Synthèse
Hôpital de référence du territoire de démocratie sanitaire de Dieppe, établissement-support du groupement hospitalier de territoire (GHT) Caux-Maritime et tête de pont d’une direction commune d’établissements publics de santé élargie au secteur médico-social, le centre hospitalier (CH) de Dieppe bénéficie d’incontestables atouts.
Cependant, avec un bassin de population de 170 000 habitants, le territoire de santé de Dieppe reste exigu. L’offre de soins y est disputée entre les deux établissements sanitaires locaux, dont le CH de Dieppe, et les acteurs de santé de l’agglomération rouennaise.
C’est donc au prix d’efforts de maillage du territoire par la structuration de filières de soins et de recrutements médicaux subséquents que les parts de « marché » du CH pourront à l’avenir progresser.
Le pilotage stratégique de l’établissement apparaît particulièrement défaillant, en l’absence de tout projet d’établissement depuis 2017 et de suivi opérationnel des contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens qui se sont succédé.
Les pôles d’activité clinique et médico-technique ne sont pas opérationnels en l’absence de projets, de démarches de contractualisation et du fait d’une vie institutionnelle interne particulièrement réduite.
L’activité de l’établissement a progressé jusqu’à la crise sanitaire début 2020, en particulier dans le champ de l’ambulatoire, mais au prix d’un effet-ciseau dans l’évolution respective des recettes et dépenses, aggravé par la crise sanitaire. Les dépenses de personnel se sont envolées sous l’effet cumulatif de recrutements massifs et de cette crise.
La marge brute, la capacité d’autofinancement (CAF) brute et la CAF nette se sont significativement dégradées sur la période contrôlée. Ce n’est qu’au prix de la mobilisation de lignes de trésorerie successives que l’établissement a pu jusqu’à présent faire face à ses charges courantes. Ne parvenant plus à les solder, il est pris dans un processus de « cavalerie » financière et de fuite en avant. Alors même que les dotations de l’agence régionale de santé (ARS) ont fortement progressé, les déficits d’exploitation n’ont cessé de s’aggraver. Depuis 2017, ceux-ci justifieraient la mise en œuvre d’un plan de redressement prévu à l’article L. 6143-3 du code de la santé publique.
Tous les indicateurs financiers sont désormais particulièrement préoccupants et commandent une vigoureuse action de restauration des capacités financières de l’hôpital dans le cadre d’un plan de redressement pluriannuel, opérationnel et réaliste, à formaliser et à suivre avec l’ARS.
Dans le champ des ressources humaines, les démarches de projet n’ont pas progressé depuis le dernier rapport de la chambre, qu’il s’agisse du projet social ou de la GPEC. Un important travail de mise en conformité des primes et indemnités et des rémunérations des praticiens recrutés par la voie de l’intérim demande à être conduit.
La structuration récente de la fonction « achat » au sein du GHT n’est pas aboutie en l’absence notamment de plan d’actions. L’absence de système d’information hospitalier commun aux établissements du GHT empêche de s’assurer de la computation des seuils par famille d’achats et, partant, de la juste application des procédures de marchés. Dans la passation des marchés, le CH s’affranchit des règles de mise en concurrence et ses procédures internes, au demeurant parcellaires et pour partie obsolètes, ne sont pas respectées.
Pour mener à bien tous ces « chantiers » d’importance majeure, l’établissement a enfin besoin de retrouver de la stabilité et de la continuité dans ses équipes de direction.
Principales recommandations
- Structurer des filières de soins pour renforcer la capacité du CH à attirer des patients et ajuster son offre capacitaire à son activité ;
- organiser le dispositif de suivi des conventions et partenariats et s’assurer de leur cohérence avec les objectifs stratégiques du CH ;
- optimiser la chaîne de facturation en partenariat avec le trésorier.
Obligations de faire
- Définir, en concertation avec l’ARS, une trajectoire pluriannuelle de réduction des déficits et de retour à l’équilibre financier et en suivre périodiquement l’état d’avancement ;
- élaborer le projet d’établissement prévu à l’article L. 6143-2 du code de la santé publique ;
- s’assurer du fonctionnement effectif des instances délibératives et consultatives du CH et du GHT, et structurer le fonctionnement des pôles d’activité ;
- appliquer la réglementation relative à certaines primes et indemnités ;
- mettre en conformité les modalités de la permanence des soins (astreintes, temps de travail additionnel) et les rémunérations des personnels médicaux recrutés par la voie de l’intérim avec les dispositions réglementaires applicables ;
- respecter les dispositions du décret n° 2010-30 du 8 janvier 2010 relatif à l’attribution de logements de fonction ou d’indemnités compensatrices mensuelles pour nécessité absolue de service ;
- s’assurer pour le CH et le GHT de la bonne computation des seuils par famille d’achats et de la juste application des procédures de passation de marchés.