré un complément de dotation
à hauteur de 75 000 euros en 2005. L'augmentation réelle est donc de 9,25 % en 5 ans soit une
moyenne de 1,85 % par an .
OREFQ :
Malgré les observations faites par la Chambre en 2002, la participation de la Région a augmenté
de près de 64 % en 2004, alors que le fonds de roulement de l'OREFQ restait considérablement
élevé.
Dans sa réponse, le président a indiqué que «De 2000 à 2003, la Région a financé l'OREFQ en
fonction des besoins nécessaires liés aux études de la structure et non par rapport à l'application
du montant annuel du contrat de plan.
En 2004, afin d'anticiper une incertitude sur l'engagement de l'Etat, le Conseil Régional a décidé
de réajuster sa dotation annuelle en versant à l'OREFQ le tiers du solde de son engagement
global contractuel. C'est pourquoi, l'augmentation de la dotation apparaît importante en 2004.
Toutefois, la Région ne fera que respecter ses engagements liés au CPER 2000-2006».
Centre de documentation des EURES : La Région n'a certes plus confié d'opération ponctuelle à
cette association de 2000 à 2004, mais toutefois son aide a progressé de 22,46 % entre 2000 et
2002
7.1.5. L'élaboration du programme régional
En ce qui concerne INFFOLOR, la Région a décidé, à compter de 2005 seulement,,d e déduire le
montant de certaines actions spécifiques de la subvention annuelle accordée, après recentrage
des activités de cette association avec le CARIF. Elle a indiqué par ailleurs que ces actions
feraient l'objet d'une mise en concurrence, le cas échéant. Pour les mêmes prestations, la
subvention, qui était de près de 465 000 euros en 2000, a été portée à 590 000 euros en 2005 ,
soit une augmentation apparente de 26,88 % en cinq ans.
Dans sa réponse, le président du conseil régional précise qu'il a été confié à INFFOLOR une
nouvelle mission concernant les métiers d'art et qu'à ce titre, une complément de dotation de 75
000 euros lui a été apporté en 2005. L'augmentation réelle de la dotation au titre des actions
citées par la Chambre assumées par INFFOLOR est donc de 9,25 % en cinq ans. La Chambre en
prend acte.
La sélection des organismes de formation : Si les organismes de formation sont désormais mis en
concurrence selon le Code des Marchés Publics, seul le taux d'insertion des stagiaires dans
l'emploi peut être mesuré. En revanche, le niveau d'adéquation des offres de formation aux
demandes n'est pas analysé. La Chambre avait pourtant recommandé une démarche en ce sens,
considérant le peu de candidats par rapport à l'offre substantielle pour les jeunes sortant du
système éducatif sans qualification.
La fiche financière : Du fait de l'application du code des marchés publics, la notion de subvention
a été supprimée, le prix proposé (second critère de choix) par les prestataires étant considéré
comme prix réel. Il est à relever que la Région n'hésite pas à rejeter les offres faisant apparaître
des prix excessifs ou sous-estimés, en l'occurrence environ 10 % des marchés.
Les dérogations et les recrutements en cours de stage : Sur ce sujet, la Région indique avoir
respecté son objectif de ne plus accorder de dérogations au moment des recrutements de
stagiaire.
Le compte rendu d'exécution du stage : Seuls les délégués territoriaux restent en possession des
éléments qualitatifs du bilan de chaque stage, et aucune disposition n'a encore été prise pour
qu'ils soient communiqués au service chargé de la liquidation du solde. Il est à relever toutefois
qu'un document de suivi qualitatif est désormais exigé aux termes du CCAP des marchés y
afférents pour paiement du solde.
7.1.6. L'exécution des conventions passées avec les organismes de formation
Les sanctions financières : La Région a constaté que l'application du code des marchés publics
oblige les prestataires à plus de rigueur en matière de transmission de bilans. Il en est résulté une
légère réduction du nombre de réfactions qui sont désormais systématiquement appliquées le cas
échéant. Ces nouvelles dispositions paraissent par ailleurs permettre aux services régionaux une
parfaite maîtrise de l'action, tant sur le plan financier que sur l'instruction des dossiers (gain de
temps et de moyens).
