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RAPPORT
PUBLIC ANNUEL
2022
Les acteurs publics face à la crise :
une réactivité certaine, des fragilités
structurelles accentuées
Synthèses
g
AVERTISSEMENT
Ces synthèses sont destinées à faciliter la lecture et l’utilisation
du rapport de la Cour des comptes.
Seul le rapport engage la Cour des comptes.
Les réponses des administrations, des organismes et des collectivités
concernés figurent à la suite de chacun des chapitres.
L’ordre des synthèses correspond à celui du rapport.
3
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
Sommaire
Introduction générale
5
La situation d’ensemble des finances publiques
(à fin janvier 2022) .
19
Première partie - Les mesures prises pour satisfaire les besoins
vitaux de la population et venir en aide à des publics vulnérables
ou fragilisés par la crise
1.
Les personnes âgées hébergées dans les Ehpad
25
2.
Le soutien de l’État à la vie étudiante
28
3.
Le plan #1jeune1solution en faveur de l’emploi des jeunes
31
4.
L’utilisation des moyens mis à disposition par l’Union
européenne pour soutenir l’emploi
35
5.
La sécurité des approvisionnements en produits
de santé
39
6.
La sécurité des approvisionnements alimentaires .
42
Deuxième partie - L’adaptation à la crise de certaines
administrations et entreprises publiques pourvoyeuses de
services essentiels
1.
L’administration pénitentiaire et la protection judiciaire
de la jeunesse
49
2.
Les administrations fiscales et douanières
52
3.
Les délégations de service public dans les Hauts-de-France .
55
4.
L’approvisionnement en électricité
58
5.
Les grands aéroports français
61
6.
Les transports collectifs en Île-de-France
64
7.
L’entreprise de transports collectifs Transdev
68
4
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
Troisième partie - Le soutien apporté à l’activité économique
1.
Les interventions économiques des collectivités
territoriales d’Occitanie
73
2.
Le soutien apporté aux stations de moyenne montagne
des Pyrénées-Atlantiques
77
3.
Le déploiement des prêts garantis par l’État
80
4.
Les mesures fiscales de soutien aux entreprises
84
5.
Les aides de l’État en faveur du sport
87
6.
Les réserves des caisses de retraite .
90
5
Introduction générale
Depuis qu’il a été rendu public en 1832, le rapport annuel constitue la publication
phare de la Cour des comptes .
De toutes ses productions, c’est en effet celle qui retient le plus l’attention des
pouvoirs publics et de nos concitoyens, auxquels elle s’adresse prioritairement .
Le rapport public annuel (RPA) constitue ainsi le principal vecteur de la
mission constitutionnellement dévolue à la Cour des comptes de contribuer à
l’information des citoyens sur le bon emploi de l’argent public .
Ce succès jamais démenti est le fruit d’une constante adaptation du RPA aux
évolutions du contexte dans lequel la Cour et les chambres régionales et
territoriales des comptes exercent leurs missions (juger, contrôler, évaluer,
certifier) et, corrélativement, aux besoins et aux attentes des pouvoirs publics
et des citoyens .
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
Les quatre missions de la Cour et des chambres régionales
et territoriales des comptes (CRTC)
l
Juger :
les juridictions financières jugent actuellement les comptes
produits chaque année par les comptables publics . Ce dispositif est en cours
de réforme et les juridictions financières pourraient prochainement se voir
attribuer une compétence plus large, celle de sanctionner les infractions
graves, ayant causé un préjudice financier significatif, commises par tout
gestionnaire de fonds publics, à l’exception des élus locaux et des membres
du Gouvernement .
l
Contrôler :
partout où de l’argent public est engagé, la Cour et les chambres
régionales et territoriales des comptes veillent à la régularité, à l’efficience et
à l’efficacité de la gestion .
l
Évaluer :
la Cour assiste le Parlement et le Gouvernement dans l’évaluation
des politiques publiques . Les CRTC participent à l’exercice de cette mission
lorsque, comme c’est fréquent, la politique évaluée est partagée entre l’État
et les collectivités territoriales . Le législateur envisage actuellement de leur
confier en propre une compétence d’évaluation (projet de loi 3DS) .
l
Certifier :
chaque année, la Cour certifie les comptes de l’État et du régime
général de la sécurité sociale . Les CRTC contribuent, aux côtés de la Cour, à
l’expérimentation de la certification des comptes locaux .
6
Introduction générale
Pour la première fois en 2020, une partie thématique, consacrée à l’enjeu essentiel
pour l’État, les organismes de sécurité sociale et les collectivités territoriales que
constitue la numérisation de l’action publique, a été insérée au RPA . L’expérience
a été renouvelée en 2021 pour rendre compte des premiers travaux réalisés par
les juridictions financières sur les conséquences de la crise sanitaire .
La Cour a décidé de franchir cette année une nouvelle étape, en conférant à son
rapport public annuel un caractère thématique encore plus affirmé .
L’attention des juridictions financières s’est à nouveau portée sur la crise sanitaire,
qui a fortement perturbé le fonctionnement des administrations publiques et
dont les menaces sur la santé des Français et l’impact sur l’activité économique
ont suscité des attentes très importantes de la population et des entreprises à
l’égard de l’État . Le présent rapport se concentre ainsi sur les enseignements
à tirer de cette crise inédite et de ses conséquences budgétaires, financières,
économiques et sociales .
Cette évolution s’inscrit dans le projet stratégique de réforme des juridictions
financières à l’horizon 2025 . La première phase de JF 2025, concernant les
métiers de la Cour et des chambres régionales et territoriales des comptes, a
identifié une quarantaine d’actions visant, notamment, à rendre les travaux des
juridictions financières plus diversifiés, plus rapides et plus accessibles . JF 2025
dessine à ce titre une nouvelle stratégie éditoriale, fondée sur un éventail
élargi de publications visant à mieux répondre aux attentes des décideurs et
gestionnaires publics et de nos concitoyens .
Conformément à cette orientation, le « nouveau » rapport public annuel de la
Cour présentera chaque année les observations et recommandations résultant
de contrôles, enquêtes et évaluations réalisés par la Cour et les chambres
régionales et territoriales des comptes pour traiter d’un grand enjeu de l’action
publique, sur lequel les juridictions financières souhaitent appeler l’attention des
pouvoirs publics et contribuer à l’information des citoyens .
Dans la même optique, le rapport d’activité de la Cour et le fascicule analysant
le suivi des recommandations formulées par la Cour et les chambres régionales
et territoriales des comptes, qui étaient jusqu’à présent intégrés dans le rapport
public annuel, seront dorénavant publiés selon un calendrier propre .
Une dernière novation concerne la date de publication du rapport, qui a
été avancée au 15 février afin de pouvoir en exploiter les résultats lors de la
conférence internationale organisée à l’occasion de la présidence française de
l’Union européenne .
Elle se tiendra à la Cour les 14 et 15 mars 2022 et portera sur les travaux des
institutions supérieures de contrôle (c’est-à-dire des homologues étrangères de
la Cour des comptes) pendant la crise sanitaire .
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
7
Introduction générale
Dans le prolongement des précédents travaux des juridictions financières, le
rapport public annuel de la Cour offre un premier bilan global de la gestion de la
crise sanitaire et esquisse les enseignements qu’il est possible d’en tirer à moyen
et long terme .
Les précédents travaux réalisés par les juridictions financières
au fil de la crise sanitaire
Dès le début de la pandémie, à leur initiative ou à la demande du Gouvernement
et du Parlement, la Cour et les 17 chambres régionales et territoriales des
comptes de métropole et d’outre-mer ont modifié leurs programmes de travail
pour y inclure des contrôles et enquêtes portant sur la gestion de la crise par
certains acteurs publics . Ces travaux ont débouché sur une première série de
publications intervenues au fil de l’année 2021 .
La partie thématique du rapport public annuel de mars 2021 a ainsi rendu
compte d’enquêtes, réalisées dès le début de la pandémie, relatives à la gestion
opérationnelle de la crise et aux premières mesures prises pour en atténuer les
effets économiques et sociaux sur la population et les entreprises .
Les investigations correspondantes avaient porté sur l’organisation du
rapatriement en France de nos compatriotes retenus à l’étranger, la contribution
du service public du numérique éducatif à la continuité scolaire, l’hébergement
et le logement des personnes sans domicile pendant le premier confinement,
la dispensation des soins de réanimation et des soins critiques dans les services
d’urgence et, plus généralement, à la lumière des enseignements de contrôles
réalisés en Nouvelle-Aquitaine et Bourgogne-Franche-Comté, la façon dont les
hôpitaux avaient fait face aux premières vagues de covid 19 . La Cour avait alors
également présenté les résultats d’enquêtes ayant porté sur la mise en œuvre
du fonds de solidarité à destination des entreprises, les conséquences de la
pandémie sur l’assurance-chômage, les mesures prises par la SNCF pour faire
face à la crise et son impact sur le modèle économique de l’entreprise, ainsi que
la façon dont une association culturelle (l’Institut Lumière) avait traversé cette
épreuve d’une ampleur inédite .
La crise sanitaire a constitué par ailleurs un thème d’analyse prioritaire dans les
publications annuelles de la Cour consacrées aux finances publiques .
Ses rapports sur le budget de l’État, publié en avril 2021, la situation et les
perspectives des finances publiques (juin 2021), l’application des lois de
financement de la sécurité sociale (octobre 2021) et les finances publiques
locales (juin et novembre 2021) ont ainsi comporté des développements
spécifiquement axés sur les conséquences budgétaires et financières de la
pandémie pour l’État, les organismes de sécurité sociale et le secteur public local
en 2020 et 2021 .
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
8
Introduction générale
Sur saisine du Premier ministre, la Cour a également adressé en juin 2021 au
Gouvernement un rapport proposant une stratégie de finances publiques pour
la sortie de crise .
Il en ressort que, quelles que soient les perspectives de croissance à l’issue de
la pandémie, celle-ci laissera des marques durables sur l’économie française et
les finances publiques . Dans ce contexte, la soutenabilité de la dette publique
constitue un enjeu de souveraineté . Il s’agit, en effet, d’une condition nécessaire
pour faire face aux chocs économiques futurs et rester en mesure de financer
les politiques et le fonctionnement des administrations publiques . Pour assurer
cette soutenabilité, la Cour a proposé une stratégie reposant sur deux piliers : le
renforcement de la croissance potentielle et la maîtrise des dépenses publiques .
La commission des finances de l’Assemblée nationale a parallèlement confié à la
Cour le soin de l’éclairer sur les dépenses publiques réalisées pendant la crise et
le bilan opérationnel de leur utilisation .
Le rapport correspondant lui a été communiqué en juillet 2021 . Il montre que
la crise sanitaire et ses conséquences économiques et sociales ont entraîné une
forte progression des dépenses publiques, dont la part dans le produit intérieur
brut est passée de 55,4 % en 2019 à 61,8 % en 2020 . Cette augmentation, d’un
montant total de 96,4 Md€, a essentiellement résulté de la réalisation de dépenses
directement liées à la crise (82,7 Md€) . Cependant les dépenses ordinaires, sans
lien avec la pandémie, ont également progressé (13,7 Md€) . La hausse constatée
a principalement concerné l’État, dont les dépenses ont augmenté de 11 %, et
les administrations de sécurité sociale (+ 5,6 %) . En revanche, les dépenses des
collectivités territoriales ont été peu affectées (- 0,9 %) .
La Cour a parallèlement produit plusieurs rapports analysant l’impact de la crise
dans des domaines particuliers .
En mai 2021, elle a ainsi adressé à la commission des finances de l’Assemblée
nationale une communication sur le plan de continuité d’activité des juridictions
judiciaires pendant la crise sanitaire . Le rapport a montré que le ministère de
la justice n’était pas préparé à une crise d’une telle ampleur . Phénomène inédit
dans l’histoire de la justice, le premier confinement a entraîné une interruption
du fonctionnement des juridictions judiciaires . La reprise de leurs activités,
inégale selon les lieux et les catégories de contentieux, s’est révélée difficile .
Cette situation a eu des conséquences sur la qualité de la justice rendue et sur la
prise en charge de publics sensibles .
Compte tenu de l’ampleur des moyens mobilisés à ce titre, la Cour a également
réalisé une enquête sur les mesures prises par le ministère du travail pour
préserver l’emploi face à la crise sanitaire . Ce rapport, publié en juillet 2021,
montre qu’au prix de dépenses très élevées, les mesures d’urgence massives
mises en place rapidement, dès le début de la crise, et les nombreux dispositifs
de soutien qui s’y sont ajoutés à partir de l’été 2020, ont permis d’atteindre
l’objectif d’une préservation immédiate des emplois . Cependant, les enjeux du
contrôle face aux risques d’abus et de nouvelles formes de fraude n’ont pas été
suffisamment pris en compte .
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
9
Introduction générale
La pandémie a eu pour effet immédiat et particulièrement anxiogène pour la
population d’augmenter fortement la pression sur les services hospitaliers
de soins critiques . Ce faisant, elle a révélé les difficultés structurelles de ces
services, chargés de prévenir, diagnostiquer et traiter toutes les formes de
défaillances d’organes vitaux chez des patients dont le pronostic est grave
mais potentiellement favorable . À la demande de la commission des affaires
sociales du Sénat, la Cour a produit en septembre 2021 un rapport dressant un
bilan de leur fonctionnement au plus fort de la crise et formulé une série de
recommandations visant à leur permettre de surmonter les difficultés identifiées .
En juillet 2021, la Cour a également rendu compte des conclusions d’un audit
flash
1
sur le financement de la recherche publique dans la lutte contre l’épidémie
de covid 19 . Elle a produit trois autres audits flash en septembre 2021 sur les
mesures de soutien prises pendant la crise sanitaire en faveur de la culture . Ces
audits ont permis de dresser un bilan des financements exceptionnels apportés
principalement par le ministère de la culture aux secteurs du spectacle vivant,
du patrimoine et du cinéma pour faire face à la crise .
Un premier bilan global de la gestion de la crise sanitaire
Deux ans après le début de la pandémie, le rapport public annuel de 2022
propose un premier bilan global des enseignements à tirer de la crise et de ses
conséquences budgétaires, financières, économiques et sociales .
Les constatations, analyses et recommandations qui y sont présentées sont
issues d’une vingtaine de contrôles et enquêtes que la Cour et les chambres
régionales et territoriales des comptes ont réalisés dans cette perspective .
Les vérifications correspondantes ont été entreprises avec le souci de rendre
compte des résultats obtenus et des progrès restant à réaliser en termes
de services rendus aux citoyens et de soutien à l’activité et à la croissance
économique . Les juridictions financières se sont également efforcées de chiffrer
le coût des mesures mises en œuvre pour soutenir la population et les entreprises .
L’action des acteurs publics a été examinée sous trois angles complémentaires .
Le premier a porté sur les mesures prises dans l’urgence par l’État, les organismes
de sécurité sociale et les collectivités territoriales pour continuer à satisfaire les
besoins vitaux de la population et pour protéger ou aider des publics vulnérables
ou fragilisés par la pandémie .
1
Les audits flash constituent une nouvelle catégorie de publications de la Cour, visant à éclairer,
dans des délais resserrés, les pouvoirs publics et nos concitoyens sur des questions d’actualité,
concernant par exemple le coût d’une mesure nouvelle ou les enjeux d’un sujet émergent .
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
10
Introduction générale
Comment, avec l’appui du ministère des solidarités et de la santé et des agences
régionales de santé, les 7 500 établissements d’hébergement pour personnes
âgées dépendantes (Ehpad) répartis sur le territoire national se sont-ils organisés
pour protéger au mieux leurs 600 000 résidents ? Quelles aides le ministère, les
établissements d’enseignement supérieur et les centres national et régionaux
des œuvres universitaires et scolaires (CNOUSS et CROUSS) ont-ils apporté aux
2,8 millions d’étudiants dont la vie quotidienne a été bouleversée par la crise ?
La sécurité des approvisionnements alimentaires a-t-elle été assurée pendant
la crise et les populations les plus fragiles ont-elles pu bénéficier d’une aide
alimentaire ? Quelles ont été les mesures prises pour éviter que les ruptures de
livraison de médicaments et de dispositifs médicaux, de moins en moins rares
avant la crise, se multiplient du fait de la pandémie ?
Ces sujets ont été d’une brûlante actualité, parfois dramatique pour nos
concitoyens : le nombre de personnes âgées résidant dans un Ehpad décédées
du fait de la pandémie entre mars 2020 et mars 2021 est estimé à 34 000 . Le
rapport offre des éléments permettant de mesurer l’ampleur des défis auxquels
les pouvoirs publics ont dû faire face sans délai et les résultats à court et moyen
terme des décisions qu’ils ont prises au fil des vagues épidémiques pour y
répondre
2
Au même titre, la Cour a prêté une attention particulière aux mesures prises
par le Gouvernement, dans le cadre du plan « #1jeune1solution », dont le
montant total pourrait avoisiner 10 Md€, pour réduire le risque de hausse du
chômage des jeunes consécutif à la crise, déjà deux fois plus élevé que celui de
l’ensemble de la population . Elle a, par ailleurs, examiné l’utilisation faite par le
ministère du travail des moyens, également très importants (plus de 7 Md€), que
l’Union européenne a mis à disposition de la France pour soutenir l’emploi et la
formation professionnelle .
Le deuxième axe retenu par la Cour et les chambres régionales et territoriales
des comptes a consisté à examiner la façon dont certaines administrations et
entreprises publiques pourvoyeuses de services essentiels à la population et aux
entreprises se sont adaptées à la crise .
Les juridictions financières ont ainsi constaté que les administrations fiscales
et douanières avaient compensé leur impréparation initiale à un événement
d’une telle ampleur en modifiant très rapidement leur organisation et leurs
procédures pour, notamment, assurer le versement d’aides aux entreprises et
faciliter le dédouanement de matériel et de dispositifs médicaux . Les directions
de l’administration pénitentiaire et de la protection judiciaire de la jeunesse, qui
n’étaient pas non plus préparées à la survenue d’une crise sanitaire majeure,
se sont elles aussi adaptées rapidement pour assurer la protection de leurs
agents et des personnes placées sous main de justice, sans conflit social avec les
personnels, ni tensions notables avec les détenus .
2
La Cour publiera ultérieurement un rapport sur la politique vaccinale contre la covid 19 .
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
11
Introduction générale
Une enquête sur les conséquences de la crise sur les transports publics en
Île-de-France a montré que la RATP, la SNCF et les opérateurs de bus de
moyenne et grande couronne avaient, conformément à la demande de l’État
et de l’autorité organisatrice de la mobilité (IDFM), ajusté leur offre pour qu’elle
soit constamment supérieure à une demande de transport fluctuante et pris
les mesures nécessaires pour protéger leurs salariés et les usagers du risque
de contamination . L’enquête a aussi fait apparaître que l’État était intervenu
comme l’assureur en dernier ressort d’un service normalement financé par des
ressources franciliennes .
En France comme dans la quinzaine de pays étrangers où il assure des services
de transports collectifs, principalement pour le compte d’autorités publiques, le
groupe Transdev a fait preuve de la même réactivité pour ajuster son offre . De
même, les acteurs du système électrique ont su s’adapter dans l’urgence pour
maintenir la production et la fourniture d’électricité, notamment en réorganisant
les arrêts pour maintenance du parc de réacteurs nucléaires, qui assure 70 % de
la production française d’électricité .
La Cour a également examiné les conditions dans lesquelles les grands
aéroports français ont, avec le soutien de l’État, fait face à la forte baisse de leurs
revenus, causée par l’effondrement du trafic aérien, en mettant en œuvre des
plans d’économies volontaristes, et réorganisé leur fonctionnement pour ajuster
en permanence leur activité à l’évolution de la demande . La baisse de chiffre
d’affaires consécutive à la chute de la fréquentation a également compromis
l’équilibre économique de nombreuses délégations de services publics locaux,
dans des domaines aussi divers et essentiels que la distribution de l’eau, la
collecte et le traitement des déchets, la gestion des réseaux de transport urbain,
l’exploitation d’équipements sportifs ou culturels et de centres de congrès . Une
enquête réalisée dans les Hauts-de-France a montré que l’intervention des
collectivités territoriales concernées avait permis de préserver la rentabilité
de l’exploitation et les intérêts des délégataires, sans toutefois tenir toujours
suffisamment compte de la dégradation du service subie par les usagers .
Les juridictions financières se sont, en troisième lieu, intéressées à la déclinaison
concrète de la décision prise par le Gouvernement de soutenir « quoi qu’il en
coûte » l’activité économique du pays, au travers de dispositifs novateurs d’une
ampleur inédite mais également d’interventions plus ciblées .
