13, rue Cambon
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PREMIÈRE CHAMBRE
S 2023-0625/1
PREMIÈRE SECTION
OBSERVATIONS DÉFINITIVES
(Article R. 143-11 du code des juridictions financières)
LE SERVICE DES RETRAITES DE
L’ÉTAT
Exercices 2015-2021
Le présent document, qui a fait l’objet d’une contradiction avec les destinataires concernés,
a été délibéré par la Cour des comptes, le 2 février 2023.
En application de l’article L. 143-6 du code des juridictions financières, la communication de ces
observations est une prérogative de la Cour des comptes, qui a seule compétence pour arrêter la liste des
destinataires.
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
1
TABLE DES MATIÈRES
TABLE DES MATIÈRES
..............................................................................................
1
SYNTHÈSE
......................................................................................................................
3
RECOMMANDATIONS
............................................................................................
7
INTRODUCTION
.......................................................................................................
8
1
UNE REFORME D’ORGANISATION MENEE A SON TERME MAIS
DES REDEPLOIEMENTS D’EFFECTIFS A POURSUIVRE
.............................
12
1.1
Une réforme qui a placé le SRE au centre du dispositif des retraites
..............
12
1.1.1
Une centralisation visant à améliorer la productivité et le service
rendu
........................................................................................................
12
1.1.2
Une montée en charge du SRE comme acteur central de la chaîne
des pensions
.............................................................................................
13
1.1.3
La nécessité d’un déploiement préalable du compte individuel
retraite (CIR)
...........................................................................................
15
1.2
Des décalages de calendrier liés notamment à une gouvernance fragile
.........
16
1.2.1
Une adhésion progressive des employeurs au CIR
.................................
16
1.2.2
Une réforme organisationnelle conduite sur huit ans
..............................
17
1.2.3
Une faiblesse de la gouvernance qui illustre l’implication variable
des employeurs
........................................................................................
19
1.3
Une réforme achevée dans son volet organisationnel mais des
redéploiements d’effectifs à poursuivre
...........................................................
20
1.3.1
Un transfert achevé des principales tâches vers le SRE
..........................
20
1.3.2
Des redéploiements d’effectifs à poursuivre chez les employeurs
.........
23
2
UN SERVICE QUI POURSUIT SA MUTATION POUR MIEUX
ACCOMPAGNER USAGERS ET EMPLOYEURS
............................................
29
2.1
Une activité qui évolue vers l’accompagnement des usagers et des
employeurs
.......................................................................................................
29
2.1.1
Une augmentation modérée du nombre de pensions versées
..................
29
2.1.2
Un renforcement de l’activité d’accueil et d’accompagnement des
usagers
.....................................................................................................
30
2.1.3
Une offre de services à destination des employeurs qui s’enrichit
.........
32
2.2
Des moyens et une organisation qui ont accompagné les évolutions du
service
...............................................................................................................
33
2.2.1
Des implantations qui pourraient être regroupées
...................................
33
2.2.2
Une hausse des effectifs qui suit l’évolution de l’activité
.......................
34
2.2.3
Un budget en forte progression pour investir dans les SI
.......................
37
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
2
2.3
Un réseau des CGR/CSR qui s’est nettement concentré sans aller jusqu’à
la création d’une agence comptable unique
.....................................................
39
2.3.1
Une réduction marquée du nombre de centres
........................................
39
2.3.2
Des disparités d’activité corrigées par le regroupement des centres
.......
41
3
DES ENJEUX D’AMELIORATION DES PERFORMANCES ET DE
MODERNISATION DU SYSTEME D’INFORMATION
...................................
45
3.1
Des performances à améliorer en lien avec les employeurs
.............................
45
3.1.1
Un compte d’affectation spéciale dont la trajectoire devrait être
mieux justifiée
.........................................................................................
45
3.1.2
Des indicateurs de coûts de gestion mal calculés
....................................
48
3.1.3
Des délais de traitement maîtrisés au SRE mais hétérogènes parmi
les employeurs
.........................................................................................
50
3.1.4
Des objectifs de qualité de service atteints
..............................................
52
3.2
Une maîtrise des risques à renforcer
................................................................
53
3.2.1
Une amélioration nécessaire de la qualité des données transmises
par les employeurs
...................................................................................
54
3.2.2
Poursuivre le déploiement et l’amélioration des dispositifs de
contrôle interne
........................................................................................
56
3.2.3
Un contrôle par les CGR en cours d’évolution
.......................................
59
3.2.3.1
La priorisation des contrôles effectués par les CGR
..............................................
59
3.2.3.2
Les contrôles d’existence
.......................................................................................
60
3.2.3.3
Le contrôle des coordonnées bancaires
..................................................................
61
3.3
Une modernisation des SI à mener à terme, un projet à mettre sous
contrôle
.............................................................................................................
61
3.3.1
Une structure SI du SRE à moderniser
....................................................
61
3.3.2
MutSI, un projet de mutualisation accusant d’importants retards et
surcoûts
....................................................................................................
63
3.3.2.1
Une mutualisation des SI dont la complexité a été sous-estimée dès l’origine
......
63
3.3.2.2
Une structuration en trois briques
...........................................................................
64
3.3.2.3
Des décalages préoccupants du calendrier
.............................................................
66
3.3.2.4
D’importants surcoûts déjà constatés
.....................................................................
67
3.3.3
Un pilotage bicéphale qui fait peser des risques sur la poursuite et
l’achèvement du projet
............................................................................
69
3.3.3.1
Une absence de consultation préalable de la direction interministérielle du
numérique (Dinum)
................................................................................................
69
3.3.3.2
Des difficultés qui remettent en question l’équilibre financier du projet
...............
69
3.3.3.3
Une problématique de réversibilité qui illustre la fragilité de la gouvernance
.......
71
ANNEXES
......................................................................................................................
75
Annexe n° 1.
Effectifs consacrés par les employeurs à la gestion des
retraites (en ETP)
..............................................................................................
76
Annexe n° 2.
Organisation de l’accueil des pensionnés
..............................
77
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
3
SYNTHÈSE
Le SRE assure la gestion du régime de retraite et d’invalidité des fonctionnaires de l’État
et verse des pensions d’un montant total de plus de 58 milliards d’euros à près de 2,5 millions
de pensionnés. Il liquide chaque année près de 100 000 nouvelles pensions, un flux relativement
stable sur la période récente.
Une réforme de la gestion des retraites de l’État menée à son terme
mais une réduction des effectifs gestionnaires à poursuivre dans les
services des ministères employeurs
L’État a engagé en 2007 une réforme de la gestion des pensions de retraite de ses
fonctionnaires visant principalement à améliorer le service rendu aux usagers et à faire
progresser la productivité afin de réduire les moyens mobilisés pour la gestion des pensions. Le
service des retraites de l’État (SRE) a été créé en 2009 sous la forme d’un service à compétence
nationale rattaché à la direction générale des finances publiques (DGFiP) afin, d’une part, de
piloter la réforme et, d’autre part, de centraliser certaines tâches auparavant exercées par les
différents employeurs de fonctionnaires de l’État, notamment les ministères.
La mise en
œ
uvre de la réforme a fait l’objet de nombreux décalages de calendrier. La
première étape, qui consistait à déployer le compte individuel retraite (CIR) dans l’ensemble
des employeurs, a été achevée en 2015, trois ans après la date initialement prévue. Le transfert
progressif d’une partie des missions des employeurs vers le SRE est officiellement terminé
depuis décembre 2020. Le service assure désormais le conseil, l’information et
l’accompagnement des usagers en amont et durant leur départ en retraite tandis que les
employeurs conservent un rôle essentiel dans l’alimentation et la correction de la base carrière
constituée par les CIR.
Le redéploiement des effectifs dans les services des ministères employeurs doit être
poursuivi pour tenir compte de cette évolution de l’organisation. Alors que la réduction des
moyens humains consacrés à la gestion des retraites faisait partie des principaux objectifs au
lancement de la réforme, l’État n’a pas clairement défini ses cibles, ni de manière générale ni
dans la répartition des efforts à fournir par chacun des employeurs. Une cible de 1 200 postes
économisés avait été évoquée à l’origine du projet mais n’a pas été actualisée et déclinée par la
suite, ce qui empêche d’évaluer aujourd’hui la mise en
œ
uvre complète de la réforme et
l’atteinte de ses objectifs.
À l’issue de la réforme d’organisation, les effectifs consacrés à la gestion des retraites
ont diminué de 623 équivalents temps-plein (ETP) par rapport à 2011 : ils ont baissé de
525 ETP chez les employeurs et de 130 ETP dans les centres de gestion des retraites (CGR) de
la DGFiP tandis qu’ils ont progressé de 32 ETP au SRE pour accompagner sa montée en charge.
L’effectif total consacré aux pensions est ainsi passé de 2 336 ETP en 2011 à 1 713 ETP en
2021 (- 27 %).
Les efforts d’optimisation doivent être poursuivis par les employeurs afin de supprimer
les activités devenues redondantes avec celles exercées par le SRE. De plus, tous les employeurs
n’ont pas également contribué à la réduction des effectifs jusqu’à présent. Les principaux
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
4
employeurs que sont les ministères chargés des armées, de l’éducation nationale, de
l’enseignement supérieur et de la recherche concentrent désormais 77 % des ETP alors qu’ils
ne représentent que 66 % des départs en retraite et 71 % des CIR. Ils affichent par ailleurs des
ratios de productivité nettement inférieurs à ceux des ministères qui ont plus fortement réduit
et réorganisé leurs services.
Les économies d’effectifs réalisées (623 ETP) sont en net retrait par rapport à la cible
initiale de 1 200 ETP fixée dans le cadre de la RGPP. C’est pourquoi la Cour recommande
d’engager avec les employeurs un processus permettant de poursuivre la réduction des effectifs
qu’ils consacrent à la gestion des retraites, dans le cadre de travaux qui pourraient contribuer à
la revue des dépenses publiques annoncée par le Gouvernement.
Une montée en charge du SRE, dont les perspectives
institutionnelles doivent être clarifiées
Les missions du SRE ont évolué au cours des dernières années en lien avec la réforme,
avec une forte montée en charge des activités liées à l’accueil, à l’information et à
l’accompagnement des usagers, en amont et au moment de leur départ en retraite. Il a aussi
développé son offre de services à destination des employeurs, qui conservent un rôle important
dans la gestion de la base carrière de leurs agents.
Ses moyens ont accompagné cette montée en charge. Après une première phase de
baisse, les effectifs du service ont augmenté de 82 ETP depuis 2015, à mesure que les
employeurs adhéraient au nouveau mode de gestion des retraites, pour un effectif total de
503 ETP en 2022. Son budget s’élève à 45 M
€
, principalement consacrés aux dépenses de
personnel (37 M
€
) et à la modernisation des systèmes d’information (7 M
€
), devenus un enjeu
majeur pour le service.
Le SRE s’appuie sur le réseau comptable des CGR relevant directement de la DGFiP,
ainsi que sur un centre service retraite (CSR) qui assure un rôle de plateforme de contact unique
pour les pensionnés. De 29 à la fin des années 2000, le nombre de ces centres est passé à 17 en
2011 puis à 12 en 2022. Un nouveau regroupement a été opéré en 2023 pour aboutir à six
centres.
Sans aller jusqu’à la mise en place d’un centre de paiement unique, envisagée à la
création du SRE, ce mouvement de concentration a permis d’améliorer et d’homogénéiser la
productivité des centres. Conformément aux engagements gouvernementaux, la DGFiP a
privilégié l’implantation des centres et de leurs antennes dans des villes petites et moyennes.
La transformation du SRE en établissement public administratif et l’intégration du
régime de retraites des fonctionnaires de l’État dans un système universel de retraite, envisagées
dans le cadre de la réforme présentée en janvier 2020, ont été abandonnées au printemps 2020
en raison de la crise sanitaire liée à la Covid-19. Avec le maintien d’un régime spécifique pour
les fonctionnaires de l’État, la création d’une caisse de retraite, comme la Cour le recommandait
en 2016
1
, reste cependant d’actualité afin de renforcer la gouvernance et le pilotage financier
du régime.
1
Cour des comptes,
Les pensions de retraite des fonctionnaires
, octobre 2016.
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
5
Des chantiers d’amélioration et de modernisation à mener à bien, en
particulier en matière de systèmes d’information
Les dépenses et recettes relatives aux pensions versées par le SRE sont regroupées dans
un compte d’affectation spéciale (CAS
Pensions
) doté d’environ 58 Md
€
pour les deux
programmes qui intéressent le service. Compte tenu à la fois de l’importance des masses
budgétaires et du poids des déterminants externes (en particulier du choix des actifs concernant
leur départ en retraite), la qualité de la prévision des recettes et des dépenses est satisfaisante et
en amélioration sur les dernières années. Il ne s’agit toutefois que d’une prévision annuelle dans
le cadre du projet de loi de finances : le solde du CAS se dégradant rapidement, la trajectoire
triennale présentée dans les documents budgétaires devrait être complétée par une présentation
des principales hypothèses retenues et par des projections à plus long terme.
Les indicateurs de performance figurant dans les documents budgétaires ne rendent pas
compte de l’ensemble des coûts supportés par l’État pour la gestion du régime de retraite de ses
fonctionnaires. D’une part, ils n’intègrent qu’une faible partie des effectifs consacrés par les
employeurs à la gestion des retraites et, d’autre part, les coûts de structure supportés par la
DGFiP n’y sont qu’incomplètement répercutés. La Cour recommande par conséquent de revoir
les indicateurs afin d’intégrer l’ensemble des coûts de gestion supportés tant par la DGFiP que
par les autres employeurs.
La maîtrise des risques de la chaîne des pensions est pilotée par le SRE mais fait aussi
appel aux employeurs en amont et aux CGR en aval. La qualité des données transmises par les
employeurs dans le cadre des CIR a été sensiblement améliorée sur les dernières années même
si des progrès restent à réaliser pour fiabiliser le stock des comptes de la base carrière, ce qui
nécessite notamment d’élargir le périmètre du dispositif renforcé de qualité des comptes mis en
place par le SRE avec les employeurs volontaires.
C’est surtout sur la poursuite du renforcement du contrôle interne du SRE que doivent
désormais porter les efforts. L’échantillonnage des contrôles est en effet réduit (1,5 % des
nouvelles pensions) et cible insuffisamment les risques identifiés. De plus, même s’il est en
diminution, le taux d’anomalies détectées reste élevé (6,69 % des dossiers contrôlés en
moyenne sur la période 2015-2021) eu égard à l’importance des enjeux financiers, en particulier
pour les anomalies ayant une incidence financière (2,71 % des dossiers contrôlés entre 2015 et
2021). Des actions doivent donc être entreprises pour réduire le risque de non-conformité des
pensions nouvellement versées et en stock.
Enfin, le SRE est aujourd’hui engagé dans un projet structurant de création d’un système
d’information (SI) mutualisé avec la Caisse des dépôts et consignations (CDC), visant à
moderniser les différentes applications de la chaîne des pensions.
Ce projet de mutualisation des SI a été conçu dans le contexte de la création d’un régime
de retraite universel et d’un rapprochement institutionnel entre la CDC et le SRE. Lancé
fin 2020 malgré l’abandon de cette perspective, le projet accuse déjà des retards et des surcoûts
significatifs qui illustrent les limites de la collaboration entre le SRE et la CDC et l’absence de
pilotage suffisamment clair. La Direction interministérielle pour le numérique (Dinum) n’a pas
été saisie de ce projet, contrairement à ce que prévoit la réglementation, ce qui aurait permis
d’apporter un regard extérieur sur ce programme complexe.
Le projet se heurte en effet à des difficultés techniques qui n’avaient pas été
correctement anticipées. De plus, le caractère bicéphale de la gouvernance et la défense
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
6
d’intérêts parfois divergents entre les deux commanditaires nuisent à la capacité d’arbitrage et
contribuent à l’allongement des délais et à l’augmentation des coûts. La poursuite du
programme, qui porte sur des activités sensibles et des SI complexes, nécessite la mise en place
d’une direction de projet unique, responsable du respect des délais et des budgets et,
in fine
, de
sa réussite opérationnelle.
En conséquence, la Cour a adressé un référé au ministre de l’économie, des finances et
de la souveraineté industrielle et numérique, au ministre de la santé et de la prévention et au
directeur général de la CDC afin de les alerter sur les dérives de coûts et les risques pesant sur
le bon achèvement du programme. Elle leur recommande de s’assurer de la pertinence des
objectifs du SI mutualisé, de renforcer sa gouvernance technique et budgétaire, notamment en
désignant un responsable unique, et de soumettre le projet à une évaluation technique,
organisationnelle et financière de la Dinum.
La conduite de ces chantiers d’amélioration et de modernisation doit s’inscrire dans un
contexte d’évolution possible du cadre institutionnel des régimes de retraite, en particulier avec
l’hypothèse de création d’une caisse de retraite des fonctionnaires de l’État.
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
7
RECOMMANDATIONS
Recommandation n° 1.
(SRE et direction du budget) : Engager avec les employeurs
un processus permettant de poursuivre la réduction des effectifs consacrés à la gestion des
retraites.
Recommandation n° 2.
(direction du budget) : Préciser, dans le projet annuel de
performance du CAS
Pensions
, les hypothèses sous-jacentes à la prévision triennale
d’évolution des dépenses, des recettes et du solde du CAS, et présenter une trajectoire
d’évolution à plus long terme.
Recommandation n° 3.
(SRE et direction du budget) : Revoir les indicateurs de
performance en intégrant, d’une part, l’ensemble des effectifs consacrés par les employeurs à
la gestion des retraites et, d’autre part, les coûts de structure supportés par la DGFiP.
Recommandation n° 4.
(SRE) : Renforcer le contrôle interne en amplifiant le
dispositif renforcé de qualité des comptes (DRQC) auprès des employeurs, en tirant parti des
méthodes d’analyse des risques (
data mining
) et en étendant le contrôle interne au stock des
pensions.
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
8
INTRODUCTION
Le service des retraites de l’État (SRE) assure la gestion administrative et financière du
régime de retraite et d’invalidité des fonctionnaires civils et militaires de l’État régi par le code
des pensions civiles et militaires de retraite. Ce régime est le plus important des six régimes de
retraite de la fonction publique. Il couvre environ 2 millions de cotisants actifs et 2,5 millions
de pensionnés. Seuls les agents publics titulaires y cotisent, les agents contractuels étant affiliés
au régime général et à l’Ircantec
2
.
Schéma n° 1 :
Les régimes de retraite des agents publics
Nota : données budgétaires et démographiques 2021 ; CNRACL : Caisse nationale de retraite des agents des
collectivités locales ; CDC : Caisse des dépôts et consignations ; Cnav : Caisse nationale d’assurance vieillesse
Source : Cour des comptes, d’après le rapport sur les pensions de retraites de la fonction publique annexé au
projet de loi de finances pour 2023
Le nombre de pensionnés
3
du régime de retraite de l’État progresse au fil des années. Il
est passé de 2,386 millions de pensionnés civils et militaires en 2014 à 2,501 millions en 2021,
soit une augmentation de 5 %. Dans le même temps, l’effectif des cotisants a diminué de 6 %,
passant de 2,104 à 1,974 millions. Le ratio démographique
4
, qui était de 1,11 cotisant par
2
Institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l'État et des collectivités publiques.
3
De droits directs (droits acquis par un agent au titre de sa carrière) ou dérivés (suite au décès de l’agent,
il s’agit généralement d’une pension de réversion au profit du conjoint survivant).
4
Le ratio démographique est le rapport entre le nombre de cotisants et le nombre de pensionnés de droits
directs uniquement, au 31 décembre. Le Conseil d’orientation des retraites utilise pour ses comparaisons inter-
régimes un « ratio démographique corrigé », dans lequel les pensionnés de droit dérivé sont pris en compte pour
moitié seulement et qui exclut les pensions temporaires d'orphelins.
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
9
pensionné de droits directs en 2014, est désormais inférieur à 1 (0,97 en 2021) avec davantage
de pensionnés que de cotisants.
Graphique n° 1 :
Nombre de pensionnés et de cotisants et ratio démographique
Nota : Le ratio démographique est le rapport entre le nombre de cotisants et le nombre de pensionnés de droits
directs uniquement, au 31 décembre.
Source : rapport sur les pensions de retraite de la fonction publique annexé au projet de loi de finances pour 2023
Les dépenses et recettes liées aux pensions de retraite et d’invalidité de l’État sont
regroupés dans le programme budgétaire 741 du compte d’affectation spéciale (CAS)
Pensions
.
Le rythme de progression des dépenses était d’environ 4 % par an à la fin des années 2000-
2010 avant de fortement décélérer. Il est inférieur à 2 % depuis 2015 (1,3 % en moyenne sur
2015-2021), principalement du fait du recul de l’âge d’ouverture des droits issu de la réforme
des retraites de 2010.
Le ralentissement a été plus marqué encore pour les recettes, constituées principalement
des contributions des employeurs et des cotisations salariales, en raison de l’érosion de la base
des cotisants liée à la fois à la réduction des recrutements et à la décentralisation croissante des
politiques publiques. Depuis 2018, les recettes progressent moins vite que les dépenses et, après
neuf années de soldes excédentaires, le programme est devenu déficitaire en 2022 de 558 M
€
.
À paramètres constants (en particulier la durée de cotisation et les taux de contribution
des employeurs et de cotisation salariale), cette tendance va s’accentuer et consommer
l’excédent cumulé des exercices précédents (8,9 Md
€
fin 2022)
5
avant la fin de l’année 2025
d’après la prévision triennale du projet de loi de finances pour 2023
6
.
5
Pour davantage de précisions, voir les notes d’analyse de l’exécution budgétaire du CAS
Pensions
de la
Cour des comptes.
6
Projet annuel de performances du CAS
Pensions
annexé au PLF pour 2023.
-
0,20
0,40
0,60
0,80
1,00
1,20
0
500 000
1 000 000
1 500 000
2 000 000
2 500 000
3 000 000
2014
2015
2016
2017
2018
2019
2020
2021
Pensionnés
Cotisants
Ratio démographique (éch. droite)
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
10
Graphique n° 2 :
Solde annuel (en M
€
) et taux de croissance des dépenses et recettes
du programme 741
Source : rapport sur les pensions de retraite de la fonction publique annexé au projet de loi de finances pour 2023
La création du SRE en 2009 comme service à compétence nationale de la direction
générale des finances publiques (DGFiP) s’inscrivait dans un projet de réforme qui visait à lui
transférer une partie importante des missions jusqu’alors exercées par les employeurs de
fonctionnaires de l’État (ministères et organismes publics). Cette réforme avait pour objectif de
moderniser un processus éclaté, relativement inefficient et, par bien des aspects, archaïque. Pour
cela, le SRE devait passer d’un rôle de liquidateur des pensions
7
en bout de chaîne à un rôle de
pilote du processus, en lien étroit avec les employeurs.
