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Centre hospitalier territorial Gaston Bourret - Nouméa (Nouvelle-Calédonie)

CTC NOUVELLE-CALÉDONIE

La chambre territoriale des comptes (CTC) a examiné la gestion du centre hospitalier territorial Gaston Bourret (CHT) pour les années 2007 et suivantes. Le présent rapport présente tout d’abord les principaux enjeux de gestion de l’établissement. Il relève ensuite la croissance de ses effectifs et de ses dépenses qui contraste avec la relative stabilité de son activité. Sont ensuite examinées la fiabilité des comptes et la situation financière de l’établissement, les perspectives de sa réinstallation sur le site à Koutio à compter de 2017 puis son cadre et ses outils de pilotage.

Résumé

Les principaux enjeux de gestion, les moyens et l’activité de l’hôpital

Le budget de l’établissement s’est accru de ½ point de PIB entre 2007 et 2012 passant de 19,0 Mds F CFP à 24,9 Mds F CFP. Financé pour les 2/3 par le régime unifié d’assurance maladie maternité (RUAMM), l’hôpital mobilise un quart des recettes de cet organisme. Le cadre juridique budgétaire n’est pas à la hauteur du poids financier du CHT. La loi organique n’a pas prévu de règlementation pour les établissements publics de santé. La Nouvelle-Calédonie, dont la compétence est sur ce point plus qu’incertaine, continue ainsi de réglementer un cadre budgétaire aux dispositions disparates, mal coordonnées et parfois inappliquées. C’est pourquoi la chambre recommande une révision du cadre juridique budgétaire. Dans leur réponse, le directeur du CHT et la présidente du gouvernement ont accepté cette recommandation qui reste à mettre en oeuvre en collaboration avec l’Etat, compétent dans ce domaine en application de la loi organique.

Les capacités d’accueil de l’établissement n’ont que peu varié depuis 2007 (de 511 à 524 lits) alors que les effectifs ont augmenté de 2,5% par an entre 2007 et 2013, progressant de 1 618 à 1 888 agents. Le taux d’encadrement (personnels/lits) évolue à des niveaux particulièrement élevés, notamment s’agissant des médecins et assimilés. Leurs effectifs sont passés de 153 en 2009 à 197 en 2012, avec un taux d’encadrement par lit de 0,37 soit plus de 50% supérieur au ratio métropolitain moyen, qui était de 0,24 en 2009.
De 2007 à 2012, l’activité a évolué de façon contrastée et moins rapidement que les effectifs. La fréquentation annuelle a progressé de 2,8% (de 30 090 à 34 615 entrées) et le nombre de journées de 1% (de 149 000 à 156 000 journées). Cette progression a eu pour origine l’activité des secteurs de l’hospitalisation de jour (+ 3 200 entrées/journées) et du moyen et long séjour (+300 entrées et +5 300 journées). Le court séjour, qui représente le coeur de l’activité de l’hôpital, a compté 1 000 entrées de plus mais 1 000 journées de moins, toujours entre 2007 et 2012. Cette présentation statistique est nuancée par le CHT, qui en réponse, dans le cadre de la contradiction, estime que l’isolement géographique, le grand nombre de consultations, la multiplication des spécialités, le monopole dans les urgences et la permanence des soins doivent aussi être pris en compte pour évaluer son activité et les effectifs qui lui sont nécessaires. Il n’établit cependant pas le poids en équivalent temps plein (ETP) que représenteraient ces éléments spécifiques d’activité. La chambre relève que les déficiences des données médicales, provenant d’un codage défaillant, ne permettent pas de préciser la nature médicale des séjours en cause dans l’augmentation de l’activité.

