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CHAMBRE REGIONALE DES COMPTES
DE PROVENCE-ALPES-
COTE D’AZUR
Chambre
Jugement n° 2015-0011
Régie des transports de Marseille
(RTM)
Exercices 2001 à 2009
Rapport n° 2014-0175
Audience publique du 17 mars 2015
Délibéré le 17 mars 2015
Prononcé le 7 avril 2015
RẺPUBLIQUE
FRANÇAISE
AU
NOM
DU
PEUPLE
FRANÇAIS
La Chambre Régionale des Comptes de Provence-Alpes-
Côte d’Azur,
VU
le code des juridictions financières ;
VU
le code général des collectivités territoriales ;
VU
l’article 60 de la loi de finances n°
63-156 du 23 février 1963 modifié ;
VU
le décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 modifié portant règlement général sur la comptabilité
publique ;
VU
les lois et règlements relatifs à la comptabilité des collectivités territoriales et de leurs établissements
publics ;
VU
l’arrêté du président de la chambre régionale des comptes de
Provence-Alpes-
Côte d’Azur
du 3 février
2015 portant délégation de signature à la vice-présidente et aux présidents de section ;
VU
les jugements n° 2008-0548 du 5 novembre 2008 et n° 2009-0083 du 22 janvier 2010 sur les
comptes des exercices 1992 à 2003 de la RTM ;
VU
le réquisitoire n° 02-05 du 8 avril 2005 par lequel le procureur financier près la chambre régionale des
comptes a saisi la juridiction
afin qu’elle statue sur une opération présumée constitutive de gestion de fait
des deniers publics de la régie des transports de Marseille ;
VU
le réquisitoire n° 2009-0026 du 10 novembre 2009, résultant de la loi n° 2008-1091 du
28 octobre 2008 portant réforme des procédures juridictionnelles devant les juridictions financières et de
son décret d’application n° 2008
-1398 du 19 décembre 2008, par lequel le procureur financier près la
chambre régionale des comptes a saisi la juridiction
afin qu’elle statue sur
plusieurs opérations présumées
constitutives de gestion de fait des deniers publics de la régie des transports de Marseille intervenues au
cours de la période couverte par les exercices 2001 à 2009 ;
VU
la décision du président de la chambre du 16 novembre 2009 désignant M. Bernard Debruyne,
président
de
section,
comme
rapporteur
de
l’instan
ce
ouverte
par
le
réquisitoire
du
10 novembre 2009 ;
VU
les lettres du 22 janvier 2010, par lesquelles le réquisitoire du 10 novembre 2009 a été notifié aux
ordonnateurs successifs de la RTM au cours de la période 2001-2009,
X…, Y…
,
Z…
,
A…
et
B…
;
2
VU
les accusés de réception de réception des notifications du réquisitoire ;
VU
les courriels en date des 2 février et 15 juillet 2010, par lesquels
Y… et C…
, avocat de la RTM, ont
sollicité la communication des pièces du dossier et les courriels par lesquels le greffe de la chambre a
procédé à cette communication, en date des 4 février et 8 novembre 2010 ;
VU
la décision de la présidente de la chambre du 22 mars 2013 désignant Mme Audrey Courbon,
première conseillère,
comme rapporteur de l’instance ouverte par le réquisitoire
du 10 novembre 2009 ;
VU
les lettres en date du 22 mars 2013 par lesquelles les personnes mises en cause par le réquisitoire du
10 novembre 2009 ont été informées du changement de magistrat instructeur et leurs accusés de
réception ;
VU
la lettre en date du 22 mai 2013, notifiée le 24 mai 2013, par laquelle le réquisitoire du 10 novembre
2009 a été notifié à
B…, en sa qualité d’ordonnateur en fonctions
de la RTM ;
VU
les lettres en date du 20 juin 2013, par lesquelles les personnes mises en cause ont été invitées à
présenter leurs observations sur les faits mentionnés dans le réquisitoire du 10 novembre 2009 en
application de l’article R. 242
-3 du code des juridictions financières ;
VU
les lettres en date du 20 juin 2013, par lesquelles
l’ordonnateur et le comptable en fonctions de
la
RTM ont été invités à produire un certain nombre de pièces et à apporter toute information utile quant
aux fait relevés dans le réquisitoire du 10 novembre 2009 ;
VU
les observations écrites de
Z…
et
Y…
en date du 12 septembre 2013 ;
VU
les observations écrites et les pièces produites par
B…, en qualité d’ordonnateur
en fonctions et par
D…
, comptable en fonctions de la RTM, en date du 13 septembre 2013 ;
VU
les observations écrites de
X…
en date des 2 juillet et 18 septembre 2013 ;
VU
les observations écrites de
A…
, datées du 30 octobre 2013, mais réceptionnées à la chambre
à l’appui
d’