En 2015, la Cour des comptes avait effectué un premier contrôle du SRE portant sur les
exercices 2009 à 2014 et dont les principales conclusions avaient été reprises dans le cadre d’un
rapport public thématique sur « Les pensions de retraite des fonctionnaires »
8
.
La réforme des retraites envisagée en 2020 prévoyait notamment l’intégration des
retraites des fonctionnaires dans le régime universel et la transformation du SRE en
établissement public administratif jouant le rôle de caisse de retraite . La suspension de ce projet
en raison de la crise sanitaire liée à la Covid-19 laisse ouverte la question de l’avenir
institutionnel du SRE et de son positionnement dans le paysage des régimes de retraite.
Le présent rapport porte sur les exercices 2015 à 2021 mais couvre plus largement la
mise en
œ
uvre de la réforme depuis 2011 afin d’en examiner l’état d’achèvement et l’atteinte
des objectifs (1). Il analyse les évolutions de l’activité, des moyens et de l’organisation du SRE
et du réseau des centres de gestion des retraites (CGR) (2). Enfin, il présente les perspectives
7
La liquidation est l’opération consistant à calculer les droits à la retraite.
8
Cour des comptes,
Les pensions de retraite des fonctionnaires
, octobre 2016.
-1 000
- 500
-
500
1 000
1 500
2 000
2 500
2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 2022
0%
1%
2%
3%
4%
5%
6%
7%
8%
Solde annuel (éch. gauche)
Croissance des dépenses (éch. droite)
Croissance des recettes (éch. droite)
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
11
d’amélioration de la performance du service, de renforcement de la maîtrise des risques et de
modernisation des systèmes d’information (3).
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
12
1
UNE REFORME D’ORGANISATION MENEE A SON TERME
MAIS DES REDEPLOIEMENTS D’EFFECTIFS A POURSUIVRE
Fin 2020, les derniers employeurs d’agents de l’État qui ne l’avaient pas encore fait ont
basculé dans la nouvelle organisation de gestion des retraites, marquant ainsi l’achèvement d’un
mouvement commencé plus d’une décennie auparavant. Cette réforme a été accompagnée
d’une montée en charge du SRE, qui a progressivement centralisé des tâches auparavant
effectuées par ces employeurs.
1.1
Une réforme qui a placé le SRE au centre du dispositif des retraites
1.1.1
Une centralisation visant à améliorer la productivité et le service rendu
La réforme de la gestion des retraites de l’État est le fruit du constat dressé au début des
années 2000 d’une fragmentation du système alors en vigueur. Dans un rapport public
thématique publié en avril 2003
9
, la Cour des comptes appelait ainsi à une «
entreprise très
profonde de modernisation
» portant à la fois sur le cadre budgétaire des retraites de l’État et
sur l’organisation et la gestion de ce régime.
En application de la loi organique relative aux lois de finances du 1
er
août 2001, le cadre
budgétaire a été modernisé avec la création en 2006
10
d’un compte d’affectation spéciale
retraçant l’ensemble des opérations budgétaires en recettes et en dépenses relatives aux régimes
de retraite et d’invalidité de l’État. L’établissement de ce compte unique a mis fin à une
présentation éclatée et difficilement lisible, fruit de l’histoire du régime, qui ne permettait d’en
appréhender ni l’équilibre financier ni les perspectives à moyen et long termes.
Le chantier portant sur l’organisation et la gestion du régime a mis plus de temps à être
engagé. À l’occasion de son rapport public annuel de février 2008
11
, la Cour des comptes jugeait
que la situation n’avait guère changé par rapport au constat effectué en 2003 et que «
la gestion
des pensions de retraite des fonctionnaires de l’État [était] un cas typique des difficultés
chroniques que l’État [continuait] d’éprouver pour moderniser son administration
».
Cette organisation était notamment marquée par la fragmentation de la chaîne de
traitement entre trois catégories d’intervenants :
-
les employeurs, qui assuraient l’information des agents, effectuaient des simulations
de pensions et reconstituaient la carrière de leurs agents au moment du départ en
retraite pour établir le dossier de liquidation ;
9
Cour des comptes,
Les pensions des fonctionnaires civils de l’État
, rapport au Président de la
République, avril 2003.
10
Article 51 de la
loi n° 2005-1719
du 30 décembre 2005 de finances pour 2006.
11
Cour des comptes, «
La réforme de la gestion des pensions des fonctionnaires de l’État
», in
Rapport
public annuel 2008
, février 2008.
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
13
-
le service des pensions de l’État, relevant directement du ministère des comptes
publics, qui contrôlait l’exactitude des données et effectuait la liquidation (calcul
des droits) et la concession de la pension ;
-
des centres régionaux de pensions, relevant de la direction générale de la
comptabilité publique (intégrée au sein de la DGFiP en 2008), qui effectuaient le
paiement des pensions.
En l’absence d’une direction d’ensemble, l’action de ces différents intervenants n’était
pas suffisamment coordonnée. Cette fragmentation était accentuée par la diversité des systèmes
d’information utilisés, qui contribuait à l’hétérogénéité des procédures et aux difficultés de
pilotage de la chaîne des pensions.
Dans le cadre de sa « révision générale des politiques publiques », l’État a engagé à
partir de 2008 une réforme d’ampleur visant à la centralisation de la gestion des retraites de
l’État. Celle-ci devait notamment permettre le redéploiement de 1 200 à 1 800 postes sur les
2 700 consacrés à ces activités, par la suppression des unités ministérielles au profit d’un service
unique centralisé
12
. Outre ces économies de postes, la réforme avait pour objectif d’améliorer
le service rendu aux usagers, c’est-à-dire à la fois l’information donnée aux agents tout au long
de leur carrière (droit information retraite) et la capacité d’accueil et de réponse aux questions
et sollicitations des actifs et des pensionnés.
1.1.2
Une montée en charge du SRE comme acteur central de la chaîne des
pensions
Dans le cadre de cette réforme, le service des pensions de l’État a été remplacé en 2009
13
par le SRE. Alors que son prédécesseur avait le statut de service d’administration centrale du
ministère du budget, des comptes publics et de la fonction publique, le SRE est un service à
compétence nationale rattaché au directeur général des finances publiques.
Suivant les termes du décret de 2009, complété et modifié en 2014
14
et en 2022
15
, le
SRE est chargé de «
la mise en
œ
uvre de la gestion administrative et financière du régime de
retraite et d'invalidité des fonctionnaires civils et militaires de l'État
»
16
. Ses compétences
s’exercent sur plusieurs régimes au titre de la retraite, de la réparation ou de la reconnaissance
de la Nation :
-
le régime des pensions civiles de retraite (fonctionnaires de l’État et magistrats) ;
-
le régime des pensions militaires de retraite ;
-
le régime des allocations temporaires d'invalidité des fonctionnaires ;
-
le régime des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ;
-
la retraite du combattant ;
-
les pensions relevant du régime local d'Alsace-Moselle, à savoir la retraite des
ministres des cultes catholiques, protestants et israélites, les aumôniers des prisons
et les enseignants en théologie des universités de Metz et Strasbourg ;
12
Conseil de modernisation des politiques publiques du 12 décembre 2007
.
13
Décret n° 2009-1052 du 26 août 2009
.
14
Décret n° 2014-1551 du 19 décembre 2014
.
15
Décret n° 2022-394 du 18 mars 2022
.
16
Article 2 du
décret n° 2009-1052 du 26 août 2009
.
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
14
-
les traitements attachés à la Légion d'honneur et à la Médaille militaire.
Le SRE assure par ailleurs la gestion de plusieurs régimes de retraite ou de réparation
en voie d’extinction, liés à la Seconde Guerre mondiale, aux territoires antérieurement sous
souveraineté française ou à des établissements publics fermés, comme l’allocation de
reconnaissance des anciens supplétifs, les pensions des anciens agents du chemin de fer franco-
éthiopien ou encore les pensions de l’office de radiodiffusion-télévision française (ORTF).
Les bénéficiaires de ces différents régimes de retraite le sont en vertu de droits directs
(droits acquis par un agent au titre de sa carrière) ou dérivés (suite au décès de l’agent, il s’agit
généralement d’une pension de réversion au profit du conjoint survivant ou divorcé).
L’ensemble de ces pensions représente un montant d’environ 58 Md
€
, dont 57 Md
€
de
pensions de retraite des fonctionnaires civils et militaires.
Tableau n° 1 :
Montant des pensions versées au titre des régimes gérés par le SRE (en M
€
)
Nature de la pension
Montant 2021
Retraite des fonctionnaires civils
46 697
Retraite des militaires
10 102
Pensions militaires d’invalidité, des victimes de guerre et d’actes de terrorisme
852
Reconnaissance de la Nation
640
Allocations temporaires d'invalidité des fonctionnaires
134
Allocations de reconnaissance des anciens supplétifs
19
Pensions d'Alsace-Moselle
16
Pensions des sapeurs-pompiers et des anciens agents de la défense passive
victimes d'accidents
12
Pensions de l'ORTF
0,095
Pensions des anciens agents des chemins de fer franco-éthiopiens
0,037
Total
58 472
Sources : Rapport annuel de performance pour 2021 et Note d’analyse de l’exécution budgétaire 2021 du CAS
Pensions de la Cour des comptes
Enfin, le SRE est le représentant unique du régime des retraites de l’État auprès des
organismes de retraite et des instances de gouvernance des régimes de retraite.
Dans son rapport public thématique d’octobre 2016, la Cour recommandait la création
d’une caisse de retraite des fonctionnaires de l’État, qui «
constituerait une prolongation
logique des réformes engagées depuis une dizaine d’années
» et permettrait un meilleur
pilotage financier du régime de retraite de l’État. La transformation du SRE en établissement
public administratif, envisagée en 2020, allait dans ce sens.
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
15
Le SRE dans le projet de réforme de 2020
En janvier 2020, le gouvernement a présenté un projet de loi «
instituant un système
universel de retraite
»
17
couvrant l’ensemble des assurés, quels que soient leur statut et leur
activité professionnelle, et qui aurait donc trouvé à s’appliquer aux fonctionnaires de l’État. Il
prévoyait notamment la création d’un titre spécifique dans le code de la sécurité sociale pour
intégrer au système universel les fonctionnaires de l’État, territoriaux, hospitaliers, les
parlementaires, les magistrats de l’ordre judiciaire et les militaires.
L’article 53 du projet de loi, amendé au cours de son examen par l’Assemblée nationale,
prévoyait la transformation du SRE en établissement public administratif placé sous la tutelle
des ministres chargés du budget, de la fonction publique et de la sécurité sociale. Dénommé
« Établissement de retraite et de prévoyance de la fonction publique de l’État », il aurait eu
vocation à gérer le régime spécial de retraite des fonctionnaires de l’État, des magistrats et des
militaires.
Ce changement de statut aurait entraîné une évolution de la gouvernance avec, en
particulier, la création d’un conseil d’administration comprenant des représentants des
organisations syndicales et des employeurs publics ainsi que des personnalités qualifiées.
La transformation du SRE en établissement public administratif devait permettre de le
placer sous le pilotage et le contrôle de la « Caisse nationale de retraite universelle » tout en
conservant un organisme spécifiquement consacré la gestion de la retraite des fonctionnaires de
l’État «
compte tenu des spécificités qui seront applicables à ces agents publics
».
18
L’étude
d’impact annexée au projet de loi considérait que son périmètre aurait pu être élargi au versant
territorial de la fonction publique dans la mesure où «
la recherche de l’efficacité militerait en
faveur d’une gestion commune [des fonctionnaires territoriaux] avec les fonctionnaires d’État
dès lors qu’ils seront soumis aux mêmes paramètres dans le système universel
».
Le texte adopté par l’Assemblée nationale a été transmis au Sénat le 4 mars 2020. Le
Président de la République a toutefois annoncé le 16 mars 2020 l’abandon de la réforme
systémique en raison de la crise sanitaire liée à la Covid-19.
Contrairement au projet présenté début 2020, la réforme des retraites engagée dans le
cadre du projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 ne prévoit ni
la disparition du régime des pensions civiles et militaires de retraite, ni une évolution du statut
du SRE. La création d’une caisse de retraite des fonctionnaires de l’État, recommandée par la
Cour en 2016, reste par conséquent d’actualité afin de renforcer la gouvernance du régime et
son pilotage financier.
1.1.3
La nécessité d’un déploiement préalable du compte individuel
retraite (CIR)
À ses débuts, la réforme des retraites de l’État se heurtait notamment à l’absence de
système d’information commun assurant le partage entre les différents employeurs et le SRE
des éléments concernant leurs agents. Par conséquent, il revenait à chaque ministère de
17
Projet de loi n° 2623, enregistré à la présidence de l’Assemblée nationale le 24 janvier 2020.
18
Étude d’impact annexée au projet de loi n° 2623.
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
16
reconstituer l’ensemble de la carrière de ses agents au moment du départ à la retraite, activité
longue et fastidieuse, avant de transmettre le dossier complet au service des pensions de l’État
qui en assurait le contrôle et la liquidation pour finalement concéder la pension. Comme la Cour
l’a montré à plusieurs reprises dans le passé, ce dispositif était à la fois peu productif et
coûteux
19
.
Un important prérequis à l’évolution des procédures était donc la création d’un dossier
partagé propre à chaque agent, rassemblant au fur et à mesure de la carrière toutes les
informations nécessaires à la liquidation de la pension. Ce jalon technique a été franchi avec
l’instauration en août 2010
20
du CIR comme base unique et commune à tous les employeurs
pour la liquidation et la concession de la pension de retraite.
La gestion du CIR est confiée au SRE tandis que son alimentation relève des différents
employeurs. Pour cela, le SRE met à disposition de ces derniers un « portail des éléments
transmis pour la retraite de l’État en ligne » (Pétrel) alimenté par leurs systèmes d’information
de gestion des ressources humaines.
Un CIR est créé pour chaque agent au moment de son affiliation au régime des pensions
civiles et militaires de retraite. Les employeurs conservent la possibilité d’y corriger les
informations portant sur les deux dernières années de carrière et l’année en cours, après quoi
seul le SRE est habilité à les modifier, sur la base des justificatifs fournis par les agents ou leurs
employeurs.
1.2
Des décalages de calendrier liés notamment à une gouvernance fragile
1.2.1
Une adhésion progressive des employeurs au CIR
Le calendrier initialement fixé par le Conseil de la modernisation des politiques
publiques de décembre 2007 prévoyait une mise en
œ
uvre rapide de la réforme de la chaîne des
pensions et une liquidation centralisée pour tous les fonctionnaires concernés «
à compter de
2010-2011
» avec la suppression progressive des services ministériels et la création d’une entité
unique de paiement.
Le périmètre retenu pour la réforme portait sur les 32 employeurs relevant du régime
des pensions civiles et militaires de l’État, c’est-à-dire à la fois les ministères et administrations
centrales et des opérateurs comme Météo France, Orange ou encore La Poste.
La constitution des CIR nécessitait leur alimentation par les employeurs pour
reconstituer la carrière des agents. Leur déploiement a commencé en 2010 et devait initialement
être terminé «
au plus tard le 31 décembre 2012
»
21
.
19
Voir notamment les rapports précités de 2003, 2008 et 2012.
20
Article 1
er
du décret n°2010-981 du 26 août 2010.
21
Décret n° 2010-981 du 26 août 2010.
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
17
Dans son rapport public annuel 2012
22
, la Cour signalait cependant qu’un retard
préoccupant avait été pris et de fait, le taux de complétude et de fiabilisation des comptes
transmis par les employeurs ayant déployé le CIR n’était que de 85 % à la fin 2012.
Au 1
er
janvier 2013, bien que 24 employeurs de l’État sur 32 soient entrés dans le
nouveau cadre juridique du CIR, ils ne représentaient que le quart des comptes du périmètre
puisque plusieurs ministères aux effectifs nombreux n’étaient pas en mesure d’intégrer le
dispositif, en particulier ceux de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur, de
l’intérieur, ainsi que de la défense. L’échéance a donc été repoussée à fin 2014
23
puis fin 2015
24
,
ce qui a permis aux derniers ministères d’achever le déploiement du CIR en leur sein.
Graphique n° 3 :
Déploiement du CIR en nombre d’employeurs et de comptes
Source : SRE
La mise en
œ
uvre du CIR par les employeurs de l’État a ainsi été terminée avec trois
ans de retard sur le calendrier initial. Elle a été accompagnée par le déploiement de la plateforme
Pétrel, préalable nécessaire à la centralisation de la gestion des retraites au sein du SRE.
1.2.2
Une réforme organisationnelle conduite sur huit ans
L’objectif porté par la réforme était de centraliser la gestion des retraites de l’État au
sein du SRE, du traitement de la demande de départ jusqu’au paiement de la pension.
Cependant, les difficultés rencontrées par les employeurs pour compléter et fiabiliser les CIR
ainsi que la nécessité de moderniser leurs SI RH pour les adapter aux exigences du nouveau
processus ont conduit à une gestion différenciée des dossiers de départ en retraite pendant
plusieurs années. Cette situation transitoire n’a pris fin que récemment.
22
Cour des comptes, « La gestion des pensions des fonctionnaires de l’État : le risque d’une réforme
tronquée » in
Rapport public annuel 2012
, février 2012.
23
Décret n° 2013-186 du 1
er
mars 2013.
24
Décret n° 2014-1689 du 30 décembre 2014.
525 742
571 175
2 133 043
0
0
24
29
32
0
500 000
1 000 000
1 500 000
2 000 000
2 500 000
0
5
10
15
20
25
30
35
2011
2012
2013
2014
2015
Nombre de comptes (échelle
droite)
Nombre d'employeurs
(échelle gauche)
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
18
Trois modes de gestion ont coexisté jusqu’en 2020 :
-
l’organisation-cible (dite « groupe 1 »), c’est-à-dire les administrations ayant achevé
le transfert au SRE des principales tâches liées au départ à la retraite de leurs agents ;
-
une organisation intermédiaire (« groupe 2 ») : les employeurs recevaient et
instruisaient la demande de départ à la retraite sur la base du CIR avant de
transmettre le dossier complet au SRE. Cela impliquait le maintien d’une activité
d’accompagnement et de conseil des agents avec un niveau d’expertise suffisant
pour répondre à des questions complexes ;
-
le maintien de l’organisation antérieure (« groupe 3 ») : à la différence du groupe 2,
celui-ci rassemblait les administrations n’ayant pas encore adopté le CIR comme
base de calcul des droits à la retraite.
Au regard du retard pris par l’État, la Cour considérait dans son rapport public
annuel 2012, qu’il existait «
un risque réel de voir la réorganisation prévue remise en cause
sous l’effet du maintien de services de pensions dans les ministères employeurs
»
25
. Établissant
le même constat en 2016
26
, la Cour recommandait de «
réaffirmer l’objectif du transfert au SRE
de la totalité des missions d’instruction des dossiers de demande de retraite et d’information
pour toutes les administrations et [de] réduire significativement son calendrier
».
Le troisième groupe a disparu en 2015 avec le déploiement de Pétrel et du CIR au sein
des ministères des armées et de l’intérieur, qui représentaient 26 % des comptes du périmètre.
La transition du groupe 2 vers le groupe 1, c’est-à-dire l’intégration des employeurs dans
l’organisation-cible de la réforme, a été très progressive et ne s’est achevée qu’en 2020.
Graphique n° 4 :
Intégration des employeurs dans le groupe 1
Source : SRE
Bien que les ministères de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur, de
l’intérieur et des armées aient été parmi les derniers à intégrer définitivement le groupe 1, le
déploiement d’une nouvelle organisation a été progressive en leur sein. Ainsi, pour les
25
Cour des comptes, « La gestion des pensions des fonctionnaires de l’État : le risque d’une réforme
tronquée » in
Rapport public annuel 2012
, février 2012.
26
Cour des comptes,
Les pensions de retraite des fonctionnaires
, octobre 2016.
0
0 95 806
227 547
229 100
316 165
512 619
856 072
1 490 638
2 133 043
-
-
6
9
11
15
19
24
25
32
0
500 000
1 000 000
1 500 000
2 000 000
2 500 000
-
5
10
15
20
25
30
35
Nombre de comptes (échelle
droite)
Nombre d'employeurs
(échelle gauche)
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
19
ministères de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur, la réforme a été mise en
œ
uvre dès 2016 dans une académie avant de s’appliquer à un nombre croissant d’académies et
de pôles de l’enseignement supérieur. De même, la marine et la gendarmerie ont été intégrées
au nouveau système en 2019, avant que le reste des ministères des armées et de l’intérieur ne
suive en 2020.
1.2.3
Une faiblesse de la gouvernance qui illustre l’implication variable des
employeurs
Le retard pris dans la mise en
œ
uvre de la réforme a notamment tenu à la difficulté à
faire accepter à tous les employeurs le transfert au SRE des tâches auparavant effectuées par
leurs services faute d’une gouvernance en capacité d’imposer les arbitrages. Le SRE étant
«
responsable du processus de gestion des pensions
»
27
, il a eu un rôle prééminent dans le
pilotage de la réforme, sans pour autant disposer d’un pouvoir de contrainte sur les employeurs
concernés.
Concomitamment à la création du SRE, l’État a institué en août 2009 un «
comité de
coordination stratégique en matière de retraite de l’État
»
28
, placé auprès des ministres chargés
du budget et de la fonction publique, dont le rôle était de s’assurer de «
la mise en
œ
uvre des
orientations du projet de modernisation de la gestion des retraites de l’État
». Ce comité,
initialement créé pour une durée de cinq ans, a été prolongé d’un an en 2014
29
puis de cinq ans
en 2015
30
avant d’être supprimé fin 2019
31
.
Ce comité de coordination stratégique (CCS) était composé du directeur général de
l’administration et de la fonction publique, du directeur du budget, du directeur général des
finances publiques et des secrétaires généraux des ministères, ou de leurs représentants. Il était
présidé par le directeur général des finances publiques, qui en assurait aussi le secrétariat avec
l’appui du SRE.
Dans son rapport public annuel 2012, la Cour alertait sur les faiblesses de cette
gouvernance et soulignait la nécessité de renforcer le niveau de représentation des ministères
au CCS par une implication «
au moins des directeurs des ressources humaines, voire de leurs
secrétaires généraux
»
32
. Pour autant, aucun ministère n’a été représenté par une directrice ou
un directeur durant les neuf réunions du CCS tenues entre 2015 et 2019
33
.