Les conditions de paiement des rémunérations des stagiaires : Sans préjuger de l'optimisation des
appels de fonds par le CNASEA qui n'ont pas été analysés une nouvelle fois, il est relevé que les
autres observations de la Chambre sont restées sans suite, malgré l'établissement d'une nouvelle
convention en 2003. De plus, en sus des appels de fonds mensuels, la Région verse au CNASEA
une provision conventionnelle d'un montant global de 1 920 858 euros destinée à «couvrir les
différences pouvant se produire entre le mandatement du Conseil Régional de Lorraine pour le
mois à venir et la mise en paiement par le CNASEA des rémunérations des stagiaires de ce
mois». Cette provision est versée au moment de l'appel de fonds et est régularisée sur l'appel de
fonds suivant.
7.1.7. Les relations entre la Région et certains tiers
Les relations avec les services de l'éducation nationale : au vu des réponses apportées, les
observations antérieures de la Chambre semblent avoir été mal interprétées. En effet, les
conventions signées avec le CREPS en 2003 et 2004 ne diffèrent en rien de celles conclues
antérieurement en ce qui concerne le versement des bourses au véritable créancier. La Région a
confirmé à ce titre que «le CREPS verse le montant des bourses aux lycées abritant les athlètes
et les établissements scolaires les répercutent sous forme de déductions aux frais de pension».
Quant aux frais de gestion, leur montant est effectivement individualisé dans le tableau
récapitulatif des bourses accordées par la 1ère convention de l'année, mais ils sont toujours
globalisés à la subvention y afférente (cf. art. 3 puis 2 des conventions).
Dans sa réponse, le président du conseil régional a précisé qu'à compter de l'exercice 2005, le
versement des bourses aux sportifs de haut niveau s'effectue directement aux bénéficiaires ; en
conséquence, les frais de gestion ne sont plus versés au CREPS.
Les relations avec l'ANPE : La collectivité a transmis les conventions de 2003 et 2005. Ces
conventions n'appellent pas d'observation particulière si ce n'est le montant de l'enveloppe
attribuée annuellement à l'ANPE, soit respectivement 450 000 euros et 550 000 euros, alors qu'à
compter de 2005 les formations de niveaux I et II sont désormais exclues du FFAIR. Les
modalités de reddition des comptes restent toutefois succinctes.
Cependant, comme l'a indiqué le président dans sa réponse, le règlement 2005 du FFÀIR ouvre le
dispositif à toutes les formations et supprime l'exigence d'embauche.
Les relations avec les Organismes Paritaires Agréés pour le Congé Individuel de Formation
(OPACIF) : L'intervention de la Région en la matière serait désormais mieux identifiée, sachant
qu'en 2003 le FONGECIF a attribué 777 dossiers à des salariés en contrat à durée indéterminée,
dont 34 % de PME-PMI de moins de cinquante salariés. Le but de ce soutien en 2002 était
notamment de favoriser le développement du congé individuel de formation dans les entreprises
de moins de dix salariés.
7.1.8. Le dispositif de contrôle
Les contrôles prévus en commun avec l'Etat, et recommandés par la Commission
Interministérielle de Coordination des Contrôles (CICC), sont restés vains. En revanche, le suivi
des stagiaires à trois mois, et non plus à six, instauré aux termes du cahier des charges des
marchés publics s'avère très incitatif vis-à-vis des organismes de formation. Toutefois, la Région
reconnaît que la formalisation écrite du bilan qualitatif reste insuffisante alors qu'il a été demandé
aux délégués territoriaux de participer systématiquement aux réunions concernées.
Dans sa réponse, le président a indiqué que «les contrôles prévus initialement en commun avec
l'Etat, ont été réalisés uniquement par la Région. L'Etat n'a pas apporté son concours mais les
contrôles ont été effectifs. Les instructeurs réalisent régulièrement des bilans intermédiaires et
finaux de nombreuses actions qui permettent de constater sur place le déroulement des stages
financés par la Région».
7.1.9. L'analyse des indus
Là encore, la procédure de marchés publics aurait pour effet, selon la Région, une baisse
considérable des indus, confortée par la nouvelle règle du paiement en heures groupes. Par
ailleurs, le nombre d'actions incomplètement réalisées se serait nettement réduit.