un courrier en date du 2 février 2015 ;
VU
le rapport n° 2014-0175 de Mme Audrey Courbon, magistrat instructeur, communiqué au procureur
financier le 3 novembre 2014 ;
VU
les conclusions n° 2014-0175 du procureur financier en date du 11 février 2015 ;
VU
les lettres du 28 janvier 2015 informant les
personnes mises en cause et l’ordonnateur en fonctions de
la clôture de l’instruction et de la date de l’audi
ence publique, fixée au 17 mars 2015, ainsi que leurs
accusés de réception ;
VU
le courrier du 13 mars 2015 par lequel
C…
justifie de l’apurement définitif des débets prononcés à
l’encontre du comptable patent de la RTM par les jugements susmentionnés de l
a chambre régionale des
comptes ;
VU
l’ensemble des pièces du dossier
;
Entendus lors de l’audience publique, Mme Audrey Courbon, premi
ère conseillère, en son rapport, et Mme
Marie-Pierre Laplanche-Servigne, procureur financier, en ses conclusions ;
En présence de
C…
, avocat des personnes mises en cause et de la RTM et de
B…
, ordonnateur en
fonctions de la RTM ;
En l’absence des
autres parties, celles-ci ayant été régulièrement avertie
s du jour de l’audience
;
Après en avoir délibéré hors la présence du public, du rapporteur et du procureur financier ;
STATUANT
DEFINITIVEMENT
3
SUR LA PROCEDURE
ATTENDU
que par réquisitoire n° 2009-0026 du 10 novembre 2009, le procureur financier près la
chambre régionale des comptes de Provence-Alpes-
Côte d’Azur
l’a saisie d’opérations présumées
constitutives de gestion de fait des deniers de la Régie des Transports de Marseille (RTM) ; que ce
réquisitoire, pris à la suite de la réforme des procédures juridictionnelles devant les juridiction financières
issue de la loi n° 2008-1091 du 28 octobre 2008, et qui vise le réquisitoire n° 02-05 du 8 avril 2005, doit
être regardé comme se substituant à ce dernier, pour les faits qu’il mentionne
;
ATTENDU
qu’en application de l’article 11 du décret du 29 décembre 1962 portant règlement général sur
la comptabilité publique, les comptables publics sont seuls chargés de l’encaissement des recettes, du
paiement des dépenses et de la conservation des fonds et valeurs appartenant ou confiés aux organismes
publics ainsi que du maniement des fonds et des mouvements de comptes de disponibilités ;
ATTENDU
que l’article 60
-XI de la loi de finances du 23 février 1963 dispose que « Toute personne qui,
sans avoir la qualité de comptable public ou sans agir sous contrôle et pour le compte d'un comptable
public, s'ingère dans le recouvrement de recettes affectées ou destinées à un organisme public doté d'un
poste comptable ou dépendant d'un tel poste doit, nonobstant les poursuites qui pourraient être engagées
devant les juridictions répressives, rendre compte au juge financier de l'emploi des fonds ou valeurs
qu'elle a irrégulièrement détenus ou maniés. Il en est de même pour toute personne qui reçoit ou manie
directement ou indirectement des fonds ou valeurs extraits irrégulièrement de la caisse d'un organisme
public et pour toute personne qui, sans avoir la qualité de comptable public, procède à des opérations
portant sur des fonds ou valeurs n'appartenant pas aux organismes publics, mais que les comptables
publics sont exclusivement chargés d'exécuter en vertu de la réglementation en vigueur. Les gestions de
fait sont soumises aux mêmes juridictions et entraînent les mêmes obligations et responsabilités que les
gestions régulières. Néanmoins, le juge des comptes peut, hors le cas de mauvaise foi ou d'infidélité du
comptable de fait, suppléer par des considérations d'équité à l'insuffisance des justifications produites. Les
comptables de fait pourront, dans le cas où ils n'ont pas fait l'objet pour les mêmes opérations des
poursuites au titre du délit prévu et réprimé par l'article 433-12 du code pénal, être condamnés aux
amendes prévues par la loi » ;
ATTENDU
qu’aux termes des dispositions de l’article L. 231
-3 du code des juridictions financières, « la
chambre régionale des comptes juge les comptes que lui rendent les personnes qu'elle a déclarées
comptables de fait. Elle n'a pas juridiction sur les ordonnateurs, sauf ceux qu'elle a déclarés comptables
de fait ( ...) ; l'action en déclaration de gestion de fait est prescrite pour les actes constitutifs de gestion
de fait commis plus de dix ans avant la date à laquelle la chambre régionale des comptes en est saisie » ;
que
l’article
R.