Ce faible niveau de représentation des employeurs a pu contribuer à allonger le
calendrier de la réforme faute d’une instance d’arbitrage suffisamment légitime. Il est de ce
point de vue notable que le CCS n’ait été réuni qu’une fois en 2018 et 2019 et que sa dernière
27
Décret n° 2009-1052 du 26 août 2009.
28
Décret n° 2009-1054 du 24 août 2009.
29
Décret n° 2014-592 du 6 juin 2014.
30
Décret n° 2015-572 du 27 mai 2015.
31
Décret n° 2019-1179 du 15 novembre 2019.
32
Cour des comptes, « La gestion des pensions des fonctionnaires de l’État : le risque d’une réforme
tronquée » in
Rapport public annuel 2012
, février 2012.
33
À l’exception du ministère de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur, de la recherche et de
l’innovation lors de la réunion de juin 2019 (présence de la directrice des affaires financières) et de la DGFiP, qui
assurait la présidence du CCS.
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
20
réunion se soit tenue en juin 2019, alors même que sept employeurs représentant 30 % du total
des CIR du périmètre n’avaient pas encore rejoint la nouvelle organisation.
Les faiblesses de cette gouvernance ont été en partie compensées par l’établissement
d’un dialogue direct entre le SRE et les principaux ministères à l’occasion de rencontres
bilatérales en complément des CCS.
De plus, un comité des correspondants ministériels et référents (Corref) a été établi afin
de réunir les correspondants techniques des principaux employeurs, ainsi qu’un comité de
pilotage spécifique pour les établissements publics et autres organismes employeurs de plus de
500 fonctionnaires d’État. Le premier continue de se réunir tandis que le SRE a arrêté le second
en 2014 du fait de la faible participation des employeurs invités.
Avec l’achèvement du basculement vers l’organisation centralisée de la chaîne des
pensions, le SRE et les employeurs sont entrés dans une nouvelle phase et la gouvernance
devrait être adaptée pour pérenniser la relation construite durant la décennie écoulée. Le Corref
continue d’être une instance importante de consultation et de dialogue technique mais ne réunit
pas l’ensemble des employeurs (13 employeurs n’y sont pas conviés).
Les rencontres annuelles organisées par le SRE avec tous les employeurs sont une
occasion utile et nécessaire d’échanges mais ne peuvent suffire à les associer pleinement à la
définition des processus, qui impliquent généralement des évolutions de leurs systèmes
d’information de gestion des ressources humaines. Il est important que le SRE maintienne le
dialogue technique noué dans le cadre de la réforme, en particulier par son offre de services aux
employeurs (cf.
infra
) et par l’établissement de rencontres régulières bilatérales et multilatérales
afin de ne pas exclure les plus petits employeurs.
1.3
Une réforme achevée dans son volet organisationnel mais des
redéploiements d’effectifs à poursuivre
1.3.1
Un transfert achevé des principales tâches vers le SRE
La mise en place du CIR parmi tous les employeurs de l’État a permis le basculement
progressif de tâches vers le SRE. Alors que celui-ci effectuait auparavant principalement la
liquidation et la concession de la pension ainsi que certaines activités relatives au droit
information retraite, les employeurs lui ont transféré la plupart des étapes situées en amont du
processus : la simulation retraite, la réception de la demande de pension ainsi que la relation
avec les usagers et la préparation du dossier de départ en retraite.
Les employeurs conservent la responsabilité d’étapes importantes dans le processus, à
commencer par l’alimentation des CIR. Ils assurent aussi l’information RH de premier niveau
(procédure, interlocuteurs, échéances etc.) et les opérations relatives à la fin de carrière, en
particulier la radiation des cadres, et la validation des services auxiliaires (VSA) effectués en
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
21
qualité d’agents non titulaires par les fonctionnaires titularisés avant le 1
er
janvier 2013. Ce
dernier dispositif est en voie d’extinction
34
.
Une expérimentation a débuté en 2022 concernant la dématérialisation de la procédure
de radiation des cadres sur le périmètre de la DGFiP. L’automatisation de cette démarche
pourrait toutefois nécessiter une évolution des SI RH des employeurs.
Schéma n° 2 :
Répartition des tâches entre les employeurs et le SRE avant et après la réforme
Source : Cour des comptes d’après des informations du SRE
La dématérialisation des outils et procédures liés à la retraite a fortement contribué à la
mise en
œ
uvre de la réforme à la fois en améliorant l’accessibilité des informations et services
offerts par le SRE et en permettant un traitement plus efficace des dossiers. Le site
info-
retraite.fr
a été lancé en 2005 par le groupement d’intérêt public « Info retraite » créé en 2003.
À partir de 2014 et de la création du GIP « Union retraite », le site a été enrichi pour devenir le
portail commun inter-régimes (PCI) et offrir un nombre croissant de services.
34
Les demandes devaient être déposées avant le 1
er
janvier 2015.
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
22
Grâce à ce portail, les usagers peuvent réaliser de manière autonome des simulations de
leur pension de retraite avec l’outil Marel (« ma retraite en ligne ») depuis 2016 et effectuer
leur demande de retraite en ligne depuis 2019. Celle-ci est ensuite transmise à tous les régimes
concernés avec l’ensemble des pièces et documents fournis par l’assuré. Chaque régime est
responsable du traitement du dossier pour les droits et périodes qui le concernent.
Le développement du PCI a été étroitement articulé avec celui de l’Espace numérique
sécurisé des agents publics de l’État (Ensap). Celui-ci a d’abord permis la dématérialisation des
bulletins de paie (2017), puis la consultation du CIR et la réalisation de simulations de retraite
(2018). Depuis décembre 2019, les agents de l’État peuvent réaliser leur demande de départ en
retraite sur l’Ensap et y trouver certains documents comme les bulletins de pension et les
attestations fiscales.
Mi-2022, plus de 3,1 millions de comptes avaient été ouverts sur l’Ensap à rapporter
aux 5,3 millions d’agents actifs et pensionnés éligibles. Parmi les usagers retraités, 30 % avaient
créé un compte, ce qui témoigne d’une bonne appropriation de l’outil.
Il convient toutefois de noter que le site de l’Ensap n’est actuellement pas conforme aux
dispositions relatives à l’accessibilité aux personnes handicapées
35
(le SRE ayant indiqué qu’il
était considéré comme étant d’une « conformité partielle »). S’agissant d’un site à destination
de tous les agents de l’État, un effort particulier devrait être réalisé afin d’en garantir
l’accessibilité. De même, le site du SRE (retraitesdeletat.gouv.fr) ne fait pas mention de sa
conformité aux règles relatives à l’accessibilité, comme le prévoient les dispositions de la loi
de 2005.
Les agents de l’État peuvent réaliser leur demande de départ à la retraite sur le PCI ou
sur l’Ensap. Cependant, seul le premier portail communique l’information à tous les régimes
concernés. Environ un tiers des demandes de départ à la retraite de fonctionnaires de l’État est
réalisé sur le portail commun tandis que les deux tiers restants sont effectués sur l’Ensap.
Dans tous les cas, les demandeurs doivent utiliser l’Ensap pour fournir des pièces
justificatives spécifiques au régime de retraite de l’État et y suivre l’avancement de leur dossier.
De plus, seul l’Ensap donne pour l’instant accès à l’outil de simulation de pension développé
par le SRE qui prend en compte les spécificités liées à certains statuts particuliers. Cette
situation a vocation à évoluer et l’outil Marel disponible sur le PCI est progressivement enrichi
pour couvrir à terme toutes les situations statutaires.
Enfin, les données gérées par le SRE intégreront à l’avenir le « répertoire de gestion des
carrières unique » (RGCU), institué en 2010 et dont la réalisation a été confiée à la Caisse
nationale d’assurance vieillesse (Cnav). Il regroupera à terme les données élémentaires de
carrière de tous les régimes, de base et complémentaires. Chaque gestionnaire de régime aura
alors accès à l’ensemble de la carrière de l’assuré, ce qui devrait simplifier et fiabiliser le
traitement des dossiers et les échanges d’informations.
Le calendrier initial du projet prévoyait une alimentation du répertoire par le SRE au
plus tard le 31 décembre 2022
36
. Cependant, les retards pris par la Cnav dans le pilotage et la
mise en
œ
uvre du RGCU ont conduit à repousser cette échéance. Bien qu’aucune nouvelle date
35
Loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la
citoyenneté des personnes handicapées.
36
Décret 2018-154 du 1
er
mars 2018 relatif au répertoire de gestion des carrières unique.
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
23
n’ait été fixée, le SRE prépare le raccordement de son SI au RGCU et l’utilisation des
différentes interfaces.
1.3.2
Des redéploiements d’effectifs à poursuivre chez les employeurs
Au lancement de la réforme en 2007, le nombre de postes consacrés à la gestion des
retraites des fonctionnaires de l’État était évalué à près de 2 700 ETP (pour environ
3 000 agents). La réforme devait permettre de redéployer de l’ordre de 1 200 ETP, soit une
réduction de 44 % des moyens humains consacrés à ces missions. Cette cible, évoquée par le
Conseil de modernisation des politiques publiques de décembre 2007, n’a cependant pas fait
l’objet d’un arbitrage interministériel formel. De plus, en l’absence de détail sur la répartition
des effectifs au sein des différents employeurs, le partage des redéploiements à opérer n’a pas
été arbitré, ce qui en rend le suivi difficile.
Un recensement des effectifs concernés a été mis en place par le SRE à partir de 2012,
sur la base de déclarations annuelles effectuées par les employeurs, indiquant à la fois le nombre
d’ETP, la catégorie des agents et les missions correspondantes.
Au 31 décembre 2011, les
employeurs déclaraient employer 1 426 ETP pour le fonctionnement du régime des retraites,
auxquels s’ajoutaient 471 ETP employés par le SRE et 440 par les CGR, soit un total de
2 336 ETP.
La cible initiale de redéploiements de postes n’a pas été actualisée à l’aune de ce
recensement et aucun autre objectif chiffré n’a été fixé dans le cadre de la réforme, ni de manière
globale, ni dans le détail des efforts à fournir par chacun des employeurs. Dès lors, l’évaluation
des résultats en matière de redéploiements de postes est rendue difficile, alors même que la
réduction des effectifs consacrés à ces missions était un des principaux objectifs affichés au
lancement de la réforme.
Après une décennie de réorganisation, l’effectif au 31 décembre 2021 était de 901 ETP
chez les employeurs, soit une réduction de 525 ETP (37 %). Sur la même période, les effectifs
du SRE ont augmenté de 32 ETP (+ 7 %) et ceux des CGR ont baissé de 130 ETP (- 30 %).
En cumul, le nombre d’ETP consacrés à la gestion des retraites au SRE, dans les CGR
et au sein des employeurs est ainsi passé de 2 336 à 1 713 entre fin 2011 et fin 2021, soit une
différence de 623 ETP (- 28 %), très en deçà de l’objectif de réduction de 1 200 postes (- 44 %)
annoncé en 2007.
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
24
Graphique n° 5 :
Évolution des effectifs au sein des employeurs, des CGR et du SRE
Source : SRE
La réforme ayant conduit à transférer au SRE l’essentiel de la gestion des demandes de
départ en retraite et de l’information des usagers, les réductions de postes chez les employeurs
ont principalement porté sur les fonctions support et SI (- 57 %) et la relation avec les
usagers (- 48 %) (cf. annexe).
Le maintien dans les services des employeurs d’un nombre important d’agents sur les
missions qualifiées de « préparation des départs à la retraite » (50 % des ETP restants) et leur
faible diminution (- 21 % entre 2011 et 2021) illustre cependant la nécessité de poursuivre les
redéploiements pour tirer pleinement les conséquences des transferts de missions opérés vers
le SRE. L’accompagnement et le conseil des usagers sont en effet désormais centralisés au SRE
et n’ont plus lieu d’être réalisés par les employeurs.
De plus, tous les employeurs de l’État n’ont pas contribué de la même façon à la
réduction des effectifs (cf. annexe 1). Les principales baisses en valeur absolue concernent les
administrations des ministères de l’éducation nationale, de la jeunesse, des sports, de
l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation (- 233 ETP) et du ministère de
l’intérieur (- 194 ETP).
Les 10 principaux employeurs en effectifs consacrés à la gestion des retraites
concentraient 95 % des ETP en 2011 et 96 % en 2021. Ils ont représenté 91 % des 524 postes
redéployés. Les situations et les efforts consentis sont très variables au sein de ce groupe :
-
seuls quatre employeurs ont réduit leurs effectifs plus que la moyenne de 37 % ;
-
quatre employeurs ont réduit leurs effectifs de moins de 37 % ;
-
deux employeurs ont vu leurs effectifs déclarés augmenter entre 2011 et 2021 : le
ministère de la justice a doublé les effectifs déclarés (+ 14,5) en raison d’une
réorganisation de ses processus de gestion opérée en 2016 qui aurait conduit à mieux
identifier les agents concernés. De même, le ministère des armées a augmenté de
26,2 ETP les effectifs identifiés à la suite du passage dans le groupe 1 en 2020.
La situation de ces deux employeurs illustre la fragilité méthodologique des déclarations
effectuées chaque année au SRE, malgré les notes d’harmonisation produites par ce dernier.
440
309
1 426
901
471
503
2 336
1 713
-
500
1 000
1 500
2 000
2 500
2011
2012
2013
2014
2015
2016
2017
2018
2019
2020
2021
CGR
Employeurs
SRE
Total
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
25
Cette diversité des efforts consentis se double d’une très grande disparité de la
productivité à l’issue de la réforme, mesurée par le nombre de CIR et de départs en retraite
rapporté à l’effectif (ETP). Il en ressort que, d’une part, les 10 premiers employeurs en nombre
d’ETP consacrés à la gestion des retraites ne sont pas les 10 premiers en nombre de CIR ou de
départs en retraite : le CNRS se positionne par exemple devant le ministère des affaires
étrangères et le ministère de la culture sur ces deux grandeurs.
D’autre part, le nombre de départs en retraite par ETP était, fin 2021, de 171 dans les
ministères sociaux et de 149 dans les ministères économiques et financiers contre seulement
34 au ministère de la culture et 24 au ministère de l’Europe et des affaires étrangères. De même,
le nombre de CIR par ETP était, fin 2021, de 4 508 au ministère de l’intérieur contre 458 au
ministère de la culture, soit un facteur 10 entre les deux extrêmes.
Tableau n° 2 :
ETP et activité des 10 principaux employeurs en 2021
ETP consacrés à la gestion
des retraites
Nb de
départs
en
retraite
Départs
en
retraite /
ETP
Nombre
de CIR
CIR /
ETP
2011
2021
Évolution
MENJS MESRI
650,0 417,0
-36%
23 672
57
1 036 701
2 486
Min. armées
253,5
279,7
10%
13 322
48
389 458
1 393
MEF
77,5
41,2
-47%
6 120
149
139 025
3 374
Min. intérieur
233,5
39,6
-83%
4 048
102
178 534
4 508
Min. justice
13,8
28,3
105%
2 148
76
87 124
3 082
MAA
26,3
19,5
-26%
1 073
55
31 514
1 616
MTE MCTRCT
39,2
13,9
-65%
1 789
129
42 083
3 038
Min. culture
14,1
13,2
-7%
452
34
6 023
458
MEAE
13,3
8,5
-36%
206
24
12 093
1 423
Min. sociaux
26,3
7,0
-73%
1 200
171
24 026
3 432
Nota : MENJS MESRI : ministère de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports et ministère de
l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation ; MEF : ministères économiques et financiers ; MAA :
ministère de l’agriculture et de l’alimentation ; MTE MCTRCT : ministère de la transition écologique et ministère
de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales ; MEAE : ministère de l’Europe et
des affaires étrangères.
Source : SRE
Les deux principaux employeurs (ministère des armées et MENJS-MESRI) représentent
à eux seuls 77 % des ETP, 66 % des départs en retraite et 71 % des CIR. La répartition de leurs
activités respectives témoigne des spécificités des agents concernés : la durée d’activité des
militaires est généralement plus courte (le bénéfice de la retraite intervient en moyenne à 43 ans
pour les pensionnés militaires contre 58 pour les pensionnés civils), ce qui conduit à un plus
grand nombre de départs en retraite par rapport au nombre de CIR gérés par le ministère des
armées en comparaison avec le MENJS-MESRI.
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
26
Au-delà de ces différences, ils affichent tous les deux une productivité faible, nettement
inférieure à la moyenne pondérée des huit autres principaux employeurs (100 départs en retraite
par ETP et 3 364 CIR par ETP).
Le cas du ministère des armées se distingue par l’augmentation des effectifs déclarés
(+ 26 ETP) entre 2011 et 2021, et par la faible productivité des activités maintenues (32 % du
nombre de départs par ETP et 41 % du nombre de CIR par ETP des ministères économiques et
financiers, troisième principal employeur).
À l’inverse, les quatre employeurs qui ont le plus réduit leurs effectifs
37
sont aussi ceux
qui affichent la plus forte productivité.
Tableau n° 3 :
Productivité comparée des 10 principaux employeurs
Source : SRE
L’ampleur de ces écarts interroge sur l’efficacité des processus mis en place par les
différents employeurs et sur la possibilité de s’inspirer et de généraliser les bonnes pratiques de
ceux qui affichent les productivités les plus élevées.
À titre d’illustration, un alignement de la productivité des deux principaux employeurs
(MENJS-MESRI et ministère des armées) sur la moyenne des deux suivants (ministères
économiques et financiers et ministère de l’intérieur) permettrait de redéployer 368 ETP
(respectivement 191 et 177 ETP), soit 53 % des effectifs qu’ils y consacrent actuellement.
Enfin, les employeurs continuent de consacrer des effectifs (41 ETP fin 2021) au
dispositif de validation de services auxiliaires (VSA) et de rachat d’années d’études, qui
concernait un stock d’environ 3 000 dossiers fin 2022 contre 56 000 lors de la mise en
extinction du dispositif en 2015. Ces postes pourront être redéployés dès lors que l’ensemble
des dossiers aura été traité. Les employeurs concernés doivent par conséquent achever sans
attendre le traitement des dossiers de VSA afin de procéder au redéploiement des agents
concernés vers d’autres missions.
37
Ministère de l’intérieur, ministères économiques et financiers, MTE-MCTRCT et ministères sociaux.
-
500
1 000
1 500
2 000
2 500
3 000
3 500
4 000
4 500
5 000
-
20
40
60
80
100
120
140
160
180
Départs/ETP (éch. gauche)
CIR/ETP (éch. droite)
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
27
Les économies d’effectifs réalisées (623 ETP) sont donc en retrait par rapport à la cible
de 1 200 ETP qui avait été fixée au lancement de la réforme dans le cadre de la RGPP.
L’objectif de réduction des moyens humains consacrés par les employeurs à la gestion des
retraites doit être poursuivi et des travaux engagés dans ce sens par le SRE et la direction du
budget avec les employeurs. Cette démarche pourrait s’inscrire dans la revue de dépenses
publiques annoncée par le Gouvernement afin d’identifier des pistes d’économie.
Recommandation n° 1.
(SRE et direction du budget) : Engager avec les ministères
employeurs un processus permettant de poursuivre la réduction des effectifs consacrés à
la gestion des retraites.
______________________ CONCLUSION INTERMÉDIAIRE ______________________
L’État a engagé à la fin des années 2000 une réforme d’ampleur de la gestion de la
chaîne des pensions de retraite visant principalement à améliorer le service rendu aux usagers
et à en faire progresser la productivité. Le service des retraites de l’État (SRE) a ainsi été créé
en 2009 sous la forme d’un service à compétence nationale rattaché à la direction générale des
finances publiques (DGFiP) afin, d’une part, de piloter la réforme et, d’autre part, de
centraliser la gestion de certaines tâches auparavant exercées par les différents employeurs
des fonctionnaires de l’État.
Le SRE assure la gestion du régime de retraite et d’invalidité des fonctionnaires civils
et militaires de l’État et verse chaque année des pensions pour un montant total de plus de
58 milliards d’euros à près de 2,5 millions de pensionnés. La réforme visant à créer un système
universel de retraite, présentée en janvier 2020 et suspendue au début de la crise sanitaire liée
à la Covid-19, prévoyait la transformation du SRE en établissement public administratif. La
réforme engagée en 2023 confirmant le maintien du régime des fonctionnaires de l’État, la
création d’une caisse de retraite, recommandée par la Cour en 2016, permettrait d’en renforcer
la gouvernance et le pilotage financier.
La mise en
œ
uvre de la réforme de la gestion des retraites de l’État a fait l’objet de
plusieurs décalages de calendrier. La première étape, qui consistait à déployer le compte
individuel retraite (CIR) chez l’ensemble des employeurs, a été achevée en 2015, trois ans après
la date initialement prévue. Le transfert progressif d’une partie des missions des employeurs
vers le SRE est officiellement terminé depuis décembre 2020.
Cependant, les redéploiements d’effectifs doivent être poursuivis. Alors que la réduction
des effectifs consacrés à la gestion des retraites faisait partie des principaux axes de la réforme,
aucun objectif n’a été défini ni de manière globale ni dans le détail des redéploiements à opérer
par les différents employeurs. La cible d’économie de 1 200 ETP, évoquée en 2007, n’a pas été
actualisée et détaillée par la suite. Les effectifs consacrés à la gestion des retraites ont été
réduits de 525 ETP chez les employeurs et de 130 ETP dans les CGR, tandis qu’ils
augmentaient de 35 ETP au SRE pour accompagner sa montée en charge. L’effectif cumulé est
passé de 2 336 à 1 713 entre 2011 et 2021, soit une économie de 623 ETP.
Non seulement les employeurs consacrent toujours des moyens importants à la gestion
des retraites, y compris pour des missions qui devraient désormais relever du SRE, mais leur
contribution à l’effort de réduction des effectifs a aussi été très variable. Il en résulte une
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
28
productivité hétérogène, relativement faible au sein des principaux employeurs que sont les
ministères chargés des armées, de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur, qui
concentrent 77 % des ETP déclarés. Cela pose la question de la méthodologie de recensement
des effectifs, qui est insuffisamment harmonisée entre les employeurs, mais surtout des
réorganisations qui doivent encore intervenir pour améliorer la productivité et réduire les
effectifs consacrés par les employeurs à la gestion des pensions, conformément à l’objectif
initial de la réforme.
La Cour formule la recommandation suivante :
1.
engager avec les ministères employeurs un processus permettant de poursuivre la réduction
des effectifs consacrés à la gestion des retraites.