À ce titre, la Cour a complété et actualisé la première analyse qu’elle avait
réalisée du déploiement du dispositif de prêts garantis par l’État (PGE) au
bénéfice des entreprises, auquel ces dernières ont largement recouru : à la fin
du mois de septembre 2021, 140 Md€ de PGE avaient été souscrits par près
de 700 000 entreprises . Elle a aussi examiné les conditions dans lesquelles
l’administration fiscale a aidé les entreprises à surmonter leurs difficultés de
trésorerie et à s’acquitter de leurs obligations fiscales, notamment par des
mesures visant à soutenir leur trésorerie et au travers de la mise en œuvre
de baisses exceptionnelles d’impôts décidées par le Parlement . Elle s’est, par
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
12
Introduction générale
ailleurs, penchée sur l’utilisation que les caisses de retraite ont fait des réserves
qu’elles constituent pour être en mesure, notamment, de continuer à financer
leurs engagements en cas de crise .
Le rapport rend également compte des résultats d’une enquête ciblée sur les
aides que l’État a apportées au monde sportif, amateur et professionnel, pour lui
permettre de surmonter les conséquences de l’interruption des pratiques et des
compétitions sportives .
Les collectivités territoriales se sont elles aussi mobilisées pour contribuer à
l’effort général de soutien aux entreprises et à l’activité économique . Le chapitre
sur l’appui apporté à deux stations de moyenne montagne des Pyrénées-
Atlantiques en offre une illustration . Une analyse plus globale des interventions
de la région et des groupements de communes en faveur des entreprises
d’Occitanie montre que l’efficacité de ce soutien, d’une bien moindre ampleur
que celui de l’État, a pâti d’une coordination insuffisante entre les collectivités
concernées, notamment parce que les départements, qui ne disposent pourtant
plus de compétences dans ce domaine, ont néanmoins souhaité intervenir
directement .
Les enseignements à tirer à moyen et long terme de la crise
Il ressort en premier lieu de cet ensemble d’éléments qu’à l’image de la pandémie,
les moyens publics déployés pour y faire face ont été d’une ampleur inédite . Cet
effort considérable va durablement peser sur le déficit et la dette publics, dont
la réduction va nécessiter des efforts sans précédent de maîtrise des dépenses .
Le chapitre introductif du rapport, consacré à la situation d’ensemble des
finances publiques, montre ainsi qu’en dépit d’une reprise économique robuste, le
déficit public devrait rester très élevé en 2021 (7 points de PIB) et 2022 (5 points
de PIB) et qu’il présente désormais un caractère exclusivement structurel . La
trajectoire retenue par le Gouvernement pour le ramener en-dessous de 3 % en
2027 et amorcer à cet horizon une diminution de la dette publique suppose en
conséquence des efforts de maîtrise plus importants que par le passé .
Le respect de cette trajectoire impose la mise en œuvre de réformes visant,
conformément aux orientations préconisées par la Cour dans son rapport de
juin 2021 sur la stratégie de finances publiques pour la sortie de crise, à infléchir
le rythme de la dépense tout en améliorant son efficience . Les secteurs identifiés
comme prioritaires sont le système de retraite, l’assurance maladie, la politique
de l’emploi, les minimas sociaux et la politique du logement .
Les enquêtes et contrôles réalisés montrent, en deuxième lieu, que certaines
administrations, qui n’étaient pas préparées à affronter une crise d’une ampleur
aussi inédite que celle que traverse la France depuis maintenant deux ans, ont
compensé cette fragilité initiale par leur adaptabilité, en prenant dans l’urgence
des mesures visant à protéger la population, assurer la continuité des services
publics ou préserver le tissu économique .
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
13
Introduction générale
Dans un contexte et auprès de publics particulièrement sensibles, les directions
de l’administration pénitentiaire et de la protection judiciaire de la jeunesse ont
ainsi su faire preuve de résilience et s’adapter aux circonstances . C’est également
le cas pour la direction générale des finances publiques et la direction générale
des douanes et droits indirects, qui ont su mettre en place rapidement et faire
fonctionner des dispositifs exceptionnels de soutien aux entreprises et assurer
le dédouanement des équipements de protection individuels et matériels
médicaux dont il était impératif de maintenir la chaîne d’approvisionnement .
En revanche, le soutien apporté aux étudiants a été moins rapide . La crise a en
effet révélé la précarité de certaines catégories d’étudiants, notamment non
boursiers, qui était jusqu’alors insuffisamment identifiée par le ministère de
l’enseignement supérieur et ses opérateurs . Aussi le ministère a-t-il tardé à leur
venir en aide .
La crise a également poussé plusieurs services et organismes publics à
moderniser leur fonctionnement et à prendre des mesures de simplification
afin de rendre plus rapidement des services de qualité à la population et aux
entreprises . Sous ces deux angles, d’importants progrès ont été réalisés, qui
devront toutefois être consolidés .
La réactivité des administrations fiscales et douanières a notamment reposé
sur la mobilisation de leurs personnels et sur le développement de leurs
capacités de travail à distance et la numérisation de leurs procédures, qui se
sont accélérés sous la pression des événements . Il leur appartient de développer
encore l’équipement bureautique, la dématérialisation des processus et la mise à
disposition d’outils collaboratifs, de visioconférence et d’espaces partagés pour
se rapprocher des meilleurs standards en la matière .
Cette réactivité tient aussi aux mesures de simplification de l’organisation et des
procédures que les services concernés ont pu mettre en œuvre, par exemple
pour accélérer l’homologation en France de masques de protection sanitaire
fabriqués à l’étranger . La pérennisation de ces mesures constitue aussi un enjeu
majeur pour l’avenir .
Dans la même optique, les obligations de suivi des mesures en faveur de l’emploi
et de la formation professionnelle financées par l’Union européenne doivent
conduire le ministère du travail à renforcer la culture du contrôle interne et de
l’évaluation des fonds européens dont il a la responsabilité, pour tirer pleinement
parti des crédits qui seront mis à sa disposition au cours de la période 2021-2026
dans le cadre du plan de relance .
Il ressort également des contrôles et enquêtes réalisés par les juridictions
financières que les moyens déployés ont parfois été insuffisamment ciblés ou
coordonnés .
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
14
Introduction générale
Le
constat
d’un
ciblage
déficient
vaut,
par
exemple,
pour
le
plan
« #1jeune1solution », dont une grande partie des crédits a financé la poursuite,
sur une plus grande échelle, des dispositifs mis en œuvre avant la crise pour
favoriser l’emploi des jeunes . Ainsi, l’accroissement des moyens qui y sont
consacrés a-t-il été uniformément appliqué sur l’ensemble du territoire national,
sans tenir compte de la diversité des situations locales .
La plupart des aides spécifiques allouées par l’État et l’Agence nationale du
sport aux fédérations, associations et clubs sportifs ont été mises en place sans
réelle coordination entre les acteurs et sans véritable ciblage des bénéficiaires .
Certaines mesures de soutien à la vie étudiante ont également manqué leur
cible, le ministère de l’enseignement supérieur ne disposant pas de données
suffisamment fines sur les besoins des étudiants pour les calibrer correctement .
L’enquête sur les interventions économiques des collectivités territoriales
d’Occitanie a quant à elle mis en évidence la nécessité d’améliorer la coordination
entre les catégories de collectivités directement ou indirectement compétentes
(régions, groupements de communes et départements) .
Par ailleurs, les aides accordées n’ont généralement pas été assorties de
précautions suffisantes pour éviter les effets d’aubaine et limiter les risques de
fraude .
Il en va ainsi pour certaines mesures fiscales de soutien aux entreprises,
notamment de report de paiement d’impôts, dont le contrôle de la bonne
utilisation et du respect des conditions d’octroi devra être renforcé au sortir de
la crise . La Cour a également appelé l’administration fiscale à mettre en œuvre
effectivement les plans de contrôles
a posteriori
des aides versées aux entreprises
depuis mars 2020 au titre du fonds de solidarité et, en cas de constatation de
versements indus, de procéder à la récupération des sommes correspondantes
et, s’il y a lieu, d’engager des poursuites pénales .
La Cour a constaté que le dispositif des PGE retenu par la France, dans le cadre
défini par la Commission européenne, avait été conçu pour que l’exposition au
risque des banques soit bien réelle et les incite, en conséquence, à sélectionner
des entreprises susceptibles de rembourser leur prêt . Elle a toutefois appelé à la
vigilance du Gouvernement sur la nécessité de porter une attention particulière
aux risques d’optimisation des prêts souscrits avec la garantie de l’État par
certaines entreprises .
L’insuffisance des contrôles a également été relevée pour ce qui concerne les
aides apportées par l’État en faveur du mouvement sportif (subventions versées
au titre du fonds territorial de solidarité mis en place par l’Agence nationale
du sport, mesures de soutien à la transition énergétique des équipements
sportifs, compensations des pertes de billetteries subies par les organisateurs
de manifestations et compétitions sportives), dont les critères d’attribution
étaient dans certains cas trop généraux et pour lesquelles l’instruction préalable
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
15
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
des demandes a été réalisée, dans des délais il est vrai contraints, avec une
insuffisante rigueur . La Cour a également appelé à une agrégation des soutiens
ainsi apportés aux acteurs du mouvement sportif, afin d’identifier d’éventuels
phénomènes de surcompensation de leurs besoins .
La crise a souvent révélé ou confirmé des faiblesses structurelles, affectant selon
les cas l’organisation ou les modalités d’intervention des acteurs, et accentué
l’urgence qui s’attache à les traiter .
Ainsi, l’efficacité des mesures prises pour protéger les personnes âgées
hébergées dans les Ehpad a parfois pâti d’une insuffisante articulation entre ces
établissements et les hôpitaux . La crise a plus généralement mis en évidence
l’intérêt de leur insertion dans un réseau, par leur adossement à un établissement
de santé, leur inclusion dans un groupe d’établissements ou leur participation à
un groupement de coopération médico-social . Aussi la Cour a-t-elle réitéré la
recommandation, qu’elle avait déjà adressée au ministère de la santé, d’utiliser
les leviers dont il dispose (autorisations, tarification, contractualisation) pour
accélérer leur intégration . Elle a également regretté que le financement par
l’assurance maladie de mesures d’une ampleur inédite en faveur du secteur
médico-social (1,7 Md€ en 2020 au titre de la compensation des pertes de
recettes des établissements, de la compensation des dépenses occasionnées par
la crise et de la revalorisation des salaires des personnels) n’ait pas été assorti de
conditions allant dans le sens de cette indispensable restructuration .
De la même façon, la Cour a constaté que le soutien de l’État n’avait pas été
utilisé comme un levier pour inciter les acteurs du sport professionnel et amateur
à revoir leur organisation et leur modèle économique, conformément à des
préconisations qu’elle a déjà formulées . Les aides qui leur ont été attribuées au
titre de la relance ont d’ailleurs en partie servi à compléter celles qui leur avaient
été octroyées pour parer aux urgences suscitées par la crise . Parmi les principaux
enjeux figurent ceux de la diversification de l’offre sportive, de la mutualisation
entre les acteurs, de la poursuite de leur professionnalisation et de la recherche
de nouvelles ressources, moins soumises aux aléas conjoncturels .
Dans certains cas, l’appui des acteurs publics a même pu retarder l’indispensable
adaptation des structures qui en ont bénéficié . Ainsi les aides apportées par le
département des Pyrénées-Atlantiques aux deux stations de moyenne montagne
dont il est propriétaire ont contribué à financer un modèle économique
principalement axé sur la pratique des sports d’hiver, dont la viabilité est depuis
plusieurs années affectée par le réchauffement climatique .
Le contrôle des délégations de service public dans les Hauts-de-France a montré
que, faute d’avoir une stratégie claire pour faire face aux impératifs de continuité
et d’adaptation du service public, les autorités délégantes avaient trop souvent
accédé sans réelle discussion aux demandes des entreprises délégataires . La crise
sanitaire a ainsi une nouvelle fois illustré le caractère asymétrique de leurs relations
et la nécessité de replacer les usagers au cœur de leurs relations contractuelles .
Introduction générale
16
Introduction générale
La pandémie a aussi révélé ou accentué certaines faiblesses du système productif
ou de grandes infrastructures essentielles au développement économique,
parfois préjudiciables à l’autonomie stratégique du pays, et la nécessité d’y
remédier .
Les ruptures d’approvisionnement qui ont affecté certains produits de santé
de première nécessité, notamment des médicaments utilisés pour la prise en
charge de patients en soins critiques et les masques de protection sanitaire,
ont pour partie résulté de la dépendance de la France à l’égard de producteurs
étrangers . Les mesures exceptionnelles auxquelles ont recouru les acteurs
publics ont permis de pallier progressivement les difficultés rencontrées .
Cependant, la politique de relocalisation industrielle que le Gouvernement a
décidé de déployer devra être mise en œuvre dans la durée pour y répondre de
manière plus pérenne .
Aucune
rupture
majeure
n’a,
en
revanche,
affecté
la
chaîne
des
approvisionnements alimentaires, les acteurs privés du secteur agroalimentaire
et de la distribution ayant su s’adapter . La crise a toutefois mis en évidence la
dépendance du pays à certaines importations et le développement insuffisant
des circuits de proximité . L’élaboration, incombant à l’État, d’une véritable
stratégie de préparation et de conduite de crise doit ainsi s’accompagner d’un
travail prospectif sur le modèle national agricole .
La crise sanitaire a également permis de mesurer l’importance des risques pesant
actuellement sur la disponibilité des centrales nucléaires et, en conséquence,
sur les marges nécessaires pour assurer la sécurité de l’approvisionnement en
électricité des acteurs économiques et de la population . La restauration de ces
marges passe notamment par un développement des incitations à la modulation
de la consommation d’électricité des entreprises et des ménages en période de
fortes tensions .
La pandémie a aussi mis en lumière les fragilités du modèle économique des
aéroports, qui avaient jusque-là été partiellement occultées par la croissance
continue du trafic et des revenus qui en étaient tirés . La crise a en effet suscité une
réduction probablement durable de leurs marges, qui appelle de la part de l’État,
de l’autorité régulatrice et des opérateurs des mesures difficiles mais sans doute
inévitables de révision à la baisse des projets d’investissement aéroportuaires .
*
**
En conclusion, la Cour constate qu’alors qu’ils étaient mal préparés à affronter
une crise sanitaire de grande ampleur, les acteurs publics ont su prendre
rapidement des mesures pour protéger la population et éviter un effondrement
économique du pays . Une anticipation et une meilleure préparation auraient
été néanmoins particulièrement utiles pour faire face à une crise brutale et de
grande ampleur .
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
17
Introduction générale
De plus, la nécessité d’agir dans l’urgence, parfois aussi la méconnaissance de
la diversité des besoins des publics visés, ont pu conduire dans certains cas à
un surcalibrage ou à un ciblage insuffisant des aides attribuées . Elles expliquent
également que les précautions nécessaires pour éviter les effets d’aubaine et
réduire les risques de fraude aient été insuffisantes . Les juridictions financières
ont formulé plusieurs recommandations pour répondre à ces lacunes .
La pandémie a pu, dans certains cas, constituer une opportunité que certains
services et organismes publics ont su saisir pour moderniser leur fonctionnement
ou simplifier les processus de décision . Ces acquis doivent être pérennisés .
Cependant, les contrôles et enquêtes réalisés par les juridictions financières ont
surtout montré que la crise avait révélé ou accentué des fragilités structurelles
et mis en lumière l’urgence de les traiter .
Les réformes correspondantes devront être conduites dans un contexte
durablement contraint par la nécessité de réduire le déficit public pour maîtriser
la dette . L’ampleur des moyens mobilisés notamment par l’État et les organismes
de sécurité sociale afin de faire face aux conséquences économiques et sociales
de la crise a, en effet, porté le déficit public à des niveaux jamais atteints, accru
la dette publique de 560 Md€ par rapport à 2019 et alourdi son poids dans le
PIB de 16 points . Ces données situent la France dans le groupe des pays de
la zone euro dont, deux ans après le début de la pandémie, la situation des
finances publiques est la plus dégradée . Elles mettent en évidence la nécessité
dans laquelle notre pays se trouve de définir une trajectoire à moyen terme de
redressement des finances publiques exigeante et crédible, tout en renforçant la
croissance potentielle .
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
19
Un déficit public qui diminue-
rait en 2021 et 2022 mais reste-
rait très élevé malgré le rebond
marqué de l’activité.
En 2022, près de deux ans après le
déclenchement de la crise sanitaire
et alors que l’activité économique
a d’ores et déjà dépassé son niveau
d’avant-crise, la France ferait toujours
face à un niveau de déficit élevé : il
représenterait encore 5 points de
PIB (selon la LFI pour 2022), après
8,2 points en 2021 (selon la LFR2
pour 2021) et 9,1 points en 2020 .
Conséquence de ces niveaux de déficit,
la
dette
publique
représenterait
113,5  points de PIB en 2022 et
dépasserait alors de 16 points de PIB
son niveau de 2019 . Néanmoins, selon
des déclarations du Gouvernement
mi-janvier, le déficit public pour 2021
pourrait s’établir à un niveau proche
de 7 points de PIB, nettement plus
faible qu’attendu .
La situation d’ensemble
des finances publiques
(à fin janvier 2022)
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
Solde public et solde structurel (en % du PIB)
- 9
- 8
- 7
- 6
- 5
- 4
- 3
- 2
- 1
0
2006
2007
2008
2009
2010
2011
2012
2013
2014
2015
2016
2017
2018
2019
2020
2021
2022
Solde public
Solde structurel
Sources : Insee, ministère de l’économie, des finances et de la relance
20
La situation d’ensemble des finances publiques
(à fin janvier 2022)
Conséquence
des
baisses
impor-
tantes de prélèvements obligatoires
et de la mise en œuvre de dépenses
pérennes nouvelles en 2021 et 2022,
le
déficit
structurel,
c’est-à-dire
le déficit corrigé de l’impact de la
conjoncture, serait lui aussi très élevé,
à 5 points du PIB, soit le double
de celui d’avant-crise (2,5 points
en 2019) et supérieur de près de
5 points à l’objectif de moyen terme
fixé à 0,4 point de PIB dans la loi du
22  janvier 2018 de programmation
des finances publiques pour les années
2018 à 2022 .
Le solde structurel
serait ainsi très éloigné du niveau
souhaitable
pour
restaurer
des
marges de manœuvre pour faire
face à un prochain ralentissement
de l’économie .
Au-delà de 2022, une divergence
persistante avec nos partenaires
européens, une maîtrise
renforcée de la dépense
publique indispensable
Au sein de la zone euro, la France
appartiendrait au groupe de pays dont
le ratio de dette (110 points de PIB
ou au-dessus) et le déficit structurel
(environ 5 points de PIB) sont les plus
élevés, avec l’Italie, la Belgique et
l’Espagne .
À l’opposé se trouvent les
pays dont le niveau de dette est plus
proche de 60 points de PIB et dont
le solde structurel est de l’ordre de
3 points de PIB, comme l’Allemagne,
les Pays-Bas et l’Autriche .
Comme
la Commission européenne l’a déjà
signalé, pour les pays dont la situation
est dégradée, comme la France, cela
impliquera des efforts plus importants
de redressement à partir de 2023 .
0
20
40
60
80
100
120
140
160
0
1
2
3
4
5
6
Portugal
Autriche
Pays Bas
Allemagne
Italie
France
Belgique
Espagne
Déficit structurel
Dette publique
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
Dette publique et déficit structurel des huit principaux pays de la zone euro en 2022
(en % du PIB)
Sources : calcul Cour des comptes à partir des données des projets de
plan budgétaire des pays
21
La situation d’ensemble des finances publiques
(à fin janvier 2022)
Dans la trajectoire de moyen terme
présentée
à
l’automne
2021
à
l’occasion du projet de plan budgétaire
révisé,
le
Gouvernement
se
fixe
l’objectif de ramener le déficit sous
3 points de PIB et de mettre le ratio
de dette publique sur une trajectoire
descendante
en
2027 .
Selon
lui,
le
redressement
devrait
reposer
exclusivement sur une maîtrise de la
dépense . Les estimations faites par la
Cour montrent que l’objectif que se
fixe le Gouvernement nécessiterait
plus
de
9
Md€
d’économies
supplémentaires chaque année par
rapport à la croissance des dépenses
observée
avant-crise
(2010-2019),
période au cours de laquelle des
économies avaient déjà été réalisées .
La
trajectoire
retenue
par
le
Gouvernement
risque
d’accroître
les écarts de situation des finances
publiques au sein de la zone euro . Ils
s’aggraveraient avec l’Allemagne, où
le frein constitutionnel à la dette sera
mis en œuvre à partir de 2023 .