La fiabilité des comptes et la situation financière

Les dysfonctionnements constatés affectant la fiabilité des comptes font l’objet de plusieurs remarques portant notamment sur la pratique - à proscrire - des transferts de charges d’un exercice sur l’autre et sur les titres de recettes, affectés par une trop forte proportion d’adresses non valides faisant obstacle à leur recouvrement. La chambre rappelle donc l’établissement à ses obligations, tant juridiques que de gestion, afin qu’il améliore la fiabilité de son fonctionnement comptable et budgétaire.
La situation financière du CHT est médiocre, même si elle ne dépend pas uniquement de l’établissement, notamment s’agissant de la situation de trésorerie. L’équilibre n’est pas atteint sur le plan budgétaire. Le compte de résultat a présenté un déficit moyen de 100 MF CFP par an de 2007 à 2012. La capacité d’autofinancement a toutefois été préservée, passant de 469 MF CFP à 1 103 MF CFP. Au final, l’autofinancement, les subventions et les emprunts ont atteint un montant cumulé de 11,4 Mds F CFP entre 2007 et 2012. Ceci a permis au CHT de financer 9,8 Mds F CFP d’investissements. En dépit de ce surfinancement global de 1,6 Md F CFP, la trésorerie ne s’est pas améliorée car une partie croissante des recettes inscrites sont restées impayées, leur stock passant de 4,6 Mds F CFP à 7,6 Mds F CFP. Ceci explique que l’hôpital ait souvent eu recours aux emprunts de trésorerie. En 2013, faute d’avoir pu trouver un financement bancaire, ce n’est que grâce à une avance de trésorerie de 500 MF CFP versée par la Nouvelle-Calédonie que l’établissement a pu fonctionner.

Parmi les recettes en attente de recouvrement, figurent celles concernant des patients qui relèveraient, vue leur situation, d’une prise en charge sociale par la Cafat et/ou l’aide médicale. Ces créances s’élevaient à 1,90 Md F CFP fin 2013. Les personnes concernées étant insolvables, les efforts de recouvrement sont sans effet et l’hôpital doit au final inscrire en pertes ces recettes irrécouvrables. Ce dispositif apparaît particulièrement peu efficient. L’hôpital indique en réponse que les difficultés de recouvrement des dettes des partenaires institutionnels tels que l’Etat gestionnaire de l’agence de santé de Wallis et Futuna, la Cafat voire, les provinces, sont importantes et impactent négativement la situation de trésorerie.

Le financement du nouveau site de Koutio

Le CHT devra participer à hauteur de 17,4 Mds F CFP au financement du nouveau site. Sur ce montant, 1,8 Md F CFP restait à trouver à fin 2014. Le total prévu des investissements est de 58,35 Mds F CFP, soit plus de 200 000 F CFP par habitant.

S’agissant du coût de fonctionnement de la nouvelle structure, l’établissement prévoit un budget annuel courant de 29,3 Mds F CFP en 2018 (première année pleine) pour 528 lits, soit 74 lits et 6,5 Mds F CFP de plus qu’en 2013.
La chambre relève tout d’abord que dans le nouveau site de Koutio, l’hôpital ne gérera plus le moyen et long séjour. Elle rappelle donc que les coûts annoncés ne comprennent pas ceux des services de long et moyen séjour, qui sont certes, sortis du budget de l’hôpital mais devront, néanmoins, être financés par ailleurs. Elle observe que les prévisions de l’établissement n’intègrent pas non plus les amortissements de 80% de la valeur des bâtiments représentant 1,4 Md F CFP par an, parce qu’ils sont pris en charge par d’autres acteurs.

Si on raisonne à l’échelle de l’opération, ces deux coûts persistent et doivent donc être pris en compte, soit une majoration de 2,4 Mds F CFP par an. L’établissement indique en réponse qu’il ne supportera pas ces dépenses et qu’il convient à son échelle, de ne pas les intégrer.

S’agissant des coûts du seul l’établissement dans son nouveau format, la chambre considère la prévision avancée comme un enjeu sensible pour deux ordres de raisons. D’une part, des gains de productivité importants seront à mettre en oeuvre dans tous les domaines, personnels, charges hôtelières et achats de médicaments. D’autre part, le nombre de lits à l’ouverture, l’un des principaux paramètres des coûts de fonctionnement, devra rester fixé à 528.