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
29
2
UN SERVICE QUI POURSUIT SA MUTATION POUR MIEUX
ACCOMPAGNER USAGERS ET EMPLOYEURS
La montée en charge du SRE s’est opérée parallèlement à l’évolution de son activité,
qui se concentre désormais sur l’accompagnement des usagers et des employeurs.
L’organisation et les moyens du service s’adaptent à cette nouvelle configuration tandis que le
réseau des CGR/CSR a été réduit au fil des regroupements pour gagner en productivité.
2.1
Une activité qui évolue vers l’accompagnement des usagers et des
employeurs
2.1.1
Une augmentation modérée du nombre de pensions versées
Le nombre de pensions de retraite versées par le SRE augmente de manière régulière :
l’effectif des pensionnés civils et militaires est passé de 2,44 millions en 2018 à 2,50 millions
au 1
er
janvier 2022, soit une progression moyenne annuelle de 0,6 %. Les pensions civiles de
droit direct liées à la vieillesse représentent 61 % de ce stock contre 15 % pour les pensions
militaires.
Graphique n° 6 :
Nombre de pensions versées par le SRE au 1
er
janvier de chaque année
Source : SRE
Cette augmentation des effectifs est principalement due à l’allongement de la durée de
perception dans la mesure où le nombre de nouvelles pensions versées chaque année est
relativement stable. Sur les cinq dernières années, le flux de nouvelles pensions a même reculé
de 2 %, passant de 100 258 en 2017 à 98 211 en 2021, avec un point bas à 95 618 en 2020,
2 437 681
2 458 328 2 475 870 2 485 979 2 500 680
0
500 000
1 000 000
1 500 000
2 000 000
2 500 000
3 000 000
2018
2019
2020
2021
2022
Pensions militaires de droit
dérivé
Pensions civiles de droit dérivé
Pensions militaires de droit
direct : invalidité
Pensions militaires de droit
direct : vieillesse
Pensions civiles de droit direct :
invalidité
Pensions civiles de droit direct :
vieillesse
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
30
principalement en raison de la crise sanitaire et du report du départ à la retraite pour un certain
nombre d’agents.
Graphique n° 7 :
Nombre de nouvelles pensions versées par le SRE
Source : SRE
L’activité de correction des comptes par le SRE tend à augmenter à mesure que les
agents s’approprient les outils, en particulier l’Ensap, pour préparer leur départ à la retraite. Le
service peut en effet être saisi de demandes de correction de la part des agents
via
l’Ensap, ou
intervenir directement lors de l’examen du dossier de départ. En 2021, le SRE a reçu
37 337 demandes de correction de comptes par l’Ensap (contre 33 000 en 2020).
Dans les faits, seul un tiers des corrections de CIR intervient avant la demande de départ
à la retraite, une proportion en baisse sur les dernières années. Cette situation est d’autant moins
satisfaisante que les corrections portent principalement sur des éléments connus des agents, qui
auraient pu être signalés en amont du départ: un tiers environ des corrections concernent la
situation familiale des agents (mariage, divorce, prise en compte d’un enfant à charge…) et
20 % les informations relatives à leurs carrières (hors grade et indice). Le SRE souhaite engager
une étude afin d’éclairer les raisons de la proportion croissante de corrections réalisées au
moment du départ en retraite, alors même que l’amélioration des outils et l’augmentation du
nombre de comptes sur l’Ensap auraient dû favoriser la fiabilisation des comptes.
2.1.2
Un renforcement de l’activité d’accueil et d’accompagnement des
usagers
La centralisation de la gestion des pensions au SRE a conduit à une modification
profonde de l’accompagnement des agents, actifs et pensionnés, qui repose désormais
principalement sur le service, à l’exception des activités d’orientation et de conseil de premier
niveau qui peuvent encore être exercées par les employeurs. Le nombre de contacts annuels
d’agents actifs a presque triplé entre 2015 et 2021, passant de 70 000 à près de 200 000 en
l’espace de six ans. Si le téléphone reste le principal moyen de contact et représente 80 % des
100 258
97 788
96 460
95 618
98 211
0
20 000
40 000
60 000
80 000
100 000
120 000
2017
2018
2019
2020
2021
Pensions militaires de droit
dérivé
Pensions civiles de droit dérivé
Pensions militaires de droit
direct : invalidité
Pensions militaires de droit
direct : vieillesse
Pensions civiles de droit direct :
invalidité
Pensions civiles de droit direct :
vieillesse
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
31
sollicitations (contre 77 % en 2015), la part des courriels a aussi progressé, passant
de 16 à 19 %, en remplacement des courriers postaux, qui constituent désormais 0,4 % des
sollicitations (712 courriers postaux reçus en 2021 contre 4 780 en 2015).
La tendance est la même pour les sollicitations des pensionnés, même si la progression
est moins importante : leur nombre a augmenté de 25 % entre 2015 et 2021, passant de
495 020 à 618 780. La part des appels téléphoniques a diminué au profit des courriels, baissant
de 91 à 76 % des contacts entre 2016 et 2021, tandis que le courrier postal a presque disparu.
Graphique n° 8 :
Sollicitations adressées au SRE par les agents actifs et pensionnés
Nota : le nombre de courriels et courriers postaux des agents pensionnés reçus en 2015 n’est pas disponible.
Source : SRE
La forte hausse de l’activité d’accueil en 2019 s’explique notamment par la mise en
œ
uvre du prélèvement à la source, l’application du taux médian de contribution sociale
généralisée (CSG) sur certaines pensions ainsi que l’ouverture des services de l’Ensap à
destination des agents pensionnés.
La montée en charge de l’accompagnement se traduit aussi par une augmentation du
nombre d’entretiens information retraite et de simulations personnalisées/accompagnées
38
. Si
l’enrichissement des informations disponibles sur le site du SRE et sur l’Ensap a permis de
contenir le recours aux entretiens information retraite, le nombre de simulations personnalisées
a presque décuplé entre 2015 et 2021, à mesure que les employeurs entraient dans le dispositif
centralisé de conseil et d’accompagnement par le SRE.
38
L’entretien information retraite s’adresse aux agents à moins de sept ans de la retraite et leur permet
d’obtenir des renseignements spécialisés et de faire le point sur leur carrière avec un expert du SRE, par courriel
ou par téléphone. La simulation personnalisée / accompagnée, offerte aux agents se trouvant à moins de deux ans
de la retraite, leur fournit une projection du montant de la pension ainsi qu’un éclairage approfondi sur leur
situation.
70 510
81 200
80 000
114 000
171 318
160 026
202 696
-
50 000
100 000
150 000
200 000
250 000
Actifs
Appels téléphoniques
Courriels
Courriers postaux
495 020
517 700
607 300
598 300
780 950
699 825
618 780
-
100 000
200 000
300 000
400 000
500 000
600 000
700 000
800 000
900 000
Pensionnés
Appels téléphoniques
Courriels
Courriers postaux
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
32
Graphique n° 9 :
Nombre d’entretiens information retraite et de simulations personnalisées réalisés
Source : SRE
Le nombre de simulations réalisées a presque doublé en 2021 du fait de l’achèvement
de l’intégration des ministères des armées et de l’éducation nationale en décembre 2020.
2.1.3
Une offre de services à destination des employeurs qui s’enrichit
Afin de mener la réforme à terme, le SRE a déployé une importante activité
d’accompagnement des employeurs, dont le rôle dans la complétude et la qualité des CIR est
essentiel. En amont du basculement dans le système centralisé au SRE, chaque employeur a fait
l’objet d’un programme de travail sur 18 mois portant sur la qualité des comptes, le déploiement
d’un dispositif de contrôle interne, la formation des agents des services RH ainsi qu’un plan de
communication sur les transformations.
Le SRE déploie une « offre de services employeurs » (OSE) afin de les accompagner
dans le nouveau mode de gestion des retraites. Celle-ci prend notamment la forme :
-
d’un comité utilisateurs Pétrel, qui permet aux employeurs d’échanger sur les
évolutions informatiques en cours et de faire part de leurs besoins ;
-
d’un comité des correspondants ministériels (Corref), dans lequel sont notamment
évoqués la gestion de la chaîne des pensions, le suivi des effectifs et la qualité des
données transmises par les employeurs dans le cadre des CIR ;
-
d’une rencontre annuelle des employeurs ;
-
de « bilans pédagogiques » réalisés avec les employeurs afin de valider ou
d’améliorer le fonctionnement de leur chaîne de traitement ;
-
de formations portant notamment sur les outils, les processus et la réglementation
applicable. En 2021, 104 agents ont bénéficié de ces formations ;
-
de la lettre d’information « J’OSE, le journal de l’offre de services aux
employeurs ».
2 140
2 740
3 500
2 500
1 876
1 838
1 970
450
710
800
650
1 455
2 291
4 305
-
1 000
2 000
3 000
4 000
5 000
2015
2016
2017
2018
2019
2020
2021
Entretiens information
retraite
Simulations personnalisées
/ accompagnées
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
33
Schéma n° 3 :
L’offre de services employeurs du SRE
Source : SRE
La mission risques et audit (MRA) du SRE entretient par ailleurs avec les employeurs
un dialogue continu sur la base des résultats du contrôle interne (cf.
infra
) qui alimentent des
bilans annuels. Elle réalise des audits partenariaux menés avec les employeurs sur leurs
processus de gestion afin de veiller à la qualité des CIR (32 audits ont ainsi été effectués entre
2015 et 2021).
2.2
Des moyens et une organisation qui ont accompagné les évolutions du
service
2.2.1
Des implantations qui pourraient être regroupées
Le SRE est implanté à Nantes depuis 1985. Ce site principal accueille environ
420 agents du service, dont les fonctions de direction et les fonctions support.
Le service dispose aussi depuis 1965 d’une antenne à La Rochelle, dans laquelle
travaillaient 13 agents fin 2021. Cette implantation s’explique historiquement par la présence
dans la ville du service des pensions du ministère des armées. Auparavant consacré uniquement
aux dossiers relevant de ce ministère, le site du SRE a désormais étendu son activité aux autres
employeurs, même s’il bénéficie toujours d’une proximité et de relations de travail privilégiées
avec le ministère des armées.
Enfin, le SRE possède depuis 2020 une antenne à Guérande, où s’était installé il y a des
années le service des pensions du ministère de l’éducation nationale. Avec le basculement dans
le groupe 1 de ce dernier, une cinquantaine d’agents de ce ministère ont été transférés vers le
SRE en septembre 2020, d’abord sous la forme d’une mise à disposition puis d’une intégration
ou d’un détachement selon les situations individuelles. L’implantation à Guérande comptait
48 agents fin 2021. Elle a été maintenue à la fois pour faciliter l’acceptation de la réforme et
afin de conserver la proximité avec le département des retraites du ministère de l’éducation
nationale.
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
34
Les sites de Nantes et La Rochelle sont hébergés dans des bâtiments relevant des
ministères économiques et financiers. Le site de Guérande est situé dans des locaux loués par
le ministère de l’éducation nationale à un bailleur privé. Le loyer qui pourrait être refacturé au
SRE est évalué à 250 000
€
mais le projet de convention de location et de gestion en discussion
depuis l’installation du service n’a pas été signé par les parties.
La productivité des différentes équipes est relativement proche. L’harmonisation de leur
activité permettrait d’en envisager le regroupement sur le site nantais à moyen terme.
2.2.2
Une hausse des effectifs qui suit l’évolution de l’activité
L’organisation du SRE issue du décret de 2009
39
a été modifiée en 2016
40
pour l’adapter
à l’avancement de la réforme, notamment par la mise en place d’un bureau « mission relation
usagers ». Une nouvelle réorganisation est intervenue en 2021 afin de regrouper les études, les
développements, la production et l’infrastructure SI sous une responsabilité unique.
Organigramme n° 1 :
Organigramme du SRE
Source : SRE
Du lancement de la réforme à 2021, les effectifs du SRE ont connu deux phases. De
2009 à 2015, les gains de productivité permis par le déploiement de Pétrel et du CIR ont conduit
39
Décret n° 2009-1053 du 26 août 2009.
40
Décret n° 2016-821 du 20 juin 2016.
Direction
Mission risques et audit
Secrétariat général
Bureau finances et
statistiques
Département du programme de
modernisation
Support transverse et
coordination
Etudes, développement,
infrastructures et production
Processus de gestion
Processus compte individuel de
retraite
Département des retraites et de
l'accueil
Affaires juridiques
Retraites
Invalidités
Mission relation usagers, offre
de service et réseau
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
35
à une réduction des effectifs, dans la continuité de la tendance relevée par la Cour dans ses
précédents contrôles sur la période 1996-2010. Le nombre d’ETP est ainsi passé de 477 en 2009
à 421 en 2015, soit une baisse de 12 %.
La deuxième phase est marquée par le basculement progressif des employeurs de l’État
dans l’organisation centralisée de gestion des pensions, initiée en 2013 et achevée en 2020. Les
effectifs ont recommencé à progresser et sont passés de 421 ETP en 2015 à 503 au
31 décembre 2021, soit une croissance de 19 % et 82 ETP. Le transfert de 50 ETP du ministère
de l’éducation nationale vers le SRE évoqué ci-dessus en 2020 représente une part importante
de cette augmentation.
Graphique n° 10 :
Évolution des effectifs du SRE au 31 décembre de chaque année (en ETP)
Source : SRE
Le recours aux personnels contractuels est relativement stable et modéré sur la période,
représentant 2 à 4 % de l’effectif selon les années, soit 19 ETP en 2021. De même, la répartition
des effectifs par catégorie évolue peu, à l’exception d’une légère augmentation de la part des
agents de catégorie A, qui représentaient environ un tiers des agents en 2021.
Graphique n° 11 :
Répartition des effectifs par catégorie statutaire
Source : SRE
477
473
471
466
456
446
421
427
433
439
443
504
503
0
100
200
300
400
500
600
4%
4%
4%
4%
3%
3%
2%
26%
27%
27%
28%
31%
30%
30%
55%
54%
55%
54%
54%
54%
54%
14%
14%
14%
14%
13%
14%
13%
0%
10%
20%
30%
40%
50%
60%
70%
80%
90%
100%
2015
2016
2017
2018
2019
2020
2021
Cat. C
Cat. B
Cat. A
Cat. A +
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
36
Cette variation des effectifs et de leur composition est à mettre en regard de l’évolution
de l’activité du service, tant quantitativement (cf.
supra
) que dans sa nature. Alors que les
effectifs des fonctions de direction et administratives (secrétariat général, mission risques et
audit, bureau finances et statistiques, affaires juridiques…) ont peu varié, voire ont diminué, les
bureaux métiers ont bénéficié de la quasi-totalité de l’augmentation, en particulier le bureau
responsable de l’instruction des demandes de départ en retraite (+35 ETP), et celui en charge
de la relation usagers, de l’offre de service aux employeurs et du pilotage du réseau des CGR
(+ 34 ETP).
Les effectifs du SRE et la masse salariale correspondante figurent dans le
programme 156
Gestion fiscale et financière de l’État et du secteur public local
du budget de
l’État. Sur la période 2015-2021, la masse salariale du service est passée de 30,3 M
€
à 37,5 M
€
,
soit une hausse de 23 %. Cependant, les effectifs ont progressé de 19 % sur la même période,
ce qui aboutit à un coût moyen par ETP relativement stable, en progression de 3 %.
Tableau n° 4 :
Évolution de la masse salariale, des effectifs et du coût moyen par agent
2015
2016
2017
2018
2019
2020
2021
2015-
2021
Masse salariale (M
€
)
30,3
31,1
31,6
32,9
33,2
34,7
37,5
+ 23 %
Effectifs (ETP)
421
427
433
439
443
504
503
+ 19 %
Coût moyen / agent (
€
)
72 031
72 772
72 895
75 080
74 936
68 856
74 547
+ 3 %
Source : SRE
Du fait de son statut de service à compétence nationale rattaché à la DGFiP, le SRE n’a
pas de marge de man
œ
uvre sur sa politique salariale, déterminée à l’échelle nationale. La
gestion RH du service est effectuée par le secrétariat général des ministères économiques et
financiers et par la DGFiP, notamment les procédures de recrutement, de promotion ou encore
de détachement. Le pilotage de ses moyens est réalisé par le SRE sur la base des effectifs et des
plafonds d’emploi, sans visibilité sur la masse salariale, qui représentait pourtant 84 % des
dépenses du service en 2021.
Le statut d’administration centrale dont bénéficie le SRE offre à ses agents une
rémunération plus attractive que celle d’autres services déconcentrés de l’État dans la région,
ce qui peut être un frein à la mobilité sortante. Sur les 213 départs enregistrés par le service
entre 2016 et 2021, 156 (73 %) correspondaient à des départs à la retraite ou des décès.
De plus, la mobilité volontaire concerne principalement les agents de catégorie A :
parmi les 57 départs pour d’autres motifs, seuls 4 concernaient des agents de catégorie C et
17 des agents de catégorie B. Les agents de catégories A et A+ représentent ainsi 32 % de
l’effectif mais 63 % des mobilités volontaires.
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
37
Graphique n° 12 :
Motifs de départ du SRE sur la période 2016-2021 par catégorie
Source : SRE
Cette faible mobilité externe n’est pas compensée par la mobilité interne, qui ne
concerne en moyenne que 20 agents chaque année sur la période 2016-2021, soit de l’ordre de
4 % des effectifs, à rapporter au taux global de mobilité de 9,1 % mesuré pour les agents de
l’État en 2018 et 2019
41
.
2.2.3
Un budget en forte progression pour investir dans les SI
Afin de réaliser ses missions, le SRE disposait d’un budget de 7,15 M
€
en 2021, hors
dépenses de personnel. Ce budget était en forte progression par rapport aux années précédentes
du fait de l’inscription d’une dotation destinée à couvrir le lancement du projet de mutualisation
du système d’information avec la Caisse des dépôts et consignations (CDC) (cf
. infra
). En 2021,
le service y a consacré 1,68 M
€
.
41
Direction générale de l’administration et de la fonction publique,
Fonction publique,
les chiffres
clés 2021
, 2021.
38
89
29
30
9
1
5
2
1
6
3
74
106
33
0
20
40
60
80
100
120
A
B
C
Autre motif (disponibilité,
fin de mise à disposition,
scolarité)
Démission
Mutation et détachement
Retraite et décès
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
38
Graphique n° 13 :
Budget du SRE hors dépenses de personnel,
crédits de paiement (en M
€
)
Source : SRE
Les dépenses liées à la modernisation et au SI sont devenues prépondérantes dans le
budget du service : alors qu’elles représentaient 73 % des dépenses en 2015, elles en
mobilisaient 91 % en 2021, une part qui tend à augmenter avec la montée en charge du projet
de mutualisation.
Tableau n° 5 :
Répartition du budget du SRE, hors masse salariale (en
€
)
2019
2020
2021
Immobilier
152 399
18 281
15 005
Métiers
424 658
278 634
273 475
Fonctionnement courant
573 561
253 372
352 448
Modernisation et informatique
3 933 883
4 112 870
6 507 176
Total
5 084 501
4 663 157
7 148 104
Source : SRE
Les dépenses immobilières du service ont sensiblement diminué avec l’installation en
janvier 2020 de l’antenne de La Rochelle dans des locaux appartenant aux ministères
économiques et financiers, en remplacement d’un bail privé. L’implantation de Guérande dans
des locaux loués par le ministère de l’éducation nationale ne donnant pas lieu au paiement d’un
loyer
(
cf.
supra
),
les
dépenses
immobilières
du
SRE
couvrent
principalement
l’entretien/maintenance de ses locaux.
Les dépenses « métiers » sont essentiellement constituées par les frais occasionnés par
l’envoi des titres et documents par voie postale. Cette dépense est en diminution constante du
fait du recours croissant aux communications dématérialisées : les frais d’affranchissement
supportés par le SRE sont passés de 367 596
€
en 2015 à 169 062
€
en 2021, malgré
l’augmentation concomitante du prix des services postaux.
5,00
5,03
4,50
4,70
4,55
4,58
6,58
5,55
5,03
4,27
4,89
5,08
4,66
7,15
0
1
2
3
4
5
6
7
8
2015
2016
2017
2018
2019
2020
2021
Prévision
Réalisé
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
39
Enfin, les principaux postes de dépenses liées au fonctionnement courant concernent les
formations et déplacements ainsi que l’organisation de journées d’étude métier, séminaires et
salons. Ils ont sensiblement baissé du fait notamment de la crise sanitaire qui a conduit à
l’annulation de nombreux événements.
Du fait de la prépondérance prise par les dépenses liées au SI, l’enjeu budgétaire
principal pour le SRE est désormais la maîtrise de ces postes, compte tenu notamment des
surcoûts d’ores et déjà constatés sur le projet de mutualisation (cf
. infra
).
2.3
Un réseau des CGR/CSR qui s’est nettement concentré sans aller
jusqu’à la création d’une agence comptable unique
2.3.1
Une réduction marquée du nombre de centres
Une fois la pension concédée par le SRE, son paiement est assuré par des centres
comptables relevant directement de la DGFiP. La réforme portée dans le cadre de la révision
générale des politiques publiques prévoyait la réunion de ces centres et du service des pensions
dans un service à compétence nationale ou sous la forme d’une caisse de retraite de l’État.
L’institution d’un comptable public unique ayant la responsabilité du paiement des allocations
et pensions versées par le SRE, prévue par le décret 2009 portant création de ce dernier, n’a pas
été réalisée, ce qui oblige le SRE à piloter les CGR en liaison avec les services territoriaux de
la DGFiP dont font partie ces derniers.
La répartition des compétences est précisément décrite dans un « guide des relations
CSR-CGR-SRE » : les usagers actifs sont accueillis et renseignés par le SRE, y compris durant
leur démarche de départ en retraite, tandis que les pensionnés ont un point de contact unique,
le CSR, bien que leurs démarches puissent ensuite être traitées par le SRE ou les CGR selon les
sujets.
Lors du lancement de la réforme, le paiement des pensions était assuré par 29 centres
régionaux des pensions, dont 24 en métropole. En 2010, la DGFiP a arrêté la carte d’un réseau
resserré de 17 CGR : 13 centres en métropole, dont un situé à Nantes consacré aux pensionnés
résidant à l’étranger, et quatre outre-mer. Ce premier regroupement a été achevé en 2011.