La prochaine loi de programmation
des finances publiques qui devra être
présentée à l’automne 2022 après les
échéances électorales du printemps,
devra réviser l’ambition de la trajectoire
des
finances
publiques
au
regard
notamment de la situation économique
et sanitaire mais aussi des trajectoires
retenues par nos partenaires européens
et des règles budgétaires européennes
en cours d’évolution .
Elle devra également préciser, sur la
durée du prochain quinquennat, les
réformes nécessaires pour construire
une trajectoire qui permette de garantir
la soutenabilité de la dette . Celle-ci
devra s’appuyer sur des hypothèses
réalistes,
notamment
concernant
l’environnement
économique,
mais
également
sur
le
montant
des
économies attendues attachées aux
réformes qui seront mises en place .
Comme l’a souligné la Cour dans son
rapport de juin 2021 intitulé «
une
stratégie de finances publiques pour
la sortie de crise
», il sera essentiel de
faire preuve de sélectivité dans le choix
des dépenses, d’engager des réformes
ambitieuses dans certains secteurs
clés pour infléchir durablement le
rythme de la dépense et de faire du
renforcement de l’efficience de la
dépense publique une priorité de
premier rang .
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
Première partie
Les mesures prises pour satisfaire
les besoins vitaux de la population
et venir en aide à des publics vulnérables
ou fragilisés par la crise
1 .
Les personnes âgées hébergées dans les Ehpad
2 .
Le soutien de l’État à la vie étudiante
3 .
Le plan #1jeune1solution en faveur de l’emploi des jeunes
4 .
L’utilisation des moyens mis à disposition par l’Union
européenne pour soutenir l’emploi
5 .
La sécurité des approvisionnements en produits de santé
6 .
La sécurité des approvisionnements alimentaires
25
1
La crise sanitaire a particulièrement
frappé
les
500 
établissements
pour personnes âgées dépendantes
(Ehpad) et leurs 600  000 résidents .
80 %
des
établissements
ont
été
touchés entre mars 2020 et mars 2021 .
Durant cette période, la pandémie
a provoqué près de 34 000 décès, ce
qui représente 36 % de l’ensemble des
décès constatés en France du fait de la
covid . Cette vulnérabilité particulière
ne s’explique pas uniquement par la
fragilité des résidents . Elle résulte
également des difficultés structurelles
des Ehpad, qui appellent des réformes
en profondeur, au-delà des crédits très
importants qui ont été dégagés tant
pour la gestion de la crise elle-même
que dans le cadre du Ségur de la santé .
Un lourd coût humain
jusqu’à la mise en place
de la vaccination, révélant
les faiblesses structurelles
des Ehpad et la fragilité
de leurs résidents
Les deux premières vagues de mars-
juillet puis août-décembre 2020 se
sont soldées par un nombre équivalent
de décès dans les Ehpad (un peu plus
de 14 500 pour chacune d’entre elles) .
Leurs caractéristiques et le contexte
dans lequel elles sont intervenues ont
cependant été très différents .
La première vague s’est concentrée
dans
deux
régions
(Île-de-France
et
Grand
Est),
a
duré
quelques
semaines et s’est caractérisée par une
pénurie d’équipements de protection
individuelle, le manque de tests et
des
protocoles
particulièrement
drastiques . La deuxième vague a été
plus diffuse géographiquement et
plus longue . Les mesures prises ont
davantage tenu compte des réalités
territoriales et ont surtout mieux
respecté la liberté d’aller et venir des
résidents et l’accès des familles .
Les personnes âgées hébergées
dans les Ehpad
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
26
Au
premier
trimestre
2021,
les
Ehpad ont largement échappé à la
troisième vague du fait du succès
de la vaccination .
Ils ont tout de
même eu à déplorer 4  700 décès
supplémentaires liés à la covid  19
durant cette période .
Cette très forte mortalité s’explique
par le profil des résidents, mais aussi
par des faiblesses structurelles bien
connues malgré les progrès réalisés
depuis le début des années 2000  :
insuffisance de la prise en charge
médicale,
fortes
tensions
sur
les
ressources humaines, faible insertion
dans les réseaux de soins et, parfois,
diffi
cultés liées à l’inadaptation des
locaux .
Des mesures de soutien
conjoncturelles et pérennes
d’un montant inédit, qui
doivent s’accompagner
de réformes structurelles
Le coût pour l’assurance maladie des
mesures
conjoncturelles
destinées
notamment à compenser les dépenses
supplémentaires et pertes de recettes
des Ehpad a atteint 1,7 Md€ en 2020 .
En juillet 2020, des mesures financières
pérennes ont également été prises
dans le cadre du « Ségur de la santé » .
Ont alors été décidées d’importantes
revalorisations salariales, ainsi que
la
réalisation
d’investissements
immobiliers et l’abondement d’une
enveloppe pour le développement
des outils numériques .
Aussi l’objectif
global des dépenses en faveur des
personnes âgées en 2020 (14,3  Md€)
s’inscrit-il en hausse de  33,6  % par
rapport à 2019 .
Des
dispositions
pertinentes
pour
améliorer la prise en charge médicale
des
personnes
hébergées
dans
les
Ehpad,
prises
dans
l’urgence,
ont par ailleurs commencé à être
pérennisées  : montée en puissance
des
filières
gériatriques,
présence
plus
importante
des
équipes
d’hospitalisation à domicile dans les
établissements,
renforcement
du
temps de présence médical, etc .
Les personnes âgées hébergées dans les Ehpad
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
Les régions les plus touchées (vague 1 et vague 2)
Source : Drees
27
Le volume exceptionnel de dépenses
ainsi consenties ne pourra se justifier
que si le modèle même des Ehpad
évolue en profondeur, comme l’ont
préconisé de manière convergente
plusieurs rapports, dont ceux de la
Cour des comptes .
Recommandations
Les personnes âgées hébergées dans les Ehpad
La Cour formule les recommanda-
tions suivantes :
1.
consolider
les
relations
de
partenariat nouées pendant la crise
entre ARS, Ehpad et établissements
de santé, notamment en articulant
mieux les plans bleus et les plans
blancs,
dans
le
cadre
territorial
(ministère
de
la
santé
et
des
solidarités)
;
2.
favoriser
l’insertion
des
Ehpad
dans un réseau (adossement à un
établissement de santé, insertion
dans un groupe, participation à un
groupement de coopération médico-
social) dans le cadre de la négociation
des contrats pluriannuels d’objectifs
et de moyens
(établissements, ARS,
conseils départementaux)
;
3.
accélérer la mise en place des
réformes structurelles, en identifiant
au préalable l’impact de l’utilisation
des
trois
principaux
leviers
de
réforme : autorisations, CPOM et
tarifs
(ministère de la santé et des
solidarités)
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
28
La
crise
sanitaire
a
profondément
bouleversé le quotidien des étudiants .
La
fermeture
des
établissements
d’enseignement
supérieur,
annoncée
par le Président de la République le
14 mars 2020, a entraîné l’interruption
de nombreux services, y compris ceux
assurés par les restaurants universitaires .
La situation des entreprises a réduit les
possibilités d’emploi ou de formation en
alternance des étudiants . La fermeture
des frontières a entraîné des difficultés
spécifiques pour les étudiants étrangers,
ainsi que pour les étudiants ultramarins
en métropole . Les difficultés financières
auxquelles certains étudiants ont pu
être confrontés se sont poursuivies lors
de l’année universitaire 2020-2021 .
La prise en compte tardive
des conséquences de la crise
Les pouvoirs publics ont mis en
place des dispositifs de soutien, au
fur et à mesure que les difficultés
leur
étaient
signalées
par
les
acteurs de terrain . Les financements
additionnels mobilisés pour faire face
à la crise sanitaire en 2020 peuvent
être estimés à 215,5 M€ . Certes, la
mobilisation de la communauté de
l’enseignement supérieur a été forte .
Cependant, les mesures d’urgence
n’ont que tardivement été adaptées
aux difficultés que la crise soulevait,
de manière prolongée, pour un grand
nombre d’étudiants .
Les dispositifs de soutien, souvent trop
complexes et trop circonscrits, tant en
ce qui concerne les publics concernés
que les vulnérabilités visées, se sont
tout
d’abord
concentrés
sur
les
étudiants boursiers, plus facilement
identifiables . Cependant, la pandémie
a montré qu’une partie des étudiants
non
boursiers
était
nettement
exposée au risque de précarité en
de telles circonstances . Non ciblée
par
les
dispositifs
préexistants,
cette
population
étudiante,
dont
l’importance est difficile à évaluer, a
été délaissée dans les premiers mois
de la crise .
L’élargissement
des
mesures
de
soutien,
intervenu
seulement
fin
2020, a été tardif et se situe en retrait
par rapport à d’autres aides sociales
d’urgence décidées par l’État pour des
jeunes non étudiants en situation de
précarité .
Le soutien de l’État à la vie
étudiante
2
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
29
Le soutien de l’État à la vie étudiante
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
Principales mesures de soutien à la vie étudiante
1
er
confinement :
du 17 mars au 11 mai 2020
2
e
confinement : du 30 octobre au 15 décembre 2020
Gel loyers
logements
CROUS
1
er
janvier 2020
à août 2022
Repas à 1€ pour
les boursiers*
1
er
septembre 2020
au 24 janvier 2021
Repas à 1 € pour
les boursiers
et non boursiers*
25 janvier 2021
au 31 juillet 2021
Élargissement utilisation
CVEC (aides alimentaires,
précarité numérique, etc.)
mars 2020
(en cours
)
avril 2020
(en cours)
Abondement
de 10 M€ des aides
d'urgence des CROUS
novembre 2020
(prolongation
2021-2022)
1 294
« étudiants référents »
en résidences CROUS
février 2021
(prolongation
2021-2022)
Recrutement d'assistantes
sociales au sein des CROUS
1
er
février 2021
(en cours)
Dispositif « santé psy
étudiants » SPE
juillet 2020
(ponctuelle)
Mensualité de bourse
supplémentaire en cas
d’examens reportés
mai 2020
(ponctuelle)
Aide de 200 € en cas
de perte d'emploi ou
de stage gratifié
décembre 2020
(ponctuelle)
Aide exceptionnelle
de 150 € à tous
les boursiers*
mars 2020
(ponctuelle)
mai 2020
(ponctuelle)
Aide de 200 € pour les
étudiants ultramarins
restant en métropole
mars 2021
Recrutement
de psychologues
en services de santé
universitaires
Repas à 1€ pour
les boursiers et
étudiants précaires*
1
er
septembre 2021
à juillet 2022
2022
Santé
Accompagnement
Logement
Restauration
Aides financières
Domaines concernés :
3
e
confinement :
du 3 avril
au 3 mai 2021
Exonération
de préavis de départ
en résidences CROUS
* Dispositifs à la portée la plus significative
Source : Cour des comptes
30
Recommandations
Le soutien de l’État à la vie étudiante
Une gestion de l’urgence qui
a mis en évidence les défauts
structurels du système
de soutien à la vie étudiante
La
crise
a
révélé
des
précarités
étudiantes
dont la
nature
exacte
et
l’ampleur
étaient,
jusqu’alors,
ignorées
des
pouvoirs
publics
et
de
leurs
opérateurs,
les
CROUS
autant
que
les
établissements
d’enseignement
supérieur .
Faute
d’avoir une connaissance fine des
besoins de la population étudiante
et de disposer de données fiables sur
la précarité étudiante, les pouvoirs
publics
n’étaient
pas
préparés
à
faire face à cette crise majeure . Des
structures d’administration de la vie
étudiante trop nombreuses ont dû
apprendre à collaborer en temps de
crise, réagir au gré des informations
et de l’incertitude et faire face aux
lacunes
de
la
communication
en
direction des étudiants . Elles ont par
ailleurs été confrontées, durant la
crise, à un risque jusqu’alors considéré
comme non prioritaire, celui de la santé
des étudiants .
Le
résultat
est,
dans
l’ensemble,
décevant ; il n’est pas à la mesure
des
enjeux .
La
crise
invite
pour
l’avenir à mieux cerner et quantifier
les besoins des étudiants, à mieux
prendre en compte les risques liés à
leur santé et à rendre plus réactives
les modalités d’octroi des bourses sur
critères sociaux, dans le cadre d’une
réflexion rénovée sur l’organisation
des politiques de soutien à la vie
étudiante .
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
La Cour formule les recommanda-
tions suivantes :
1.
mettre en place des indicateurs
fiables et partagés de la précarité
étudiante
dans
ses
différentes
dimensions
(MESRI, MSS, CNOUS,
OVE, Insee)
;
2.
effectuer une revue des missions
du réseau du CNOUS et des CROUS
et des dispositifs de soutien à la vie
étudiante au regard de l’objectif de
lutte contre la précarité étudiante
(MESRI)
;
3.
renforcer les moyens des services
de santé universitaires et maintenir
leur rôle de prescripteurs dans le
cadre du nouveau dispositif général
de remboursement par l’assurance
maladie de l’accès aux psychologues
(MESRI, MSS)
;
4.
aligner,
à
compter
de
l’année
universitaire
2023-2024,
les
règles
d’octroi
des
bourses
sur
critères sociaux de l’enseignement
supérieur
sur
celles
en
vigueur
dans
l’enseignement
secondaire
en matière de prise en compte des
revenus de l’année N-1
(MESRI)
31
3
Le plan #1jeune1solution
en faveur de l’emploi des jeunes
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
La
France
se
caractérise
par
un
chômage des jeunes structurellement
élevé . En 2020, la crise sanitaire et
ses
conséquences
économiques
ont fait
rapidement
craindre
une
dégradation marquée de la situation
de cette population déjà fragilisée . Le
Gouvernement a décidé de répondre
à ce risque par un ambitieux plan de
soutien à l’emploi des jeunes .
Face aux conséquences de la
crise, une intervention légitime,
mais parfois mal proportionnée
de l’État
En complément des mesures de grande
ampleur mises en place dès mars
2020 pour soutenir les entreprises et
l’emploi et en prévision de l’arrivée sur
le marché du travail de 750 000 jeunes
sortant de formation initiale à l’été
2020, le Gouvernement a annoncé
en juillet 2020 une série de mesures
spécifiques en faveur de l’emploi des
jeunes . L’ensemble constitue le plan
« #1jeune1solution », initialement
doté de 6,5 Md€ pour 2020 et 2021,
qui devrait finalement coûter près de
10 Md€ du fait de la prolongation de
la crise et des aides correspondantes .
Il n’a pas eu d’équivalent dans les
pays comparables à la France .
32
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
Le plan #1jeune1solution en faveur
de l’emploi des jeunes
Impact du plan sur les principaux dispositifs
Source : Cour des comptes d’après les chiffres du ministère du travail, de l’emploi et de l’insertion
Actions de formation
des jeunes chômeurs
345 000 / an
→ 415 000 en 2021
→ 375 000 en 2022
Prépas apprentissage
15 000
EPIDE
3 000
Écoles
de la 2
ème
chance
15 000
Dominante
« Formation »
Actions de repérage
des « invisibles » :
30 000
bénéficiaires
2019-2020 d’actions
financées par l’appel
à projets DGEFP
Acccompagnement
intensif des jeunes
par Pôle emploi
100 000 →
240 000
Objectif emploi
accompagnement
par l’APEC*
52 000
jeunes accueillis
entre septembre 2020
et l’été 2021
GARANTIE JEUNES
105 000 →
200 000
PACEA
340 000 →
420 000
Dominante
« Accompagnement »
Effectif 2019
Objectif 2021
* Mesures spécifique crise
Mesure hors périmètre Travail et Emploi
Jeunes en IAE
25 000 →
35 000
Service
civique
140 000
missions →
245 000
Apprentissage
350 000
500 000
Contrats prof.
220 000
Dominante
« Expérience professionnelle »
Emploi francs :
10 000
Contrats aidés « fléchés »
PEC jeunes*
80 000
CIE jeunes*
50 000
D
I
S
T
A
N
C
E
À
L
E
M
P
L
O
I
Les parcours d’accompagnement Garantie jeunes et Pacea peuvent intégrer des séquences
de formation ou d’expérience professionnelle, de même que les parcours proposés par l’Epide
et les E2C
Si une intervention massive de l’État
était légitime, sa mise en œuvre a
reposé sur des objectifs qui n’ont pas
assez tenu compte des réalités locales :
elle s’est essentiellement traduite par
une amplification des moyens sur
l’ensemble du territoire de manière
quasi-uniforme, y compris dans des
zones où la situation des jeunes au
regard de l’emploi ne donnait guère
de signes de dégradation . Par ailleurs,
le plan n’a pas proposé de réponse
particulière pour les jeunes les plus
en difficulté, qui ne sont pas déjà
en contact avec le service public de
l’emploi .
33
Malgré une forte mobilisation
pour la mise en œuvre du plan,
un succès à relativiser
La mise en œuvre du plan a bénéficié
d’une forte mobilisation des services
de l’État, de ses opérateurs et de
ses
partenaires .
Sous
l’égide
de
l’État, des progrès ont été réalisés
dans la coordination des nombreux
acteurs dont l’action est souvent
trop cloisonnée . La réalisation des
objectifs d’entrées dans les différents
dispositifs
a
cependant
pâti
du
contexte
économique
et
sanitaire
incertain .
La situation des jeunes au regard de
l’emploi est revenue fin 2021 à son
niveau d’avant-crise . Elle a évolué
plus favorablement que dans d’autres
pays comparables . Toutefois, l’effet
des mesures prises spécifiquement
en faveur des jeunes peine à être isolé
de celui des mesures économiques
de portée générale, comme l’activité
partielle,
dont
ils
ont
également
bénéficié .
Les mesures les plus coûteuses sont
celles
dont
l’impact
paraît
limité
en matière d’emploi . Ainsi, les trois
primes à l’embauche représenteront
près de 70 % des coûts engagés,
soit près de 1 Md€ pour la prime à
l’embauche des jeunes, autant pour
la prime à l’embauche en contrat
de
professionnalisation
et
jusqu’à
5 Md€ pour la prime à l’embauche
d’apprentis .
Quant
à
l’accent
mis
sur la formation, il ne produira ses
effets, le cas échéant, qu’au terme
des
parcours,
dans
un
contexte
vraisemblablement
différent
du
marché de l’emploi . Loin de seulement
constituer une réponse conjoncturelle,
les crédits du plan ont ainsi largement
alimenté la poursuite de politiques
structurelles, notamment en faveur
du développement de l’alternance et
de la formation .
Les enseignements à tirer
de la crise en matière
de politique de l’emploi
des jeunes
L’expérience du plan incite à mieux
sélectionner les dispositifs dont la
rapidité de mise en œuvre est suffisante
pour avoir sur l’emploi des jeunes un
effet de nature conjoncturelle . Elle
suggère également de mieux tenir
compte, dans la déclinaison locale des
objectifs, des besoins des territoires,
qui
peuvent
être
inégalement
concernés par une crise . Elle met enfin
en lumière la nécessité de veiller à ce
que, lorsque les dispositifs retenus
nécessitent une montée en charge,
celle-ci puisse être assurée sans que
leur qualité en soit trop affectée,
au rebours de ce qui a pu parfois
être constaté en ce qui concerne la
Garantie jeunes .
Le plan #1jeune1solution en faveur
de l’emploi des jeunes
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
34
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
Le plan #1jeune1solution en faveur
de l’emploi des jeunes
Recommandations
À l’issue de cette enquête, la Cour
formule
les
recommandations
suivantes :
1.
orienter
les
jeunes
vers
les
dispositifs en fonction d’un diagnostic
et de critères communs à l’ensemble
des
opérateurs,
et
poursuivre
l’harmonisation
de
l’indemnisation
des bénéficiaires, de manière à limiter
la
concurrence
entre
dispositifs
(ministère du travail, de l’emploi et de
l’insertion, Pôle emploi)
;
2.
moduler le montant des aides à
l’apprentissage en faveur des filières
et des niveaux de diplôme où leur
valeur ajoutée en termes d’insertion
est la plus importante
(ministère du
travail, de l’emploi et de l’insertion)
3.
évaluer, au plus tard en 2023, la
valeur ajoutée en termes d’insertion
sur le marché du travail des emplois
aidés dans le secteur non-marchand
(ministère du travail, de l’emploi et de
l’insertion)
;
4.
mieux proportionner les objectifs
à atteindre pour l’entrée de jeunes
dans les dispositifs à la réalité de
l’évolution de l’emploi des jeunes
dans les territoires
(ministère du
travail, de l’emploi et de l’insertion)
35
4
L’utilisation des moyens mis à
disposition par l’Union européenne
pour soutenir l’emploi
Face à la pandémie de covid 19,
l’Union européenne a proposé, dès la
mi-mars 2020, aux États membres des
dispositifs de soutien à l’emploi et à
l’économie destinés à conforter leur
action en réponse à l’urgence de la
crise, puis aux enjeux de la relance .