231-1
du
même
code
précise
« qu’el
le déclare et apure les gestions de fait des collectivités et établissements publics de son ressort et
prononce les condamnations à l'amende » ;
ATTENDU
que le réquisitoire susvisé du 10 novembre 2009 fait suite à une série de courriers adressés
entre novembre 2004 et juin 2006 au procureur financier près la chambre régionale des comptes par la
comptable alors en fonctions à la RTM qui faisaient état de modes de fonctionnement de
l’établissement
public présentés comme constitutifs de gestions de fait au s
ens de l’article 60 de la loi n° 63
-156 du 23
février 1963 ; que ledit réquisitoire saisit la chambre de trois situations présumées constitutives de gestion
de fait et met en cause les ordonnateurs successifs de la RTM au cours de la période 2001-2009, en cette
qualité, au motif qu’ils auraient, en tant que supérieurs hiérarchiques des agents qui auraient commis les
irrégularités constitutives de gestion de fait, connu et toléré celles-ci ;
ATTENDU
que le réquisitoire met en cause les ordonnateurs successifs de la RTM, à savoir
X…
, directeur
général du 2 avril 1996 au 8 août 2001,
Y…
, directeur général par intérim du 9 août 2001 au 28 mars
2002,
Z…
, directeur général du 29 mars 2002 au 30 avril 2007,
A…
, directrice générale du 1
er
mai 2007 au
30 novembre 2008 et
B…
, directeur général depuis le 1
er
décembre 2008 ;
ATTENDU
qu’il appartient, en conséquence, à la chambre de se prononcer sur l’existence d’irrégularités
constitutives de gestion de fait pour chacune de ces trois situations ;
S’AGISSANT DES
ENCAISSEMENTS OPERES DANS LES DEPOTS DE BUS DE LA RTM ET AU
SEIN DE
L’«
ESPACE INFOS » EN
L’ABSENCE DE REGIE DE RECETTES
4
ATTENDU
que le procureur financier fait état dans son réquisitoire, de la manipulation de valeurs
inactives (tickets de bus) et de fonds pouvant être qualifiés de deniers publics par des agents affectés
dans les dépôts de bus et dans «
l’Espace Infos
», dépenda
nt statutairement du service d’exploitation de
la RTM et non de l’autorité de l’agent comptable de l’établissement et dépourvus de la qualité de
régisseurs, en l’absence de
mise en place dans les dépôts de toute régie de recettes ;
qu’il précise que
les
décisions successives
de l’ordonnateur
de créer une régie et de nommer lesdits agents mandataires du
régisseur ont été de nature à donner une base juridique à leur mission et à permettre la perception
régulières des recettes de la RTM
;
ATTENDU
qu’il ressort des pièces du dossier que
dans chacun des quatre dépôts de bus de la RTM,
accessibles au seul personnel de l
’établissement
, des agents relevant du service exploitation, dépourvus
de toute habilitation émanant du comptable, tenaient des « caisses
» dont l’objet principal était de vendre
aux conducteurs de bus des tickets destinés à la revente à bord ; que les chauffeurs pouvant également
s
’approvisionner
en tickets auprès de distributeurs automatiques, ces agents pouvaient être appelés à
intervenir en cas de problème sur ces distributeurs ; que si u
ne délibération du conseil d’administration de
la RTM en date du 12
décembre 2002 a autorisé la création d’une régie de recettes dans chacun des
dépôts de bus, celle-ci
n’a pas été suivie d’effet
; qu’une
situation similaire de vente manuelle de tickets,
mais à destination du public, avait cours dans un local dit « Espace Infos », situé au 68 rue des Fabres à
Marseille, en l’absence de régie de rece
ttes, la délibération du 31 mars 2003 par laquelle le conseil
d’administration de la RTM avait décidé la création d’une
telle
régie pour l’encaissement des produits de la
vente effectuée par les agents rattachés au service commercial installé à l’Espace In
fos
n’ayant pas
davantage été suivie d’une décision de l’ordonnateur
