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Office polynésien de l'habitat (OPH)

CTC POLYNÉSIE FRANÇAISE

L’office polynésien de l’habitat – OPH, est un établissement public industriel et commercial (EPIC) placé sous la tutelle du Pays. Celui-ci tient une place essentielle dans la conduite de la politique du logement social en Polynésie française, au point d’être doté d’un objet social pléthorique. Ce foisonnement le rend peu lisible aux yeux de la population et des partenaires institutionnels, et entrave son efficacité. Au surplus, cet établissement accomplit de nombreuses missions administratives.

Une gouvernance politique inefficace

La gouvernance de l’office est altérée par des maux déjà constatés par la Chambre en 2012 dans son rapport précédent. Faute de progrès sensibles en la matière, les handicaps internes sont nombreux. Le conseil d’administration s’empare insuffisamment des questions stratégiques, et les directeurs généraux se succèdent à un rythme accéléré, soit six en cinq années. Cette situation empêche la conduite d’un dialogue de gestion efficace avec le gouvernement, et ne favorise pas non plus la formalisation de cadres stratégiques internes. Il en résulte que, dépourvu d’une vision d’ensemble, l’OPH ne parvient pas à élaborer un plan de charge opérationnel réaliste : les prévisions budgétaires sont, chaque année, très inférieures aux niveaux de consommation des crédits. Dans ce contexte défavorable, les changements répétés d’organigrammes, ainsi que le redémarrage récent de la certification qualité, qui sont présentés par l’OPH comme des voies de progrès, n’ont de fait, rien réglé. Ces changements renvoient plutôt à l’incapacité du conseil d’administration et du gouvernement à créer les conditions permettant à l’établissement de se réformer en profondeur.

Un bailleur social défaillant

L’OPH, en tant que bailleur social, se doit de produire suffisamment de logements, d’entretenir correctement son patrimoine immobilier, et d’assurer une gestion locative efficace.

La mesure de la performance de l’OPH, qui a été effectuée par la Chambre, confirme les retards répétés dans l’exécution de ses programmes de construction. Ainsi, lorsque sont considérés, sur la période, les volumes cumulés de production de logements groupés
(276 unités), rapportés au nombre de dossiers validés en attente (2711 en moyenne), le taux de satisfaction ne dépasse pas 2%.

Par ailleurs, l’OPH ne parvient pas à corriger un retard accumulé depuis près de 30 années dans la conduite de ses programmes de réhabilitation. Ces travaux sont notamment contrariés par la présence d’aménagements illicites construits par les locataires, ou des biens dont la situation administrative n’est pas régulière. Ainsi, depuis 2013, l’OPH a consommé, au total, seulement 10% de ses crédits d’investissement dédiés aux travaux de grosses réparations. Ce retard explique, en partie par effet domino, le blocage de projets d’accession à la propriété.

La gestion locative est également défaillante. En considérant le coût cumulé des loyers impayés et des loyers non révisés, la Chambre estime la perte financière globale à 6 Mrds F CFP en retenant l’hypothèse la plus favorable. Cette somme correspond à l’équivalent de la recette de six années de loyers, ou bien, à plus de huit années de versement à l’office de la subvention de fonctionnement territoriale.

Ainsi, l’OPH, par ses manquements persistants, a continué à se disqualifier en tant que bailleur social, ce qui, paradoxalement, a contribué à maintenir la situation de mal-logement constatée en Polynésie française.

Un guichet concentré exclusivement sur les volumes

A côté de son métier de bailleur social, l’OPH distribue, pour le compte du Pays, sous condition de revenus, des aides aux familles. Ces aides, qui relèvent d’une mission de service public administratif, sont organisées sous deux formes : la distribution de maisons individuelles en kit (fare), subventionnée à hauteur de 65 à 98%, et l’octroi, gratuit, de matériaux de construction à des propriétaires de logements individuels.

Au vu des volumes distribués, l’OPH a fait preuve de dynamisme en fin de période. Le taux de satisfaction, calculé à l’identique du logement groupé, atteint 17,6% en 2017 dans le cas des fare, et 79% pour les matériaux de construction. Or, l’attention quasi exclusive portée aux volumes, pourrait expliquer, mais sans aucunement le justifier, que les contrôles sur l’usage de ces aides, une fois livrées, soient délaissés par l’OPH, laissant la porte ouverte à toutes sortes d’abus.

Une situation financière mal orientée

La juxtaposition de services administratifs et commerciaux en son sein, justifierait pour l’OPH de connaître avec précision sa situation financière pour chacun de ses métiers, ce qui n’est pas le cas. Faute de mieux, la Chambre est seulement en mesure de dresser un constat global de la situation financière de l’office, qui est défavorablement orientée, et ce, malgré les subventions de fonctionnement massives reçues chaque année du Pays.

Un employeur généreux, des pratiques contestables

L’OPH compte 43 agents supplémentaires depuis 2012, soit une hausse de + 30 % de ses effectifs. Cette augmentation significative est d’abord le résultat de l’accueil par l’office, mais décidé par le Pays, d’agents issus du fonds de développement des archipels – FDA, et de la société d’aménagement et de gestion de Polynésie française – SAGEP, deux organismes territoriaux appelés à être supprimés. Cette hausse des effectifs est aussi la conséquence du recours croissant à des emplois à durée déterminée.

Faute d’une réelle stratégie RH, l’OPH s’est contenté de poursuivre des pratiques qui étaient déjà contestées par la Chambre dans son rapport précédent. Il a ainsi choisi d’offrir à ses agents, à deux reprises, la possibilité de bénéficier d’une prime exceptionnelle de départ à la retraite. A ce jour, le coût de ces mesures est évalué à près de 360 MF CFP.

Au surplus, l’OPH a décidé d’élargir son régime indemnitaire, en instaurant deux primes individuelles supplémentaires. Une prime forfaitaire de 160 000 F CFP par mois a été attribuée aux directeurs à partir de 2016, puis a été supprimée, avant d’être, cette fois, intégrée dans les salaires mensuels de base des bénéficiaires. En outre, une gratification annuelle, dite prime à la performance, a été instituée en 2017 pour tous les agents de l’OPH. Celle-ci a été versée pour la première fois en octobre 2018, pour un coût total de 33,5 MF CFP. La Chambre conteste le bien-fondé de cette prime, car le résultat comptable pris en compte dans son calcul, ainsi que les conditions dans lesquelles celle-ci a été répartie entre les salariés, sont inappropriés dans la méthode et dans l’esprit.

Au vu de l’ensemble des éléments qui précèdent, la Chambre conclut à l’impérieuse nécessité, pour l’OPH, de repenser, avec l’appui du gouvernement, son modèle en profondeur, en vue d’assumer pleinement son rôle de bailleur social.

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