Chronologie des mesures prises par l’Union européenne pour faire face à la crise sanitaire
2020
2021
Janvier
Premiers cas de covid 19 signalés en Europe
Mars
Les États membres de l’Union européenne commencent
à fermer les frontières et à confiner
Adoption de l’Initiative d’investissement en réponse
au coronavirus (CRII)
Décembre
Adoption définitive du cadre financier pluriannuel 2021-2027
(1 211 Md€)
Adoption définitive du règlement REACT-EU
Avril
Accord de l’Eurogroupe sur l’instrument SURE (100 Md€)
et d’autres dispositifs financiers
Adoption de CRII+ permettant de nouvelles flexibilités
de gestion des fonds européens structurels et d’investissement
Juillet
Accord sur le plan de relance européen «
Next Generation EU
»
(806,9 Md€) composé de plusieurs volets financiers : REACT-EU
(50,6 Md€), la Facilité pour la reprise et la résilience (723,8 Md€)
et le Fonds pour la transition juste (10,9 Md€)
Février
Adoption définitive du règlement établissant la Facilité pour
la reprise et la résilience (FRR) et précisant les orientations
pour l’élaboration des Plans nationaux de relance et de résilience
(PNRR)
Avril
Présentation officielle par la France de son plan national
de relance et de résilience (39,4 Md€ dont 7,1 Md€ pour
le volet emploi et formation professionnelle financés par
la FRR)
Juillet
Accord du Conseil à 12 pays de l’UE sur les PNRR présentés
par l’Allemagne, l’Autriche, la Belgique, le Danemark, l’Espagne,
la France, la Grèce, l’Italie, la Lettonie, le Luxembourg, le Portugal
et la Slovaquie
Août
Versement à la France d’un premier acompte de 5,1 Md€
au titre du PNRR
Les chiffres sont en euros courants 2020.
Source : Cour des comptes
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
36
L’utilisation des moyens mis à disposition
par l’Union européenne pour soutenir l’emploi
Une appropriation rapide
par le ministère du travail
des moyens déployés
en urgence par l’Union
européenne
Dès mars 2020, en coordination avec
le secrétariat général des affaires
européennes et l’Agence nationale de
la cohésion des territoires, le ministère
du travail s’est fortement mobilisé
pour que les mesures annoncées au
niveau européen soient rapidement
mises
en
œuvre .
Cependant,
malgré
les
souplesses
accordées
par
la
Commission
européenne
(autorisation
temporaire
de
financement à 100 %, cofinancement
rétroactif
d’investissements
pour
renforcer les capacités de réaction
aux crises, transfert de ressources
entre les fonds de la politique de
cohésion et entre régions), cette
première phase a été marquée par
des difficultés de gestion persistantes,
que le ministère devra surmonter
pour pleinement bénéficier des futurs
crédits du plan de relance .
L’enquête de la Cour a également
montré
que
la
France
avait
proportionnellement moins réorienté
des crédits du Fonds social européen
(FSE) vers des actions de soutien aux
travailleurs et aux publics vulnérables
(146
M€,
dont
30
M€
environ
directement
affectés
au
soutien
à l’emploi) que ses partenaires de
l’Union européenne (4,1 Md€ pour
l’ensemble des États membres) .
Elle se singularise aussi par une
dispersion des financements vers une
multitude d’actions et de porteurs de
projets, ce qui complique la gestion et
l’audit des fonds correspondants .
Pour l’avenir, des enjeux forts
de pilotage et d’évaluation
du plan de relance
Dans le cadre du plan de relance
européen
Next
Generation
EU
,
la
France
pourrait
bénéficier
de
43,3  Md€ au titre de « REACT-EU  »
(3,9 Md€ apportés en 2021 et 2022)
et de la «  Facilité pour la reprise
et la résilience  » (39,4 Md€ sur
la période 2021-2026) . Les fonds
européens mobilisés à ce dernier titre
représentent 40 % des ressources du
plan France Relance (100 Md€) . Il est
prévu qu’environ 18 % des sommes
correspondantes
(soit
7,1
Md€)
financent des mesures en faveur de
l’emploi, des jeunes, des personnes
en situation de handicap et de la
formation professionnelle .
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
37
Au cours de la période 2021-2026, ces
importants financements européens
devront être gérés selon un calendrier
particulièrement serré, exigeant une
articulation et un suivi rigoureux des
projets .
Les
assouplissements
temporaires
apportés aux règles de gestion des
fonds pour gérer l’urgence de la crise,
le chevauchement des périodes de
programmation et la multiplication
des nouveaux dispositifs accroissent
la
complexité
de
la
gestion
et
engendrent un surcroît d’activité pour
les différents services, alors que la
culture de maîtrise des risques reste
encore faible au sein du ministère du
travail .
Celui-ci devra s’organiser pour
prévenir les diffi
cultés de pilotage,
de coordination et de capacité à
consommer les fonds .
L’utilisation des moyens mis à disposition
par l’Union européenne pour soutenir l’emploi
Synthèses du Rapport public annuel 2020 de la Cour des comptes
Plan de relance européen : Next Generation EU :
806,9 Md€
Emploi
7,1 Md€
Transition écologique
Recherche, développement, Santé
Transition numérique
Soutien aux entreprises
Formation professionnelle :
1,3 Md€
Sauvegarde de l’emploi :
1 Md€
Handicap :
0,3 Md€
Jeunes :
4,5 Md€
50,6 Md€
3,9 Md€
39,4 Md€
React-EU
Autres fonds
Autres
France
Plan national de relance et de résilience
(PNRR)
Facilité pour la reprise
et la résilience(FRR) :
723,8 Md€
18 % des crédits de la « Facilité pour la reprise et la résilience » destinés à la France
pour l’emploi
Source : Cour des comptes
38
L’utilisation des moyens mis à disposition
par l’Union européenne pour soutenir l’emploi
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
Le suivi et l’évaluation des 15 mesures
qui relèvent de sa compétence dans
le plan national de relance et de
résilience
constituent
également
des enjeux forts, les financements
européens étant conditionnés par la
réalisation d’engagements qualitatifs
et
quantitatifs
négociés
entre
la
France et la Commission européenne .
La
Cour
appelle
l’attention
du
ministère du travail sur la vigilance
qu’il devra porter au respect de
ces obligations tout au long du
déploiement du plan national de
relance et de résilience jusqu’en 2026
pour
bénéficier
des financements
attendus .
Recommandations
Aussi,
la
Cour formule-t-elle
les
recommandations suivantes :
1.
renforcer le pilotage des opéra-
tions bénéficiant de financements
européens au cours de la période
2021-2026
(ministère du travail, de
l’emploi et de l’insertion)
;
2.
anticiper les difficultés opération-
nelles en matière de gestion comme
de contrôle afin de garantir le bon
emploi des financements européens,
en particulier au cours de la période
de vigilance 2021-2023
(ministère du
travail, de l’emploi et de l’insertion, en
lien avec l’ANCT et la CICC)
;
3.
assurer un suivi et une évaluation
rigoureux des mesures mises en
œuvre dans le cadre du plan national
de relance et de résilience afin de
tirer pleinement parti des crédits
européens
(ministère du travail, de
l’emploi et de l’insertion)
39
5
Sous l’effet de la crise épidémique, la
France a, comme ses voisins, connu
un brusque accroissement de ses
besoins pour certains produits de
santé, en particulier les médicaments
utilisés dans les services de soins
intensifs
(curares,
hypnotiques)
ainsi que les masques de protection
(chirurgicaux et FFP2) . Les chaînes
d’approvisionnement
traditionnelles
ont peiné à y répondre, générant des
situations
critiques .
Des
mesures
exceptionnelles, dont l’efficacité reste
à évaluer, ont dû être mises en œuvre
pour faire face aux difficultés nées de
ces pénuries .
Un problème mis au premier
plan par la crise sanitaire
Les
tensions
d’approvisionnement
suscitées par la crise sanitaire sont
venues
s’ajouter
à
d’autres,
plus
anciennes, affectant particulièrement
les médicaments . Leur ampleur reste
toutefois difficile à objectiver . En effet,
même si le nombre des déclarations
de rupture ou de risque de rupture de
stock de médicaments, que l’industrie
pharmaceutique doit communiquer
à
l’administration,
a
fortement
augmenté au cours des dernières
années, le suivi de cet indicateur
est
insuffisant
pour
appréhender
l’évolution
effective
des
tensions
d’approvisionnement . Les dispositifs
médicaux ne font quant à eux l’objet
d’aucun suivi pérenne .
En cas de pénurie, les patients ou
les prescripteurs doivent parfois se
reporter sur des produits alternatifs,
lorsqu’ils sont disponibles . De telles
substitutions exposent à des risques
d’erreur,
notamment
lorsque
le
conditionnement
est
différent
de
celui
des
produits
habituellement
administrés . Toutefois, aucune étude
nationale ne permet encore d’évaluer
l’ampleur de ces risques .
Les pénuries prennent largement leur
source dans la transformation des
modes de production des médicaments .
Les chaînes de fabrication se sont
mondialisées et ont eu tendance à se
fragmenter entre de multiples étapes
de production, lesquelles reposent sur
un nombre de fournisseurs ou de sous-
traitants qui peut être restreint . Comme
l’a rappelé l’épidémie de covid 19, il en
résulte des vulnérabilités importantes,
qui affectent l’approvisionnement en
produits de santé .
La sécurité
des approvisionnements
en produits de santé
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
40
Des actions publiques
dont l’effi
cacité n’est pas
encore avérée
Face à ces diffi
cultés, deux grandes
séries de mesures ont été mises en
place, dont l’effi
cacité ne peut encore
être évaluée .
D’une part, la législation a évolué
dans le sens d’un renforcement des
obligations des industriels, de façon
à
mieux
prévenir
la
survenance
des
pénuries .
Depuis
l’entrée
en
vigueur de la loi du 26 janvier 2016
de modernisation de notre système
de santé, ils doivent définir des plans
de gestion des pénuries (PGP), dont
l’objet est d’analyser les principaux
risques
susceptibles
d’affecter
la
production
des
médicaments
et
de prévoir les mesures propres à y
remédier .
Ces plans n’étaient toutefois
pas à la hauteur des enjeux, ce qui a
conduit à les renforcer en 2020 .
Les
industriels ont désormais l’obligation
de prévoir un stock tampon minimum .
Le ministère des solidarités et de la
santé et l’Agence nationale de sécurité
du médicament et des produits de
santé (ANSM) devront toutefois en
contrôler le respect .
La sécurité des approvisionnements
en produits de santé
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
Répartition des sites de production des principes actifs de médicaments
commercialisés dans l’Espace économique européen
L’Asie principal fournisseur de l’Europe
Nombre de sites de production de principes actifs pour des médicaments commercialisés
dans l’Espace économique européen (EEE)
Source : Le Figaro à partir d’EudraGDMP (base de données de l’Union européenne portant sur les
autorisations de fabrication et les certificats de bonnes pratiques de fabrication des médicaments)
41
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
La sécurité des approvisionnements
en produits de santé
D’autre part, à la suite de la crise
sanitaire, des actions relevant du
champ des politiques industrielles
ont été engagées afin de réduire les
vulnérabilités du tissu productif . Des
appels à projets nombreux et divers,
visant à relocaliser des usines de
fabrication de produits de santé, ont
été lancés, au risque toutefois d’un
saupoudrage . Un travail de ciblage
s’impose
donc,
de
même
qu’une
meilleure articulation de ces actions
avec celles impulsées par l’Union
européenne .
Recommandations
Aussi, la Cour recommande de :
1.
exploiter les différentes sources
d’information disponibles (déclarations
auprès de l’ANSM, DP ruptures, etc .)
pour mieux objectiver l’évolution des
ruptures
d’approvisionnement
en
médicaments
(ministère des solidarités
et de la santé, ANSM, Cnop)
;
2.
mettre
en
place
un
dispositif
de
remontée
d’information
sur
les
ruptures
d’approvisionnement
affectant les dispositifs médicaux
pour lesquels un tel événement
aurait des conséquences graves pour
les patients
(ministère des solidarités
et de la santé, ANSM)
3.
préciser la définition des médi-
caments
d’intérêt
thérapeutique
majeur
(MITM),
en
donnant
à
l’ANSM la compétence d’y inclure
des médicaments qui le justifieraient,
bien que non proposés par les
industriels (et inversement d’en
exclure)
(ministère des solidarités et
de la santé, ANSM)
4.
pour les médicaments d’intérêt
thérapeutique
majeur
les
plus
indispensables, réaliser une analyse
approfondie des risques de rupture
et mettre en place les types de
mesures (renforcement des stocks
de sécurité, augmentation des prix,
action
de
politique
industrielle)
qui apparaîtront les plus adéquats
pour prévenir au mieux les tensions
d’approvisionnement, en s’appuyant
si nécessaire sur l’échelon européen
(ministère des solidarités et de la
santé, ministère de l’économie, des
finances et de la relance, ANSM)
42
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
L’alimentation
constitue
l’un
des
12 
secteurs
d’activité
identifiés
comme
étant
d’importance vitale
dans le code de la défense . La
responsabilité
en
incombe
aux
ministères
de
l’agriculture
et
de
l’économie .
L’approvisionnement alimentaire
des français a été assuré pendant
la crise
Les volumes de production agricole et
agroalimentaire ont été globalement
maintenus durant la crise sanitaire,
en
dépit
de
la
désorganisation
initiale
des
transports
et
des
flux
logistiques
et
de
tensions
ponctuelles
rencontrées
par
les
abattoirs, confrontés à des difficultés
d’approvisionnement en équipements
de protection individuels (EPI) . Le taux
d’équipement en EPI des entreprises
du
secteur
agroalimentaire
figure
parmi les plus élevés : fin mars 2020,
52 % des entreprises agroalimentaires
déclaraient fournir des masques à
80 % ou plus de leurs salariés (contre
28 % pour l’ensemble des entreprises) .
Aucune rupture majeure d’approvi-
sionnement n’a été observée, malgré
l’indisponibilité, de courte durée, de
certains produits (pâtes, farines, œufs) .
La crise sanitaire a surtout entraîné
une perte de débouchés et modifié les
canaux de distribution habituels, avec
la fermeture de la restauration hors
domicile et des marchés alimentaires .
Aussi la distribution a-t-elle été
assurée sans impact significatif sur
les prix, même si le ressenti de la
population a pu être différent .
Avec le soutien budgétaire de l’État
et
des
collectivités
territoriales,
l’aide alimentaire et la mobilisation
du secteur caritatif ont permis de
répondre aux besoins des publics
précaires
(étudiants,
jeunes
privés
de restauration collective), malgré
la baisse de 30 % en 2020 de la
collecte de denrées alimentaires . La
préservation de l’accès à l’alimentation
des plus fragiles aurait cependant pu
être mieux anticipée .
Les aides publiques destinées à assurer
le maintien du fonctionnement des
filières (8,63 Md€), complétées par
des dotations du plan de relance
(382,5 M€), ont davantage bénéficié à
la distribution qu’à la production .
6
La sécurité
des approvisionnements
alimentaires
43
La sécurité des approvisionnements alimentaires
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
Dispositifs de soutien financiers mobilisés
Sources : Cour des comptes d’après données MAA, France Stratégie / IGF et Etalab –
les aides générales n’incluent l’activité partielle qu’à partir de septembre 2020
Aides générales par secteur d’activité (Md€)
Aides au secteur agricole et aux industries agroalimentaires
(9,39 Md€)
Aides aux filières agricoles
(373,5 Md€)
0
5
10
15
20
25
30
35
40
45
Commerce
Agriculture
Hébergement et restauration
Transports et entreposage
Industries agroalimentaires (IAA)
Aides générales
8 635 M€
Plan de relance
(382,5 M€)
Appels à projet :
Résilience
Protéines
végétales
Modernisation
des abattoirs
Structuration
des filières
Prêts garantis par l’État
Fonds de solidarité
Reports de charges
Dont
Dont
Agriculture
1 686 M€
821 M€
13 M€
IAA
5 184 M€
169 M€
625 M€
crédits nationaux
fonds européens
62 %
38 %
277,3
67,5
29
Vins,
bière,
cidre
Productions animales
(bovins, petites volailles
gibiers, chevreaux,
produits laitiers)
Productions végétales
(horticulture,
pommes de terre)
44
La sécurité des approvisionnements alimentaires
La crise sanitaire, un révélateur
des faiblesses et dépendances
structurelles de la chaîne
d’approvisionnement
alimentaire
La crise sanitaire a mis en lumière
les
vulnérabilités
de
la
chaîne
d’approvisionnement
alimentaire,
notamment
en
ce
qui
concerne
certains intrants et emballages de
produits alimentaires . Les initiatives
en faveur du développement de
circuits courts ont eu un impact
limité . En revanche, la vente en ligne
de produits alimentaires (+ 42 %) et
les
drives
(+ 340 %) ont vu leur chiffre
d’affaires fortement augmenter en
2020, sans qu’il soit possible de se
prononcer sur la pérennité de ces
évolutions .
La
fermeture
des
frontières
a
empêché
240 000
travailleurs
saisonniers étrangers d’accéder au
territoire, mettant en péril certaines
productions de fruits et légumes
et
industries
de
transformation
(abattoirs, conserveries), même si
les restrictions de circulation ont
été levées le 20 mai 2020 pour les
travailleurs saisonniers de l’Union
européenne .
Si la réponse des acteurs publics a
été jugée pragmatique et efficace,
le
secteur
a, faute
de
plans
de
continuité
d’activité
en
bonne
et
due
forme,
souffert
d’un
faible
niveau de préparation à la gestion
de
crise .
L’absence
de
stratégie
nationale
formalisée
tranche
au
regard d’exemples étrangers (Suisse,
Allemagne ou Finlande) .
Les enseignements à tirer
au sortir de la crise :
anticipation et organisation
La
conjonction
du
soutien
des
acteurs publics et de l’adaptation des
acteurs privés a permis à la chaîne
d’approvisionnement
alimentaire
de faire preuve d’une indéniable
résilience pendant la crise sanitaire .
Des leçons doivent néanmoins en
être tirées pour l’avenir .
La réduction de la dépendance de
la France aux importations pour
certains intrants doit être recherchée,
comme le volet « résilience » du plan
de relance invite à le faire . La crise
met aussi en évidence les faiblesses
du modèle national agricole, qui
souffre du recul progressif de la
compétitivité
française
sur
les
marchés
internationaux .
Cette
situation
invite
à
une
réflexion
prospective, qui devra tenir compte
de l’adoption, en novembre 2021,
par
l’Union
européenne,
d’un
plan
d’urgence
visant
à
garantir
l’approvisionnement et la sécurité
alimentaires en temps de crise .
L’identification des stocks de réserves
stratégiques, que les outils de suivi
de FranceAgriMer ne permettent pas
d’assurer totalement, est prioritaire . Un
travail interministériel de cartographie
doit
être
réalisé,
en
tirant
les
bénéfices de la souplesse qu’offrirait
la
désignation
«
d’entreprises
essentielles
» .
Une
autre
priorité
consiste à mieux prendre en compte
la dimension géographique et sociale
de l’accès à l’alimentation et conforter
l’organisation de l’aide alimentaire .
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
45
La sécurité des approvisionnements alimentaires
Recommandations
En conséquence, la Cour formule les
recommandations suivantes :
1.
établir d’ici fin 2023 un diagnostic
des vulnérabilités de la chaîne des
approvisionnements
alimentaires
pour
en
tirer
les
conséquences
en
termes
d’identification
des
stocks
de
réserves
stratégiques
et
des
entreprises
essentielles
afin de faciliter l’accès de tous à
l’alimentation
(MAA, MEFR, SGDSN) 
;
2.
en
lien
avec
les
réseaux
consulaires
et
les
organisations
professionnelles, renforcer dès 2022
l’accompagnement des petites et
moyennes entreprises des secteurs
agricoles et agroalimentaires dans la
préparation aux crises afin d’assurer
la continuité de leur activité
(MAA et
MEFR)
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
Deuxième partie
L’adaptation à la crise
de certaines administrations
et entreprises publiques pourvoyeuses
de services essentiels
1 .
L’administration pénitentiaire et la protection judiciaire
de la jeunesse
2 .
Les administrations fiscales et douanières
3 .
Les délégations de service public dans les Hauts-de-France
4 .
L’approvisionnement en électricité
5 .
Les grands aéroports français
6 .
Les transports collectifs en Île-de-France
7 .
L’entreprise de transports collectifs Transdev
49
Comme
d’autres
administrations,
les directions de l’administration
pénitentiaire
(DAP)
et
de
la
protection judiciaire de la jeunesse
(DPJJ) étaient peu préparées à la
gestion d’une crise de l’ampleur de
celle liée à l’épidémie de covid 19 .
