Le niveau de retour de financement d’Horizon Europe obtenu par la France est inégal selon les piliers du programme
L’Union européenne a mis en place des programmes pluriannuels de financement de la recherche, dont les plus récents sont Horizon 2020 (79 Md€) et Horizon Europe (95,5 Md€). Le pilier 1 d’Horizon Europe (25 Md€ entre 2021 et 2027) concerne la recherche fondamentale. Dans ce domaine, la France améliore sa position relative grâce aux fleurons de la recherche française : unités de recherche rattachées aux grands opérateurs nationaux de recherche (CNRS) et aux grandes universités de recherche. Pour autant, la performance réalisée est bien en deçà de l’objectif de 17,5 %. Le pilier 2 d’Horizon Europe (53,5 Md€ entre 2021 et 2027) et son équivalent d’Horizon 2020 sont organisés autour de six grandes thématiques de recherche appliquée, regroupant à l’international des chercheurs et des entreprises. Dans ce domaine, les performances françaises sont nettement moins bonnes. Cela s’explique principalement par le manque de liens entre le monde de la recherche publique et le monde de l’entreprise. Le pilier 3 d’Horizon Europe (13,6 Md€ entre 2021 et 2027) est, quant à lui, centré sur l’innovation. Dans ce domaine, les performances françaises sont satisfaisantes et placent notre pays au deuxième rang derrière l’Allemagne. À la lumière des résultats passés, si la France prônait un renforcement du pilier 1 au détriment du pilier 2, elle risquerait de se trouver isolée dans cette position. Il conviendrait au contraire de mobiliser les leviers susceptibles d’améliorer la performance française sur le pilier 2. Il serait souhaitable que, chaque année, soit rendue publique une évaluation de la performance française, en matière de mobilisation des fonds européens.
Des actions sont nécessaires pour mieux piloter le dispositif, renforcer l’influence française, mieux accompagner et inciter les chercheurs à aller vers l’Europe
Depuis Horizon 2020, le pilotage national a été renforcé sous l’égide de la DGRI, avec un réseau de points de contact nationaux (PCN) efficace pour diffuser l’information. Cependant, les administrations n’ont pas pleinement tiré parti de l’évaluation de 2016 sur la participation française, notamment en matière de coordination interministérielle via le secrétariat général des affaires européennes (SGAE). Un nouveau plan d’action national d’amélioration de la participation française aux dispositifs européens de financement de la recherche (PAPFE), prolongeant celui de 2018 qui n’a été que partiellement mis en œuvre, est nécessaire pour améliorer la participation française. L’intégration des entreprises, notamment dans les projets collaboratifs du pilier 2, reste insuffisante. Un engagement accru de Bpifrance, des pôles de compétitivité et une déclinaison territoriale claire impliquant agences régionales et pôles universitaires sont indispensables. La représentation française auprès de l’UE doit également être renforcée pour préparer les négociations du programme succédant à Horizon Europe en 2025. Le dispositif d’accompagnement national piloté par la DGRI est efficace pour les chercheurs publics, mais les chercheurs isolés manquent de soutien territorial structuré. Les entreprises, surtout les PME, peinent à s’impliquer dans les projets du pilier 2, faute d’interlocuteurs identifiés. Enfin, les financements nationaux, plus accessibles et prévisibles, dissuadent jusqu’ici les candidatures aux programmes européens. Une meilleure prise en compte des candidatures européennes dans les carrières, une obligation d’explorer ces financements en priorité et un soutien accru aux jeunes chercheurs sont nécessaires pour améliorer la participation française et mieux capitaliser sur les expériences.
L’actualité du sujet est marquée par une triple urgence
Une négociation pour le futur plan de recherche pluriannuel va s’engager au premier semestre 2025 sur la base de la proposition que formulera la Commission européenne à cette échéance. La nécessité de remobiliser les forces nationales pour tirer le meilleur parti de cette ressource s’impose pour plusieurs raisons. Le rapport remis par l’ancien Premier ministre italien Mario Draghi en septembre 2024, met en évidence l’écart entre les ambitions de la stratégie de Lisbonne qui vise à mobiliser 3 % du PIB de l’Union européenne au profit de la recherche, et les résultats. Il confirme que l’UE décroche par rapport à ses principaux concurrents, les États - Unis et la Chine, dont le PIB, croît en outre plus rapidement. Ce rapport est susceptible de conduire la Commission à proposer que le programme pluriannuel de recherche soit intégré à une composante plus vaste visant à améliorer la compétitivité de l’économie européenne. La négociation va s’engager dans un contexte où, le Royaume-Uni ayant conclu en 2024 un accord lui permettant à nouveau de candidater aux financements européens de la recherche, la compétition pour les financements européens va s’accentuer. Enfin, la poursuite de financements nationaux abondants, dont a bénéficié la recherche publique française au cours de ces dernières années, du fait notamment de la loi pluriannuelle de programmation de la recherche de 2020 et du programme France 2030, n’est pas assurée au regard de l’état préoccupant des finances publiques françaises. Cette situation devrait imposer à tous un effort redoublé de recherche de financement pour préserver l’effort national de recherche.