Une seconde vague de réorganisation a été lancée en 2020, marquée par la volonté à la
fois de réduire le nombre de centres et d’implanter ou réimplanter des services de la DGFiP
dans des villes petites et moyennes. Au 1
er
janvier 2022, le nombre de CGR est passé de 17 à
12 avec la fermeture des centres de Paris, Ajaccio, Clermont-Ferrand, Montpellier, Marseille,
et Fort-de-France, tandis qu’un centre service retraite (CSR) a été ouvert à Laval, qui reprend
les activités d’accueil auparavant exercées par les CSR de Bordeaux et Rennes.
Le CSR de Laval, point de contact unique des pensionnés
Le CSR de Laval réalise depuis le 1
er
janvier 2022 l’accueil téléphonique et numérique des
pensionnés de l’État. Il a pris la suite des CSR de Rennes et Bordeaux, dont l’activité a pris fin le
31 décembre 2021.
Le CSR assure l’accueil de premier niveau («
front office
») sur la plupart des sujets et s’appuie
sur le SRE et les CGR sur leurs champs de compétences respectifs («
back office
»). Il est le point
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
40
d’entrée unique pour les contacts téléphoniques, qui sont transférés au SRE ou aux CGR si le besoin
d’expertise le requiert et selon qu’il s’agit de questions relatives au droit des pensions (SRE) ou à leur
paiement (CGR) (voir annexe 2).
Le CSR est en mesure de renseigner les pensionnés sur des questions simples portant sur la
liquidation de leur pension (le calcul des droits à pension civile, d’invalidité ou militaire), les règles de
cumul entre une pension et une activité rémunérée ou encore le paiement des pensions (en particulier le
taux de prélèvement des cotisations sociales).
Il répond par ailleurs aux messages des usagers adressés
via
le site internet des retraites de l’État
pour les renseigner sur leurs démarches et leur apporter des réponses de premier niveau ne nécessitant
pas un traitement de la situation des usagers (ce qui relèverait du SRE) et n’ayant pas d’incidence directe
sur leur situation financière.
Enfin, le CSR accompagne les pensionnés dans la plupart de leurs démarches de changement de
situation personnelle : d’adresse, d’identité bancaire, de situation conjugale, reprise d’activité
professionnelle… Il aide aussi les usagers dans la navigation et la manipulation des outils numériques
mis à leur disposition, en particulier sur l’Ensap.
À sa création, le CSR a été doté de 34 agents, qui n’exerçaient pas auparavant de fonctions en
lien avec les pensions de l’État ou dans une plateforme d’appels. Des formations ont donc été réalisées
par le SRE, accompagnées par une immersion au sein de sa plateforme d’accueil des usagers actifs et
de l’intervention d’un consultant spécialisé dans les métiers de l’accueil téléphonique.
Le SRE suit des indicateurs d’activité et de performance comme le nombre de contacts reçus, le
taux d’appels décrochés en moins de 10 sonneries, la durée moyenne de traitement ou encore le taux de
réitération des appels. Des objectifs ont été définis en commun par le SRE et le CSR sur la base de
l’analyse de ces indicateurs.
Au 1
er
janvier 2023, le nombre de centres en activité a été réduit à six, dont trois
comportent un site principal et un site secondaire. Le rattachement des usagers (actifs et
pensionnés) à un centre est déterminé par leur lieu de domiciliation. Auparavant calqué sur
celui des régions administratives, il a évolué à mesure que l’activité était regroupée dans un
nombre réduit de centres.
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
41
Carte n° 1 :
Ressort géographique et localisation des CGR/CSR
Les six centres en activité depuis le 1
er
janvier 2023 :
- Nantes, avec un site à Châteaubriant actif depuis
2022 ;
- Limoges ;
- Tours, avec un site à Loches qui commence son
activité en 2023 ;
- Rennes, avec un site à Fougères qui commence
son activité en 2023 ;
- le CSR de Laval ;
- la direction spécialisée des finances publiques
pour l’étranger (DSFIPE), qui est restée en dehors
des périmètres de regroupement.
Source : SRE
2.3.2
Des disparités d’activité corrigées par le regroupement des centres
Les premières vagues de regroupements opérés ont abouti à une situation très disparate
en ce qui concerne l’activité et surtout la productivité des CGR. Fin 2021, le nombre de pensions
versées
42
par ETP était ainsi supérieur à 15 000 dans les centres de Tours et Toulouse mais
inférieur à 10 000 dans les centres d’Ajaccio, Bordeaux et Rennes (ces deux derniers exerçaient
par ailleurs une activité de CSR jusqu’au 31 décembre 2021).
Tableau n° 6 :
Activité et effectifs des CGR au 31 décembre 2021
Nombre de pensions versées
Effectifs (ETP)
Activité par ETP
Marseille
329 828
23,8
13 858
Ajaccio
31 178
3,5
8 908
Toulouse
355 817
23
15 470
Bordeaux
234 542
28,2
8 317
Montpellier
255 439
22,8
11 203
42
Toutes pensions confondues.
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
42
Nombre de pensions versées
Effectifs (ETP)
Activité par ETP
Rennes
228 517
30
7 617
Tours
327 582
21,4
15 308
Nantes
360 907
26,4
13 671
Lille
324 235
20,5
15 816
Clermont-Ferrand
224 338
16,3
13 763
Paris
369 824
29,8
12 410
Limoges
404 859
31,3
12 935
Fort-de-France
45 265
6
7 544
Saint-Denis de La Réunion
30 563
5
6 113
Papeete
7 938
4,5
1 764
Nouméa
6 445
4
1 611
Total hors DSFiPE
3 537 277
297
11 930
DSFiPE
50 867
42
1 235
Source : Cour des comptes d’après des données du SRE
Les effectifs des CGR/CSR ont été réduits en même temps que le nombre de centres,
passant de 387 ETP répartis dans 17 centres en 2015 à 309 ETP dans 12 centres en 2022,
conduisant à une augmentation de la productivité. Le dimensionnement des six centres en
activité depuis le 1
er
janvier 2023, en ce qui concerne à la fois les effectifs et le ressort
géographique, a été réalisé afin d’homogénéiser leur activité. Chaque centre traitera désormais
environ 14 400 pensions par ETP, à l’exception de la DSFiPE, maintenue en dehors de la
réorganisation.
Tableau n° 7 :
Activité et effectifs projetés à partir du 1
er
janvier 2023 (hors CSR Laval)
Nombre de pensions versées
Effectifs (ETP)
Activité par ETP
Nantes et Châteaubriand
807 174
56
14 414
Limoges
884 636
62
14 268
Tours et Loches
917 941
64
14 343
Rennes et Fougères
927 526
64
14 493
Total hors DSFiPE
3 537 277
246
14 379
DSFiPE
50 867
42
1 235
Source : Cour des comptes d’après des données du SRE
La productivité moyenne était de 11 930 pensions par ETP fin 2021 (hors DSFiPE). À
l’issue du regroupement opéré au 1
er
janvier 2023, elle devrait passer à 14 379 pensions par
ETP, soit une progression de 21 %. Ce passage à six centres constitue la dernière étape des
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
43
reconfigurations projetées par la DGFiP. La création d’un comptable unique, telle que le
prévoyait le décret de 2009 n’est pas envisagée à l’heure actuelle.
La DGFiP ne souhaite par ailleurs pas constituer un centre de gestion unique, comme la
CNRACL l’a fait avec son pôle de paiement implanté à Bordeaux. D’une part, le regroupement
dans un service unique des près de 250 agents des CGR irait à l’encontre de la politique qu’elle
a initiée depuis 2019 visant au contraire à relocaliser des services sous forme de plus petites
implantations dans des villes de taille moyenne ou petite. D’autre part, l’existence de plusieurs
sites de paiement peut contribuer à assurer la continuité du service en cas de graves difficultés
(crise sanitaire, panne informatique, perturbation du travail…).
Le maintien voire la création de plusieurs centres au nom de l’équilibre territorial de
l’emploi public ne doit cependant pas conduire à renoncer à l’objectif de réduction du coût de
gestion des pensions de retraite, dont le regroupement des centres de gestion demeure un
vecteur.
______________________ CONCLUSION INTERMÉDIAIRE ______________________
Le SRE assure le versement de leur pension à 2,5 millions d’anciens fonctionnaires
civils et militaires et traite près de 100 000 nouvelles pensions chaque année, un flux
relativement stable sur la période récente. La réforme a abouti à centraliser au SRE l’ensemble
de la gestion des pensionnés ainsi que la plupart des activités en amont et durant le départ en
retraite. Pour assurer cette mission, il s’appuie de plus en plus sur le portail numérique Ensap
qui permet aux usagers d’agir de manière autonome sur leur dossier. De surcroît, il reçoit et
traite
chaque
année
plus
de
200 000 sollicitations
d’usagers
actifs
et
plus
de
600 000 sollicitations de pensionnés.
Le SRE a aussi développé son offre de services à destination des employeurs, qui
conservent un rôle majeur dans l’alimentation des CIR de leurs agents et dans la constitution
des dossiers de départ en retraite. Des instances et rencontres ont été mises en place par le
service pour alimenter un dialogue à la fois sur les outils et sur les procédures, appuyé par des
audits partenariaux réalisés avec les employeurs, avec l’objectif de progresser dans
l’harmonisation des pratiques.
Après une première phase de baisse, les effectifs du service ont augmenté de 82 ETP
depuis 2015, à mesure que les employeurs adhéraient au nouveau mode de gestion des retraites,
pour un effectif final de 503 ETP en 2021. La mobilité externe et interne des agents est
relativement faible et principalement concentrée sur les agents de catégorie A, qui représentent
moins d’un tiers de l’effectif.
Le SRE s’appuie sur un réseau comptable de centres de gestion des retraites (CGR)
relevant directement de la DGFiP, complétés par un centre service retraite (CSR) qui assure
un rôle de plateforme de contact unique pour les pensionnés. De 29 à la fin des années 2000,
le nombre de ces centres est passé à 17 en 2011 puis à 12 en 2022. Un nouveau regroupement
a été opéré en 2023 pour aboutir à six centres. Ce mouvement de concentration a été
accompagné d’une homogénéisation de leur activité qui corrige les disparités précédemment
observées. Le projet d’agence comptable unique, qui faisait partie des attendus de la création
du SRE en 2009, n’a cependant pas été mis en
œ
uvre.
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
44
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
45
3
DES ENJEUX D’AMELIORATION DES PERFORMANCES ET
DE MODERNISATION DU SYSTEME D’INFORMATION
Après une décennie marquée par la mise en
œ
uvre de la réforme des retraites de l’État,
une attention particulière est désormais portée à la performance du SRE, qui s’est par ailleurs
engagé dans un projet structurant de système d’information mutualisé avec la CDC dont les
risques doivent être maîtrisés et le pilotage renforcé au regard des difficultés, des retards et des
surcoûts déjà constatés.
3.1
Des performances à améliorer en lien avec les employeurs
3.1.1
Un compte d’affectation spéciale dont la trajectoire devrait être mieux
justifiée
Seuls les crédits affectés au fonctionnement du SRE figurent dans le programme
budgétaire 156
Gestion fiscale et financière de l’État et du secteur public local
. Les dépenses
et recettes relatives à toutes les pensions sont regroupées dans un compte d’affectation spéciale
(CAS
Pensions
)
43
, suivant les principes posés par la loi organique relative aux lois de finances
de 2001
44
. Le SRE est responsable des deux programmes de ce compte
45
:
-
le programme 741 –
Pensions civiles et militaires de retraite et allocations
temporaires d’invalidité
, qui comprend les opérations en recettes et en dépenses
relatives aux pensions servies par l’État en application du code des pensions civiles
et militaires de retraite et aux allocations temporaires d’invalidité. Il représente
57 Md
€
de dépenses annuelles ;
-
le programme 743 –
Pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre et
autres pensions
, qui correspond aux pensions militaires d’invalidité et des victimes
de guerre ainsi que, de manière plus résiduelle, aux diverses prestations versées par
le SRE au titre des engagements historiques de l’État et de la reconnaissance de la
Nation. Ce programme représente 1,5 Md
€
de dépenses, financées en quasi-totalité
par des subventions du budget général, en particulier de la mission budgétaire
Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation
.
Les recettes correspondant aux pensions de retraite et allocations temporaires
d’invalidité (programme 741) sont constituées à 99 % des cotisations employeurs et cotisations
salariales. La prévision des recettes est réalisée par la direction du budget et repose sur deux
hypothèses principales, les taux de contribution et de cotisation et l’assiette contributive :
-
le taux de contribution employeurs n’a pas été modifié depuis 2014 tandis que le taux
des cotisations salariales est stabilisé depuis 2020 après une décennie d’augmentation
43
Créé par l’article 51 de la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006.
44
En particulier le troisième alinéa du I de son article 21.
45
Le troisième programme du compte concerne les ouvriers des établissements industriels de l’État et
relève de la Caisse des dépôts et consignations.
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
46
linéaire décidée dans le cadre de la réforme des retraites de 2010. En prévision, ces taux
sont maintenus constants ;
-
l’assiette utilisée dans la prévision de recettes est déterminée sur la base des projections
d’effectifs et de masse salariale des différents employeurs de fonctionnaires de l’État,
ce qui inclut les collectivités territoriales et établissements publics.
La prévision de dépense est, quant à elle, réalisée par le SRE, à partir d’un cadrage fixé
par la direction du budget concernant notamment la prévision d’inflation et la valeur du point
d’indice. Cette prévision s’appuie, d’une part, sur la revalorisation des pensions, qui a lieu
annuellement le 1
er
janvier, dans les mêmes conditions que les pensions du régime général
46
.
Par dérogation, une revalorisation anticipée de 4 % a été appliquée au 1
er
juillet 2022 dans le
cadre de la loi portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat
47
. D’autre part,
la dépense est déterminée par la prévision des entrées en paiement (principalement les départs
en retraite) et sorties (principalement les décès). Les projections peuvent toutefois être
invalidées par des changements de comportement des actifs (départs en retraite anticipés ou à
l’inverse plus tardifs) ou par une surmortalité, difficiles à anticiper.
Sur la période 2018-2021, le nombre d’entrées en paiement s’écarte en moyenne de 2 %
de la prévision (soit 1 525 personnes par an) tandis que celui des sorties s’écarte en moyenne
de 4 % par rapport à la prévision (3 025 personnes).
Graphique n° 14 :
Prévision et réalisation des entrées et sorties en paiement
Source : direction du budget
Sur la période 2015-2021, l’écart moyen entre la prévision et l’exécution budgétaires du
programme 741 est de 128 M
€
pour les dépenses et de 269 M
€
pour les recettes. Ces montants,
importants en valeur absolue, doivent toutefois être rapportés aux sommes concernées. L’écart
moyen est ainsi de 0,23 % en dépenses et 0,44 % en recettes (ces dernières ont été constamment
surévaluées sur la période récente), ce qui témoigne d’une amélioration de la prévision par
46
Article L. 16.
47
Loi n° 2022-1158 du 16 août 2022.
-
20 000
40 000
60 000
80 000
100 000
120 000
2018
2019
2020
2021
Prévisions entrées
Réalisation entrées
Prévisions sorties
Réalisation sorties
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
47
rapport à la période antérieure : entre 2009 et 2014, l’écart moyen était de 0,54 % en dépenses
et 0,50 % en recettes.
Tableau n° 8 :
Prévision et réalisation des dépenses et recettes (en M
€
)
2015
2016
2017
2018
2019
2020
2021
Dépenses
Prévues
52 789
57 205
53 825
54 627
55 360
56 059
56 744
Réalisées
52 537
57 027
53 880
54 743
55 348
55 967
56 933
Écart
- 0,48%
- 0,31%
0,10%
0,21%
- 0,02%
- 0,16%
0,33%
Recettes
Prévues
53 482
57 875
56 063
56 697
56 935
57 474
57 505
Réalisées
53 301
57 789
55 876
56 139
56 687
57 227
57 282
Écart
- 0,34%
- 0,15%
- 0,33%
- 0,98%
- 0,44%
- 0,43%
- 0,39%
Source : Cour des comptes
Les prévisions effectuées par le SRE et la direction du budget s’avèrent par conséquent
relativement fiables compte tenu des masses budgétaires concernées et de la sensibilité de la
dépense à des facteurs exogènes.
À titre de comparaison, l’écart entre la prévision et l’exécution des dépenses de la
branche retraite du régime général, gérée par la Cnav, était de - 1,5 % en 2020 et + 5,1 %
en 2021
48
.
Comme la Cour des comptes le soulignait dans son analyse de l’exécution
budgétaire 2021 du CAS
Pensions
49
, le compte pris dans son ensemble affichait un solde
cumulé excédentaire de 9,5 Md
€
fin 2021, résultat des excédents des exercices précédents.
Toutefois, les dépenses augmentant plus rapidement que les recettes, l’exercice 2022 s’est soldé
par un déficit de 558 M
€
, réduisant le solde cumulé à 8,9 Md
€
.
En application de la loi organique du 28 décembre 2021 relative à la modernisation des
finances publiques
50
, le projet annuel de performance annexé au projet de loi de finances
pour 2023 présente une trajectoire triennale (2023-2025) pour les recettes et les dépenses
du CAS. Celle-ci affiche une croissance des dépenses de 9 % entre 2023 et 2025, qui ne serait
que partiellement compensée par l’augmentation des recettes de 2 % sur la période, ce qui
conduirait à une nette détérioration du solde annuel, dont le déficit passerait de 820 M
€
en 2023
à 5 229 M
€
en 2025. L’excédent cumulé du compte serait ainsi consommé avant la fin de
l’année 2025.
Des projections à plus long terme sont réalisées dans le cadre des travaux sur le besoin
de financement actualisé jusqu’en 2070 figurant dans le compte général de l’État
51
et dans le
rapport sur les pensions de retraite de la fonction publique (« jaune Pensions ») annexé chaque
48
Cour des comptes,
La situation financière de la sécurité sociale
, octobre 2022, et
La trajectoire
financière de la sécurité sociale à partir de 2020
, octobre 2021.
49
Cour des comptes, note d’analyse de l’exécution budgétaire du CAS Pensions, 2022.
50
Loi organique n° 2021-1836 du 28 décembre 2021 relative à la modernisation des finances publiques.
51
Chapitre 25.1.2 du compte général de l’État 2021.
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
48
année au projet de loi de finances. Ces calculs reposent sur des hypothèses conventionnelles,
comme le maintien sur toute la période considérée des taux de contributions employeurs alors
même que l’assiette (les rémunérations) augmente sensiblement, alourdissant
de facto
le coût
total pour l’État. Dans le scénario principal, les charges seraient supérieures aux produits
jusqu’en 2048, conduisant à une détérioration du solde cumulé, avant une inversion de la
tendance à partir de 2049, toutes choses égales par ailleurs.
Enfin, le Conseil d’orientation des retraites exploite des projections d’effectifs et de
rémunérations établies par la direction du budget pour calculer la part du régime des retraites
de l’État dans les équilibres financiers globaux dans le cadre de son rapport annuel sur les
évolutions et perspectives des retraites jusqu’en 2070.
L’affichage d’une trajectoire budgétaire triennale dans les annexes du projet de loi de
finances constitue un progrès par rapport à la situation précédente. Compte-tenu de la rapide
dégradation du solde du CAS
Pensions
anticipée pour les années à venir, ces projections doivent
toutefois aller au-delà d’un horizon triennal et être complétées par une explicitation des
principales hypothèses sous-jacentes (démographie, taux des contributions et cotisations,
assiette des contributions etc.), en cohérence avec les travaux réalisés par le Conseil
d’orientation des retraites et dans le cadre de la comptabilité générale de l’État.
Recommandation n° 2.
(direction du budget) : Préciser, dans le projet annuel de
performance du CAS
Pensions
, les hypothèses sous-jacentes à la prévision triennale
d’évolution des dépenses, des recettes et du solde du CAS, et présenter une trajectoire
d’évolution à plus long terme,.
3.1.2
Des indicateurs de coûts de gestion mal calculés
Deux indicateurs qui figurent dans les documents budgétaires (projets et rapports
annuels de performances du CAS
Pensions
) visent à rendre compte des coûts de gestion du
régime rapportés, d’une part, au nombre de ressortissants (actifs et retraités) et, d’autre part,
aux montants de pensions versés.
Les deux indicateurs distinguent ce qui relève des seuls services de la DGFiP (SRE et
CSR/CGR) du coût global intégrant les dépenses supportées par les employeurs.
Le coût global de gestion d’un ressortissant était de 19,35
€
fin 2021, dont 18,29
€
correspondant aux coûts supportés par la DGFiP. Ces deux coûts ont eu tendance à converger
à mesure que le SRE a récupéré les tâches auparavant effectuées par les employeurs, qui ont
réduit les effectifs correspondants. Alors que le coût supporté par la DGFiP a progressé de 27 %
sur la période 2013-2020, le coût global a diminué de 28 %.
La différence, qui correspond aux dépenses supportées par les employeurs, est passée
de 12,5
€
à 1,1
€
sur la période et ne représente plus que 5 % du coût total fin 2021.
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
49
Graphique n° 15 :
Coût de gestion d’un ressortissant du régime PCMR, avec et sans les coûts
supportés par les employeurs (en
€
)
Source : direction du budget et SRE
Les tendances et ordres de grandeur sont les mêmes pour ce qui concerne le coût de
gestion rapporté aux montants de pensions versés. Celui-ci est en effet passé de 0,23
€
pour
100
€
de pension en 2013 à 0,15
€
en 2021, soit une diminution de 35 %. Dans ce total, le coût
employeur représentait 0,08
€
en 2021 contre 0,11
€
en 2013.
Ces indicateurs présentent toutefois une limite importante : le calcul du coût employeur
ne prend en compte que les effectifs déclarés pour les activités relatives à la validation des
services auxiliaires et au rachat d’années d’études. Ainsi, les effectifs retenus pour le calcul
en 2021 correspondent à 69,22 ETP seulement pour l’ensemble des employeurs alors même
que ceux-ci déclarent 901 ETP pour la globalité des activités liées à la gestion des retraites (cf.
supra
).
Sur cette base de 901 ETP et du coût moyen de 65 900
€
/ETP utilisé dans les documents
budgétaires, les coûts de gestion seraient les suivants pour l’exercice 2021.