Elles ont pourtant réussi à assurer
la continuité du service, certes sous
une forme dégradée .
L’élaboration des plans de continuité
d’activité des services relevant de leur
compétence
n’était
généralement
pas achevée au début de l’année
2020 . L’organisation de la gestion
de crise a également souffert de
la faiblesse du secrétariat général
du
ministère face
aux
directions
« métier » et de l’inégale implication
de ces dernières au sein de la cellule
de suivi et d’anticipation . Sur le
terrain, les chargés de mission des
cours d’appel de zone de défense ont
éprouvé des difficultés à coordonner
la totalité des services du ministère .
Ces faiblesses dans l’organisation
se sont traduites par des coûts de
coordination élevés pour les services,
qui ont notamment dû alimenter en
informations, souvent redondantes,
différents niveaux de décision .
Dans ce contexte, la continuité
du service a été assurée au prix
d’une adaptation des modalités
de fonctionnement en milieu
fermé et d’une forte réduction
des activités en milieu ouvert.
En
milieu
fermé,
l’administration
pénitentiaire a accéléré les sorties de
détenus condamnés à des peines légères
ou présentant les meilleures chances
de réinsertion . Avec la diminution de
l’activité des tribunaux, cette politique a
permis de réduire la population carcérale
de 17 % entre janvier et juillet 2020 . Le
taux d’occupation des établissements
pénitentiaires est ainsi passé de 116 %
avant la crise à 97 % au 1
er
juillet 2020,
ce qui a facilité la mise en œuvre des
mesures sanitaires .
Les interactions avec le monde extérieur
ont également été limitées . En milieu
ouvert,
les
services
pénitentiaires
d’insertion
et
de
probation
ont
accordé
une
priorité
au
suivi
des
personnes considérées comme les plus
dangereuses ou les plus vulnérables .
Par ailleurs, les activités de la DPJJ
concernant le suivi éducatif, l’insertion
ainsi que le travail d’investigation et
d’aide à la décision des magistrats, ont
été fortement réduites .
L’administration pénitentiaire
et la protection judiciaire
de la jeunesse
1
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
50
Ces mesures, comparables à celles
mises
en
œuvre
dans
les
pays
européens proches, ont contribué à la
sauvegarde de la sécurité sanitaire des
agents et des personnes sous main de
justice . Elles ont été mises en œuvre
sans dérapage budgétaire .
La crise a toutefois mis en lumière
plusieurs insuffisances auxquelles
le ministère de la justice
doit répondre.
L’organisation interne du ministère
a montré quelques limites . Elles se
sont notamment traduites par la
difficulté d’accès des éducateurs de
la DPJJ aux quartiers de mineurs des
établissements
pénitentiaires,
ainsi
que par une mauvaise coordination
entre les pôles chargés des extractions
judiciaires
et
les
tribunaux .
Ces
difficultés mettent en évidence la
nécessité de constituer des cellules
de crise locales pour améliorer la
coordination entre les juridictions et
les services déconcentrés du ministère
de la justice .
Le renforcement des partenariats
s’avère également nécessaire . Les
services de la DPJJ ont en effet pâti
de l’arrêt des activités des services
de l’Éducation nationale dans leurs
établissements
lors
du
premier
confinement .
Ils
ont
également
souffert du fort ralentissement de
l’activité des organismes de formation
professionnelle, dont la participation
au processus de réinsertion des jeunes
est essentielle .
Enfin, l’effort de prévention en matière
sanitaire s’est révélé insuffisant . Le
réseau de la médecine de prévention
a
été
peu
présent
auprès
des
responsables d’établissement . À la
demande de ces derniers, les mesures
sanitaires à destination des personnels
ont été mises en place par les unités
sanitaires internes, rattachées aux
établissements
hospitaliers,
dont
la mission est d’assurer le suivi des
détenus, et non celui des agents de
l’administration .
Par ailleurs, deux choix inhérents
à la politique mise en œuvre par
le Gouvernement pour faire face à
la crise ont accentué les difficultés
de fonctionnement des services de
la DAP et de la DPJJ . D’une part,
leurs agents n’ont pas été identifiés
comme prioritaires pour la garde
de leurs enfants . D’autre part, la
stratégie vaccinale mise en place le
27 décembre 2020 n’a pas non plus
retenu le milieu carcéral comme une
cible prioritaire . Les caractéristiques
du milieu fermé, associant privation
de liberté et difficulté à maintenir des
gestes barrières, auraient pourtant dû
conduire à leur accorder une priorité .
L’administration pénitentiaire et la protection
judiciaire de la jeunesse
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
51
L’administration pénitentiaire et la protection
judiciaire de la jeunesse
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
Recommandations
La Cour formule les recommanda-
tions suivantes :
1.
mettre en place des cellules de crise
locales associant les responsables
des
services
déconcentrés
du
ministère de la justice et les chefs de
juridiction
(SG)
;
2.
définir une stratégie vaccinale
contre la covid 19 volontariste
visant à étendre le plus possible
la vaccination à l’égard des agents
de la pénitentiaire et des détenus
(DAP, DPJJ)
;
3.
améliorer l’articulation du réseau
de médecine de prévention avec les
directions « métier » du ministère
par
l’élaboration
d’un
protocole
précisant les missions de chaque
acteur, notamment en matière de
gestion de crise
(SG)
;
4.
développer
une
approche
partenariale de préparation aux
crises, au niveau local, garantissant
la participation des acteurs de
l’enseignement et de la formation
à la continuité du service
(DPJJ)
52
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
La direction générale des finances
publiques (DGFiP) et la direction
générale
des
douanes
et
droits
indirects
(DGDDI)
constituent
les
deux principales directions à réseau
territorial du ministère de l’économie,
des finances et de la relance, à la
fois
par
leurs
effectifs
(près
de
100 
000 
agents
pour
la
DGFiP,
17 000  pour la DGDDI, dont 90 %
travaillent au sein du réseau local) et
par leur présence sur tout le territoire
national .
Ces deux administrations ont été
fortement mobilisées en 2020 pour
soutenir l’économie, tant au titre de
leurs
missions traditionnelles
que
de missions nouvelles directement
liées
à
la
crise
sanitaire,
telles
que
le
versement
d’aides
aux
entreprises
(fonds
de
solidarité)
et
l’approvisionnement
du
pays
en
équipements
de
protection
individuelle (dont les masques) et en
matériel médical .
Des directions insuffisamment
préparées à une crise
d’une telle ampleur
La
DGFiP
et
la
DGDDI
étaient
insuffisamment préparées, tant du
point de vue des outils de gestion de
crise (absence de plan de continuité
d’activité
actualisé)
que
de
la
capacité à faire travailler un grand
nombre d’agents à distance . En mars
2020, seuls 27 % des agents de la
DGDDI (hors branche surveillance)
et 17 % de ceux de la DGFiP étaient
équipés d’ordinateurs portables . En
conséquence, de nombreux agents
n’ont pas pu travailler lors du premier
confinement . Aussi, les deux directions
ont-elles
connu
une
forte
baisse
d’activité au cours de cette période
(mars à mai 2020), supérieure à celle
constatée dans la plupart des pays
de l’Organisation pour la coopération
et le développement économiques
(OCDE) .
Les administrations fiscales
et douanières
2
53
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
Les
deux
directions
ont
pu
progressivement
augmenter
leur
force de travail, notamment grâce à
l’acquisition d’ordinateurs portables
(54 000 ordinateurs ont été achetés
par la DGFiP entre mars 2020 et juin
2021, portant son taux d’équipement
à 81 %) . L’activité à distance reste
cependant
encore
pénalisée
par
l’insuffisante dématérialisation des
processus, concernant notamment la
paye ou les droits d’enregistrement
(successions, donations, actes de
société) .
Deux directions ayant fait
preuve d’importantes
capacités d’adaptation
Malgré
leur
manque
initial
de
préparation
et
d’équipement,
la
DGDDI et la DGFiP ont fait preuve
de
réactivité
pour
assurer
leurs
missions traditionnelles et mettre
en œuvre des missions nouvelles
liées à la crise . Ainsi, 2,6 milliards
de
masques
de
protection
ont
été dédouanés entre fin mars et
fin juin 2020 sur la plate-forme
aéroportuaire
de
Roissy-Charles
de Gaulle . Par ailleurs, entre avril
2020 et décembre 2021, la DGFiP
avait versé 10,8  millions d’aides
pour un montant de 38,7  Md€ au
titre du fonds de solidarité . Il reste
cependant
à
mettre
en
œuvre
complètement
les
contrôles
a
posteriori
de ces aides . En effet,
plus d’un an après leur détection,
des
sommes
indûment
perçues
n’avaient toujours pas fait l’objet
d’une demande de remboursement .
Les administrations fiscales et douanières
Évolution de la part des agents travaillant (présentiel et télétravail)
à la DGFiP et à la DGDDI, entre mars et juillet 2020
0 %
10 %
20 %
30 %
40 %
50 %
60 %
70 %
80 %
90 %
100 %
Mars
38 %
43 %
64 %
81 %
76 %
44 %
58 %
65 %
63 %
Avril
Mai
Juin
Juillet
DGFIP
DGDDI
Source : Cour des comptes d’après les données du secrétariat général du MEFR
Notes : (1) Moyenne de l’ensemble des données disponibles pour les jours du mois
concerné.
(2) Absence de données DGDDI pour le mois de mars 2020.
54
Les administrations fiscales et douanières
Les leçons à tirer afin de faire face
à
d’éventuelles
nouvelles
crises
portent principalement sur les outils
et la culture de gestion de crise, les
capacités de travail à distance et le
contrôle des activités nouvelles (fonds
de solidarité) .
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
Aides du fonds de solidarité payées entre avril 2020 et décembre 2021 (en M€)
0
3 000
6 000
9 000
12 000
15 000
18 000
21 000
24 000
27 000
30 000
33 000
36 000
39 000
42 000
Avril
Mai
Juin
Juillet
Août
Septembre
Octobre
Novembre
Décembre
Avril
Mars
Janvier
Février
Mai
Juin
Juillet
Août
Septembre
Octobre
Novembre
Décembre
Montant
Cumul
1 460
3 502
5 581
5 880
6 195
6 540
7 562
11 819
14 508
16 744
20 948
24 623
29 055
32 691
34 714
35 554
36 568
37 343
37 944
38 699
4 920
Source : Cour des comptes d’après DGFiP
Recommandations
La Cour formule à cet effet les
recommandations suivantes :
1.
actualiser une fois par an les plans
de
continuité
d’activité,
réaliser
un exercice de crise impliquant les
services opérationnels
a minima
tous
les deux ans dans chaque direction
et en tirer un retour d’expérience
(DGFiP, DGDDI)
;
2.
afin d’assurer la continuité des
activités, développer les capacités
de
travail
à
distance
tout
en
garantissant un niveau de sécurité
approprié
(DGFiP, DGDDI).
La Cour renouvelle par ailleurs la
recommandation
qu’elle
a
déjà
formulée dans le rapport public
annuel 2021 et dans le rapport réalisé
à la demande de la commission des
finances de l’Assemblée nationale
sur les dépenses publiques pendant
la crise :
3.
mettre en œuvre effectivement
des plans de contrôle
a posteriori
sur les aides du fonds de solidarité
versées depuis mars 2020 ; en cas
de versement à tort, engager les
mesures de récupération des indus
et, le cas échéant, des poursuites
pénales
(DGFiP)
55
Les collectivités territoriales et leurs
établissements peuvent confier à un
opérateur tiers la construction d’un
équipement et la gestion de tout ou
partie de leurs services publics .
Ce
mode de gestion est, aujourd’hui,
largement répandu, dans de nombreux
domaines comme la distribution de
l’eau, la collecte et le traitement des
déchets ou la gestion des réseaux de
transport urbain .
Les délégations de service public
dans les Hauts-de-France
3
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
Les acteurs des délégations de service public
Collectivité délégante
Collectivité délégante
• définit/organise le service
• définit/organise le service
• et/ou fournit les biens nécessaires
• et/ou fournit les biens nécessaires
Usagers
Usagers
• bénéficient du service
• bénéficient du service
Délégataire
Délégataire
(société, association, etc.)
(société, association, etc.)
• fournit le service
• fournit le service
• et/ou réalise les biens
• et/ou réalise les biens
• gère le service au quotidien
• gère le service au quotidien
fi
n
a
n
c
i
è
r
e
s
p
a
i
e
n
t
l
e
t
a
r
i
f
fi
x
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l
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t
a
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f
v
e
r
s
e
d
e
s
c
o
m
p
e
n
s
a
t
i
o
n
s
Source : Cour des comptes
56
Les délégations de service public
dans les Hauts-de-France
Sans attendre la fin de la crise sanitaire,
les juridictions financières ont souhaité
analyser les dispositions prises par les
délégants et leurs délégataires face
à l’arrêt de leurs activités et/ou aux
restrictions sanitaires et mesurer leurs
conséquences sur l’usager . L’enquête a
été réalisée auprès d’un échantillon
de communes et d’établissements
publics locaux des Hauts-de-France
représentatif
de
la
diversité
des
territoires ruraux et urbains . Elle ne
met nullement en cause la réactivité
des collectivités territoriales vis-à-vis de
la population, unanimement soulignée .
La priorité donnée
à la préservation des intérêts
financiers des délégataires
Avec la crise sanitaire, les services
délégués contrôlés ont connu une
chute de leur fréquentation : entre 15 %
à 20 % pour les réseaux de transports,
entre 40 % et 80 % pour les salles de
spectacles et de congrès et de plus
de 60 % pour les piscines et centres
aquatiques . Il en a résulté une baisse
significative de leur chiffre d’affaires .
De leur propre initiative ou à la
demande des délégataires, certaines
collectivités, soucieuses de préserver
le service public, ont décidé d’accorder
un soutien à leurs délégataires sous
forme d’indemnisations financières,
d’exonérations
de
redevance
d’occupation
du
domaine
public,
d’avances de trésorerie ou encore
de remises de pénalités dues . Ces
mesures ont été prises sans véritable
analyse préalable de la situation
réelle des délégataires concernés .
Ainsi, les collectivités de l’échantillon
ont
maintenu
le
versement
des
compensations
financières
pour
sujétions de service public, en dépit
de la chute des activités déléguées,
alors que l’arrêt de l’exploitation ou
sa réduction du fait des contraintes
sanitaires ont induit une baisse du
coût de ces sujétions et auraient donc
dû conduire à en réviser le montant .
Ces versements pour compensation
financière, conjugués aux dispositifs
d’aide
de
l’État,
ont
contribué
à
préserver la rentabilité de l’exploitation
et les intérêts des délégataires et,
le cas échéant, de leurs groupes
d’appartenance, alors que les usagers
subissaient un service dégradé .
La crise sanitaire a une nouvelle
fois
montré
que
les
collectivités
maîtrisent
insuffisamment
les
mécanismes
économiques
des
contrats de DSP . Elles manifestent
peu d’exigences dans la restitution
par
les
délégataires
de
données
financières
fiables
et
complètes,
ce
qui
restreint
l’information
de
l’assemblée délibérante et du citoyen .
À défaut de pouvoir appréhender
l’amplitude de la baisse des recettes,
les économies réalisées par l’arrêt
ou la limitation des services et le
montant complet des aides de l’État,
les collectivités n’ont pas été en
mesure d’apprécier la situation réelle
de leurs délégataires .
De bonnes pratiques ont toutefois
été relevées et devraient permettre
d’établir, pour l’avenir, une relation plus
équilibrée entre les deux partenaires
du contrat . Certaines collectivités ont
ainsi négocié des clauses de revoyure
et ont été ou seront en mesure d’exiger
un reversement des sommes indues .
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
57
Les délégations de service public
dans les Hauts-de-France
Le rôle prépondérant
des délégataires face
aux impératifs de continuité
du service public
Le respect des principes de continuité
et
d’adaptabilité
du
service
public
incombe conjointement au délégant et
à son délégataire . Le premier définit et
pilote la stratégie du service . Le second
le met en œuvre dans le respect des
dispositions contractuelles . Or, avec la
crise sanitaire, les fermetures totales ou
partielles, conjuguées aux mesures de
distanciation sanitaire, ont sévèrement
perturbé la continuité du service public .
L’enquête a montré que la perspective
d’un déficit de la délégation de service
public avait conduit le délégant à
intervenir en soutien financier de son
délégataire sans toujours définir de
stratégie de continuité et d’adaptation
du service, pourtant essentielle dans
une telle situation .
Les modalités de mise en œuvre des
clauses de continuité du service ne
sont que trop rarement explicitées
dans
les
contrats .
L’absence
de
procédures communes de gestion des
ruptures de l’activité est préjudiciable
en
cas
d’événement
exceptionnel,
comme le contexte de la pandémie l’a
démontré . Trop souvent, les plans de
continuité ont été conçus et mis en
place à l’initiative des délégataires .
La crise sanitaire a révélé l’importance
de la qualité des réponses à apporter
à l’usager . Or, les collectivités ont
manifesté
peu
d’exigences
en
la
matière .
Le
contexte
leur
offrait
pourtant l’occasion de réexaminer
avec leur partenaire la pertinence du
contrat au regard du périmètre des
activités proposées ainsi qu’à l’aune
de l’atteinte des objectifs fixés et de la
qualité du service rendu .
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
Recommandations
En conséquence, la Cour adresse
les recommandations suivantes aux
collectivités territoriales :
1.
conformément à l’article L . 2224-2
du code général des collectivités
territoriales, définir la nature des
sujétions
de
service
public,
le
mode de calcul des compensations
financières
que
les
délégants
accordent
en
contrepartie
de
celles-ci aux délégataires et les
conditions de leur versement au
regard de l’exécution du contrat ;
2.
renforcer dans les contrats de
service public les obligations des
délégataires en matière de qualité
du service rendu aux usagers et en
suivre l’exécution .
58
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
La crise sanitaire a mis à l’épreuve
la capacité des acteurs du secteur
électrique à assurer la production et
l’acheminement de l’électricité afin
de répondre à tous les besoins de
consommation .
En dépit des mesures de restriction
d’activités
et
de
déplacements
décidées à partir du 1
er
trimestre 2020
pour lutter contre la propagation de la
pandémie, l’alimentation en électricité
a été maintenue . Cette indéniable
réussite de l’ensemble des acteurs du
secteur électrique (État, commission
de régulation de l’énergie, autorité
de sûreté nucléaire, gestionnaires de
réseaux,
producteurs,
fournisseurs
d’électricité) mérite d’être saluée . Il
convient toutefois de tirer tous les
enseignements de cette crise inédite,
en exploitant les retours d’expérience
engagés par tous les acteurs sur la
gestion de crise du printemps 2020
et sur la mise en œuvre des plans de
continuité d’activité .
Par ailleurs, au plus fort de la crise,
l’État a cherché à protéger par diverses
mesures les consommateurs et les
entreprises susceptibles de rencontrer
des difficultés pour honorer leurs
factures d’électricité  : prolongation
de la trêve hivernale, suspension des
coupures, reports de factures . Les
impacts financiers de ces mesures
pour
les
fournisseurs
d’électricité,
qui les ont mises en œuvre, devront
également être évaluées afin qu’à
l’avenir, les conséquences de telles
décisions soient mieux anticipées .
L’État
a
également
apporté
son
soutien financier à EDF, principal
producteur d’électricité en France,
dont les comptes ont été dégradés en
2020 par les effets de la crise . Il a en
particulier participé à une émission
obligataire de l’entreprise à hauteur
de 960 M€ . La très forte augmentation
des prix intervenue sur les marchés
de l’électricité au cours de l’année
2021 devrait sensiblement améliorer
les perspectives financières d’EDF à
court terme . Sa trajectoire financière
à moyen et long terme reste toutefois
dépendante des principaux dispositifs
de régulation du secteur électrique,
qui conditionnent les revenus que
l’entreprise tire de sa production
d’électricité,
notamment
nucléaire,
et peuvent évoluer en fonction des
décisions des pouvoirs publics .
La crise sanitaire a surtout mis en
lumière les conséquences du manque
de marges du système électrique pour
prévenir tout risque sur la sécurité
d’approvisionnement . Chaque année
depuis 2017, le gestionnaire du réseau
de transport (RTE) a signalé, dans ses
bilans prévisionnels de l’équilibre entre
offre et demande d’électricité, que la
période de 2018 à 2022 s’annonçait
«  sans marge », en raison du retrait
de certains moyens et du retard pris
dans la mise en œuvre de capacités
nouvelles de production d’électricité .