de création de cette régie ; que, dès lors que les
agents concernés manipulaient des valeurs inactives et des fonds en numéraire appartenant à la RTM,
sans avoir la qualité de régisseur e
t sans qu’
auc
une régie n’existe en vue de la perception de ces fonds,
le
fonctionnement de ces différentes caisses était constitutif
d’une gestion de fait
;
ATTENDU
toutefois
que,
s’
agissant des dépôts de bus, le directeur général de la RTM, a, par décisions du
13 juillet 2006, créé une régie
de recettes et d’avances
dans chacun des dépôts de bus concernés et, par
décisions du même jour, nommé le régisseur et le suppléant de chacune des quatre régies, après avis
conforme du comptable ; que, dans un second temps
, le conseil d’administration, dans sa séance du 18
juin 2009, a décidé de créer une régie unique rattachée à la direction du réseau de surface en lieu et
place de ces quatre régies ; que cette régie unique
d’avances et de recette
s a été créée par décision du
directeur général de la RTM, en date du 22 juin 2009 après avis conforme du trésorier ; que par décision
du 14 septembre 2009, le directeur général a procédé à la nomination du régisseur, de son suppléant
ainsi que de quatre mandataires affectés dans chacun des dépôts de bus ;
ATTENDU
que,
s’agissant de l’Espace Infos
, les agents concernés, qui relevaient du secteur commercial,
ont été rattachés à la direction du Métro à compter du 1
er
janvier 2005 ; que, dans ce cadre, une
délibération du 14 décembre 2004 a décidé la fusion de la régie
d’avances SAV de l’Espace Infos
avec
celle du secteur Métro,
en vue de la mise en place d’une régie SAV unique
, rattachée au secteur Métro à
compter du 1
er
janvier 2005 ; que cette régie unique a été créée par décision du directeur général du 31
décembre 2004, après agrément de l’agent comptable du
22 décembre 2004
; qu’à
compter de cette
date, les recettes encaissées au sein de l’Espace Infos
dépendaient du secteur Métro, pour lequel le
conseil
d’administration de la RTM a décidé, par délibération du 22 décembre 2006, la création d’une régie
de recettes de billetterie ; que la décision effective
de création d’une régie n’a toutefois
, pour diverses
raisons,
pas été prise par l’ordonnateur
; qu’u
ne nouvelle délibération est alors intervenue le 18 juin 2009
créant cette régie en date du 22 juin 2009
; qu’elle a été
suivie de
la nomination d’un régisseur
;
ATTENDU
, d’une part,
qu
’il résulte de ce qui précède que
la situation de gestion de fait a cessé, dans le
cas des dépôts de bus, dès juillet 2006, et, pour
l’Espace Infos
, en juin 2009 ; que le mode de
fonctionnement de ces caisses, les modalités de comptabilisation des opérations effectuées et les
mécanismes du contrôle intervenant aux différentes étapes du processus ont été précisément décrits par
le comptable actuel de la RTM ;
ATTENDU
,
d’autre part,
que le réquisitoire mentionne des vols de fonds et de valeurs inactives commis
dans un dépôt de bus, pour lesquels des plaintes ont été déposées et une instance ouverte, qui a conduit
à la condamnation des prévenus au versement de dommages et intérêts pour un montant total de 56 000
€, par jugement du tribunal correctionnel de Marseille du 15 octobre 2013
; qu’au demeurant
ces vols ont
été pris en compte par la chambre dans son jugement susvisé du 22 janvier 2010 qui a prononcé
plusieurs débets à l’encontre du comptable patent de la RTM, lesquels ont été
, à ce jour, totalement
apurés ; que, dans ces conditions, il ne ressor
t ni des termes du réquisitoire, ni des pièces du dossier, qu’il
5
demeurerait des sommes à reverser dans la caisse du comptable, qu’il s’agisse des dépôts de bus ou de
l’Espace Infos
;
ATTENDU
qu’
il
n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de prononcer une amende à l’encontre
des personnes mises en cause ;