Tableau n° 9 :
Coût de gestion suivant l’effectif employeurs pris en compte (en
€
)
Calcul actuel
(69,22 ETP)
Calcul sur la base
de 901 ETP
Coût de gestion d’un ressortissant du régime PCMR
avec les coûts supportés par les employeurs
19,35
32,02
Coût de gestion pour 100
€
de pensions versés, avec
et sans les coûts supportés par les employeurs
0,15
0,25
Source : Cour des comptes
Le régime de retraite des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers, géré par la
CNRACL, est le plus comparable à celui des fonctionnaires de l’État, bien qu’il compte moins
12,5
12,4
10,0
10,9
10,5
9,6
7,6
4,5
1,1
-
5
10
15
20
25
30
2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021
Différence (coût
employeurs)
Coût de gestion d’un
ressortissant
Coût de gestion global
(y.c. employeurs) d’un
ressortissant
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
50
de pensionnés (1,5 million). Dans son rapport public thématique d’octobre 2016
52
, la Cour
constatait que «
la mauvaise connaissance des coûts au SRE et la complexité du modèle de coût
de la Caisse des dépôts limitent cependant les comparaisons des coûts totaux des régimes
rapportés au montant total des pensions versées ou au nombre de pensionnés, qui permettraient
d’en évaluer l’efficience. Ces comparaisons sont rendues plus difficiles encore avec le régime
général
».
La comparaison entre les régimes se heurte en effet à l’absence d’harmonisation des
modalités de calcul des indicateurs mais aussi à la différence de périmètre des missions relevant
des employeurs et des services gestionnaires.
Pour ce qui relève de la DGFiP, le coût de gestion communiqué comprend les dépenses
directes du SRE et un coût des CGR/CSR issu de la comptabilité analytique de la DGFiP, ce
qui exclut notamment les principales fonctions supports assurées par cette direction au profit
du SRE, en particulier s’agissant des SI. Le périmètre des charges considérées est donc trop
réduit pour rendre compte de l’ensemble des coûts supportés par la DGFiP pour la gestion du
régime.
De même, le « coût employeurs » utilisé dans les indicateurs de performance est limité
à un périmètre d’activité très restreint et constitué de dispositifs qui ont vocation à disparaître
(validation des services auxiliaires et rachat d’années d’études), ce qui aboutit, d’une part, à
minorer fortement les effectifs pris en compte et, d’autre part, à une trajectoire artificiellement
décroissante à mesure que les dispositifs concernés disparaissent.
Par conséquent, une révision des indicateurs est nécessaire afin de rendre compte des
coûts effectivement supportés par l’État – DGFiP et autres employeurs – pour la gestion du
régime de retraite de ses fonctionnaires. Cette révision pourrait permettre de distinguer des
indicateurs portant sur le coût complet du régime pour l’État et des indicateurs communs avec
les autres régimes destinés à la comparaison des coûts de gestion.
Recommandation n° 3.
(SRE et direction du budget) : Revoir les indicateurs de
performance en intégrant, d’une part, l’ensemble des effectifs consacrés par les
employeurs à la gestion des retraites et, d’autre part, les coûts de structure supportés par
la DGFiP.
3.1.3
Des délais de traitement maîtrisés au SRE mais hétérogènes parmi les
employeurs
Les délais de traitement des demandes de départ à la retraite sont encadrés par le code
des pensions civiles et militaires de retraite
53
et par une circulaire d’août 2015
54
qui décrit la
répartition des tâches entre les employeurs et le SRE et le temps imparti à chaque étape :
52
Cour des comptes,
Les pensions de retraite des fonctionnaires
, octobre 2016.
53
En particulier ses
articles D. 1
et
D. 20
.
54
Circulaire
relative au compte individuel de retraite des agents de l’État et à l’organisation des relations
entre le Service des retraites de l’État et les employeurs partenaires, du 20 août 2015.
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
51
-
les agents doivent déposer leur demande de départ en retraite au moins six mois
avant la date de départ souhaitée ;
-
une fois saisi, l’employeur dispose d’un maximum de deux mois pour contrôler le
dossier, prendre l’arrêté de radiation des cadres et transmettre les éléments
nécessaires au SRE ;
-
le SRE dispose alors de trois mois pour procéder à la liquidation et à la concession
de la pension, qui doit intervenir au moins un mois avant la date d’effet de la
radiation des cadres.
En 2015, le temps moyen de traitement des dossiers entre leur enregistrement et leur
transmission au SRE était de 100 jours calendaires pour les employeurs ayant basculé dans la
gestion centralisée des départs en retraite (groupe 1). L’amélioration continue des processus et
de la qualité des éléments contenus dans les CIR a permis de le réduire très sensiblement et de
respecter le délai réglementaire de deux mois en 2021.
Dans le même temps, les délais de traitement par le SRE sont restés relativement
stables : 27 jours calendaires en 2015 contre 33 en 2021, malgré l’intégration progressive de
tous les employeurs dans le groupe 1 (achevée en 2020) qui s’est traduite par un transfert
d’activités au SRE.
En cumulé, le temps moyen de traitement d’une demande de départ en retraite est passé
de 127 jours en 2015 à 89 en 2021, à mettre en regard du délai réglementaire de 150 jours.
Graphique n° 16 :
Délais moyens de traitement pour les employeurs du groupe 1
Source : SRE
En 2021, les demandes de départ ont été déposées par les agents en moyenne 202 jours
avant le départ effectif. Le temps moyen de traitement des dossiers par les employeurs avant
transmission au SRE s’est établi en moyenne à 56 jours calendaires, inférieur à la cible de deux
mois. Pour autant, les employeurs affichent de fortes disparités, ceux qui traitent le plus de
demandes ayant généralement des délais supérieurs à la cible. Le délai moyen de traitement est
0
20
40
60
80
100
120
2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 Max.
Délai enregistrement -
transmission (employeurs)
Délai réception -
concession (SRE)
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
52
ainsi inférieur à 30 jours à l’Ifremer, à La Poste et à l’IGN tandis qu’il dépasse 90 jours au
CESE, à la DGAC et au MASA
55
.
Le temps de traitement par le SRE entre la réception des éléments et la concession de la
pension était en moyenne de 33 jours calendaires en 2021, inférieur à la cible de trois mois. Si
des disparités existent suivant la provenance des dossiers, les délais moyens sont dans tous les
cas en-deçà de 90 jours (au maximum 66 jours pour les demandes émanant du Conseil d’État).
Schéma n° 4 :
Délais réglementaires et délais moyens 2021
Source : Cour des comptes d’après les données SRE
En 2021, 7,2 % des dossiers (4 408 dossiers) n’avaient pas été liquidés à la date d’effet
de la radiation des cadres, une proportion proche de celle des dossiers déposés moins de 60 jours
avant la date de départ (4 109, soit 6,2 % des dossiers enregistrés). À titre de comparaison avec
le régime général, la Cnav indique que 41,6 % des dossiers sont déposés moins de quatre mois
avant le départ en retraite et que 23,1 % des notifications interviennent après cette échéance
56
.
3.1.4
Des objectifs de qualité de service atteints
Avec la réforme, la relation avec les usagers (actifs et pensionnés) est devenue un enjeu
central pour le SRE. Celui-ci a mis en place un dispositif de suivi qui s’inscrit par ailleurs dans
le cadre des engagements « services publics + »
57
de la DGFiP.
Le SRE mesure notamment la proportion des prises de contact traitées dans les délais
fixés. Des objectifs ont été définis pour les courriels (72 % traités en moins de cinq jours) et les
appels (taux de décrochage en moins de 10 sonneries de 75 %). Un objectif de deux semaines
pour le traitement des courriers a été fixé, sans toutefois définir de taux-cible.
55
Ifremer : Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer ; IGN : Institut national de
l’information géographique et forestière ; CESE : Conseil économique, social et environnemental ; DGAC :
direction générale de l’aviation civile ; MASA : ministère de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire.
56
Annexe 10 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023.
57
Services publics +
est un programme porté par la direction interministérielle de la transformation
publique visant à l’amélioration continue des services publics.
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
53
Après une nette dégradation des délais de réponse liée à la montée en charge des
nouvelles missions du service et à l’augmentation conjoncturelle des sollicitations (en
particulier en 2019), ils ont été améliorés et le taux de réalisation dépasse désormais les objectifs
fixés. L’indice de qualité de service global, qui combine le respect des différents délais, était
de 87 % en 2021, supérieur à la cible de 80 %.
Graphique n° 17 :
Taux de traitement des sollicitations dans les délais prescrits
* Aucune cible n’est définie pour le taux des courriers traités en moins de deux semaines
Source : SRE
Le service réalise par ailleurs des enquêtes auprès de ses usagers, dont les résultats
montrent un taux de satisfaction relativement élevé (87 % pour les contacts téléphoniques et
80 % pour les contacts par courriels), en amélioration sur les trois dernières années. Le taux de
retour à ces enquêtes est de l’ordre de 5 à 10 %, ce qui correspond à la norme
58
.
3.2
Une maîtrise des risques à renforcer
Le dispositif de maîtrise des risques vise à garantir d’une manière permanente la
conformité des pensions concédées avec les dispositions du code des pensions civiles et
militaires de retraite. Le contexte de la période de contrôle (2015-2021) est marqué, d’une part,
par une évolution du périmètre de l’activité du SRE, d’autre part, par une réduction du nombre
de CGR et enfin par la refonte progressive, en partenariat avec la CDC, du SI frappé d’une
obsolescence technique porteuse de plusieurs risques.
58
Un guide pratique «
Une approche renouvelée des études de satisfaction
» publié par le secrétariat
général pour la modernisation de l’action publique indique ainsi que «
les scores habituels sont […] entre 5% et
10% pour les enquêtes externes auprès du grand public
».
70%
95%
97%
87%
72%
75%
80%
0%
10%
20%
30%
40%
50%
60%
70%
80%
90%
100%
Courrier*
Courriel
Téléphone
Indice de qualité de
service global
2015
2016
2017
2018
2019
2020
2021
Cible
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
54
Le contrôle interne piloté par le SRE est décliné sur chacun des trois niveaux de la chaîne
des pensions :
-
chez les employeurs dans les phases amont pour la préparation et le traitement de la
base carrière des pensionnés ;
-
au sein du SRE, en tant qu’autorité concédante, lors de la concession de la pension
du fonctionnaire ;
-
chez les comptables publics de la DGFiP, au sein des CGR, pour la phase finale du
paiement.
3.2.1
Une amélioration nécessaire de la qualité des données transmises par les
employeurs
Une circulaire du Premier ministre du 20 août 2015 a fixé trois orientations majeures
59
pour améliorer la qualité des données de la base carrière des agents en vue du basculement de
l’ensemble des employeurs dans le groupe 1. Leur application a conduit le SRE, en partenariat
avec les employeurs, à mettre en place plusieurs audits (internes et externes) et des revues
périodiques des processus de départ à la retraite et du contrôle interne.
Un dispositif de pénalités financières a été mis en place à partir de 2019
60
qui aboutit à
infliger aux employeurs une pénalité de 51,42
€
par CIR vide ou non déclaré. Son périmètre a
été étendu en 2022 aux comptes présentant des périodes lacunaires. En 2019, 20 employeurs
avaient fait l’objet de pénalités portant sur 35 881 comptes, pour un total de 728 296
€
. En 2021,
seuls 3 146 comptes relevant de neuf employeurs ont été pénalisés, à hauteur de 161 767
€
.
L’ensemble de ces mesures a permis d’améliorer la qualité de la base carrière. Le taux
de comptes comprenant l’ensemble des éléments permettant le traitement de la demande de
départ à la retraite est ainsi passé de 79,8 % en 2018 à 95,3 % fin avril 2021.
De même, le taux des comptes présumés complets (dans lesquels des informations
complémentaires peuvent encore être nécessaires) était de 99,3 % en 2021 contre 62,9 %
fin 2015.
59
Une base carrière unique alimentée au fil de l’eau par les employeurs ; une concentration au SRE du
métier retraire et de la relation usager ; des échanges dématérialisés avec les usagers via l’Ensap.
60
Décrets n° 2018-935 et 2018-936 du 31 octobre 2018.
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
55
Graphique n° 18 :
Évolution de la qualité des comptes
Source : SRE
Depuis l’achèvement en 2020 du volet organisationnel de la réforme, l’un des
principaux enjeux pour le SRE est désormais de garantir la qualité des nouveaux comptes
individuels de la base carrière tout en améliorant la qualité des comptes déjà corrigés. C’est
l’objectif principal du dispositif renforcé de la qualité des comptes (DRQC), présenté en 2019
par le SRE dans le cadre du Corref, qui vise à améliorer la conformité et la complétude des
comptes (en stock et en flux) par la mobilisation de deux leviers : la mise en place de plans
d’action ciblés par employeur et la mobilisation de l’assuré lui-même pour fiabiliser son compte
depuis son espace sécurisé sur l’Ensap.
Afin d’accompagner le déploiement des plans d’action du DRQC, le SRE met à
disposition des employeurs des outils d’aide à la correction des comptes, en particulier pour la
détection des anomalies, ainsi que des indicateurs de qualité visant à identifier des erreurs
techniques et certaines données manquantes. Un suivi des plans d’action est réalisé deux fois
par an (fin mars avant le Corref et fin septembre avant la rencontre annuelle des employeurs)
et présenté aux employeurs.
Fin mars 2022, ce dispositif de correction de la base carrière à l’initiative des
employeurs avait permis d’identifier puis de corriger plus de 54 000 comptes, soit 65 % des
83 000 comptes des employeurs adhérents au dispositif. Il conviendrait maintenant que celui-
ci couvre davantage d’employeurs et de comptes.
Le second levier, qui porte sur la correction des comptes depuis l’Ensap à l’initiative
des usagers, est en phase expérimentale et devrait être progressivement déployé afin
d’accompagner les plans d’actions des employeurs. Une première campagne a été lancée en
2020 auprès de 1 000 usagers relevant de cinq employeurs, qui a confirmé la pertinence de
mobiliser directement l’assuré pour identifier les manques sur sa carrière.
Une campagne expérimentale portant sur environ 300 comptes sur les cohortes des
années 1961 et 1962 a été réalisée avec le ministère de l’Europe et des affaires étrangères
fin 2022 avant une extension progressive à partir de 2023 qui prendra la forme de deux
campagnes annuelles ciblant des cohortes uniformes, de préférence proches du départ à la
retraite. Ces campagnes seront précédées de plusieurs points préparatoires avec les employeurs
63%
93%
91%
95%
96%
98%
99%
80%
87%
92%
95%
0%
20%
40%
60%
80%
100%
120%
2015
2016
2017
2018
2019
2020
2021
Taux des comptes présumés complets
Taux des comptes permettant le départ à la retraite
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
56
qui devront articuler les corrections demandées par les utilisateurs de l’Ensap avec celles
effectuées à leur propre initiative.
3.2.2
Poursuivre le déploiement et l’amélioration des dispositifs de contrôle
interne
Le plan de contrôle interne du SRE est déterminé en début d’année en tenant compte
des résultats de l’année passée et des orientations définies dans le plan national de contrôle
interne. Celui-ci comprend principalement des contrôles
a posteriori
et des contrôles
thématiques.
Le dispositif est constitué de deux niveaux de contrôle :
-
le premier est un contrôle de supervision effectué par les chefs de section du bureau
des retraites du SRE, réalisé sur un échantillon de pensions nouvellement
concédées ;
-
le second est un contrôle de corroboration, réalisé par la mission « risques et audit »
du SRE et portant sur une partie des pensions préalablement soumises au contrôle
de supervision (environ 20 % de l’échantillon précédent). Ces contrôles
a posteriori
donnent lieu à une nouvelle liquidation complète des dossiers sélectionnés puis, le
cas échéant, à la correction des anomalies identifiées.
Sur la période de 2015 à 2021, le SRE a vérifié en moyenne 1 854 dossiers par an,
soit 1,55 % des nouvelles pensions concédées, un pourcentage relativement stable. Sur cet
échantillon, 3,98 % des dossiers examinés présentaient une anomalie sans incidence
financière
61
. Ce taux est en diminution depuis 2015 (5,11 % en 2015 et 2,77 % en 2021).
Le taux de dossiers contrôlés présentant une anomalie ayant une incidence financière
était en moyenne de 2,71 % entre 2015 et 2021. Le SRE se fixe pour objectif de maintenir ce
taux en-deçà de 5 %. La nette dégradation du taux d’anomalie observée en 2021 (4,13 %) est
liée à l’application d’une nouvelle jurisprudence complexe dans un contexte de confinements
et restrictions des déplacements qui n’a pas favorisé la formation des agents du service. Les
actions entreprises pour surmonter ces difficultés ont permis une amélioration du taux
d’anomalie en 2022 (2,63 % au 30 septembre 2022).
Le taux d’incidence financière (montant des anomalies ayant une incidence financière
rapporté au montant des nouvelles pensions concédées) était en moyenne en valeur absolue de
0,18 % entre 2015 et 2021. L’objectif
62
défini par le SRE est de conserver ce taux en-dessous
de 0,5 %.
61
Le seuil de comptabilisation des anomalies ayant une incidence financière correspond à un point
d’indice de la fonction publique, soit 56,23
€
par an.
62
Ce taux alimente un des indicateurs du dialogue de performance de la DGFiP. Ce choix de l’indicateur
annuel est guidé par les informations qui ressortent des rapports de certification des comptes de la sécurité sociale
pour la branche vieillesse. Son périmètre et ses valeurs de référence sont définis dans un objectif de comparabilité
avec les indicateurs de même nature figurant dans les conventions d’objectifs et de gestion 2018-2022 de la CNAV
(indicateurs IQV et TIF) et 2018-2022 de la CNRACL.
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
57
Au total, 6,90 % des dossiers contrôlés en 2021 comportaient une anomalie ayant ou
non une incidence financière (6,69 % en moyenne sur la période 2015-2021). Par extrapolation,
cela correspondrait à 8 152 dossiers en anomalie parmi les 118 148 nouvelles pensions
concédées en 2021 si le taux d’anomalie sur les dossiers contrôlés était le même sur l’ensemble
des dossiers.
À titre de comparaison avec le régime général, la Cnav indique que le pourcentage des
dossiers contrôlés en 2021 comportant une anomalie s’élevait à 14 %
63
(12,83 % en moyenne
sur la période 2015-2021). S’agissant du taux d’incidence financière, il était en 2021 de 1,2 %
64
(1,29 % en moyenne sur la période 2015-2021).
Tableau n° 10 :
Résultats du contrôle interne du SRE
2015
2016
2017
2018
2019
2020
2021
Moy.
Nombre de contrôles
1 978
1 866
1 918
1 817
1 867
1 616
1 914
1 854
% des nouvelles
pensions contrôlées
1,73 %
1,54 %
1,52 %
1,41 %
1,55 %
1,47 %
1,62 %
1,55 %
Taux d’anomalie sans
incidence financière
5,11 %
5,52 %
4,54 %
3,91 %
3,70 %
2,29 %
2,77 %
3,98 %
Taux d’anomalie avec
incidence financière
2,22 %
1,88 %
2,82 %
3,03 %
2,73 %
2,17 %
4,13 %
2,71 %
Incidence financière
unitaire moyenne (
€
brut par an)
1 455
1 861
1 409
1 414
1 408
1 687
1 008
1 463
Montant annuel des
anomalies détectées
(en M
€
)
3,7
4,2
5,0
5,5
4,6
4,0
4,9
4,6
Taux d’incidence
financière
0,16 %
0,17 %
0,19 %
0,19 %
0,17 %
0,17 %
0,19 %
0,18 %
Note de lecture (chiffres 2021) : sur 100 nouvelles pensions contrôlées, 4,13 présentent au moins une anomalie
ayant une incidence financière. Le montant moyen de l’incidence financière sur ces 4,13 pensions est de 1 008
€
brut par an. L’incidence financière de l’ensemble des pensions présentant une anomalie (taux d’incidence
financière) représente 0,19 % du montant de la totalité des nouvelles pensions concédées dans l’année.
Source : SRE
Parmi les dossiers ayant une incidence financière, le montant en valeur absolue de
l’anomalie était en moyenne de 1 463
€
par an. Jusqu’en 2018, la répartition des anomalies
détectées par les contrôles du SRE était équilibrée entre celles en faveur des pensionnés et celles
en leur défaveur. Depuis 2019, elles sont en moyenne à 80 % en défaveur des pensionnés.
En dehors d’un dysfonctionnement exceptionnel de l’outil de liquidation et de
concession des pensions (Visa3) qui a appliqué en 2021 un taux de revalorisation erroné pour
63
Le pourcentage est calculé à partir du taux de fiabilité des pensions publié dans le PLFSS 2023.
64
Le pourcentage est calculé à partir de l’indicateur de risque financier résiduel sur les pensions publié
dans le PLFSS 2023.
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
58
les agents démissionnaires, les principales anomalies détectées concernent le grade ou l’indice
ainsi que les droits et bonifications liés aux enfants.
Les contrôles réalisés par le SRE ont aussi mis en évidence l’absence de pièces
justificatives suffisantes pour 2,31 % des pensions contrôlées. Les dossiers concernés ont été
régularisés et les agents liquidateurs à nouveau sensibilisés sur ce sujet.
Ces résultats montrent par ailleurs la nécessité d’étendre le contrôle au stock des
pensions versées et d’orienter la correction des comptes (par les employeurs et les usagers) en
priorité vers les zones de risque identifiées.
De plus, des méthodes de ciblage plus avancées devraient être mises en place, en
substitution ou en complément du contrôle aléatoire des dossiers. Bien que la méthode actuelle
de sélection des pensions appliquée par le SRE réponde aux règles fixées par le référentiel du
contrôle interne de l’État
65
, l’identification des dossiers à contrôler gagnerait à hiérarchiser les
pensions selon une grille de notation, sur la base d’une carte des risques, en vue de cibler les
plus complexes et les plus risqués.
Dans la perspective de la mise en service du futur SI mutualisé avec la CDC (cf.
infra
),
l’utilisation par le SRE du lac de données développé à partir de ces applications
66
conjuguée à
l’exploitation des machines apprenantes permettant des analyses prédictives devrait être
envisagée pour constituer des ensembles homogènes de pensions disposant du même profil en
termes d’exposition aux risques.
En complément des contrôles de supervision et de corroboration, le SRE pilote des
contrôles thématiques, réalisés en lien avec les CGR, qui portent à la fois sur des risques
identifiés à partir de l’application du code PCMR et sur des thèmes définis chaque année dans
le cadre du plan national de contrôle interne.
Le SRE a notamment engagé des travaux spécifiques sur le cumul emploi/retraite non
déclaré. Le croisement des données du SRE avec le fichier du centre national de traitement des
données fiscales a permis d’identifier 256 cas représentant un montant indûment versé de
7,6 M
€
. Plus de la moitié des pensionnés concernés par la procédure de régularisation
percevaient des rémunérations d’activité mensuelles dépassant 10 000
€
bruts.