L’approvisionnement
en électricité
4
59
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
Cette
situation
résulte
également
de
la
nécessité
de
mettre
en
œuvre
un
important
programme
de maintenance du parc nucléaire .
Or les mesures destinées à limiter
la
propagation
de
l’épidémie
ont
fortement
affecté
les
opérations
correspondantes,
déjà
soumises
à
de fortes contraintes (industrielles,
humaines, réglementaires, etc .) . Ces
perturbations ont nourri des craintes
quant
à
la
disponibilité
effective
du parc de réacteurs à partir de
l’automne 2020 et quant à l’équilibre
offre-demande
d’électricité
pour
l’hiver 2020-2021 .
En
conséquence,
EDF
a
revu
en
profondeur
le
planning
de
son
programme
de
maintenance
pour
accroître la disponibilité des réacteurs
durant l’hiver 2020-2021 ainsi que
pour les hivers suivants . La réussite
opérationnelle et industrielle de cette
réorganisation est patente . Si l’hiver
2020-2021, peu rigoureux, s’est
in fine
déroulé sans difficulté, la vigilance
reste toutefois encore de mise pour
les prochains hivers . RTE a même
renforcé sa vigilance pour le cœur
de l’hiver 2021-2022 à la suite de
nouvelles indisponibilités non prévues
de réacteurs nucléaires .
L’approvisionnement en électricité
Évolution de la production d’électricité entre 2019 et 2020 (en TWh) et ajustement
avec la baisse de consommation observée
0
- 10
- 20
- 30
- 40
- 50
- 60
Nucléaire
Gaz
Fioul
Charbon
Bio
énergies
Solaire Hydrau-
lique
Éolien Moindres
exports
Imports
accrus
Consom-
mation
Baisse de la consommation brute non corrigée des aléas climatiques de 24,6 TWh
Baisse de la production de 37,4 TWh
Réduction
du solde net
exportateur
de 12,8 TWh
- 44,1
- 4,0
- 0,3
- 0,2
- 0,1
0,3
5,0
5,9
8,8
4,0
Source : Cour des comptes d’après les données du SDES et de RTE
La restauration des marges de sécurité
d’approvisionnement
passe
par
plusieurs leviers . À court terme, ils
s’agit de développer les «  capacités
d’effacement » résultant de dispositifs
d’incitation
à
la
réduction
de
la
consommation pendant les pics de
demande . À moyen terme, des capacités
supplémentaires de production devront
être mises en service . Ces capacités
sont prévues par la programmation
pluriannuelle
de
l’énergie
(PPE)
arrêtée pour la période 2019-2023, mais
les retards sur l’atteinte des objectifs
fixés
par
cette
programmation
se
sont accumulés, avant de s’accentuer
pendant la crise . Il convient donc de
les combler .
60
L’approvisionnement en électricité
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
Recommandations
La Cour formule les recommanda-
tions suivantes :
1.
établir le bilan des conséquences
financières pour les fournisseurs des
mesures d’urgence mises en œuvre
par le Gouvernement en réponse à la
crise dans le secteur de l’électricité
(CRE, 2022)
;
2.
tenir compte, lors de la révision du
plan national de continuité électrique
en cours, des retours d’expérience
consécutifs à la crise de la covid 19
et veiller à son articulation avec les
plans des opérateurs du secteur
(DGEC, 2022)
;
3.
combler les retards pris dans
le développement des capacités
nouvelles
d’effacement
et
de
production prévues par la program-
mation pluriannuelle de l’énergie
afin d’améliorer la sécurité d’appro-
visionnement
(DGEC, 2022)
61
5
Des aéroports durement
éprouvés par la crise
Après des décennies de croissance
soutenue, la crise sanitaire et les
mesures de restriction de circulation
décidées mi-mars 2020 ont mis un
coup d’arrêt brutal au trafic aérien
et à l’activité des aéroports .
Le
trafic passagers a ainsi chuté de
70 % entre 2019 et 2020 .
Les vols
domestiques ont connu des phases
de rebonds lorsque les mesures
de
restriction
étaient
assouplies .
Les
déplacements
européens
et,
plus encore, internationaux, sont en
revanche restés durablement en retrait,
freinés à la fois par les réglementations
des États d’origine et de destination .
Les perspectives d’un retour du trafic à
son niveau de 2019 restent incertaines .
Les dernières projections établies par
Eurocontrol en octobre 2021 situent
le rétablissement du trafic à son niveau
d’avant-crise entre 2024 et 2027 .
Les grands aéroports français
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
Scenarii de reprise du trafic en Europe
58 %
93 %
105 %
109 %
56 %
89 %
96 %
100 %
54 %
74 %
83 %
89 %
4 000
7 000
10 000
13 000
2019
2020
2021
2022
2023
2024
Nombre de vols en milliers
hypothèse haute (retour du trafic 2019, mi-2023)
hypothèse moyenne (retour du trafic 2019, fin 2023)
hypothèse basse
(retour du trafic 2019 après 2027)
Niveau 2019
Source : Eurocontrol – prévisions de trafic établies en octobre 2021
(EUROCONTROL 2021-2027 forecast )
Les trois scenarii varient selon des hypothèses d’évolution de la
pandémie, de la vaccination et de la capacité des États à s’accorder sur
les règles de levée des restrictions.
62
Les grands aéroports français
Une prise de conscience tardive
et une adaptation efficace
La gestion de la crise a pris une
dimension
interministérielle
le
17 
mars
2020
avec
l’activation
du plan Pandémie et le début du
premier confinement . La France a
été l’un des derniers pays d’Europe
à prendre des mesures spécifiques
à l’égard des vols en provenance de
Chine, laissant les aéroports français
ouverts à l’international continuer
d’assurer des liaisons avec des pays
où la circulation du virus était active .
Dès
le
premier
confinement,
les
aéroports ont déployé leurs plans
de continuité d’activité et adapté
leur organisation à l’effondrement
du trafic, tout en veillant au respect
de
leurs
obligations
de
service
public et de continuité territoriale .
Une majorité a aussi accompagné
financièrement prestataires et clients
jusqu’à l’été 2021, permettant d’éviter
des faillites . La crise a donné aux
aéroports l’occasion de gagner en
efficacité et en flexibilité .
Des plans d’économies
exceptionnels pour faire face
à l’effondrement des chiffres
d’affaires
La
croissance
soutenue
du
trafic
aérien avait habitué les aéroports à
des niveaux de rentabilité élevés . Le
recul du trafic passagers a affecté
concomitamment
les
recettes
du
service
public
aéroportuaire
(redevances et taxe d’aéroport) et
les revenus tirés des commerces et
parkings . Ainsi, le chiffre d’affaires
cumulé des dix aéroports dont la
situation a été examinée par la Cour
a baissé de 54 % en 2020 et leurs
résultats d’exploitation sont devenus
fortement
déficitaires
malgré
des
plans d’économies sans précédent
et la prise en charge par les pouvoirs
publics de l’activité partielle .
Dès
le
printemps
2020,
les
aéroports
ont
pris
des
mesures
qui ont permis de réduire de 27  %
leurs
charges
de
fonctionnement
(hors
amortissements) .
Ils
ont
également révisé leurs programmes
d’investissement,
annulant
ou
reportant
au-delà
de
2022
de
nombreux
projets .
Ces
mesures
de
sauvegarde
et
les
emprunts
mobilisés pour prévenir les risques
de liquidité leur ont permis de faire
face aux effets immédiats de la crise .
Des défis à relever au sortir
de la crise
À court terme, la crise soulève des
questions
spécifiques
au
secteur
aéroportuaire . La mise en jeu de la
clause du cahier des charges des
concessions relative à l’imprévision
ou la force majeure est discutée . Le
financement des missions régaliennes
de sûreté et de sécurité déléguées aux
exploitants fait aussi l’objet de débats
car les coûts correspondants ne sont
plus couverts par la taxe d’aéroport .
Le système d’avances créé par l’État
pour couvrir les déficits de 2020 et
2021 paraît difficilement prorogeable
dans la mesure où il reporte la
charge de ce service sur les passagers
futurs . Il risque donc de menacer la
compétitivité des aéroports français
et de freiner la reprise .
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
63
À
moyen
terme,
la
crise
met
également en évidence les faiblesses
du modèle de régulation économique
du secteur aérien, jusque-là occultées
par la croissance continue du trafic .
Dans le nouveau contexte de marges
financières
réduites,
les
principes
régissant l’homologation des tarifs
des redevances aéroportuaires se sont
avérés inadaptés .
Recommandations
La
Cour
fera
part
de
ses
observations et recommandations
sur la régulation et sur le maillage
aéroportuaire à l’issue de travaux
actuellement
en
cours .
Pour
l’heure et au vu du déclenchement
tardif de la gestion de crise dans
le secteur aérien, elle invite à tirer
les
enseignements
de
l’épisode
pandémique
et
à
adapter
les
dispositifs de gestion de crise .
Elle
formule
à
cet
effet
deux
recommandations :
1.
mieux
définir
les
indicateurs
d’alerte et les mesures graduées à
mettre en œuvre dans les aéroports
ouverts à l’international en cas de
risque sanitaire
(DGAC, 2022)
;
2.
dans l’espace aérien européen,
proposer
le
renforcement
de
la
coordination des dispositifs en cas de
crise sanitaire
(DGAC, SGAE, 2022)
Les grands aéroports français
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
64
La Cour des comptes et la CRC d’Île-
de-France ont examiné les conditions
dans lesquelles les pouvoirs publics et
les opérateurs de transports collectifs
ont assuré la gestion opérationnelle
de
la
crise,
analysé
son
impact
financier en 2020 et 2021 et évalué
ses conséquences à moyen et long
terme sur l’évolution du système de
transports collectifs en Île-de-France .
6
Les transports collectifs
en Île-de-France
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
Évolution comparée de l’offre et de la fréquentation
Une activité brutalement réduite qui n’a pas retrouvé
son niveau d’avant-crise
Taux de fréquentation
Taux de réalisation de l’offre
0 %
20 %
40 %
60 %
80 %
100 %
Janv-20
Févr-20
Mars-20
Avr-20
Mai-20
Juin-20
Juil-20
Août-20
Sept-20
Oct-20
Nov-20
Déc-20
Janv-21
Févr-21
Mars-21
Avr-21
Mai-21
Juin-21
Juil-21
Août-21
Sept-21
Source : Cour des comptes, d’après les données IDFM
En dépit d’une chute drastique de la
fréquentation, qui n’a toujours pas
retrouvé son niveau d’avant la crise,
l’État, IDFM et les opérateurs (RATP,
SNCF et exploitants des lignes de
bus Optile) ont choisi de maintenir
une
offre
supérieure
aux
besoins
constatés pour permettre le transport
des salariés des première et deuxième
lignes et garantir la distanciation
physique des voyageurs .
La maintenance, essentielle au service,
a été réorientée prioritairement sur les
opérations courantes et préventives .
Les
travaux
d’extension
et
de
modernisation des réseaux ont été
davantage affectés, avec des retards en
cascade de l’ordre de six mois . Ils seront
d’autant plus difficiles à rattraper
que les chantiers sont complexes,
interdépendants et se déroulent dans
des environnements urbains .
65
La gestion de la crise a été globalement
satisfaisante . IDFM et les opérateurs
se sont efforcés de mettre en place
des mesures sanitaires adaptées pour
rassurer les usagers . Les personnels,
bien accompagnés, ont fait preuve
d’implication, en particulier durant les
phases les plus aiguës de la pandémie .
De lourdes pertes
d’exploitation, compensées
par l’État, et un rythme
d’investissement maintenu
En 2020, les pertes globales de recettes
par rapport à 2019 ont atteint 1,42 Md€,
dont 1,29 Md€ de pertes de recettes
tarifaires . Ces dernières devraient
s’établir à environ 1 Md€ en 2021 .
À l’issue de difficiles négociations,
marquées par la décision d’IDFM
de
suspendre
le
versement
de
ses
contributions
à
la
SNCF
et
à la RATP en juillet 2020, puis à
nouveau en septembre 2021, la plus
grande partie de ces pertes a été
compensée par l’État . Ce dernier est
ainsi intervenu comme l’assureur en
dernier ressort d’un système dont la
gestion est pourtant décentralisée
et le financement de l’exploitation
censé reposer sur des ressources
exclusivement franciliennes .
Les transports collectifs en Île-de-France
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
Évolution du poids relatif des financeurs d’IDFM pour ses recettes d’exploitation
52 %
53 %
49 %
50 %
27 %
27 %
17 %
20 %
16 %
16 %
16 %
16 %
1 %
1 %
1 %
1 %
2 %
2 %
3 %
2 %
2 %
2 %
15 %
11 %
0 %
10 %
20 %
30 %
40 %
50 %
60 %
70 %
80 %
90 %
100 %
2018
2019
2020
2021
Autres
État
Consommateurs
de carburant et
d'hydrocarbures
Collectivités membres
d'IDFM (contributions
statutaires et subventions)
Usagers des transports en
commun (recettes tarifaires)
Entreprises (versement
transport et
remboursement
d'abonnements)
Source : Cour des comptes, d’après les données IDFM
Malgré ces difficultés financières, les
investissements d’IDFM et de la SGP se
sont accrus . En parallèle, leurs dettes
ont aussi augmenté pour atteindre
respectivement 7,62 Md€ et 24,5 Md€
fin 2021 .
66
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
Les transports collectifs en Île-de-France
La nécessité de conforter
le financement régional
des transports collectifs
franciliens
En dépit des effets bénéfiques de
l’accroissement
de
l’offre
et
de
l’augmentation de la population, l’essor
du télétravail et l’atonie persistante du
tourisme devraient maintenir au moins
jusqu’en 2023-2024 la fréquentation
à un niveau inférieur à son niveau de
2019 . La crise se traduirait ainsi par un
retard de croissance de la demande
de transports collectifs de cinq à
six  ans, qui aggravera sensiblement
les difficultés de financement que
connaissait déjà le système francilien
de
transports
collectifs
avant
la
pandémie .
La
soutenabilité
du
modèle
économique des transports publics
franciliens dépend notamment de la
capacité d’IDFM à maintenir son ratio
de désendettement en-deçà de quinze
années . Or les projections réalisées
montrent que ce ratio sera dépassé en
2026 . Des mesures doivent donc être
prises, en dépenses et en recettes, pour
rétablir l’équilibre financier du système .
Les investissements programmés sont
en grande partie intangibles . Seuls des
retards dans la mise en exploitation des
futures lignes de métro automatique
du Grand Paris Express, ainsi qu’un
lissage des investissements prévus
par IDFM sur la période de 2026
à 2030 (10  Md€, dont 8,5 Md€ de
renouvellement ou modernisation de
matériel roulant) sont envisageables .
L’ajustement fin de l’offre de transport
et la poursuite de l’amélioration de
la productivité des opérateurs sont
indispensables mais ne généreront pas
non plus des économies importantes .
Il
est
donc
nécessaire
d’agir
sur
les
recettes
pour
contribuer
au
rétablissement de la soutenabilité du
modèle . Les extensions substantielles
Évolution des dépenses d’investissement de la SGP et d’IDFM
0
500
2019
2020
2021
1 000
1 500
2 000
2 500
3 000
3 500
Dépenses réelles d’investissement d’IDFM (en M€)
Dépenses réelles d’investissement SGP (en M€)
Source : Cour des comptes, d’après les données d’IDFM et de la SGP
67
Les transports collectifs en Île-de-France
du réseau, en cours et à venir, et
l’amélioration corrélative de la qualité
de service, justifient une hausse des
tarifs et une augmentation, le cas
échéant différenciée, des contributions
des collectivités membres d’IDFM .
La
restauration
de
l’équilibre
du
financement du système francilien
de
transports
collectifs
passe
également par des mesures nouvelles .
L’amplification
de
celles
visant
à
favoriser
les
déplacements
en
transports collectifs et à dissuader
l’utilisation de la voiture permettrait
d’accroître
la
fréquentation .
IDFM
pourrait par ailleurs bénéficier de
nouvelles
ressources
provenant
de la captation d’une partie de la
valorisation foncière induite par la
densification
du
réseau
et
d’une
participation des usagers des routes
franciliennes
au
financement
des
transports collectifs de la région .
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
68
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
Opérateur de transport public, le
groupe Transdev, filiale de la Caisse
des
dépôts
et
consignations,
est
présent dans 17 pays .
Il emploie
83 000 salariés et son chiffre d’affaires
a atteint 6,8 Md€ en 2020 .
Avec la crise
sanitaire,
l’entreprise
a
transporté
seulement 6,2 millions de passagers
par jour en moyenne en 2020, contre
11 millions en 2019 .
L’entreprise de transports
collectifs Transdev
7
Activités et organisation du groupe Transdev
Caisse des dépôts
RETHMANN France SAS
66 %
34 %
Amérique
du nord
17%
France
36 %
International :
Reste de l’Europe (7 pays) ;
Amérique du sud (3 pays) ;
Pacifique (2 pays) et Maroc
31 %
Allemagne
16 %
Actionnariat
Activité mondiale
Autres (parkings, ferries, vélos, ambulances, etc.)
9,7 %
Bus et tramway
70,6 %
Train et métro
14,7 %
Transports pour des pouvoirs publics
et des collectivités :
95 %
Transports pour des organismes
privés :
5 %
Aéroports
Tourisme
Taxi , etc.
Santé
Source : Transdev, retraitement Cour des Comptes
Une adaptation rapide
de Transdev au contexte
de la crise sanitaire
S’il n’avait pas anticipé le risque de
pandémie, le groupe Transdev a su
mettre en place, dès le début de la crise
sanitaire, une organisation de gestion
de crise effi
cace .
Au niveau mondial,
conformément
aux
demandes
des
autorités, son offre de transport urbain
a été maintenue à 60 % de son niveau
d’avant-crise alors que, pendant le
confinement du printemps 2020, la
fréquentation ne représentait plus
que 10 % en moyenne de son niveau
normal .
En France, à la suite des annonces
gouvernementales de début 2020, le
télétravail a été privilégié pour une
partie des salariés .
Les conducteurs
69
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
ont majoritairement poursuivi leur
activité . Transdev a contribué à la
sécurité sanitaire des passagers et
des conducteurs avec la désinfection
quotidienne
des
véhicules
et
l’adaptation
des
espaces
pour
favoriser
la
distanciation .
Des
solutions innovantes de digitalisation
pour les passagers et les salariés ont
aussi été déployées . Dans l’ensemble
du groupe, 4 % des salariés auraient
été
diagnostiqués
positifs
à
la
covid 19 en 2020 .
Des
mesures
exceptionnelles
en
matière de ressources humaines ont
été mises en place avec notamment
l’utilisation des dispositifs d’activité
partielle et le gel des salaires et des
recrutements . Le groupe Transdev a
bénéficié de subventions à hauteur de
114,2 M€ au titre de l’activité partielle
et de 253,9 M€ de reports de charges
sociales . Malgré ces aides, l’année
2020 a été marquée par une baisse de
1,4 % des effectifs du groupe .
Un impact financier significatif
sur les recettes, mais
une trésorerie renforcée,
grâce notamment
à l’intervention publique
Le chiffre d’affaires du groupe a
fortement baissé en 2020 (- 660 M€
par rapport à 2019, soit - 9 %) . Transdev
évalue l’impact de la crise sanitaire sur
son résultat d’exploitation à 200  M€
en 2020, dont près de la moitié se
rapporte à la France (- 97,1 M€) . La
rentabilité des activités internationales
a également été amoindrie dans les
autres pays européens (- 77,3 M€) et le
reste du monde (- 25,6 M€) .
Les filiales au sein de chaque pays
ont
s’adapter
aux
différentes
mesures
gouvernementales
et
aux
aides
accordées .
Elles
ont
également
échangé
avec
chaque
autorité organisatrice de la mobilité
pour prendre en compte le niveau
de service attendu et négocier les
compensations financières dues aux
pertes de recettes passagers et aux
surcoûts liés aux mesures sanitaires .
En raison des facilités de paiement
accordées par les États (385,5 M€)
et des cessions de filiales décidées
majoritairement avant la crise sanitaire,
le groupe Transdev a amélioré sa
trésorerie sur l’année 2020 (485,3 M€
en fin d’année, soit + 56 % par rapport
à 2019) . L’endettement financier net
du groupe a été ramené à 1 305,9 M€
en 2020 (contre 1 864,2 M€ en 2019,
soit une baisse de 30 %) .
L’entreprise de transports collectifs Transdev
70
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
Les conséquences à moyen
terme de la crise sanitaire
sur l’activité de Transdev
La stratégie de Transdev, revue autour de
quatre priorités (la discipline financière,
les équipes et partenariats, l’attention
portée aux besoins des clients et la
rentabilité des contrats), s’est révélée
adaptée aux défis posés par la crise
sanitaire . Cette dernière a ainsi accéléré
le processus de recentrage du groupe,
par activité (Transdev privilégiant les
activités de transport à la demande des
autorités) et par pays .