Les enjeux du fonctionnement de l’établissement dans son nouveau site. En effet, les prévisions de l’hôpital incluent, dès 2014 et jusqu’en 2018, des gains annuels de productivité de 1% pour les charges de personnels, de 1,6 % pour les dépenses de médicaments et de 3,5% s’agissant des charges hôtelières. Sans ces gains, les coûts de fonctionnement en 2018 atteindraient non pas 33 Mds F CFP mais 35 Mds F CFP. L’hypothèse retenue par l’hôpital suppose que le taux d’encadrement global soit de 3,8 effectifs par lits en 2018. Sans aucun gain de productivité, ce chiffre atteindrait 4,02 effectifs par lit (pour une moyenne métropolitaine de 2,8 effectifs par lits). Avec un taux d’encadrement ramené à trois, le coût de fonctionnement en 2018 serait limité à 29,8 Mds F CFP. Il est donc indispensable que l’établissement réalise des gains de productivité.

Cet objectif général ne pourra être mené avec succès qu’à la condition que la gouvernance fasse pression en ce sens et que l’établissement soit doté d’outils et des capacités de pilotage et de contrôle permettant d’identifier les gisements de productivité, de fixer des objectifs et de mesurer les progrès accomplis. Dans sa réponse, l’établissement s’est engagé d’une part à réaliser des gains de productivité substantiels selon une méthodologie basée sur le « Lean Management » et, d’autre part, à maintenir la capacité à l’ouverture actuellement décidée, telle que validée par le conseil d’administration et la commission médicale d’établissement. La chambre prend bonne note de ces engagements positifs de l’établissement.

Le pilotage de l’établissement

Les tutelles et les partenaires de l’établissement sont mal coordonnés. Ainsi, la commission inter-organismes rassemblant les financeurs fonctionne formellement sans exercer d’influence. Le congrès, qui devrait exercer un rôle budgétaire déterminant, ne fait qu’acter des décisions prises en amont.
L’exécutif et le conseil d’administration exercent les fonctions réglementaires qui leurs sont dévolues mais sans impacter significativement le pilotage de l’établissement qui reste l’affaire du directeur et des instances internes en premier lieu desquelles la commission médicale d’établissement.
Il semble toutefois que, depuis 2011, le gouvernement s’engage dans une tutelle sinon plus active du moins mieux formalisée, comme l’a montrée la publication pour la première fois au journal officiel d’un arrêté approuvant le budget 2014. Poursuivre le renforcement de la gouvernance apparaît indispensable pour maîtriser les enjeux de la réinstallation et du fonctionnement à Koutio. Cela devrait déboucher sur un nouveau contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens fixant des objectifs et des critères de suivi dans tous les domaines de la performance.
Parallèlement, le processus de réorganisation de l’hôpital en six pôles gérés de manière déconcentrée par des directeurs adjoints responsabilisés doit être poursuivi. Ce mode de management plus participatif est le prolongement logique du projet médical et de soins 2012-2015, un travail considérable qui montre l’engagement de l’ensemble des services dans la recherche d’un meilleur service rendu.
Pour définir et atteindre ses objectifs, l’établissement doit progresser également dans son contrôle interne. En effet, la qualité insuffisante du reporting ne permet pas, actuellement, de poser des diagnostics précis par service et en un temps suffisamment rapproché de celui de la gestion. Une modernisation du système d’information et, notamment, un rapprochement entre le service de l’informatique médicale et celui du contrôle de gestion seraient souhaitables.
L’instrument de pilotage des coûts que constitue la comptabilité analytique devrait être renforcé : la comptabilité analytique de l’exercice 2012 n’était pas encore disponible début 2014. Les autres volets du reporting sur la répartition physique des coûts (dotations en personnels et en matériel) rapprochée de l’activité de chaque service, doivent progresser.
Enfin, l’établissement est invité à poursuivre ou à engager le renforcement de ses performances dans différents domaines tels que la lutte contre l’absentéisme, l’optimisation de l’usage des blocs opératoires, celle du service des ambulances, l’amélioration de la gestion des achats et des produits pharmaceutiques. Dans sa réponse, l’établissement annonce pour fin 2015 la finalisation d’un codage exact et d’un management basé sur les données produites. Il poursuit la modernisation des instruments de pilotage et la mise en place d’une direction déléguée de chacun des pôles de l’hôpital. Une direction déléguée centralisant les questions relatives au Médipôle a été créée dans cette optique.

 

 

 

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