Créé le 20 octobre 1999, Mégalis regroupe sur le territoire breton 59 intercommunalités qui couvrent 1 233 communes, les quatre départements et la collectivité régionale.
Il s’est vu confier, en 2013, la mise en œuvre du programme « Bretagne très haut débit » (BTHD), qui doit amener la fibre optique aux foyers bretons vivant en dehors des agglomérations. Ce programme représente 116 M€ de recettes sur un budget global de 123 M€ en 2018.
Un changement dans la stratégie du syndicat qui privilégie désormais la rapidité du déploiement à l’aménagement du territoire
Le schéma de cohérence régionale pour l’aménagement numérique du territoire (SCORAN) adopté en avril 2011 prévoyait de relier à la fibre, jusqu’en 2030, tous les locaux bretons pour un budget de 2 Md€. Il s’agissait de définir un réseau structurant reliant dans un premier temps 500 sites prioritaires, puis 2 000 sites et enfin de déployer le réseau sur l’ensemble des foyers, entreprises et sites publics.
La feuille de route adoptée en avril 2012 a modifié cette stratégie pour retenir un déploiement parallèle des villes moyennes et des zones rurales dont l’accès à internet était réduit, tout en permettant aux entreprises et services publics de se raccorder en fonction des opportunités, besoins ou priorités.
Une première phase programmée, de 2014 à 2018, mais dont l’échéance a été repoussée à 2020, comportait deux tranches de travaux. La première concernait environ 70 000 locaux (foyers, entreprises et sites publics), situés pour moitié dans quatre villes moyennes et pour l'autre moitié dans 28 zones rurales. La deuxième tranche, prévue initialement de 2016 à 2018 mais reprogrammée de 2018 à 2020, doit raccorder à la fibre optique 170 000 foyers, entreprises et sites publics bretons, pour moitié situés dans neuf villes moyennes et pour l'autre moitié dans 91 zones rurales.
La deuxième phase, prévue de 2019 à 2023, dont le lancement a été reporté à 2020, concerne 400 000 locaux. La phase 3 (2024-2030), qui concerne plus de 600 000 locaux, a été avancée, pour une réalisation entre 2023 et 2026. Pour ces deux dernières phases, la détermination des critères géographiques de déploiement des travaux a été largement confiée aux entreprises prestataires, Mégalis renonçant ainsi pour une grande part à une stratégie d’aménagement du territoire pour privilégier la vitesse de déploiement.
Des retards persistants dans le déploiement du réseau
Au 31 décembre 2019, le nombre de lignes raccordables s’élevait à 71 148, et le nombre de lignes raccordées à 25 944. Mégalis s’était pourtant initialement engagé auprès de son délégataire chargé de l’exploitation du réseau à livrer 216 272 lignes, cible revue à la baisse en 2018 à 119 782 lignes raccordables et 32 366 raccordées. Alors que la moyenne nationale des zones moins denses d’initiative publique couvertes en fibre était de 20 % au quatrième trimestre 2019 (12 % en 2018), la Bretagne est non seulement moins couverte mais elle déploie plus lentement son réseau. Au premier trimestre 2020, selon les données ARCEP, le territoire couvert par Mégalis comptait 1 206 000 foyers dont 6,2 % couverts par la fibre.
Un contrat de délégation de service public très favorable aux intérêts du délégataire
Mégalis a confié en 2015 la gestion de son réseau et le raccordement final des usagers à THDB (très haut débit Bretagne), filiale à 100 % d’Orange, pour une durée initiale de 17 ans. Ce contrat apparait très favorable aux intérêts du délégataire.
Dans ce contrat, Orange apportait initialement 19,7 M€ de capital social et percevait une rémunération de 15 % (55,3 M€ de dividendes). Mégalis percevait 132,4 M€ de redevances pour financer son réseau, ce qui était très inférieur aux prévisions de 360 M€ de la feuille de route.
Avec les retards accumulés dans les livraisons et une proportion d’abonnés dans les lieux desservis meilleure que prévu, Mégalis a renégocié ce contrat pour l’allonger de trois années, augmenter le nombre de prises et modifier les calculs de la redevance qui lui est versée.
Les redevances versées à Mégalis sont désormais prévues à hauteur de 486,7 M€ sur 20 ans, mais Orange réduit son apport au capital social à 5,8 M€, ce qui lui rapporterait 238,5 M€ de dividendes sur 20 ans, soit une rémunération moyenne de 44 %, niveau très excessif au regard des stipulations contractuelles initiales qui prévoyaient le maintien d’une rémunération des capitaux de 15 %.
Une trésorerie excessive par rapport aux besoins du syndicat
Le coût moyen des prises était estimé à 2 000 €, subventionné forfaitairement à hauteur de 445 € par les intercommunalités. Le coût réel moyen des prises est très inférieur (en moyenne entre 1 000 et 1 100 €), ce qui a permis de réduire les participations de la région et des départements. La part des intercommunalités dans le financement du projet BTHD a donc été majorée.
Les retards de déploiement et le versement des acomptes par les intercommunalités se sont traduits par une trésorerie pléthorique, passée de 18,3 M€ à 81,3 M€ entre 2015 et 2019, ce qui représente des frais financiers inutiles estimés à 1,9 M€ par an pour les intercommunalités.