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Les interventions économiques de la métropole de Lyon pendant la crise sanitaire

CRC AUVERGNE-RHÔNE-ALPES

La chambre régionale des comptes Auvergne-Rhône-Alpes a procédé, dans le cadre de son programme de travail 2022, au contrôle des comptes et de la gestion de la métropole de Lyon pour les exercices 2018 et suivants. Ce contrôle s’inscrit dans le cadre d’une enquête régionale sur les interventions économiques des collectivités locales sur le territoire de la métropole de Lyon pendant la crise sanitaire liée à l’épidémie de covid-19.

Les aides de la métropole à destination des entreprises de son territoire ont été mises en œuvre rapidement en s’appuyant sur les dispositifs de l’État et de la région

Les interventions économiques mises en place par la métropole de Lyon pour faire face à la crise sanitaire représentent 114 M€, soit 81 € par habitant. Les principales aides économiques, constituées de l’aide complémentaire au fonds de solidarité national (101 M€), du dégrèvement des deux tiers de la cotisation foncière des entreprises (4,7 M€) et de la contribution métropolitaine au Fonds Région Unie (2,8 M€), ont été adossées à des dispositifs nationaux ou régionaux. La métropole a ainsi évité la multiplication des dispositifs et des coûts administratifs de traitement des dossiers. L’alignement des critères de l’aide complémentaire sur ceux du fonds de solidarité national (FSN) et l’utilisation des fichiers des bénéficiaires de l’État a permis le paiement rapide de cette aide, délibérée le 23 avril 2020 et dont les premiers paiements (18 M€) sont intervenus dès le 7 mai 2020.

Le nombre d’entreprises métropolitaines aidées est conséquent : 44 500 entreprises ont touché l’aide complémentaire au FSN de 1 000 euros mensuels et, d’après le bilan de la région, 2 115 entreprises de la métropole ont bénéficié des subventions et avances remboursables accordées par le Fonds Région Unie . Si tous les secteurs d’activités touchés par une fermeture administrative ou au chiffre d’affaires réduit ont pu bénéficier de l’aide complémentaire au FSN, 38 % du montant des aides ont concerné le commerce de détail, la restauration, les « activités pour la santé humaine » et les travaux de construction spécialisés. L’action du Fonds Région Unie a, elle, été davantage concentrée sur quelques secteurs, au premier rang desquels la restauration, qui a touché 87 % des subventions et 15 % des avances remboursables.

La métropole n’a pas développé de suivi de ses aides et des bénéficiaires

La métropole a su concevoir et mettre en œuvre rapidement son action, mais ne s’est pas donné les moyens de dresser un bilan des aides économiques versées. Ainsi, aucun bilan n’a été tiré de l’aide complémentaire au FSN, tandis que le bilan du Fonds Région Unie adressé par la région Auvergne-Rhône-Alpes à la métropole en mars 2022 ne constitue qu’un « état des consommations de la contribution de la métropole ». La métropole n’a analysé les secteurs économiques aidés pour aucun de ces deux dispositifs.

La métropole n’a pas été associée aux efforts de lutte contre la fraude entrepris par l’État dans le cadre du FSN mais n’a pas non plus demandé à l’être.

Des aides plutôt bien adaptées à la situation mais avec quelques effets d’aubaine

La métropole a aidé ses fournisseurs et les associations locales. Les délais de passation et d’exécution des marchés publics ont ainsi été allongés et la métropole a pris en charge une partie des surcoûts liés à la situation sanitaire des attributaires de marchés publics, tandis que les subventions aux associations étaient maintenues même en l’absence temporaire d’activité.

Les délégations de service public (DSP) ont fait l’objet d’une suspension rapide des redevances versées à la métropole dès le 23 avril 2020, puis d’une analyse détaillée de leur situation économique menée avec plusieurs mois (voire un an) de recul, qui a permis à la métropole d’identifier les DSP réellement touchées par la crise et de les aider au juste niveau, ce qui constitue une bonne pratique. Elle a ainsi aidé les DSP de la restauration scolaire des collèges, la DSP des parkings des gares de Perrache et Villette et la DSP du centre des congrès de Lyon.

Le délégataire du centre des congrès a été aidé par une réduction de 0,8 M€ de la redevance d’occupation du domaine public acquittée à la métropole fin 2020. L’information du conseil de la métropole aurait pu être plus complète sur le manque à gagner subi par le délégataire du fait de la crise sanitaire. Par ailleurs, l’aide de l’État a permis au délégataire de renouer avec d’importants profits dès 2021. A posteriori, il apparait que les bénéfices des années 2019 et 2021 auraient pu compenser les pertes 2020 du délégataire, même sans aide de la métropole.

En outre, la métropole a accordé une exonération de loyer pour les mois de mars, avril et mai 2020 à l’ensemble de ses locataires professionnels (entreprises, associations, indépendants et agriculteurs). Cette mesure générale, qui n’était pas limitée aux locataires ayant fait l’objet d’une fermeture administrative ou d’une baisse de chiffre d’affaires et qui ne tenait pas compte de leur situation économique et financière, était par conséquent illégale. 56 baux sur 510 représentaient 71 % du coût des exonérations. La métropole a ainsi aidé de grandes entreprises et plusieurs de ses satellites sans analyser leur situation financière. Elle aurait gagné à mettre en œuvre la démarche plus prudente retenue pour les DSP en suspendant rapidement le paiement des loyers puis en analysant la situation des principaux locataires avant toute exonération ou réduction de loyer.

Les montants conséquents déboursés par la métropole pendant la période n’ont pas altéré sa situation financière

Les aides imputées en investissement s’élèvent à 104 M€ et ont donné lieu à une réelle augmentation de l’investissement, sans être financées par redéploiement. Si l’encours de la dette de la métropole a augmenté en 2020 en raison de ces dépenses, il est redescendu en 2021 en dessous de son niveau de 2019, tout comme la capacité de désendettement.

La principale aide, complémentaire au FSN, a été imputée en investissement, en méconnaissance de la nomenclature comptable M57, ce qui a significativement amélioré l’épargne brute en 2020, qui aurait dû s’élever à 301 M€ au lieu des 402 M€ enregistrés. Cette imputation erronée explique que les aides économiques liées à la crise sanitaire comptabilisées en section de fonctionnement n’ont représenté que respectivement 0,8 % et 1,4 % de l’épargne brute en 2020 et 2021.

Les aides importantes mises en place par la métropole de Lyon ont donc eu un impact limité sur sa situation financière, qui reste bonne fin 2021 : la capacité de désendettement est seulement de 3 années et le taux de CAF brute est élevé et stable.

RECOMMANDATION
Se rapprocher des services de la direction régionale des finances publiques pour identifier les entreprises ayant perçu à tort le complément métropolitain au fonds de solidarité national.