ATTENDU
qu
’il résulte de ce qui précède qu’il n’y a pas d’intérêt pratique à déclarer la gestion de fait des
deniers de la RTM
s’agissant des encaissements intervenus dans les d
épôts de bus
et à l’Espace Infos
;
SUR LES CONVENTIONS CONCLUES AVEC DES DEPOSITAIRES EN VUE DE LA VENTE DE
TITRES DE TRANSPORT
ATTENDU
que le réquisitoire mentionne la conclusion, par la RTM, de conventions irrégulières avec des
dépositaires en vue de la vente de tickets entraînant la perception, par les intéressés, de recettes sans
titre légal, dans la mesure, notamment, où ces conventions ont été conclues hors de toute surveillance de
l’agent comptable et ne comport
aient pas les stipulations recommandées par les instructions comptables
en vigueur, particulièrement en matière de reddition des comptes et de garanties
; qu’il
précise que « si
des conventions de mandat ont été
passées avec les gérants des kiosques sur la base de l’article 1984 du
code civil, il semble
que cela contrevienne aux règles précisées par l’avis du Conseil d’Etat du 13 f
évrier
2007 » ;
ATTENDU
qu’il résulte de l’instruction que d
es titres de transport ont été commercialisés par divers
commerçants (kiosques à journaux, points presse, pressing, etc.) au moyen
d’un équipement dit
« terminal de vente » permettant la vente de cartes prépayées par encodage de supports magnétiques
vierges et de recharger des cartes clients, cet équipement fonctionnant
au moyen d’une connexion
à un
ordinateur central par l’intermédiaire d’une ligne téléphonique dédiée, après
activation par un badge
personnel codé ;
ATTENDU
que le Conseil d’Etat,
dans son avis du 13 février 2007 (section des finances), confirmé au
contentieux (Section, 6 novembre 2009, n° 297877
; 10 février 2010, n° 301116, Société Prest’Action)
, a
précisé que «
dans les cas où la loi n’autorise pas l’intervention d’un mandataire, les collectivités
territoriales et leurs établissements publics ne peuvent décider par convention de faire exécuter une partie
de leurs recettes ou de leurs dépenses par un tiers autre que leur comptable public » et que « le
mandataire d’une collectivité territoriale ou d’un établissement public local, qui n’est pas le préposé du
comptable, ne pe
ut être qualifié de régisseur s’il n’est pas nommé dans les conditions fixées par les
articles R. 1617-1 et suivants du code général des collectivités territoriales » ; que, dans ces conditions,
les conventions de mandat, telles que conclues entre la RTM et les commerçants, confiant à ces derniers
le soin d’encaisser des recettes publiques
, ne sauraient constituer un titre légal habilitant les intéressés à
manier des fonds publics, en l’absence d’habilitation législative autorisant
les établissements publics à
conclure de telles conventions ; que, dès lors, la manipulation de fonds et de valeurs inactives
appartenant à la RTM par divers dépositaires était
constitutive d’une gestion de fait
des deniers de la RTM
;
ATTENDU
toutefois que,
par délibération du 16 décembre 2009, le conseil d’administration de la RTM a
décidé la mise en place
d’une régie de recettes rattachée à la direction commerciale
ayant pour objet
d’intégrer
le
réseau
des
dépositaires ;
que
par
décision
du
23 décembre 2009, le directeur général de la RTM a procédé à la création de cette régie, après avis
conforme du comptable du 9 décembre 2009 ; que par décision du 4 janvier 2010 ont été nommés, après
avis
conforme
du
comptable,
un
régisseur,
son
suppléant
et
des
mandataires
;
que l’article 7 de cette décision prévo
yait que « sont nommés mandataires de la régie de recettes des
vendeurs agréés, les dépositaires de la RTM pour la vente et le rechargement des titres de transport RTM
existants ou à venir, dont la liste nominative est jointe en annexe »,
annexe constituée par une liste des