Cependant, dans sa réponse, le président du conseil régional a précisé que certains délais de
recouvrement d'indus restent longs, et la Région prévoit un renforcement en moyens humains à
court terme afin d'y remédier.
7.2. L'apprentissage
7.2.1. L'identification des objectifs régionaux
Dix thèmes d'actions composent le Plan Régional de Développement de la Qualité de
l'Apprentissage (PRDQA) qui est mis en application moyennant une somme globale d'environ 2,5
M.Euros (dont 1 M.Euros de FSE) distribuée aux CFA. La répartition de ces crédits pour 2005 fait
apparaître que près de la moitié est allouée au financement de responsables de Centres de
Ressources, le quart aux liaisons CFA/Entreprises. Il s'avère par ailleurs que la formation des
équipes pédagogiques semble être absorbée par le développement des centres de ressources.
Quant aux moyens mis en oeuvre en faveur de l'information du jeune et de sa famille et à la
formation des tuteurs, ils restent restreints : respectivement 1,09 et 1,47 %.
Dans sa réponse, le président du conseil régional a indiqué que les actions du PRDQA «portent
principalement sur l'alternance». Il précise que «des actions ont été menées, telles que la
formation aux spécificités de l'alternance» et "des formations spécifiques des formateurs dans les
domaines de la sécurité au travail".
7.2.2. Les caractéristiques de l'apprentissage en Lorraine
Les services régionaux ne constatent pas d'évolution notoire s'agissant des effectifs, et ils
confirment la stabilité du système existant, confortée aux termes du Plan Régional de
Développement de la Formation (PRDF) 2005 à 2009.
7.2.3. Les modalités de financement des centres
Le dispositif «budget de référence/coefficient» est toujours en vigueur et, si les écarts relevés au
vu des comptes définitifs persistent, ils sont analysés et ils font l'objet d'observations de la part
des services régionaux. Cependant, il n'est pas rare de constater encore que bon nombre de
structures gestionnaires font glisser certains de leurs coûts sur le CFA. Pour y remédier, la Région
met en exergue les dispositions du décret n° 2000-470 du 31 mai 2000, relatif au financement des
centres de formation d'apprentis et des sections d'apprentissage, notamment la certification des
comptes. Or, l'article 3 de ce même décret rend cette mesure obligatoire dès les comptes relatifs à
l'exercice 2001 ou au premier exercice complet suivant la publication du texte en question. En
conséquence, il est certain que la Région aurait dû pouvoir en appréhender les effets depuis 2002
déjà.
Dans sa réponse, le président du conseil régional indique que «le résultat aujourd'hui est qu'il n'y
pas d'homogénéité dans les formules de certification utilisées et que de nombreuses ambiguïtés
ne sont pas levées, ce qui ne garantit pas une bonne utilisation des fonds publics».
En matière de délais d'obtention des pièces nécessaires au versement du solde des subventions,
des retards persistent de la part de certaines structures. Aucune mesure dissuasive n'a été mise
en oeuvre pour y remédier, la Région jugeant qu'il en va de l'entière responsabilité des
organismes gestionnaires.
Dans sa réponse, le président du conseil régional indique qu' «il est incontestable que des retards
persistent dans la production des pièces nécessaires au mandatement des subventions
régionales de fonctionnement des CFA» et il ajoute que «le non versement des subventions paraît
la seule mesure dissuasive envisageable».
7.2.4. La politique de contrôle des centres
Les négociations avec le rectorat sont toujours pendantes, alors que la Région serait en mesure
d'y apporter les financements nécessaires, le cas échéant. Dans l'attente de résultats concrets,
une formation aux spécificités de l'alternance a été initiée avec le GIP «Formation tout au long de
la vie» de Nancy pour un montant de 53 820 euros couvrant la période du 1er avril 2003 au 31
décembre 2005 (thème d'action n° 7 du PRDQA).
(1) Source Région Lorraine
Réponse 1 de l'ordonnateur
LOO02030601.pdf
Réponse 2 de l'ordonnateur
LOO02030602.pdf