La fréquentation des transports publics
n’ayant
toujours
pas
retrouvé
son
niveau d’avant-crise dans la plupart
des pays où Transdev est implanté,
l’entreprise est confrontée à une forte
incertitude sur l’évolution à moyen
terme de son activité . La diminution
du nombre de passagers entraîne une
baisse des recettes d’exploitation et
modifie l’équilibre des contrats . Cette
situation devrait conduire le groupe
à adapter les niveaux de service et à
renégocier les contrats avec les autorités
organisatrices, en prenant davantage en
compte les facteurs exogènes tels, que
le risque pandémique . Transdev doit
également proposer une nouvelle offre,
plus intégrée, et prenant en compte
différentes mobilités, afin de ramener les
usagers vers les transports publics et de
se différencier de la concurrence .
L’entreprise de transports collectifs Transdev
Impacts de la crise sanitaire sur Transdev
Chiffre
d’affaires :
- 660 M€
Dépréciations :
- 62 M€
Cout des
restructurations :
85,5 M€
EBIT net des
compensations
des autorités :
- 200 M€
Trésorerie
nette :
+ 174 M€
Mesures de
compensation
(DE et NL) :
109,3 M€
Chômage
partiel :
114,2 M€
Reports
de charges :
253,9 M€
CRISE
Covid 19
Source : Transdev, retraitement Cour des Comptes
Recommandation
Au terme de son enquête, la Cour
adresse la recommandation suivante
au groupe Transdev :
dans les nouveaux contrats, porter
une
attention
particulière
aux
causes exogènes de l’évolution de
la fréquentation afin de limiter les
risques économiques .
Troisième partie
L’adaptation à la crise
de certaines administrations
et entreprises publiques pourvoyeuses
de services essentiels
1 .
Les interventions économiques des collectivités territoriales
d’Occitanie
2 .
Le soutien apporté aux stations de moyenne montagne
des Pyrénées-Atlantiques
3 .
Le déploiement des prêts garantis par l’État
4 .
Les mesures fiscales de soutien aux entreprises
5 .
Les aides de l’État en faveur du sport
6 .
Les réserves des caisses de retraite
73
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
À l’occasion de la crise sanitaire, les
acteurs publics locaux ont rapidement
souhaité contribuer à l’effort général
de
soutien
aux
entreprises
et
à
l’activité
économique,
en
mettant
en œuvre leurs propres dispositifs,
parallèlement à ceux déployés par
l’État . Si l’ensemble de ces aides a
limité les effets de la crise, l’articulation
et la pertinence des moyens mobilisés
par les acteurs locaux méritent d’être
analysées . La phase de relance doit
être l’occasion de tirer les leçons
de cette crise en hiérarchisant les
actions structurantes et à vraie valeur
ajoutée en termes d’emploi et de
développement économique .
La difficile coordination
des interventions des acteurs
publics locaux
Un objectif d’encadrement par l’État
non tenu
En créant dès mars 2020 le fonds
de solidarité national (FSN), l’État
voulait éviter un éparpillement des
aides allouées par les collectivités
territoriales . Toutefois, cette tentative
d’encadrement
des
dispositifs
de
soutien n’a pas évité l’émergence de
dispositifs de soutien locaux .
En
sa
qualité
de
cheffe
de
file
en
matière
de
développement
économique,
la
région
Occitanie
a, dès avril 2020, adopté un plan
de
soutien
d’urgence
doté
d’une
enveloppe globale d’environ 394 M€,
dont 316 M€ en faveur des acteurs
économiques locaux, permettant aux
entreprises occitanes de bénéficier
d’aides à la trésorerie, de facilités
de prêts ou encore de subventions
d’investissement .
Outre sa participation au FSN à hauteur
de 36,7 M€, la région a notamment créé
deux fonds de soutien à l’économie,
dont le fonds « L’Occal », qu’elle a
cofinancé avec les départements, les
établissements publics de coopération
intercommunale (EPCI) et la Banque
des Territoires à hauteur de 61,5 M€ .
1
Les interventions économiques
des collectivités territoriales
d’Occitanie
74
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
La quasi-totalité des départements
occitans a déployé une stratégie de
contournement de leurs compétences
pour mettre en œuvre des mesures
propres visant à apporter un appui au
tissu économique local . Aussi, comme
au plan national, leur intervention
en
matière
économique
s’est-elle
renforcée par rapport à 2019 .
Pour
autant,
les
contribtions
des
acteurs
locaux
peuvent
apparaître
limitées au regard du montant total des
aides versées par l’État en Occitanie
(2,9 Md€ au titre du seul FSN) .
Un foisonnement de dispositifs peu
propice à l’efficience
La
portée
de
l’ensemble
des
mesures prises par l’État, la région,
les
départements
et
les
EPCI,
parfois
complexes
à
articuler,
voire redondantes, reste difficile à
établir . La mise en œuvre du fonds
L’Occal soulève au demeurant des
difficultés juridiques, dans la mesure
il
constitue
une tentative
de
contournement de la réglementation
en vigueur .
Les interventions économiques des collectivités
territoriales d’Occitanie
Typologies des aides de l’État et de la région
RÉGION
OCCITANIE
Fonds de solidarité national
(FSN) créé par l’État
Volet 1 :
aides mensuelles (subventions)
– gestion centralisée
Volet 2/2 bis :
élargissement des critères
– instruction par région
Activité
Partielle
Report
des échéances
fiscales
Prêt garanti
par l’État
(PGE)
Prêt
AERO
FSEO,
fonds de soutien
exceptionnel
Occitanie
Contrats
d’accompagnement
Contrat entreprise
en crise de trésorerie
COVID-19
Fonds L’OCCAL
(volets 1, 2, 3)
créé et géré
par la région
Fonds de garantie
régional (FRG)
Fonds de
solidarité pêche
PASS REBOND
Plan de soutien Occitanie
DISPOSITIF ÉTAT
DISPOSITIF RÉGION
Prêt
Rebond
Source : Cour des comptes
75
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
Des finances préservées
qui offrent aux collectivités
territoriales des marges
de manœuvre pour s’engager
dans la relance
Des prévisions budgétaires
volontaristes parfois difficiles
à exécuter
Les acteurs publics locaux ont dû
procéder à une adaptation complexe
de leurs prévisions budgétaires tout au
long de l’année 2020 . Les fonds alloués
à certains dispositifs d’aides n’ont pas
été intégralement consommés . C’est
le cas du fonds L’Occal, dont le taux de
consommation s’établissait à environ
50 % en juillet 2021 .
Les interventions économiques des collectivités
territoriales d’Occitanie
Décalage entre montants budgétés et mandatés au titre des contributions
au fonds L’Occal et des aides aux entreprises
12 000 000 €
10 000 000 €
8 000 000 €
6 000 000 €
4 000 000 €
2 000 000 €
0 €
Contributions inscrites aux budgets région, départements et EPCI
Total des aides mandatées aux entreprises
Source : CRC Occitanie d’après données région
Une efficience de la contribution
à la relance conditionnée par
une démarche plus structurée
Au plan national comme en Occitanie,
la
crise
sanitaire
a
eu
des
effets
moindres sur la situation financière
des collectivités que ceux initialement
envisagés . La dégradation, mesurée,
des principaux indicateurs disponibles
(capacité de désendettement et taux
d’épargne brute) permet ainsi à la région
et aux départements de disposer des
capacités de financement nécessaires
pour contribuer à la relance .
La
stratégie
nationale
de
relance
de l’économie s’appuie notamment
sur
une
nouvelle
démarche
de
contractualisation avec les collectivités
territoriales, qui comptent pour leur
part utiliser principalement le levier
de la commande publique . Cependant,
compte tenu de la relative faiblesse des
taux antérieurs de réalisation de leurs
investissements, l’efficacité d’une telle
stratégie n’est pas garantie .
76
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
Les interventions économiques des collectivités
territoriales d’Occitanie
Recommandations
La Cour formule à l’attention des
collectivités territoriales d’Occitanie
les recommandations suivantes :
Sécuriser le cadre juridique
d’intervention
(départements)
1.
veiller à ce que les politiques
menées s’inscrivent dans les champs
de compétences définis par la loi ;
Dresser
un
bilan
financier
des
dispositifs
mobilisés
pendant
la
crise
(région, départements, EPCI)
2.
organiser,
en
lien
avec
les
départements
contributeurs,
le
reversement
des
participations
au fonds L’Occal qui n’ont pas été
consommées sur leur territoire ;
3.
surveiller
la
capacité
de
remboursement, par les entreprises
soutenues, des avances qui leurs
ont été allouées dans le cadre des
dispositifs d’aides et de soutien mis
en œuvre pendant la crise ; le cas
échéant, inscrire des provisions ;
Veiller à l’efficience des mesures
prévues en phase de relance
(région,
départements, EPCI)
4.
réaliser un diagnostic préalable à
tout projet de relance pour définir
son périmètre, les résultats attendus
et des indicateurs d’évaluation ;
5.
établir un bilan à l’issue de chaque
projet de relance .
77
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
Le
département
des
Pyrénées-
Atlantiques
est
propriétaire
des
domaines skiables des stations de
sports d’hiver de Gourette et La Pierre-
Saint-Martin
et
des
infrastructures
du train touristique de La Rhune . Il
a choisi d’en déléguer l’exploitation,
par le biais d’un contrat d’affermage,
à l’établissement public des stations
d’altitude (EPSA) .
Dans un chapitre du rapport public
annuel de 2015, intitulé «
L’avenir
des stations de ski des Pyrénées : un
redressement
nécessaire,
des
choix
inévitables
», la Cour des comptes
avait dressé un tableau inquiétant de
la situation financière de ces stations .
L’impact très négatif de la crise sanitaire
actuelle ne saurait occulter le fait qu’une
grande partie des constats alors établis
est restée sans réponse . Les subventions
importantes versées à l’EPSA par l’État
et le département en 2020 et 2021
pour lui permettre d’affronter la crise
pourraient même avoir retardé le
traitement des enjeux de long terme .
La pandémie de covid 19 :
une crise conjoncturelle sans
précédent pour les stations
de moyenne montagne
des Pyrénées-Atlantiques
La crise sanitaire a eu des conséquences
significatives
sur
le fonctionnement
de l’EPSA . Les deux stations de ski
ont en effet été contraintes de fermer
à compter de mi-mars 2020 . Elles
ont perdu près de 3,4 M€ de recettes
d’exploitation sur l’ensemble de l’année
(- 42 %) . Aussi, l’EPSA a-t-il enregistré un
déficit de l’ordre de 2 M€ .
Pour surmonter ce choc, l’établissement
a bénéficié en 2020 et 2021 d’un peu
plus de 9,5 M€ d’aides directes de l’État
et du département, auxquelles s’est
ajoutée la garantie de l’État sur un
emprunt de 3,5 M€ . L’ensemble (13 M€)
représente près d’une année habituelle
de chiffre d’affaires de l’établissement .
Un soutien inconditionnel,
au risque de retarder
la nécessaire transformation du
modèle des stations
de moyenne montagne
Les stations d’altitude des Pyrénées-
Atlantiques drainent une clientèle
limitée et peinent à conquérir de
nouveaux marchés . Les perspectives
de diversification de leurs activités
ne
permettent
pas
d’assurer
la
soutenabilité à long terme de leur
modèle économique .
Le changement climatique constitue
un enjeu majeur pour les territoires
de
montagne .
En
entraînant
une
diminution de l’enneigement naturel,
Le soutien apporté aux stations
de moyenne montagne
des Pyrénées-Atlantiques
2
78
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
Le soutien apporté aux stations de moyenne
montagne des Pyrénées-Atlantiques
Les
études
disponibles
montrent
qu’à l’horizon de 20 à 30 ans, il ne
devrait plus subsister qu’une station
pyrénéenne
avec
un
enneigement
naturel acceptable . Elle se situerait
hors du département des Pyrénées-
Atlantiques .
Le modèle économique des deux
stations gérées par l’EPSA est ainsi
remis en cause par une double fragilité
commerciale et environnementale . Ces
fragilités structurelles sont d’autant
plus préoccupantes que les coûteux
investissements
de
modernisation,
assumés par le département, tendent
eux aussi à déséquilibrer la situation
financière des stations . Une partie
de la redevance versée par l’EPSA au
département est en effet corrélée au
niveau des investissements réalisés :
plus ces derniers s’accroissent, plus
la redevance augmente, aggravant
le déficit si la modernisation n’a
pas d’effet sur la fréquentation des
stations .
surtout
à
basse
altitude,
il
rend
le domaine skiable dépendant de
l’utilisation d’équipements de neige
artificielle . Le fonctionnement de ces
équipements est lui-même soumis
à
des
conditions
météorologiques
spécifiques,
sans
parler
de
leurs
conséquences environnementales .
Élévation des températures dans les Pyrénées impactant l’enneigement
0,0
- 0,5
- 1,0
0,5
1,0
1,5
2,0
Anomalie en °C (réf. 1961-1990)
1959
1962
1965
1968
1971
1974
1977
1980
1983
1986
1989
1992
1995
1998
2001
2004
2007
2010
Anomalie positive
Anomalie négative
Moyenne mobile
Source : Observatoire Pyrénéen du Changement Climatique
Note de lecture : Sont indiquées l’anomalie annuelle par rapport à la
valeur moyenne de la période de référence 1961-1990 (en rouge si elle est
positive, en bleu si elle est négative) ainsi que l’évolution de la moyenne
mobile pour une période de 10 ans (ligne violette).
79
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
Le soutien apporté aux stations de moyenne
montagne des Pyrénées-Atlantiques
À
court
terme,
la
question
de
l’adéquation
du
montant
de
la
redevance par rapport à l’équilibre
financier du contrat est donc posée .
À
plus
long
terme,
la
stratégie
générale des deux stations devra être
redéfinie lors de la renégociation de
la délégation de service public que le
département a consentie à l’EPSA en
2012 pour 18 ans . Le contrat inclut
une clause de revoyure quinquennale,
que le département et l’établissement
n’ont pas mise en œuvre en 2017 .
La
transformation
du
modèle
économique des stations de Gourette
et La Pierre-Saint-Martin nécessite
la mobilisation de l’ensemble des
acteurs intéressés, notamment l’État
et la région . Outre une amélioration
du suivi des déséquilibres financiers,
elle
suppose
un
recours
plus
important aux mutualisations entre
les stations de sports d’hiver des
Pyrénées .
Recommandations
La Cour des comptes recommande à
ce titre :
À l’État :
1.
de mettre en place un dispositif
de suivi de la situation financière
des stations, permettant d’éclairer
les choix nécessaires en termes
d’accompagnement structurel, no-
tamment dans la perspective de
la mise en œuvre du plan « Avenir
Montagnes » ;
À la région Nouvelle-Aquitaine :
2.
de préciser le projet de territoire
« durable et résilient » pour les
stations
de
Pyrénées-Atlantiques,
avec le département et l’ensemble
des parties prenantes, si nécessaire
d’autres parties du massif pyrénéen ;
3.
de mettre en place une condition-
nalité des aides pour renforcer le
processus de mutualisation entre les
opérateurs de stations ;
Au
département
des
Pyrénées-
Atlantiques :
4.
de choisir les projets d’investisse-
ment sur ces stations en cohérence
avec le projet de territoire « durable
et résilient » ;
5.
de
concevoir
avec
toutes
les
parties prenantes un plan d’avenir
pour ces stations et rénover le
contrat d’affermage de l’EPSA en
conséquence .
80
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
Définis
par
voie
législative
et
réglementaire dès le 23 mars 2020, les
prêts garantis par l’État (PGE) ont été
distribués par les banques rapidement :
sur les 143  Md€ de PGE bénéficiant
à près de 700  000  entreprises à fin
2021, 70 % avaient été octroyés dès
juin 2020 . La Cour des comptes a
engagé une évaluation des PGE, qui
sera finalisée en 2022 . Elle présente
dans son rapport public annuel des
constats sur la mise en œuvre du
dispositif .
Un dispositif simple et souple,
une mobilisation conjointe
de l’État et des banques
Face
au
risque
de
credit
crunch
,
les
gouvernements
européens
ont
souhaité instaurer des « ponts de
liquidités » en faveur des entreprises,
prenant la forme de prêts garantis
par les États . Dans le cadre défini
par la Commission européenne le
19  mars  2020, la France a mis en
place un dispositif plus avantageux en
termes de coûts pour les entreprises
que les autres pays qui ont déployé des
dispositifs comparables, en s’appuyant
sur les réseaux bancaires pour la
distribution des prêts et sur Bpifrance
pour la gestion de la garantie .
La
délégation
aux
banques
de
l’instruction des demandes de prêt
a été facilitée par leur bonne santé
financière . Le choix de ce circuit
de distribution, la conception d’un
produit simple et la mise en place
d’un processus fluide de demande en
ligne d’attestation de garantie auprès
de Bpifrance ont permis de déployer
le
dispositif
sensiblement
plus
rapidement que dans d’autres pays .
Les entreprises interrogées par la Cour
ont souligné le climat de coopération
qui a marqué les échanges avec les
banques et la fluidité du processus de
demande .
Le déploiement des prêts
garantis par l’État
3
81
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
Le déploiement des prêts garantis par l’État
Processus de demande d’un PGE
- 5000 salariés
et CA < 1,5 Md€
+ 5000 salariés
ou CA > 1,5 Md€
Discussion avec la banque
$
Discussion avec la banque
$
Demande par l’entreprise
d’une attestation à Bpifrance
Instruction du dossier
par la direction
générale du Trésor
Vérification par Bpifrance
que le total des demandes
par l’entreprise n’excède pas
25 % du chiffre d’affaires
Arrêté ministériel
autorisant
le prêt
Validation par la Banque
Déblocage du Prêt
PETITES
ENTREPRISES
GRANDES
ENTREPRISES
Déblocage du Prêt
Source : Cour des comptes
82
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
Un déploiement rapide et massif
La plupart des PGE ont été souscrits
en avril et mai 2020 . Le rythme
des
souscriptions
s’est
nettement
ralenti en 2021 . Le dispositif a été
particulièrement
sollicité
par
les
très petites entreprises, qui avaient
bénéficié de près de 88 % des prêts
au 31 décembre 2021 (mais 37 % en
montant) . Le secteur du commerce est
le principal bénéficiaire en montant,
devant
l’hôtellerie-café-restauration,
l’industrie et la construction .
Le déploiement des prêts garantis par l’État
Prêts garantis rapportés à la valeur ajoutée des sociétés non financières (2019)
0 %
5 %
10 %
15 %
20 %
25 %
30 %
35 %
Italie
France
Allemagne
Espagne
Royaume-Uni
Avril
Mai
Juin
Juillet
Août
Septembre
Octobre
Novembre
Décembre
Avril
Mai
Juin
Juillet
Août
Septembre
Octobre
Novembre
Décembre
Janvier
Février
Mars
2020
2021
Source : données de l’ICO (Espagne), de la KfW (Allemagne), de la SACE
du ministère de l’économie (Italie) et de data.gouv.fr (France), recensées
dans l’étude « Covid-19 credit support programmes in Europe’s five largest
economies », publiée par Bruegel
Le taux de refus des PGE est resté
limité et stable autour de 2,9 %, un
niveau inférieur à celui habituellement
constaté pour les crédits de trésorerie .
Près des deux-tiers des refus ont
fait l’objet d’un recours auprès du
médiateur du crédit, service gratuit et
confidentiel assuré par la Banque de
France . L’intervention du médiateur
a abouti positivement dans la moitié
des dossiers traités .
Une réponse au besoin
de trésorerie des entreprises,
un coût réel encore incertain
pour l’État
La
mobilisation
importante
des
acteurs publics comme privés a permis
au dispositif des PGE d’atteindre ses
objectifs de court terme, consistant à
préserver les liquidités des entreprises,
éviter tout
credit crunch
dans une
83
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
période
de
grande
incertitude
et
limiter le nombre de défaillances
d’entreprises . Les PGE ont cependant
accru l’endettement des entreprises
françaises,
déjà
caractérisées
par
un niveau d’endettement bancaire
plus élevé que dans d’autres pays
européens .
Les
situations
sont
contrastées selon les entreprises et
impliquent un suivi attentif dans les
prochains mois .
Près de 15 % des entreprises ont choisi
de rembourser leur PGE dès 2021
et seulement 50 % ont opté pour un
différé de remboursement de deux ans .