dépositaires liées à la RTM par une convention, remise à jour régulièrement ; que cette convention de
mandat définit les obligations des deux parties et organise le fonctionnement du système, chaque
vendeur agréé signant un document par lequel il atteste
avoir reçu l’équipement de vente et de
rechargement des titres de transport « en [sa] qualité de mandataire de la régie de recettes des vendeurs
agréés rattachée à la direction commerciale » et qui précise que le dépositaire concerné est désigné
comme mandataire de la régie, « agissant pour le compte et sous la responsabilité de son régisseur »
;
que cet acte est revêtu des signatures valant avis conforme du régisseur, de son suppléant et de
l’agent
comptable de la RTM, ainsi que de la signature du directeur général, valant nomination du dépositaire ;
ATTENDU
que l’
équipement informatique confié aux vendeurs agréés permet la vente de cartes
prépayées par encodage de supports magnétiques vierges ; que les dépositaires ne disposa
nt d’aucun
6
stock de tickets déjà encodés destinés à la revente, toute vente opérée transite nécessairement par ce
terminal, qui édite chaque jour, lors de la session de fermeture, un ticket comptable contenant le montant
des ventes réalisées ; que chaque dépositaire est rémunéré par une commission hors taxe de 2 % sur le
montant des ventes TTC, qui est versée par virement hebdomadaire correspondant aux ventes effectuées
la semaine précédente ; que les ventes enregistrées
font l’objet, tous les
dix jours,
d’une facturation de la
RTM et d’un prélèvement associé
;
ATTENDU
, par ailleurs, que le réquisitoire du procureur financier
ne fait état d’aucune erreur de
comptabilisation ou manquant concernant le réseau des dépositaires sur la période concernée et que
l’instruction n’a
rien révélé de tel ;
ATTENDU
qu’au surplus, l’article 40 de la loi
n° 2014-1545 du 20 décembre 2014 relative à la
simplification de la vie des entreprises et portant diverses dispositions de simplification et de clarification
du droit et des procédures administratives, autorise désormais les collectivités territoriales et leurs
établissements publics, « après avis conforme de leur comptable public et par convention écrite », à
confier à un organisme public ou privé l'encaissement « du revenu tiré des prestations assurées dans le
cadre d'un contrat portant sur la gestion du service public de l'eau, du service public de l'assainissement
ou de tout autre service public dont la liste est fixée par décret » ; que cette liste inclut le transport
urbain ;
ATTENDU
qu’il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de prononcer une amende à l’encontre
des personnes mises en cause ;
ATTENDU
qu’il résulte de ce qui précède qu’il n’y a pas d’intér
êt pratique à déclarer la gestion de fait des
deniers de la RTM
s’agissant de la vente de titres de transport par les dépositaires agréés
;
EN CE QUI CONCERNE LA VENTE EMBARQUEE DE TITRES DE TRANSPORT PAR LES
CONDUCTEURS DE BUS
ATTENDU
que le réquisitoire saisit la chambre de
l’existence d’
un mécanisme de vente embarquée de
titres de transport
par les chauffeurs de bus de la RTM, constitutive d’une manipulation de valeurs
inactives et de fonds ayant la qualité de deniers publics, sans que les intéressés aient la qualité de
régisseur ou de mandataire du régisseur et en dehors de toute autorité du comptable public
; qu’il précise
que les chauffeurs de bus s’approvisionnent en tickets auprès des points de vente manuels ou
automatiques après versement d’une
avance de 134 € par la RTM
; que cette avance donne lieu à une
reconnaissance de dette qui mentionne que les intéressés « ne sont ni mandataires, ni sous-régisseurs
d’une régie d’avances
» ;
ATTENDU
qu’il résulte de l’instruction que l