Une démarche similaire a été engagée par le SRE dans le cadre des travaux conduits
conjointement avec la CDC pour exploiter les informations contenues dans le dispositif de
ressources mensuelles
67
, alimenté par la déclaration sociale nominative mise en place en 2019
68
,
pouvant aboutir à une meilleure connaissance des traitements et rémunérations accessoires
perçus par les pensionnés. Le SRE envisage par ailleurs de développer une démarche similaire
65
Celui-ci indique que l’application de la loi normale avec un intervalle de confiance de 95 % et une
marge d’erreur de 1 % devrait permettre d’évaluer le taux d’erreur global contenu dans la population totale.
66
Un lac de données (en anglais
Data lake
) est une méthode de stockage de données massives utilisées
par les mégadonnées (
Big data
en anglais). Ces données sont gardées dans leur format original ou sont très peu
transformées. Plusieurs typologies de données peuvent être gérées dans un lac de données (données structurées
comme un fichier Excel, semi-structurées comme un fichier au format XML, non structurées comme des mails,
des images voire des vidéos).
67
Le dispositif des ressources mensuelles, alimenté par les données de la déclaration sociale nominative,
permet d’agréger un ensemble de données, essentiellement des ressources, à la maille individuelle et de les restituer
à des opérateurs en fonction de leurs besoins.
68
Décret 2019-969 du 18 septembre 2019.
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
59
pour mieux contrôler les majorations pour enfant grâce à un rapprochement des données du
service avec des bases externes (administration fiscale ou Insee).
Enfin, une réflexion est en cours sur la possibilité d’alléger et d’automatiser le traitement
des dossiers de pension les plus simples (pour les carrières « linéaires ») ne nécessitant pas de
vérifications des éléments de carrière ou de rémunération.
Ces travaux devraient être poursuivis afin de renforcer la maîtrise des risques et de
réduire le taux d’anomalie constaté.
Recommandation n° 4.
(SRE) : Renforcer le contrôle interne en amplifiant le dispositif
renforcé de qualité des comptes (DRQC) auprès des employeurs, en tirant parti des
méthodes d’analyse des risques (
data mining
) et en étendant le contrôle interne au stock
des pensions.
3.2.3
Un contrôle par les CGR en cours d’évolution
En complément du contrôle comptable, les CGR participent à la mise en
œ
uvre du plan
national de contrôle interne défini par le SRE. Les thèmes de contrôle sont les mêmes depuis
plusieurs années et portent principalement sur :
-
les relevés d’identité bancaire des pensionnés ;
-
la revue des habilitations des applications de paiement ;
-
la justification de l’apurement des dossiers de pensionnés ;
-
les paiements manuels hors échéance ;
-
les paiements d’arrérages restant dus au décès.
3.2.3.1
La priorisation des contrôles effectués par les CGR
Le SRE a expérimenté puis généralisé en 2017 un dispositif de priorisation des contrôles
lors du paiement des pensions, afin de mieux cibler les dossiers les plus risqués. Des critères
cumulatifs ont été définis
69
, qui permettent d’écarter du contrôle les pensions à risque maîtrisé
(mécanisme « Prisma »), qui représentent en moyenne 48 % des pensions payées entre 2017
et 2021. À moins d’un changement de coordonnées bancaires ou lorsque le montant mensuel
est supérieur à 4 000
€
, le paiement de ces pensions intervient sans action ni contrôle des agents
des CGR. Les dossiers présentant un risque selon le SRE (52 % en moyenne) font l’objet d’un
contrôle et d’une action du comptable public. La répartition entre les deux catégories est
relativement stable depuis 2017.
69
La pension est une pension civile ou militaire de retraite ; le titulaire est un ayant droit ; la pension
concerne une première liquidation ; le texte d’information apparaissant sur le titre de la pension est compris dans
une liste fournie par les bureaux métiers SRE ; la date de jouissance de la pension est postérieure à la date de
l’arrêté de la concession ; le droit à la majoration pour enfant (s’il existe) doit être définitivement ouvert à la date
de mise en paiement. Pour cela le dernier enfant doit avoir atteint l’âge de 16 ans ; le pourcentage normal liquidable
doit être inférieur ou égal à 10% ; la pension ne doit pas être assortie d’une allocation temporaire d’invalidité.
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
60
Les modalités du mécanisme « Prisma » n’ont pas été revues depuis sa généralisation
en 2017, afin de s’assurer que les critères retenus demeurent pertinents compte tenu des
changements intervenus dans le code PCMR et pour tenir compte du résultat des différents
contrôles réalisés. Compte tenu de l’ampleur de cette simplification dans la chaîne de paiement
dans une période marquée par une réduction du nombre de CGR et par la baisse des effectifs
affectés aux contrôles, les incidences financières de ce mécanisme de priorisation devraient
pourtant faire l’objet d’un suivi. En effet, l’objectif initial de ce mécanisme était de concentrer
les contrôles des agents sur les pensions non « Prisma ». Son déploiement ne s’est pourtant pas
traduit jusqu’à présent par une intensification des contrôles sur les pensions risquées ou par une
amélioration notable des taux des pensions exemptes d’anomalies.
Le futur SI mutualisé intégrera les différentes étapes de la chaîne de la pension, ce qui
conduira à une réduction significative des ruptures applicatives et des tâches de contrôle
réalisées par les CGR lors du paiement. Cela représente une opportunité importante de refonte
du dispositif de contrôle interne au sein des CGR et de son articulation avec celui du SRE, dans
un contexte marqué par la réforme de la responsabilité des gestionnaires publics.
3.2.3.2
Les contrôles d’existence
Les CGR réalisent par ailleurs des contrôles d’existence et la radiation des pensionnés
en s’appuyant sur l’exploitation d’un fichier transmis par l’Insee. Cette procédure ne trouve pas
à s’appliquer pour la DSFiPE en ce qui concerne les pensionnés résidant à l’étranger. Cette
direction utilise en effet un autre système d’information (Pastel), qui n’est pas raccordé à la
chaîne de pension du SRE et n’effectue pas le contrôle automatisé d’existence des pensionnés.
Les vérifications de la DSFiPE sont dès lors réalisées différemment selon les risques
rencontrés dans chaque pays, le montant des pensions versées et l’âge des pensionnés. Elles
font intervenir d’autres acteurs, notamment les régies diplomatiques dans les ambassades de
France et l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre. La DSFiPE a par
exemple décidé, par mesure de simplification pour les pensionnés résidant en Algérie, de
considérer la fourniture d’un relevé d’identité bancaire comme valant preuve de vie. Cette
pratique est contraire à la loi
70
, qui prévoit l’obligation pour les pensionnés qui résident à
l’étranger de fournir annuellement un certificat de vie émanant des autorités locales. Un RIB
est en effet un document aisément falsifiable.
La maîtrise de ces risques devrait être revue conjointement avec le SRE et les autres
régimes de retraite
71
et dans la perspective du déploiement du futur SI mutualisé avec la CDC.
De plus, l’organisation de cette politique de contrôle devrait tenir compte d’un objectif de
70
Article 83 de la loi n° 2012-1404 du 17 décembre 2012 de financement de la sécurité sociale pour 2013.
71
Le rapport de la Cour des comptes publié en septembre 2017 sur
l’application des lois de financement
de la sécurité sociale
avait notamment recommandé de «
renforcer les contrôles sur pièces a posteriori de
l’existence des assurés et ayant droits, mettre en place ou reconduire des contrôles réguliers d’existence sur place
dans les pays qui concentrent les principaux enjeux financiers et mutualiser l’information sur les résultats de ces
contrôles entre régime de base et complémentaires
. »
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
61
fermeture du réseau des trésoreries auprès des ambassades de France, ce qui implique pour la
DSFiPE de revoir sa chaîne des paiements
72
.
3.2.3.3
Le contrôle des coordonnées bancaires
Le SRE ayant identifié un risque spécifique portant sur la demande frauduleuse de
changement des coordonnées bancaires, les CGR exercent une vigilance particulière dans
l’exécution de ces tâches, en collaboration étroite avec le SRE. Les changements au profit de
comptes hébergés par des « néo-banques », qui réalisent des contrôles réduits à l’ouverture d’un
compte, sont notamment ciblés.
Conjointement avec la mission « responsabilité, doctrine et contrôle interne comptable »
de la DGFiP, le SRE a réalisé une documentation à destination des CGR précisant les actions à
entreprendre lorsqu’un virement a été réalisé vers un compte bancaire frauduleux.
Le nombre de fraudes avérées reste à ce stade limité (13 cas entre 2019 et 2020). De
plus, elles sont généralement rapidement détectées, les pensionnés se manifestant lorsqu’ils
n’ont pas reçu leur pension.
Pour autant, le nombre de contrôles
a posteriori
programmés dans le plan national de
contrôle interne de la DGFiP
et effectués par les CGR est relativement faible : alors que les
CGR réalisent chaque année plus de 127 000 modifications de coordonnées bancaires, les
contrôles portent sur environ 1 500 dossiers
73
. Bien que les taux de conformité constatés les
dernières années à l’occasion des contrôles effectués sur les changements de coordonnées
bancaires soient jugés satisfaisants par le SRE, un renforcement de ces contrôles au sein des
CGR devrait être envisagé en collaboration avec le service
74
.
3.3
Une modernisation des SI à mener à terme, un projet à mettre sous
contrôle
3.3.1
Une structure SI du SRE à moderniser
Le SRE ayant le statut de service à compétence nationale de la DGFiP, son système
d’information (SI) est très largement intégré à celui de cette direction. Le SRE dispose d’un
72
Cour des comptes, « Les trésoreries auprès des ambassades de France : une survivance injustifiée », in
Rapport public annuel 2015
, février 2015.
73
Chaque CGR a contrôlé en 2021 les coordonnées bancaires d’environ 60 pensionnés, à l’exception
deux CGR qui ont vérifiés respectivement 300 et 360 RIB.
74
À titre de comparaison avec les mesures de contrôle interne des données de paiement et des paiements
des prestations de la Cnav,
l’acte de certification des comptes de la sécurité sociale de 2021 publié par la Cour des
comptes
indique que «
bien que le dispositif de contrôle interne des opérations de paiement soit correctement mis
en
œ
uvre au sein du réseau, il présente encore certaines limites liées notamment aux outils employés à cette fin
(dépendance à l’égard d’outils bancaires, suivi insuffisant des suppressions de paiement réalisés par ces
derniers).
»
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
62
service dédié à la gestion de son SI, qui relève d’un bureau « études, développement,
infrastructure, et production » composé d’environ 80 personnes. Celui-ci ne dispose toutefois
pas d’un pouvoir décisionnel sur les orientations stratégiques : le SRE utilise les solutions,
préconisations et le socle de la DGFiP dont il applique également la politique de sécurité. La
direction du système d’information du SRE est donc pilotée par la DGFiP.
Le bureau informatique du SRE a fait l’objet d’une profonde réorganisation pour y
concentrer l’ensemble des fonctions liées aux SI et mieux coordonner les bureaux de maîtrise
d’
œ
uvre. Le développement et l’administration d’infrastructures informatiques nécessitent en
effet des équipes projets transverses intégrant dès le départ les différentes expertises.
Cette nouvelle organisation est opérationnelle depuis 2021 et sa pertinence devra être
évaluée à l’aune de ses résultats. Ce bureau aura notamment la charge de mener à bien les
projets de digitalisation des processus et la mise en
œ
uvre du « Cloud Nubo »
75
de la DGFiP,
qui requièrent une conduite du changement à mener avec l’ensemble des acteurs du SI.
Le SRE pilote par ailleurs plusieurs projets de modernisation tels que la refonte des
applications de paiement et de liquidation en partenariat avec la CDC (cf.
infra
) et le
décommissionnement
76
de « Visa3 », son outil pour liquider et concéder les pensions. Il
contribue enfin à la poursuite de l’extension de l’offre de l’Ensap et au déploiement d’outils
inter-régimes visant à améliorer le service rendu aux usagers.
Situé sur une zone réseau DGFiP (zone 3 renforcée)
77
, le SI du SRE dispose d’une cellule
locale de sécurité avec un RSSI
78
et un adjoint, qui assurent la gestion des incidents internes, le
pilotage des homologations RGS
79
, la production des analyses risques RGPD
80
, la
sensibilisation à la sécurité interne et le soutien auprès des équipes opérationnelles.
Dans un contexte où la sécurité informatique devient primordiale, le SRE et son bureau
spécialisé orientent leurs ressources vers la protection des données. La fonction du RSSI a été
intégrée aux équipes du bureau informatique en mai 2022 et devait être occupée par un ancien
chef de projet et architecte du SI. Cependant, en octobre 2022, cet agent était encore en
transition entre les deux fonctions et cumulait les postes de RSSI et de chef de projet. Or pour
être efficace, le RSSI doit être indépendant et ne se consacrer qu’au contrôle de la sécurité
informatique au sein de l’entité.
Dans un rapport d’avril 2019
81
, la Cour des comptes recommandait à la DGFiP de
formaliser son schéma directeur informatique (SDI) afin de décrire l’évolution souhaitée du SI
75
La doctrine « Cloud au centre » (
circulaire du Premier ministre n° 6282-SG du 5 juillet 2021
) instaure
le stockage dans le « cloud » comme le mode d’hébergement et de production par défaut des services numériques
de l’État. Le « Cloud Nubo » est une des deux offres internes de l’État. Opéré par la DGFiP pour l’ensemble des
ministères, il est destiné à accueillir des services, données et traitements sensibles de l’État.
76
Pratique consistant à retirer une ou plusieurs applications du système d’information.
77
La notion de zone correspond à des niveaux de découpage et de protection du système informatique.
Une zone de niveau 3 indique la présence de deux niveaux de contrôles en amont (pares-feux).
78
Responsable de la sécurité des systèmes d’information.
79
Le référentiel général de sécurité (RGS) a pour objet le renforcement de la confiance des usagers dans
les services électroniques mis à disposition par les autorités administratives.
80
Le RGPD (règlement général sur la protection des données) encadre le traitement des données
personnelles sur le territoire de l’Union européenne.
81
Cour des comptes, «
Les systèmes d’information de la DGFiP et de la DGDDI
», mai 2019.
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
63
et les ressources à y consacrer. Cette recommandation a été mise en
œ
uvre en 2020 avec la
formalisation d’un SDI pour l’ensemble de la direction.
L’évolution de l’activité et des besoins informatiques du SRE implique désormais la
mise à jour de sa précédente feuille de route SI, élaborée en 2015 pour la période 2016-2025.
L’actualisation d’un tel document permettrait de s’assurer de l’identification des nouveaux
besoins du SI et du partage de ces priorités entre les services, et ainsi de renforcer la visibilité
sur l’évolution du SI du SRE.
Le développement continu du SI et l’extension des services en ligne augmentent les
menaces pour son intégrité, alors même que les exigences en la matière sont fortes pour le SRE.
C’est pourquoi le service a initié un plan de mise en conformité avec le RGPD et la loi n° 2018-
493 du 20 juin 2018 relative à la protection des données personnelles. Auparavant intégrée au
sein du bureau informatique du SRE, la thématique RGPD possède maintenant un responsable
dédié. Une sensibilisation des agents au traitement des données personnelles a également été
mise en place depuis la directive européenne de 2016 et le RGPD de 2018.
Le SRE utilise actuellement une salle serveurs présente dans ses locaux pour
l’hébergement des applications internes. L’obsolescence progressive des composants de cette
salle la rend inapte à supporter les évolutions du SI au-delà d’une dizaine d’années. En
conséquence, le SRE souhaite migrer la totalité de son infrastructure sur le « cloud NUBO » de
la DGFiP, ce qui implique une modernisation importante de ses infrastructures. Le SI du SRE
opère en effet une partie de ses technologies sur COBOL, l’un des plus anciens langages de
programmation informatique, dont la maintenance nécessite des compétences rares et coûteuses
sur le marché.
À partir de l’identification des problématiques clés de son SI, le SRE a donc mis en place
plusieurs actions permettant d’y répondre. Le projet structurant du service pour les prochaines
années est celui répondant à l’obsolescence grandissante des applications de paiement et de
liquidation, le programme MutSI.
3.3.2
MutSI, un projet de mutualisation accusant d’importants retards et
surcoûts
3.3.2.1
Une mutualisation des SI dont la complexité a été sous-estimée dès l’origine
Dans le contexte particulier du projet de création d’un régime de retraite universel et de
rapprochement institutionnel de la CDC et du SRE et après une phase d’études réalisée en 2019
et 2020, ces deux administrations ont décidé de mutualiser leurs SI sur les deux principaux
processus que sont la liquidation et le paiement des pensions.
En dépit de l’abandon du projet de réforme (cf.
supra
), la CDC et la DGFiP ont poursuivi
le développement mutualisé d’un SI permettant de répondre à leurs besoins communs à un
moindre coût, sur la base des études réalisées en 2020 qui avaient confirmé la possibilité de
faire converger les processus de liquidation et de paiement des deux entités, sous réserve d’un
certain nombre de conditions fonctionnelles, techniques, juridiques et financières.
Le programme, dénommé MutSI, est porté de manière égalitaire et partenariale par le
SRE et la direction des politiques sociales (DPS) de la CDC. Son contenu fait écho à un rapport
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
64
de la Cour des comptes
82
recommandant notamment d’«
examiner préalablement au lancement
d’un projet la possibilité de privilégier une solution mutualisée
».
Le projet porte sur un périmètre couvrant au total 4,5 millions de fonctionnaires de
l’État, territoriaux et hospitaliers, 3,2 millions de pensionnés et plus de 40 000 employeurs
83
,
ce qui représente des enjeux financiers (en termes de pensions versées) de plus de 116 Md
€
(dont 58 Md
€
pour l’État). Cependant, sa complexité a été sous-estimée lors des études initiales
et sa structuration apparaît trop fragile.
Le cadre juridique du programme MutSI reposera à terme sur deux conventions de
partenariat. La première, signée en décembre 2020, est une convention de construction du SI
mutualisé qui précise les modalités de la coopération ainsi que les conditions financières du
programme. Elle prévoit notamment un financement à parts égales pour la construction du SI
mutualisé.
Une deuxième convention devait être établie courant 2022 afin de définir le cadre de
l’exploitation du SI, mais sa signature a été retardée et faisait toujours l’objet de nombreuses
négociations début 2023, notamment sur le partage de la charge financière, la réversibilité (cf.
infra
) et la propriété intellectuelle.
3.3.2.2
Une structuration en trois briques
Le programme MutSI est décliné en trois briques : le référentiel, la liquidation, le
paiement. Ces trois projets correspondent à chacun des processus communs de gestion des
pensions du SRE et de la CDC.
Schéma n° 5 :
Les trois briques du projet MutSI
Source : SRE
Le projet « référentiel » vise à mettre en place un référentiel commun des usagers du
SRE et de la CDC, qui s’appuiera sur celui existant à la CDC, adapté aux spécificités du SRE
82
Cour des comptes, «
La conduite des grands projets numériques de l’État
», Juillet 2020.
83
La volumétrie des employeurs tient principalement à l’activité de la CNRACL.
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
65
et complété par un raccordement à la base de données des pensionnaires du SRE afin d’assurer
la continuité des services Ensap. Ce raccordement est donc critique pour l’activité du SRE :
sans lui, le service ne pourrait réaliser ni la liquidation ni le paiement des pensions.
Le projet « liquidation » consiste à développer une nouvelle application partagée de
liquidation, dénommée GULI (gestion unifiée de la liquidation), qui repose sur des processus
métiers communs et notamment sur l’exploitation de moteurs de calcul du SRE rendue possible
par la proximité des réglementations retraite entre l’État (SRE) et les collectivités territoriales
(CNRACL).
Le déploiement de la solution GULI devrait permettre, outre le remplacement des
applications obsolètes de la CDC, l’accès à de nouvelles fonctionnalités attendues par les deux
entités. Elle couvrira en effet la gestion de la carrière, le conseil et le droit à l’information
retraite, la liquidation et la révision des pensions de retraite de droits directs (vieillesse et
invalidité), les droits dérivés et la gestion des allocations temporaires d’invalidité.
Enfin, le projet « paiement » vise à remplacer l’application utilisée par le SRE au profit
d’applications déjà déployées au sein de la CDC
84
. Le SRE utilise en effet un outil (PEZ)
obsolète, codé en langage COBOL avec un système d’exploitation datant des années 1960
85
.
La pérennité de ce dernier n’étant pas assurée au-delà de 2023, il est urgent pour la DGFiP de
sortir de cet environnement.
Le système d’information mutualisé devra être raccordé à celui de la DGFiP afin
d’alimenter l’application Chorus et de déclencher les paiements par la Banque de France.
À l’issue du projet, les agents du SRE devraient bénéficier d’outils plus faciles
d’utilisation, avec des interfaces utilisateurs ergonomiques et adaptées au besoin métier. Pour
des agents habitués à travailler sur des technologies anciennes, l’application OCAPI de la CDC
apporte de nombreuses nouvelles fonctionnalités : navigation par menus, interfaces interactives
ou encore menus déroulants.
L’hébergement du projet MutSI fait appel aux capacités de la filiale informatique de la
CDC (ICDC
86
) et bénéficiera d’un hébergement interne, sans recours à des prestataires externes.
Il s’appuiera notamment sur deux centres de données
87
de la CDC situés à Paris et Bordeaux
(site de repli), partagés avec la Banque de France et conformes aux normes de sécurité
bancaires. Au regard des moyens et assurances apportés par la CDC, le choix de l’hébergement
au sein de sa filiale informatique ICDC apparaît pertinent.
84
OCAPI pour les calculs, SUI pour l’émission et le suivi des paiements et CLIENT pour le référentiel
des usagers.
85
GCOS
(
General Comprehensive Operating System
) est une famille de systèmes d’exploitation
développée dans les années 1960.
86
Gestionnaire de l’hébergement informatique de la CDC, ICDC est un groupement d’intérêt économique
constitué de la CDC et de CDC Placement, qui intervient en dehors du champ concurrentiel et propose une
externalisation des actifs informatiques. L’activité de retraite au sein d’ICDC représente un tiers de son chiffre
d’affaires, soit environ 100 M
€
.
87
Un datacenter, ou centre de données, sert à organiser, stocker et traiter des données grâce à une
infrastructure complexe, composée de serveurs, de routeurs et d'espaces de stockage.
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
66
3.3.2.3
Des décalages préoccupants du calendrier
Le déploiement du projet « référentiel » constitue le premier jalon du programme et
devait initialement intervenir en mars 2022. Finalement opérationnel depuis la fin d’année
2022, sa mise en service complète est liée à celle du projet « paiement », qui a été retardée (cf.
infra
). La concomitance des mises en service des deux projets est également porteuse de risques
quant à l’exhaustivité et à l’exactitude de la migration de données. Il conviendra de s’assurer
de la qualité et de la bonne reprise des données.