Le coût pour l’État, qui a bénéficié en
2020 et 2021 des primes de garantie,
dépendra
in fine
du taux de défaut des
bénéficiaires de PGE : les estimations
disponibles à ce jour, entourées de
nombreuses incertitudes, convergent
autour de 4 %, soit un coût net pour
l’État inférieur à 3 Md€ .
Si les caractéristiques retenues pour
les PGE en France ont permis à ce stade
d’éviter les phénomènes de fraude
massive qui ont été rencontrés dans
d’autres pays, une attention devra
être portée dans la durée aux risques
d’optimisation et à l’amélioration des
outils de pilotage financier .
L’évaluation complète du dispositif,
à laquelle procède actuellement la
Cour, doit permettre de formuler des
recommandations et de mesurer si les
prêts garantis par l’État ont contribué
à assurer durablement la viabilité
d’entreprises affectées par la crise
sanitaire .
Le déploiement des prêts garantis par l’État
84
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
Comme dans la majorité des pays
de
l’OCDE,
l’administration
fiscale
française a pris des mesures pour
soutenir la trésorerie des entreprises
et prendre en compte leurs difficultés
à s’acquitter de certaines obligations
fiscales durant la crise sanitaire .
Trois types de mesures fiscales
pour soutenir les entreprises
Des mesures de trésorerie
ont visé à
soutenir la liquidité des entreprises .
La DGFiP leur a permis de reporter
de
plusieurs
mois
les
échéances
de mars et juin 2020 de l’impôt
sur les société (IS), la taxe sur les
salaires et la cotisation foncière des
entreprises
(CFE) .
Les
entreprises
ont ainsi conservé une trésorerie
supplémentaire comprise entre 0,8 et
2,3 Md€ de mars 2020 à mars 2021 .
Ces mesures infra annuelles n’ont pas
pesé sur le budget de l’État .
En
complément,
l’administration
fiscale a accéléré le remboursement
des crédits de TVA, d’IS et de taxe
intérieure de consommation sur les
produits énergétiques (TICPE) . L’effet
de ces mesures sur la trésorerie
des entreprises ne peut être évalué
précisément,
faute
de
données
exhaustives .
Des baisses exceptionnelles d’impôt
décidées par le Parlement ont soutenu
les secteurs particulièrement affectés
par la crise, pour près de 4 Md€, dont
1,6 Md€ au titre des exonérations de
taxes sur l’importation des produits
sanitaires et 1,7 Md€ au titre de
la prolongation à deux reprises de
l’avantage fiscal concernant l’emploi
du gazole non routier (GNR), qui
bénéficie essentiellement au secteur
du BTP .
Des mesures dites de « bienveillance »
fiscale
ont permis de prendre en
compte
les
difficultés
rencontrées
par les entreprises pour déposer leurs
déclarations
d’impôt
ou
répondre
aux demandes de l’administration .
L’engagement de nouveaux contrôles
fiscaux a aussi été suspendu pendant
le premier confinement, conduisant à
une diminution de 1,3 Md€ des droits
rappelés
en
2020
concernant
les
impôts directs des entreprises .
Les mesures fiscales de soutien
aux entreprises
4
85
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
Des mesures utiles mises
en place rapidement,
une contribution limitée
à l’ensemble des dispositifs
de crise
Décidées dès le 4 mars 2020, certaines
mesures fiscales ont fait partie des
premiers
soutiens
apportés
aux
entreprises confrontées à la crise et
ont ensuite été modulées suivant
l’évolution de la situation sanitaire .
Leur
ampleur
est
demeurée
inférieure à celle d’autres dispositifs,
comme les prêts garantis par l’État
(PGE) ou le report des cotisations
sociales .
Environ 0,4 % des petites
et moyennes entreprises, soit entre
10 000 et 15  000  entités, auraient
bénéficié
des
reports
d’échéances
d’IS
et
d’impositions
foncières .
Concernant l’ensemble des mesures
fiscales, la DGFiP a enregistré près de
115 000 demandes d’entreprises entre
mars 2020 et juillet 2021 .
Les mesures fiscales de soutien aux entreprises
Chronologie des principales mesures fiscales de soutien
aux entreprises touchées par la crise en 2020
Mars
Avril
Mai
Juin
Juillet
Août
Sept.
Oct.
Nov.
Déc.
Confinement
Confinement
4 mars
Report de paiement
des échéances d’IS,
de taxe sur les salaires
et des dettes fiscales
Accélération
des remboursements
de créances fiscales
(IS et TVA)
6 août
Plans de règlement
des dettes fiscales
11 novembre
Report
de l’échéance
de CFE de décembre
Suspension des penalités
25 mars
Suspension
des contrôles fiscaux
Reprise
des contrôles
fiscaux
12 octobre
Report
de l’échéance
de taxe foncière
d’octobre
30 juillet
Accélération
des remboursements
au titre des reports
en arrière de déficit
19 mars
Exonération de TVA et de droits
de douane
pour les importations
de produits sanitaires
30 juillet
Dégrèvement de CFE
pour
les secteurs les plus fragilisés
Report de la hausse du taux
de TICPE
des entreprises
du BTP
29 décembre
Crédit d’impôt
pour
les abandons de loyers
de novembre 2020
25 avril
TVA réduite
pour certains produits
permettant la lutte contre
l’épidémie
29 mai
Report
des échéances
d’IS et de CFE de juin
Modulation
des acomptes d’IS
2 juin
Remboursements
trimestriels de TICPE
des transporteurs
routiers
Mesure de trésorerie
Baisse d’impôt
Mesure de bienveillance
Source : Cour des comptes d’après données DGFiP et DGDDI
IS : impôt sur les sociétés, TVA : taxe sur la valeur ajoutée, TICPE : taxe intérieure de
consommation sur les produits énergétiques, CFE : cotisation foncière des entreprises.
86
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
Toutefois, ces mesures fiscales ont
permis de soutenir la trésorerie de
ces entreprises dès le début de la
crise,
avant
l’instauration
d’autres
aides nécessitant des modifications
réglementaires ou législatives .
Un suivi à améliorer,
des contrôles à accentuer
La
gestion
de
ces
mesures
exceptionnelles a mis en évidence
certaines rigidités liées aux systèmes
d’information
de
l’administration
fiscale . Ainsi, l’impossibilité d’instruire
les reports de paiement dans les
applications de gestion a alourdi leur
traitement et amoindri la qualité de
leur pilotage et de leur suivi . Il importe
qu’à l’avenir, la DGFiP dispose d’outils
d’informations fiables et précis sur les
dispositifs mis en œuvre, même en
période de crise .
Par ailleurs, l’information présentée au
Parlement sur les deux prolongations
successives de l’avantage fiscal relatif
au GNR du secteur du BTP est restée
limitée et fragmentée . Introduites par
amendements du Gouvernement, ces
mesures n’ont fait l’objet d’aucune
étude d’impact . L’information fournie
au Parlement ne permet pas d’en
reconstituer
le
coût
total,
évalué
à 1,7  Md€ par la direction de la
législation fiscale .
Dès septembre 2020, la DGFiP a
progressivement mis fin aux mesures
générales
de
bienveillance
et
de
trésorerie . Deux ans après le début
de la crise, il convient d’accentuer le
contrôle de la bonne utilisation de ces
mesures et des conditions fixées pour
en bénéficier . Il s’agira notamment
pour la DGFiP de vérifier le respect
des engagements de responsabilité
conditionnant le report d’échéances
fiscales pour certaines entreprises et
d’en tirer les conséquences en cas de
non-respect .
Les mesures fiscales de soutien aux entreprises
Recommandations
Au terme de son enquête, la Cour
adresse à l’État les recommandations
suivantes :
1.
s’assurer de disposer des outils
de suivi permettant d’obtenir des
informations fiables et précises sur
les dispositifs mis en œuvre, même
en période de crise
(DGFiP)
;
2.
vérifier le respect des engagements
de responsabilité conditionnant le
report
d’échéances
fiscales
pour
certaines entreprises et en tirer les
conséquences en cas de non-respect
(DGFiP)
87
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
Début
2020,
le
monde
sportif
comptait
112
000
entreprises
(réalisant 78 Md€ de chiffre d’affaires
et représentant 333  000 emplois)
et
360 
000 
associations
(dotées
de
13
Md€
de
budget
cumulé
et de 115 000 emplois) . La crise
sanitaire
a
lourdement
affecté
le
secteur marchand comme le sport
professionnel et amateur, avec une
perte de chiffre d’affaires estimée
en 2020 à 20 Md€, qui a motivé une
intervention massive des pouvoirs
publics .
Une gestion de crise maîtrisée
dans le cadre de la nouvelle
gouvernance du sport
La gestion de la crise sanitaire s’est
faite dans le contexte de la réforme de
la gouvernance publique du sport . En
effet, la direction des sports (DS) a été
recentrée sur ses missions régaliennes
et l’agence nationale du sport (ANS),
récemment créée, est chargée du
pilotage des principaux dispositifs de
soutien au sport pour tous et au sport
de haut niveau .
La DS et l’ANS ont apporté des réponses
coordonnées pour identifier les besoins
du monde sportif et accompagner
les acteurs de terrain dans la mise
en œuvre des mesures spécifiques .
Parallèlement, les fédérations et le
Comité national olympique et sportif
français (CNOSF) ont joué un rôle
d’interface entre l’État, les clubs et leurs
licenciés . Cependant, l’évolution rapide
des règles applicables, induite par le
contexte sanitaire, a mis sous tension
les associations et les clubs, qui se sont
parfois trouvés dans l’incapacité de
poursuivre leur activité .
Des mesures sectorielles
s’additionnant aux aides
de droit commun
Outre les dispositifs de droit commun,
les fédérations, associations et clubs
ont bénéficié d’aides spécifiques de
l’État . Jusqu’à la rentrée 2020, elles
sont restées limitées aux opérateurs
de la DS (2,31 M€) et à un fonds de
solidarité de 15 M€, déployé par l’ANS .
De septembre 2020 à avril 2021,
l’État a multiplié les annonces d’aides
sectorielles, pour un montant total de
506 M€ .
La succession de ces dispositifs a
pu susciter chez leurs bénéficiaires
un sentiment d’empilement, tandis
que la rapidité de leur déploiement
n’a pu se faire qu’au prix de mesures
d’instruction réduites .
Les aides de l’État en faveur
du sport
5
88
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
Les aides de l’État en faveur du sport
Des mesures essentiellement
tournées vers l’urgence
sans ambition structurelle
ni moyens de contrôle
L’enquête de la Cour a mis en évidence
une
confusion
entre
les
mesures
d’urgence et les mesures de relance,
ces dernières ayant principalement
servi à compléter les premières . Elle a
également montré que la coordination
avec les collectivités territoriales et les
fédérations avait été insuffisante, ce
qui a conduit à la multiplication des
dispositifs .
La Cour a aussi relevé l’absence de
véritable ciblage des bénéficiaires . Ce
constat illustre les lacunes du suivi
financier des fédérations, de leurs
instances territoriales et des clubs .
Mesures de soutien en faveur du mouvement sportif lors de la crise sanitaire
Annonce de la prolongation du fonds de compensation des pertes
de billetterie (130 M€)*
Annonce de mesures complémentaires pour les acteurs du sport :
- Fonds de compensation des pertes de billetterie (107 M€)
- Pass’ sport (100 M€)
- Prolongation du fonds territorial de solidarité (15 M€)
- 5 000 contrats de service civique (32 M€)
7
Décret relevant à 3,1 M€ jusqu’à fin 2020 le plafond des subventions
pouvant être accordées par les collectivités territoriales aux clubs
professionnels et amateurs et relevant à 4 M€ pour la saison 2020/2021
le plafond d’achats de prestations de services
Annonce du plan de relance comprenant 6 mesures pour les acteurs
du sport :
- Soutien à l’emploi des jeunes dans le sport (40 M€)
- Soutien aux clubs et associations (11 M€)
- Transition énergétique des équipements sportifs (50 M€)
- Transformation numérique des fédérations (8 M€]
- Transformation numérique des données et nouveaux services
du sport (1 M€)
- SESAME (12 M€]
4
Création par l’ANS d’un fonds territorial de solidarité pour soutenir
les associations et sportifs (15 M€)
3
Ordonnance donnant la faculté de proposer un avoir aux spectateurs
et partenaires hospitalités des compétitions et événements
ayant dû être annulés
2
- Dotation complémentaire à l’INSEP, aux CREPS, aux écoles
et au musée national du sport (2,31 M€)
- Aide exceptionnelle aux centres équestres et écoles d’équitation
(20,7 M€)
- Fonds d’urgence pour les fédérations en difficulté (0,9 M€)
1
1
er
semestre
2020
7 mai 2020
Juin 2020
Septembre
2020
6 octobre
2020
5
6
Novembre
2020
Avril 2021
2020
2021
* À la date de publication du présent rapport, seuls 100 M€ sur les 130 M€ ont été budgétés.
Source : Cour des comptes
89
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
Par ailleurs, les mesures fédérales et les
aides des collectivités territoriales ont
pu recouper les objectifs des mesures
nationales . La DS se trouve d’ailleurs
dans l’incapacité d’avoir une vision
d’ensemble des aides versées à chaque
structure et donc d’identifier d’éventuels
effets de cumul ou d’aubaine .
De plus, les aides ont été versées
sans condition, alors que leur niveau
important donnait à l’État une base
solide pour demander au mouvement
sportif de mettre en œuvre des
réformes structurelles de son modèle
économique (recherche de nouveaux
publics,
diversification
de
l’offre,
poursuite de la professionnalisation,
soutien à la numérisation) .
L’enquête de la Cour a enfin montré
que les contrôles dans l’attribution
des aides avaient été insuffisants
en raison de calendriers contraints,
d’un manque d’effectif et de critères
d’attribution
des
aides
parfois
trop
généraux .
Cette
situation
a
été aggravée par l’insuffisance des
contrôles
a posteriori
Il est impératif de développer, dans
les
fédérations
comme
à
l’ANS
et à la DS, une véritable fonction
de contrôle de gestion et d’audit .
Au-delà, l’État est confronté au défi
de mieux utiliser son pouvoir de
délégation sur les fédérations . Avec le
contrat de délégation, créé par la loi
du 24 août 2021 confortant le respect
des valeurs de la République, il doit
réaffirmer les droits et obligations
conférés aux fédérations sportives
délégataires
de
prérogatives
de
puissance publique et mettre en place
un dialogue stratégique annuel .
Les aides de l’État en faveur du sport
Recommandations
En conséquence, la Cour formule les
recommandations suivantes :
1.
établir dans les meilleurs délais
une
répartition
consolidée
des
mesures d’urgence et du plan de
relance
déployés
par
l’État,
en
évaluer les impacts et identifier les
éventuels effets d’aubaine et de
cumul
(DS, ANS, DB)
;
2.
renforcer les moyens de suivi et
de contrôle de l’attribution et du
versement des aides
(DS, ANS)
;
3.
mettre en œuvre un suivi financier
des
structures
territoriales
des
fédérations pour consolider leurs
aides
nationales,
territoriales
et
fédérales et apprécier leur situation
financière
(DS, ANS, fédérations)
90
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
La Cour a examiné la contribution
des réserves des caisses de retraite
obligatoire à la résilience du système
de retraite français durant la crise
sanitaire . Le recours à l’activité partielle
et l’octroi de délais pour le versement
des cotisations ont eu des répercussions
sur les ressources des régimes . La
crise a également soumis les marchés
financiers
à
de
fortes
variations .
Ces phénomènes ont entraîné une
mobilisation contrastée des réserves,
tout en illustrant leur utilité .
Des réserves d’inégale
importance aux objectifs variés
Définies comme « l’actif des organismes
qui n’est pas directement nécessaire à
la gestion administrative des régimes »,
les réserves correspondent à des actifs
(actions, obligations, immobilier, etc .)
détenus par les caisses gérant un ou
plusieurs régimes de retraite obligatoire .
En France, la place des régimes par
capitalisation,
dans
lesquels
les
réserves sont la contrepartie des
engagements
individuels
vis-à-vis
des affiliés, est limitée : leur valeur
nette comptable atteignait 36,2 Md€
fin
2020 .
L’essentiel
des
réserves
relève des régimes en répartition
(soit un montant de 124,9  Md€),
principalement
des
régimes
complémentaires, dont l’Agirc-Arrco
(52,9 Md€) .
Les réserves des caisses
de retraite
6
Répartition des réserves entre les différents types de régimes obligatoires
fin 2020 (en valeur nette comptable)
Source : Cour des comptes d’après les données transmises par les régimes
Régimes de base
Régimes spéciaux
Régimes complémentaires
Régimes en capitalisation
FRR
36,2 Md€
23,1 Md€
2,0 Md€
12,8 Md€
110,1 Md€
91
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
La Cour a constaté que les régimes
en répartition qui accumulent des
réserves le font le plus souvent sans
en définir les objectifs, et parfois sans
les intégrer dans le pilotage général
du régime .
Du fait de la diversité des situations,
l’importance
relative
des
réserves
varie
fortement .
Fin
2020,
elles
représentaient entre 7,7 mois de
prestations
pour
l’Agirc-Arcco
et
144 
mois,
soit
douze
années
de
prestations, pour la caisse des avocats .
Les effets contrastés de la crise
sanitaire sur les réserves
des régimes de retraite
La crise sanitaire a eu pour conséquence
une diminution limitée du montant
global des réserves des régimes de
retraites en répartition, qui est passé
de 130,4 Md€ fin 2019 à 124,9 Md€ fin
2020 . En revanche, elle a eu des effets
hétérogènes selon les régimes .
Pour l’Agirc-Arrco, le déploiement
massif de l’activité partielle dans
les entreprises a conduit à un déficit
technique de 5,3 Md€ en 2020 et
nécessité
une
mobilisation
des
réserves à hauteur de 4,1 Md€ .
Pour respecter la règle prudentielle
selon laquelle les réserves doivent
permettre de financer six mois de
prestations à un horizon de 15 ans,
les pensions ont été sous-indexées
en 2021 de 0,5 point par rapport
à l’inflation . De son côté, le régime
complémentaire des indépendants
a prélevé 1 Md€ de réserves pour
financer des aides exceptionnelles .
La
crise
est
survenue
alors
que
l’encadrement
réglementaire
du
placement
des
actifs
est
devenu
incertain .
Sa
refonte,
devenue
indispensable,
devrait
poursuivre
trois
objectifs
:
l’amélioration
de
la transparence de la gestion des
réserves,
le
renforcement
de
la
cohérence de leur pilotage avec les
projections financières de moyen-long
terme des régimes et la construction
d’une capacité d’expertise extérieure
aux caisses de retraite, afin d’apprécier
la solvabilité à long terme des régimes,
la performance de leur gestion et les
risques associés .
Enfin, la crise a conduit à revoir
l’affectation des réserves du Fonds
de
réserve
des
retraites
(FRR) .
La quasi-totalité de son actif est
désormais engagée en faveur de la
Cades pour financer les déficits des
différentes branches de la sécurité
sociale et non plus, comme c’était
l’objectif initial, pour financer des
pensions de retraite dans le futur .
Dans ce contexte, le FRR pourrait
être supprimé et l’éventuel surplus,
correspondant à l’écart de valeur
entre
son
actif
et
son
passif,
transféré à la Cades . Une alternative
consisterait à redéfinir sa nature et ses
missions, par exemple en lui confiant
la gestion de réserves de précaution
conjoncturelle au bénéfice de la Cnav
(voire de l’ensemble des branches de
la sécurité sociale), sous réserve que
soit restauré l’équilibre structurel du
régime général .
Les réserves des caisses de retraite
92
Synthèses du Rapport public annuel 2022 de la Cour des comptes
Les réserves des caisses de retraite
Recommandations
En conséquence, la Cour formule les
recommandations suivantes :
1.
harmoniser la définition comptable
des actifs admis en représentation
des réserves, des produits financiers
et
des
frais
de
gestion
sous
l’égide
de
l’Autorité
des
normes
comptables, afin de permettre le
suivi et la comparabilité des données
financières
(DSS, DB, DG Trésor)
;
2.
actualiser le cadre réglementaire
de la gestion des réserves des caisses
de retraite, en recherchant la mise en
cohérence de leur gestion financière
avec leurs projections de moyen et
long terme
(DSS, DB, DG Trésor)
;
3.
construire une capacité d’expertise,
au sein des administrations de tutelle
ou
d’un
organisme
indépendant,
destinée à apprécier la solvabilité
à
long
terme
des
régimes,
la
cohérence de leur gestion financière
et les risques associés, et à établir un
parangonnage des résultats de ces
gestions
(DSS, DB, DG Trésor)
;
4.
transférer l’actif résiduel du Fonds
de réserve pour les retraites à la
Caisse d’amortissement de la dette
sociale, ou redéfinir sa nature et ses
missions
(DSS, DB, DG Trésor)