a vente dite « embarquée » de titres de transport par les
conducteurs de bus ne concerne que les titres à l’unité dits «
de dépannage » ; que le système consiste,
pour la RTM, à délivrer aux chauffeurs, à leur prise de fonctions
, une avance de 134 € en contrepartie
d’un reç
u ; que ces avances sont utilisées par les chauffeurs pour acheter des tickets aux distributeurs
automatiques et dans les caisses situés dans les dépôts en vue d’une revente à bord, chaque conducteur
étant responsable de son approvisionnement ; que ces avances, non renouvelables, doivent être
restituées lors de la cessation de fonctions ; que dans la mesure où les conducteurs utilisent des fonds de
l’établissement public par l’intermédiaire de l’avance consentie
, le mécanisme mis en place doit être
regardé comme ayant été
constitutif d’une gestion de fait
;
ATTENDU
, cependant, que par décision du directeur général en date du 4 janvier 2010, ont été nommés
mandataires de la régie d’avances et de recettes rattachée à la direction commerciale,
précédemment
évoquée, « les agents affectés au sein de cette direction et appelés à manipuler des fonds, notamment en
qualité de : / - conducteurs receveurs du réseau de bus, dont la liste nominative est jointe en annexe ; / -
caissiers
de
dépôts,
dont
les
noms
et
signatures
figurent
ci-dessous, / pour le compte et sous la responsabilité du régisseur de la régie de billetterie de la direction
du réseau de surface » ;
que chaque conducteur de bus fait désormais l’objet d’une
décision individuelle
de nomination en qualité de mandataire, signée par le directeur général, le régisseur et le mandataire
suppléant ; que ce document individualisé comporte
l’acceptation formelle
par chaque mandataire de
l’avance reçue en monnaie et son engagement à la restituer à la cessation de s
es fonctions et
qu’il est
conservé par le régisseur ;
7
ATTENDU
d’autre part,
que le réquisitoire du procureur financier
ne fait état d’aucune erreur de
comptabilisation ou manquant concernant le réseau des conducteurs de bus ; que, par construction, le
mécanisme mis en place, avec une avance obligatoirement restituée au départ des conducteurs apparaît,
de ce point de vue, sécurisé ;
ATTENDU
qu’il n’y a pas lieu, dans les circonstances de l’espèce, de prononcer une
amen
de à l’encontre
des personnes mises en cause ;
ATTENDU
qu’il résulte de ce qui précède qu’il n’y a pas d’intérêt pratique à déclarer la gestion de fait des
deniers de la RTM
s’agissant de la vente «
embarquée » de titres de transport par les conducteurs de bus
;
8
PAR CES MOTIFS :
ORDONNE
Article 1
er
:
Il n’y a pas lieu
de déclarer la gestion de fait des deniers de la RTM en ce qui concerne
les trois situations évoquées ci-dessus.
Fait et délibéré à la chambre régionale des comptes de Provence-Alpes-
Côte d’Azur,
le
dix-sept mars deux mille quinze.
Présents : Mme Catherine Renondin, vice-présidente, présidente de séance, M. Marc Larue, président
de section, M. Jean-Pascal Uteza, premier conseiller, M. Olivier Villemagne, premier conseiller et M.
Matthieu Juving, conseiller.
Le greffier,
Bertrand MARQUÈS
La vice-présidente,
Présidente de séance
Catherine RENONDIN
La République française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ledit
jugement à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux de
grande instance d’y tenir la main, à tous les commandants et officiers de la force publique de prêter main
forte lorsqu’ils en seront légalement requis.
En application des articles R. 243-1 à R. 243-3 du code des juridictions financières, les jugements
prononcés par les chambres régionales des comptes peuvent être frappés d’appel devant la Cour des
comptes dans le délai de deux mois à compter de leur notification selon les modalités prévues aux articles
R. 243-4 à R. 243-6 du même code.