Le projet « liquidation » se décompose lui-même en quatre lots (simulation, départ,
réversion, allocation temporaire d’invalidité), dont la mise en production devait intervenir de
janvier 2023 au premier trimestre 2024. Les retards constatés ont conduit à décaler de plusieurs
mois la date prévisionnelle de mise en production. Deux lots (départ et réversion) concentrent
les tensions du fait des différences dans les processus métiers entre la CDC et le SRE, ce qui
pourrait produire une divergence des solutions et donc des applications SI, contraire à l’esprit
de la mutualisation.
Certains cas d’usage non identifiés préalablement diffèrent en effet entre les deux entités
et la difficulté de la direction de projet bicéphale à trancher entraînent des délais (et donc des
coûts) supplémentaires, alors même que ces cas d’usage restent marginaux. Il apparaît donc
nécessaire de mieux évaluer la criticité des sujets au sein des équipes SRE-CDC afin de prioriser
les cas d’usage essentiels à la MutSI.
Enfin, le projet « paiement » devait initialement être mis en production en mode « big
bang »
88
au 1
er
janvier 2023. Cependant, le retard pris dans l’avancée des travaux (décalages de
recettes, retard dans les tests de validation…) a conduit à la réalisation d’audits externes en
2022, qui ont préconisé un déploiement progressif, par lotissement de population, à partir du
1
er
avril 2023.
Le premier lot du projet « paiement » devrait concerner les traitements attachés à la
Légion d’honneur et à la Médaille militaire ainsi que la retraite du combattant, ce qui correspond
à environ 850 000 pensionnés et représente pour le SRE une certaine variété de cas d’usage
(décès, attribution ou changement de CGR…). Cette population présente également une
simplicité de calcul des pensions qui correspondent, pour la plupart, à des montants forfaitaires.
Le deuxième lot, considéré comme le plus complexe, correspond à plus de
2 700 000 pensionnés et devrait être effectué en fin de second semestre 2023 si le déploiement
du premier lot est conclusif.
Les CGR, utilisateurs finaux de l’outil de paiement, ont été associés dans la phase de
conception mais ne sont pas impliqués dans l’étape de test de la nouvelle solution. Cette absence
ne permet pas de s’assurer de la bonne prise en compte de tous leurs besoins, même si
l’application de paiement est déjà en fonctionnement dans les services de la CDC et bénéficie
donc d’une expérience utilisateurs proche.
88
Cette méthode consiste à mettre en service tous les nouveaux lots en même temps. Elle nécessite un
important travail en amont, avec un fort risque de surcharge si des problèmes sont rencontrés lors du lancement
du projet.
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
67
Schéma n° 6 :
Prévision initiale et actualisée des mises en production du programme MutSI
Nota : RC : retraite du combattant ; LH : légion d’honneur ; MM : médaille militaire ; PCMR : pensions civiles
et militaires de retraites ; PMI : pension militaire d’invalidité ; ATI : allocation temporaire d’invalidité
Source : SRE
Les échéances présentées dans ce schéma correspondent aux objectifs fixés par la
direction du programme mais pourraient encore être décalées. En effet, les projets
« liquidation » et « paiement » représentent, du fait de leur complexité et de leur incidence sur
la gestion des pensions, les projets les plus risqués en termes de coûts et de délais. Il appartient
aux directions du SRE et de la CDC de s’assurer, avec un suivi régulier et détaillé des actions
bloquantes, de leur bon déroulement. La gouvernance de ces projets doit également s’assurer
de conserver une logique de mutualisation des applications, en se basant sur l’existant de
chacune des deux parties.
3.3.2.4
D’importants surcoûts déjà constatés
Le budget initial du programme, à fin 2020, correspondait à 44 000 jours-homme
89
. Il a
été révisé à 59 000 jours-homme par un avenant en avril 2022, soit une augmentation de 35 %
équivalant, sur la base d’un taux journalier moyen (TJM
90
) de 750
€
, à un dépassement de
11,6 M
€
du budget initial, sans compter plusieurs dépenses complémentaires nécessaires à la
réalisation du projet qui n’avaient pas été incluses dans l’enveloppe initiale comme l’achat de
89
Unité de mesure correspondant au travail d’une personne pendant une journée.
90
Ce taux est le résultat d’une analyse entre les différents TJM SRE et CDC utilisés dans le cadre de leurs
marchés en intégrant : le domaine d’activité (MOE et MOA), les différents niveaux de prestations (développement,
PMO, conduite du changement, conseil), les différents profils (junior, confirmé, sénior, manager).
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
68
licences, les évolutions technologiques ou encore la maintenance évolutive. Le chiffrage de ces
coûts et leur inscription dans le partenariat financier noué avec la CDC doivent être réalisés
sans délai.
Tableau n° 11 :
Évolution du budget MutSI (en jours-homme)
Budget
initial
Budget révisé
09/2021
Budget révisé
04/2022
Dépassement
Référentiel
3 355
3 069
4 410
31 %
Liquidation
21 410
23 052
24 249
13 %
Paiement
10 100
14 794
20 684
105 %
Infra/portail
1 938
1 537
1 535
- 21 %
Pilotage
7 360
7 747
8 824
20 %
Total en jours-
hommes
44 163
50 199
59 702
35 %
Total en M
€
*
33,1
37,6
44,8
11,7
* sur la base d’un taux journalier moyen de 750
€
Source : Cour des comptes d’après des données du SRE
Ce dépassement budgétaire de 35 % s’explique par la sous-estimation de certaines
difficultés relatives, en particulier, à la fiabilité des données, à l’intégration des règles de gestion
des entités ou encore au raccordement des différentes applications. De plus, des choix ont été
opérés qui s’écartaient des hypothèses de départ, comme l’absence de mutualisation des
référentiels et de la base carrière entre les deux entités du fait de différences jugées trop
profondes dans les processus métiers.
Enfin, les équipes ont rencontré des difficultés pour l’interconnexion de deux systèmes
par principe extrêmement sécurisés (DGFiP en zone renforcée 3 contre CDC en zone 4 avec les
exigences bancaires contrôlées par l’ACPR).
Ces différents éléments illustrent le caractère trop optimiste et insuffisamment réaliste
des études d’avant-projet qui ont sous-estimé la complexité du projet MutSI ainsi que les
conditions techniques, financières et de durée de sa réalisation.
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
69
3.3.3
Un pilotage bicéphale qui fait peser des risques sur la poursuite et
l’achèvement du projet
3.3.3.1
Une absence de consultation préalable de la direction interministérielle du
numérique (Dinum)
La réglementation
91
prévoit depuis 2019 une saisine obligatoire de la Dinum pour avis
conforme de tous les projets informatiques dont le montant prévisionnel
92
dépasse 9 M
€
, ce qui
n’a pas été fait pour le programme MutSI alors même que son budget initial était de 33 M
€
. La
soumission du projet à l’avis de la Dinum – à laquelle le SRE était contrainte - aurait pourtant
pu permettre de contre-expertiser l’estimation de son coût et de son retour sur investissement
et d’apporter un regard extérieur sur ce programme complexe dès son origine.
MutSI est en effet un partenariat égalitaire entre deux institutions (DGFiP et CDC), dont
la direction repose sur quatre administrations (DGFiP, SRE, ICDC et DPS). Le programme
mobilise plus de 150 personnes implantées sur quatre sites, en charge de trois projets conduits
suivant deux méthodes différentes (« cycle en V » et « agile »
93
).
Les audits externes ont identifié des zones de risques au sein de cette structure complexe,
en particulier en ce qui concerne la capacité de la direction de programme à raccourcir des
chaînes de décision jugées trop longues, le lien de confiance entre le SRE et la CDC quant à
une réussite commune, et l’efficacité à traiter les sujets urgents et importants à travers une
gestion des risques simplifiée.
3.3.3.2
Des difficultés qui remettent en question l’équilibre financier du projet
Les études préalables se sont appuyées sur une comparaison entre les coûts de
développement d’un SI mutualisé et ceux d’une modernisation simultanée des deux SI pris
séparément pour évaluer l’intérêt économique de l’opération. Bien que l’investissement
nécessaire à une solution mutualisée soit supérieur à celui pour des outils séparés, les économies
réalisées sur l’exploitation devaient permettre un retour sur investissement au bout d’un an et
demi
94
.
91
Décret n°2019-1088 du 25 octobre 2019 relatif au système d’information et de communication de l’État
et à la Dinum : «
les projets interministériels et ministériels répondant à des caractéristiques, notamment de coût
prévisionnel, fixées par arrêté du Premier Ministre, sont soumis pour avis conforme au directeur interministériel
du numérique selon des modalités fixées par ce même arrêté
». «
Lorsque ces projets sont à l'initiative d'une
autorité ministérielle ou interministérielle, notamment parce qu'ils ont été décidés, initiés ou préfigurés par celle-
ci, ou parce que l'autorité ministérielle assure sa direction de projet, ils sont soumis à l'avis conforme [de la
DINUM]
».
Arrêté du 5 juin 2020 pris pour l'application de l'article 3 du décret n° 2019-1088 du 25 octobre 2019.
92
Le montant prévisionnel comprend l'ensemble des coûts estimés depuis la phase de construction ainsi
que ceux relatifs aux 24 premiers mois de maintien en condition opérationnelle.
93
La méthode Cycle en V s’opère en deux phases : la conception et réalisation du produit, puis la
vérification du produit. La méthode Agile est basée sur des phases de développement courtes, ciblées sur une ou
plusieurs fonctionnalités et impliquant au maximum l’utilisateur sur toutes les phases de développement.
94
Différence entre l’investissement mutualisé et l’investissement séparé.
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
70
Ce calcul se fondait toutefois sur un budget correspondant à 44 000 jours-homme. La
révision de ce budget à 59 000 jours-homme en avril 2022 ne permet déjà plus d’envisager un
retour sur investissement aussi rapide.
Graphique n° 19 :
Évolution du budget MutSI (en jours-homme)
Source : Cour des comptes d’après des données SRE
De plus, ce calcul reposait sur une hypothèse de coût annuel du maintien en condition
opérationnelle (MCO) correspondant à 20 % du coût de construction du SI mutualisé la
première année. L’augmentation du coût de construction entraîne donc mécaniquement celle
du coût de MCO, ce qui dégrade l’équilibre de l’opération.
La révision du budget opérée en 2022 (+ 35 %) a déjà rendu le retour sur investissement
relativement incertain. Dans l’hypothèse où le budget augmenterait encore de 15 %, les gains
attendus sur le MCO pourraient être neutralisés et le projet représenter un surcoût net important
pour les deux entités.
44 163
44 163
46 755
50 201
59 703
2 592
3 446
9 502
591
-
10 000
20 000
30 000
40 000
50 000
60 000
70 000
Décembre 2020
Mars 2021
Septembre 2021
Avril 2022
Septembre 2022
Budget MutSI
Avenant
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
71
Tableau n° 12 :
Comparaison de l’équilibre financier, pour l’ensemble du SRE et de la CDC,
selon les hypothèses (en jours-hommes)
Budget initial :
44 000 j.-h.
Budget révisé :
59 000 j.-h.
Hypothèse :
68 000 j.-h.
(+ 15 %)
Construction du
SI
Mutualisé
44 048
59 000
68 000
Non mutualisé
37 290
37 290
37 290
Différence
+ 6 758
+ 21 710
+ 30 710
Maintien en
condition
opérationnelle*
Mutualisé
8 810
11 800
13 600
Non mutualisé
13 687
13 687
13 687
Différence
- 4 877
- 1 187
- 87
Total
1 881
19 823
30 623
* Coût annuel.
Source : Cour des comptes d’après des données du SRE
Compte tenu de l’inflation et des tensions croissantes sur les métiers de l’informatique,
mais aussi des difficultés de gouvernance précédemment citées, l’hypothèse d’une nouvelle
augmentation du coût du projet n’est pas exclue. Il est donc primordial pour la direction du
projet de veiller aux conditions de son correct achèvement, au risque d’en voir l’équilibre
financier profondément remis en question.
3.3.3.3
Une problématique de réversibilité qui illustre la fragilité de la gouvernance
Le SRE et la CDC ne sont pas encore parvenus à s’entendre sur les termes d’une
convention d’exploitation du SI mutualisé car certains points de désaccord persistent,
notamment au sujet de la réversibilité et du périmètre des coûts qu’elle devrait couvrir.
A cet égard, le cadre juridique de la collaboration entre le SRE et la CDC doit comporter
une clause de réversibilité permettant d’organiser un éventuel retour à l’état d’origine des SI.
Ce type de clause permet à la structure ayant confié des prestations à un tiers de récupérer les
données, processus et codes sources qui lui seraient nécessaires si elle souhaite mettre fin à la
relation contractuelle. L’objectif d’une telle clause est la poursuite de l’activité
95
, sans perte ni
altération des données, en récupérant autant que possible les investissements et ce qui est
réutilisable.
Bien que la collaboration entre le SRE et la CDC ait été satisfaisante par le passé
96
, la
définition d’une telle clause et d’un plan de réversibilité est nécessaire. Dans un guide publié
95
La réversibilité peut intervenir à différentes étapes de vie d’une collaboration entre deux entités : le
terme d’un contrat, une décision stratégique entraînant une nouvelle orientation technique, l’incapacité du tiers à
assurer la prestation initialement proposée, ou encore un défaut de relation entre les deux parties.
96
Une première collaboration entre la CDC et le SRE portait sur le développement du service de demande
unique de réversion en ligne, opérationnel depuis juillet 2020.
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
72
en 2010, l’Anssi en faisait un point d’attention et rappelait que «
la question de la réversibilité
doit être une préoccupation permanente du donneur d’ordres. Quelles que soient les évolutions
du système, il doit être en mesure d’en reprendre l’exploitation à son compte, ou de la confier
à un autre tiers de son choix, et ce, à tout moment et sans difficulté particulière
»
97
.
Dans le cadre du projet MutSI, le SRE doit notamment s’assurer de maîtriser cette sortie
de contrat, d’un point de vue opérationnel, en limitant les risques de dépendance vis-à-vis de la
CDC.
Ces difficultés illustrent la faiblesse d’une gouvernance bicéphale dans laquelle chacune
des deux entités souhaite préserver ses intérêts et son indépendance d’activité. Dans son rapport
de 2020 sur les grands projets numériques de l’État
98
, la Cour des comptes recommandait «
la
désignation d’un responsable unique ayant autorité pour prendre les décisions et les faire
appliquer par l’ensemble des équipes engagées dans le projet
», une recommandation qui
trouve à s’appliquer dans le cas du projet MutSI.
C’est pourquoi la Cour a recommandé, dans un référé adressé au ministre de l’économie,
des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, au ministre de la santé et de la
prévention et au directeur général de la CDC, de confirmer rapidement les attendus stratégiques
du projet MutSI, de le soumettre à une évaluation technique, organisationnelle et fonctionnelle
de la Dinum, de renforcer sa gouvernance et de prendre toutes mesures utile de mise sous
contrôle pour prévenir de nouveaux retards et surcoûts.
______________________ CONCLUSION INTERMÉDIAIRE ______________________
Les dépenses et recettes relatives aux pensions versées par le SRE sont regroupées dans
un compte d’affectation spéciale (CAS Pensions) doté d’environ 58 Md
€
pour les deux
programmes dont le service a la responsabilité. Compte tenu de l’importance des masses
budgétaires et du poids des déterminants externes (en particulier du choix des actifs concernant
leur départ en retraite), la qualité de la prévision de recettes et des dépenses est satisfaisante
et en amélioration sur les dernières années. La présentation, depuis le projet de loi de finances
pour 2023, d’une trajectoire triennale du CAS doit cependant être complétée par des
projections de plus long terme et par une explicitation des principales hypothèses retenues, en
cohérence avec les autres travaux réalisés sur les perspectives financières du régime des
retraites de l’État.
Les deux indicateurs de performance figurant dans les documents budgétaires ne
rendent pas correctement compte de la réalité des coûts supportés par l’État pour la gestion
du régime de retraite de ses fonctionnaires. Leurs modalités de calcul doivent donc être revues
pour intégrer l’ensemble des moyens consacrés par les employeurs à ces missions ainsi que les
divers coûts de structure de la DGFiP.
97
Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information.
98
Cour des comptes, recommandation n°4 du rapport «
La conduite des grands projets numériques de
l’État
» juillet 2020.
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
73
La maîtrise des risques de la chaîne des pensions est pilotée par le SRE mais fait aussi
appel aux employeurs en amont et aux CGR en aval. La qualité des données transmises par les
employeurs dans le cadre des CIR a été sensiblement améliorée sur les dernières années même
si des progrès restent à réaliser pour fiabiliser le stock des comptes de la base carrière et
élargir le dispositif renforcé de qualité des comptes. Les vérifications effectuées par le CGR au
moment du paiement des pensions vont évoluer avec le déploiement d’un nouveau SI plus
intégré, qui sera l’occasion de revoir la politique de contrôle en lien avec le SRE.
C’est surtout sur la poursuite du renforcement du contrôle interne du SRE que devraient
désormais porter l’essentiel des efforts. L’échantillonnage des contrôles est en effet réduit
(1,5 % des nouvelles pensions) et cible insuffisamment les risques identifiés. Le taux
d’anomalies détectées est en diminution mais reste élevé (6,69 % des dossiers contrôlés en
moyenne sur la période 2015-2021) considérant l’importance des enjeux financiers, en
particulier pour les anomalies ayant une incidence financière (2,71 % des dossiers contrôlés
entre 2015 et 2021). Des actions devraient être entreprises pour réduire le risque de non-
conformité des pensions nouvellement versées et en stock.
Le SRE s’est engagé dans un projet de mutualisation des SI avec la CDC, qui a été
conçu dans le contexte de la création d’un régime de retraite universel et d’un rapprochement
institutionnel entre la CDC et le SRE. Lancé fin 2020 malgré l’abandon de cette perspective, le
projet accuse déjà des retards et des surcoûts significatifs.
Le projet se heurte en effet à des difficultés techniques qui n’avaient pas été
correctement anticipées. De plus, le caractère bicéphale de la gouvernance et la défense
d’intérêts parfois divergents entre les deux commanditaires nuisent à la capacité d’arbitrage
et contribuent à l’allongement des délais et à l’augmentation des coûts. La poursuite du
programme, qui porte sur des activités sensibles et des SI complexes, nécessite la mise en place
d’une direction de projet unique, responsable du respect des délais et des budgets et,
in fine
,
de sa réussite opérationnelle.
En conséquence, la Cour a adressé un référé au ministre de l’économie, des finances et
de la souveraineté industrielle et numérique, au ministre de la santé et de la prévention et au
directeur général de la CDC afin de les alerter sur les dérives de coûts et les risques pesant sur
le bon achèvement du programme. Elle leur recommande de s’assurer de la pertinence des
objectifs du projet de SI mutualisé, de renforcer sa gouvernance technique et budgétaire,
notamment en désignant un responsable unique, de soumettre le projet à une évaluation
technique, organisationnelle et financière de la Dinum et de prendre toutes mesures utiles de
mise sous contrôle pour prévenir de nouveaux retards et surcoûts.
La Cour formule les recommandations suivantes :
2.
préciser les hypothèses sous-jacentes à la prévision d’évolution des dépenses, des recettes
et du solde du CAS Pensions fixée par le budget triennal et présenter une trajectoire
d’évolution à plus long terme, tenant compte notamment des réformes envisagées ;
3.
revoir les indicateurs de performance en intégrant, d’une part, l’ensemble des effectifs
consacrés par les employeurs à la gestion des retraites et, d’autre part, les coûts de
structure supportés par la DGFiP ;
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
74
4.
renforcer le contrôle interne en amplifiant le dispositif renforcé de qualité des comptes
auprès des employeurs, en tirant parti des méthodes d’analyse des risques (
data mining
) et
en étendant le contrôle interne au stock des dossiers de pensions ;
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
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ANNEXES
Annexe n° 1.
Effectifs consacrés par les employeurs à la gestion des retraites
(en ETP)
.....................................................................................................
76
Annexe n° 2.
Organisation de l’accueil des pensionnés
..........................................
77
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
76
Annexe n° 1.
Effectifs consacrés par les employeurs à la gestion des retraites
(en ETP)
2011
2021
Évolution en
ETP
Évolution en
%
MENJS-MESRI
650,0
417,0
-233,0
-36%
Ministère des armées
253,5
279,7
+26,2
10%
Ministère de l’intérieur
233,5
39,6
-193,9
-83%
Ministère de la justice
13,8
28,3
+14,5
105%
Ministère de l’agriculture
26,3
19,5
-6,8
-26%
DGFiP
36,4
18,8
-17,6
-48%
MTE_MCTRCT_MER
39,2
13,9
-25,4
-65%
Ministère de la culture
14,1
13,2
-0,9
-7%
SGF
15,4
8,5
-6,9
-45%
MEAE
13,3
8,5
-4,8
-36%
DGDDI
14,9
7,7
-7,2
-48%
Ministère solidarité et santé
26,3
7,0
-19,3
-73%
CNRS
15,7
5,4
-10,3
-66%
INSEE
6,0
4,8
-1,2
-20%
INRAE (fusion INRA et IRSTEA)
14,8
4,1
-10,7
-72%
Office nationale des forêts
5,4
3,1
-2,4
-44%
Direction générale de l’aviation civile
8,2
3,0
-5,2
-63%
Caisse des dépôts et consignations
3,6
3,0
-0,6
-16%
Office national des anciens combattants
2,5
2,8
+0,3
12%
INSERM
4,4
2,6
-1,8
-41%
Cour des Comptes
3,9
2,0
-1,9
-48%
Météo France
3,5
1,6
-1,8
-53%
Services du Premier ministre
3,3
1,4
-2,0
-59%
Conseil d’État
6,0
1,3
-4,7
-78%
Institut de recherche pour le développement
4,4
1,3
-3,1
-70%
DGCCRF
2,8
1,2
-1,6
-57%
INRIA
1,6
1,0
-0,6
-38%
CESE
0,2
0,6
+0,4
175%
Caisse nationale militaire de sécurité sociale
1,0
0,5
-0,5
-50%
Direction générale du Trésor
2,0
0,2
-1,8
-90%
Total
1 426
901
-524,5
-37%
Source : SRE
LE SERVICE DES RETRAITES DE L’ÉTAT
77
Annexe n° 2.
Organisation de l’accueil des pensionnés
Schéma n° 7 :
Organisation de l’accueil des pensionnés
Source : SRE